• Aucun résultat trouvé

La santé, un droit pour TOUS!

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "La santé, un droit pour TOUS!"

Copied!
20
0
0

Texte intégral

(1)

La santé,

un droit pour TOUS !

vision et recommandations

Solidarité Mondiale mène la campagne La santé, un droit pour tous avec

(2)

La santé, un droit pour tous!...3

1. Le droit à la santé ...4

2. Santé et médicaments ...7

3. La lutte contre la commercialisation des soins de santé ...10

4. La pénurie de professionnels de santé ...13

5. Une politique de protection sociale ...16

6. Recommandations ...19

editeur responsable Andre Kiekens

Solidarité Mondiale asbl

Chaussée de Haecht 579, 1030 Bruxelles

solidarité.mondiale@solmond.be, www.solmond.be

auteurs

Gijs Justaert, Bart Verstraeten, Valérie Van Belle, Caroline Lesire.

Photos

Solidarité Mondiale Graphisme Gevaert Graphics Janvier 2011

Solidarité Mondiale au Nord et au Sud,

avec le soutien de: Groupe Arco, VDK, DVV, Dexia et DGD, la coopération belge.

Sommaire

(3)

la déclaration d’alma ata, document de base pour un accès universel aux soins de santé. Le droit à la santé a été associé à des notions comme la justice sociale, la participation, l’autonomisation, les soins de santé de base et des rapports mondiaux justes. L’objectif de la santé pour tous, comme l’a affirmé la Déclaration d’Al- ma Ata, aurait du être atteint aux alentours de l’an 2000.

Dix ans après l’échéance, ces objectifs sont loin d’être réalisés. Nous n’arrivons toujours pas à organiser des soins de santé accessibles et de qualité pour tous, surtout dans les pays en développement.

Pour y faire face, comme cela s’est passé chez nous il y a longtemps, les citoyens se mobilisent. ils pren- nent eux-mêmes des initiatives pour améliorer leur santé via des mutualités, des mouvements sociaux.

Ensemble, ils revendiquent leur droit à la santé en dé- veloppant un système d’assurance maladie, en créant un fond commun et en rendant les coûts des soins médicaux plus supportables. Mais aussi pour amélio- rer la qualité des soins. En effet, la santé est l’un des premiers soucis des individus.

solidarité mondiale, les mutualités chrétiennes et les partenaires de campagne pensent que l’accès aux soins de santé doit être une des priorités principales des autorités et des décideurs politiques partout dans le monde. Et à cet égard, les gouvernements des pays du Sud ne sont pas les seuls à jouer un rôle important : la Belgique, l’Union européenne et la communauté in- ternationale doivent se mobiliser et agir pour apporter leur contribution. Avec les dix recommandations de ce dossier, nous voulons, ensemble, donner un signal fort aux décideurs politiques.

andre Kiekens,

Secrétaire général Solidarité Mondiale – Wereldsolidariteit

marc Justaert, Président de l’ANMC La santé est fondamentale. Plus encore, c’est un droit de

l’homme. Et pourtant les chiffres mondiaux en matière d’acces à la santé sont alarmants. actuellement, 2,5 milliards de personnes dans le monde n’ont pas accès aux soins de santé de base. Parce qu’elles ne peuvent pas payer le droit d’entrée au centre de santé ou les mé- dicaments, parce que les centres de santé sont trop éloi- gnés ou parce que le personnel médical ou le matériel nécessaire manquent à l’appel. Chaque année, au moins 20 millions de personnes meurent dans les pays en dé- veloppement, faute de soins de santé de base adéquats.

Parmi ces morts facilement évitables, les innombrables mères qui meurent encore pendant leur grossesse ou à l’accouchement ou les enfants en bas âge qui succom- bent à des pathologies bénignes. Dans la plupart des cas, les personnes tombent malades et meurent d’af- fections faciles à prévenir et à traiter. En Belgique aussi, les inégalités sociales en matière de santé restent im- portantes. Les populations défavorisées vivent non seu- lement moins longtemps mais elles sont également en mauvaise santé nettement plus tôt dans leur vie.

Pour bon nombre de personnes, vivre en bonne san- té n’est qu’un rêve lointain. De nombreux problèmes trouvent leurs racines dans les échanges inégaux entre pays dits développés, émergents et en dévelop- pement. Les autorités investissent trop peu dans le secteur public, privant ainsi une grande partie de la population de soins de santé accessibles. Le manque de médicaments et la commercialisation des services de soins de santé empêchent la majorité de la popula- tion, aux moyens financiers limités, de se faire soigner.

Les conditions de travail et de vie poussent de nom- breux prestataires à s’installer dans d’autres régions plus propices. Sans quitter forcément le pays, ils mi- grent souvent vers le secteur privé lucratif ou les ONG et programmes internationaux. Enfin, l’absence d’une politique de protection sociale dans de nombreux pays laisse les habitants vivre dans la pauvreté et l’inégalité sociale augmenter au lieu de diminuer.

En 1978 déjà, 134 pays ont signé, à l’initiative de l’Unicef et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS),

La santé, un droit pour touS !

(4)

nous demandons que :

Le droit à la santé est de moins en moins acces- sible pour un nombre croissant de personnes dans le monde. C’est pourtant un droit fondamental pour tout homme, quel que soit son statut dans la société. L’état a la responsabilité essentielle d’assurer sa mise en œuvre. Malgré tout, 2,5 milliards de personnes dans le monde, c’est-à-dire quasiment une personne sur deux, n’a pas accès aux soins de santé.

Bien que les gouvernements portent, entre autres res- ponsabilités premières, celle d’assurer à leur population une vie en bonne santé, rares sont les états qui, dans le Sud, parviennent à offrir des services de santé acces- sibles et de qualité à la population. Au niveau africain, les pays se sont engagés dans la déclaration d’Abuja (2001) à consacrer 15% de leur budget national aux soins de santé, mais seulement quelques-uns parvien- nent à dépasser le seuil des 10%.

L’accès aux soins de santé dépend beaucoup des pos- sibilités financières du patient et de son entourage, car près de 70% des dépenses totales de santé restent à charge des familles. Les soins de santé sont un luxe pour bon nombre de personnes et les coûts directs et indirects liés à la maladie peuvent être élevés, surtout quand ces personnes ne bénéficient pas d’une assu- rance maladie.

Si l’on souhaite voir des progrès réels dans le domaine des soins de santé, des efforts accrus sont néces- saires, non seulement de la part de la Belgique, mais

devrait à titre d’exemple consacrer 15% de ce budget aux soins de santé – qui équivaut au pourcentage du budget que les pays africains ont convenu de consa- crer à la santé depuis 2001. Ce n’est qu’avec de tels efforts accrus et prévisibles qu’un soutien financier et technique pourra être garanti à long terme pour le dé- veloppement de la politique de santé des pays du Sud.

