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Observations sur le deuxième rapport sur les ressources naturelles partagées : eaux souterraines transfrontières établi par M. Chusei Yamada

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Observations sur le deuxième rapport sur les ressources naturelles partagées : eaux souterraines transfrontières

établi par M. Chusei Yamada

Observations présentées par Jochen SOHNLE

1

pour la réunion à l'UNESCO les 17 et 18 juin 2004

Introduction : Les ressources en eau

2

souterraine sans lien physique avec un système de cours d’eau ou un bassin hydrographique n'ont fait l’objet, jusqu’à une époque récente, que d'une réglementation internationale rare et isolée.

3

Certains instruments anciens réglementent les fontaines, puits et sources situés sur le tracé d’une frontière, sans se préoccuper si elles sont reliées ou non à un cours d’eau international.

4

La vulnérabilité des nappes phréatiques exige un traitement particulier qui ne permet pas toujours une simple transposition des règles applicables aux eaux superficielles et ni même celles applicables aux cours d'eau au sens de la Convention de New York de 1997. C’est en ce sens que la Convention d’Helsinki sur la protection et l’utilisation des cours d’eau transfrontières et des lacs internationaux du 17 mars 1992 dispose que „ des mesures spécifiques supplémentaires soient prises pour éviter la pollution des eaux souterraines “ (art. 3 par. 1 k), imitée par sa convention d’application du 29 juin 1994 relative à la protection du Danube (art. 6 par. b).

D’après Julio Barberis, la règle de l'utilisation rationnelle et équitable revêt dans le contexte des eaux souterraines un caractère plus écologique dans la mesure où il convient "de préserver la ressource par l'adéquation du régime d'utilisation au rythme de sa recharge".

5

De même, en vertu du Projet de Charte pour la gestion des eaux souterraines du 24 décembre 1987, adopté dans le cadre de la C.E.E.(N.U.), il faut réserver „ les eaux souterraines aux utilisations qui exigent des eaux de qualité élevée, en particulier pour la consommation humaine et animale “ (art. 4 in fine). Cette gestion doit s’étendre à l’ensemble des aquifères, même en dehors des bassins hydrographiques (ibid. art. 6 par. 2). Malgré tout,

1 Maître de Conférences à la faculté de droit et d'économie de l'Université de Chambéry

2 Comp. Jochen Sohnle, Le droit international des ressources en eau douce : solidarité contre souveraineté, La documentation française, 2002 (606 pages), p. 115-118

3 C.E.E. (N.U.), La législation des eaux souterraines dans la région de la CEE, Rapport établi sous les auspices du Comité des problèmes de l’eau de la CEE, N.U. New York, 1987, p. 34 ; Robert Rosenstock, Rapporteur spécial, 2e Rapport sur le droit relatif aux utilisations des cours d’eau internationaux à des fins autres que la navigation pour la C.D.I. 21.04.1994, doc. A/CN.4/462, annexe sur les eaux souterraines captives „ sans rapport avec le cours d’eau “, par. 15.

Doctrine : Pour M. Wolfrom (Marc Wolfrom, L'utilisation à des fins autres que la navigation des eaux des fleuves, lacs et canaux internationaux, Pedone Paris 1964, p. 7, 8 et 235), le problème peut être traité dans le cadre des eaux superficielles. En revanche, pour Lederle (Lederle, Das Recht der internationales Gewässer - unter besonderer Berücksichtigung Europas, Eine völkerrechtliche Studie von Dr. Lederle, Regierungsrat beim badischen Staatsministerium, 1920, J. Bensheimer/Mannheim, Berlin, Leipzig, p. 8), les sources d’eau constituent un secteur à part entière du droit international de l’eau.

Comp. d’une manière plus générale : C.D.I. 1994, Résolution sur les eaux souterraines transfrontières, préambule al. 3. Comp. Recommandation 629 (1971) relative à la protection de la nappe phréatique de la plaine rhénane de l’Assemblée du Conseil de l’Europe du 22 janvier 1971, par. 6 ; Echange de notes de Mexico et de Tlatelolco du 30 août 1973 constituant un accord relatif au problème de la salinité du fleuve Colorado confirmant la Minute n° 242 de la Commission Etats Unis - Mexique sur la frontière internationale et les eaux, Mexique, Etats-Unis, par. 5.

4 Comp. Traité de Bayonne du 2 déc. 1856 pour déterminer la frontière depuis l’embouchure de la Bidassoa jusqu’au point où confinent le département des Basses-Pyrénées, l’Aragon et la Navarre, France, Espagne, art.

