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"Pulsions" de vie et "pulsions" de mort dans les Bacchantes

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Academic year: 2022

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"Pulsions" de vie et "pulsions" de mort dans les Bacchantes

Prologue

Nous dirions volontiers, aujourd'hui, que la conduite de Penthée et son processus tout au long de la pièce sont proprement SUICIDAIRES.

Le suicide est retour vers le corps de la mère, dont le mélancolique n'a jamais pu se déprendre.

"C'est moi, mère, ton petit Penthée que tu as fait dans la maison d'Echion. Pitié! mère, pour mes fautes, n'immole pas ton enfant."

(v. 1118 - 1121)1

Penthée se présente constamment comme enfant légitime, du nom de son père et de la lignée de Cadmos : face au divin bâtard Dionysos, qui se réclame de son père Zeus et de sa mère Sémélé.

Si le nom du Père et la reconnaissance légitime inscrivent le sujet dans le droit-fil de la parole et de l'entendement, comment se peut-il que Penthée soit d'abord taxé de "folie", puis acculé à la folie et à la mort ? Lui, qui se veut tellement viril et martial, par quel malin démon, par quel fatal retournement doit-il se tourner du côté des femmes et, simulant leur apparence (mais non leur nature), devenir leur victime?

Cette tragédie des Bacchantes, plus que d'autres du théâtre d'Euripide, comporte des ambiguïtés que n'a pas manqué de signaler par exemple Jacqueline de Romilly: "(Cette tragédie) est parmi les plus déconcertantes. A beaucoup d'égards, en effet, la pièce rend un son inha- bituel... ni ces sentiments plus ou moins mystiques, ni cette conception d'un dieu punissant une faute ne rendent compte de l'ensemble de la pièce. Au contraire, leur présence fait ressortir l'espèce de décalage un peu grinçant qu'Euripide introduit dans un thème en apparence si pieux. "2

Ce décalage, ce hiatus, ou pour utiliser un mot d'auteur (Luce lrigaray), cette "schize", est-ce cela qui a suscité notre réflexion?

La personnification divine de sentiments humains - La Pitié, la Rage - est d'usage dans le récit épique et la tragédie, et familiers sont

1 Les références sont à l'édition des Belles-Lettres et/ou à l'édition des tragédies d'Euripide de la Pléiade, 1984.

2 Jacqueline de Romilly. La tragédie grecque. PUF, Quadrige, 1986, p. 149.

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ces dieux livrés aux emportements les plus soudains, cyniques et violents.

"Quant aux passions, il convient que les dieux n'imitent pas les humains." (v. 1348)

Cette réplique d'Agavé (ou, selon les éditions, de Cadmos) exprime la révolte des mortels face au dieu inexorable. Comme dans toute tragédie il est ici question de raison et de déraison, de délire, de violence et de mort. Mais la faute, et la souillure y sont tout particulièrement marquées, et le châtiment implacable.

J'ai supposé que Dionysos et Penthée représentent3 l'avers et le revers d'une même effigie, image spéculaire de :

• l'un, qui se place d'emblée au-dessus de la condition humaine

"enfant de Zeus qu'enfanta Sémélé délivrée par la foudre" (v. 1-3),

• et de l'autre, "humain, trop humain", sourd, aveugle puis muet, se réclamant de son origine terrestre que le Dieu et ses acolytes, le chœur des Bacchantes, lui jettent au visage : "Descendant du dragon, fils d'Echion issu du sol, tu fais bien voir, Penthée, ton origine ... "

V. 537.541.

Marie Delcourt évoque également cette hypothèse dans son article "le partage du corps royal" (1963)4 : "Penthée est un doublet de Dionysos devenu, comme souvent en pareil cas, son ennemi."

Si nous admettons que Penthée soit le reflet humain de Dionysos, non seulement nous pouvons supposer que les "poussées"5 qui les inci- tent soient du même ordre, mais aussi nous pouvons penser que chacun d'eux figure une instance complémentaire ou opposée de la vie psychique, que ce soit dans un système "inconscient 1 (préconscient) 1 conscient", dans une topique "Surmoi 1 moi 1 ça" ; ou, au sens scopique dans une dualité "occultation 1 épiphanie" (Dionysos), "représentation 1 apocalypse -exhibition" (Penthée). Et, sur le plan de la représentation "sexuelle" :

- féminin <:>masculin (Dionysos) - masculin <:> féminin (penthée) ou encore activité 1 passivité ... etc.

Pour brûler les ponts, nous en viendrons à la dialectique Eros- Thanatos, qui sous-tend toute tragédie - c'est banal de le dire - mais qui, dans les Bacchantes, est exagérément présente et agissante, sous l"'hypocrisis" et le masque.

3 S. Freud, "Personnages psychopathiques sur la scène", Résultats. Idées. Problèmes, l, Paris, PUF, 1984, pp. 123 -129.

4 Marie Delcourt, "Le partage du corps royal", Studi e materiali di storia delle religioni, 1963, 34, p. 18.

5 Je préfère traduire ainsi le vocable freudien "Trieb" plutôt que par le mot français

"pulsion" (cf. Dictionnaire Hermann Paul Halle, 1897, pp. 460-462). Le mot latin "instinc- tus" correspondait, par exemple pour Cicéron, au grec "enthousiasmos", ce qui n'est pas indifférent pour notre propos. Les traductions récentes de Freud ont renoncé à "instinct"

au profit de "pulsion" ...

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Le banquet sanglant

"En fin de compte, Dieu n'a de rapport complet, authentique, qu'avec des cadavres. Dieu ne comprend rien aux êtres vivants, son omnipré- sence ne saisit les choses que de l'extérieur, jamais de l'intérieur ... "

Jacques Lacan, Séminaire "les psychoses", p. 8I.

Dégrisée par les paroles de son père Cadmos, par l'''anamnèse'' qu'il a suscitée chez elle, réalisant son égarement et sa pitoyable méprise, Agavé s'efforce de reconstituer sur scène le corps de son fils, en rassemblant les lambeaux qu'a pu recueillir Cadmos parmi les rochers et les taillis du Cithéron. Le corps se trouve ainsi exposé dans son morcellement.6

Dans son livre Le festival des cadavres 7 Bernard Deforge ne considère pas isolément la tragédie des Bacchantes ; il retient les trois procédés tragiques qui consistent en :

- le récit de la mort,

- la monstration du cadavre, - la déploration.

Dans notre tragédie, la monstration du Cadavre se trouve scénique- ment confondue, (v. 1216-1326)8 avec la fin du délire d'Agavé et le thrènos. Bernard Deforge note: "Du rituel au spectacle, la tragédie est un rituel de mise à mort, et son point culminant est la monstration du cadavre" (p. 23).

