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Les productions lithiques expédientes du Néolithique final campaniforme du Sud-est de la France.

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Les productions lithiques expédientes

d u N é o l i t h i q u e

f i n a l

d u S u d - e s t d

Fin de cycle ou

Robin Furestier (ESEP - UMR 6636)

La notion de d é b ita g e expédie nt est sujette à de nombreuses discussions que l'on pe u t lire depuis longtem ps au fil des articles traitant des outillages lithiques du Néolithique. L’industrie lithique représente ie vestige archéologique principal de la Préhistoire, et vestige princeps de la Préhistoire paléolithique. Les approches typologiques puis technologiques mises en p la c e depuis le d é b u t des recherches arch é o lo g iq u e s préhistoriques sont fo rte m e n t imprégnées par ce regard d e paléolithicien, e t ont d o n c m arqué fortem ent les études des industries lithiques néolithiques.

Dans le sud-est d e la France, au Néolithique ancien e t surtout au Néolithique m oyen chasséen, les productions m ontrent des caractéristiques e t un investissement technique substantiel qui leur assurent l’intérêt des néolithiciens. La production chasséenne d e lamelles par pression, exécutée à partir des silex bédouliens des monts d e Vaucluse en est un exem ple criant. Il est d ’ailleurs fort rare de trouver la notion de d é b ita g e ou d ’outillage expédient dans les études traitant d e l’industrie lithique du Néolithique moyen alors que certaines d ’entre elles pourraient selon toute vraisem blance être com parées aux industries lithiques du Néolithique final ainsi qualifiées (Léa, ce volume).

C ’est d o n c bien l’absence d e spécificités fortes d e l’industrie lithique du Néolithique final qui a généré le recours à c e tte notion d ’expédient, étroitem ent lié à l’id é e d ’opportunism e d e la p ro d u ctio n . Les productions typiques d e grandes lames ne sont que l’exception qui confirm e la règle : q u ’elles soient

originaires des Alpes-de-Haute-Provence, du Vercors ou d e la région du Grand-Pressigny, elles sont affaire de spécialistes e t ont un statut particulier. Leur large diffusion à travers une grande partie d e l’Europe o c c id e n ta le (R enault 1998) c o n fo rte c e tte hypothèse, Ces p roduction s b é n é fic ie n t depuis longtemps d ’un regard privilégié des chercheurs e t on ne s'étonne pas de l'existence d'un PCR concernan t leur com plexité (Plisson 2003). Mais ici encore, dans tous les cas, c 'e s t l’arbre qui c a c h e la forêt...

Avant d e s'attarder sur la signification des productions expédientes, il fa u t les définir dans leur a c c e p tio n actuelle. L’exercice est aisé et assez peu c o n tra ig n a n t puisque l’ensemble des productions domestiques du Néolithique final s’est vu qualifié de près ou d e loin d ’expédiente. En excluant les grandes lames et quelques armatures retrouvées en milieu sépulcral, on s'a tta ch e ra plutôt à faire parler la m ajorité silencieuse des éclats e t des débris qui constituent souvent l'essentiel des corpus.

Les spécificités des industries lithiques expédientes du sud-est

Pour le sud-est d e la France, la dernière synthèse a bientôt 10 ans (D’Anna 1995), e t seul le PCR a b o rd a n t le Couronnien fa it a c te de renouveau en c e qui concerne l’industrie lithique domestique du Néolithique final (Lemercier e t al. 2002). L’étude des collections ancienn es e t d e quelques fouilles nouvelles, m êm e si elle n’est pas encore exhaustive, nous perm et aujourd'hui d e porter un regard neuf sur

« la fin de l'Âge d e Pierre ».

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Robin Furestier

Les travaux co n ce rn a n t les matières premières o n t é té sig n ifica tive m e n t investis ces dernières années. Les prospections menées par Raphaëlle Guilbert e t les analyses chimiques de Céline Bressy ouvrent d e nouvelles perspectives p e rm e tta n t d'a pprofondir nos connaissances des gîtes de silex.

Dès c e premier maillon d e la chaîne opératoire, une ce rta in e sim plification est constatée . Mais c e tte simplification est contrastée : d'une part, les matières premières locales sont considérablem ent privilégiées, e t d'autres part, to u t typ e d'approvisionnem ent peut être réalisé.

Ainsi pour le Couronnien par exemple, aux Fabrys e t aux Martins, le silex est souvent de bonne, voire très bonne qualité, alors que sur les sites de Martigues, du Pilon du Roy ou de Fontainieu, les matières premières utilisées sont de moindre qualité.

