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LE QUEBEC: UN ENJEU CULTUREL

Allocution du ministre des Affaires culturelles, monsieur Clément Richard, à l'occasion du lancement de la con- sultation qu'il entreprend sur le devenir culturel du Québec et l'action de son ministère

Le 26 janvier 1982

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Le ministère des Affaires culturelles, si jeune qu'il soit, a derrière lui un vécu, une histoire. Nous pouvons maintenant construire sur vingt ans de travail, de recherche, d'efforts, de succès, voire d'échecs. Ce vingtième anniversaire est une excellente occasion de faire le point, de repenser des gestes que nous faisons peut-être par habitude.

Vous le savez, on ne saurait assumer la responsabilité d'un ministère sans revenir naturellement aux motifs qui ont pré- sidé à l'intervention de l'Etat dans le secteur d'activités dont il s'agit. Le cheminement à rebours est parfois diffi- cile, puisque l'état actuel du développement culturel masque les conditions et les difficultés d'auparavant. Mais ce recul est profitable; il permet d'évaluer le chemin parcouru, d'identifier des acquis irréversibles et de mieux comprendre les tendances qui se font jour.

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I. Une évaluation de T a c t i o n du ministère des Affaires cul- turelles.

I. De nouveaux champs d'intervention ouverts grâce aux acquis antérieurs

Si le ministère des Affaires culturelles peut s'ouvrir à des domaines nouveaux, s'il peut élargir son action comme j'en ferai état tout à l'heure, c'est que les années de défrichage, les efforts pour donner un statut, une place au soleil à ce ministère sont maintenant derrière nous, c'est que nos prédécesseurs ont travaillé ferme pour lui donner des moyens, créer de solides équipes, susciter des participations, voire des complicités.

Permettez-moi de souligner avec plus de précision certai- nes réalisations et d'en dresser un peu le palmarès.

Au premier rang de ce palmarès, il faut signaler le déve- loppement des bibliothèques, service culturel de base par excellence. Au cours des dernières années, les biblio- thèques publiques ont été une des priorités du ministère, et maintenant plus de 80% de la population a accès à un tel service. Il faut ici souligner les efforts des muni- cipalités pour construire des bibliothèques, les rénover et améliorer la qualité de leurs services.

Un autre domaine dans lequel les municipalités s'enga- gent, c'est celui du patrimoine, de sa conservation, sa mise en valeur. Dans ce secteur, l'évolution est signi- ficative: depuis les grandes opérations de restauration exemplaire jusqu'à la démarche actuelle de prise en

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charge par les municipalités, une importante réflexion s'est poursuivie. Le ministère des Affaires culturelles est ainsi devenu un partenaire parmi d'autres dans des projets qui souvent font entrer en jeu, outre lui-même et les villes en cause, l'Office de planification et de développement du Québec, le ministère des Affaires muni- cipales et même l'entreprise privée.

Un autre domaine qui a connu un élargissement, c'est celui de l'aide aux créateurs, une aide qui s'est concré- tisée par la politique d'intégration des arts à l'archi- tecture et à l'environnement. Plutôt restrictive au départ, cette politique s'applique maintenant à tous les édifices construits sous l'autorité directe ou indirecte du gouvernement. Les projections indiquent que, pour 1981-1982, c'est environ 3 millions de dollars qui seront consacrés à l'intégration des arts à l'architecture et à l'environnement. L'aide aux artistes est un programme à deux volets, dont l'un est géré sur une base régionale, ce qui permet de mieux répondre aux besoins régionaux dans le secteur de la création artistique. Des program- mes nouveaux ont été conçus pour ouvrir le marché du tra- vail aux jeunes créateurs; OSE-ARTS et Design de l'envi- ronnement ont ainsi contribué à la création d'emplois, ont encouragé l'innovation dans la production et ont assuré la vitalité des organismes dispensateurs de servi- ces.