Il convient également de revoir l’affectation de ce bud- get, en accordant davantage de place à la prévention, au renforcement du système de santé et à la rationali- sation de l’offre de soins.

Les mutueLLes s’organisent

Afin d’améliorer l’accès aux soins de santé de qualité pour tous, les gens essaient de s’organiser dans des mutuelles de santé et prennent ainsi ensemble leur santé en mains. S’appuyant sur la solidarité entre jeunes et vieux, riches et pauvres, malades et per- sonnes en bonne santé, ils s’organisent pour faire va- loir collectivement leurs droits face au gouvernement et aux prestataires de soins de santé. Avec leurs res- sources et la cotisation de chacun, chaque membre peut, le cas échéant, bénéficier des fonds mutuels pour contribuer au paiement des soins médicaux : une répartition du risque financier dans le temps et entre les membres permet de rendre les coûts sup- portables. On constate que les membres de mutuelles vont plus régulièrement et plus rapidement consulter au centre de santé puisqu’ils savent qu’ils pourront payer la facture avec l’aide de la mutuelle (qui prend la

1. Le droit à la santé

> Les autorités belges consacrent 15% du bud- get de la coopération au développement (APD) au renforcement des systèmes de santé dans les pays partenaires.

> Dans les pays partenaires, les autorités belges réclament la participation des mutualités locales au développement et à l’exécution d’une politique de santé en vertu de laquelle chacun a accès aux soins de santé et peut défendre ce droit.

(5)

Elles mettent par ailleurs souvent l’accent sur la sen- sibilisation et la prévention de diverses maladies, l’uti- lisation de moustiquaires pour prévenir le paludisme, l’importance de l’hygiène et d’une alimentation saine pour lutter contre la mortalité infantile, etc.

Les mutuelles travaillent également, en tant que mou- vements sociaux, à nouer un dialogue avec les gou- vernements et les prestataires de soins de santé. À travers les conventions et les négociations avec ces derniers, elles essaient d’améliorer le niveau de quali- té des soins et de contrôler les services rendus à leurs membres dans les structures.

Les mutuelles peuvent ainsi contribuer à l’accès aux soins de santé pour les populations à revenus mo- destes. Mais les mutuelles de santé qui démarrent peuvent difficilement prendre en charge les plus pauvres, incapables de cotiser. Elles sont encore fra- giles, de par leur petite taille. Comme l’indique le rap- port 2010 de l’Organisation mondiale de la santé, les mutuelles, certainement en Afrique, représentent un concept encore neuf, mais en croissance : au niveau national, elles ne remplissent pas encore toujours un rôle significatif, ou alors exceptionnellement. Mais au niveau local, leur contribution à des soins de santé ac- cessibles et de qualité est souvent substantielle.

En attendant, quelles solutions pour les plus pauvres?

Une assurance maladie rendue obligatoire dans la gestion de laquelle participeraient activement les mutuelles de santé pourrait créer une véritable soli- darité entre les différents groupes sociaux. A l’heure actuelle, les mutualités essaient de pallier au manque d’initiative de l’Etat avec une assurance maladie volon- taire, qui pourra ensuite servir d’exemples à l’échelon national.

Dans les mutuelles de santé, la démocratie est un concept clé. Les membres ont une influence sur les choix qui sont effectués par leur organisation. De par le paiement de leur cotisation, ils sont de facto membres de l’Assemblée générale et peuvent siéger dans les instances de leur organisation. Les mandats

sont renouvelables, il doit y avoir un certain équilibre entre les hommes et les femmes. Ils font leurs propres choix pour améliorer leur santé et leur existence. Pro- gressivement, c’est un réel contre-pouvoir qui se met en place. A l’échelon supérieur, les coordinations na- tionales de mutuelles de santé peuvent contribuer au processus décisionnel en matière de santé.

Dans le développement d’une politique de santé ac- cessible et de qualité, les autorités des pays du Sud doivent reconnaître le rôle et la contribution des mu- tualités. Elles doivent également encourager le mou- vement mutualiste et le subsidier et surtout ne pas s’en servir comme une excuse à l’inaction. Les mutua- lités s’adressent surtout aux pauvres de la société qui sont souvent exclus de l’accès aux soins de santé. La Belgique, l’Union européenne et la communauté inter- nationale doivent insister, dans leur dialogue avec les pays partenaires, sur le fait que les mutualités doivent être impliquées dans le développement de soins de santé nationaux accessibles à tous. En outre, la coo- pération au développement belge peut grandement contribuer à la reconnaissance des mutualités, en impliquant également ces mutualités locales et leur expérience accumulée dans leurs propres actions.

(6)

Au Burundi, être membre de la mutualité signifie avoir accès aux consultations dans les centres de santé ou aux médicaments essentiels. Moyennant une contribution de 5,5 € par année, la mutualité prend à sa charge 60% des frais médicaux. Pour les femmes et les enfants de moins de 5 ans, l’intervention est même de 100%.

Burundi

Le rôLe des mutuaLités dans Le diaLogue nationaL sur La santé

Après une guerre civile de 13 ans qui s’est terminée en 2006, la situation des soins de santé du Burundi était dramatique et elle ne s’est pas beaucoup amé- liorée depuis. En 2010, il y a tout juste un médecin pour plus de 20.000 personnes, le taux de morta- lité infantile s’élève à 168 sur 1.000 enfants âgés de moins de cinq ans et en moyenne 7 lits d’hôpital sont disponibles pour 1.000 habitants.

Depuis la fin de la guerre, les autorités burundaises s’efforcent de développer un système offrant à tous un accès aux soins de santé via une assurance ma- ladie universelle, ce dont environ 85% de la popu- lation est toujours privée aujourd’hui. Les mutua- lités burundaises s’adressent à ce grand groupe.

Elles veillent à ce que ces personnes aient accès aux services de santé de base et aux médicaments, grâce à un système solidaire d’assurance maladie où la mutualité prend la plus grande partie des frais médicaux d’un patient à sa charge.

Parce qu’elles veillent, en tant que mouvements so- ciaux, à ce que les groupes de population pauvres et vulnérables de la société aient accès aux soins médicaux, les mutualités veulent avoir leur mot à dire dans la définition d’un système de soins de santé national. Elles veulent également être recon- nues et soutenues parce que seule une institution- nalisation, c.à.d. un encadrement légal de ces mu- tualités, leur permettra d’étendre leurs activités.

