D. SAUVANT,P. CHAPOUTOT,
H. ARCHIMÈDE
INRA - INA PG
Laboratoire de Nutrition et Alimentation 16 rue Claude Bernard,
75231 Paris Cedex 05
A la fin des années 70 s’est instauré un
débat sur les
avantages respectifs
des ali-ments concentrés riches en amidon ou riches
en
parois végétales
facilementdigestibles.
Plusieurs journées
d’études ont été consacrées à ce thème et deux articlespubliés
dans cetterevue ont
également permis
de faire lepoint
sur ses
aspects zootechniques
(Coulon et al 1989) etdigestifs
(Michalet-Doreau et Sauvant 1989).Pendant les années
80,
il a été confirmé que des distinctionspouvaient
être faitesentre les aliments concentrés riches en ami- don en fonction du devenir
digestif
de cetteLa digestion des
amidons par les ruminants et ses
conséquences
fraction.
Compte
tenu du fait que l’évolution du contexteagricole,
enparticulier
la mise enplace
de la nouvellePAC, risque d’entraîner,
pour certains
élevages,
un accroissement de l’utilisation des céréales par lesruminants,
ila semblé opportun de faire le
point
de laconnaissance sur ces variations de la
diges-
tion des amidons chez l’animal ruminant et
sur
l’impact
que celapourrait présenter
surles
performances
des animaux et les recom-mandations alimentaires. Le thème du rôle de l’amidon pour les ruminants
ayant déjà
étéabordé dans
quelques
revues (Theurer1986, Campling 1991,
Nocek etTamminga 1991),
nous nous attacherons à des
aspects
peu ou pas abordés par ces études.1 / La digestion ruminale des amidons
1.i / La cinétique de dégradation
des amidons
Le
développement
de la méthode d’étude par mesure de ladégradation
in sacco des ali-ments a
permis
de mettre en évidence le fait que les amidons des alimentspouvaient
êtredégradés
à desrythmes
très différents. Lesmesures successives de la
dégradation (Dt)
dans le réticulo-rumen d’un même aliment sont en
général ajustées
en fonction dutemps
tpar le modèle monomoléculaire
simple : qui permet
d’identifier leparamètre
acomme la fraction très
rapidement dégradable
ou
soluble,
leparamètre
b comme la fractionprogressivement dégradable,
leparamètre
cétant la vitesse de
dégradation
relative de la fraction b. Le tableau 1 regroupe les valeurspubliées
dans la littérature desparamètres
a,Résumé ’
Il est maintenant acquis que la digestion ruminale de l’amidon varie largement en
fonction de la nature de l’aliment et de son traitement technologique. La mesure in
sacco de la dégradation
théorique
de l’amidon (X,%) permet deprédire
la digestibilité préintestinale (Y,%) de ce constituant : Y = 0,483 X + 45,62. Lesdifférences sur les paramètres de la digestion de l’amidon peuvent se répercuter sur
la
protéosynthèse
microbienne, le profil fermentaire et la stabilité de l’écosystèmeruminal. La digestibilité de l’amidon entrant dans l’intestin grêle n’est que
partielle
et semble révéler une limite de la capacité amylolytique de ce segment. L’amidon
non digéré dans l’intestin
grêle
est enpartie dégradé
par lesmicroorganismes
dugros intestin. Les résultats de bilans digestifs partiels publiés à ce jour permettent
d’effectuer une estimation des quantités d’acides gras volatils et de glucose
potentiellement
mises àdisposition
de l’animal par l’amidon d’un régime.Lorsque la ration distribuée aboutit à des valeurs normales du
profil
fermentaire ruminal et du taux butyreux du lait, il ne semble pas y avoir d’effet important de lavitesse de digestion de l’amidon et de sa répartition entre les différents segments
digestifs.
