Utilisation de l’azote des fourrages
vertspar le
mouton encroissance :
influence du stade de végétation, de l’espèce fourragère,
de la fertilisation azotée
etde l’addition d’orge
Élisabeth GRENET C. DEMARQUILLY
J. M. BOISSAU H. BOUSQUET, Madeleine DUDILIEU, Marie JAILLER, Jacquelme JAMOT L. L’HOTELIER
Laboratoire des Aliments
Centre de Recherches de Clermont-Ferrand, LN.R.A.
Theix, Saint-Genès-Cham!anelle, 63IIO Beaumont (France)
Résumé
Trente-cinq échantillons de fourrages verts ont été étudiés : luzerne, ray-grass italien,
ray-grass anglais, fétuque élevée et dactyle récoltés à divers stades de végétation du ier cycle
et à divers âges de repousses. Le 3! cycle de dactyle correspond à 2taux de fertilisation azotée.
Vingt-neuf des fourrages ont été distribués seuls et six, soit seuls, soit avec de l’orge qui repré-
sente dans chaque cas 23 p. 100de la matière sèche totale ingérée. La digestibilité, la quantité ingérée et le bilan azoté ont été mesurés sur des lots de 6 moutons âgés de 15 mois environ et
pesant qo kg en moyenne. La teneur en azote ammoniacal du jus de rumen a été déterminée
avec 2 moutons supplémentaires munis d’une fistule du rumen.
La quantité d’azote retenue varie de - o,5 à -!- 16,2 g par jour. Elle augmente en même temps que la quantité d’azote ingérée. Elle a été diminuée par la fertilisation azotée et n’a pas été augmentée par la supplémentation avec de l’orge.
La quantité d’azote retenue augmente aussi en même temps que la quantité de matière organique digestible ingérée et que la digestibilité du fourrage. Elle diminue quand la teneur en
cellulose brute augmente. Une meilleure estimation de la quantité d’azote retenue est obtenue
en associant la quantité d’azote ingérée à la quantité de matière organique digestible ingérée.
Il existe cependant des différences entre espèces végétales, les ray-grass permettant des réten-
tions d’azote plus élevées que les dactyles à mêmes quantités d’azote et de matière organique digestible ingérées.
La concentration moyenne journalière en azote ammoniacal du jus de rumen est très varia- ble : de 33 à 332 γ/ml. Elle augmente avec la quantité d’azote ingérée. La quantité d’azote excré- tée dans l’urine augmente avec la teneur en azote ammoniacal du jus de rumen. Avec les four-
rages verts l’existence d’un bon équilibre entre les quantités d’azote et d’énergie apportées aux microorganismes du rumen, et absorbées dans l’intestin, permet des rétentions élevées d’azote.
Les différences entre espèces fourragères sont discutées, ainsi que le peu d’intérêt du point de vue
nutritionnel de la distribution d’orge en supplément de fourrages jeunes offerts à volonté.
Introduction
La teneur en matières azotées
apparemment digestibles (M.A.D.)
ne rend pas biencompte
chez le ruminant de laquantité
d’acides aminés absorbée dans l’intes- tingrêle, qui représente
la valeur azotée réelle des aliments. Ces acides aminés ont deuxorigines,
alimentaire et microbienne(CxAr,M!RS
etS YN GE, 1954 ).
Lapremière dépend
de laquantité
d’azoteingérée
parl’animal,
nondégradée,
dans lerumen
(c’est-à-dire
de laquantité
d’azoteingérée
et de la fermentescibilité de cetazote),
la seconde essentiellement de laquantité d’énergie disponible
pour lasynthèse
desprotéines
microbiennes dans le rumen, c’est-à-dire de laquantité
de matière
organique digestible digérée
dans le rumen, du moinsquand
la teneuren azote fermentescible n’est pas un facteur limitant de cette
synthèse protéique
microbienne. En
définitive,
la valeur azotée réelle d’un alimentdépend
de la teneuren azote et de la fermentescibilité de cet azote dans le rumen, de la
quantité
de matière
organique digestible ingérée
et du bonsynchronisme
entre la for-mation
d’ammoniaque
dans le rumen et la fournitured’énergie
auxmicroorga-
nismes du rumen, c’est-à-dire la vitesse de
digestion
de la matièreorganique digestible.