Avec la création de la Plate-forme nationale de concertation des acteurs des mutuelles de santé au Burundi en 2010, les mutualités burundaises ont lancé la démarche. La MSAG, la Mutuelle de Santé de l’Archidiocèse de Gitega, un partenaire de Solidarité Mondiale et de la MC, est membre fon- dateur de cette plate-forme. Toutes les mutualités tiennent maintenant le même langage vis-à-vis des autorités en ayant comme première exigence une reconnaissance légale et un cadre pour les mutua- lités. Aujourd’hui, la plate-forme réfléchit à la place des mutualités dans un système d’assurance ma- ladie obligatoire.

(7)

2. Santé et médicaments

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), un accès élargi aux médicaments essentiels pourrait em- pêcher le décès d’environ 10 millions de personnes chaque année. 1,8 milliard de personnes, dont 98%

dans les pays en développement, n’ont pas accès aux médicaments dont ils ont besoin. En revanche, 20% de la population, principalement en Amérique du Nord, en Europe et au Japon, utilisent plus de 80% de l’en- semble des médicaments.

Au niveau des dépenses de santé, le poste « médica- ments » est de loin le plus important. Les plus pauvres y consacrent leurs maigres ressources.

Le médicament est un bien de santé, l’accès aux trai- tements est souvent une question de vie ou de mort.

Pourtant, il est souvent considéré comme une simple marchandise, soumis comme n’importe quel autre bien de consommation aux dispositions qui régissent le commerce international. Le prix du médicament est fixé par les marchés occidentaux et pas pour le pouvoir d’achat des gens. Que ce soit pour traiter une diar- rhée ou un épisode de paludisme compliqué, les mé- dicaments sont inabordables pour la majorité de la population en afrique. Les prix sont particulièrement élevés pour les médicaments protégés par un brevet.

Et dans les cas où ils sont fournis gratuitement par l’Etat (par exemple pour soigner la tuberculose ou le VIH), d’autres problèmes surgissent : épuisement des stocks, examens sanguins complémentaires payants, fraudes et revente des traitements…

L’ adPiC, ça Pique énormément

Depuis 1994, les accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) obligent les pays membres à se sou- mettre aux ADPIC (Accords sur les droits de propriété intellectuelle liés au commerce). Il n’est, en principe, plus possible de produire un médicament ou de l’ache- ter à l’étranger sans l’autorisation du propriétaire de l’invention, qui garde ce pouvoir pendant au moins 20 ans.

Selon les multinationales pharmaceutiques, « Big Pharma », la protection des brevets est indispensable pour assurer le développement et le financement de l’innovation. Difficile d’avaler la pilule, quand on sait :

> que les budgets de marketing et de publicité sont deux fois plus élevés que ceux de la recherche;

> que la santé économique de cette industrie est plus florissante que jamais. Le secteur pharma- ceutique est en effet le plus rentable de tous les secteurs économiques légaux;

> qu’une pratique courante consiste à déposer une molécule sans l’exploiter, simplement pour s’as- surer que les concurrents n’exploiteront pas le produit.

L’ADPIC, qui protège les droits de propriété intellec- tuelle et rend ainsi plus chères les connaissances en matière de médicaments, a des conséquences extrêmes pour les pays du Sud. Il bride en effet le commerce en médicaments génériques malgré la dé- claration de l’OMS selon laquelle l’ADPIC ne peut s’ap- pliquer au détriment de la santé publique. En pratique,

> La Belgique et l’Union européenne permettent aux pays en développement de décider et de contrôler leur approvisionnement en médi- caments vitaux, génériques, abordables et de qualité, via la production locale et une politique commerciale adaptée.

> Les autorités belges consacrent à la recherche sur les maladies délaissées une partie du bud- get dédié à la santé.

nous demandons que :

(8)

la marge de manœuvre est extrêmement étroite : les pays ne peuvent en appeler aux médicaments géné- riques qu’en cas de « crise de la santé » et à condition qu’une compensation financière soit versée à l’entre- prise pharmaceutique détenant le brevet.

L’Union européenne veut même aller plus loin à ce niveau et, avec les mesures ADPIC-plus, protéger davantage les droits de la propriété intellectuelle à l’avantage des grandes entreprises. Dans le cadre de cette politique, l’Union européenne veut imposer ces mesures aux pays en développement via des ac- cords de libre-échange, ce qui va ainsi radicalement à l’encontre d’autres obligations et engagements inter- nationaux, comme l’accès à des médicaments abor- dables dans le monde.

Mais tant que la concurrence des médicaments gé- nériques sera empêchée par les pays occidentaux et leurs multinationales, le prix des médicaments continuera à être élevé. Selon les calculs de l’OMS, la concurrence des génériques entraînerait une baisse des prix des médicaments de 40 à 80%.

La Belgique et l’Union européenne doivent permettre aux pays en développement d’obtenir des médica- ments essentiels, génériques, de qualité et acces- sibles. Ce n’est possible que si les capacités de pro- duction et de distribution propres de médicaments dans le Sud sont renforcées et si la politique euro- péenne de commerce n’instaure pas de barrières à l’accès à ces médicaments via des réglementations imposées dans les accords commerciaux bilatéraux.

très Peu de reCherChe sur Les maLadies troPiCaLes

Certaines maladies infectieuses, comme la tubercu- lose, s’étendent ou font leur réapparition, en Afrique, mais également en Europe centrale et orientale. La re- cherche et le développement sur le traitement de ma- ladies spécifiques aux pays pauvres sont quasiment abandonnés par les trusts pharmaceutiques parce que ces médicaments ne sont pas rentables, faute de demande solvable. Au cours des trente dernières années, plus de 1.500 nouveaux médicaments ont été développés, mais 20 d’entre eux seulement étaient destinés aux maladies « tropicales » typiques. Dans les choix de recherche, le premier critère est le pro- fit attendu. La règle du « blockbuster » concentre les recherches sur les médicaments qui rapporteront au minimum un milliard de dollars de ventes annuelles.

Les entreprises argumentent que les droits de pro- priété intellectuelle constituent un stimulant pour l’innovation : elles investissent dans la recherche et le développement en vue d’obtenir une position de mo- nopole sur le produit final pendant une période déter- minée. Mais elles empêchent ainsi que les connais- sances accumulées auparavant ne soient accessibles aux chercheurs. En outre, il est entretemps devenu notoire que ces droits de brevet ne mènent pas du tout à l’innovation dans la recherche de médicaments pour les maladies touchant les pays pauvres, tout simple- ment parce qu’il n’existe pas de marché rentable pour ces médicaments. Par conséquent, moins de 10% du budget de la recherche mondiale va aux maladies qui touchent principalement 90% de la population.