Une distinction apparaît par contre pour lesrégimes plus
riches enconcentrés
qui
entraînent des fermentationspropioniques marquées
et un faibletaux butyreux du lait. Dans ce cas, le choix d’amidon lentement dégradable semble apporter une certaine «sécurité fermentaire» dans le rumen et permet de limiter la chute du taux
butyreux
du lait.D’une façon générale, des recherches doivent encore être poursuivies pour mieux
connaître les conséquences nutritionnelles et zootechniques de la vitesse de
dégradation de l’amidon des régimes dans le réticulo-rumen et pour élaborer des recommandations fiables.
b et c. D’autre
part,
les variations entre réfé-rences et aliments de la fraction a et de la vitesse c sont
indiquées
auxfigures
1 et 2. Ilapparaît
que la fraction soluble de l’amidon (a) varielargement
suivant la matièrepremière
considérée et sans doute
également
en fonctionde la
méthodologie
de mesure. Elle estparticu-
lièrement élevée pour
l’avoine, l’orge,
le blé etses
sous-produits,
et très faible pour le maïs, lesorgho,
la pomme de terre et le son de riz. Enconséquence,
il existe unlarge
éventail de la teneur en amidon soluble de la matière sèche des aliments (tableau 1). Enparticulier,
l’avoi-ne,
l’orge,
lemanioc,
le blé et lesremoulages présentent
des teneurssupérieures
à 30 % dela matière sèche sous forme d’amidon soluble donc très
rapidement
mis àdisposition
desmicroorganismes
du rumen. Les valeurs de la vitesse dedégradation
(c) de la fraction pro-gressivement dégradable
(b) de l’amidon sesituent entre 5 et 25 % par heure. Seule
l’orge
se détache de ce groupe avec certaines obser- vations à
plus
de 50 % par heure.Les variations des
paramètres
a, b et c serépercutent
sur la valeur dedégradabilité théorique,
calculée en tenantcompte
d’untransit de 6 % par heure des fractions
amyla-
cées des aliments (tableau 1). L’habitude a été
prise
deparler
d’amidonrapide
ou lent en fai-sant référence à leur vitesse de
dégradation
dans le rumen. Un examen du tableau 1 per- met de constater
qu’on
classe en fait dans le groupe des amidonsrapides
(DT >_ 90%),
des alimentsqui
se situent dans desplages d’amplitude
nonnégligeables
de la fraction soluble (60 < a <_ 96 %) et de la vitesse dedégradation
deb(ll<c<39% par heure).D’une
façon générale,
pour une même valeur dedégradabilité théorique,
les matières pre- mières peuventprésenter
des taux horaires dedégradation plus
ou moinsimportants.
Parexemple,
à DTproche,
leglutenmeal présente
une vitesse de
dégradation
de l’amidon bienplus importante
que leglutenfeed.
Il convien- drait depouvoir préciser
lesorigines
de ces dif-férences de
disponibilité
de l’amidon entretypes
de céréales. Si la structure de la moléculeprésente
indéniablement une influence (diffé-rence de
dégradation
entreamylose
etamylo- pectine),
ilapparaît
que la matièreprotéique
entourant le
grain
d’amidonpeut également jouer
un rôle deprotection plus
ou moins effi-cace (Me Allister et al 1993). Un autre
aspect explicatif
des variations desparamètres
descinétiques
in sacco est la finesse debroyage qui
estpositivement
liée à a et c, etnégative-
ment à b (Cerneau et Michalet-Doreau 1991).
1.
2 / La digestibilité ruminale des amidons
Les variations des
cinétiques
dedégrada-
tion de l’amidon
expliquent
celles de son bilandigestif
ruminal.Ainsi,
ladigestibilité préin-
testinale des amidons à
dégradation rapide,
orge
principalement,
estgénéralement compri-
se entre 90 et 95 %. Pour les amidons à
dégra-
dation
lente,
maïs etsorgho essentiellement,
ladigestibilité
est nettementplus
faible maisl’amplitude
de variation des résultats est beau- coupplus importante,
de 50 à 90 % environ. Il est donc enpratique
incertain de retenir unevaleur moyenne de la
digestion
ruminale de l’amidon de maïs. Cettedispersion
invite enoutre à rechercher les causes de variation de
l’ampleur
de ladigestion
de l’amidon lent deces céréales.