Peu d’études ont été effectuées sur les
fourrages
verts. On saitcependant
que la
quantité
d’azote retenue par l’animal encroissance, qui
est une bonneestimation de la valeur azotée
réelle,
est élevéequand
ilreçoit
desfourrages
vertsjeunes, digestibles,
riches en azote, maisqu’elle
diminue avecl’âge
dufourrage,
en même
temps que
la teneur en azote et en matièreorganique digestible (Mac G
R A HAM
, 19 6 4 ;
Du PI,!SSIS etM!RVE, Ig6g;
RATTRAY etJOYCE, Ig6g;
Mac RAEet
U I , YA TT,
Ig74et HUME et PURSER,I g 74 ). Cependant,
à mêmequantité
d’azoteet
(ou)
de matièreorganique digestible ingérée,
ilpeut
exister des différences entrefourrages,
comme l’ont montréJ OYC E
et NEWTH( I g6 7 )
et RATTRAY etJ OYCE (
I
g6g)
en mesurant la rétentionazotée,
et Mac RAE et UI,YATT( I g7 4 )
en mesurantla
quantité
d’acides aminés absorbée dans l’intestingrêle.
Ellespeuvent résulter,
suivant les
fourrages,
de différences dans la fermentescibilité de l’azote dans le rumen, ou dans la vitesse dedigestion
de la matièreorganique digestible
dans lerumen par suite de modifications dues à
l’espèce,
au stade devégétation
ou à lafertilisation,
azotée notamment. Cette dernièreaugmente
en effet la teneur enazote du
fourrage
et diminue la teneur englucides
solubles et lerapport
azoteprotéique
sur azotetotal,
mais ne modifie pas, ou peu, ladigestibilité
de la matièreorganique (W AI TE, 195 8;
NOWAKOWSKY,19 6 2 ; C AM E RON , 19 66;
REID,J UN G
etM
URR A Y
, 19 66; DEMARQUmY,
1970; HUGUET etGILLET, 1973).
Aussi avons-nous étudié comment varie la
quantité d’azote
retenue par le mouton en croissance recevant desfourrages
verts en relation avec la concentrationen azote ammoniacal du
jus
de rumen, suivant la nature dufourrage,
sadigesti-
bilité et la fertilisation azotée reçue, et
si, éventuellement,
ellepeut
êtreaugmentée
par une
complémentation
enénergie rapidement
fermentescible(céréales).
Lesrésultats
rapportés
ici ont servi de base pour mesurer l’influence de la conservation desfourrages
parensilage
sur la rétentionazotée, qui
feral’objet
d’unepublication
ultérieure.
Matériel et méthodes
Fourrages
étudiésTrente-cinq
échantillons defourrages
verts ont été étudiés au totalprovenant
de 5
prairies
deTheix,
à 800 m d’altitude(luzerne,
ray-grassitalien,
ray-grassanglais, fétuque
élevée etdactyle)
récoltées à divers stades devégétation
du lercycle
et à diversâges
de repousses, et d’uneprairie
de luzerne enplaine (domaine
du C.N.E.E.M.A. à
Montoldre)
récoltée au jer et au 2ecycle ( 30 j.
derepousses) (tabl.
i et2 ).
Le 3e
cycle
dedactyle correspond
à 2 taux de fertilisationazotée,
33,5 unités d’azote et 100 unités d.’azote à l’hectarerespectivement
ont étéappliquées
surchacune des deux moitiés de la
parcelle après
la fauche du 2ecycle.
Trois compa- raisons ont été effectuées.Vingt-neuf
desfourrages
ont été distribués seuls etsix,
soitseuls,
soit avec del’orge représentant
danschaque
cas 23p. 100de la matière sèche totaleingérée.
Qu’ils
aient été distribués seuls ou avec del’orge,
lesfourrages
onttoujours
étéété offerts à volonté
( 10
p. 100 derefus).
Mesures
La
digestibilité,
laquantité ingérée
et le bilan azoté ont été mesurés sur des lots de 6 moutons mâles castrés de raceTexel, âgés
de m mois environ(l’âge
desmoutons variait entre 5 et 16 mois suivant les
lots)
etpesant
5okg
en moyenne(entre
30et6 7 kg)
au début des mesures(le poids
d’un adulte est de 80-100kg).
Nous
disposions
d’un lot de moutons pourchaque espèce fourragère.
Les animauxétaient alimentés avec le
fourrage
vert étudiépendant
une durée minimum de 3 semaines avant lapériode
de mesurequi
était de 6jours.