Je ne résiste pas à la tentation de laisser pour un instant la parole à Michel Leiris9 :

,<'La corrida toute entière, tel un sacrifice, tend vers son paroxysme : la mise à mort, après laquelle seulement peut se produire la détente, comme après la possession de l'objet désiré, dans l'amour, ou la mort du héros, dans une tragédie. Dans le cas du sacrifice, ce paroxysme ou maximum de tension, c'est le moment même de l'immolation (conflagra- tion du dieu avec le sang de la victime), que suivent les rites de détente : désacralisation, congédiement du dieu après qu'il a reçu sa part et qu'il peut retourner à l'endroit d'où il était venu, sans plus être immédia- tement menaçant. De susceptible qu'il était d'agir dans un sens malé- fique, le dieu est devenu bénéfique, jusqu'au moment où il lui faudra quelque nouveau paiement."

Mieux qu'une importune paraphrase, ce texte me paraît exprimer l'essentiel de notre tragédie.

6 Le même acteur jouait les personnages de Penthée et d'Agavé, qui ne se trouvent jamais ensemble sur la scène (Agavé n'apparaissant que dans l'Exodos).

7 Bernard Deforge, Le festival des cadavres, Paris, Les Belles Lettres. 1997.

8 Il faut tenir compte des importantes lacunes qui mutilent, malencontreusement, le texte de la dernière partie.

9 Michel Leiris, Miroir de la tauromachie, Paris, Guy Levis Mano, 1938, pp. 42-43.

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Dionysos, ayant reçu son offrande et dicté à chacun les voies de l'exil

"car il n'est pas pieux que les meurtriers demeurent près des tombes"

(v. 1676-1677 du Christos Paschôn), est pour l'instant apaisé. Il n'est pas interdit de supposer que Penthée ait reçu les honneurs de l'inhuma- tion10, ou même qu'il soit "héroïsé", mais les textes dont nous disposons ne le disent pas expressément.

Ainsi cette tragédie exprime-t-elle un châtiment en cascade, et le meurtre de Penthée est-il bien loin de satisfaire l'insatiable exigence des dieux !

La colère des dieux

"Les héros sont d'abord des rebelles envers Dieu ou quelque chose de divin ... "11

Les dieux de la tragédie (comme le Dieu de l'Ancien Testament et tant d'autres) sont exigeants, jaloux, cyniques, et violents, persécuteurs, meurtriers. Trop souvent ils règlent leurs différends aux dépens des pauvres humains.

Egarer l'un de ces mortels, l'exciter jusqu'à le conduire au crime sur l'un des siens ou sur lui-même, est parmi les jeux préférés des Immortels. Rarement un autre dieu, tutélaire, intervient, directement ou par le biais d'un mortel, pour éviter de justesse la catastrophe ... qui est le plus souvent inéluctable.

"La grande question de la Tragédie c'est : comment est-il possible de dire que l'homme est responsable, puisque ce sont les dieux qui se jouent de lui ? [ ... ] la tragédie passe entre le postulat de la respon- sabilité posé par la société et l'âme démoniaque de l'homme traversé par ce qu'il ne contrôle pas."12

Bien sûr, nous pouvons voir dans la moira (et la moria)13 le jeu des forces inconscientes qui s'exercent, dès avant notre conception et notre naissance, sur nous du fait de l'histoire familiale et de la chaîne des générations: le récit myth(olog)ique est empli de telles histoires. Le jeu alterné et contradictoire des poussées de vie et des poussées de mort est comme la navette qui tisse la trame de nos existences. On peut dire, par image, que la lignée des générations forme la longue chaîne de ce tissu, et que chaque destin individuel se trame de ce fil, que les Parques nous allouent plus ou moins généreusement: Clotho, la fileuse nous octroie la

10 Si l'on prend en compte ces vers 1676-1677 (édition B.L., p. 298), de quelle tombe s'agirait-il, sinon de celle de Penthée, à moins que ce soit celle de Sémélé, mais l'accu- sation de "meurtriers" ne tiendrait plus?

11 S. Freud, Personnages psychopathiques sur la scène, Zoe. cit, p. 125.

12 Maria Daraki, "Le dionysisme", Art et thérapie, 32-33, 1989, pp. 5.10.

13 M.J. Bataille. "Le fou et le devin dans la tragédie grecque", Cahiers du GITA, n° 4 décembre 1988, pp. 147-156.

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vie ; Lachésis oriente le sort qui nous échoit ; Atropos, l'inflexible, rompt le fil.

Je pense que la définition par Freud de la notion de Trieb14 traduit assez précisément l'allégorie mythologique. Trieb est toute force qui pousse en avant - par exemple le chasseur, le véhicule - mais qui peut être alternative, comme le piston. Trieb est aussi force germinative qui induit les cycles de la végétation dans son éternelle reviviscence et son inéluctable déclin15.

Penthée est fauché comme le sapin, victime de son impulsivité et de son impatience. Le dieu des éternelles renaissances et métamorphoses (cf. Otto, Jeanmaire, Détienne; et Jung-Kerenyi, etc.), le dieu versatile et bouleversant ne lui pardonne pas de se refuser à l'enthousiasme, d'être déjà sclérosé (atteint de ce que Jung appelle joliment "miso- néisme", refus de la nouveauté ... ).

"On dit que sont possédés (entheoi) ceux qui sont privés de leur raison par une vision (phasma) et qui tombent sous l'empire du dieu qui envoie cette vision, et font ce qu'il veut1&>.

Ce dieu "qui est Suc et Sève aussi pour les dieux" (v.284), a vaine- ment engagé Penthée à se soumettre au rite nécessaire de l'initiation (v. 465-490). Son discours n'est plus opportuniste comme les encoura- gements de Cadmos, ou "tolérant" comme les propos amphigouriques de Tirésias ... (à ces deux là l'impatient jeune homme avait répondu dans le droit-fil de sa logique, invitant grand-père à aller se coucher et menaçant le curé de saccager les lieux et instruments de son exercice). Dionysos énonce la seule vérité: ou ne transige pas avec les mystères; le "passa- ge"se mérite (qu'on songe à tous les récits de voyages aux Enfers), le pouvoir temporel ne domine pas dans le champ du sacré!

Le dieu qui délie (mais aussi qui déchaîne) ne peut être entravé dans des"" lieux humains: ni les murs ni les chaînes ne retiennent le libre (eleutheros). Et même et surtout sa parole ne peut être contenue, ce dont s'irrite Penthée. "Nous voilà aux prises avec cet étranger insaisissable, qui, soit qu'on le moleste soit qu'il s'agite17, ne se taira pas".

Il ne se taira pas!

Cet "aporos xénos", cet étranger intenable éternel parleur, qui se fait entendre en dehors mais aussi au plus profond de nous-même, est une bonne figuration de ce que Freud, dans la seconde Topique, établit comme Surmoi, et ultérieurement théorisa en tant que "pulsion" de Mort

14 S. Freud, "Pulsions et destins de pulsions", Oeuvres complètes, Paris, PUF, 1988, t. 13, pp. 161-185. Titre original: "Triebe and Triebsechicksale", 1915.