Paradoxalement,
peu d’études ont été consacrées à la mesure de ladigestibilité pré-
intestinale de l’amidon del’ensilage
de maïs.Widyobroto
(1992) a effectué une estimation de ladigestibilité
duodénaleégale
à0,56
de l’ami- don del’ensilage
de maïs,alors
quel’interpré-
tation des résultats de
Kung
et al (1992) abou-tit à une valeur de l’ordre de
0,90, proche
decelle
(0,87)
que nous avons observée au labora- toire (S. Munoz etal,
nonpublié). Compte
tenude
l’importance pratique
de cefourrage,
ilserait utile de mieux connaître les influences de la
variété,
du stade de récolte et de la fines-se de
hachage.
SelonLeroy (1993),
ce dernier facteurpourrait
avoir un rôle nonnégligeable
sur la vitesse de
dégradation
ruminale del’ensilage
de maïs.Différentes études ont démontré que la
digestion
ruminale de l’amidon lentpouvait
être en
partie
contrôlée par des traitementstechnologiques.
Il est ainsi connu que les trai- tementshydrothermiques appliqués
au maïset au
sorgho, permettent
d’accroître très sensi- blement leurdigestion
dans le rumen (Waldo1973,
Theurer1986, Campling
1991) suite àune rupture des
grains
d’amidon et de leurenveloppe protéique.
Cestechniques
ont étélargement pratiquées
aux Etats-Unis dans les années 1970 dans le cadre de l’alimentation des bovins en feedlots. Dans le cas du maïsgrain,
il convient en outre desouligner
que legrain
entierprésente
unedigestibilité
de l’ami-don
plus
faible dans le rumen et dans l’ensemble du tubedigestif
que legrain broyé
ou écrasé
(Cottyn
et al1978, Galyean
et al 1979). Al’inverse, quelques
travaux, enparti-
culier ceux de Me Allister et al (1989) et P.
Chapoutot
et al (nonpublié)
ont montréqu’il
étaitpossible
d’accroître de 20 à 30 % laprotection
de l’amidond’orge
ou de blé enappliquant
un traitement partannage
augrain broyé.
D’autre part, différents facteurs de varia- tion de la
capacité
du réticulo-rumen àdégra-
der l’amidon d’une ration ont été identifiés. Il
s’agit
enparticulier
du niveaud’ingestion qui
intervient sans doute par la réduction du
temps
deséjour
ruminal(Galyean
et al1979,
Robinson et al 1986) etqui
affecteplus
lesamidons lents que les
rapides.
En outre, il est vraisemblable que d’autres facteurs intervien- nent (Kotarski et al 1992). Onpeut
à ce proposévoquer
desphénomènes
d’interactionsdiges-
tives
qui peuvent
affecter lacapacité amyloly- tique
ruminale.Ainsi,
Archimède et al (1994)ont montré que de l’amidon «lent» était moins bien
digéré,
in sacco et invivo,
avec unrégime
de base pauvre, constitué de canne de maïs,
en
comparaison
de foin de luzerne. Il estéga-
lementpossible
que lacapacité amylolytique globale puisse
varier en fonction d’un seuil de niveaud’apport
d’amidon. Eneffet,
le regrou- pement des données de lalittérature,
où diffé-rents niveaux
d’apport
d’un concentré à ami- don lent étaient étudiés(figure 3),
laisseapparaître
un minimum dedigestibilité
auxalentours d’une teneur de 40 % d’amidon dans la ration (Archimède et al 1994). Ce
phé- nomène, qui
estsignificatif malgré
lagrande
diversité
d’origine
desdonnées, indique
quel’activité
amylolytique
totale s’accroît moins queproportionnellement
au niveaud’apport
d’amidon lent
jusqu’à
environ 40 %. Au-delà dece
seuil,
lesmicropopulations amylolytiques
sembleraient par contre devenir dominantes et
plus
actives.1.
