FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
ANNEE 1901-1902 N° 3
CONTRIBUTION A L'ÉTUDE
THÈSE
POUR LE DOCTORAT ENMÉDECINE
présentée et sontennepubliquement le 15 Novembre 1901
Marie-Victor-Pierre BAHANS
Né à Pessac (Gironde), le 5 Octobre 1873.
ANCIEN INTERNE DES HOPITAUX LAURÉAT (ter)DES HOPITAUX :
Médaille de bronze 1897 ;Médaille d'argent 1898; Médaille d'argent 1899 LAURÉAT DE LA FACULTÉ :
Médailled'argent 1893
ANCIEN MONITEUR DE TRAVAUX PRATIQUES D'ACCOUCHEMENT A LA FACULTÉ
MEMBRE DE LA SOCIÉTÉ D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE
Examinateurs de la Thèse :
MM. MOUSSOUS PICOT MONGOUR MOURÉ
prolesscui.... Président prolosseur....)
agrégé | -luges.
chargédecours)
Le Candidat répondra aux questions qui lui seront ïaites sur les diverses parties de l'Enseignement médical.
BORDEAUX
iïvIPRlMERIE DU MIDI — PAUL CASSIGNOL
91 — RUE PORTE-DIJEAUX — 91
1901
Faculté de Médecine et de Pharmacie de Bordeaux
M. DE NABIAS, doyen — M. PITRES, doyen honoraire.
PROFESSEURS MM. MIGÉ
DUPUY
)
t Professeurs honoraires.MOUSSOUS
Clinique interne
MM.
* PICOT.
/ PITRES.
DEMONS.
LANELONGUE.
Clinique externe Pathologie et théra¬
peutique générales. VERGELY.
Thérapeutique ARNOZAN.
Médecine opératoire. MASSE.
Clinique d'accouche¬
ments LEFOUR.
Anatomie pathologi¬
que COYNE.
Anatomie CANNIEU
Anatomie générale et
histologie V1AULT.
Physiologie JOLYET.
Hygiène LAYET.
Médecine légale MORACHE.
AGRÉGÉS EU
section demédecine (Patliolog
MM. SABRAZÈS.
LE DANTEC HOBBS.
Physiquemédicale...
Chimie
Histoire naturelle ...
Pharmacie
Matière médicale....
Médecine expérimen¬
tale
Clinique ophtalmolo¬
gique
Clinique des maladies chirurgicalesde! en¬
fants
Clinique gynécologique Clinique médicale des maladiesdes enfants Chimiebiologique...
Physique pharmaceu¬
tique
MM.
BERGONIÉ.
BLAREZ.
GIJILLAUD.
FIGUIER.
de NABIAS FERRÉ.
BADAL.
P1ECHAUD.
BOURSIER.
A. MOUSSOUS DENIGÈS.
SIGALAS.
ie interneet Médecinelégale.)
EXERCICE :
MM. MONGOUR.
CABANNES.
section de chirurgie etaccouchements
1MM. CHAYANNAZ.
Pathologieexterne] BRAQUEHAYE f BÉGOUIN.
Accouchements.IMM. FIEUX.
) ANDÉRODIAS.
Anatomie.
section dessciences anatomiques et physiologiques
IMM. GENTES. | Physiologie MM. PACHON
CAYALIE. Histoirenaturelle.
section dessciencesphysiques Chimie MM. BENECH. | Pharmacie....
COURS COllPIiÉAlEIVUA I R
Clinique des maladies cutanées etsyphilitiques Clinique des maladies des voiesurinaires Maladies du larynx,des oreilles et dunez Maladies mentales
Pathologie interne Pathologie externe Accouchements
Physiologie Embryologie Ophtalmologie
HydrologieetMinéralogie Pathologie exotique
Le Secrétaire de la Faculté:
BEILLE.
M. DUPOUY F S :
MM. DUBREUILH.
POUSSON.
MOURE.
RniGIS.
RONDOT.
DENUCÉ.
FIEUX.
PACHON.
PRINCETEAU LAGRANGE.
CARLES.
LE DANTEC.
LEMA1RE.
Pardélibération du 5 août 1879, la Faculté aarrêté que les opinions émisesdans les Thèsesqui luisont présentéesdoivent être considérées comme propres à leursauteurs, qu'elle n'entendleurdonner niapprobation niimprobation.