XII ; Traité de frontière du 29 sept. 1864, Espagne, Portugal, art. 28 ; Accord de Londres des 2 et 9 février 1888 relatif à la Côte Somali, France, Royaume Uni, n° 1 et 2 ; Convention de Lisbonne du 23 juin 1926 délimitant la frontière entre les deux pays du confluent du fleuve Cuncos avec la Guadiana jusqu’à l’embouchure de ce dernier, Espagne, Portugal, art. 11.

5 Julio A. Barberis, Le régime juridique international des eaux souterraines, AFDI 1987, p. 153, 154 ; également le même, International groundwater resources law, FAO, Legislative Study n° 40, 1986, p. 48.

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les instruments conventionnels mentionnant les nappes non reliées à un cours d’eau superficiel restent une rareté, tel l’Accord du 18 juillet 1990 relatif aux ressources en eau communes au Nigeria et au Niger (art. 9 par. b

6

). Le Projet de Traité de Bellagio de février 1989 sur les eaux souterraines transfrontières insiste sur l’état insuffisant de protection et de contrôle de ces eaux (préambule par. 4) et propose une protection par le biais de zones de conservation des eaux souterraines transfrontières (articles VI-VIII).

Toutefois, depuis une période récente, les nappes souterraines captives font l’objet d’une réglementation générale. A l’image de la Résolution de Séoul sur le droit relatif aux eaux souterraines internationales, adoptée par l’I.L.A. en 1986 (article. 1), la Convention d’Helsinki de 1992 vise indistinctement toutes les eaux souterraines (et superficielles) transfrontières sans exiger une interconnexion quelconque (art. 1

er

, alinéa 1). Le Protocole de Londres sur l’eau et la santé du 17 juin 1999 suit en cela sa convention mère en définissant l’expression "eau souterraine" comme eau présente sous la surface du sol dans la zone de saturation et en contact direct avec le sol ou le sous-sol (art. 2 par. 3). Cette définition consacre d’une manière particulièrement fidèle la définition proposée par les sciences exactes.

Dans certaines régions, les eaux souterraines captives font également l’objet d’une réglementation spécifique.

7

Enfin, rappelons seulement que la discussion qui s’est déroulée au sein de la C.D.I.

8

s’est prolongée lors des travaux préparatoires intergouvernementaux de la future Convention de

6 Article 9 : "Groundwater resources shall not be accounted for the purpose of equitable sharing determination unless: (a) such resources are part of shared river basins within the meaning of Article 1, paragraph (3); or (b) such resources lie in whole or only part within the shared river basins and are bi-sected by common frontier between the Contracting Parties." A contrario, exclusion des eaux souterraines non reliées.

7 Sur la controverse non résolue des eaux souterraines dans la vallée de Mexicali et les eaux souterraines transfrontières en général (aquifères de la région El Paso/Ciudad Juárez, de la région Hueco et Mesilla Bolson, de Santa Cruz) opposant le Mexique et les Etats-Unis, comp. Sánchez, in : Edward H.P. Brans, Esther J. de Haan, André Nollkaemper, Jan Rinzema (éditeurs), The Scarcity of Water – Emerging Legal and Policy Responses, Kluwer Law International, London, The Hague, Boston, 1997, p. 263, 264, 266-268. Sur le conflit au Moyen Orient : Eran Feitelson, Marwan Haddad, Management of Shared Groundwater Resources : The Israeli-Palestinian Case with an International Perspective, Kluwer Academic Publishers, Boston, Dordrecht, London, 2001.