Les gîtes de matières premières qui ont connu une très forte exploitation au Néolithique moyen sont encore exploités mais ne connaissent plus le succès rencontré alors. Il n 'y a plus d e choix sélectif, e t des blocs, des éclats ou des galets alluviaux peuvent être collectés sans préférences apparentes.

Le m êm e c o n s ta t est dressé pour le Cam paniform e. L'acquisition d e matières premières locales est quelquefois quasi exclusive co m m e notam m ent sur les sites des Calades, du Fortin du saut, e t du Mas d e Vignole IV. C om paré aux cultures du Néolithique final, le C am paniform e est marqué par une te n d a n c e nette à l'exploitation des territoires locaux sans q u 'a u c u n e d iffé re n cia tio n ne soit toutefois possible enfre les phases anciennes e t les phases récentes.

L'aspect qualitatif des approvisionnemenfs en mafières premières esf, en revanche, plus révélateur des logiques d e gestions des outillages lithiques. C et a spect est directem ent lié à la réduction de la diversité des gîtes exploités. En privilégiant la proximité, on observe dans les séries du Néolithique final e t surtout du C am paniform e, une diminution de la qualité du silex. Toutefois, c e tte rem arque doit être n uancé e sur deux points :

• L'exploitation privilégiée de la sphère locale est le corollaire d ire ct d e la qualité du silex utilisé. Une nuance doit d o n c être faite entre, par exemple, les sites du mas de Vignole IV e t du Bois Sacré situés à une p o ig n é e d e kilomètres des très bons silex crétacés des Costières d e Nîmes, e t le site de la Balance ou des Calades, plus distants des gîtes de silex bédouliens des monts d e Vaucluse pourtant accessibles.

• Il s'agit surtout d'une baisse de la qualité m oyenne d e l'ensem ble des m atières premières im portées, e t non pas utilisées. Plusieurs blocs présentant une h é té ro g é n é ité (diaclases, parties désilicifiées...) sont découverts sur les sites, mais l'ensemble d e la production ne reflète pas c e t é ta t de fait. En effet, rares sont les blocs to ta le m e n t impropres à la taille, et un fragm ent d e qualité m oyenne pourra néanmoins générer quelques éclats d'une qualité suffisante pour satisfaire les besoins.

Les c h a n g e m e n ts d e logiques d 'a p p ro v i­

sionnem ent sont en ra p p o rt d ire c t a v e c les changem ents des relations entre les groupes d e la fin du N éolithique. Un m o n d e plus peuplé , plus segm enté e n g a g e à une gestion plus com plexe des terroirs e t territoires. L'installation des C am paniform es dans c e co ntexte a c c e n tu e c e tte com plexité. La situation to p o g ra p h iq u e extrêm e des sites cam paniform es des phases anciennes dans le Sud- Est tém oigne d e la co m plication des relations a ve c les groupes locaux et d o n c d e la difficulté d e gestion du quotidien, a v e c notam m ent le problèm e d e la fréquentation des gîtes d e matières premières déjà exploités, Vivre d e plus en plus nom breux — et différents — dans un espace d e plus en plus restreint a forcém ent généré d e nécessaires changements, notam m ent en c e qui co n ce rn e l'industrie lithique.

Ces changem ents d'ordre socio-économ iques g é n è re n t l'opposition d é jà c o n s ta té e entre une industrie lithique peu investie et fruste faisant office de consom m ables domestiques, e t une industrie lithique à h a u t investissement te c h n iq u e — e t souvent esthétique —, em blém atiqu e du besoin d e trouver une p la c e hiérarchique particulière, faisant é ta t d'un statut social différent. Ce second exem ple ayant toujours é té l'o b je t d 'é tu d e s typotechnologiques, c'est le prem ier cas qui nous intéressera ici.

Quelles productions ?

À partir d e nouvelles m atières prem ières auxquelles il fa u t s'adapter, quelles productions sont engagées ?

