(1)Académie d’Orléans –Tours Université François-Rabelais
FACULTE DE MEDECINE DE TOURS
Année 2013-2014
Thèse pour le
DOCTORAT EN MEDECINE Diplôme d’Etat
Par
SCHOLTES Charlotte
Née le 25 avril 1985 à Clermont-Ferrand
Présentée et soutenue publiquement le 1er décembre 2014
TITRE
Réunion de synthèse dans le cadre du Rézo Addictions 41 : moteur du changement des représentations des Médecins Généralistes
Jury
Président de Jury : Madame le Professeur Anne-Marie LEHR-DRYLEWICZ Membres du jury : Monsieur le Professeur Nicolas BALLON
Monsieur le Professeur Vincent CAMUS Madame le Docteur Anne-Marie BRIEUDE
,
Madame le Docteur Marguerite COGNET
(2)14 octobre 2014
UNIVERSITE FRANCOIS RABELAIS
F
FAACCUULLTTEEDDEEMMEEDDEECCIINNEEDEDETOTOUURRSS
DOYEN
Professeur Patrice DIOT
VICE-DOYEN
Professeur Henri MARRET
ASSESSEURS
Professeur Denis ANGOULVANT, Pédagogie
Professeur Mathias BUCHLER, Relations internationales
Professeur Hubert LARDY, Moyens – relations avec l’Université
Professeur Anne-Marie LEHR-DRYLEWICZ, Médecine générale
Professeur François MAILLOT, Formation Médicale Continue
Professeur Philippe ROINGEARD, Recherche
SECRETAIRE GENERALE
Madame Fanny BOBLETER
********
DOYENS HONORAIRES
Professeur Emile ARON (†) – 1962-1966
Directeur de l’Ecole de Médecine - 1947-1962
Professeur Georges DESBUQUOIS (†)- 1966-1972
Professeur André GOUAZÉ - 1972-1994
Professeur Jean-Claude ROLLAND – 1994-2004
Professeur Dominique PERROTIN – 2004-2014
PROFESSEURS EMERITES
Professeur Alain AUTRET
Professeur Catherine BARTHELEMY
Professeur Jean-Claude BESNARD
Professeur Patrick CHOUTET
Professeur Etienne DANQUECHIN-DORVAL
Professeur Guy GINIES
Professeur Olivier LE FLOCH
Professeur Etienne LEMARIE
Professeur Chantal MAURAGE
Professeur Léandre POURCELOT
Professeur Michel ROBERT
Professeur Jean-Claude ROLLAND
PROFESSEURS HONORAIRES
MM. Ph. ANTHONIOZ - A. AUDURIER – Ph. BAGROS - G. BALLON – P.BARDOS - J. BARSOTTI
A. BENATRE - Ch. BERGER –J. BRIZON - Mme M. BROCHIER - Ph. BURDIN - L. CASTELLANI
J.P. FAUCHIER - B. GRENIER – A. GOUAZE – M. JAN – J.-P. LAMAGNERE - F. LAMISSE – J. LANSAC – J.
LAUGIER - G. LELORD - G. LEROY - Y. LHUINTRE - M. MAILLET - Mlle C. MERCIER – J. MOLINE - Cl.
MORAINE - J.P. MUH - J. MURAT - Ph. RAYNAUD – JC. ROLLAND – Ch. ROSSAZZA - Ph. ROULEAU - A.