Au Moyen Orient, quatre nappes captives sont particulièrement importantes. L’aquifère nubien sous la Libye, l’Egypte, le Soudan et le Tchad, l’aquifère Disi sous la Jordanie et l’Arabie Saoudite, l’aquifère Araba/Arava sous Israël ou la Jordanie et l’aquifère de montagne sous la Cis-jordanie et Israël. En ce qui concerne la nappe souterraine partagée d’Araba/Arava, le Traité de paix intervenu du 26 octobre 1994 entre Israël et la Jordanie s’était efforcé de mettre fin à un conflit ancien entre les deux pays (art. 6 par. 1, annexe II art. III par. 1). En Cisjordanie, Israël contrôlait les nappes souterraines et les forages, seules sources d’eau signifiantes dans la région, en permettant à ses colons de creuser des puits très profonds, ce qui restreignait le nombre et la profondeur des puits arabes. Cette pratique a causé l’assèchement des puits arabes et a forcé la population arabe de migrer. Le traité de 1994 établit un régime juridique précis des puits utilisés par Israël qui se situent avec leurs systèmes associés sur le côté jordanien de la frontière et tombent sous souveraineté jordanienne. Ces utilisations sont désormais réglementées : Israël doit respecter à l’égard de la Jordanie certaines limites de quantité et de qualité (annexe II art. IV). Les acquifères cisjordaniens sont également pris en considération dans la réglementation sur l’eau dans le cadre de l’Accord intérimaire relatif à la Cisjordanie et la bande de Gaza (annexe III, appendice 1, art. 40, par. 3 (a) et complément (schedule) 10, conclu le 28 septembre 1995 entre Israël et l’O.L.P. et donc l’application dépendra de l’issue du conflit actuel qui a surgi entre l’Autorité paléstinienne et le Gouvernement d’Israël. (comp. V. Rosenstock, 2e rapport pour la C.D.I. 21.04.1994, doc.

A/CN.4/462, annexe sur les eaux souterraines captives „ sans rapport avec le cours d’eau “, par. 2 ; Benvenisti, Collective action in the utilization of shared freshwater : The challanges of international water resources law A.J.I.L. 1996, p. 389 ; Donkers, in : Brans et al. (éd.) 1997, p. 137, 139-141. V. aussi : Stephen McCaffrey, A Human Right to Water: Domestic and International Implication G.I.E.L.R., 1992, p. 6 ; Tarasofsky, International Law and Water Conflicts in the Middle East, E.P.L. 1993, p. 70, 71; Maurizio Arcari, Il regime guiridico delle utilizzazioni dei corsi d’acqua internazionali – principi generali e norme sostanziali, Università degli studi droit international Parma, Pubblicazioni della facoltà di guirisprudenza, nuova serie 25, Padova, CEDAM 1998, p. 60, 61).

8 Au sein de la C.D.I., les nappes captives ont fait l’objet de vives discussions. Si pour certains membres elles avaient dû être inclues dans le Projet d’articles de 19948, la version finale les exclut. Toutefois, la C.D.I. a joint à

(3)

New York de 1997. Tandis que certaines délégations militaient en faveur d’une prise en compte large des eaux souterraines

9

, le texte final correspond à l’idée restrictive exprimée dans le projet de la C.D.I., à savoir la prise en compte des seules eaux souterraines reliées à un cours d'eau au sens de la Convention. Malgré tout, il ne fait pas de doute qu'un certain nombre de principes de la Convention de NY peuvent, grosso modo, être appliqués mutatis mutandis aux eaux souterraines non reliées (comp. 2

e

rapport de M. Yamada, n° 7). Toutefois, il me semble, toujours en accord avec le second rapport du rapporteur spécial de C.D.I., M.

Chusei Yamada, sur les ressources naturelles partagées : eaux transfrontières, que d'autres principes doivent être adaptés d'une manière particulière aux eaux souterraines. C'est à ce propos que je me permets de formuler les observations suivantes.

A) observations sur le terme „aquifère“

-Article 1 : champ d’application de la présente convention :

"La présente convention s’applique aux utilisations de systèmes d’aquifères transfrontières et d’autres activités qui ont ou qui peuvent avoir un impact sur de tels systèmes et des mesures de protection, préservations et gestion de tels systèmes."

-Article 2 : "utilisation des termes (a) : „aquifère“ signifie une formation rocheuse perméable contenant de l’eau capable de fournir des quantités d’eau exploitable"

-commentaire n° 17 : "usefull groundwater" (utile, utilisable)

Critique 1 : Le choix de ce terme semble limiter le champ d’application de la Convention à une utilisation économique et utilitaire de l’eau évacuant l’aspect environnemental et écologique alors que le commentaire se propose de faire un projet de traité environnemental (commentaire n° 15 in fine).

Le choix de ce terme semble exclure notamment les eaux difficilement exploitables (au moins celles qui le sont actuellement

10

) ou non exploitables, parmi lesquelles on trouve notamment les catégories suivantes :

- les eaux souterraines liquides douces inexploitables à cause d’un accès difficile (nappes très profondes, notamment captives/fossiles)

11

son projet de 1994 une Résolution séparée sur les eaux souterraines transfrontières qui vise ces eaux souterraines lorsqu’elles n’ont pas de rapport avec un cours d’eau international (préambule alinéas 2 et 3). Les nappes captives peuvent être régies par les principes énoncés dans le Projet d’articles de 1994 relatif aux cours d’eau internationaux (préambule alinéa 5 et par. 1), en particulier le recours, le cas échéant, aux procédures de règlement de différend conformément à l’article 33 du Projet ou à toute autre manière convenue est proposé (par. 3). D’une manière générale la conclusion d’accords interétatiques portant sur les nappes captives est recommandée (par. 2).