Les moutons maintenus en cage à métabolisme
équipée
d’unegoulotte
pour la récolte del’urine,
ont été alimentés à volonté en 2repas parjour
à 8 h et 16 h 30.L’herbe
nécessaire aux animaux était fauchéechaque matin, exception
faite de la luzerne cultivée à Montoldrequi
étaitcongelée
et stockée en chambre froide.L’orge
a été distribuée en 2repaségaux
avantchaque
distribution defourrage
vert.Les mesures de
digestibilité
etd’ingestibilité
ont été réalisées selon la méthode deD EMARQUILLY (DE MARQUILLY
etWEISS, 1970 ).
L’urine,
récoltée dans desjerricans
contenant de 50 à 100 ml de solution d’acidesulfurique
R.P. à 30 p. 100, étaitpesée chaque jour
et unequantité
ali-quote
conservée à -!-4 °C jusqu’à
l’issue de lapériode
de mesure.Nous avons
prélevé
dujus
de rumen sur 2 moutonssupplémentaires,
munisd’une fistule du rumen,
juste
avant la distribution du repas du matinpuis
1, 2,3
, 4, 6 et 8 heures
après,
et durant 2jours
consécutifs lors dechaque période
de emesure. Ces animaux étaient alimentés à volonté comme les moutons en lots et leur consommation ramenée au
kg
depoids métabolique
était du même ordre degrandeur.
Analyses
Les échantillons
représentatifs
de l’herbe et del’orge offertes,
de l’herbe refusée et des fècescorrespondant
àchaque période
de mesure ont étéanalysés
pour déterminer leur teneur en
cendres,
en cellulose brute et en azote. Sur lespremiers
échantillons les teneurs en azote et englucides
solubles dans l’eau a40
°C
ont été mesurées : ces derniers ont été estimés par lepouvoir
réducteur(S
OMOGYI
, 1952 )
de l’extrait aqueux. Les échantillons moyens individuels d’urine ont étéanalysés
pour déterminer leur teneur en azote.Les échantillons de
jus
de rumen ont été conservés à - 15 °Caprès
additionde chlorure de sodium à z2,5p. IOOdans la
proportion
de i volume dejus
de rumenpour 4 volumes de solution
jusqu’au
moment de la détermination de leur teneuren azote ammoniacal à
l’auto-analyseur
Technicon.Résultats
Fourrages
verts distribués seulsLa
digestibilité
de la matièreorganique,
des matièresazotées,
de la cellulose brute etl’ingestibilité
des échantillons étudiés varient dans desproportions impor-
tantes,respectivement
de 59,2 à81,3
p. 100, 47,2 à76,5
p. 100,39,8
à83,4
p. 100 et de 544 à I 259 g de matièreorganique digestible
parjour (tabl.
i et2 ).
Cesvariations traduisent essentiellement les différences liées au stade de
végétation
des
fourrages puisque
celui-ci varie du stade feuillu au stade floraison. Elles tra- duisentaussi,
mais à un moindredegré
les différences entreespèces végétales :
pour une même
digestibilité
de la matièreorganique,
la cellulose brute de la luzerne est moinsdigestible
maisl’ingestibilité
de cefourrage
estplus
élevée que celle desgraminées.
La
quantité
d’azoteingérée (xi)
s’échelonne entre 12,2 et 61 g parjour.
Lesquantités
d’azote excrétées dans les fèces(Yf) et
dans l’urine(Yu)
et laquantité
d’azote retenue
(Yr)
varientrespectivement
de6,6
ài8,2;
de 5,9 à 35,3 et de- 0,5 à
1 6, 2
g parjour (tabl.
i et2 );
elles sontplus
élevées pour les luzernes que pour lesgraminées
et diminuentquand
la maturité dufourrage augmente
pour le ray-grass italien et ledactyle
de jercycle,
laquantité
d’azote retenue devenantmême
négative
pour ledactyle
à la floraison(la quantité
d’azote retenue trèsélevée et très variable :
1 6, 2
2 g * z2,o obtenue pour l’échantillon n° 5 est vraisem- blablement due à unepériode d’adaptation trop
courte des animauxqui,
enpleine période
desécheresse,
sontpassés
d’unrégime
defourrages
pauvres à unrégime
de
fourrage
vertjeune
et trèsdigestible).