Le c h a n g e m e n t le plus visible est bien sûr la

« disparition » des production s lam inaires et lamellaires, à l'e xce p tio n des p roduction s d e spécialistes d e grandes lames en silex rubané o ligocèn e des Alpes-de-haute-Provence (Forcalquier, Vallée du Largue) qui ne correspondent pas, en dehors des ateliers, à des éléments constituant des chaînes opératoires intra-sites. Plusieurs produits finis laminaires ou lamellaires sont toutefois, retrouvés sur les sites. Il s'agit le plus souvent d e lamelles entières ou

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fragmentées, les lames à proprem ent parler é ta n t rarissimes, Les lamelles, présentes sur la plupart des sites, ne sont jam ais a c c o m p a g n é e s d e pièces techniques p ouvan t suggérer la mise en oeuvre d'une chaîne opératoire co m p lè te sur les sites. D'un point d e vue général, l'ensemble des éléments lamellaires connus d e c e typ e p e u t être interprété com m e des récupérations e t des réutilisations par les groupes du Néolithiques final et les C am paniform es (Furestier 2002). De rares lamelles peuvent avoir été débitées sur place, mais elles diffèrent to ta le m e n t des autres, no ta m m e n t en c e qui c o n c e rn e leur régularité (planche 1, n°3 et 4). Dans la m ajorité des cas, ces pièces ne fo n t pas clairem ent partie d'une chaîne opératoire d o n t la prédéterm ination est lamellaire, et l'on p e u t parler dans c e cas d e lamelles opportunistes. Toutefois, quelques cas p e u ve n t tém oigner d'une chaîne o pératoire ouvertem en t lamellaire (planche 1, n °l, 2 e t 5 à 7). Tous les autres éléments lamellaires découverts semblent être des pièces d e récupération (ayant servi ou non), à moins qu'il ne s'agisse d'une perduration technique e t d 'u n e production mise en oeuvre sur sites spécialisés... qu'il reste à découvrir.

D evant c e tte minorité laminaire e t lamellaire (toujours moins d e 5% des assemblages), c'est la production d 'é c la t qui est largem ent majoritaire.

C e tte masse im posante et, au prem ier regard, h o m o g è n e c o m p o rte néanm oins certaines spécificités. Les dimensions générales sont le premier critère général des industries lithiques néolithique final e t surtout cam paniform es : les modules des supports sont généralem ent faibles, Au-delà d e 5 centimètres d e long, les pièces sont rares, e t les moyennes tournent plutôt autour de 2 à 3 centimètres. Ces moyennes sont d irectem ent liées aux nucleus e t à leur nature d'origine dom inée par trois types : les nucleus sur petits blocs ou fragm ents d e blocs, les nucleus sur galets, e t les nucleus sur éclat. Dans certains cas, il p e u t s'agir d e réels choix d'approvisionnem ent : pour le Mas d e Vignole IV e t le Bois sacré par exemple, les gîtes exploités fournissent aussi des galets d e dimensions plus conséquentes qui ne sont pourtant pas sélectionnés. Les nucleus utilisés par les C am paniform es ne dépassent que rarem ent la dizaine d e centim ètres d e dimension maximum.

D'une manière générale, une nouvelle te n d a n ce à la microlithisation pe u t être constatée. C ette évolution déjà am orcée au Néolithique final prend là une dimension plus conséquente.

Du point de vue d e l'analyse technologique, la présence de petits nucleus, de petits éclats, e t de petits débris pose d e nom breux problèm es. Un nom bre non n é g lig e a b le d e ces pièces est difficilem ent caractérisable :

• D'une part, du fait d e leurs dimensions : plusieurs nucleus sont compris entre 2 et 3 centimètres d e dimensions maximum, e t certains dépassent à peine le centim ètre (Planche 2, n°5). À c e tte taille, il est quelquefois malaisé de déterm iner s'il s'agit d'un d é b ita g e ou d'une retouche. Mais la présence d'un plan d e fra p p e isolé ou plus souvent préférentiel, de négatifs organisés, etc. contraint à placer ces pièces a typ iq u e s en nucleus. Pourtant, les dimensions réduites posent à un certain m om ent des difficultés d e m aintien du nucleus.

• D'autre part, qu'ils soient réduits ou plus gros, certains nucleus sont difficilem ent classables dans leur propre catégorie : c'est le cas de quelques pièces présentan t seulem ent un, deux ou trois enlèvem ents visibles. À c e stade, il n'apparaît aucune organisation du débitage, e t les motifs d e l'arrêt de l'exploitation du nucleus sont inconnus puisque la plupart du temps, aucune raison technique (qualité d e la m atière, a c c id e n t d e taille, m a n q u e de m atière..,) ne le justifie.