Le Ministère est aussi intervenu dans le secteur indus- triel et commercial de la culture en subventionnant des associations d'artisans, des maisons d'édition et des librairies pour la promotion et la mise en marché des oeuvres québécoises. Nous ne sommes pas complètement étrangers au succès des salons du livre et des salons

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des métiers d'art. La création de la Société de dévelop- pement des industries culturelles exprime la volonté de l'Etat d'appuyer par des mesures concrètes la structure industrielle de production des biens culturels. Nous avons également régionalisé les programmes de subventions aux arts de la scène.

Ces dernières années, un nombre de plus en plus grand de troupes, d'organismes et de compagnies ont bénéficié d'une aide du Ministère. En 1975, environ 120 troupes ou organismes, dans le domaine des arts d'interprétation, de la musique, de la diffusion et de la danse, avaient reçu une aide financière; en 1981, le nombre d'organismes et de troupes subventionnés a dépassé les 225. D'autres réalisations importantes méritent d'être soulignées: la mise en place de centres régionaux d'archives, la conso- lidation du réseau des musées privés et des centres d'ex- position, la relance de l'Opéra de Montréal, de l'Orches- tre des Jeunes du Québec, etc.

Faut-il souligner que tout cela ne s'est pas réalisé par le seul effort isolé du ministère des Affaires culturel- les et que nombreux ont été nos partenaires. Je voudrais insister ici sur un exemple: celui des Conseils régio- naux de la culture.

Ces conseils sont peu ou mal connus des médias et du grand public. Organismes de concertation et d'animation, organismes-conseils et même organismes de pression par- fois, les conseils régionaux de la culture ont pourtant joué et continuent de jouer un rôle important dans les régions. Ils ont eu, à ce jour, un effet réel sur le Ministère lui-même en le sensibilisant à la réalité régionale et aux besoins diversifiés des régions.

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Leur action culturelle - car ils sont avant tout des agents culturels - a donc contribué à transformer notre i ntervention.

2. L'élargissement de T a c t i o n « i n i s t é r i e n e

L'évaluation de l'action présente doit inclure une vision d'avenir, et le Ministère doit montrer qu'il est capable de réagir à des situations nouvelles, de déceler les ten- dances qui se dessinent et de susciter des initiatives.

Les attentes de la société à l'égard du Ministère ne débordent-elles pas largement les secteurs du patrimoine, des arts et des lettres et des arts de l'environnement visuel, pour s'élargir à une notion plus ouverte, une notion qu'on appelle parfois "la culture éclatée"?

C'est d'ailleurs ainsi que La Politique québécoise du développement culturel conçoit la culture. Elle est milieu de vie, mode d'existence. Elle touche aussi bien les domaines de l'habitation, de la santé, du loisir, des communications, du travail, de l'éducation que le domaine des arts et des lettres. Elle est au coeur de la vie quotidienne; elle est comportement, mentalité, manière d'être.

La culture et l'activité culturelle rejoignent actuelle- ment trop peu de Québécois. C'est pourtant, avec l'éco- nomie, un des deux domaines essentiels à notre avenir.

Sans des investissements aussi audacieux dans la culture que dans l'économique, le Québec ne saurait survivre com- me nation. C'est le rôle essentiel du Ministère et du

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gouvernement, aujourd'hui comme il y a vingt ans, de com- prendre cette réalité et de prendre les mesures qu'elle commande.

Cette exigence a déjà amené une conversion de l'action culturelle, laquelle définit à sa façon le mandat du ministère des Affaires culturelles: présence à la diver- sité culturelle; ouverture aux divers langages; actions de concertation; sensibilité aux nouveautés technologi- ques.. .

Une définition trop large de la culture comporte aussi ses risques. Si elle offre l'avantage de faire saisir les liens qui existent entre le culturel, l'économique et le social, elle ne doit pas conduire à une sorte d'éva- nouissement de la réalité du culturel. Le Ministère doit donc préciser le mieux possible la "valeur ajoutée" que représente son rôle pour l'ensemble des intervenants du secteur culturel.

3. Une évaluation qui prend en compte la conjoncture économique

Le contexte présent n'est pas sans influencer notre manière d'agir. La conjoncture économique touche de bien des façons le ministère des Affaires culturelles et ses organismes.