3 / La prévision de la digestion quantitative ruminale de l’amidon
Au cas où il
apparaît justifié
de tenir comp- te des variations de ladigestibilité
ruminalede l’amidon dans le calcul de la matière orga-
nique fermentescible,
cequi
est parexemple
réalisé dans le nouveau
système
hollandaisproche
de notresystème PDI,
il estindispen-
sable de
pouvoir disposer
d’une méthode deprévision permettant
d’éviter des mesures in viuo très lourdes à mettre en oeuvre. A ce pro- pos, àpartir
de la littérature et des résultats de notrelaboratoire,
nous avons pu mettre récemment en évidence une relation haute- mentsignificative
entre ladégradabilité théorique in
sacco de l’amidon(DT6A,
%) etsa
digestibilité préintestinale (DIA, % ;
Archimède et al 1994) :Cette
relation, rapportée
à lafigure 4, indique cependant
que ladégradabilité
insacco sous-estime assez
largement
ladigestibi-
lité ruminale des amidons «lents». Ce
résultat, qui
a été confirmé dans unepublication
récen-te de De Visser
(1993), pourrait
traduire l’exis- tence d’unphénomène
d’interactionnégative
àl’intérieur des sachets de
nylon.
Il a été eneffet été montré que la niche
écologique
del’intérieur du sachet n’était pas le reflet fidèle de celle du rumen
(Meyer
et Mackie 1986). Lafigure
4indique
par contre que ladégradabili-
té in sacco est
plus
élevée que ladigestibilité
in vivo pour les aliments à amidon
«rapide».
Ce
phénomène pourrait s’expliquer
par unedispersion physique
de l’amidon hors des sachets ou bien par lestockage important
d’amidon
qui
seproduit
avec cetype
d’aliment dans les cellules des bactéries et surtout desprotozoaires
du rumen(Jouany
1978)qui
peu- ventquitter
les sachets denylon
alorsqu’ils
sont considérés au niveau du duodénum
comme de l’amidon non
digestible.
La relationde la
figure
4peut
êtreappliquée
aux valeursde DT de l’amidon du tableau 1 et aux teneurs
en amidon des aliments de la
banque
de don-nées de l’alimentation animale (1 0
7,
1993)pour connaître la
digestibilité
in vivo laplus probable
ainsi que les teneurs de la MS enamidon
digéré
dans le rumen et en amidonentrant dans l’intestin (tableau 1). Cette der- nière donnée
peut permettre
d’affiner les valeurs PDIME de ces aliments en la sous-trayant
à la teneur en matièresorganiques
fer-mentescibles (MOF) calculée à
partir
desteneurs en matières
organiques digestibles
(MOD) moins les matières azotéesprotégées,
l’extrait éthéré et lesproduits
volatils (INRA 1988). Il convient derappeler
que, dans sa ver-sion de
1988,
lesystème
PDI tenaitpartielle-
ment
compte
de cetaspect
enmultipliant
par0,8
la MOF du maïsgrain
et par0,7
celle duriz,
du millet et dusorgho. D’après
le tableau1,
quatre matièrespremières,
le maïs, le sor-gho,
le riz et la pomme de terre sontparticuliè-
rement pourvues en amidon
protégé
avec desteneurs de l’ordre de 200
g/kg
de MS.Si la méthode in sacco
présente
un intérêtindéniable,
elle estcependant
assez lourde àmettre en oeuvre et, dans l’état actuel de la
connaissance,
nous nedisposons
pas de métho- de de laboratoiresimple permettant
deprévoir
en routine la
dégradabilité
de l’amidon des matièrespremières
dans le réticulo-rumen.1.
4 / Influence
surles paramètres de
la digestion ruminale
L’acidité induite par la
dégradation
del’amidon a été
fréquemment évoquée
comme leprincipal phénomène
àl’origine
des interac- tionsdigestives négatives.
Les travaux deMould et al (1983) ont montré que cet effet
négatif
n’était pasuniquement
dû à la chutede
pH
ruminal maiségalement
à un «effetamidon»
spécifique, qui
induirait ledéveloppe-
ment d’une
population amylolytique
au détri-ment d’une flore
cellulolytique.