A MES AMIS
A mon Président de Thèse
MONSIEUR LE DOCTEUR MOUSSOUS
PROFESSEUR DE CLINIQUEMÉDICALE INFANTILE A LAFACULTÉ
DE MÉDECINEDEBORDEAUX OFFICIER DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
INTRODUCTION
Pendant l'année que nous venons d'avoir l'honneur et
le
bonheur de passer dans le service de M. le
Prof, agrégé
Rondot, nous avons eu labonne fortune d'observer chez une jeune fille des complications rénales au cours
de la varicelle.
Notre maître a eu l'extrême obligeance de nous communi¬
quer une observation semblable concernantune
de
sesclien¬
tes de laville, auprès de laquelle d'ailleurs la
malade qui fait
l'objet de l'observation que nous apportonsavait contracté
la maladie pour laquelle elle entra à
l'hôpital. La rareté
relative du retentissement de cette fièvre éruptive sur l'appa¬
reil rénal nous donna l'idée de publier les faits qu'on lira plus loin, et de faire sur la question une
petite étude d'en¬
semble, à laquelle des circonstances imprévues nous
ont
empêché de donner le développement que nousdésirions.
Tout entier aux préoccupations du présent,
interrogeant
anxieusement l'avenir, il nous est doux, jetant un regard sur le passé, de nous rappeler l'heureux temps
de
nosétudes,
dont le souvenir est intimementlié à ceux de nos maîtres qui
firent notre éducation médicale.
L'annéed'externatpassée dans le servicede M.le
Prof. Picot
fut, nous pouvons le dire, la base de nos
connaissances
médicales. C'est la saine clinique que nous avons
appris à
faire et à aimer chez ce maître savant et dévoué, dont ren¬
seignementpratique et
éclairé, dégagé des entraves d'une éru¬
dition fastidieuse et inutile, forma tant de générations de praticiens,quiavec succès en ont
plus tard recueilli les fruits
: qu'il reçoivel'hommagecle notrereconnaissance.
- 8 —
Successivement externe etinterne dans le service de M. le Prof. Moussous, nous pûmes apprécier pendant ces deux années l'extrême bonté de ce maître, qui nous initia aux secrets de la médecine infantile dont nous pouvons constater actuellement l'importanceconsidérable dans la carrière médi¬
cale. Ses causeries au lit du malade furent pour nous, en même temps que de parfaites leçons cliniques, des exemples
de sollicitude et de dévouement auprès de l'enfance malheu¬
reuse et souffrante. Pour tout cela et pourl'honneur qu'il
nous fait aujourd'hui en acceptant la présidence de notre thèse, du fond du cœur nous lui disons merci.
Nous fîmes notre dernière année d'externat chez M. le Dr Dubourg, chirurgien consommé, chef dévoué et éminem¬
ment alîable, chez lui nous trouvâmes à la fois l'utile et
l'agréable. Car c'étaitun maître en même temps qu'un ami.
Nous le prions d'agréer l'assurance de notre sincère attache¬
ment.
Étant interne dans le service de M. le Prof, agrégé Pous-
son, nous reçûmes de lui des marques constantes d'uneaffec¬
tueuse bienveillance. L'année passée dans son service fut
une année de sérieuses études pendant laquellenous profi¬
tâmes de son solide enseignement, dans une des branches de la chirurgie les plus importantes et de la plus haute utilité pratique; qu'il reçoivel'expressiondenos sentiments dévoués et reconnaissants. A son souvenir, nous joignons celui de
M. le Prof, agrégé Ghavannaz dont nous pûmes apprécier,
en même temps que la science chirurgicale letact et la délica¬
tesse, et qui nous honora de saprécieuse amitié.
C'est chez M. le Prof, agrégé Rondot que nous venons de terminer notre internat. Il ne nous appartient pas d'apprécier
ce clinicien émérite, dont seule la modestie, jointe à une correction parfaite, égale la science ; qu'il nous permette simplement de le remercier de son indulgence, de sa bien¬
veillance et de son haut enseignement.
M. le Prof, agrégé Mongour, M. le Dr Fromaget ont un titre spécial à notre reconnaissance. Leurs savantes leçons,
— 9 -
jointes à nn zèle
infatigable et à
undévouement constant,
nouspermirent d'obtenir avec
succès le titre et les fonctions
si enviées, etsi importantes aupoint
de
vuede l'avenir médi¬
cal, d'interne des hôpitaux. Nous
n'oublierons
pasle service
signaléqu'ils nous ont
ainsi rendu.