(9)

L’union euroPéenne menaCe L’aCCès aux médiCaments dans Le sud

L’Union européenne et l’Inde négocient déjà depuis un certain temps un accord de libre-échange en- traînant bon nombre de conséquences sur l’accès aux médicaments dans le Sud. L’Inde est reconnue comme la pharmacie des pays en développement.

C’est en effet l’un des rares pays en développement à avoir développé sa propre industrie pharmaceutique et à commercialiser des médicaments efficaces et abordables vers des dizaines d’autres pays en dé- veloppement. 90% des médicaments contre le sida dans les pays en développement proviennent d’Inde.

Au moyen de cet accord de libre-échange avec l’Inde, l’Europe veut maintenant imposer des règles plus strictes dans le domaine des droits de la pro- priété intellectuelle. Les fabricants indiens de mé- dicaments génériques auront par conséquent plus de difficultés à écouler leurs produits sur le marché et les prix augmenteront. L’accord de libre-échange UE-Inde menace non seulement une source de mé- dicaments génériques abordables, mais il met éga- lement en danger d’innombrables vies humaines dans les pays en développement.

Source : Plate-forme Santé et Solidarité www.sante-solidarite.be

queLs Liens aveC Les mutueLLes de santé ?

L’accès aux médicaments représente une des princi- pales contraintes à la hausse de la qualité des soins et donc au développement du réseau mutualiste.

Il s’agit avant tout de problèmes de disponibilité, de qualité et de coût. Souvent, il est difficile d’accéder à des médicaments essentiels génériques de qualité et à coût abordable. Les mutuelles et les organisations

sociales qui s’occupent de santé ne se contentent pas de constater le problème, mais tentent de le dépasser en travaillant à une meilleure distribution des médica- ments ou en créant elles-mêmes des pharmacies qui travaillent dans une optique sociale.

éviter la maladie, c’est encore mieux. C’est pourquoi les mutuelles de santé organisent des séances d’in- formation et d’échanges sur des thèmes liés à la pré- vention des maladies.

(10)

Certains pays dépensent vraiment beaucoup d’argent dans les soins de santé, alors que les pays pauvres disposent à peine des moyens nécessaires : moins de 30 dollars par an pour la santé d’un habitant d’un pays en développement, contre cent fois plus (3.000 dollars en moyenne) pour un habitant d’un pays de l’OCDE.

Mais cherté ne veut pas nécessairement dire qualité.

Nulle part, on ne dépense autant en soins de santé qu’aux Etats-Unis, soit 7.500 dollars par an par habi- tant en 2010. Comment expliquer alors que, malgré les réformes en cours, des millions d’Américains demeu- rent insuffisamment, voire pas du tout assurés contre la maladie ? Le système de santé y est en grande par- tie aux mains du secteur privé lucratif. Dans la pra- tique, cela signifie davantage de commercialisation, moins de qualité, et moins d’accès aux soins médicaux pour les plus démunis.

Dans certains pays du Sud, la privatisation du secteur de la santé est en cours et les soins deviennent inac- cessibles à une partie de la population. Les malades riches sont soignés par des prestataires privés tandis que les pauvres doivent se débrouiller avec un service public à l’abandon, faute de moyens.

Après avoir imposé le sous-financement des bud- gets publics de santé des pays en développement via des programmes d’ajustement structurels (PAS), les institutions financières internationales telles que la Banque mondiale n’ont de cesse aujourd‘hui d’encou- rager des réformes qui conduisent généralement à la

La néCessité d’un

système de santé PuBLiC fort

La diminution des budgets de santé est le principal moyen pour arriver à la privatisation des soins de santé. Sans moyens suffisants, la qualité des soins publics chute et les patients qui en ont les moyens vont dans les structures privées. Mis à part les ONG et les institutions caritatives, les prestataires privés sont plutôt tournés vers le profit et non vers les besoins de la population majoritaire.

Le fossé qui sépare le secteur public du secteur privé commercial est source d’inégalité, la prestation des services publics étant déficiente tandis que, dans le secteur privé, le surtraitement est monnaie courante.

Dans les sections les plus riches du secteur privé, les examens médicaux et les traitements sont semblables à ceux des pays industrialisés, alors qu’ailleurs dans le même pays, les gens ne peuvent même pas soigner un épisode de paludisme.

Par ailleurs, il n’est pas du tout prouvé que la privati- sation puisse avoir un effet positif sur la qualité ni sur les prix. Les soins de santé privés peuvent parfois ob- tenir de meilleurs résultats sur le plan de l’efficacité, mais les marges bénéficiaires font par contre grimper les prix.

La privatisation peut aussi passer par la sous- traitance au secteur privé. En 1997, la Colombie a aug- menté les budgets de santé de 54% et appliqué depuis

3. La lutte contre la

commercialisation des soins de santé

> La Belgique et l’Union européenne s’engagent, tant ici que dans le Sud, à œuvrer pour le main- tien, le développement et le renforcement de services de soins de santé et de mutualités qui ont exclusivement un objectif social.

> Les institutions internationales telles la Banque mondiale, le FMI et l’OMS investissent dans un système public de santé plutôt que de favoriser les systèmes de soins de santé privés lucratifs.

nous demandons que :

(11)

payer plus cher les soins facturés par le secteur privé.

Comme l’Etat manque le plus souvent de moyens pour contrôler ces structures, l’obligation de donner accès à tous à une santé de qualité n’est pas respectée. La stimulation d’une politique de santé publique est dès lors cruciale pour garantir l’accès universel aux soins de santé.

santé et LiBre-éChange

Il ne faut pas sous-estimer l’impact du libre-échange extrême sur la santé. La mondialisation libérale, telle que nous la connaissons actuellement, est au service de multinationales et il est prouvé qu’elle élargit le fossé entre les riches et les pauvres, les personnes en bonne santé et les malades. Les pauvres deviennent plus pauvres et doivent de plus en plus prendre en charge les coûts de leurs soins médicaux eux-mêmes, en raison d’une mauvaise politique de santé.

Ce processus risque de s’accélérer encore avec la mise en œuvre progressive de l’Accord général sur le commerce des services (AGCS) car, en livrant la santé aux intérêts du secteur privé, cet accord aboutirait à un démantèlement du service public. Les déséqui- libres actuels, dans le champ de la santé, ne feraient que s’aggraver dramatiquement.

Pousser toujours plus loin la libéralisation des mar- chés dans le Sud minerait encore davantage le peu de services publics restants aujourd’hui. Les autori- tés dans les pays en voie de développement ne seront alors plus du tout en mesure d’assurer le paquet mini- mum de services à leurs citoyens.