9 En particulier la délégation de l’Egypte, appuyée par celles des Pays-Bas, insiste sur l’importance des eaux souterraines qui n’aboutissent pas à un point d’arrivée commun (C/R 6e Comm. 1996, SR.23, n° 50, 52 et C/R 6e Comm. 1997, SR.52, n° 37). La proposition en ce sens est écartée à cause du problème très technique qu’elle pose. Finalement l’Egypte déclare que ces eaux font bien partie du système (ibid. 1997, SR.58, n° 2 et SR.62, n°

37).

10 Il ne serait peut-être pas inutile de préciser dans le commentaire si le terme exploitable se réfère aux capacités actuelles de l’homme ou s’il inclut également les capacités futures.

11 Les eaux souterraines très profondes ont donné lieu à un litige suite aux activités des Mines de potasse d’Alsace qui étaient à l'origine d'une pollution importante du bassin rhénan par les résidus en sel. Une négociation internationale avait été entreprise par les Etats riverains du Rhin pour réduire cette pollution en injectant le sel sous forme de saumure dans un réservoir d'eau souterrain très profond, aboutissant à la Convention du 3 décembre 1976 relative à la protection du Rhin contre la pollution par les chlorures (art. 2 (2) et annexe I). Cet accord a été considéré par les populations locales en Alsace comme portant atteinte à leur environnement, puisqu’il existait une incertitude scientifique sur les risques d'injection dans une nappe dont le régime hydrodynamique était inconnu. L'opposition locale a remporté un double succès. Les arrêtés préfectoraux autorisant l'injection ont été annulés le 19 février 1980 par un jugement du Tribunal administratif de Strasbourg, confirmé par l'arrêt du Conseil d'Etat du 1er juin 1984 pour des motifs de droit interne. Sur le plan international, la France exécute son obligation de réduire les déversements de sel dans le Rhin par un autre procédé, la mise en terril, selon le Protocole additionnel du 25 septembre 1981 à la convention de 1976 sur la pollution du Rhin par les chlorures (annexe I).(Comp. Prieur, Commentaire, Tribunal administratif de Strasbourg, jugement 19 févr.

(4)

- les eaux souterraines liquides salées - les eaux souterraines gelées

- également les eaux souterraines sous forme de vapeur (évaporation) mais qui constituent certainement des quantités négligeables.

La rédaction actuelle de l’article 1

er

applique notamment les mesures de protection, préservation et gestion aux seules systèmes aquifères alors que le commentaire (n° 15) parle dans ce contexte, à juste titre, de ressources et pas d’aquifères. Or, il semble intéressant qu’un traité environnemental n’exclut pas les formes d’eau souterraines non exploitables et non utiles/utilisables (usefull).

Critique 2 : Formulons une autre critique à propos du terme „aquifère“ qui rejoint la première et aboutit aux mêmes propositions de modification : L’aquifère se définit par deux caractéristiques (comp. commentaire n° 12) : capacité de stockage et capacité de circulation (groundwater flow). Cette dernière n’existe pas ou très peu dans le cas des nappes captives et des eaux souterraines gelées. De nouveau, le choix du terme aquifère s’avère très restrictif.

Proposition de modification : Trois solutions alternatives pourraient se présenter plus particulièrement :

1) remplacer le terme „aquifère“ par „ressources en eau souterraines“ (ground water resources - art. 1 : transboundery systems of groundwater resources). Par ailleurs, personnellement, je défends l’application d’un concept générique des ressources en eau douces et le choix du terme ressources en eau souterraines irait en ce sens.

12

2) compléter le terme „aquifère“ par l'adjonction d'un terme du genre „les autres eaux souterraines“ pour distinguer par la suite éventuellement deux régimes différents, l’un applicable aux aquifères exploitables, l’autre aux autres ressources en eau souterraines.

