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La prévention des accidents du travail en droit international

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La prévention des accidents du travail en droit international

AUBERT, Gabriel

AUBERT, Gabriel. La prévention des accidents du travail en droit international. Cahiers médico-sociaux , 1983, vol. 27, no. 2, p. 207-211

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:12179

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Les cahiers médico-sociaux, Genève, 1983, 27ème année, No 2, pp. 207-211

LA PREVENTION DES ACCIDENTS DU TRAVAIL EN DROIT INTERNATIONAL

par Gabriel Aubert * 1. Introduction

Nombreuses sont les organisations qui, sur le plan international, s'occupent de la prévention des accidents du travail. Citons seulement l"Organisation internationale du travail (OIT), l'Organisation mondiale de la santé (OMS), la Communauté européenne (CEE), le Conseil de l"Europe, l"Agence internatio·

nale de l"énergie atomique (AlEA) et l'Association internationale de la sécurité sociale (AISS) (1). Il ne saurait être question, dans le cadre de cette brève note, de dresser un panorama de leurs activités. Nous concentrerons notre attention sur l'OIT dont, comme on le sait, le secrétariat permanent est le Bureau interna- tional du travail (BIT).

La réglementation internationale du travail élaborée par l'OIT consiste essentiellement dans des conventions et des recommandations. Les premières créent des obligations à la éharge des Etats qui les ratifient; les secondes ser- vent uniquement à orienter l"action des gouvernements (2). Obligatoires ou non, ces normes présentent un intérêt particulier. En effet, la Conférence inter- nationale du travail, qui les adopte, se compose de représentants des gouverne- ments et des organisations d'employeurs et de travailleurs. En raison du carac- tère tripartite (3) de cet organe, elles expriment une sorte de COnsensus idéal qui émane non seulement des Etats, mais aussi des partenaires sociaux. . La prévention des accidents et des maladies professionnels a joué très tôt un rôle important en droit international. La première Conférence internationale du travail réunie en 1919 sous l'égide de l'OIT adopta plusieurs recommanda- tions touchant notre domaine, soit la prévention du charbon et du saturnisme, l'inspection du travail et l"interdiction du phosphore blanc dans la fabrication des allumettes (4). Avant même la création de l"OIT, le problème de l'emploi du phosphore blanc avait déjà fait l'objet d'une convention élaborée à Berne, en 1906, dans le cadre d'une conférence diplomatique convoquée par le Conseil fédéral suisse. Il s'agissait d'harmoniser les législations en la matière, afin d'empêcher que les mesures de protection prises par les Etats n'affaiblis- sent leurs positions respectives dans la concurrence internationale (5).

II. L'approche traditionnelle

Les instruments adoptés depuis 1919 par l'OIT dans le domaine de la sécu- rité et de l"hygiène du travail révèlent une approche fragmentaire (6). Ils s'atta- chent à la mise en oeuvre d'une législation protectrice répondant aux besoins

* Directeur adjoint du Centre d'études juridiques européennes (Faculté de droit, Genève);

chef de travaux à l'Université de Genève et charge de cours à l'Université de Fribourg.

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particuliers qui ont surgi en liaison avec l'évolution économique et sociale.

Cette protection couvre certaines catégories de travailleurs (les enfants, les ado- lescents et les femmes), certains secteurs de l'activité économique (travail mari- time, ports, bâtiment, commerce, bureaux) ou certaines causes spécifiques d'accident ou de maladie (radiations, machines, poids des objets à transporter, benzène, cancer professionnel, pollution de l'air, bruit, vibrations).

Une telle méthode, qui reflète celle suivie dans les Etats membres, allait montrer ses limites. On devait constater au cours des années soixante-dix que si, dans la plupart des pays industrialisés, elle permettait, au mieux, d'enrayer l'augmentation des accidents et des maladies professionnels, elle ne suffisait pas à entraîner leur diminution. Ailleurs, notamment dans les pays en voie de développement, les cas d'accidents et de maladies se multipliaient (7).

Plusieurs gouvernements entreprirent une révision de leur politique à cet égard, afin de dégager une conception d'ensemble. Au Royaume-Uni, par exemple, une commission présidée par lord Robens rendit en 1972 un rapport aujourd'hui célèbre. Ses observations, bien que fondées sur l'examen d'un seul pays, ont une portée générale. Elles soulignent la nécessité de coordonner les interventions trop souvent dispersées du législateur. De plus, pour faciliter l'application des lois dans la pratique, elles mettent l'accent sur la responsabi- lité première et conjuguée de ceux qui créent les risques, d'une part, et de ceux qui travaillent au contact de ces risques, d'autre part. La prévention doit donc reposer davantage sur une meilleure collaboration des employeurs et des sala- riés au niveau de l'entreprise (8). Des idées semblables ont été exposées dans d'autres Etats, notamment en Scandinavie et en France (9).