Cet effetspéci- fique d’interaction, indépendant
dupH,
a étéconfirmé
ultérieurement,
enparticulier
par Archimède (1992). Avec les donnéesactuelles,
il est difficile d’affirmerqu’un type
de ciné-tique
dedégradation
de l’amidonprésente
uneffet défavorable
plus marqué.
Eneffet,
il a étéobservé que la
digestibilité
du NDF de rationscontenant du maïs était
plus
élevéequ’avec
del’orge
(MeCarthy
et al1989,
Weiss et al 1989).Cependant,
il faudraitpouvoir corriger
cesdonnées du fait que la
paroi végétale
du maïsgrain
estpotentiellement
bienplus digestible
que celle de
l’orge
etprésente
enquantité plus
faible (P.
Chapoutot
etal,
nonpublié).
D’autrepart,
en utilisant des mesures dedigestibilité
fécale et duodénale et de
dégradabilité
in saccode mêmes
aliments,
Archimède et al (1994)n’ont pas pu mettre en évidence de différence d’interaction
digestive
sur lesholocelluloses,
de canne de maïs et de foin de
luzerne,
entredes amidons
rapides
et lents.Différents auteurs, en
particulier
Nocek etTamminga (1991),
ontcomparé quelques
pro- fils fermentaires ruminaux en fonction des vitesses dedégradation
des amidons sans pou-L’apport
d’amidonlent permet de réduire un
déséquilibre fermentaire
conduisant à une
trop forte proportion
depropionate.
voir
dégager
d’effetmarqué.
L’examen des données de la littérature sous unangle
diffé-rent des
comparaisons
antérieures(figure
5)laisse
cependant apparaître
que lerapport
molaire (acétate +butyrate)
/propionate
durumen ( (A+B) / P) est en
partie dépendant
dela nature de l’amidon. En
effet, lorsque
lesdeux
types
d’amidon sontcomparés
au sein de la mêmeexpérimentation,
lerapport
(A+B) / Pest nettement
plus
faible avec des aliments à amidonrapide, type
orge,lorsque
lerégime
considéré induit
déjà,
parlui-même,
une valeur faible (inférieure à 3) de cerapport.
Unapport
d’amidon lentpermet
donc de réduire lesdéséquilibres
fermentaireshyper-propio- niques
induits par un apportimportant
d’ali-ment concentré à amidon
rapide.
Par contre,aucun effet
systématique
nepeut
être détecté dans la zone desprofils
fermentaires avec unrapport proche
de3,5,
considérés comme nor- maux et recommandés dans nos conditionsd’élevage.
Lesconséquences zootechniques
deces différences seront
envisagées
et discutéesplus
loin.Toujours
à propos des fermentationsruminales,
il a été montré par Cullen et al (1986) que les céréales à amidonrapide (orge,
blé) entraînaient une accumulation accrued’acide
lactique
et unpH plus
faible que les céréales à amidon lent(maïs, sorgho).
Cerésultat va dans le même sens que les observa- tions
précédentes
et confirme le rôleplus
«sécuritaire» des amidons lents vis-à-vis du
risque
d’acidose ruminale. Il ne semble par contre paspossible
de mettre enévidence,
àtravers des résultats
expérimentaux in vivo,
de différencessystématiques
de vitesse d’accu-mulation
post-prandiale
des AGV entre lesamidons
rapide
et lent. Eneffet,
si des écartsnets ont pu être observés par
Kung
et al (1992)entre orge et maïs, rien n’a été observé entre des aliments concentrés à amidon
rapide
oulent par
Widyobroto
(1992) sur vaches en lac-tation et Archimède (1992) sur chèvres à l’entretien. Cet aspect mériterait d’être étudié
spécifiquement
en identifiant les facteurs«d’amortissement»
responsables
del’apparente
contradiction entre les vitesses de
dégradation
des fractions
amylacées
et d’accumulationpost-prandiale
des AGV et c’estpeut-être
sur le rôle de«compartiment
de délais» desproto-
zoaires
qu’il
faudrait se focaliser(Jouany
1978).Il
importe également
de chercher à savoir si les variations decinétiques
dedégradation
del’amidon
peuvent
influencer l’efficacité de laprotéosynthèse
microbienne. Sur cetaspect,
la littérature ne laisse pas actuellement appa- raître d’effetsystématique
(Archimède et al 1994) bien que les essais réalisés à Rennes(Widyobroto
1992) ou à l’INA-PG (Archimèdeet al
1994,
S. Munoz etal,
nonpublié)
révèlentune meilleure efficacité de la croissance micro- bienne avec les amidons lents. Dans un même ordre
d’idée,
il convient des’interroger
surl’opportunité
du contrôle de la vitesse de ladigestion
de la fractionamylacée
des aliments pour harmoniser lescinétiques
dedégradation
des fractions
glucidiques
et azotées au sein desrégimes.