15 Voir S. Freud, "Verganglichkeit", traduit en français par "Passagèreté", Q.C., 13, pp. 319-324.

16 Scholie Euripide Hippolyte, 141. Cité par H. Jeanmaire, Dionysos, 1991, p.489.

17 Sans excès, dans l'alternance "oute paschôn oute drôn" se fait entendre ce que je disais plus haut au sujet de Trieb.

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(Thanatos). Que Dionysos, travesti sous l'aspect de son desservant, soit insaisissable n'est pas pour nous surprendre, puisque les dieux n'ont pas de corps substantiel physique, sont champions de la métamorphose, et qu'un humain ne peut, sauf rarissime exception, les voir ni les toucher. (Un dieu ou une déesse, parfaitement invisible, peut comme dans l'Iliade participer activement au combat des hommes, lancer une arme mortelle, semer la zizanie ou la terreur ... ).

Dionysos, une fois encore, est dans un statut particulier, car engendré par Zeus dans une mortelle (mais réincorporé dans Zeus18 avant de naître dans l'éther), il est "fils de Zeus" (v.1), et représente l'émanation d'une substance matérielle éminemment volatile, "l'esprit-de-vin"

(l'alcool) que nos anciens vignerons se plaisaient à dire "Esprit-du-vin".

Cette figure est énoncée à plusieurs reprises:

Dionysos # vin Vin # Dionysos

Les caractères que le mythe prête au dieu sont très proches de ceux de "l'eau-de-vie", qui peut être douce et violente, qui apaise le chagrin des hommes et les conduit au sommeil, mais qui suscite le délire 19, la violence et le meurtre.

Intermezzo

"Dans le drame grec, le rideau se lève toujours pour ainsi dire au milieu de la pièce"2O.

L'aspect tragique des Bacchantes, pour nous comme sans doute pour le spectateur du Ve siècle a.c. résulte de ce que nous voyons un homme bien ordinaire, jeune garçon tout empêtré dans l'exercice du pouvoir, en proie à ce dieu versatile, ironique, vindicatif et cynique, qui en se jouant facilement de lui, le conduit à sa perte. Et ce garçon est détruit par sa mère, elle même totalement sous l'emprise du dieu.

Penthée est essentiellement sourd et aveugle : il n'entend ni ne voit tous les avertissements, tous les signes qui lui sont prodigués.

En proie à son idée fixe, persuadé de sa légitimité et de la justesse de son projet, il s'avance inexorablement vers son destin.

D'abord, le jeune Roi veut rétablir l'Ordre dans la cité et ses abords, donc se saisir du perturbateur et faire rentrer à la maison ces "folles"

(ménades) qui font on-ne-sait-quoi avec un supposé nouveau dieu et ... du vin. Tous les moyens "laïcs" seront bons. Ces belles dispositions tiennent

18 V. 286-287. "Enerraphé Dios mér6". Il me paraît important - et tant pis pour "la cuisse de Jupiter" - de considérer que l'enfançon fut bel et bien inclus dans le sexe de Zeus, ce qui se défend à tous points de vue ...

19 On connaît la phrase lapidaire de Lasègue, psychiatre français du 1ge s. : "Le délire alcoolique est un rêve".

20 S. Freud, "Personnages psychopathiques sur la scène", Zoe. cit., p. 126.

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jusqu'à la fin du troisième épisode, qui s'achève sur une dernière hésitation de Penthée (v. 845-846) et sur le triom~he de l'Etranger:

"Femmes, l'homme tombe dans mes filets !" (v. 848). 1

Sous ses airs bouffons et jonglant avec les mots, le Dieu masqué donne une leçon de catéchisme que Penthée n'entend pas ... Aussi, lors du dénouement et de la théophanie, Dionysos aura beau jeu de dire, pour les vivants et pour le démembré:

"Trop tard ! Tu ne m'as point connu quand il le fallait... Né Dieu, par vous j'ai été outragé". (v. 1345-1347).

La tragédie se noue sur une antinomie essentielle : Penthée se place, et restera sur le plan humain, profane. Dionysos se situe constamment - malgré les bouffonneries du Masque - sur le plan divin, sacré.

La faute

"Ah, la maledizione !", F.M. Piave-Verdi-Rigoletto (1851).

Par sa curiosité obsédante et malsaine dirigée sur sa mère et ses tantes, Penthée a-t-il commis une grave faute?

Littéralement, aucune de ces femmes n'est une déesse, et il ne saurait s'agir d'une faute grave, du genre de celle qui entraîna la mort d'Actéon.

Mais - outre de vieux contentieux familiaux avec Héra, Artémis et les accointances avec l'Olympe par grand-mère Harmonie -Ino, en tout cas, et peut-être les autres filles de Cadmos avaient connu les enfances de Dionysos. Si celui-ci pouvait leur tourner la tête et les ensauvager, Penthée,tout Roi, fils, neveu qu'il fût, ne pouvait s'en saisir sans encourir ges risques : car elles étaient dans le champ du sacré22. Cette notion, je)e redis, échappe absolument à Penthée.

Voir 1~1> femmes "au doux nid d'amour prises" n'est qu'un leurre encore, que Dionysos tend à Penthée pour s'assurer de lui et le conduire vers le piège du Cithéron23•

Le début du quatrième épisode (v. 912 sq.) pourrait n'être qu'un intermède tragi-comique24• Mise en scène permettant à l'étranger de

21 La métaphore cynégétique est loin d'être gratuite quant aux significations incon- scientes. Eschyle (prologue des Euménides, v. 26). "Bromios ... ourdissant pour Penthée le sort d'un lièvre pris". La chasse ouvre sur la sexualité primitive, mais aussi sur le parricide. Voir G. Flaubert, "La légende de Saint-Julien l'Hospitalier".

22 Elles sont quatre, et le destin de chacune est tragique. Elles peuvent représenter quatre images différentes de la femme archaïque. Chacune voit au moins un enfant mourir dans des circonstances tragiques. le nombre quatre est lié au "theotokos" (cf. Jolande Jacobi, Complexe, archétype, symbole, Neuchatel- Paris, Delachaux et Niestlé, 1961 ; Le rêve du méchant animal (p. 117-156 et particulièrement p. 137-148).

23 le Cithéron est la montagne sacrée.

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toucher le corps du prince et de le porter à l'état d'entheos ... Penthée, un instant plus tard, abdique:

"C'est dans tes mains que je me suis remis" (v.934) avec une ambivalence sur "anakeimestha", qui peut signifier "dépendre de", mais aussi "être offert, dédié, consacré", ce qui introduit l'image sacrificielle.

A partir de là, Penthée, plus hypnotisé qu'enivré, ne s'appartient ni ne se connaît plus. Son désir de maîtrise sur l'Etranger et les Ménades se transforme en rêverie de toute puissance titanesque:

"Pourrais-je porter sur mes épaules les caches du Cithéron, et les Bacchantes avec ... ? faudra-t-il des leviers, ou de mes mains"? Il est trop envoûté, pour saisir le jeu des allusions de l'Etranger, allusions de plus en plus claires au destin qui l'attend (v. 955 sq.).

Dans une suprême ironie, avec une répétition des mots chère à Euripide25, tandis que Penthée s'élance vers le Cithéron, l'étranger énonce le prochain massacre ... et la victoire assurée pour lui-même et Bromios.