En pratique, la lutte contre les problèmes de santé dans les pays en développement exige une approche globale avec un commerce mondial servant également les intérêts de la majorité pauvre. La santé doit rester en dehors de la logique du marché, du libre-échange et de la privatisation si elle veut être accessible à tous.

La santé ne peut pas constituer une sous-partie des accords de libre-échange que l’Union européenne né- gocie avec les pays du Sud et les services de soins de

santé doivent rester en dehors de l’Accord général sur le commerce des services (AGCS).

queLs Liens aveC Les mutueLLes de santé ?

Dans les mutuelles de santé, ce ne sont pas que les assureurs et les gestionnaires de capitaux qui ont droit au chapitre. La mutuelle ne travaille pas pour faire du bénéfice, mais pour organiser des soins de santé ac- cessibles et de qualité à ses membres. Les mutuelles sont des acteurs qui revendiquent auprès des diffé- rentes autorités des investissements dans le système de santé public. Que ce soit en Europe de l’Est, en Gui- née, au Burkina Faso ou au Mali, des mutuelles créent l’offre de soins, travaillent avec le secteur non lucratif ou encore visent à renforcer la qualité dans le secteur public.

(12)

“On va à Tondo pour mourir”, c’est ainsi que les gens décrivent Tondo, un des nombreux bidonvilles de Manille, la capitale des Philippines. Le sous-finan- cement structurel de l’hôpital local rend impossible un service de qualité. Il n’y a pas d’argent pour les médicaments, pas d’argent pour les appareils médicaux, pas d’argent pour le personnel, tout simple- ment parce que le gouvernement n’investit pas dans un secteur de santé publique.

Les habitants de Tondo en sont les victimes, littéralement. Ils vont à l’hôpital quand c’est déjà trop tard.

Le ComBat de

L’aLLianCe des travaiLLeurs de La santé Contre La Privatisation aux PhiLiPPines

Le syndicat philippin du personnel des soins de santé, l’alliance des travailleurs de la santé (al- liance of Health Workers ou AHW), a fait de la lutte contre la privatisation des soins un de ses chevaux de bataille. Les autorités philippines mènent de- puis 1996 une politique active en matière de pri- vatisation des soins de santé et le gouvernement continue de vendre les hôpitaux. Le rapport s’élève maintenant à 700 hôpitaux privés contre 661 hôpi- taux publics, avec un immense contraste entre les deux. En raison du manque d’investissements de l’état dans les hôpitaux publics, ils deviennent de plus en plus chers et doivent faire face à une pé- nurie chronique de médicaments, d’équipements techniques et de personnel. Le budget public pour les soins de santé a diminué en 2010 de 3,5% par rapport à 2009.

L’AHW essaie de lutter contre cette tendance par des concertations avec les autorités et surtout par

des actions publiques. En 2009, une augmentation de salaire de 3.000 pesos (52 euros) par mois a pu être obtenue pour le personnel de soins de santé dans les hôpitaux publics. Elle sera complètement réalisée en 2012, de sorte que le personnel des soins de santé gagnera au minimum 9.000 pesos (environ 157 euros) par mois. En outre, l’AHW a pu mettre un frein à la privatisation mise en route.

Sous la grande pression exercée par l’AHW, le gou- vernement a provisoirement suspendu ses plans de démantèlement des hôpitaux publics. Mais la ba- taille est loin d’être gagnée : le nouveau président élu Aquino a fait beaucoup de promesses avant les élections, mais il semble de plus en plus les oublier.

Le budget consacré aux soins de santé continue à diminuer et les autorités mènent une politique ac- tive de « brain drain » : elles concluent des accords avec d’autres pays pour recruter des infirmières philippines et y gagnent même de l’argent… De l’ar- gent qui n’est pas consacré à leur propre système de soins de santé, mais au « remboursement de la dette publique… »

(13)

4. La pénurie

de professionnels de santé

Pourquoi tant de pays à travers le monde sont-ils confrontés à une carence de personnel soignant alors qu’il est dans notre nature humaine de prendre soin d’autrui et que nous le faisons naturellement pour nos proches ? Plusieurs facteurs, tant internes qu’ex- ternes, peuvent expliquer cette pénurie. Générale- ment, on parle d’un certain nombre de facteurs « push

& pull » (poussée et attraction). Les facteurs « push » de plus en plus récurrents sont la pression, l’épuise- ment, les mauvaises conditions de travail, le bas ni- veau et l’irrégularité dans le versement des salaires.

Dans certains pays en voie de développement vient se greffer une situation politique instable ou dénuée de perspective, avec tous les problèmes de sécurité qui en découlent. Le principal facteur « pull » est l’insuffi- sance de personnel dans les pays riches et le vieillis- sement de la population, qui poussent les directeurs d’hôpitaux ou de maisons de repos à recruter active- ment sur le marché international de l’emploi. Le per- sonnel le plus compétent est ainsi littéralement chipé aux institutions médicales du Sud.

« Brain drain »

La population dans les pays développés vieillit : la pro- portion des plus de 80 ans aura doublé d’ici 30 ans.

Face à ce nouveau défi, nos pays font notamment appel à deux catégories de travailleurs immigrés: ceux qui acceptent des emplois mal payés, durs et dangereux et les professionnels hautement qualifiés, dont font par- tie les médecins et infirmiers. Sous couvert de pénurie, les structures de soins de nos pays recrutent du per- sonnel de santé en provenance d’Europe de l’Est et des pays du Sud. En Belgique, une société commerciale a

été chargée il y a quelques années de recruter des in- firmiers en Roumanie. Or, le véritable problème chez nous n’est pas lié au nombre de diplômés, mais au fait que plus de 30.000 d’entre eux ne travaillent plus dans le secteur de la santé, et que près de la moitié le font à temps partiel en raison entre autres du manque de re- connaissance de la profession, des conditions de travail difficiles ou encore de salaires peu attractifs.

Cela soulève d’importantes questions éthiques car l’émigration (brain drain) constitue un facteur aggra- vant des problèmes des systèmes de santé de ces pays. La Commission économique des Nations unies pour l’Afrique et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) estiment que depuis 1990, 20.000 professionnels africains quittent annuellement leur pays. Selon l’OMS, l’Afrique totalise 22% des malades pour seulement 2% du personnel soignant. A l’échelle mondiale, on évalue à 4,3 millions le nombre de profes- sionnels supplémentaires nécessaires pour atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement.

Selon l’OIM toujours, les pays africains consacrent chaque année environ 4 milliards de dollars à l’emploi d’environ 100.000 expatriés non africains pour com- bler le déficit en ressources humaines de santé.