Elles sont étroitement liées à laquantité
d’azote
ingérée
comme le montrent les relations suivantes calculées pour tous les échantillons(>1
=2 6)
ou pour lesgraminées
seules(n
=23 ) :
La
quantité
d’azote retenueexprimée
en p. 100 de l’azoteingéré
varie de- 4,z à
2 8, 4
p. 100, etexprimée
en p. 100de l’azotedigestible
de - 9,1à 39,4p. Ioo.Elle diminue avec
l’âge
dufourrage
au cours du Wrcycle
de croissance et est unpeu
plus
élevée pour les repousses que pour lespremiers cycles
en moyenne.L’augmentation
de la fertilisation azotée de 33,5 à 100kg
d’azote par ha alégèrement
accru la teneur en azote dudactyle,
ainsi que ladigestibilité
de lamatière
organique,
des matières azotées et de la cellulose brute(de
2 à q.points)
mais a diminué de 4,5 p. 100
l’ingestibilité.
Laquantité
d’azoteingérée
a été peumodifiée,
laquantité
d’azote excrétée dans les fèces abaissé, mais,
enrevanche,
laquantité
d’azote excrétée dans l’urine a très nettementaugmenté,
de sorte que laquantité
d’azote retenue adiminué;
en moyenne cette dernière estpassée
de2,77 à 0,10 g par
jour (tabl. 2 ).
Fourrages
distribués avec del’orge
La distribution
d’orge
avec lesfourrages
verts a un effet variable sur ladiges-
tibilité de la matière
organique
de la ration(fig. z).
Elle nel’augmente
pas pour lesfourrages
dont ladigestibilité
de la matièreorganique
estélevée, supérieure
à70p. 100, elle a même tendance à la
diminuer,
tandis que pour lesfourrages
dontla
digestibilité
est inférieure à 70 p. 100 ellel’augmente jusqu’à plus
de 6points
pour le ray-grass italien à la floraison.
L’orge
diminue ladigestibilité
des matièresazotées de la
luzerne,
diminue ladigestibilité
de la cellulose brute de la luzerne et des ray-grass; elle modifie peu laquantité
de matièreorganique digestible ingérée
ou
l’augmente
un peu pour deux ray-grass du iercycle
et pour la luzerne(tabl. 3 ).
Les
quantités
d’azoteingérées
sont relativement peu modifiées. Les relations entre, d’unepart,
lesquantités
d’azote excrétées dans les fèces et dans l’urine ou la quan- tité d’azote retenue et, d’autrepart,
laquantité
d’azoteingérée exprimée
en g parjour,
pour lesfourrages
seuls et lesfourrages
avec orge sontreprésentées
surla
figure
2. Lespentes
des deux droites derégression
de laquantité
d’azote fécal excrétée(Yf
etYf )
en fonction de laquantité
d’azoteingérée (xio et xi) pour les fourrages
avec ou sans orge, sontsignificativement
différentes l’une de l’autre : l’additiond’orge
à cesfourrages
verts a donc entraîné uneaugmentation signi-
ficative de la
quantité
d’azote fécal à mêmequantité
d’azoteingérée.
Il en est demême si la
quantité
d’azote fécal estrapportée
à laquantité
de matière sècheingérée (Vii
etYfoI) :
En
revanche,
les autres droites derégression
liant laquantité
d’azote urinaireou la
quantité
d’azote retenue à laquantité
d’azoteingérée
ne sont passignifi-
cativement différentes que le
fourrage
soit distribué seul ou avec orge. Les modi- fications nonsignificatives
de laquantité
d’azote retenue sont donc duesunique-
ment aux variations de la
quantité
d’azoteingérée
consécutives à l’additiond’orge.
Liaisons entre la
quantité
d’azote retenue,la
com!osition chimique
et la valeur alimentaire desfourrages
La
quantité
d’azote retenue(NR) exprimée
eng /jour,
est en liaisonpositive
très
étroite,
nous l’avons vu, avec laquantité
d’azoteingérée (NI)
elle-mêmeexprimée
eng /jour,
mais elleaugmente également
en mêmetemps
que laquantité
de matière
organique digestible ingérée (MODI
eng /jour)
et que ladigestibilité
du
fourrage.
Mais la relation avec cette dernière n’est passignificative quand
onajoute
les 3 luzernes auxgraminées.
Enrevanche,
laquantité
d’azote retenuediminue
quand
la teneur en cellulose bruteaugmente (tabl. 4 ).