13

3) rien faire du tout dans la première partie, mais compléter le projet d'articles par une partie sur la protection, préservation et gestion (partie environnementale) appliquant des principes spécifiques (à l'image de la 4

e

partie de la Convention de NY introduisant le concept des écosystèmes de cours d'eau) ; cette dernière solution me semble la moins intéressante vu le caractère particulièrement vulnérable des eaux souterraines dans leur ensemble (à juste titre souligné dans le 2

e

rapport).

B) observations sur le terme "transfrontière" (système d’aquifère transfrontière - transboundery aquifer system) (art. 2c)

Le choix du terme exclut les espaces qui ne sont soumis à aucune souveraineté nationale … - Antarctique

- nappes sous un territoire national, mais très profondes (Barberis cite la thèse d’après laquelle ces eaux deviendraient patrimoine commun de l’humanité)

- nappes d’eau (douces) captives dans les fonds marins (s'il y en a ?)

… ainsi que les territoires où s'applique un régime international ou territorial, notamment : - le droit communautaire

- le Protocole de Londres sur l’eau et la santé du 17 juin 1999 qui ne se limite pas au contexte transfrontière, mais vise aussi bien "l'échelon national que … un contexte transfrontière et international" (article 1

er

).

1980, RJE 1980, p. 248 ; Kiss, AFDI 1983, p. 775, 776 ; Kiss, droit international de l'environnement, 1989, p.

199).

12 V. notre ouvrage précité : Le droit international des ressources en eau douces …

13 Dans ce contexte on pourrait compléter la première phrase du commentaire n° 12 par pollué (extracted „or polluted“)

(5)

- la Convention alpine qui applique un régime territorial, couvrant tout l'espace alpin, sans se soucier des frontières.

Proposition de modification :

- pour éviter d'exclure ce genre de situations, remplacer le terme "transfrontière" par

"international" (ou "internationalisé")

C) observations sur le terme „system State“ (Etat du système d’aquifère) (art. 2d et combinaison avec les art. 4 et 5)

Faut-il limiter l’interdiction de causer un dommage aux Etats du système (ce qui limiterait éventuellement les Etats qui pourraient adhérer à un accord sur un système)? Existe-t-il des hypothèses où des Etats tiers aux système interfèrent (p.ex. phénomène des précipitations, notamment les pluies acides, certains vecteurs de maladie, pollution volontaire d’une nappe dans le cadre d’un conflit international

14

)? L’obligation générale de coopération, ne devrait-elle pas s’étendre à d’autres Etats ? Ne serait-il donc pas préférable de parler simplement d’Etat parties (au moins en ce qui concerne des aspects partiels telle l'obligation de coopération) ?

D) observations sur le principe de l’utilisation équitable et raisonnable

Le caractère difficilement renouvelable et particulièrement vulnérant des eaux souterraines ne me semble pas en contraction avec le principe de l'utilisation équitable. Tout comme le terme

„significatif“ (v. commentaire n° 25 sur l’article 4), les termes "raisonnable et équitable" sont souples ("flexible and relatif") et peuvent être interprétés dans le sens d’une meilleure protection de la ressource. Ainsi, dans la liste des facteurs à énumérer (à l'image de l'article 6 de la Convention de NY), au lieu de procéder d’une manière indicative et indistincte, on peut valoriser certains facteurs et leur accorder une supériorité sur les autres (p.ex. impératif de maintenir l’équilibre de la nappe, voire consacrer la priorité de l’obligation de ne pas causer de dommage de l’article 4 du projet d'articles).

Par ailleurs, l’article 7 sur les relations entre les utilisations ne doit pas forcément être revu dans ce contexte, parce qu’il concerne les différentes sortes d’utilisation et non pas l’impact de ces utilisations sur les eaux souterraines.

Deux exemples me semblent particulièrement significatives pour inspirer la rédaction d'un article sur le principe de l'utilisation raisonnable et équitable ainsi que les relations de ce principe avec l'interdiction de causer un dommage.

1) Convention d'Helsinki de 1992 : art. 2 (2b) : Les parties prennent, en particulier, toutes les mesures appropriées : "Pour veiller à ce que les eaux transfrontières soient utilisées dans le but d'assurer une gestion de l'eau respectueuse de l'environnement et rationnelle, la conservation des ressources en eau et la protection de l'environnement."

et art. 2 (2c) : "Pour veiller à ce qu'il soit fait un usage raisonnable et équitable des eaux transfrontières, en tenant particulièrement compte de leur caractère transfrontière, dans le cas d'activités qui entraînent ou risquent d'entraîner un impact transfrontière."