Au cours des dernières années, par exemple, les troupes, les organismes et les compagnies du domaine des arts d'interprétation ont connu une augmentation rapide de leurs coûts de production et notamment du coût de la main-d'oeuvre. Ils ont réagi en adoptant une programma- tion qui exige un personnel moins nombreux. Cette seule méthode ne saurait régler les problèmes puisqu'elle ne

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fait que les reporter, tout en réduisant la qualité des services. C'est à une réévaluation du nombre des troupes subventionnées qu'il faut procéder, par la mise en com- m u n , par des fusions, par une véritable planification de l'action culturelle. N'ayons pas peur de le dire, les notions de rentabilité, de choix stratégique, de priorité doivent faire partie du langage que parle le monde de la culture, celui des arts, et celui des artistes.

Qui plus est, la simple augmentation des montants des subventions ne ferait que déplacer le problème, car il arrive un point de rupture où l'aide financière accordée à un secteur culturel risque de déséquilibrer l'aide con- sentie aux autres secteurs. Il y aura sûrement, au pas- sage, des choix difficiles.

Le rôle essentiel du Ministère est de guider les choix.

Ne pas avoir de politique et refuser de faire des choix serait fatal pour l'avenir de bien des secteurs.

Mais il y a plus, le gouvernement actuel n'est-il pas l'émanation d'une formation politique dont la raison d'être même est l'affirmation de l'identité culturelle, de la spécificité de la société québécoise?

Il nous faut, et cela me semble urgent, en tenir compte lorsque vient le moment pour l'Etat de faire ses choix.

4. Transformation de l'action culturelle

Nous devons donc faire oeuvre d'imagination, d'audace et d'innovation dans la recherche de solutions aux problèmes actuels de la culture. C'est pourquoi nous avons ouvert un vaste chantier de réflexion au Ministère; il débou- chera sur un ensemble d'énoncés de politique. On nous

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reproche souvent de ne point avoir de politiques explici- tes et publiques, et cela a pu être vrai dans certains secteurs. C'est pour redresser cette situation que nous travaillons intensément à "mettre nos livres à jour".

Les politiques disciplinaires demeurent cependant insuf- fisantes pour assurer la coordination et l'équilibre du développement culturel. On ne peut plus agir comme si le développement d'une discipline artistique était étranger aux autres aspects du développement culturel. On ne peut penser, par exemple, une politique du théâtre ou de la musique sans penser en même temps aux créateurs, à la formation des artistes et du public, ou à la diffusion des oeuvres. Ces diverses politiques n'ont de sens que si elles sont éprouvées auprès des intervenants culturels et auprès de nos clientèles et partenaires. Nous comp- tons donc les soumettre à l'examen et à la discussion aussi largement que possible. Ce travail constituera le fond de scène de l'ensemble de nos interventions.

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II. Nouvelles approches

L'adaptation aux changements que subissent nos sociétés est un défi qui nous oblige aussi à utiliser des con- cepts nouveaux et à donner l'impulsion à des projets où 1'ensemble des gouvernements, des institutions et des associations partagent la responsabilité.

1. Le cadre de vie

Cette impulsion doit s'exercer en ce qui concerne le cadre de vie. La notion de "cadre de vie" se fait jour peu à peu, et elle se révèle comme un aboutissement et une convergence, en même temps qu'elle paraît être un facteur dynamique et fécond.

Le cadre de vie, ce n'est pas un objet, une action, un plan, c'est un concept intégrateur englobant tous les champs d'activités, les renouvelant en quelque sorte, leur apportant des dimensions nouvelles, des valeurs ajoutées.

Ce concept appartient au domaine culturel parce qu'il vise à améliorer le milieu de vie, à le rendre plus har- monieux, à en faire un environnement dans lequel la vio-

lence de la laideur et l'anarchie dans l'utilisation de l'espace font place à l'harmonie des ensembles; à rechercher un développement de l'environnement immédiat qui soit pour chaque citoyen un vêtement aussi adapté et adaptable que possible; à privilégier une conception de la cité selon laquelle chacun y trouve l'alimentation culturelle dont il a besoin.