Le souci d'exercer une plus grande influence sur la pratique se rencontre aussi dans les activités récentes de l'OIT. Le Programme international pour l'amélioration des conditions et du milieu de travail (PIA CT), adopté par le BIT en 1976, a créé notamment un système international d'alerte, grâce auquel les risques importants découverts dans un pays peuvent être rapidement signa- lés ailleurs. Par exemple, le risque de stérilité masculine causé par le dibromo- chloropropane (DBCP) fut suspecté en 1977 par un groupe d'ouvriers exposés à cette substance. L'alerte répercutée par le BIT la même année conduisit Cer- tains pays à interdire provisoirement l'usage du DBCP, jusqu'à ce que des études plus poussées soient réalisées (l0). En outre, dans de nombreux domaines, le BIT a intensifié l'application de directives pratiques et de guides .consacrés à la prévention des accidents et des maladies professionnels. On relè-

vera, parmi les tout derniers, les recueils de règles sur l'exposition profession- nelle à des substances nocives en suspension dans l'air ou sur la sécurité et l'hygiène dans la construction des installations fixes de forage en mer dans l'industrie du pétrole (II).

Ainsi, le caractère insuffisant de l'approche traditionnelle a suscité des réac- tions. D'une part, plusieurs Etats ont manifesté la volonté de dépasser la conception fragmentaire de la prévention pour élaborer une politique globale.

D'autre part, cette politique doit faire une juste place à une action plus efficace au niveau de l'entreprise. En vue de compléter sa contribution, l'OIT prit, elle aussi, des mesures nouvelles sur le plan normatif.

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III. Tentative de définition d'une politique globale

Si la grande majorité des instruments adoptés par l'OIT depuis 1919 vise des aspects particuliers de la prévention, on rencontre cependant des exceptions.

En 1929, par exemple, la Conférence votait une recommandation sur la préven- tion des accidents du travail, qui abordait de nombreux problèmes en la matière (12). Au bénéfice des expériences faites, il a paru nécessaire de revoir l'ensemble de la question. Aussi bien la Conférence internationale du travail a- t-elle mis au point, en 1981, une convention (No 155) concernant la sécurité, la santé des travailleurs et le milieu du travail, de même qu'une recommandation (No 164) sur ce sujet. La convention revêt un caractère promotionnel. Les Etats qui la ratifient assument l'obligation non seulement de prendre des dispositions immédiates, mais aussi de « promouvoir progressivement l'application de mesures nouvelles et étendues» (13).

Les parties à la convention devront définir, mettre en application réexami- ner périodiquement une politique nationale cohérente visant à prévenir les accidents et les atteintes à la santé liés au travail dans toutes les branches d'acti- vité économique, en rbduisant au minimum les causes de risques susCitées par le milieu de travail, lorsque cela est raisonnable et pratiquement réalisable (14).

Cette politique aura plusieurs aspects. Elle touchera d'abord les composantes matérielles du travail, c'est-à-dire les lieux de travail, les machines et le maté- riel, les substances et les agents chimiques, physiques et biologiques. Elle embrassera aussi l'organisation du travail, en veillant à son adaptation constante aux capacités physiques et mentales des salariés (le recours à certains procédés sera interdit ou contrôlé). Elle régira la formation des travailleurs pour que des niveaux de sécurité et d'hygiène suffisants soient atteints. Elle favorisera les recherches et les échanges d'informations sur les accidents du tra- vail et les maladies professionnelles. Elle assurera l'application effective des prescriptions légales et réglementaires par un système d'inspection approprié.

Elle s'efforcera enfin de coordonner l'action des autorités et des organismes chargés de donner effet aux principes ci-dessus (15).

La convention place un accent particulier sur le rôle des entreprises. Dans la mesure où cela est raisonnable et pratiquement réalisable, les employeurs sont tenus de faire en sorte que la sécurité et la santé des travailleurs ne soient com- promises ni par les lieux, les machines, le matériel et les procédés de travail, ni par les substances et les agents sous leur contrôle. Il leur incombe, en outre, de mettre en oeuvre la coopération des travailleurs en vue d'atteindre ce but. Cette participation se déroulera non seulement sur le plan individuel, mais aussi sur le plan collectif. Les travailleurs et leurs représentants recevront les informa- tions utiles, qu'ils pourront étudier avec leurs organisations représentatives. Ils auront le droit, le cas échéant avec le concours de ces dernières, d'examiner tous les aspects de la santé et de la sécurité relatifs à leur travail et seront consultés à leur propos par J'employeur. Une telle participation s'.ccompa- gnera d'une protection contre les sanctions disciplinaires consécutives à des actions effectuées par eux à bon droit dans le cadre général de la prévention (16). La convention souligne elle-même que la coopération des employeurs et des travailleurs (et de leurs représentants dans l'entreprise) constitue un «élé- ment essentiel» (17) des dispositions à prendre.