Il serait nécessaire de consacrer unelarge place
pour aborder rationnellement cettequestion. Compte
tenu du nombreimportant d’expérimentations
consacrées actuellement àce
sujet,
ilparaît logique
d’en attendre les résultats avant deprendre position.
Cette atti- tudeprudente
estjustifiée
par le fait que les résultats obtenus à cejour
sur cesujet,
dansnotre laboratoire ou dans d’autres
équipes,
nelaissent pas
apparaître
de tendance nette.2_/_La digestion intestinale
Un accroissement de la
proportion
d’amidonalimentaire entrant dans l’intestin
grêle (AIA,
% de
l’ingéré)
se traduit par une baisse notable de sadigestibilité (dAIA,
%) dans cesegment,
comme l’ont calculé Nocek et
Tamminga
(1991)à
partir
de rations et de types d’amidon divers :Cette relation
statistique
peut être utiliséepour obtenir une estimation de la teneur en
amidon
digestible
dans l’intestin (ADI) des rationsingérées,
par contre elle nepeut
pas êtreappliquée
aux alimentspris séparément.
Ce
phénomène
soulève laquestion
d’une satu-ration éventuelle de la
capacité amylasique
intestinale des animaux
ruminants, aspect
dis-cuté par les auteurs
précités
et par Harmon (1992).Cependant, malgré
la saturation de cettecapacité,
ilapparaît
clairement que l’intestingrêle joue
un rôle de vicariance par- tielle parrapport
à l’actiondigestive
du réticu-lo-rumen
(figure
6). Cettefigure
montreégale-
ment que le gros intestin
participe
efficace-ment à ce
phénomène compensatoire
et que laproportion
d’amidonqui
y estdigérée repré-
sente en moyenne de l’ordre de 60 % de la
quantité digérée
dans l’intestingrêle.
Enconséquence,
la fraction d’amidon nondigérée
dans l’ensemble du tube
digestif
demeure engénéral
très faible (de 0 à 10 % del’ingéré).
Même avec des rations à base
d’ensilage
demaïs, dans le cas d’une
présence apparente
degrains
de maïs dans lesbouses,
la teneur enamidon de celles-ci demeure en
général
infé-rieure à 5 % de la MS. Cette valeur est d’autant
plus
faible que lehachage
est fin et lateneur en MS de
l’ensilage
faible.3 / Bilan quantitatif de la
digestion
La nature des nutriments absorbés n’est pas la même selon que l’amidon est
digéré
dans l’intestin
grêle,
cequi
fournit duglucose,
ou dans le gros
intestin,
cequi
fournit des AGV. Les données du tableau1,
leséquations
(2) et (3) et la contribution moyenne du gros intestin dans ladigestion
intestinale de l’ami- donpermettent
d’estimer larépartition
de ladigestion
de l’amidon entre les troisgrands segments digestifs
du ruminant. Dans cetteapproche,
les aliments sont considérés indivi- duellement au niveau du rumen tandis que les relations sur ladigestion
intestinales’appli- quent
à l’ensemble de la ration. Les résultats obtenus peuventpermettre
d’avoir une estima-tion
globale
desquantités
deglucose
et d’AGVissus de
l’amylolyse
etpotentiellement
absor-bables en
multipliant
lesquantités
d’amidonpar 1 et
0,5 respectivement.