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Au cours des dernières années, beaucoup d'énergies ont été consacrées à la sensibilisation des citoyens au res- pect de leur environnement. Cela s'est concrétisé dans de vastes programmes de protection de la nature et des campagnes contre toutes les formes de pollution. C'est là un prélude à des actions visant à créer un cadre de vie meilleur pour l'ensemble des citoyens. De 1'idée de patrimoine à protéger et à conserver, nous passons ainsi graduellement à celle de patrimoine à bâtir.

2. Une culture renouvelée par la création et les créa- teurs

Pour que ces orientations se traduisent par des actions, nous devons augmenter le soutien à la création et diver- sifier les formes d'aide. Je n'ai pas à rappeler l'im- portance de la création pour l'expression et la préser- vation de notre identité culturelle, non plus que la nécessité d'assurer un soutien aux créateurs pour leur permettre de créer en toute liberté. Nous devons cepen- dant prendre conscience des dimensions nouvelles qui s'ouvrent à la création et en mesurer les conséquences pour notre action.

Traditionnellement, l'art était fondé sur le simple rap- port artiste matériaux. La gestuelle était peu élabo- rée, les habiletés de base bien déterminées, les défis techniques différents. Bien sûr, le génie créateur, la largeur et la profondeur de la vision étaient et sont toujours les principaux fondements de l'art, mais un nouveau rapport existe maintenant entre l'art et la tech- nologie, et cette association est de plus en plus fré- quente. Par exemple, le peintre peut emprunter à l'ordi- nateur; le laser devient matériau pour le sculpteur;

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les appareils électroacoustiques deviennent instruments du musicien; le plasticien crée des oeuvres sur vidéo.

La distance se rétrécit entre la gravure, l'impression

"offset" et la photographie. La technologie permet désormais de reproduire en grande quantité non seulement des oeuvres visuelles, mais aussi des sons, des objets.

L'espace ainsi réservé à l'artiste se transforme tout comme l'espace autrefois réservé au typographe.

Pour assurer la vitalité de notre culture, pour conti- nuer de la définir d'une manière originale, il nous faut assurer l'abondance du renouvellement des oeuvres.

Pour qu'il y ait une place pour la création québécoise dans la production industrielle, il faut que celle-ci soit alimentée en oeuvres nouvelles. Plus que toutes autres, les industries culturelles dépendent de la créa- tion artistique: c'est dans la création qu'elles trou- vent leur source; c'est la création qui assure le renou- vellement des produits. Il est certain que les indus- tries culturelles imposent des conditions nouvelles à la création. Plusieurs produits culturels n'ont qu'une durée éphémère ou connaissent une fluctuation de la demande selon la mode ou selon les cycles saisonniers.

Le créateur se voit obligé de produire dans des délais prescrits; son produit doit répondre à la demande ou à la commande; une concurrence s'installe entre les créa- teurs.

Une de nos missions importantes consiste à faire recon- naître l'apport du créateur dans la société. Il est de plus en plus injuste de considérer comme marginal le travail de l'artiste, alors que l'investissement dans le spectacle, dans le patrimoine ou dans la création en arts visuels, notamment par le design, est reconnu comme

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un des plus grands multiplicateurs d'emploi.

Le créateur n'est donc pas simplement un producteur de biens; il est aussi un producteur de services. Cela va de pair avec la reconnaissance de l'importance de l'art et de la création dans la vie quotidienne.

3. Le développement technologique

Les innovations récentes ne se comptent plus. Déjà l'acquisition d'un ordinateur maison est à la portée d'un grand nombre de citoyens. Demain, ce sera la télé- vision payante. L'avènement du microprocesseur nous plonge brutalement dans la société de l'information. Et que nous réserve l'interconnexion de la télévision, du téléphone et de l'ordinateur?