Avec une violence inouïe, le chœur des Bacchantes, envahissant l'orchestra, lance une imprécation et une malédiction implacables contre

"ce contempteur des Dieux, des lois, de la justice, ce fils d'Echion né des entrailles de la terre" (v. 995-996). A cette violence répond une autre violence, lors de l'ultime rencontre de Penthée avec Agavé, sa mère.

La mère meurtrière

"Dans l'orage parle le Dieu ...

... Mais vous avez tous oublié que toujours les premiers-nés ne sont pas aux hommes, sont aux Dieux.

Plus commun et quotidien doit devenir d'abord le fruit pour conve- nir aux humains."26

"Mère, je suis ton enfant, ton Penthée, que tu as enfanté dans la maison d'Echion"27. Je pense que nous sommes, ici, à l'acmé de la tragédie, ce qui va suivre illustrant explicitement ce qu'Aristote a défini de terreur et pitié ... et de catharsis.

Echo aux deux cris d'une autre femme fatale ou tragique, Jocaste dans Œdipe-Roi:

24 Cf. François Jouan, "La paratragédie dans les Acharniens d'Aristophane". Thalie, Cahiers du 0.1. T.A., n05, déc. 1989, p. 17-29. Pourrait-on parler de style "satyrique" dans les B. ? En tout cas, cet épisode conduit droit à l'extrême de la violence.

25 V. 955 : Krupsé su Krupsin èn se Kruphthénai... V. 969-970 : Trnphan ... trnphas ...

V.971 : Deinos su deinos kapi dein' ...

26 Holderlin, "Le langage" in : Pierre-Jean Jouve, Poèmes de la folie de Holderlin, Paris, NRF, 1963, p. 52.

27 Si Echion, le Chtonien, le "gegenes" vit dans les entrailles de la terre, il pourrait, comme Ion, avoir été enfanté dans une caverne ou une grotte, lieu initiatique primordial.

(9)

"Va, absous-toi de ce que tu dis ... " (v. 707) et "encore une fois, je t'en supplie, arrête-toi" (v. 1064).

Jocaste, qui sait28, et aime Oedipe envers et contre tout, s'efforce de le retenir dans son élan catastrophique.

Agavé, entièrement possédée, n'a plus rien d'humain. Obnubilé, ridi- cule et entravé dans son accoutrement, voici Penthée juché, et sitôt découvert puis abattu comme un oiseau vidé du nid : dénicheur déniché!

L'assaut des femmes déchaînées, excitées par la crainte du sacrilège et les exhortations "en voix off" du Dieu, leurs forces décuplées (mille mains), a délogé le guetteur (episkopos) de sa palombière et l'a livré à leur fureur. Toutes, et bien sûr Agavé en tête les commandant, se l'arrachent comme un petit animal. Penthée, dégrisé par sa chute, mais incapable de réagir et de se défendre autrement, crie vers sa mère, la seule qu'il croie capable encore de le reconnaître. Il arrache le bandeau qui ceint - et cache - ses cheveux.

Mais elle ne l'entend pas, ne l'identifie pas, pour ses sens égarés il n'est qu'une créature sauvage (ther) menaçante, et devient une proie.

Scène onirique, nocturne, cauchemardesque; tous les ingrédients y sont:

. • l'irritation, le sentiment de se démener ... en vain;

• le carnaval ;

• l'ascension et la chute;

• l'inhibition motrice, l'empêchement d'agir;

• le rituel de mort.

Le cri de Penthée n'a pas été entendu, sinon le cauchemar n'aurait pu suivre son cours inexorable.

[On sait que, dans le rêve, la vérité s'exprime davantage dans une parole, une pensée que dans les images et événements. Et que les divers personnages représentent, sinon le seul rêve, au moins les protagonistes de son drame inconscient. Qui rêve ?]

Penthée, Agavé et ses sœurs, les Ménades de Thébes, tous sont à ce moment possédés par le Dieu (entheoi), qui se fait entendre et se manifeste par des signes coutumiers: une lumière surnaturelle éclaire la scène, toute la nature se tait, une force surhumaine habite les ménades qui déracinent le sapin avec ces leviers dépourvus de fer (asiderois mochlois29, v. 1104).

28 M.J. Bataille, "Pas d'Orchidée pour Jocaste", Femmes fatales, Cahiers du G.I.T.A. n° 8, 1994-1995, pp. 217-224.

29 Avec ces leviers dépourvus de fer: déjà dans le récit du bouvier (cheiros asidérou meta, v. 736). Penthée, au point de partir vers le Cithéron, s'en était souvenu et s'était ravisé: des leviers, non mes mains (seules) t Sommes-nous justement dans les temps très anciens, d'avant l'âge du fer? Age d'or déjà disparu, mais peut-être prise du pouvoir par les femmes ...

(10)

Penthée, dans un brusque sursaut de son instinct de vie (celui-là même qui nous réveille, en sueur et dans l'angoisse, de nos pires cauche- mars de risque de mort ... ), retrouve une claire conscience de sa situation.

Pouvons-nous entendre son imploration dans tout son sens?

[A part le cri bref des enfants de Médée, cette prière est l'une des plus déchirantes, des plus brèves (vu les circonstances !) et des plus authentiques parmi les supplications ou les plaintes de ces enfants menacés ou massacrés par leurs parents qui abondent dans le théâtre d'Euripide. Tout est dit, en vingt mots ! Reléguant dans les accessoires de théâtre les plaintes d'Hippolyte, d'Iphigénie, d'Ion ... seul le cri de l'enfant d'Hérakles, mais encore? Une seule plainte, cinq siècles plus tard, plus laconique "Père, pourquoi m'as-tu abandonné" et à la mère, désignant le compagnon bien-aimé "Mère, celui-ci sera ton fils".]

AFFIRMATION : Moi, mère, je suis ton enfant (1118).

IDENTITE : Penthée, que tu as mis au monde dans la maison d'Echion30.

CONJURATION: Epargne-moi, mère! (1120).

DEMANDE DE PARDON: Et pas même pour mes erreurs31 (1121).

SUPPLICATION: Ne massacre pas ton enfant (1121).

Certes, la conduite de Penthée était du domaine de l'interdit.

L'Etranger n'avait pas manqué de le lui exprimer à maintes reprises et jusqu'avant le départ :

"Toi, si pressé de voir ce qui est défendu, qui t'empresses vers ce que tu devrais fuir ... espion de sa mère et de sa suite !" (912-916).

Voir-savoir, dans ces conditions, est prohibé. Tout le dernier échange de l'Etranger et de Penthée, marqué par le double-sens et la menace, exprime ces vacillements du Moi tiraillé entre les désirs et l'instance morale. Au jeune homme qui ne voit plus et n'entend plus que des perspectives de plaisir, l'Etranger laissait encore une chance: "Tu es seul, tout seul... tu vas trouver un combat digne de toi...".

Pris au piège de son désir, et maintenant de son délire, Penthée n'avait pas compris.

Voir à tout prix : son érection dans le sapin est la conséquence logique de cette impatience, et de son impuissance32, puisqu'il n'avait pu réduire ces femmes insoumises sous son pouvoir humain.