Outre ces variations de la
répartition
de ladigestion
de l’amidon et des nutrimentsdispo- nibles,
il convient degarder
àl’esprit
le faitque les formes
protégées
d’amidonpermettent
vraisemblablement d’atténuerl’amplitude
et labrutalité de la vague d’entrée des nutriments dans
l’organisme.
4 / Conséquences nutritionnelles et zootechniques
Il
apparaît
que laprotection
ruminale del’amidon
peut présenter
apriori l’avantage
d’accroître le flux de
glucose
absorbé dans l’intestingrêle.
Il convientcependant
d’êtreprudent
sur les conclusionsrapides
et avanta-geuses que l’on
pourrait
tirer d’une telle infor- mation considérée defaçon
isolée. Eneffet,
d’unepart,
laprotection
de l’amidon réduit laprotéosynthèse
microbienne dans le rumen et la valeur PDIqui s’y
attache ( -9,3
g de PDIME en moins / 100 g d’amidonprotégé)
et, d’autrepart,
différentes études ont montré que larécupération quantitative
deglucose
parl’organisme
était bien moinsimportante
que ce que l’onpouvait imaginer (Huntington
etReynolds 1986,
Gross et al 1988). Ce dernierphénomène
doit être enpartie
laconséquence
de la métabolisation
prioritaire
duglucose
parla
paroi
intestinale.Même en
supposant qu’une quantité
accruede
glucose puisse
être renduedisponible
defaçon quasi chronique
par unapport
d’amidonlent,
il n’a pas encore étéexpérimentalement
démontré que l’animal
ruminant,
enparticu-
lier la vache
laitière,
en tirait unprofit
mesu-rable. Il est certes connu que le ruminant doit
assurer la
majeure partie
de la couverture deses besoins en
glucose
parnéoglucogénèse hépatique
et que, dans certaines situations(gestation multiple,
début delactation),
leniveau des besoins en
glucose
est si élevé que l’animalpeut présenter
des troubles métabo-liques
(toxémie degestation,
cétose de lacta- tion).Cependant,
leproblème
du manque deglucose
des ruminants apeut-être
ététrop
dra-matisé. En
effet,
il convient derappeler
quel’organisme
et le foie de ces animauxpossèdent
une «marge de sécurité» de
capacité néogluco- génique plus importante
que ce que l’on pense souvent.Ainsi,
les nombreusesexpérimenta-
tions sur les effets
d’injections
desomatotropi-
ne ont démontré l’existence d’un accroissement
significatif
de secrétion de lactose associé àune
augmentation
de laglycémie,
sans modifi-cation,
dans lespremières semaines,
de laquantité
de matière sèche doncd’énergie ingé-
rée (C. Disenhaus et D.
Sauvant,
nonpublié).
D’autre
part, lorsque
l’animal est enpériode
debilan
énergétique
déficitaire en raison d’un besoin accru, enparticulier
autour de la misebas,
lacapacité
du foie à transformer lepropio-
nate
disponible
englucose
n’est pas accrue maisabaissée,
vraisemblablement parce que cet organe est alors «calibré» pour utiliserpré-
férentiellement des nutrimentsd’origine
endo-gène
(Bas etal 1993,
Smith etYoung
1993). En outre, la vache laitière montre unecapacité
Une
digestion plus faible
de l’amidondans le rumen est
compensée
par unedigestion
accruedans l’intestin.
L’amidon est ainsi
digéré
à
plus
de 90 %.métabolique d’adaptation importante,
sansmodification de sa
production
laitièrebrute,
àun accroissement de sa
perte
urinaire englu-
cose, sous
injection
dephlorizine, équivalant
àenviron 7
kg
de lait brut !(Amaral-Phillips
etal 1993).
Enfin,
dans laplupart
desexpérimentations
où du
propionate
ou duglucose
ont étéperfu-
sés par voie
digestive
ousanguine,
la vacherépond
selon le facièscaractéristique
de l’excèsénergétique,
avec enparticulier
une chute detaux
butyreux
mais pas d’accroissement du tauxprotéique
du lait (Hurtaud et al 1992).Dans un même ordre
d’idées,
Janes et al (1985)ont clairement montré que l’accroissement d’entrée du
glucose
par la voiedigestive,
consécutif à un
apport
de maïs en substitution d’herbedéshydratée,
était associé à une baisse de lanéoglucogénèse hépatique,
le coefficient de substitution étantcependant
inférieur à 1 :0,47.