La Belgique devrait par conséquent prendre l’initiative de définir et surtout de mettre en œuvre un cadre lé- gal qui prévienne le « brain drain » du personnel sani- taire du Sud. Le point de départ devrait être le Global Code of Practice on the International Recruitment of Health Personnel qui fut arrêté le 21 mai 2010 lors de l’Assemblée mondiale de la santé, le plus haut niveau décisionnel de l’OMS.

> La Belgique et l’Union européenne mettent en œuvre le code de pratiques sur le recrutement international du personnel de santé et adapter ses interventions pour promouvoir la stabilité des ressources humaines en santé dans les pays du Sud.

> La Belgique s’engage pour un travail et un sa- laire décents pour le personnel des soins de santé au sein du secteur de la santé dans la politique de coopération au développement.

nous demandons que :

(14)

des faCteurs muLtiPLes

Tant que les facteurs qui rendent l’émigration pos- sible persistent, il est illusoire de penser résoudre le manque d’effectifs simplement par un retour des pro- fessionnels expatriés. Dans les pays les plus pauvres, des millions de personnes continueront à tenter leur chance dans les pays riches pour trouver des em- plois rémunérateurs et améliorer leur niveau de vie.

En outre, l’émigration des professionnels de la santé ne se fait pas seulement vers l’étranger. En interne, on constate également un déplacement massif des personnels soignants du secteur public vers le sec- teur privé, de la pratique de la médecine à la santé publique et des zones rurales vers les zones urbaines.

Le déficit le plus sévère se constate dans les services publics ruraux, où les besoins sont pourtant les plus importants.

Une des raisons importantes de cette hémorragie – tant interne qu’externe - est liée aux politiques éco- nomiques internationales : les mesures d’ajustement structurel et autres édictées par le FMI et la Banque mondiale dans les pays concernés ont pour consé- quence de réduire les dépenses consacrées au sec- teur public et donc les conditions de travail des pro- fessionnels de la santé. Extrêmement dépendants des bailleurs internationaux, ces pays sont contraints de se plier à des objectifs de croissance économique en sacrifiant leur législation économique et sociale. Si on prend le cas de la RDCongo, qui vient d’atteindre le point d’achèvement PPTE (pays pauvres très en- dettés), le budget 2010, qui s’élève à 6,2 milliards de dollars - soit 77 fois moins que celui de la France pour une population de taille équivalente - n’accorde qu’une place réduite aux besoins fondamentaux de la popula- tion. Cette situation sévit malheureusement dans de nombreux autres pays en développement.

importante du sida chez les soignants) qui affectent la motivation. Avec comme autre conséquence le recru- tement du personnel de santé le plus compétent par les partenaires de l’Etat (ONG, agences des Nations unies, bureaux de coopération). Ces mêmes agences ont en outre souvent recours à des experts techniques étrangers aux dépens des experts nationaux. Déjà en 1993, le PNUD (Programme des Nations unies pour le développement) soulignait la persistance de la dépen- dance africaine envers un personnel technique d’ex- patriés.

L’aPPort des mutueLLes de santé

Via les conventions qu’elles signent, les mutuelles de santé contribuent à améliorer la viabilité et les condi- tions de travail au sein des structures sanitaires. Elles offrent des mécanismes avantageux pour les patients et pour les agents de santé. Une mutuelle de santé améliore la fréquentation du centre de santé et la ré- gularité des paiements. Elle garantit aussi une trans- parence dans la gestion et les choix faits en termes de dépenses : la création et le renforcement d’initiatives mutualistes peuvent avoir un impact sur la qualité des soins et la bonne gouvernance du secteur de la santé par la création d’un contre-pouvoir formé, informé et organisé, capable de mieux négocier sur pied d’égalité avec les prestataires de soins et de mener des actions de plaidoyer vis-à-vis des autorités locales, régionales et nationales.

(15)

GK organise des soins de santé à travers tout le Bangladesh. Il forme du personnel infirmier local, principalement des femmes. La formation est gratuite, mais les étudiants s’engagent en contrepartie à travailler pendant 4 ans pour l’organisation.

gK au BangLadesh investit dans La formation du PersonneL médiCaL

Le Centre de santé populaire, “Gonoshasthaya Kendra” en bengali, est une ONG de développe- ment intégré, animée par des équipes pluridiscipli- naires bangladaises. GK a été créé en 1971 au len- demain de la guerre de libération, par une équipe de médecins qui voulaient gagner une autre guerre

“ la guerre contre la pauvreté, la faim et la maladie des plus pauvres “. GK s’efforce de mettre en place des actions de développement intégré simples et efficaces, adaptées aux réalités des populations les plus pauvres et particulièrement les femmes et les enfants. L’émancipation féminine est le levier dans la réalisation de ces actions qui bénéficient à plus d’un million de personnes en zones rurales et ur- baines.

Parmi ses activités, la formation professionnelle médicale dans le domaine de la santé occupe une

place importante. GK a fondé une université située à Savar qui comprend une faculté de médecine et une faculté dentaire. L’organisation forme égale- ment des paramedics (sorte d’infirmières polyva- lentes), des travailleurs de santé spécialisés dans les soins aux personnes âgées, des sages-femmes traditionnelles, des physiothérapeutes. Les para- médics sont les véritables vecteurs de la santé en milieu populaire et rural, chaque paramedic ayant la responsabilité du suivi de 700 à 800 familles ré- parties sur 1 à 4 villages. Après une formation de trois ans, les paramedics s’engagent à travailler pour GK encore quatre années. Quant aux méde- cins, GK n’en emploie qu’une quarantaine et en forme donc beaucoup plus pour le pays.

Avec cette stratégie, GK a réussi à atteindre les Ob- jectifs du millénaire dans ses zones d’intervention pour ce qui concerne les mortalités maternelle et infantile. GK a ainsi réduit la mortalité infantile de plus de 60% dans ces régions.

(16)

La Pauvreté et L’inégaLité : des faCteurs déterminants Pour votre santé

Le lien entre la pauvreté, l’inégalité et la santé n’est pas difficile à faire. Ce sont les pauvres qui ont le plus de difficultés à se protéger, qui ont le plus de risques de tomber malades et qui n’ont pas les possibilités de se soigner lorsqu’ils sont malades. La pauvreté est, de plus, également à la base de la malnutrition, ce qui rend les personnes plus sensibles aux maladies et accidents. À cela s’ajoute le fait que les pays pauvres manquent souvent de ressources pour offrir des ser- vices de santé adéquats et de qualité à leur population.

De plus, les gouvernements ne font pas les bons choix politiques afin de répondre à ces problèmes.