A l'implacable logique de Penthée, qui l'a conduit jusqu'ici, Agavé répond par un acte fou: se saisir non point pour soumettre, mais pour anéantir.

30 Une formulation presque identique est employée par Cadmos pour réveiller Agavé de son état de transe (1271-76).

31 Amartiaisi (emais) : le sens fort semble bien être ~, errement (au sens réel et figuré). Le sens de faute est-il vraiment à prendre en compte, si le héros tragique est égaré par un dieu?

32 Il y a, si l'on veut, voyeurisme-exhibitionnisme ... mais nous devons nous garder de toute interprétation symptomatique. Voir P. Bourdier, "Début de psychanalyse d'un scopto- phile", Rev. Fran. de Psychanalyse, 32, 1968, n° 3, pp. 531-554.

(11)

[Nous voyons, dans ce geste de sauvagerie un rappel du geste fondateur de Cadmos : Agavé et ses compagnes arrachent et dispersent les membres et les lambeaux du corps palpitant, comme le père- fondateur avait arraché et semé les dents du dragon (diasparagmô et sperma se rattachent au même sens).

Penthée, précipité à terre, est la proie de la violence bestiale de sa mère "la brillante, la bien née" née du Ciel et de la Terre.

N'est-ce pas ce caractère chtonien que vitupère, avec la violence que je signalais il y a un moment, le chœur des Bacchantes (v. 977 sq.)?

"Qui donc l'a enfanté? Car il n'est ~int issu d'un sang de femme mais de quelque lionne, ou des gorgones lybiennes."

Ce qui est chtonien est en relation constante avec le sexe et avec la mort.

Le Chœur (v. 997-1005) dit bien que nous sommes dans le champ du sacré - et du sacrilège - et que la sanction est "la Mort sans hésiter"

pour celui qui "veut forcer l'invincible".

La justice armée du glaive tranchera la gorge de "l'impie, l'athée, sans foi ni loi descendant de la terre".

Agavé n'est-elle donc qu'un exécutant de la vengeance du Dieu?

Face à ces forces démoniaques déchaînées par Dionysos - qui main- tenant se fait entendre sans encore se montrer (v. 1079-1081), Penthée me paraît terriblement et simplement humain. C'est l'heure de vérité:

tout ce qui, jusqu'à ce moment, avait pu le montrer excessif, colérique, versatile, infantile, tout cela a disparu.

Tout se tait (v. 1084-85), seule se fait entendre la voix impérieuse du Dieu, insistante: "châtiez-le !" (v. 1081).

N'est-ce pas là (bien plus qu'au v. 801, selon de nombreux critiques et exégètes) que s'effectue le renversement qui dévoile la vérité du

"terrible héros"?

Cv.

971). Il n'est plus infantile, "pervers", etc ... il est l'enfant d'une mère dé-naturée (par l'enthousiasme, l'enchantement, la

"mania" dionysiaque), qui appelle sa mère dans un sanglot pour qu'elle le reconnaisse, le pardonne, l'épargne.

Cet enfant-là ne peut appeler son père, il ne sait qu'énoncer son nom ... 34 (et nous ne savons pas davantage où il est !). La situation

33 Rappelons pour mémoire que les Gorgones naquîrent de l'union d'un frère et d'une sœur (banal dans le mythe). Du sang issu de la décapitation de Méduse naquirent Pégase (bénéfique) et Chrysaor qui engendre une généalogie de monstres. Du sang dégoulinant de la tête de Méduse naquirent une infinité de serpents. Pour Méduse, voir J.P. Vernant, La mort dans les yeux, Hachette, Textes du 20· siècle, 1985.

34 La nomination du père biologique, du "géniteur" - sa désignation par la Mère - est, tant dans l'histoire de l'humanité que dans l'histoire personnelle, un moment déterminant (voir ce qu'il en est aujourd'hui dans les ethnies qui pratiquent encore la polyandrie et la polygamie). La question de la filiation (maternelle, paternelle) est prépondérante dans le théâtre d'Eurifide.

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extrême à laquelle Penthée se trouve réduit, est l'expression de sa relation avec son étrange mère.

Que pouvons-nous saisir d'elle, sans oublier la place particulière de la mère dans l' oikos et de la femme dans la polis?

Claire Nancy, avec "l'enthousiasme" que nous lui connaissons, et dans le système d'analyse qui lui est propre, écrit ceci : "C'est la transgression suprême ... la destruction de la polis par l'oikos, de l'homme public, du héros voué à la défense de la cité, du mâle-né-pour- l'Etat par l'être affecté à la domesticité. Pour peu que l'équilibre soit rompu, que le héros ait été retenu à la guerre et qu'il ait laissé vacant le pouvoir, pour peu qu'aucun lieu institutionnel ne vienne contenir ce qu'Eschyle appelle "le désir sans frein qui dompte la femelle, chez l'homme comme chez la bête", la femme anéantit toute la construction civique et justifie la méfiance radicale dont elle est l'objet."35 Ce qu'avance Claire Nancy pourrait être exact, si nous nous en tenions à une analyse factuelle, et si nous éliminions le fait du sacré (ou du religieux), et l'inconscient ...

En la personne d'Agavé (comme pour Phèdre), Euripide nous mène dans les profondeurs les plus sombres de l'inconscient d'une femme.

Qu'un dieu (Dionysos pour Agavé, Aphrodite quant à Phèdre) soit responsable de cet aveuglement ne trompait pas les Athéniens ; et que nous ayons substitué à Dieu (et au Diable !) les forces souterraines de l'inconscient ne change rien à l'affaire: le destin se joue de nous.

[En témoigne le final commun à Alceste, Médée, Andromaque, Hélène et Bacchantes, que Jacqueline de Romilly nomme "la ritournelle triste"36 : "Les choses divines ont bien des aspects. Souvent les dieux accomplissent ce qu'on n'attendait pas. Ce qu'on attendait demeure inachevé, à l'inattendu les dieux livrent passage. Ainsi se clôt cette aventure" (v. 1388-1392)37.]

Il s'agit bien de l'aléa de notre condition et du souverain pouvoir des dieux, c'est-à-dire du Surmoi inhumain et cruel qui joue notre présent et notre avenir avec la donne du passé.

Agavé est-elle "à part" par rapport à la galerie des mères qu'Euripide met en scène?

• Elle n'apparaît sur scène qu'à la fin de la pièce (v.1165), "les yeux hagards" (diastrophois), portant en trophée la tête de son fils. Conformé- ment à la convention tragique, un récit de messager nous a décrit, avec une parfaite sobriété, le massacre du jeune roi et les suites de l'égare- ment d'Agavé et de ses compagnes.

35 Claire Nancy, "La femme tragique", In Du féminin (collectiO, Col. Trait d'union, P.U.

Grenoble, 1992, pp. 141-165.

36 J. de R., op. cit., p. 145.

37 Traduction Marie De1court, Euripide-Pléiade, p. 1278.

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• Il semble qu'il ny ait eu chez elle aucun débat intérieur: tout s'est déroulé immédiatement, dans la parfaite logique du délire: totalement dépossédée de son discernement et de son sentiment maternel, elle n'a ni entendu ni reconnu son enfant38.