Cela pose un défi aux institutions culturelles. Qu'ad- viendra-t-i'l de nos salles de spectacles lorsque la télévision payante permettra à chacun de se procurer son concert, sa pièce de théâtre ou son film préféré à domicile? Que deviendra l'industrie de la câblodistri- bution avec des appareils de télévision qui pourront capter les micro-ondes? Que deviendront les bibliothè- ques lorsque le savoir universel sera disponible sur petit écran à domicile?

Quels enseignements pouvons-nous tirer de l'avènement des technologies nouvelles? La diffusion de la culture telle que nous la connaissons risque d'être largement modifiée. Je vois également un risque d'invasion cultu- relle si nous ne prenons pas les dispositions nécessai- res pour alimenter les réseaux de diffusion en contenu québécois de qualité. Les technologies nouvelles sont

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une menace à notre culture si nous les subissons; elles deviennent nos alliés si nous les domestiquons.

4. De nouveaux partenaires

Nous pouvons compter de plus en plus sur des partenai- res. Les municipalités s'engagent dans la conservation et la mise en valeur de leur patrimoine local, dans le développement des bibliothèques et dans le financement de divers organismes culturels. Des entreprises pri- vées, des fondations et des mécènes commencent à assumer un rôle dans le soutien des arts. Des institutions financières sont fières de leurs collections d'oeuvres d'art; des compagnies financent des tournées de specta- cle. De même, les mass média commandent des oeuvres à des écrivains, à des cinéastes, à des créateurs et embauchent un grand nombre de comédiens.

Si le Ministère a un mandat précis de soutien du déve- loppement des arts et de la culture, il n'est pas le seul intervenant, ni le seul responsable. C'est une responsabilité partagée avec les autres ministères, les municipalités, les organismes régionaux et les agents économiques.

Leur engagement allège dans une certaine mesure les obligations du Ministère, mais il réclame aussi l'éta- blissement de nouveaux rapports. C'est donc à susciter de nouveaux rapports concertés que nous devrons nous attacher. A la participation croissante d'autres inter- venants, le Ministère doit donner une impulsion active e t imaginative.

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De nouvelles perspectives

J'en viens maintenant aux principes qui guideront les orientations et les gestes du Ministère au cours des prochaines années. Ils découlent logiquement des con- sidérations précédentes. La première de ces orienta- tions est la régionalisation.

1. La régionalisation

Dès l'instant où il privilégie la concertation et l'ou- verture aux réalités culturelles nouvelles, où il vise à multiplier les initiatives dans les différents milieux et à rejoindre le citoyen, à favoriser l'ex- pression culturelle dans son originalité et sa diver- sités le Ministère doit se rapprocher des populations régionales. La régionalisation se présente d'abord comme un respect des identités régionales et comme une humanisation de l'action de l'Etat. C'est dire que, dans un tel contexte, les citoyens auront la possibi- lité de modeler eux-mêmes leur vécu culturel et les conditions de son développement.

Je poursuivrai donc les efforts de régionalisation déjà amorcés, persuadé que je suis qu'il en résultera un plus grand dynamisme et une plus grande diversité. Il s'agit pour nous d'ajuster l'organisation et l'action du ministère des Affaires culturelles à des réalités variées. Le défi est de taille: poursuivre des objec- tifs généraux, utiles à tous les Québécois, d'une part;

régionaliser, pour mieux respecter et rentabiliser les différences, d'autre part.

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2. Le développement des industries culturelles

Certains voient un risque de dévaluation de la qualité d'une oeuvre dans sa reproduction en série; d'autres soutiennent que la reproduction en grande quantité est le moyen de rendre la culture accessible au plus grand nombre; pour d'autres encore, les entreprises commer- ciales sont suspectes parce qu'elles recherchent le profit, parce qu'elles contribuent au nivellement des goûts. Il ne s'agit pas ici de trancher le débat, mais bien de prendre acte d'une réalité: les produits cul- turels de l'industrie occupent une place de plus en plus grande et de plus en plus déterminante dans notre vie culturelle; en conséquence, nous ne pouvons les ignorer dans l'élaboration de nos politiques.