A tous nosmaîtres de la Faculté et des hôpitaux
qui
nous témoignèrent de l'intérêt etde la sympathie nous disons
aussi merci.
A tous nos camarades d'internat nous disons nn
adieu
plein de regrets,atténués seulement
parla pensée de les
revoir souvent, maintenant et plus tard
dans la vie, et l'es¬
poir de laisserparmi eux un
souvenir.
Nous remercionsvivement notre traducteur, M.
le D1' Me-
nier, et l'assurons de notre amitié.
I
HISTORIQUE
C'est Henochle premierqui
mentionna,
en1884, l'existence
de la néphrite varicelleuse
dans quatre observations que l'on
liraplusloin. Une fois
l'attention attirée
surles complications
rénales de cette fièvre éruptive, celles-ci
devaient être recher¬
chées désormais systématiquement par
certains praticiens, et
les observations ne pouvaient que se
multiplier. La même
année, lesjournauxétrangers en
publiaient de Rasli, Newski,
Jansen, à deux reprises différentes
d'Hoffmann.
En 1885, Frantz Hogyes, en1886
Rachel, les années suivan¬
tesJansende nouveau, Wichmann,
Hagenbach, Unger
en1888
relataient des faits nouveaux. En 1893,
Cassel publiait
unarticle critiquesur la question, en
apportant
uneobservation
personnelle. Ne
voulant
pasplacer ici
unindex bibliogra¬
phique, nous ne
citons
que ces nomsprincipaux apparte¬
nant tous, comme on le voit, à la presse
étrangère. Dans
la littérature médicale française, citons le nom
de M. Gomby.
qui a donné une
observation à la Société Médicale des
Hôpitauxen 1896,
la thèse de Daverède en 1899. M. le Dr
Léon Cerf, sans apporter de faits nouveaux, a
publié
en1900
unexcellent article dans YAnjoumédical.
Nous allons faire l'analyse des
principales de
cesobser¬
vations, nousréservant d'en
tirer plus tard des déductions.
II
OBSERVATIONS
Observations d'Henoch.
Observation î. — Je suis appelé, au printemps 1883, en consultation auprès d'un garçon de dix ans, pour une néphrite qui avait apparu,
sans causeconnue, il y avait huitjours. La scarlatine était à éliminer.
Le médecin traitant me dit que quinze jours avant, l'enfant avait
eu une éruption modérée de varicelle, dont les séquelles se reconnais¬
saient sur la peau, sous formede pâles macules. La néphrite guériten deux semaines par le repos constantau lit et l'emploi à petites doses d'acétate de potasse.
Le médecin traitant ne voulait pascroire àun rapport entre cette néphrite et cette varicelle ; mais la lecture des trois
observations suivantes ne laissera
aucundoute à ce sujet.
ObservationII. — Le 18 octobre 1882 vint, dansmon service, une
petite fille de deux ans avec des accidents de nature syphilitique. Jus¬
qu'au 28 octobre, frictions et bains.
Le 13 novembre, éruption de nombreuses varicelles avec fièvre modérée; le 16, œdème des paupières et du dos du pied; urinesalbu- mineuses avec cylindreset épithéliums. Température38°1.
Traitement : bains de vapeur,décoction dequinquina avec acétate de potasse; variations et oscillations parallèles del'œdème et de la teneur en albumine de burine. Le 3 décembre, vomissementsviolents, subits;
collapsus, cyanose. Mort le soir. L'autopsie indique l'hypertrophie
moyenne et la dilatation du ventricule gauche, les valvules étant
— 13 -
intactes; œdème1 pulmonaire. Néphrite parenchymateu.se légère et
récente; dégénérescencegraisseuse du foie.
ObservationIII. —Une petite tille de cinq ans, traitée en octo¬
bre 1882, à laClinique,pour un iléo-typhusde deux semaines et
demie
dedurée, était depuisle 20octobresans fièvre. Le 10 novembre, abon¬
dante éruption de varicelles avec fièvre. Température
37°8. Le 18,
œdème de la face et despieds avec albuminurie.
Traitement : bains de vapeur. Le 19 décembre, encore quelques tra¬
cesd'albumine; œdèmedisparu totalement; guérison.