• Elle demeure dans cet égarement jusqu'à la retrouvaille avec Kadmos son père.

Le désir de sauvegarder le secret de l'état de transe peut occasionner le meurtre accidentel ou rituel d'un "spectateur" jugé indésirable, et les récits de voyageurs (même dans Robinson Crusoë) et des missionnaires en portent témoignage, comme de nombreux massacres commis en Chine, Océanie, Afrique ... Ce qui ne peut être vu, dit, colporté39, ce que l'on dira "tabou", c'est-à-dire les divers niveaux de l'initiation et de la

"connaissance", justifie pleinement aux yeux des officiants et des partici- pants la mise à mort sans phrase ou le sacrifice rituel, afin de sauve- garder le "secret".

L'initié lui-même doit passer par la mort - symbolique toujours, réelle parfois - afin d'accéder au secret4O. Si ce secret est de Polichinelle, ou paravent de pratiques infâmes, le néophyte ne l'apprend souvent que trop tard ... à ses dépens.

[Bon nombre des "martyrs" de la religion chrétienne à ses débuts furent des "néophytes" catéchumènes (un peu trop) enthousiastes, qui n'avaient pas encore accédé au symbolon et à l'eucharistie, et dont le supplice41, comme un rite de passage, leur assura l'entrée dans la communauté, après leur mort.]

Cet inconnu habillé de noir .•.

L'infanticide aurait été considéré, nous assure-t-on (Alain Moreau), comme l'un des "crimes fondamentaux" le moins grave dans la civili- sation grecque, infiniment moins grave que le parricide (meurtre du père et/ou de la mère), l'inceste et le cannibalisme.

Par contre, l'infanticide est gravement puni lorsqu'il s'accompagne de cannibalisme (Atrée) et d'offense aux dieux (Tantale). Nous savons qu'il continue sous des formes diverses, légalisées ou criminelles, à se perpé- tuer tous les jours dans le monde entier. Il est rarement mais sévè- rement puni lorsqu'il est réputé criminel et commis en toute conscience ...

38 L'expérience clinique - et médico-légale - nous permet de constater de telles condui- tes lors de psychoses graves, dans des états toxiques (drogues hallucinogènes, alcoolisme chronique sévère avec troubles du jugement - délirium ou Syndrome de Korsakof - , arriérations mentales sévères).

39 Ce sont les expressions mêmes du texte d'Euripide.

40 Cf. J. Jacobi, op. cit., "La résurrection", pp. 145-148.

41 Bien sûr, ils étaient suppliciés par "les autres", les païens... Sur la signification profonde du martyre. Cf. J.P. Albert "La chair et le sang", Giulia Sissa "Le corps virginal".

(14)

hormi faits de guerre, luttes ethno-raciales, abandon ou délaissement et maltraitance d'enfants et ... IVG.

J'ai essayé de montrer, dans une étude à partir de Médée d'Euripide42, confrontant les données de la psychopathologie clinique et de la clinique psychanalytique

• que la tendance à l'infanticide est profondément ancrée chez tous les humains ;

• que cette tendance est très fortement liée à l'identification de la Geune) mère et du (présumé ou soi-disant) père avec ses propres parents;

• que le passage à l'acte infanticide correspond à des stagnations de la personnalité dans des stades très archaïques du développement de la personnalité.

Mélanie Klein, Lou Andréas-Salomé, avec leur génie propre et dans leur langue poétique, ont proposé une théorisation du premier narcis- sisme et du sadisme du premier âge, qui sont la pépinière de ces quatre transgression majeures.

Et nous sommes certain qu'elles furent toutes commises et proba- blement en toute impunité dans les premiers âges de l'humanité, jusqu'à ce que l'homme s'invente des Dieux et se donne des lois.

Tu ne sais même pas qui tu es

Face à la présomption de Penthée, l'étranger lui lance cette pointe

"Tu ne sais plus ce que tu dis ni ce que tu fais. Tu ne sais même pas qui tu es" (v. 506).

Comme un gamin, Penthée décline; "Penthée, fils d'Agavé, Echion est mon père" et le mage, jouant sur les mots: "Pour ton malheur, ce nom te va bien !", mais le jeune prince ne l'entend pas et caporalise toujours.

Entendons-nous encore cette réponse dans le cri de Penthée livré à la rage meurtrière de sa mère?

Nom du père? nom de la mère? lieu de naissance?

Tout cela vous fait à la rigueur un "état-civil" (pour les gendarmes ... ), mais cela ne vous donne pas une "identité", tout au plus une filiation légale.

Mais, que sait Penthée de ce père "serpent, né de la terre" ?

On dit que ces Spartes étaient de véritables brutes, à peine capables de parler, ne songeant qu'à la bagarre.

Ce père muet, ce père seulement connu par son nom et sa race ("race de vipères" cela sera dit plus tard !), ce père présent-absent ou disparu ? est-ce de cela que procède la fragilité, la "fêlure" de Penthée ?

42 M.J. Bataille, "Complexe de Médée", Communication au 1er Congrès International Mythologie - Psychothérapie, 1988 (non publié).

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A part un grand-père un peu sénile, qui a abdiqué en sa faveur (c'est la version d'Euripide, pas celle de tous les mythographes), ce gamin princier, qui joue de son mieux à être le roi, n'a pas de modèle d'identi- fication virile.

Pais encore, plus que kouros, il affecte une conduite martiale: prison, chaînes, armes, troupe, bottes, il a toute la panoplie, il joue son rôle, mais il n'est pas dans la fonction. Cadmos le rappelle incidemment lors du thrène: "C'était un bon petit, il faisait respecter mes cheveux blancs"

et puis, nous comptions sur lui pour maintenir la dynastie43 ...

La tentation de Penthée est-elle seulement de s'assurer de la réalité sexuelle dans la position du voyeur?

Si les enfants naissent du Ciel (comme la mère de sa mère, et peut- être ce Dionysos ... ) ; si les hommes naissent de la Terre (comme son père ... ), à quoi sert donc le sexe de l'homme, et le ventre des femmes?

Veut-il aussi s'assurer que sa mère ne fasse pas la catin, à son tour, avec un imposteur qui se fait passer pour Zeus?

"Et, vous avez, là-bas, un Zeus père de nouveaux dieux ?"

Et ce sacré étranger de répondre: "Non point, c'est le même qui, ici, s'est uni à Sémélé en (de secrètes) noces !".

Ce qui n'est pas pour rassurer notre jouvenceau ...

n

continue pourtant "Et ces mystères, tu as pu les voir, toi ?"

Charles Perrault termine le conte de "la Barbe Bleue" par une jolie moralité:

"La curiosité malgré tous ses attraits coûte souvent bien des regrets ; On en voit tous les jours mille exemples paraître.

C'est, n'en déplaise au sexe, un plaisir bien léger.

Dès qu'on le prend il cesse d'être.

'" Et toujours il coûte trop cher."