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IV. La position de la Suisse

La Suisse ne sera liée par la convention que si elle la ratifie. Le Conseil fédé·

raI a donc examiné, en détail, la compatibilité de notre ordre juridique avec les exigences posées par ce texte. Il a conclu que, compte tenu de la nouvelle loi fédérale sur l'assurance~accidents, qui devrait entrer en vigueur le 1 er janvier 1984, la Suisse serait d'une manière générale à même d'y satisfaire (18). Nous voudrions insister sur deux aspects.

D'abord, notre législation en matière de prévention, comme celle d'autres pays, a progressivement étendu son champ d'application. Pqur s'en convaincre, il suffit de suivre son évolution à partir de la première loi sur les fabriques, de 1877, en passant, notamment, par la loi concernant la fabrication et la vente des allumettes, de 1898; la loi sur l'assurance en cas de maladie et d'accidents, de 1911 ; la loi révisée sur le travail dans les fabriques, de 1914; la loi sur le tra- vail, de 1964 et, enfin, la loi sur l'assurance-accidents, de 1981. Chacun de ces textes représente un pas vers la politique globale préconisée par l'OIT (19).

En second lieu, bien que la collaboration individuelle des travailleurs soit prévue par les lois en vigueur (20), son organisation reste sommaire. Ce n'est que dans les entreprises industrielles que l'employeur doit établir un règlement contenant des dispositions sur la protection de la santé et sur la prévention des accidents. Et l'obligation de faire participer collectivement les travailleurs, à cet égard, se limite à celle de les entendre avant l'établissement du texte (21). De nombreuses conventions collectives instituent des commissions d'entreprise (22), qui jouissent de droits de consultation non négligeables. Mais la pratique demeure fragmentaire. Dans le cadre de la longue préparation d'une loi sur la participation des travailleurs, le législateur aura sans doute à l'esprit les nou- velles exigences du droit international.

Notes et références

(1) Cf. Sécurité, hygiène et milieu de travail, in Conférence internationale du travail, 66ème session 1980, Rapport VII a) (1), p. 51 ss.

(2) Cf. VALTICOS N.: Droit international du travail, Paris, Dalloz, 1970, p. 142.

(3) Cf. V ALTI COS, p. 208 ss.

(4) Cf. VALTICOS, p. 367 ss.

(5) Cf. VALTICOS, p. 27 ss.

(6) Cf. Rapport (note l, supra), p. 45 et 62 ; V AL TICOS, p. 367 ss ; voir aussi ROBERT M. et PARMEGGIANI L., Cinquante années de collaboration internationale au service de la santé et de la sécurité des travailleurs, Revue internationale du travail, vol. 99 (1969), p.

97.

(7) Cf. Rapport (note 1, supra), p. 5.

(8) Cf. Rapport (note 1, supra), p. 10 s.

(9) Cf. Rapport (note l, supra), p. 14 s.

(l0) Cf. Rapport (note l, supra), p. 47 s.

(11) Cf. Rapport (note l, supra), p. 48 s. Le BIT édite un catalogue spécial pour ses publica- tions sur la sécurité, l'hygiène et la médecine du travail.

(12) Cf. VALTICOS, p. 375 s.

(13) Cf. Sécurité, hygiène et milieu de travail, in Conférence internationale du travail, 67ème session 1981, Rapport VI (1), p. 4.

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(6)

(14) Cf. Convention (No 155) concernant la sécurité, la santé des travailleurs et le milieu de travail, 1981, art. l, al. 1 et 4.

(IS) Cf. Convention précitée, art. S, 9, Il, 12 et IS.

(16) Cf. Convention précitée, art. 16 et 19.

(17) Cf. Convention précitée, art. 20.

(18) Cf. Rapport du Conseil fédéral sur la 67ème session de la Conférence internationale du travail, du 24 novembre 1982, in Feuille fédérale 1983, vol. l, p. 38 55., 50. Sur la politique de ratification des conventions internationales du travail par la Suisse, cf. KNEUBÜH- LER H.U.: Die Schweiz aIs Mitglied der Internationalen Arbeitsorganisation, Berne, StAmpni, 1982, p. 66 OS., 160 ss.

(19) Voir, dans ce cahier, l'article de DESPLAND B. Cf. aussi, par exemple, la prise de posi- tion de la Suisse à l'égard du projet de Convention No 155: (( La loi actuelle et la future loi sur l'assurance-accidents prévoient des organes de coordination ( ... ), adaptant ainsi le système décentralisé de la Suisse au système préconisé par le futur instrument» (Sécurité, hygiène et milieu de travail, in Conférence internationale du travail, 66ème session 1980, Rapport VII a) (2), p. 33).

(20) Cf. art. 7 de la loi sur le travail et l'art 65, al. 1 bis de la loi sur l'assurance en cas de maladie et d'accidents. Voir aussi l'art. 82, al. 2 de la loi sur l'assurance-accidents.

(21) Cf. art. 37 de la loi sur le travail.

(22) Cf. par exemple l'accord du 19 juillet 1974/1978 entre les organisations de l'industrie des machines et des métaux, participant à la Convention du 19 juillet 1937/1978, sur la colla·

boration des travailleurs dans l'entreprise, art. 2.2.1.

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