ObservationIV. — Unefille de quatre ans, traitée à la Clinique
pour eczémafacial et prolapsusdu rectum, eut,
le 19 décembre 1882,
une fièvre violente, des varicelles étendues le jour suivant à toutle
corps. Le 20, pas de fièvre. Le 30, nous
fûmes frappés de la pâleur de
la peau et d'un œdème de la face;
l'enfant
seplaignait de
mauxde
tête et dedouleurs sacro-lombaires. Fièvrelégère ; urines trèsalbumi-
neuses.
Traitement : purgatifset bainsde vapeur. Le2
janvier, visage œdé-
matié ; urinescontenant de l'albumine et de
nombreux cylindres, des
épithélia etdesglobulesrouges. Le 7,
amélioration considérable. Le 13,
l'enfant sort guérie.
«Les objections du
début contre le deuxième et le troisième
cas, comme s'il avait pu
s'agir d'une conséquence de la
syphilis ou de
l'iléo-typhus,
meparaissent sans fondement,
puisqueje dispose
de quatre
cassemblables.
» Dans tous ces cas^ huit à quinzejours après
l'éruption de
varicelle abondante et accompagnée
de fièvre,
nous voyonsdes œdèmes et de l'urine néphritique.
Dans trois
cas,la
maladie eut une marche heureuse par un
traitement diapho¬
nique et grâce à une
excitation concomitante de la diurèse
par l'acétate
de potasse, et le deuxième cas seulement a eu une
marche fatale à cause de l'œdème
pulmonaire et l'hypertro¬
phie du
ventricule gauche trouvés
surle cadavre.
» La présence d'une
néphrite aiguë comme séquelle de la
varicelle estdémontréeévidemment
dans
mesquatre
cas ;elle
est l'analogue de la
néphrite qui survient après les autres
— 14 —
maladies infectieuses, surtout la scarlatine. D'autres recher clies et des examens de l'urine dans tous les cas de varicelle,
faits huit jours après le début, donneraient des renseigne¬
ments sur la fréquence de cette maladie qui n'a pas été observée jusqu'à présent. »
Observation et rapport de Cassel.
Après avoir signalé les 25 cas décrits par 13 auteurs :
Henoch, Clausen, Hoffmann, Rasli, Semstchenko, Racliel, Wiclimann, Hogyes. Newski. Jansen, Unger, Hagenbach, Semen, cet auteur dit :
« Quoique depuis Henocli j'ai cherché la néphrite dans
» plus de 200 cas de varicelle, ce n'est qu'en mai 1893 que
» j'ai pu trouver une néphrite varicelleuse. »
Il s'agit d'une petite fille de quatre ans, sans maladie antérieure, malade depuis huit jours. Actuellement, enfant bien développée, cou¬
verte sur tout le corps,etsur le dos surtout, d'un exanthème varicelli- que, présentant tousles stades depuis la papule jusqu'à lavésicule des¬
séchée. Langue chargée, anorexie, constipation, pharynx rouge, gan¬
glionssous-maxillairesbilatéraux;pasd'albumine; température 39°. On revoit la malade le 19 mai, parce quela mère aremarqué le visage
bouffiet le peu d'urine rendue; l'urine est sombre, rouge, hémorragi¬
que; il y a de l'albumine et .de l'hémoglobine (réaction d'Almen); on
trouvesous le microscopedes globules rouges nombreux, en partie bien conservés, en partie sous forme d'anneaux jaune pâle; puis des globu¬
les blancs, descylindres épithéliauxet granuleux. Température 38°.
Diagnostic: Néphrite parenchymateuse aiguë hémorragique.
Le 20 mai, 400 centimètres cubesd'urines, qui ont les mêmes carac¬
tères queles jours précédents. Le 24 mai, température 37°5; les urines sontplus abondantes, elles perdent leurs caractères pathologiques, sont plus claires; le dosage de l'albumine par le réactif d'Esbach donne 2 grammes par litre; la diurèse devient de plus en plus abondante, etle 1er juin on ne trouve plus que des traces d'albumine par l'acide acé¬
tique et le ferrocyanure de potassium ; urinesjaune pâle et ne présen¬
tantplus d'éléments figurés. L'enfant n'est pas revenue.
— 15 —
Résumé. — Il s'agit d'une enfant en
bonne santé, frappée
de varicelle; douze à quinze jours après,
néphrite aiguë à
caractère hémorragique, dont les phénomènes
resteront à
leur acmé pendant six jours pour
disparaître
parle traite¬
ment.