Mis à part ces cas problématiques, les nucleus sont en a p p a re n c e multiples. En a p p a re n c e seulement, du fait de la ca té g o rie dom inante au Néolithique final e t au C am paniform e : les nucleus polyédriques. Ils sont le résultat d'un d é b ita g e d'éclats multipolaires qui leur confère souvent un aspect globuleux (Planche 2, n°l et 2). Dans c e dernier cas, plus aucun angle ne perm et le d é b ita g e et l'on peut supposer qu'il s'agit là d'u ne raison justifiant l'a b a n d o n de la pièce. En revanche, ces nucleus reflètent mal les chaînes opératoires mises en oeuvre en portant surtout les traces des dernières phases d'exploitation. Quelques nucleus tém oignent quand m êm e d 'u n c e rta in souci d e l'organisation du débitag e, qui se traduit souvent par un schéma simplifié. Pour le C am paniform e, plusieurs nucleus m ontrent en e ffe t un aspect polyédrique, mais surtout un plan d e fra p p e préférentiel à partir duquel partent la m ajorité des négatifs d'éclats (planche 2, n° 3 à 7).

Il a m êm e é té rem arqué dans c e rta in cas un a m é n a g e m e n t volontaire de c e plan de fra p p e par un enlèvem ent rebroussé (n° 3 et 6). Ce type de chaîne opératoire semble être indifférem m ent réalisé sur galet, p e tit nodule ou fragm ent d e bloc.

Le d é b ita g e sur é c la t est sensiblement différent. Aucun nucleus n'a ttestant l'existence d'une chaîne opératoire d é d ié e à la production d'éclats de 8 à 10 centim ètres, ces derniers sont d o n c probable m ent débités sur les gîtes mêmes e t importés sur les sites. S'ils semblent avoir été utilisés com m e supports d'outils quelques fois (en ta n t qu'arm ature fo lia cé e essentiellement), ou support de nucléus à éclats.

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Robin Furestier

Quels que soient la m atière première e t le d é b ita g e mise en œuvre, la production d'é cla ts semble bien tendre vers un m odule particulier. Le type d e nucleus n'apparaît pas déterm inant fa c e à l'o b je c tif d e p ro d u c tio n d e supports d e petites dimensions. L'étude des éclats co n firm e c e tte hypothèse en m ontrant des ensembles hom ogènes et des stigmates d e débitages cohérents a v e c les observations réalisées sur les nucleus.

S'il est d o n c a p p a re n t qu'une organisation du d é b ita g e existe, elle n'est pas non plus généralisée, et à c ô té d e ces nucleus à plan de fra p p e préférentiel existe un nom bre im p o rta n t d'inclassables pour lesquels une logique d e productivité im m édiate doit avoir prévalue. L'exploitation d'angles suffisamment ouverts pour perm ettre le d é ta ch e m e n t d'un é c la t à d o n c pu présenter un attrait suffisant à l'initiation du déb ita g e .

Les techniques

Sous toutes ces formes, l'industrie lithique

« expédiente » du Néolithique final et surtout du C am paniform e a été d é p e n d a n te de la percussion directe à la pierre dure, la plus aisée à m ettre en œ uvre, Toutefois, dans certains cas, une nouvelle te c h n iq u e d e d é b ita g e a é té a p p liq u é e : la percussion sur enclum e. Déjà mis en é vidence dans le Poitou, par Joussaume (1981) e t en Ajoie, par Fillion (2000), c e tte techniqu e semble se dévelop per dans les phases régionales du C am paniform e du sud-est d e la France (Furestier à paraître). C ette technique qui a é té inte rp ré té e n o ta m m e n t c o m m e un nouveau m ode d e d é b ita g e d e galets ne se prêtant pas bien aux techniques classiques de percussion à la pierre existe pour le Néolithique final, mais représente une proportion plus im portante au Cam paniform e.

Les outils

Plus qu e le d é b ita g e e t ses produits,c'est l'a sp e ct « fruste » e t « ingrat » des outils d e la fin du troisième millénaire av. J.-C. qui est à l'origine du d é ve lo p p e m e n t d e la notion d'expédient. Pourtant, les observations sont contrastées. Deux chaînes opératoires s'opposent : l'une, présentant un degré d e te ch n icité important, et l'autre, tém oignan t d 'u n investissement techniqu e moindre. Le premier cas est ca ra cté risé pa r les arm atures cam paniform es à pédoncules e t ailerons équarris, e t le deuxièm e cas — qui nous intéresse ici — se retrouve dans quasiment to u t le reste de l'outillage.