2) Protocole de Londres sur l’eau et la santé du 17 juin 1999 : article 4 (2) : "Les Parties prennent, en particulier, toutes les mesures appropriées pour assurer :

a) Un approvisionnement adéquat en eau potable salubre ….

b) Un assainissement adéquat …

14 Bien que ce dernier aspect soit traité par la Convention de NY par un simple renvoi (v. article 29).

(6)

c) Une protection efficace des ressources en eau utilisées pour l'approvisionnement en eau potable et des écosystèmes aquatiques correspondants contre la pollution due à d'autres causes, notamment à l'agriculture, à l'industrie et aux autres rejets et émissions de substances dangereuses. Cette protection visera à réduire et à éliminer effectivement les rejets et émissions de substances jugées dangereuses pour la santé de l'homme et pour les écosystèmes aquatiques ; …"

article 4 (4) : "Les Parties fondent toutes ces mesures sur une évaluation de chaque mesure proposée eu égard à l'ensemble de ses incidences, y compris de ses avantages, de ses inconvénients et de son coût pour :

a) La santé de l'homme ; b) Les ressources en eau ; et c) Le développement durable,

compte tenu des nouveaux impacts, différents selon les secteurs de l'environnement, de la mesure proposée."

E) observations sur la prise en compte du principe d'intégration

Bien évidemment, un lien est à établir avec les cours d'eau visés par la Convention de NY.

Cette dernière devrait être applicable au titre d'une lex generalis par rapport au projet d'articles. Toutefois, il me semble que d'autres liens doivent être établis et qui pourraient s'articuler autour du principe d'intégration. Ce principe figure chaque fois plus dans les accords environnementaux et autres. Il pourrait être formulé d'une manière générale (clause générale) ou, au contraire, viser à inclure des aspects particulièrement importants pour la gestion des eaux souterraines telle la protection des sols (le système de la Convention alpine protège les eaux souterraines d'une manière particulière

15

dans le cadre du Protocole protection des sols où on trouve des règles exemplaires de protection des eaux souterraines, non forcément reliées à un cours d’eau

16

), voire les relations avec les eaux atmosphériques

17

.

15 L’auteur a travaillé en 2003 comme expert pour la CIPRA (Commission internationale pour la protection des Alpes) et contribué dans ce cadre à l’élaboration d’un projet de protocole à la Convention alpine relatif aux ressources en eau.

16 Le sol est appréhendé "dans ses fonctions naturelles comme ... (c) partie des écosystèmes, en particulier avec ses cycles de l’eau ... (d) milieu de transformation et de régulation pour les apports de substances, notamment par ses capacités de filtre, d’effet tampon, de réservoir, en particulier pour la protection des eaux souterraines."

(article 1, par. 2, chiffre 1). Le sol est également pris en compte "en vue de sauvegarder son utilisation comme ...

(c) site pour ... l’approvisionnement et la distribution, l’évacuation des eaux ..." (article 1, par. 2 chiffre 3). On voit ici le rôle déterminant que joue le sol dans la protection qualitative des eaux souterraines (sol comme filtre, tampon, voire comme milieu d’évacuation des eaux usées). Ces dispositions insistent également sur le rôle du sol dans la gestion quantitative de l’eau : le sol en tant qu’élément du cycle d’eau (suite à l’évaporation), le sol en tant que réservoir, site d’approvisionnement et de distribution des eaux souterraines. Le sol doit ainsi être protégé pour garantir le cycle de l’eau et pour garantir l’approvisionnement des eaux souterraines. Ainsi l’article 7 du protocole, relatif à l’utilisation économe et précautionneuse des sols vise dans son paragraphe 2 la limitation de l'imperméabilisation et de l’occupation des sols. En effet, l'imperméabilisation a un double effet sur le régime quantitatif des eaux, orientée à la fois vers le bas et vers le haut : elle restreint l’alimentation des réservoirs souterrains et elle empêche l’évaporation. Ce deuxième aspect protège en fait les eaux atmosphériques ou plus généralement le fonctionnement du cycle hydrologique dans son ensemble.

17 Les eaux atmosphériques sont généralement réglementées dans le cadre d’une autre spécialité juridique, le droit de la protection de l’air et du climat. Bien que ces eaux ne se trouvent pas (encore) incorporées au sol, elles présentent un lien plus ou moins important avec celui-ci ainsi qu’avec les eaux souterraines (notamment suite aux phénomènes d’évaporation et de précipitations). Une approche intégrale de la gestion des ressources en eau douce doit ainsi prendre en compte les eaux atmosphériques.

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