(3)PROFESSEURS DES UNIVERSITES - PRATICIENS HOSPITALIERS
MM. ALISON Daniel ... Radiologie et Imagerie médicale
ANDRES Christian ... Biochimie et Biologie moléculaire
ANGOULVANT Denis ... Cardiologie
ARBEILLE Philippe ... Biophysique et Médecine nucléaire
AUPART Michel ... Chirurgie thoracique et cardiovasculaire
BABUTY Dominique ... Cardiologie
BALLON Nicolas ... Psychiatrie ; Addictologie
Mme BARILLOT Isabelle ... Cancérologie ; Radiothérapie
MM. BERNARD Louis ... Maladies infectieuses ; maladies tropicales
BEUTTER Patrice ... Oto-Rhino-Laryngologie
BINET Christian ... Hématologie ; Transfusion
BODY Gilles ... Gynécologie et Obstétrique
BONNARD Christian ... Chirurgie infantile
BONNET Pierre ... Physiologie
Mme BONNET-BRILHAULT Frédérique ... Physiologie
MM. BOUGNOUX Philippe ... Cancérologie ; Radiothérapie
BRILHAULT Jean ... Chirurgie orthopédique et traumatologique
BRUNEREAU Laurent ... Radiologie et Imagerie médicale
BRUYERE Franck ... Urologie
BUCHLER Matthias ... Néphrologie
CALAIS Gilles ... Cancérologie ; Radiothérapie
CAMUS Vincent ... Psychiatrie d’adultes
CHANDENIER Jacques ... Parasitologie et Mycologie
CHANTEPIE Alain ... Pédiatrie
COLOMBAT Philippe ... Hématologie ; Transfusion
CONSTANS Thierry ... Médecine interne ; Gériatrie et Biologie du vieillissement
CORCIA Philippe ... Neurologie
COSNAY Pierre ... Cardiologie
COTTIER Jean-Philippe ... Radiologie et Imagerie médicale
COUET Charles ... Nutrition
DANQUECHIN DORVAL Etienne ... Gastroentérologie ; Hépatologie
DE LA LANDE DE CALAN Loïc ... Chirurgie digestive
DE TOFFOL Bertrand ... Neurologie
DEQUIN Pierre-François ... Thérapeutique ; médecine d’urgence
DESTRIEUX Christophe ... Anatomie
DIOT Patrice ... Pneumologie
DU BOUEXIC de PINIEUX Gonzague . Anatomie & Cytologie pathologiques
DUMONT Pascal ... Chirurgie thoracique et cardiovasculaire
EL HAGE Wissam ... Psychiatrie adultes
FAUCHIER Laurent ... Cardiologie
FAVARD Luc ... Chirurgie orthopédique et traumatologique
FOUQUET Bernard ... Médecine physique et de Réadaptation
FRANCOIS Patrick ... Neurochirurgie
FROMONT-HANKARD Gaëlle ... Anatomie & Cytologie pathologiques
FUSCIARDI Jacques ... Anesthésiologie et Réanimation chirurgicale ; médecine d’urgence
GAILLARD Philippe ... Psychiatrie d'Adultes
GYAN Emmanuel... Hématologie ; thérapie cellulaire
GOGA Dominique ... Chirurgie maxillo-faciale et Stomatologie
GOUDEAU Alain ... Bactériologie -Virologie ; Hygiène hospitalière
GOUPILLE Philippe ... Rhumatologie
GRUEL Yves ... Hématologie ; Transfusion
GUERIF Fabrice ... Biologie et Médecine du développement et de la reproduction
GUILMOT Jean-Louis ... Chirurgie vasculaire ; Médecine vasculaire
GUYETANT Serge ... Anatomie et Cytologie pathologiques
HAILLOT Olivier ... Urologie
HALIMI Jean-Michel ... Thérapeutique ; médecine d’urgence (Néphrologie et Immunologie clinique)
HANKARD Régis ... Pédiatrie
HERAULT Olivier ... Hématologie ; transfusion
HERBRETEAU Denis ... Radiologie et Imagerie médicale
Mme HOMMET Caroline ... Médecine interne, Gériatrie et Biologie du vieillissement
MM. HUTEN Noël ... Chirurgie générale
LABARTHE François ... Pédiatrie
LAFFON Marc ... Anesthésiologie et Réanimation chirurgicale ; médecine d’urgence
LARDY Hubert ... Chirurgie infantile
LASFARGUES Gérard ... Médecine et Santé au Travail
LAURE Boris ... Chirurgie maxillo-faciale et stomatologie
LEBRANCHU Yvon ... Immunologie
LECOMTE Thierry ... Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie
(4)LESCANNE Emmanuel ... Oto-Rhino-Laryngologie
LINASSIER Claude ... Cancérologie ; Radiothérapie
LORETTE Gérard ... Dermato-Vénéréologie
MACHET Laurent ... Dermato-Vénéréologie
MAILLOT François ... Médecine Interne
MARCHAND-ADAM Sylvain ... Pneumologie
MARRET Henri ... Gynécologie et Obstétrique
MARUANI Annabel ... Dermatologie
MEREGHETTI Laurent ... Bactériologie-Virologie ; Hygiène hospitalière
MORINIERE Sylvain ... O.R.L.
