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Submitted on 1 Jan 1930
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Expériences sur les couches moléculaires d’acides gras
Anne Joffé, Pierre Lukirsky
To cite this version:
Anne Joffé, Pierre Lukirsky. Expériences sur les couches moléculaires d’acides gras. J. Phys. Radium,
1930, 1 (12), pp.405-410. �10.1051/jphysrad:01930001012040500�. �jpa-00233041�
LE JOURNAL DE PHYSIQUE
ET
LE RADIUM
EXPÉRIENCES SUR LES COUCHES MOLÉCULAIRES D’ACIDES GRAS par ANNE JOFFÉ et PIERRE LUKIRSKY
à Léningrad.
Sommaire. 2014 On a exploré les chutes brusques de potentiel qui existent dans les couches mono, bi et trimoléculaires d’acide stéarique cristallisées sous forme de couches minces à la surface de l’or. Les mesures donnent les valeurs : + 0,13 volt, 0 volt et + 0,09 volt, c’est ce qui montre qu’à la formation des couches les molécules de la couche sui- vante sont tournées vers la couche précédente par les mêmes bouts de la longue chaîne.
Si on dépose une couche sur une surface d’or préalablement acidulée, on obtient la valeur 0,14 volts, inverse de signe, ce qui montre que dans ce cas la couche moléculaire est formée de molécules tournées vers les disques d’or par d’autres bouts.
On a analysé les différentes applications des résultats obtenus à l’égard du signe, ainsi qu’à propos de la valeur des effets observés.
SÉRIE VII. TOME I. DÉCEMBRE 1930 IN Il 12.
Les expériences de Langmuir (1) et Adam (2) ont montré que les molécules d’acides de la série grasse ayant la formule suivante CH3 (CH2 B COOH déposées sur l’eau acidulée,
se placent sur sa surface sous forme d’une couche moléculaire. Cette couche consiste en
molécules qui sortent de l’eau par leur longue chaîne et sont tournées vers l’eau par le groupe acide COOH, Langmuir a réussi à montrer que la surface occupée par une molé- cule ne dépend pas de la longueur de sa chaîne (du coefficient n) et a la même valeur pour toutes les molécules de la série grasse. Trillat (3) a étudié aux rayons X les acides gras en les cristallisant sous forme de couches de différentes épaisseurs déposées sur les divers
corps solides et trouva des couches régulièrement arrangées jusqu’à une épaisseur de 0,005 mm.
L’orientation et la formation de ces couches sont fortement affectées par les propriétés chimiques du porte-couche sur lequel se passe leur formation. Dans le cas d’un support métallique, fait en métal qui donne facilement des sels d’acides gras, la couche voisine du métal consiste en couches de sels régulièrement arrangées, ensuite au-dessus de cette couche se forment les couches régulières d’acide gras par, et enfin, à une grande distance, l’acide en menus cristaux, tandis que les métaux qui ne réagissent pas avec l’acide (comme
par exemple Ag et Au) donnent des couches régulières d’acide pur. L’orientation des couches est affectée aussi par les propriétés alcalines ou acides du porte-couche. Ces pro-
priétés alcalines, en général, favorisent l’orientation et la formation des couches régulières.
Au contraire, l’acidité empêche l’orientation.
En étudiant le spectre en rayons X de telles couches régulièrement disposées, M. Trillat
a montré que la distance entre les couches croît régulièrement à mesure qu’augmente la longueur de la chaine carbonique des molécules (coefficient ~). Ensuite en étudiant la distri- bution de l’intensité parmi les spectres de différents ordres Trillat arriva à la conclusion que les couches sont formées de molécules tournées l’une vers l’autre avec les mêmes bouts
comme le fait voir la figure schématique n° 1, où la partie inclinée désigne le groupe COOH et la flèche indique le groupe CH, de ces molécules.
(1) J. Arraer Chent. Soc., 39 (1917).
(2) Proc. Roy. Soc. (1921), p. 336; (1928), p. 452; (1923;. p. "23; (1926), p. 112.
z(3) Ann. de Phys. 6 (t9!6).
LE JOURNAL DE PHYSIQUE ET LE RADIUM.
-SÉRIE VII. --- T. 1. - 12. - DÉCE~IBRE 1930. 30.
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphysrad:01930001012040500
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L’exploration de propriétés électriques de ces couches était le hut du présent travail.
Les expériences de Trillat montrent que sur les supports solides on obtient des couches moléculaires régulières jusqu’à une grande épaisseur. Il est naturel de penser qu’aux
moindres épaisseurs il s’agira aussi de couches moléculaires régulièrement formées. Une
molécule d’acide gras possédant un moment électrique, une telle couche moléculaire donnera
sur la surface de métal un saut de potentiel, dont la mesure peut donner une représenta-
Fig. 4 .
tion de la régularité dans la formation de la couche ainsi que la valeur des moments élec-
triques des molécules.