La lutte contre la pauvreté et l’inégalité est par consé- quent cruciale pour que plus de gens vivent en bonne santé. L’Organisation mondiale de la santé ne suggère pas sans raison que les inégalités en matière de santé sont dans une large mesure imputables aux circons- tances dans lesquelles les individus naissent, grandis- sent, vivent, travaillent, vieillissent et donc aux choix des gouvernements pour changer quelque chose à cette situation. La politique sociale, les relations de pouvoir économiques, les différences culturelles et les mesures politiques dans ces domaines influencent grandement ces conditions. En bref, plus haut vous vous situez sur l’échelle sociale, plus votre santé est garantie. L’inégalité sociale tue des gens, et cela à grande échelle. Ainsi, l’espérance de vie au Japon ou en Suède est de plus de 80 ans, tandis qu’en Afrique du Sud, elle atteint à peine 50 ans.

les soins de santé dans un contexte plus large : une politique qui inscrit la santé dans la lutte contre l’ex- clusion sociale et l’inégalité, la pauvreté et la vulnéra- bilité. Ce n’est pas différent chez nous, en Belgique, où les études montrent que les pauvres vivent en moyenne deux à six ans de moins que leurs compatriotes plus aisés. Dans le Sud, l’écart entre riches et pauvres est beaucoup plus grand, littéralement, mortel.

une PoLitique de ProteCtion soCiaLe

Traditionnellement, on pense le plus souvent au sec- teur de la santé afin de répondre aux maladies et aux besoins en matière de santé : fourniture de vaccins contre le paludisme ou création de centres de santé à proximité des gens. Le degré de mortalité et de ma- ladie élevé, souvent chez les jeunes enfants, est ce- pendant en grande partie dû aux circonstances dans lesquelles les individus naissent, grandissent, vivent, travaillent et vieillissent. Les programmes de santé doivent par conséquent répondre à ces divers aspects sociaux : la souveraineté alimentaire, les conditions de travail et de vie décentes, ainsi que l’éducation n’en sont que quelques exemples.

Grâce à une meilleure politique sociale et économique, des conditions favorables peuvent être créées pour tous ces facteurs. Une politique où la protection so- ciale joue un rôle important. Les pays avec une bonne protection sociale peuvent généralement afficher de meilleures notes sur le plan de la santé publique : des allocations familiales plus élevées sont liées à une

5. une politique de protection sociale

> La protection sociale soit une priorité dans les politiques de coopération belge et européenne au développement et dans leurs relations étrangères.

> Les autorités, tant des pays donneurs que des pays en développement, reconnaissent le rôle des mouvements sociaux dans l’élaboration et l’exécution d’un système de protection sociale.

nous demandons que :

(17)

importantes sont liées à une espérance de vie plus longue, car même les personnes sans travail peuvent subvenir à leurs besoins vitaux.

Mais 80% de la population mondiale doit malheureu- sement survivre sans protection sociale adéquate.

La protection sociale est un mécanisme éprouvé qui crée et redistribue la richesse selon le principe de la solidarité et qui vise à donner à chacun un niveau de vie décent. Elle veille à ce que les initiatives visant à lutter contre la pauvreté profitent également aux plus pauvres et aux plus vulnérables dans la société.

Les mutueLLes : des mouvements soCiaux qui Luttent Pour Le Changement soCiaL

Comme de nombreux gouvernements dans le Sud n’offrent pas de protection sociale adéquate à leurs ci- toyens, les mouvements sociaux sont cruciaux dans le développement d’une politique de protection sociale.

Les caisses d’assurance maladie, les syndicats, les or- ganisations paysannes, les coopératives, les organisa- tions de jeunesse, les associations pour les femmes, etc. entreprennent en effet eux-mêmes des actions contre l’exclusion sociale et l’inégalité, la pauvreté et la vulnérabilité.

Les mouvements sociaux essaient non seulement de faire face collectivement aux défis de la société, mais ils s’orientent en premier lieu vers ceux qui restent aujourd’hui exclus de toute protection sociale : les populations pauvres et vulnérables qui représentent toujours la grande majorité de la population mondiale.

Ces gens sont malheureusement trop souvent privés de leurs droits. Dans le Sud, il s’agit dans la plupart des cas de travailleurs employés dans l’économie in- formelle et de la population rurale, dont la majorité sont des femmes, des jeunes et/ou des immigrés qui travaillent généralement sans cadre juridique et donc sans protection sociale.

Des mouvements sociaux, comme les mutuelles de santé et les syndicats, jouent ici plus que le simple rôle d’assurance maladie, car elles procurent en même temps une protection et une valorisation à

leurs membres. De cette façon, non seulement les symptômes d’un mauvais accès aux soins de santé sont traités, mais les causes sont également prises en charge par une politique de protection sociale : par une cogestion ou en essayant d’élargir la sécurité so- ciale ; en orientant les groupes les plus faibles de la société vers l’aide sociale ; en fortifiant leurs propres membres par des microcrédits, l’éducation ou des formations professionnelles, souvent en collaboration avec d’autres mouvements sociaux.

Outre l’assistance, nous ne pouvons pas ignorer le rôle que les mouvements sociaux jouent dans l’avènement d’une société plus solidaire. En mettant en place des actions collectives, en organisant des campagnes, ou à travers des plaidoyers politiques ciblés lors d’un dialogue structuré ou non avec le gouvernement, les mouvements sociaux cherchent à étendre le système actuel de protection sociale aux groupes exclus.

(18)

Avec l’aide de Kondo Jigima, ces femmes ont pu acheter une machine à couper les oignons, accroître leur production et donc obtenir un revenu plus élevé.

revenus et santé : une interaCtion qui Porte ses fruits au maLi

Au Mali, l’un des pays les plus pauvres du continent africain, la santé est un bien précieux. La pauvreté et la maladie se côtoient de très près : les soins de santé sont coûteux, une alimentation variée est chère et les personnes en ignorent souvent l’importance. La moitié de la population vit à plus de 5 km d’un poste de santé. En outre, en raison de la sécheresse, le sol est extrêmement pauvre, avec toutes les conséquences que cela entraîne : la population se bat contre la sous-alimentation ou se débrouille dans le meilleur des cas avec une alimentation peu variée et pauvre en énergie. Les chiffres ne trompent pas : 30% des enfants souf- frent d’un retard de croissance, 23% sont sous- alimentés, voire faméliques, et 40% ont un poids insuffisant.

Pour relever le défi de la lutte contre l’extrême pau- vreté, la sous-alimentation et le manque d’accès aux soins de santé, l’utm, l’union technique de la

mutualité malienne, et Kondo Jigima, une des plus grandes institutions d’épargne et de microcrédit du Mali, collaborent dans plusieurs régions du Mali.