Si on parcourt.la
bibliographie de tous les
cas, onpeut voir
tous les degrés d'intensité de cette
néphrite, depuis quelques
traces d'albumine jusqu'à l'anurie,
l'hydropisie, l'urémie.
Unger, qui a le plus
grand nombre d'observations (7), a
divisé les cas en trois groupes d'après
la gravité.
Le plus jeune des enfants
malades avait six mois (Rachel),
le plus âgé onze ans ; la
néphrite n'apparaît
pas audébut de
l'exanthème, mais du cinquième au
vingtième jour; la durée
de la néphriteva de douze à
vingt-quatre jours. La terminai¬
son fatale a été observée dans trois cas (Henocli,
Hogyes,
Hagenbach),c'est-à-dire dans '15 0/0 des
cas;cependant le
pourcentageest bien
moindre,
carbeaucoup de
casfavorables
nesontpasconnus ;lesrésultats
des autopsies correspondaient
à ceux trouvés dans la néphrite scarlatineuse.
Hogyes donne
des renseignements exacts;
c'étaient surtout les tubuli con-
torti et les anses de Henle qui étaient atteints;
les capsules
deBowmann étaient intactes.
Quant à laprophylaxie de la
néphrite, elle
serésume dans
la recommandation d'Henoch. Dans tous ces cas,
même
légers, faire garder lelit quelques jours et la chambre pen¬
dantune semaine; entout cas. onpourrait donner un
régime
de précaution, en évitant
les aliments de digestion difficile.
Le traitement de la néphrite elle-même est
le même
quecelui
de la néphrite scarlatineuse.
Observations d'Hogyes.
Observation II. — Un garçon de deux ans et demiest atteint
de
varicelle. Le 12novembre 1884, ilne resteplus de traces de
pustules.
Jusqu'au 15 novembre, rien de
particulier. Le matin de
cejour, on
observe de la bouffissurede la face, del'œdème despieds et des
mains;
— 16 -
oligurie. A partir du 16, l'étatde l'enfants'aggrave beaucoup ; élévation
de latempérature; accélération dupouls etde la respiration; augmen¬
tation de l'œdème et généralisation ; anurie totale pendant dix-huit heures; vomissements.
La sonde retire 15 centimètres cubesd'une urineépaisse, rouge brun,
trèsalbumineuse; aumicroscope,ontrouve descylindres,del'épithélium
rénal et beaucoup de globules rouges. Bientôt se montrent des signes de broncho-pneumonie; la respiration devient de [dus en [dus gênée et l'enfant meurtdans l'après-midi du 18.
Observation III. — Nous y relevons simplement ce passage intéres¬
sant : « Fille de sept ans. Sortde l'hôpital, guérie d'une varicelle,le 7
» novembre; yrentre le 21, la facebouffie, les piedsœdématiés; elleest
» dans cetétatdepuis deux jours. »
Observation de Jansen.
Le 14 janvier, cinq jours après la première éruption de varicelle, l'enfant n'avait presque pas du tout uriné, que seulement pendant la défécation, assez pénible, il avait rendu une petite quantité d'urinetrès foncée. Dans le cours de lajournée, l'enfant a vomi plusieurs fois. La température du matin 38°3. Les paupièressont trèsœdématiées, le visage
nettement tuméfié; iln'y a pas d'autre œdème. L'enfant se plaint de
maux de tête, d'éblouissements, de douleurs lombaires. Il n'urine ce
mêmejour que 150 centimètres cubes; l'urine est foncée; sa densité est de 1035; elle renfermaitbeaucoupd'albumine etunpeu desang; dans le dépôt, on trouvait des sels, des globules sanguins et des cylindres épi- théliaux. Le 17janvier, la quantité d'urine estde 250centimètrescubes, ladensitéest de 1030; ily a encorebeaucoup d'albumine et de sang; on
ne trouveplus de cylindres. Le 18 janvier, il y a 500centimètres cubes d'urine de 1022de densité;il y a peu d'albumine, pas de sang. La température est de 38°1.Le 20janvier, température normale; augmen¬
tation de la quantité d'urine; iln'y a plusque des traces d'albumine.
Quelques jours après, il n'y a plus rien à signaler dans les urines.
Guérison. ,
Observation de Comby.