MULLEMAN Denis ... Rhumatologie
PAGES Jean-Christophe ... Biochimie et biologie moléculaire
PAINTAUD Gilles ... Pharmacologie fondamentale, Pharmacologie clinique
PATAT Frédéric ... Biophysique et Médecine nucléaire
PERROTIN Dominique ... Réanimation médicale ; médecine d’urgence
PERROTIN Franck ... Gynécologie et Obstétrique
PISELLA Pierre-Jean ... Ophtalmologie
QUENTIN Roland ... Bactériologie-Virologie ; Hygiène hospitalière
REMERAND Francis ... Anesthésiologie et Réanimation chirurgicale
ROBIER Alain ... Oto-Rhino-Laryngologie
ROINGEARD Philippe ... Biologie cellulaire
ROSSET Philippe ... Chirurgie orthopédique et traumatologique
ROYERE Dominique ... Biologie et Médecine du développement et de la Reproduction
RUSCH Emmanuel ... Epidémiologie, Economie de la Santé et Prévention
SALAME Ephrem ... Chirurgie digestive
SALIBA Elie... Biologie et Médecine du développement et de la Reproduction
Mme SANTIAGO-RIBEIRO Maria ... Biophysique et Médecine Nucléaire
MM. SIRINELLI Dominique ... Radiologie et Imagerie médicale
THOMAS-CASTELNAU Pierre ... Pédiatrie
Mme TOUTAIN Annick ... Génétique
MM. VAILLANT Loïc ... Dermato-Vénéréologie
VELUT Stéphane ... Anatomie
WATIER Hervé ... Immunologie.
PROFESSEUR DES UNIVERSITES DE MEDECINE GENERALE
Mme LEHR-DRYLEWICZ Anne-Marie ... Médecine Générale
PROFESSEURS ASSOCIES
MM. LEBEAU Jean-Pierre ... Médecine Générale
MALLET Donatien ... Soins palliatifs
POTIER Alain ... Médecine Générale
ROBERT Jean ... Médecine Générale
MAITRES DE CONFERENCES DES UNIVERSITES- PRATICIENS HOSPITALIERS
Mme ANGOULVANT Théodora ... Pharmacologie fondamentale ; pharmacologie clinique : addictologie
M. BAKHOS David ... Physiologie
Mme BERNARD-BRUNET Anne ... Biostatistiques, Informatique médical et Technologies de Communication
M. BERTRAND Philippe ... Biostatistiques, Informatique médical et Technologies de Communication
Mme BLANCHARD Emmanuelle ... Biologie cellulaire
BLASCO Hélène ... Biochimie et biologie moléculaire
M. BOISSINOT Éric ... Physiologie
Mme CAILLE Agnès ... Biostatistiques, Informatique médical et Technologies de Communication
M. DESOUBEAUX Guillaume ... Parasitologie et mycologie
Mme DUFOUR Diane ... Biophysique et Médecine nucléaire
M. EHRMANN Stephan ... Réanimation médicale
Mme FOUQUET-BERGEMER Anne-Marie .. Anatomie et Cytologie pathologiques
M. GATAULT Philippe ... Néphrologie
Mmes GAUDY-GRAFFIN Catherine ... Bactériologie - Virologie ; Hygiène hospitalière
GOUILLEUX Valérie ... Immunologie
GUILLON-GRAMMATICO Leslie ... Biostatistiques, Informatique médical et Technologies de Communication
MM. HOARAU Cyrille ... Immunologie
HOURIOUX Christophe ... Biologie cellulaire
(5)MM. PIVER Eric ... Biochimie et biologie moléculaire
ROUMY Jérôme... Biophysique et médecine nucléaire in vitro
Mme SAINT-MARTIN Pauline ... Médecine légale et Droit de la santé
MM. SAMIMI Mahtab ... Dermatologie