Pour Kondo Jigima, il est en effet important qu’un client reste en bonne santé pour pouvoir rembour- ser son prêt. Et inversement, les personnes ne res- tent pas membres de la mutualité si elles n’ont pas de revenus.

Les Maliens qui contractent un emprunt auprès de Kondo Jigima pour, par exemple, acheter des semences ou monter leur affaire, étaient obligés d’utiliser cet argent lorsqu’ils tombaient malades.

Grâce à la collaboration avec la mutualité, ils bé- néficient maintenant d’une assurance maladie et les frais de la visite chez un médecin sont réduits.

L’argent qu’ils ont emprunté auprès de Kondo peut dorénavant être vraiment investi dans une activité productive. Cette collaboration a un résultat dans les deux sens : toute personne disposant de re- venus peut payer une cotisation à la mutualité et toute personne en bonne santé peut travailler.

(19)

6. Recommandations

Un accès pour chacun à des soins de santé de qualité est possible. C’est une question de volonté politique. une question de choix politiques justes au nord et au sud. Hélas, des soins de santé accessibles et de qualité ne figurent pas toujours très haut dans les priori- tés. Certainement pas dans les pays en développement. Il appartient à tous les décideurs politiques de provoquer un changement à cet égard.

Le rôle des mutuelles, en tant que mouvements sociaux, est de ce fait crucial. Pour définir et mettre sur pied une politique de santé qui soit vraiment accessible à chacun.

Y compris pour les groupes les plus pauvres et les plus fragiles de la société.

solidarité mondiale mène campagne avec les mutualités chrétiennes, Jeunesse et santé, l’ucP, altéo et le cieP pour l’accès aux soins de santé pour tous et partout dans le monde. Ensemble, avec nos partenaires du Sud et de l’Europe de l’Est, nous voulons encourager les responsables politiques à faire de la santé leur premier souci. Avec ces dix propositions concrètes, la Belgique et l’Union européenne pourront jouer un rôle de premier plan.

nous demandons que :

> Les autorités belges prévoient de consacrer 15% du budget de la coopération au déve- loppement (APD) au renforcement des systèmes de santé dans les pays partenaires.

> Dans les pays partenaires, les autorités belges exigent la participation des mutuali- tés locales au développement et à l’exécution d’une politique de santé où chacun a accès aux soins de santé et peut défendre ce droit.

> La Belgique et l’Union européenne permettent aux pays en développement de décider et de contrôler leur approvisionnement en médicaments vitaux, génériques, abor- dables et de qualité, via la production locale et une politique commerciale adaptée.

> Les autorités belges consacrent à la recherche sur les maladies délaissées une partie du budget dédié à la santé.

> La Belgique et l’Union européenne s’engagent, tant ici que dans le Sud, à œuvrer pour le maintien, le développement et le renforcement de services de soins de santé et de mutualités qui ont exclusivement un objectif social.

> Les institutions internationales telles la Banque mondiale, le FMI et l’OMS investis- sent dans un système de santé public plutôt que de favoriser les systèmes de soins de santé privés lucratifs.

> La Belgique et l’Union européenne mettent en œuvre le code de pratique sur le recrute- ment international du personnel de santé et adaptent leurs interventions pour promou- voir la stabilité des ressources humaines en santé dans les pays du Sud.

> La Belgique s’engage pour un travail et un salaire décents pour le personnel des soins de santé au sein du secteur de la santé dans la politique de coopération au développement.

> La protection sociale soit une priorité dans les politiques de coopération belge et européenne au développement et dans leurs relations étrangères.

> Les autorités, tant des pays donneurs que des pays en développement, reconnais- sent le rôle des mouvements sociaux dans l’élaboration et l’exécution d’un système de protection sociale.

sourCes

Actieplatform Gezondheid en Solidari- teit, “Platformtekst Gezondheid en So- lidariteit.” (Plate-forme Action Santé et Solidarité, « Charte »)

Actieplatform Gezondheid en Solidari- teit, “Intellectuele eigendomsrechten en toegang tot kwaliteitsvolle geneesmid- delen”, 2010 (Plate-forme Action Santé et Solidarité, « Les droits de la propriété intellectuelle et l’accès à des médica- ments de qualité », 2010.)

European Working Group on Social Pro- tection and Decent Work & The Grow up Free from poverty Coalition, “Protecting people, transforming lives. Why social protection should be an essential part of the EU’s development cooperation strategy.” 2010.

ILO, World Social Security Report 2010/11: Providing coverage in the time of crisis and beyond, 2010.

J. De Maeseneer, e.a., “Geneesmidde- len en ontwikkelingslanden”, Tijdschrift voor Geneeskunde, UZ Gent, februari 2010.

V. Van Belle en F. Van Overmeieren,

“GATS en Gezondheidszorg”, http://

www.mondiaal.be/files/mondiaal/at- tachments/GATS_en_gezondheidszorg.

pdf

Solidarité Mondiale, “La protection so- ciale : une question de changement social. Visions et stratégies des mouve- ments sociaux.” WSM- Rapport théma- tique mondiale – N°2-2010. Solidarité Mondiale, « Etude comparative des sys- tèmes de protection sociale au Rwanda et Burundi », 2010.

WHO, Closing the gap in a generation.

Health equity through action on the so- cial determinants of health, 2008.

WHO, Infectious Disease Report, 2005.

WHO, Public Health, Innovation and In- tellectual Property Rights, Commission on Intellectual Property Rights, Innova- tion and Public Health (CIPIH), 2006.

WHO, World Health Report 2010.

(20)

Références

Documents relatifs

1 Cet article, extrait d’un projet de recherche plus exhaustif, porte sur l’accès aux soins de santé chez les migrants à statut précaire qui, en raison de leur inadmissibilité

• Il faut lutter contre le gaspillage, la loi n°2018-938 du 30 novembre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une

Il faut se méfier des anachronismes ou d’une périodisation artificielle, mais à partir de travaux de juristes, de ceux de Michel Foucault et des miens, je distin- gue

Les personnes étrangères qui disposent d’un titre de séjour en France sont affiliées à l’assurance maladie française (la sécurité sociale), soit parce

Les mutuelles disposent également d’un réel savoir-faire médical et exercent une action de régulation des dépenses de santé et d’innovation sociale à travers près

A partir de la rentrée 2021-2022, le nombre de places sera fixé par les universités en lien avec les régions et les Agences régionales de santé (ARS) en fonction des besoins

Social Movements and Labour Rights in the Global Garment Industry, Sabrina Zajak, Ruhr-University Bochum, Eva Kocher, University of Frankfurt & Nina Wienkoop,

Si une compréhension plus fine des usages militants du droit et de l’action en justice passe inévitablement par leur étude théorique et empirique, nous faisons le pari que