Au dixièmejour de la maladie, jour delà disparition du rash, une quantiténotable d'albumine est trouvée dans les urines, qui étaient
examinéestous lesjours. Pendant quatre jours, on a trouvé 0,25 à
l'albuminomètre. Le quatorzième jour de la maladie, plus de traces d'albumine; mais il survient un engorgement ganglionnaireà l'angle
de la mâchoire gauche,véritable bubon indolentqui afini par suppurer etaété incisé.
Observation d'Hœnel.
Uneenfant d'un an, convalescente de coqueluche, présente brusque¬
mentune élévation detempérature de 40°. L'analyse d'urine décèle de
l'albumine, des cylindres, des globules blancs; la fièvre se manifeste
encorelesjours suivants, et le dixième jour apparaît une éruptionde
varicelle. L'albumine diminue peu à peu, puis complètement.
Voici maintenant les deux observations que nous appor¬
tons :
Observation I
(Due à l'obligeance de M. le Prof, agrégéRondot.)
Une dame enceinte de cinq mois et demi est prise, le 17 février,
d'une fièvre vive après une après-midi passée au concourshippique.
Céphalée, courbature. Rien au coeur,ni au poumon; urines rares et épaisses.
Le 18février, nuit mauvaise, sans sommeil; début d'éruption de petites vésico-bullesautourdes poignets, cinq à six environ, trois àla
lèvresupérieure, une à la cuisse droite. Gorge un peu rouge. Rien au
poumon,ni au cœur;rien dansles urines.
Le 19, pousséenouvelle, surtout àla face (front etjoues) d'une érup¬
tion qui a franchementletype de l'éruption varicellique; il existe une vésicule sur le bout dela langue, un peu d'enrouement. Les urinesres¬
tentrares sans albumine.
20 février. Même état, quelques bulles nouvelles dans le dos.
B. 2
21 février. Urines rares, renferment de l'albumine; l'éruption est
encore plus accentuée àla face.
22 février. Nouvelles vésicules à la face, au poignet, clans le dos; celle duboutde lalangue a disparu; pas d'élévation de température.
Pulvérisations de sublimé à 100/00.
23février. Températureplutôt basse 36o3. Bonne nuit. Un peu de diarrhée; la quantité d'urines est de 750 centimètres cubes. Rien au poumon, ni au cœur; aucunsignede brightisme;l'éruptionesttoujours
abondante àla face, maisleséléments ensont à des phases différentes;
quelques-unes laiteuses, d'autres à centre affaissé, mais non encore desséchées; plusieurssont àl'état de croùtelles noirâtres.
25février. 1 litre d'urine; 25 centigrammes d'albumine; légère diarrhée.
Depuis, amélioration rapide. L'albumine disparait graduellement, l'éruption s'atténue jusqu'à disparitioncomplète sans laisser de traces.
Aucune complication.
Observation II (Personnelle).
J. T..., vingt ans, domestique, entre à l'hôpital Saint-André, le
4 mars1901, dans le service de M. le Prof, agrégé Rondot.
Antécédents héréditaires nuls.
Antécédentspersonnels, rien à signaler.
Histoire de la maladie. — A soigné la malade qui fait l'objet de
l'observation précédente. Le 1er mars, après quelques jours de malaise,
a senti celui-ci devenir plus intense : céphalée, douleurs lombaires, quelques frissons; pas de vomissements ni de diarrhée. Entre à l'hôpital
le 4.Lamalade est un peuabattue, le visage estrouge. Latempérature
estde 38°. La langue est saburrale; quelques vomissements, pas de
diarrhée. Le ventren'est ni tendu ni douloureux; la malade ne tousse pas, etl'examen des poumons et du cœurreste négatif. L'examen qua¬
litatif des urines décèle l'existence d'un trouble assez intense ; par la chaleur, l'acide azotique, le réactif d'Esbach, le dosage donne 2gram¬
mesd'albumine. Traitement : régime lacté absolu, quinine.
5mars. Le matin 30o8; l'état saburral de la langue persiste toujours;
il n'ya plus devomissements, pas de diarrhée; pouls normal; rien au
- 19 —
poumon ni au cœur; pasdetroublescérébraux; mais légèrebouffissure
des paupières; léger œdème des membres inférieurs au niveau des
tibias. On ajouteau traitementprécédentde la lactose et du lactate de
strontium. Température du soir 39°, etcoïncidant avec cette élévation
de température, une poussée éruptive au niveau des poignets, des
genouxet de lapartie supérieure du cou. Laquantitéd'urine n'est que
de 400 centimètres cubes; ily a 13 grammes d'urée en vingt-quatre
heures.