Notre action serait cependant incomplète si elle se limitait aux seuls produits. Elle doit rejoindre la structure industrielle. C'est pourquoi le gouvernement du Québec a créé l'Institut québécois du cinéma et, plus récemment, la Société de développement des indus- tries culturelles, qu'il a investie de pouvoirs d'ini- tiative et de soutien financier, à l'instar de la Société de développement industriel (S.D.I.).

Le plan de développement que s'est donnée la Société de développement des industries culturelles constate un déséquilibre entre les besoins et les moyens d'inter- vention. En effet, l'industrie culturelle intégrée, d'une taille qui la rend concurrentielle vis-à-vis de la multinationale et capable de conquérir les marchés internationaux, est inexistante chez nous; il faut avouer franchement que nous en sommes encore bien loin.

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Aussi, force nous est de constater que des pans com- plets de la production de masse échappent encore à notre influence. Nous ne pouvons plus nous contenter d'une Société qui n'a finalement les moyens que de res- caper les entreprises en difficulté et dont on ne juge de l'efficacité que dans ce contexte. Un mandat de lancement d'initiatives exige des moyens beaucoup plus considérables que ceux actuellement consentis.

La Société de développement des industries culturelles apparaît donc comme un outil d'intervention essentielle auprès des industries culturelles. Elle se distingue du Ministère par sa clientèle, qu'elle trouve dans le secteur marchand, par son style d'action, qui s'appa- rente à celui de l'entreprise privée, et par ses objec- tifs économiques, dans lequel la rentabilité financière va de soi.

3. La coopération culturelle

La coopération culturelle entre les peuples est un moyen à la fois de prendre conscience de notre identité culturelle, de nous manifester à autrui et de tirer profit de ce qui fait l'originalité et la richesse des autres cultures. Les échanges culturels sont des occa- sions de s'instruire sur l'homme. La confrontation des valeurs, des styles et des formes d'expression stimule la créativité.

C'est traditionnellement avec la France que les échan- ges ont été les plus nombreux, nous comprenons facile- ment pourquoi: les liens historiques qui nous unis- sent, la richesse de la culture en France et la commu- nauté de langue . La coopération s'ouvre maintenant

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vers la Belgique, les provinces du Canada, les Etats- Unis et les pays de l'Amérique latine.

Une priorité est accordée, dans la coopération, à la formation et au perfectionnement de nos ressources humaines. Nous sommes convenus avec la France d'un programme de bourses de formation et de perfectionne­

ment destinées aux professionnels des secteurs de la muséologie, des métiers d'art, de l'édition, des arts d'interprétation, de 1'archivistique.

Les échanges de biens culturels sont aussi recherchés.

Un secteur qui a connu une grande évolution depuis quelques années est celui du livre. Le programme d'ai­

de a la coédition avec la France sera élargi. Mous espérons pouvoir conclure des ententes qui assureront une plus grande diffusion du cinéma québécois en France. Ce pays a d'ailleurs manifesté le désir d'é­

largir l'accessibilité de son marché intérieur au ciné­

m a des autres pays francophones.

Il devient également possible, dans le cadre de la coo­

pération, d'accueillir des expositions ou des groupes artistiques et de pratiquer la réciproque.

Le Québec devra aussi se manifester au plan internatio­

nal par une participation aux travaux et aux réunions de certaines grandes organisations internationales, que ce soit 1'UNESCO, la Communauté Economique Européenne ou l'Agence de Coopération culturelle et technique. Ce sont là des occasions privilégiées pour nous faire con­

naître comme nation bien distincte du Canada et pour échanger connaissances et expériences avec d'autres pays. Le Québec a un rôle à jouer au plan international. Il m'est apparu hors de tout doute, à

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la rencontre des ministres francophones de la culture à Cotcnou, en septembre dernier, que le Québec était en position privilégiée parmi les pays francophones en raison de sa situation nord-américaine. Il peut appor- ter un témoignage, une expérience et une aide aux pays en développement qui luttent pour la préservation de leur identité culturelle, parce que lui-même a défendu et défend encore son droit d'existence culturelle et qu'il a adopté un ensemble de mesures pour accélérer son développement.