-~On peut en dire autant de tous les "plaisirs" ! Penthée ne fut-il qu'un curieux, qui, tout en jouant au grand, ne voulait pas grandir? Agavé ne fut-elle qu'une mère imprudente? (impudente ?). Quel que soit le biais par lequel on tente de prendre cette pièce, toujours le fil se dérobe.

G. Karsaï, dans une communication en 1991 à Montpellier, "Tirésias dans les Bacchantes"44, donne une lecture astucieuse et pleine de sel du personnage de Tirésias, et suppose que Penthée et sa mère furent initiés, ce qui sous-entend, si je ne me trompe, que Penthée ne fut pas vraiment mis à mort, qu'Agavé ne fut pas vraiment meurtrière de son fils puis exilée (remarquons que, de même qu'à Médée, le mythe lui attribue une autre union et d'autres méfaits).

43 Combien toute cette histoire rappelle, de façon analogique, les racontars d'une certaine famille sur un rocher ... et d'une autre famille sur une grande île.

44 Publiée dans L'initiation, t.l, P.U. Montpellier, 1992, p.199-208.

(16)

J'adhère entièrement à l'hypothèse de G. Karsaï, même si peut-être il extrapole quelque peu le texte.

La question que nous nous poserons maintenant est, je crois, celle-ci : un système de lecture, quel qu'il soit, nous permet-il de mieux apprécier et comprendre (double sens de krinein) l'œuvre que nous envisageons?

Essai d'interprétation

"Bryant, dans sa très remarquable "Mythologie", mentionne une source analogue d'erreurs quand il dit que, bien que personne ne croie aux fables du paganisme, cependant nous nous oublions nous-mêmes sans cesse au point d'en tirer des conclusions, comme si elles étaient des créatures vivantes" (E.A. Pœ).

Comme le Petit Poucet, j'ai semé, aux détours de cette lecture, quel- ques cailloux blancs. Je n'ai peut-être pas évité l'odieuse paraphrase?

Et je constate, comme vous sans doute, que j'ai centré notre attention sur ce moment crucial de la supplication de Penthée, de la méconnais- sance et de l'acte meurtrier de sa mère.

C'est sur cette horreur du démembrement que je voudrais revenir.

Non sans avoir rappelé qu'Agavé est dite "prêtresse du meurtre" (ierea phonou), v. 114 ; et la réprobation du Chœur: "Beau combat! de ses mains dégouttantes de sang déchirer un enfant !" v. 1163-64.

L'angoisse de morcellement est l'une des plus archaïques et des plus éprouvantes. Et pourtant, nous n'en avons que rarement une expression directe verbale. C'est encore par le symbolisme artistique que nous en avons quelque représentation.

Elle a pu cependant être dite par de rares personnalités capables de l'analyser et de la décrire. Ainsi Margaret I. Little, psychanalyste anglaise, rapporte, lors d'une seconde tentative d'analyse qu'elle vécut:

"Ma peur, c'était la peur de la destruction absolue, que mon corps soit démembré, de devenir irrémédiablement folle, d'être anéantie, d'être abandonnée et oubliée par le monde entier comme si je n'avais jamais existé"45.

Plus loin, ce même auteur exprime: "Je me cachais dans le ventre maternel mais, même là, je n'étais pas en sécurité" (p. 290). Il lui faudra huit ans d'une véritable descente aux enfers, lors d'une troisième analyse conduite par Donald W. Winnicott, dans des conditions très différentes de celles que Freud a pu définir et proposer pour la "cure- type" des psychonévroses, avant de retrouver une paix intérieure, et le sentiment et le droit de "n'être plus désormais une non-personne, puisque mon identité était reconnue" (p. 305).

45 M.I. Little, "Un témoignage", in L'amour de la Haine, Nouvelle revue de psychanalyse, NRF, 3.3, 1986, p.286.

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Durant ce long parcours, cette femme connut plusieurs épisodes de profonde dépression dans l'obsession térébrante du suicide, dut être hospitalisée (régression extrême, disparition sociale) et recourut à des modes d'expression non verbale divers, entre autres la peinture mais aussi de nombreux "acting out", pour exprimer ce qui ne peut être dit et se laisser aller dans ces temps archaïques antérieurs à la possession de la parole46. [On se souvient de ce que disait Aristote : "Quant aux mystères, il ne s'agit pas d'apprendre quelque chose, mais de ressentir (pathein) et d'être dans une disposition (diatithenai)."]

Et encore, nous remarquons que, si elle nomme son angoisse "peur ...

que mon corps soit démembré", elle ne peut aller plus loin dans une description phénoménale de cette angoisse47. Tous les cliniciens sont d'accord pour situer des angoisses d'une telle intensité et d'une telle prégnance dans un niveau de "psychose"48, domaine que Freud avait commencé à explorer et dont il avait pu, dans les dernières années de sa vie et de son œuvre, jalonner les limites cliniques et théoriques.

Si nous faisons la part - capitale - de la symbolisation mythique, nous pouvons situer l'angoisse déchirante de Penthée et l'aveuglement d'Agavé dans ces zones de l'angoisse primordiale. A un moment, D.W. Winnicott exprime à sa patiente: "Votre mère est imprévisible, chaotique et c'est le chaos qu'elle crée autour d'elle" (ibid., p. 294).

Agavé, je l'ai dit, est "différente", parce que, dans sa mania elle ne voit plus son enfant, mais un jeune animal sauvage. N'est-il pas en effet

"un monstre", ce paquet de chair rougeaud et hurlant qui vous déchire le ventre, vous mord et vous aspire de sa bouche goulue, alors que vous n'auriez qu'un seul souhait: dormir - mourir? - et le laisser là, quoi qû'il puisse lui arriver?

L'acte mythique recoupe en cela notre quotidien: de nombreuses mères abandonnent leur enfant à l'occasion de la dépression qui suit l'iccouchement, et de "psychoses puerpérales". Bonne aubaine pour les psychanalystes que cette pièce où sont représentés la plupart des figur- ants de ce que Freud appela "le monde souterrain de la psychanalyse ...

les couches profondes de ce monde49" ! Mais nous n'insisterons jamais assez sur deux points :

46 Rappelons que ceux qui étaient incapables de prononcer correctement ("phônen asunetoi") les formules rituelles, et ceux dont les mains étaient souillées (?) ne pouvaient être admis aux Mystères.

47 C'est sans doute là que réside l'une des butées de la psychanalyse existentielle (Dasein analyse) et aussi de la cure type freudienne.

48 M.I. Little considère qu'il s'est agi dans son cas d'une "psychose de transfert", ce qui expliquerait l'issue positive de la cure menée par elle et D.W.W.

49 S. Freud, Contribution à l'histoire du mouvement psychanalytique, Paris, P.B.P., 1979, p.155.

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- l'aspect onirique: d'emblée l'Etranger, Le Masque, Dionysos sous apparence humaine nous avertit du leurre. Et j'imagine volontiers que la pièce se termine, la nuit tombée, à la lumière des torches.