6 mars. Le matin, poussée à la face, rien à la poitrine, ni surles
muqueuses. Cetteéruption, ainsi quecelle de laveille, afranchementle
type de l'éruption de la varicelle; ily a encore de l'œdème des paupiè¬
res et des membres inférieurs. La quantité d'urine est de 500 centimè¬
tres cubes. Latempérature 37°8.
Les7, 8, 9, 10 mars,laquantitéd'urine oscille entre 5 et 300 centi¬
mètrescubes.
10 mars. Ledosage del'albumine donne 50 centigrammes.
13 mars. Iln'y a plusque20 centigrammes d'albumine. 1.200centi-
mètrescubes d'urines assez claires; pasde fièvre; lalangue est un peu saburrale.
14 mars. Mémo quantité d'urines. Pas d'élévation detempérature.
15mars. 1.500 centimètres cubesd'urines,quelquestracesd'albumine.
Pendantce temps, l'éruption a parcouru ses différentes phases classi¬
ques; vésicules,vésico-pustules, dessiccation ettransformation en petites
croûtelles noirâtres; les éléments éruptifs sont, suivantleur siège, àun de cesdegrés d'évolution.
Le20, il ya encore quelques traces del'éruption sur le frontetle
menton; l'albumine a disparu.'A sa sortie del'hôpital,la jeunefille est
enparfaite santé.
Indépendammentde la
complication rénale, dont
nous par¬lerons plus loin et quien fait l'intérêt,cette
observation
noussemble prêter, en outre, aux quelques
considérations sui¬
vantes :
L'incubation, suivant les données classiques, a été exacte¬
ment de quinze jours à partir de
l'apparition de la varicelle
chez la dame soignée parla malade. Cette
période
a été à peu— 20 -
près silencieuse, sauf la fatigue qu'elle mettait sur le compte
de l'excès de ses occupations.
La période d'invasion a été assez longue : trois jours et demi; les symptômes en ont été assez bruyants : 39° de tem¬
pérature, céphalée intense, rachialgie, vomissements.
L'éruption s'est faite cà peu près en une seule poussée ayant commencé dans l'après-midi et le soir du mardi et s'étant complétée pendant la nuit; elle a été en coïncidence
parfaite avec la haute élévation de température.
De toutes ces observations et rapports, nous allons main¬
tenant essayer de tirer quelques considérations cliniques,
concernantles manifestations observées du côté de l'appareil
rénal au cours de la varicelle.
III
CONSIDÉRATIONS CLINIQUES
FRÉQUENCE
On peut dire sans
crainte
quela néphrite varicelleuse n'est
pas une
complication très fréquente. Nous n'en voulons pour
preuve que le début
tardif de
sonhistoire
en1884, au mo¬
ment où Henoch en fit la première mention,
contrairement
à la néphrite scarlatineuse connue
d'aussi longue date que
l'affection causale et qui est toujours une
des principales
préoccupations
du praticien. Mais bien des
casont dû exister
qui ne furent
jamais signalés, et il
asuffi que l'attention
des médecins soit mise en éveil par la
révélation du profes¬
seur de Berlin, et comme nous l'avons vu
à l'historique,
comme l'atteste l'indexbibliographique, les cas se
sont
assez rapidementmultipliés depuis. Nous
pouvonsdire néanmoins
qu'étant donné
le nombre élevé de varicelles observées sans
cesse dans les hôpitaux et dans
la clientèle privée, la
néphrite
varicelleuse n'a qu'une fréquence relative. Que
voyons-nous, en
effet, dans l'article de Gassel? Après
avoir parlé des 25 cas
décrits
par13 auteurs^ il ajoute :
« Quoique depuis
Henoch, j'ai cherché la néphrite dans plus
» de 200 cas devaricelle, ce n'est qu'en mai
1893
quej'ai
pu» trouver une néphrite varicelleuse. »
Pendant les deux années que nous avons
passées dans
le service de M. le Prof. Moussous nous avons vu
de
nom¬breux cas de varicelle, surtout pendant notre
année d'exter¬
nat. Nous ne nous rappelons pas avoirvu un cas
qui, soit
pendant le cours de la maladie, soit pendant la convales¬
cence, ait attiré notre attention du côté de l'appareil rénal,
dont l'atteinte, nous devons l'ajouter, n'était pas recherchée systématiquement.