TERNANT David ... Pharmacologie – toxicologie
Mme VALENTIN-DOMELIER Anne-Sophie .. Bactériologie – virologie ; hygiène hospitalière
M. VOURC’H Patrick... Biochimie et Biologie moléculaire
MAITRES DE CONFERENCES
Mme ESNARD Annick ... Biologie cellulaire
M. LEMOINE Maël ... Philosophie
Mme MONJAUZE Cécile ... Sciences du langage - Orthophonie
M. PATIENT Romuald ... Biologie cellulaire
MAITRE DE CONFERENCES ASSOCIE
Mmes HUAS Caroline ... Médecine Générale
RENOUX-JACQUET Cécile ... Médecine Générale
M. ROBERT Jean ... Médecine Générale
CHERCHEURS INSERM - CNRS - INRA
M. BOUAKAZ Ayache ... Directeur de Recherche INSERM – UMR INSERM 930
Mmes BRUNEAU Nicole ... Chargée de Recherche INSERM – UMR INSERM 930
CHALON Sylvie ... Directeur de Recherche INSERM – UMR INSERM 930
MM. CHARBONNEAU Michel ... Directeur de Recherche CNRS – UMR CNRS 7292
COURTY Yves ... Chargé de Recherche CNRS – UMR INSERM 1100
GAUDRAY Patrick ... Directeur de Recherche CNRS – UMR CNRS 7292
GILOT Philippe ... Chargé de Recherche INRA – UMR INRA 1282
GOUILLEUX Fabrice ... Directeur de Recherche CNRS – UMR CNRS 7292
Mmes GOMOT Marie ... Chargée de Recherche INSERM – UMR INSERM 930
GRANDIN Nathalie ... Chargée de Recherche CNRS – UMR CNRS 7292
HEUZE-VOURCH Nathalie ... Chargée de Recherche INSERM – UMR INSERM 930
MM. KORKMAZ Brice ... Chargé de Recherche INSERM – UMR INSERM 1100
LAUMONNIER Frédéric ... Chargé de Recherche INSERM - UMR INSERM 930
LE PAPE Alain ... Directeur de Recherche CNRS – UMR INSERM 1100
Mme MARTINEAU Joëlle ... Chargée de Recherche INSERM – UMR INSERM 930
MM. MAZURIER Frédéric ... Directeur de Recherche INSERM – UMR CNRS 7292
MEUNIER Jean-Christophe ... Chargé de Recherche INSERM – UMR INSERM 966
RAOUL William ... Chargé de Recherche INSERM – UMR CNRS 7292
Mme RIO Pascale ... Chargée de Recherche INSERM – UMR INSERM 1069
M. SI TAHAR Mustapha ... Directeur de Recherche INSERM – UMR INSERM 1100
CHARGES D’ENSEIGNEMENT
Pour la Faculté de Médecine
Mme BIRMELE Béatrice ... Praticien Hospitalier (éthique médicale)
M. BOULAIN Thierry ... Praticien Hospitalier (CSCT)
Mme CRINIERE Lise ... Praticien Hospitalier (endocrinologie)
M. GAROT Denis ... Praticien Hospitalier (sémiologie)
Mmes MAGNAN Julie ... Praticien Hospitalier (sémiologie)
MERCIER Emmanuelle ... Praticien Hospitalier (CSCT)
Pour l’Ecole d’Orthophonie
Mme DELORE Claire ... Orthophoniste
MM. GOUIN Jean-Marie ... Praticien Hospitalier
MONDON Karl ... Praticien Hospitalier
Mme PERRIER Danièle ... Orthophoniste
Pour l’Ecole d’Orthoptie
Mme LALA Emmanuelle ... Praticien Hospitalier
M. MAJZOUB Samuel... Praticien Hospitalier
(6)REMERCIEMENTS
A la Présidente du Jury, Madame le Professeur Anne-Marie Lehr-Drylewicz,
Pour l’honneur que vous me faites de présider ce jury et pour avoir accepté de juger ce travail, Pour votre dévouement pour la Médecine Générale,
Veuillez trouvez ici le témoignage de ma sincère reconnaissance.