IV- La consultation

Les propos que j'ai tenus vous ont convaincus, je l'es- père, que le Ministère ne se considère pas comme le seul responsable des orientations, des politiques et des arbitrages. Il n'entend pas pour autant abdiquer ses responsabilités, bien au contraire. L'une d'elles consiste à apporter des changements majeurs à son action. Mais avant d'arrêter l'ensemble des mesures nécessaires, j'ai tenu, par voie de consultation, à faire part de mes préoccupations aux différents inter- venants culturels et à chercher avec eux les solutions les plus appropriées.

Au moment d'entreprendre cette consultation, les ques- tions qui me préoccupent particulièrement sont le redé- ploiement du Ministère en région; la création d'une Commission des arts et des lettres; la recherche des partenaires; les incursions d'un autre gouvernement dans notre développement culturel.

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1. Le redéploiement du Ministère en région

Le Ministère est déjà présent dans les régions par ses bureaux régionaux et ses diverses institutions. Il s'est adjoint des conseils régionaux qui jouent un rôle important en région. Nous en sommes maintenant à pré- ciser l'ampleur et les modalités d'une telle régionali- sation. Allons-nous créer des directions régionales dynamiques et fortes? Devons-nous réviser le rôle et le mandat des Conseils régionaux de la culture? Com- ment devons-nous aménager le partage avec les municipa- lités et les municipalités régionales de comté? Com- ment assurerons-nous le partage avec le scolaire, les partenaires du privé? Ces questions sont lourdes de conséquences et nous voulons y répondre en pleine con- naissance des attentes du milieu.

2. La création d'une Commission des arts e t lettres

Une autre question a fait l'objet de débats et demeure encore sans réponse: c'est la création d'une Commis- sion des arts et lettres. La Politique québécoise du développement culturel a recommandé une telle action;

ce n'est pas sans raison qu'elle est demeurée à 1'étu- de. On nous apporte souvent 1'exemple du Conseil des arts du Canada. Mais quelle est la marge de manoeuvre réelle de ce conseil? Dans quelle mesure peut-il s'af- franchir de son ministère de tutelles lequel voit dans les arts un moyen de propager l'unité canadienne?

Jusqu'à quel point fonctionne-t-il sans orientations ni objectifs explicites? Qui lui définit ses priorités de choix et de développement?

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Se poser ces questions est utile mais cela ne règle pas notre problème* En dépit de l'existence d'une politi- que des jurys, en dépit de l'absence de toute interven- tion politique dans l'attribution des subventions, les critiques sont de plus en plus drues a l'endroit du ministère des Affaires culturelles qu'on accuse de tous les péchés.

Arrive un moment où la répétition des mêmes demi-véri- tés, l'expression continue des mêmes préjugés devien- nent irréversibles et forcent le changement. Si on ajoute à cela l'intérêt qu'il y aurait à orienter le ministère des Affaires culturelles vers des tâches d'élaboration de politique, de gestion du changement, de planification et de recherche, tout laisse croire qu'il est temps d'en finir avec cette question et d'ex- plorer des hypothèses qui soient respectueuses de notre contexte culturel et de nature à dissiper l'atmosphère de suspicion qui s'est développée.

3. La recherche de nouveaux partenaires

La formule qui consiste à résoudre les problèmes finan- ciers des organismes culturels par une hausse de la contribution du Ministère demeure insuffisante. Le contexte économique n'a fait que hâter cette prise de conscience; il est temps de nous diriger vers un sou- tien financier qui reconnaisse le partage des responsa- bilités entre l'Etat et les autres partenaires et qui compte sur l'appui du public. Comprenez-moi bien! Il ne s'agit aucunement de nous retirer du financement des arts, ni de nous désengager partiellement, sans formule de rechange, ni de contraindre les organismes culturels à s'ajuster à tout prix au goût du plus grand nombre ou à se donner une orientation commerciale. Il s'agit

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plutôt d'apporter une diversification des sources de financement, d'accroître la part des autres interve- nants et du public en général dans ce financement.