- l'aspect religieux plus marqué ici que dans toute tragédie, aspect que marque précisément G. Karsaï (citant Otto, Jeanmaire, etc.) : "Sur des plans bien différents, acteurs et spectateurs deviennent initiés au cours de la représentation, et le changement qui doit se produire en chacun de nous nous permet de pénétrer dans un autre monde que celui de notre vie quotidienne; dans celui de Dionysos50". Sous le couvert de l'apparence humaine certes - sauflors de la théophanie -le Dieu est sur la scène, qu'il ne quitte pratiquement pas. Si Penthée n'est pas censé le savoir, le spectateur est averti d'entrée de jeu : le théâtre est trompe- l'œil (phasma), mais aussi "mystère théologique".

Les événements qu'on nous montre se situent aux temps très anciens, où le récit mythique comporte une importante confusion des temps et des générations.

La famille de Cadmos est une famille typiquement mythique : ascen- dance olympienne (Harmonie par Arès et Aphrodite) et ascendance terrestre (Cadmos venu de Phénicie). Peut-on considérer que les unions des filles de Cadmos sont des hiérogamies? Sûrement pour Sémélé.

Possible pour Ino et Autonoé. Quant à Agavé, son père "lui a donné pour époux Echion", que son origine situe dans les zones les plus primitives et les plus obscures. Les dieux ont souvent bon dos, en se laissant attri- buer (ou en revendiquant) des parternités auxquelles on ne croit plus guère. Les pères sont bien souvent absents, et lorsqu'ils reviennent ou se manifestent, déclenchent des drames (Iphigénie) ou des catastrophes (Thésée, Héraklès). Les mères se débrouillent, généralement mal, avec les enfants peu d'exceptions près, par exemple Andromaque).

Nous ne pouvons, en toute loyauté intellectuelle, assimiler les temps mythiques, même dans la version "modernisée" qu'en donne la tragédie attique classique, aux références socioculturelles précises du monde et de l'époque de Sigmund Freud.

[Par contre, nous ne serions pas loin de ce que l'on vit, aujourd'hui, dans des secteurs marginalisés de plus en plus étendus de nos sociétés occidentales51].

Sur la fin de sa vie (1937), Freud se référa à la doctrine d'Empédocle enseignant "qu'il y a deux principes régissant le cours des événements dans la vie de l'univers comme de l'âme, qui sont éternellement aux prises l'un avec l'autre. Il les nomme philia - amour - et neikos -lutte - ... [. .. ] Ces deux principes fondamentaux d'Empédocle - philia et

50 G. Karsaï, loe. cit., pp. 199-200.

51 M. J. Bataille, "Initiation et psychanalyse", L'initiation, Actes du colloque Montpellier, 1991, PU Montpellier, 1992, t.2, pp. 231-251.

(19)

neikos - sont par le nom comme par la fonction 1'équivalent de nos deux pulsions originaires, Eros et destruction, s'efforçant l'une de rassembler ce qui existe en unités toujours plus grandes, 1'autre de dissoudre ces unions et de détruire les formations qui en sont nées". Plus loin, Freud assimile cette "pulsion de destruction à la pulsion de mort, poussée du vivant à retourner à 1'absence de vie52".

Le jeu de la "pulsion de mort", que je dirais volontiers "pulsation de mort" est le moteur de toute tragédie. Dans les Bacchantes, Agavé et Penthée s'y livrent - alternativement actif (active) et passif (passive) - avec emportement et fureur, dans la manie dionysiaque.

Le "sacrifice" de Penthée est-i1la représentation d'un rite initiatique qui aurait existé à très haute époque? Les jeunes filles en cours d'ini- tiation se saisissant d'un animal sauvage (lionceau)53 et le sacrifiant en vue de l'obtention de la fécondité? Un adolescent fut-il ensuite substitué pour jouer le rôle de l'animal (sauvage) qui avait disparu (ou avait été divinisé: taureau) ?

Les processus de déplacement, condensation, symbolisation qui prési- dent à la formation des mythes (et des œuvres poétiques) comme à la genèse des rêves, ont joué dans les élaborations successives du mythe et finalement dans la création d'Euripide.

L'anthropologie nous montre, aujourd'hui, dans quelques ethnies encore protégées, la survivance de croyances et de rites qui représentent pour l'essentiel la séquence mise en scène dans les Bacchantes54•

L'intérêt de tels rites me paraît consister en ce qu'ils témoignent d'une relation essentielle entre la mise à mort et les rituels de renaissance et de souveraineté.

En guise de conclusion

Considérée d'un autre point de vue, la situation de Dionysos, Penthée et Agavé est une situation perverse, qui pourrait être lue sur les registres du masochisme et du sadisme. Ce qui induit le reproche formulé dans l'exodos par Agavé (ou Cadmos) :

"Pour les passions, vous les dieux, n'en remontrez pas aux humains"

(v. 1348).

52 S. Freud, "L'analyse avec fin et l'analyse sans fin", Résultats. Idées. Problèmes, II, Paris, P.U.F., 1987, pp. 262-263.

53 Les représentations rupestres dans la grotte Chauvet à Vallon-Pont-d'Arc, datée d'envi- ron - 32.000, témoignent de l'existence d'animaux maintenant exotiques, sous nos climats, au début du paléolithique supérieur. Quant au bison et au taureau, leur présence et leur fonction religieuse ne sont plus à démontrer.

54 J.CI. Müller, La calebasse sacrée. Initiations rukuba, Ed. La Pensée sauvage, P.U.

Montréal, 1989.

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Les dieux seraient-ils, en fin de compte, les boucs émissaires des hommes? Mais la culpabilité demeure!

Comment s'en débarrasser? Freud, avec son humour, nous proposera une solution provisoire:

"On croit reconnaître dans l'évolution des vieilles religions que bien des "forfaits" auxquels l'homme avait renoncé avaient été "passés" à Dieu et étaient encore permis en son nom, de telle sorte que la cession à la divinité était le moyen par lequel l'homme se libérait de la domination de ses instincts mauvais et nuisibles à la société. Aussi n'est-ce pas un hasard si toutes les particularités humaines - avec les mauvaises actions qui en dérivent- étaient attribuées aux anciens dieux dans une mesure illimitée, et ce n'était pas une contradiction qu'il ne fut pourtant pas permis de justifier ses propres forfaits par l'exemple divin.,,55

"ET LE RESTE PRENDRA SENS DE LUI-MEME! (v. 1392) ... !"

BIBLIOGRAPHIE

Marie-José BATAILLE Psychanalyste, Bordeaux

Odile BOURGUIGNON, Mort des enfants et structures familiales, Paris, PUF, 1984.

Jacques GOROT, "La mère, l'imaginaire et la somatisation immune", Kentron, 8.5., déc. 1992, p. 241-254.

Leben und Sterben der Kinds Môrderin Susanna Margaretha Brandt (Vie et mort de la meurtrière d'enfant S.M.B.), Insel Verlag, Frankfurt am Main 1973. Cette affaire criminelle jugée en 1771 ("exécution" le 14 janvier 1772) a certainement inspiré Gœthe pour son Faust.

55 S. Freud, L'Avenir d'une illusion, Paris, PUF, 1989, p. 100.

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