A mes directrices de thèse, Madame le Docteur Marguerite Cognet et Madame le Docteur Anne- Marie Brieude,
A Marguerite pour l’immense aide que tu m’as apportée, tes compétences, tes remarques toujours pertinentes et la découverte d’un univers très différent du mien et passionnant : la recherche, la sociologie.
A Anne-Marie pour tout ce que tu m’as transmis, que les livres et les autres stages ne m’avaient jamais appris, pour ton soutien et bien sûr pour ce sujet de thèse que tu m’as proposé.
Aux juges : Monsieur le Professeur Nicolas Ballon et Monsieur le Professeur Vincent Camus, Pour l’honneur que vous me faites d’avoir accepté de juger ce travail,
Pour votre investissement dans l’enseignement et la recherche, Veuillez trouver ici le témoignage de ma sincère considération.
Aux 10 médecins qui ont pris le temps de me recevoir et sans qui mon travail n’aurait pu exister.
A Renée et toute l’équipe du Rézo Addictions 41 : pour m’avoir accueillie chaleureusement parmi vous pendant six mois.
A mes parents et ma sœur pour votre amour inconditionnel, votre soutien, pour ce havre de bonheur et douceur que vous avez bâti.
A Arnaud, tu as été mon coach et mon soutien le plus assidu, l’heure de la délivrance est bientôt proche ! A toi qui me comprend et m’écoute mieux que personne, s’il y a une chose dont je suis sûre (c’est rare) c’est ce que je ressens pour toi ! Je tiens à te remercier pour toute la patience dont tu fais preuve avec moi depuis bientôt quatre ans… Merci d’être entré dans ma vie !
A ma famille : mes oncles et tantes, mes cousins et cousines, ma filleule Romane pour votre soutien, vos sourires, votre joie de vivre et tous les bons moments passés ensemble. J’espère avoir d’avantage de temps pour être à vos côtés.
A tous mes amis de lycée, de faculté de Clermont-Ferrand, d’internat, d’ici et d’ailleurs, d’avant et de maintenant : pour tous ces instants partagés ensemble et pour les futurs ! Pour votre gentillesse, votre originalité, votre humour, votre courage qui font que vous avez une place particulière dans mon cœur. Difficile de mettre un ordre et j’espère n’oublier personne : les Sarah et Matthieu, Marianne et Vincent, la joyeuse troupe de Clermont : la Cé et le Dav, Pé et Réj, Cycy et Gaël, Soso, Florence, Marine, Micha, Sandra, Camille, Ingrid et Aurélie, mes chers voisins : Stéph et Alex, Tiff, ma coloc de choc Clairelynou, Noémie, Clara, Amélie, Marion et Denis, la joyeuse troupe d’Angers et tous les autres…
A tous ceux qui m’ont apporté une aide technique, linguistique, alimentaire pour ce travail : merci !
A Marie-Laure ma maître de stage qui a su me donner une belle image de la médecine générale : merci !
Aux équipes de l’hôpital de Chartres et de Blois : pour tous les bons moments passés avec vous.
(7)SERMENT D’HIPPOCRATE
En présence des Maîtres de cette Faculté, de mes chers condisciples
et selon la tradition d’Hippocrate,
je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité dans l’exercice de la Médecine.
Je donnerai mes soins gratuits à l’indigent,
et n’exigerai jamais un salaire au-dessus de mon travail.
Admis dans l’intérieur des maisons, mes yeux ne verront pas ce qui s’y passe, ma langue taira
les secrets qui me seront confiés et mon état ne servira pas à corrompre les mœurs ni à favoriser le crime.
Respectueux et reconnaissant envers mes Maîtres, je rendrai à leurs enfants
l’instruction que j’ai reçue de leurs pères.
Que les hommes m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses.
Que je sois couvert d’opprobre et méprisé de mes confrères
si j’y manque.
(8)RESUME
Introduction : L’addiction est un problème majeur de santé publique et le médecin généraliste reste le premier recours. Il a été démontré que les médecins généralistes ont des représentations négatives des patients addicts et des addictions, faisant obstacle au dépistage précoce et à la prise en charge. La réunion de synthèse proposée par le Rézo Addictions 41 est une réunion pluriprofessionnelle en présence du patient pour définir une prise en charge. L’objectif de cette étude est d’évaluer l’impact de la réunion de synthèse sur les représentations des médecins généralistes.