Mais en plus de partenaires financiers, il y a de nom- breux autres partenaires pour le développement culturel même: maisons d'enseignement, médias, services munici- paux, ..

Le gouvernement n'a sûrement pas, par exemple, couvert le Québec d'un réseau de cégeps et d'universités pour que ces établissements se confinent à leur seule mis- sion d'enseignement! Ils sont des lieux d'expression et d'initiative culturelles, ils disposent - c'est bien connu - d'un équipement et de services sophistiqués qui doivent être utilisés au maximum, selon des ententes de concertation bien sûr, mais dans un esprit ouvert, selon des formules flexibles et en fonction notamment des priorités régionales. L'éducation permanente, c'est aussi le développement culturel.

Enfin, disons un mot de la place que font les médias â la culture.

Nous constatons avec plaisir que des changements s'opè- rent, que les médias électroniques emboîtent le pas aux journaux qui produisent, depuis plusieurs années, d'ex- cellents cahiers dans leurs éditions de fin de semai- ne.

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Mais cela est encore timide. Pourquoi faut-il encore que Diane Dufresne attire 125 000 personnes pour que cette performance occupe, pour un soir, la place dans les médias que tient le moindre tournoi de tennis, la moindre remontée des Nordiques, la dernière fugue d'un lanceur ou d'un gardien de buts! Pour la culture, trop peu d'émissions de télé et de radio; des chroniques partagées entre plusieurs dossiers; des recherchistes inexistants. Telle est la réalité!

4. Les incursions d'un autre gouvernement dans notre action culturelle

Vous avez sans doute remarqué lorsque j'ai parlé de responsabilités partagées que je n'ai fait aucune men- tion du gouvernement du Canada ni de ses agences. Ce n'est pas un oubli de ma part, croyez-le bien. Ce gou- vernement vient patauger tous les jours dans notre cul- ture, sans aucune gêne. Il intervient auprès des orga- nismes culturels, des associations et des créateurs; il aménage selon ses vues notre patrimoine; il soutient un développement culturel parallèle, pour ne pas dire opposé au nôtre. Ses motifs politiques sont de plus en plus avoués. ïl veut, à des fins politiques, créer une

"Canadian culture". Il a d'ailleurs mis sur pied une commission qui, en laboratoire, doit déterminer l'héré- dité de cette culture. Il est évident que nous ne pou- vons nous fondre dans une culture hybride, et cette politique culturelle que veut se donner le gouvernement canadien reviendrait à nier notre droit à nous dévelop- per comme nous l'entendons. Nous ne reconnaissons à ce gouvernement aucune compétence ni aucun pouvoir en matière de politique culturelle au Québec. Aucun

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peuple ne laisse à un autre le soin de définir sa cul- ture! A cet égard les interventions du gouvernement fédéral sont une véritable intrusion dans notre intimi- té culturelle.

Depuis toujours, les hommes politiques ont considéré la souveraineté culturelle du Québec de diverses manières, mais toujours en se fondant sur l'évidence: un Québec différent du reste du Canada en raison de sa langue, de son histoire, de sa tradition artistique, de ses raci- nes... Cela demeure plus vrai que jamais et il est plus impérieux que jamais de redire que notre dévelop- pement culturel, c'est notre affaire, que personne d'autre que nous n'a le droit de l'orienter et de l'in- fléchir; qu'il appartient à notre intimité la plus pro- fonde. .,

Le Québec sera culturel ou ne sera pas. Tel est l'en- jeu, tel est le risque. Nous devons être prêts à assu- mer le défi de notre histoire, qui nous rend, nous Qué- bécois, uniques, permanents et résolus.

Voilà autant de thèmes qui, au-delà des changements majeurs que j'envisage pour le Ministère, motivent la vaste consultation lancée aujourd'hui.

Au cours des dernières années, le gouvernement québé- cois a voulu se donner un projet de développement aux niveaux économique, social et politique. La situation actuelle exige l'intensification de nos efforts sur le plan culturel.

Il m'apparait essentiel que la population du Québec soit associée à une démarche aussi importante.

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