En
prenant
encompte
une deuxièmevariable,
enplus
de laquantité
d’azoteingérée,
on améliore un peu les liaisonsobtenues,
la meilleure étant celle avec laquantité
de matièreorganique digestible ingérée (R
=0 ,88
ou 0,00 suivant quen = 23 ou
2 6).
Si toutes les variables sontexprimées
en g parkg
depoids
méta-bolique (P 0 , 75 )
afin depouvoir
comparer des moutons depoids différent,
on obtientla relation suivante pour les 23
graminées
+ les 3 luzernes :Cette relation montre
qu’un
mouton àjeun
doitperdre
de l’ordre de 0,53 g d’azote parkg
depoids métabolique
etqu’il
fixequand
ilreçoit
desfourrages
verts en moyenne o,2 g d’azote par g d’azote
ingéré
et io g d’azote parkg
de matièreorganique digestible ingéré.
Cependant,
il existe des différences entre lesespèces végétales,
enparticulier
entre les ray-grass
(+
deuxfétuques)
et lesdactyles :
pour une mêmequantité
d’azote et de matière
organique digestible ingérée,
lespremiers permettent
une rétention d’azotebeaucoup plus importante
que les seconds. Leséquations
s’écri- vent, toutes les variables étantexprimées
en g parkg
depoids métabolique (P 0!75) !
Si l’on
prend
commeexemple
le ray-grassn° 4 (tabl. i)
avec MODI =85 7
et NI = 30,3, et le
dactyle
n° 10 avec 3IODI =86 4
et NI = 30,9(donc
des valeurs très voisines pour les deuxespèces)
on trouve NR =0 , 3 6
pour le ray-grass et NR = 0,20 pour ledactyle.
La
prise
en considération d’une troisième variable n’amélioreplus laliaison,
à
l’exception
de celle obtenue en associant à laquantité
d’azoteingérée,
la quan- tité de matièreorganique digestible ingérée
et la teneur englucides
solubles.La
quantité
d’azote retenue,exprimée
en p. 100 de l’azoteingéré dépend
des mêmes critères que la
quantité
d’azote retenue,exprimée
eng !jour,
maisles liaisons sont
généralement
moins étroites.La
quantité
d’azote retenue(NR
en g parjour) dépend
de laquantité
de pro-téines, digestibles
dansl’intestin, ingérée (P.D.I. (i)
en g parjour) :
Si on
exprime
ces résultats en g parjour
et parkg
depoids métabolique
pour comparer des moutons depoids
différent :Concentration en azote ammoniaeal du
jus
de rumenLa concentration moyenne
journalière
en azote ammoniacal dujus
de rumen(N — NH,)
est très variable d’unfourrage
à l’autre : de 33 à 332 y/ml.
Elle est(r) I,a quantité de protéines digestibles dans l’intestin ou P.D.I. est estimée à partir :
- d’une part de la fraction de l’azote alimentaire qui n’est pas dégradée dans le rumen et qui est digérée dans l’intestin : ce sont les protéines digestibles dans l’intestin d’origine alimentaire ou PDIA qui
sont calculées à partir de la quantité de matières azotées totales dans l’aliment (MAT), de la solubilité de celles-ci (S) et de la digestibilité vraie de ces protéines dans l’intestin qui est estimée à 75et $5p. cent respectivement pour les graminées et les luzernes, suivant la formule :
roo - S
PDIA g;kg de matière sèche = 0,65 MAT g/kg de matière sèche x xoox digestioilité vraie;
- d’autre part de la fraction d’azote microbien qui est synthétisé dans le rumen dont la synthèse est
limitée : soit par la quantité d’énergie disponible, ce sont les PDIME qui sont calculées d’après la formule : PDIME g,’kg de matière sèche = 75,6 M.O.D. ou matière organique digestible en kg/kg de matière sèche, soit par la quantité d’azote fermentescible disponible, ce sont les PDIMN qui sont calculées d’après
la formule :
/ S B
PDIMN g/kg de matière sèche ! M.A.T. g /kg de matière sèche x
(o,xg6
+o,364 ! )
(JOUKN E
T et VÉRITÉ, 1977)
plus
élevée pour les luzernes que pour lesgraminées
et elle diminue avecl’âge
du
fourrage.
Elleaugmente
en effet en mêmetemps
que la teneur en azote desfourrages (tabl. 5 ),
laquantité
d’azote total ou d’azote solubleingérée,
ou mieuxencore, les
rapports
entre laquantité
d’azote total ou d’azote solubleingérée
et la
quantité
de matièreorganique digestible ingérée.