On
peut
toutefoiss’interroger
sur certainesconséquences zootechniques
des modifications desphénomènes dynamiques digestifs
et fer-mentaires ruminaux. En
effet,
pour desrégimes
entraînant un tauxbutyreux réduit,
lechoix entre des amidons lents et
rapides
n’estpas neutre. En
effet,
il semble que, dans de telles situations d’excèsénergétique,
unapport
d’amidonrapide
induit une entréeplus
brutalede
nutriments, accompagnée
par une fermen- tationpropionique plus marquée (figure 5),
entraîne une chute
plus importante
du tauxbutyreux
du lait(figure
7) et vraisemblable- ment unengraissement
excessif. La relation de lafigure 7,
établie àpartir
de 17 donnéespubliées,
laisseapparaître
une absence d’effetdans la zone des valeurs normales (37-40
g/kg)
de taux
butyreux
alors que, parexemple,
pourun taux
butyreux
de 30g/kg
avec un amidonrapide
la valeur est de 3g/kg supérieure
avecle maïs. Cette influence de la vitesse de
diges-
tion de l’amidon sur le taux
butyreux
du laits’explique
non seulement par une différencesur le
profil, plus
riche enpropionate,
des AGVabsorbés,
maisprobablement également
par des différences de vitesses d’entrée de cesnutriments,
enparticulier
dupropionate.
Cette molécule est en effet
particulièrement insulinotrope lorsqu’elle pénètre
brutalement dansl’organisme
(Istasse et Orskov 1984). Elle induit donc un étatanabolique
d’autantplus important
que l’animal se trouvedéjà
en excèsd’énergie.
L’étatanabolique plus marqué
induit par l’amidonrapide
parrapport
au lentressort
également
des résultats deCasper
et al (1990)qui observent,
chez des vaches en début delactation,
moins d’acides graslongs
à 18atomes de
carbone, exprimés
en % de la matiè-re grasse ou en
g/kg
de lait avec del’orge qu’avec
du maïs.Il ne semble
cependant
pas y avoir d’influencesystématique
de la vitesse dedégradation
de l’amidon sur les taux pro-téiques
et lesproductions
laitières bruteslorsque
maïs et orge sontcomparés.
Par contre,lorsque
des rationscomprennent
uneproportion importante
desorgho
non ou peutraité, qui
est la céréale laplus
riche en «ami-don lent» (tableau
1),
on assiste à une baissedes
performances
laitières parrapport
au sor-gho
traité à la vapeur souspression
(Sinas etal
1992,
Chen et al 1992). Ces résultats révè- lentpeut-être
l’existence d’un seuil maximum à ne pasdépasser
del’apport
d’amidonprotégé
dans les rations.
Conclusions
Les travaux de
recherche,
effectués pour laplupart
au cours de la dernièredécennie,
ontclairement démontré l’existence de variations
importantes
de lacinétique
de ladigestion
ruminale des amidons. Il est
aujourd’hui
pos- sible dedisposer
de références chiffrées per- mettant de caractériser les aliments sur cetaspect.
Par le choix d’aliments il est donc envi-sageable
de contrôler enpartie
larépartition
de la
digestion
de l’amidon entre les différentssegments digestifs.
Ces variations serépercu-
tent sur
l’énergie disponible
pour la croissance microbienne et il seraitlogique
depouvoir
lesintégrer
dans laprédiction
des teneurs enmatière
organique
fermentescible et enPDIME des aliments.
Lorsque
la ration estéquilibrée
de manièreà induire des fermentations ruminales nor-
males,
les différences de vitesse dedigestion
de la fraction
amylacée
ne semblent pas avoird’influence
marquée
sur leprofil
fermentaire.Dans ce cas, la
principale
modificationdigesti-
ve due à une
protection
de l’amidon concernedonc l’accroissement du flux de