Certains auteurs ont été plus favorisés. La traduction des observations d'Hœnelnous apprend que cet auteur a vu 3 cas de néphrite sur 6 cas cle varicelle. Nous sommes donc loin du pourcentage de Cassel. A quoi tiennent ces différences? La cause n'en est certainement pas univoque. On peut invo¬
querla susceptibilitéindividuelle, l'existence de lésions préa¬
lables de l'appareil urinaire favorisant une atteinte nouvelle par le virus, une intensité plus grande de celui-ci, les capri¬
ces dugénie épidémique.
D'ailleurs, pour établir une statistique exacte du nombre
de cas de néphrite varicelleuse, il faut se demander quels
sontceux surlesquels on peut apposer cette étiquette. Nous
avons en vue ici les cas où l'on constate simplement del'al¬
buminurie. Seule son existence permet-elle d'affirmer qu'il y
alésion rénale ?C'est mettre en avant la question de la valeur séméiologique de cet important syndrome, et du mécanisme qui en réalise la production.
Dans l'article « Varicelle » de M. Guinon (Traité de méde¬
cine, de-Bouchard et Brissaud), nous lisons dans la 2e édi¬
tion cette phrase écrite déjà dans l'édition de 1892 : «La
» néphrite signalée par Henoch en 1884, puis par Rasli,
» Unger, Hoffman, etc., est-elle bien d'origine varicelleuse.
» Tous les cas ne sont pas inattaquables, car on a compté
» commetels des cas où l'on avait constaté simplement de
» l'albuminurie ; or cela n'est pas suffisant pour affirmer la
» néphrite. »
On cite, en effet, dans lesclassiques,parmi les variétés étio- logiques de l'albuminurie, l'albuminurie dite fébrile, essen¬
tiellement passagère, sans œdème, sans signe d'insuffisance rénale, et qu'il nefaudraitnullementimputer à une lésion du
rein. D'après M. Bouchard, qui a étudié les propriétés du coagulum albumineux obtenu par la chaleur et l'acide acé-
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tique,
l'albumine dans
cesalbuminuries fébriles reste à l'état
de nuage floconneux,
tandis
quequand il y a lésion rénale
elle se rétracterait très rapidementenun
fin dépôt grumeleux.
L'étude du coagulum
aurait donc
unegrande importance
puisqu'elle permettrait d'apprécier l'état du rein. Cette opi¬
nion semble contreditepar les
recherches de M. Lépine, qui
a établi que la
rétractilité plus
oumoins grande du précipité
était enrapportavec le
degré d'acidité ou de densité de l'urine.
Pour MM. Lécorché et Talamon
( Traité de Valbuminurie,
1888),
l'albuminurie relèverait toujours d'une lésion rénale.
Cette opinion
serait la nôtre, si nous avions qualité pour
donner une appréciation.
On
nepeut s'empêcher de penser,
en effet, que dans
les maladies infectieuses où il y a un
degré,
variable
sansdoute, mais constant, élimination des
agents
pathogènes et des toxines microbiennes par le filtre
rénal, l'existence de
l'albuminurie
nesoit pas liée à un cer¬
tain degré
d'altération de l'épitliélium. Il n'y a que de l'albu¬
minurie sans autre signe de
néphrite
parceque la lésion est
légère, et il
n'en reste aucune trace et aucune conséquence
pour
l'avenir justement parce que cette néphrite, en raison
de son peu
d'intensité, était essentiellement curable. Si nous
ne pouvons donner
des
preuvescertaines en faveur de cette
hypothèse, on ne
peut plus vraisemblable et rationnelle, on
nenous donnera d'autre part
de
preuvesplus certaines du
contraire.
Nous pensons donc que
même les cas de varicelle où on ne
constate que de
l'albuminurie peuvent être classés sous la
rubrique«
néphrite varicelleuse
»,réserve faite, bien entendu,
pour ceux
où il pourrait
yavoir d'autres causes de lésion
rénale, telles qu'une
affection aiguë récente ou ancienne ou
une maladie chronique.
ÉTIOLOGIE
On ne voitpasdansles cas
observés de prédominance sensi¬
ble d'un sexesurl'autre. Onrencontre