Elle est liéenégativement
à la teneur en
glucides
solubles.Elle
augmente
avec la différence rDiMrr - PDIME(p. 24 ) (fig. 3 )
comme suit :N —
NH 3
= 133,17 + 3,95(PDIMN- PDIM E) *
40,4o r =0,88
n = 29. Laquantité
d’azote excrétée dans l’urine est liéepositivement
à la concen-tration moyenne en azote ammoniacal du
jus
de rumen ou à la différence entre la concentration maximale(T max.)
atteinteaprès
le repas et la concentration initiale mesurée avant le repas(To),
soit T max — To.L’augmentation
de fertilisation azotée de 33,5 à 100unités d’azote à l’hectare modifie peu la concentration en azote ammoniacal dujus
de rumen(tabl. 2 ).
Memême,
cette dernière est en moyenneinchangée
par lacomplémentation
avecl’orge (tabl. 3 ).
Discussion
Nos résultats montrent que la
quantité
d’azote retenue par les moutonspeut
varier considérablement suivant lefourrage qu’ils ingèrent;
avec du dac-tyle
au stade floraison les moutonsperdent
o,5 g d’azote parjour
tandisqu’à l’opposé
avec de la luzerne ou du ray-grassjeunes
ils retiennentjusqu’à
la ou I5g d’azote parjour.
Laquantité
d’azote retenue est d’autantplus
élevée que les quan- tités d’azote et de matièreorganique digestible ingérées
sontimportantes.
Lessynthèses
microbiennes dans le rumen ont besoin à la foisd’énergie, apportée
par la matière
organique digestible,
et d’azote pour être efficaces. Onpeut
estimerd’après
le calcul des PDIquelle
est lapart,
dans l’azote arrivant au niveau duduodénum, qui provient
de l’azote alimentaire etquelle
est cellequi provient
del’énergie,
c’est-à-dire l’azote microbien. C’est ainsi que pour une luzerne depremier cycle,
dedigestibilité
de la matièreorganique 6 3 , 4
p. 100et renfermant1 8,6
p. Ioo de matières azotées(échantillon
n° I, tabl.1 )
51 p. 100de l’azote arrivant dans le duodénum estd’origine
alimentaire et 4g p. 100d’origine microbienne,
et pourun ray-grass italien de
digestibilité
de la matièreorganique
74,4 p. 100 et renfer- mant 13,9 p. 100 de matières azotées(échantillon
n°4 )
44,5 p. 100 de l’azote arrivant dans le duodénum estd’origine
alimentaire et 55,5p. Iood’origine
micro-bienne. Ces
proportions respectives
d’azoted’origine
alimentaire et microbien sont très voisines de celles mesurées par Ur,yATT et al.( 1975 )
sur desfourrages
verts.
D’après
nos calculs laquantité
d’azote retenueaugmente
linéairementavec la
quantité
de PDIingérée,
cequi
prouve ainsiqu’il
existe un bonsynchro-
nisme chez le mouton en croissance recevant de l’herbe verte entre les
quantités
de
protéines
etd’énergie
absorbées. Eneffet,
il n’est pas suffisant pour que la quan- tité d’azote retenue soitélevée,
que laquantité
d’acides aminés absorbée au niveaude l’intestin le
soit,
encore faut-il quel’énergie
absorbée soit suffisante pour fixerces acides aminés
(B L AC K
etGRIhFITHS, 1975).
La
quantité
d’azote retenuedépend
aussi de ladigestibilité
de la matièreorganique
dufourrage
vert et cela vraisemblablement parce que cette dernière est un bon critère non seulement de laquantité
de matièreorganique digestible ingérée
mais aussi de la vitesse dedégradation
de cette matièreorganique
dans lerumen.
L’énergie
des membranes est libéréeplus
ou moins vite suivant leurdegré
de
lignification.
Laquantité
d’azote retenue est liéenégativement
à la teneur encellulose brute des
fourrages.
La relation estplus
étroitequ’avec
ladigestibilité
de la matière
organique
notammentquand
on considère l’ensemble desgraminées
et des luzernes pour
lesquelles
la liaison avec ladigestibilité
n’est passignificative.
Pour une même teneur en cellulose brute les luzernes sont en effet moins
digestibles
que les
graminées
mais elle sontdigérées beaucoup plus rapidement (D EMARQUILLY
et
C H E NOS T, 19 6 9 , DEMARQUILLY
etJARRIGE, 1973).