Le contraste esthétique e t techniqu e fort entre ces deux catégories d 'o u tilla g e est p robable m ent en partie à l'origine d e l'emploi du term e d 'e xp é d ie n t pour ces industries. La fabrication des armatures, contrairem ent à celle des poignards e t des grandes lames en silex exogènes, oeuvres d e spécialistes, correspond à une production intra-site réalisée sur m atières prem ières locales. Ce c o n s ta t laisse entrevoir la possibilité que la fin du Néolithique ne soit pas considérée co m m e un m om ent d e régression techniqu e puisque plusieurs exemples fo n t preuves de savoir-faire encore maîtrisés (Furestier 2004). Deux chaînes opératoires s'opposent d o n c au sein de mêmes groupes sans q u'il soit possible d 'e n connaître les raisons. Si deux statuts différents sont facilem ent déductibles, il est en revanche plus périlleux de proposer com m e explication une division sexuelle du travail (Bailly 2002). Rien ne perm et en e ffe t de rejeter l'existe nce d e plusieurs schém as opératoires différents pour un m ê m e tailleur (ou tailleuse) a d a p ta n t son savoir faire à ses besoins.

Quoi q u 'il en soit, à l'instar des m atières premières, on co n s ta te une diversité moins im portante q u 'a u p a ra va n t. La caisse à outils des cam paniform es est moins fournie qu e celle des Couronniens, des Rhonouvéziens ou des Fontbuxiens.

De plus, co m m e pour le N éolithique final, une im portante variabilité typ o lo g iq u e est observée pour ch a q u e typ e d'o util (Furestier 2003). À c ô té des armatures à p é d o n cu le e t ailerons équarris, des armatures cordiformes e t des segments d e cercle, les grattoirs (planche 1 n° 9 à 12) e t les pièces esquillées (planche 1 n° 8, 13 e t 14) en sont les principaux com posants. Bien q u e très présente dans d e nombreuses séries cam paniform es, la p ièce esquillée pose de nombreuses difficultés d e caractérisation et d'in terprétation (Furestier à paraître). Les grattoirs sont en revanche plus aisés à reconnaître et font montre de plusieurs spécificités typologiques, notam m ent pour les nombreux grattoirs unguiformes.

La diversité restreinte des outils va d e pair avec la retouche directe à la pierre qui est largem ent utilisée. Elle est responsable de l'a sp e ct souvent fruste des outils, et spécialem ent des grattoirs. D'un point d e vue général, la te ch n iq u e est a d a p té e au résultat à atteindre : une m orphologie particulière dans le cas des grattoirs, e t une fonctionn alité prédéterm inée pour les pièces esquillées. Une logique d e restriction d e l'investissement techniqu e paraît prédom inante et co n firm é e par un fa ib le d e g ré d e finition de l'outillage domestique. Si c e tte évolution tém oigne d 'u n ch a n g e m e n t d e statut des industries lithiques à

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la fin du Néolithique, elle ne stigmatise pas forcém ent une déprise technique.

Alors ? fin de cycle ou optimisation ?

Finalement, quel constat, quelle analyse est-il possible d e faire des productions dites expédientes en c e qui concerne le Néolithique final du sud-est de la France ?

En résumé, les matières premières mises en oeuvre sont moins variées qu'aux périodes précédentes et proviennent plus m ajoritairem ent de la sphère locale. La qualité des blocs ne semble plus être un critère préém inent pour leur sélection. Les m atières prem ières sont moins volumineuses e t servent quasi exclusivem ent d e supports à des nucleus à éclats, les p roduction s lam inaires et lamellaires é ta n t rarissimes et non spécifiques des productions observées. Les nucleus à éclats sont essentiellement d e trois types : polyédriques, à plan d e fra p p e préférentiel et sur enclum e. Mis à part ce dernier type, la percussion directe à la pierre dure est la plus a ppliqu ée ; la percussion sur enclum e en est d'ailleurs une variante. Les petits éclats produits ne p e rm e tte n t q u e très peu d e rem ontage s e t la com plexité des chaînes opératoires reste difficile à saisir dans le détail. Néanmoins, c 'e s t un certain m odule d 'é c la t qui est le but à atteindre d o n t le critère prépond érant semble être la taille réduite à quelques centimètres de longueur (la largeur, et surtout l'épaisseur ne rentrant que peu dans les critères déterminants). C ette m arge d e sélection perm et d e m ettre en oeuvre des chaînes opératoires simplifiées assurant une p roductivité certaine. La recherche d 'u n angle p ropice au d é ta c h e m e n t d 'é c la t p e u t alors prévaloir sur toute organisation du d é b ita g e . La re to u ch e répond aux mêmes exigences. La percussion directe à la pierre dure y est aussi majoritaire. Elle est appliqu ée sur les éclats pour la réalisation d 'u n e majorité d e grattoirs et pour la réalisation/utilisation des pièces esquillées.