Dans le cas de Langmuir, c’est-à-dire, dans le cas oii on dépose une couche sur l’eau acidulée., Guyot (1) et Frnmkin (2) faisaient des mesures de tels sauts de potentiel, mais
comme nous le verrions plus loin, cette mesure amène à des résultats distincts des précédente
parce que dans tous les (,.eux cas le caractère des couches obtenues parait être différent.
Obtention de couches. - Dans nos expériences les couches d’acide stéarique furent déposées sur des disques en métal polis et recouverts d’une couche d’or par voie électro-
lytique. En ce cas, eonfo1lméme.nt aux résultats trouvés par si. Trillat on doit obtenir des couches d’acide stéarique pur, exception faite peut-être pour la première couche, parce
qu’un disque soigneusement lavé et bien séché est quand même toujours couvert d’une mince couche d’humidité 4:J’nne nature alcaline. L’acide stéarique fut dissous dans l’alcool et on prenait pour l’expérieiice une quantité de solution qui contenait un nombre de molé- cules nécessaire pour recouvrir le disque d’une couche monomoléculaire d’acide ou d’une couche en plusieurs moléeiries. Le nombre des molécules qui est nécessaire pour le dit but fut obtenu comme résultat de la division de la surface du disque par la surface occupée par
une molécule de la couche (a
=16.10"~ em- d’al~rès Trillat).
La dissolution alcoolise lut distribuée uniformément sur tout le disque et ensuite lentement évaporé pendant quelques jours dans l’atmosphère de vapeur d’alcool qui
saturait presque l’espace. Par suite d’une évaporation plus rapide de l’alcool, l’acide se déposait sur le disque en taches arbitraires au lieu d’être réparti en couches moléculaires;
dans ce cas, les disques furent reconnus non valables et ne furent pas soumis aux mesures.
Mesures. - Les mesures du saut de potentiel étaient faites par la méthode d’ionisa- tion, On faisait les mesures séparément pour les différents endroits d’un disque parce que, outre la mesure du saut tte potentiel, il était nécessaire d’être sûr que la couche était uni- forme. Dans ce but, on plaçait à une petite distance (1 - 2 mm) un cylindre vide c~ fermé
en bas avec un réticule de sorte qu’il se trouvât contre le disque c recouvert de la couche.
A l’intérieur de ce petit eylindre se trouvait un ionisateur (Polonium). Un étroit pinceau
de particules x, qui passaient à travers le réticule du cylindre ionisait l’air dans un très (1) Ann. de Phys., 2 (1924).
(=’} Z. f. phys. Chem., B.4f6 (i925).
petit volume auprès de la surface du disque. Comme les ions ne se formaient que dans cette région, ils se mouvaient et venaient charger les électrodes seulement sous l’influence.
du champ qui existait aux endroits de leur formation.
La petit cylindre, le réticule qui le f erinait, toute la protection électrostatique, ainsi que
Fig. "2.
les conducteurs porteurs de courant furent dorés dans la même cuve électrolytique où
furent dorés les disques. Ce n’est qu’en présence de cette précaution qu’il y avait une
garantie que le champ de contact entre le disque et les autres parties métalliques (si elles
étaient en autres métaux) n’ait pas d’influence sur les mesures exécutées. On faisait les mesures au moyen d’un électromètre à corde en connection avec le disque. On donnait au cylindre un potentiel qui compensait la différence de potentiel existante entre le disque et
le cylindre. La compensation était supposée atteinte s’il n’y avait pas de courant sur l’élec- tromètre penclant un laps de temps considérable et si on recevait sur l’électromètre des courants égaux de valeur et opposés de signe, lorsque le potentiel compensant changeait
de la valeur + 0 vivant qu’une couche fût déposée, on examinait chaque fois le disque séparément après l’avoir soigneusement lavé et séché. Quoique le disque et le cylindre fus-
sent couverts d’or, une différence de potentiel entre eux pouvait se produire quand même’
sous l’influence des conditions superficielles. Cette différence fut mesurée préalablement,
et c’est dans ce but que le petit cylindre fut placé contre une série d’endroits du disque
bien déterminés. Ensuite, après avoir déposé une couche sur le disque, on remettait celui- ci à son ancienne place et de nouveau on mesurait le potentiel aux points situés en face des
mêmes endroits du disque. Le degré de précision de l’installation du cylindre joue un rôle
Fig. 3.