Pour une même
quantité
d’azote et de matièreorganique digestible ingérée
nous avons vu que la
quantité
d’azote retenue était biensupérieure
pour les mou- tons alimentés avec des ray-grass que pour ceux alimentés avec desdactyles. Or,
on sait
(JARRIG!
et MINSON,19 6 4 )
que lacomposition
de la matièreorganique digestible
de ces deuxespèces
est très différente. A stade devégétation comparable
la matière
organique digestible
des ray-grass contientbeaucoup plus
deglucides
solubles que celle des
dactyles,
mais moins de membranesdigestibles. L’énergie
fournie par les ray-grass est
beaucoup plus rapidement disponible
pour les syn- thèsesmicrobiennes, grâce
auxglucides solubles,
que celle desdactyles
et doitpermettre
une meilleure fixation de l’azote. Il estégalement possible
que les matières azotées desdactyles
soientplus
fermentescibles dans le rumenque
celles des ray-grass.On sait que la concentration en acides gras volatils totaux du
jus
de rumenn’atteint souvent son maximum que 3 ou 4 heures
après
le début du repas alors que la concentration en azote ammoniacal atteint son maximumbeaucoup plus rapidement.
La libérationd’énergie
est donc souventplus
lente que la libérationd’ammoniaque
et ilpeut
alors y avoir des « fuites »d’ammoniaque,
notammentdans les toutes
premières
heuresqui
suivent le repas si laproduction d’ammoniaque
est
supérieure
à lacapacité
deprotéosynthèse
desmicroorganismes
du rumen. Cetazote en excès est excrété en
partie
dans l’urine et est doncperdu
pour l’animal.On constate d’ailleurs
qu’effectivement
laquantité
d’azote excrétée dans l’urine est d’autantplus
élevée que la concentration en azote ammoniacal dujus
de rumenest élevée.
L’ammoniaque
est d’autant mieux utilisée pourla prolifération
micro-bienne que la
digestion
de la matièreorganique
fournissantl’énergie
nécessaireest elle-même
rapide.
Onpeut
en voir comme preuve la liaisonnégative
observéeentre la teneur en azote ammoniacal du
jus
de rumen et la teneur englucides
solubles des
fourrages,
cesglucides
constituant une sourced’énergie
immédia-tement
disponible
pour lesmicroorganismes
du rumen.En
revanche,
le faitqu’avec
desfourrages
pourlesquels
la différence PDIMN- PDIME est inférieure à o(fig. 3 )
on trouve encore de l’azote ammoniacal dans lejus
de rumen traduit l’existence d’unrecyclage important
del’ammoniaque
auniveau du rumen.
Sinon,
eneffet, lorsque
laquantité
d’azote fermentescible estplus
faible que laquantité d’énergie disponible
la concentration en azote ammo-niacal du
jus
de rumen devrait êtrepratiquement
nulle.L’apport d’orge
avec lesfourrages
verts a entraîné uneaugmentation
del’excrétion d’azote dans les
fèces,
mais pas de variationsignificative
de l’excrétion d’azote urinaire ni de la rétention azotée. Enrevanche,
Du PLESSIS et :BIERVE(ig6g)
ont obtenu uneaugmentation
de la rétention azotée enajoutant
de l’ami-don ou de la farine de maïs à du
fourrage
vert delégumineuses.
Pour lesfourrages
verts que nous avons étudiés et
qui
sont en moyenne trèsdigestibles
laquantité
d’azote retenue est
déjà
trèsimportante
avec lesfourrages
distribuésseuls,
parce que lasynthèse protéique
microbienne estgrande,
etl’apport d’orge qui n’aug-
mente pas la
quantité
de matièreorganique digestible ingérée
ni ladigestibilité,
donc vraisemblablement pas la vitesse de
digestion,
a dû peuaugmenter
lasynthèse protéique
microbienne dans le rumen. Cela serait d’ailleurs confirmé par le fait quel’apport d’orge
n’a pas fait diminuer la teneur en azote ammoniacal dujus
derumen.
L’apport d’orge
n’a pasaugmenté
ladigestibilité
de la matièreorganique
dela ration totale vraisemblablement parce
qu’il
a diminué ladigestibilité
des mem-branes du
fourrage
dans le rumen. Le contenudigestif
arrivant au niveau dugros intestin doit donc renfermer
davantage d’énergie
quelorsque
lesfourrages
sont distribués seuls par suite de la
présence
de membranes nondégradées.