D'un point de vue te chnolo gique d'ensem ble, les industries lithiques d e la fin du N éolithique co m p o rte d o n c des spécificités qui p erm ettent une caractérisation. Le C am paniform e pe u t m êm e se prévaloir d 'u n e évolution d e sa phase ancienne à sa phase récente (Furestier 2004), C ette évolution est un premier argum ent attestant l'im p o rta n ce d e c e t é lé m e n t m obilier e t e xclu a n t l'h yp o th è se d 'u n a b a n d o n de c e tte industrie. La présence d e séries lithiques conséquentes au Bronze ancien a d'ailleurs déjà été observée. Pour répondre au premier point

d 'in te rro g a tio n du titre d e c e t article, l'industrie lithique c a m p a n ifo rm e ne p e u t d o n c pas être considérée c o m m e une fin d e cycle, la fin de l'exploitation du silex. Elle cristallise, en revanche, une évolution so cio -é co n o m iq u e particulière de l'industrie lithique déjà initiée au Néolithique final.

L'investissement techniqu e est réduit à sa plus simple expression, limitant les dépenses d'énergie. Toutes les phases de la chaîné opératoire sont d o n c simplifiées : acquisitions locales, sélection minime des matières premières, choix techniques généralisés et adaptés à un outillage prédéterm iné e t d e réalisation rapide.

Ainsi a p paraît la réponse à la deuxièm e interrogation du titre : la fin du troisième millénaire peut être considérée com m e un m om ent d'optim isation de l'industrie lithique.

Finalement, au regard d e l'industrie lithique du Néolithique final e t du C am paniform e, le recours à la notion d 'e x p é d ie n t sem ble naître d e deux faits différents :

- d 'u n e part, d e l'a p p ro c h e esthétique de la Préhistoire par les préhistoriens,

- et d 'a u tre part, d 'u n profond change m e nt des sociétés de la fin du troisième millénaire av. J.-C.

Le premier point te n d à s'estomper au plus grand profit du second. De l'atom isation de l'unité chasséenne résulte une m ultiplication des groupes humains e t d o n c des traditions locales. Les relations entre ces groupes e t des groupes ou traditions culturelles exogènes tels que le C am paniform e est une des problém atiques les plus intéressantes d e la fin du Néolithique. L'étude d e ces industries lithiques qui présentent un im portant potentiel s'inscrit pleinem ent dans c e tte problém atique. Il fa u t d o n c espérer -et la tenue d e c e tte ta b le ronde en constitue une des raisons- que l'inté rêt unilatéral des archéologues lithiciens s'estom pe aujourd'hui pour faire p la ce à une a p p ro ch e plus globalisante du fait lithique. Les faits les plus structurants qu e constituen t les production s standardisées, d e spécialistes, les diffusions e t les échanges à longues distances, etc.

ont en e ffe t déjà été investis. Forts de l'expérience ces années d'é tu d e s technologiques, il nous faut m aintenant porter un regard nouveau sur les témoins plus ténus des activités liées à la production des outillages lithiques. La notion d 'e xp é d ie n t doit donc être a b o rd é e selon sa vraie nature, m ultiple et multiforme.

A ujourd'hui, e xp é d ie r les productions expédientes ne suffit plus.

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Robin Furestier

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Planche 1 - 1 i 5 , 9 , 1 0 , 1 3 e t 14 : Le M a s d e V ig n o le IV, N îm e s , G a rd ; 6 e t 7 : La G r o t t e M u r e , M o n t p e z a t , A lp e s -d e H a u te -P ro v e n c e ; 8 , 1 1 e t 1 2 : L e F o r t in -d u -S a u t , C h â t e a u n e u f- le s - M a r t ig u e s , B o u c h e s -d u -R h ô n e .

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Robin Furestier

Planche 2 -1 â 3 : L e M a s d e V ig n o le IV, N îm e s , G a r d ; 4 e t 6 : L 'A b ri d u C a p ita in e , S a in t e - C r o ix d u V e rd o n , A l p e s - d e - H a u t e - P r o v e n c e ; La B a s tid e B la n c h e , P e y ro lle s e t 8 ,1 1 e t 1 2 : Le F o r t in -d u -S a u t , C h â t e a u n e u f - le s - M a r t ig u e s , B o u c h e s - d u - R h ô n e .

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