408
essentiel, car le potentiel de contact du disque propre diffère notamment dans les divers endroits. Sur les figures 3a, 3b et 3c on voit les courbes, obtenues dans le cas des trois
disques, lorsqu’on déposait sur ceux-ci une couche monomoléculaire. Sur les axes des abscisses sont représentées les coordonnées des points du disque et sur l’axe des ordonnés les valeurs du potentiel appliqué au cylindre dans le but de compensation. Les valeurs du
potentiel sont exprimées en millivolts. Les courbes 1 sont obtenues pour les disques propres avant qu’une couche moléculaire fût déposée. Les courbes II sont obtenues après avoir déposé
la couche. Nous voyons que préalablement entre le disque propre et le petit cylindre il y a des sauts de potentiel qui varient d’un endroit du disque à un autre et parfois même chan- gent de signe. En même temps les valeurs des sauts qui avaient lieu au moment où une couche
fut déposée sont considérablement plus grandes et, ce qui est le plus remarquable, leur cours
est à peu près parallèle à celui qui a lieu dans le cas d’une couche moléculaire uniforme.
En cas d’une couche irrégulière on ne peut pas s’attendre à une pareille régularité. La
valeur moyenne du saut de potentiel introduit par une couche monomoléculaire d’acide
stéarique, calculée comme la différence des ordonnées des courbes II et I, est égale à ; 0,13 ; -~- 0, i ~ ; + U, I 3 volt.
1
1rg. 4.
Les courbes concernant les couches bimoléculaires sont tracées sur les figures n°’ 4a, 4b, 4c. Les courbes I correspondent aux disques propres; les courbes II correspondent aux
fcouches bimoléculaires d’acide, pour la production desquelles on prenait une quantité
double de la solution d’acide stéarique. Le tableau qui se présente en ce cas diffère distinc-
.ement de celui qui fut obtenu dans le cas des couches monomoléculaires. Les courbes Il et les courbes I n’ont pas de différence sensible; les sauts de potentiel sont très petits et n’ont
pas un caractère régulier : ils varient d’un endroit à un autre. La valeur moyenne d’un saut de potentiel est dans ce cas égale à 0 ou voisine de 0. Il s’en suit qu’une couche bimolécu- ,Iaire n’est pas accompagnée d’un saut de potentiel, ce qui est en accord parfait avec les
résultats de NI. Trillat, qui a montré sur les roentgenogrammes que les molécules des couches voisines se placent les unes vers les autres par les bouts pareils. Dans ce cas la
~somme de deux sauts de potentiel formés par les deux moments égaux de valseur et opposés
de signe sera toujours égale à zéro.
Les trois figures suivantes (5a, 5b, 5c) représentent les résultats analogues pour les couches trimoléculaires. En ce cas, comme dans le cas des couches mono moléculaires, les
courbes II sont à peu près parallèles aux courbes I, étant situées plus haut que celles-ci a
une distance considérable.
Les deux couches de molécules donnent des sauts de potentiel mutuellement compensés,
et en faisant des mesures nous trouvons un saut qui provient de la troisième couche
seulement, mais, quant au signe, ce dernier saut doit donner une coïncidence avec le saut
qui pourrait être produit par une seule couche séparée. La valeur absolue d’un saut dans le
«as de trois couches est un peu intérieure, d’une manière systématique, à celle pour le cas d’une couche monomoléculaire (0,085; 0,090; 0,086).
Il est donc curieux de noter que, dans les travaux de Guyot ainsi que dans ceux de
Frumkin, etc., on obtenait des résultats différents en signe et en valeur, lorsqu’on mesurait
le saut de potentiel pour une couche monomoléculaire sur l’eau acidulée. Pour le saut des
Fig.5
potentiel dans le cas de l’acide stéarique, Frumkin et Guyot ont obtenu - 0,390 volt. Nos
mesures donnent + 0,130 volt.
C’est dans !es conditions de la formation de la couche qu’il faut chercher la cause de
ce désaccord dans la valeur et le signe du saut. Pour expliquer les résultats,"on peut sup- poser que les molécules dans nos couches moléculaires furent tournées. vers le support où
elles se formaient par le bout opposé à celui qui corres-
- 1pond au cas oii les couches se formaient sur l’eau acidu- lée. Un tel résultat est bien possible, puisque notre support
avait un caractère un peu alcalin. La figure 6 représente
les courbes de contrôle qui furent obtenues avec une cou-
che monomoléculaire déposée sur un support préalable-
ment lavé avec l’eau acidulée. En ce cas nous avons une
différence initiale de potentiels considérable entre le
disque sans couche et le cylindre (courbe I). Ensuite après
avoir déposé la couche on a obtenu la courbe II située à peu près parallèlelement à la courbe I, mais plus bas que celle-ci. La valeur moyenne du saut de potentiel dans ce cas
est égale à - 0,14 volt et son signe coïncide avec le signe
obtenu par Frumkin et Guyot. Cela montre que la pre- mière couche de molécules se cristallise sur le support par
un autre bout, si le caractère de celui-là subit un change-
ment. Le même résultat est confirmé par une note de 1B1. Guyot, où il indique qu’en obtenant une couche sur l’eau
alcalinisée il a trouvé la valeur du saut égale à + 0,13 volt, c’est-à-dire un nombre qui coïncide avec le nôtre par la
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