Cetteénergie
doitpermettre
la fixation d’uréerecyclée
au niveau du caecum. L’azote fécal est alors accru de l’azote desmicroorganismes
ainsi formés(O RSKOV et al., 1970).
Dans nos
résultats,
laquantité
d’azote retenue a été diminuée par la fertili- sation azotée par suite d’uneperte
accrue d’azote par la voie urinaire. Lerapport
azote
ingéré
sur matièreorganique digestible ingérée
est un peuaugmenté
par la fertilisation azotée. Dans la mesure où celle-ci modifie peu ladigestibilité
de lamatière
organique
et par là vraisemblablement la vitesse dedigestion, qu’elle
n’augmente
pas laquantité
de matièreorganique digestible ingérée
etqu’elle
diminue la teneur en
glucides solubles,
il n’est pas étonnantqu’elle
n’améliorepas la rétention azotée. HoGnrr et WESTON
(ig6g)
avec de l’avoine surpied,
etBEE V E
Ret THOMSON
(r 973 )
avec du ray-grassanglais,
ont montré que laquantité
d’azote arrivant dans le duodénum était même diminuée par la fertilisation azotée.
En
conclusion,
les bilansazotés,
et donc les croîts lesplus
élevés sont obtenussoit avec des
graminées jeunes
etdigestibles,
très riches englucides solubles,
soitavec des
luzernes,
moinsdigestibles,
maisqui
sontingérées
en trèsgrandes
quan- tités etdigérées
trèsrapidement.
Par
ailleurs,
la distributiond’orge
avec lesfourrages jeunes présente
un faibleintérêt du
point
de vue nutritionnel.Accepté pour publication en juillet z977.
Summary
Utilization
of fresh herbage nitrogen by g y owing sheep.-
.’influence of herbage growth stage, herbage species, nitrogen fertilization
and
barley supplementation
W Thirty-five fresh herbage samples were used in this study: lucerne, Italian rye-grass,
perennial rye-grass, tall fescue, and cocksfoot harvested at different ist growth stages and at various regrowth ages. The 3rd growth of cocksfoot corresponded to 2nitrogen fertilization levels.
Twenty-nine herbage samples were offered alone and six, either alone or with barley repre-
senting in each case 23 per cent of the total dry matter intake.
The herbages were given ad libitum (10per cent refusals). Digestibility, ingestibility and nitrogen balance were measured on groups of 6 castrated male sheep, about 12 months old and weighing 5o kg, on an average. Pre-experimental periods lasted 3 weeks and periods of measure-
ments 6 days. The sheep received 2 meals per day ad libitum. The grass required for the ani- mals was cut every morning, except lucerne no i (Table i) which was frozen. Barley was offered
in two equal meals before each fresh herbage feeding.
Rumen liquor was taken from 2supplementary sheep fitted with a rumen fistula, just be-
fore the morning meal, then i, 2, 3, 4, 6 and 8 hours thereafter and for 2consecutive days at each period of measurement.
2
° The results of the measurements are given in tables i and 2. The amount of nitrogen
retained (Y) varied from - 0.5 to -!- 16.2g per day. It was closely related with the amount of nitrogen ingested (xi in g per day):
Nitrogen fertilization reduced nitrogen retention from 2.!! to 0.10g per day, on an average
(Table 2).
3
° Barley offered together with fresh herbages had a variable effect on the organic matter digestibility of the ration (Fig. i). The latter was not increased in the case of forages with a high digestibility (> 70 per cent) whereas an increase was observed when the digestibility of
the forages was lower than 70 per cent. Relations between urinary and fecal N-excretion or
N-retention, on the one hand, and N intake expressed in g per day, on the other, for herbages
alone or for herbages -)- barley are given in figure 2. Nitrogen retention was not significant by changed by the addition of barley.
4
° Nitrogen retention in g per day increased with the digestible organic matter intake
and the digestibility of the forages. It decreased with increasing crude fibre content (Table 4).
On the basis of nitrogen and digestible organic matter intakes the amount of nitrogen retained by the sheep can be accurately forecasted (v = 0.88 or o.go, table 4).
However, there were differences between the plant species: for the same nitrogen and digest-
ible organic matter intake, rye-grass led to a higher N-retention than cocksfoot.
Nitrogen retention (NR in g per day) increased with the amount of P.D.I. (i) ingested (in g per day):
(r) P.D.I. = protein truly digestible in the small intestine.