Méthode : Des entretiens semi-directifs ont été menés auprès de 10 médecins généralistes du réseau puis retranscrits et analysés selon un codage thématique.
Résultats : Les médecins généralistes de l’étude ont globalement des représentations positives et indiquent que leurs représentations ont clairement évolué depuis la fin de leurs études. Plus de la moitié des médecins identifient spontanément la réunion comme facteur du changement. La réunion est un lieu d’observation d’une approche thérapeutique basée sur le respect et centrée sur le patient.
Elle permet une vision globale de sa vie et l’encourage à prendre une position active, tout en entraînant un changement de regard sur lui. La réunion se rattache ainsi à l’entretien motivationnel. Les autres médecins évoquent indirectement la réunion en distinguant dans la réunion une fonction de soutien qui remet en cause la représentation de fatalité associée aux addictions.
Conclusion : Notre étude démontre que la répétition d’activités avec et pour le patient rassemblant addictologue, médecin généraliste et professionnels des autres champs de l’addiction permet une amélioration des représentations des médecins sur les addictions.
Mots clés : représentations, addictions, médecins généralistes, réunion pluriprofessionnelle, entretien
motivationnel.
(9)ABSTRACT
Rézo Addictions 41’s multiprofessional meeting: cause of change of general practitioner’s perceptions.
Introduction: Addiction constitutes a major public health problem and general practitioners (GPs) are patients’ first appeal. It has been demonstrated that GP have negative social perceptions of addicts and addictions, thus limiting early diagnosis and care. Rézo addictions 41 set up a multiprofessional meeting aiming to resolve problems where professionals from a variety of fields unite and establish care goals together. Our study’s purpose is to evaluate this synthesis meeting’s impact on GPs social perceptions of addictions.
Methods: Semi-structured interviews were conducted among 10 GPs belonging to the care network.
They were then retranscribed and analysed using the grounded theory.
Results: Most GPs we interviewed have positive perceptions and say that these perceptions have strongly changed since the end of their medical studies. More than half of them spontaneously identify the multiprofessional meeting as responsible with their opinion change. Indeed, the patient’s active status and global vision of his/her life lead to a more human look. Observing patient’s centered therapeutical approach based on respect contribute to this evolution of look and to increase the patient’s motivation like motivational interviewing. The other GPs mention the meeting’s impact, recognising its support role. Fighting against loneliness one feels facing a wide problem challenges the perception of fatality associated with addictions.
Conclusion: Repeated activities involving addictologists, GPs and other addiction-linked professionals working with and for the patient improve doctors’ social perceptions on addicts and addictions.
Keys words: social perceptions, addictions, general practitioner, multiprofessional meeting,
motivational interviewing
(10)TABLE DES MATIERES
Avant-Propos _________________________________________________________________ 13 I) INTRODUCTION ___________________________________________________________ 14
A) Définition des addictions ____________________________________________________ 14
B) Les addictions sont un problème de santé publique ________________________________ 14
C) Le médecin généraliste est le premier recours ____________________________________ 15
D) La difficulté de prise en charge des addictions est liée aux représentations négatives chez les
Médecins Généralistes ________________________________________________________________ 15
II) CADRE THEORIQUE DE L’ETUDE : LES REPRESENTATIONS SOCIALES _____ 18
A) Définition des représentations _________________________________________________ 18
B) Changement des représentations _______________________________________________ 18
III) ETAT DES CONNAISSANCES SUR LES REPRESENTATIONS DES ADDICTIONS 21
A) Représentations des addictions, des patients addicts et de leur prise en charge chez les
médecins généralistes ________________________________________________________________ 21
1) Regard en fonction des substances _____________________________________________ 23
2) Regard en fonction du sexe de la personne addict _________________________________ 24
3) Regard en fonction du pays ___________________________________________________ 25
4) Regard en fonction du niveau social du patient addict ______________________________ 26
5) Regard du médecin généraliste versus regard des psychiatres et addictologues ___________ 26
6) Regard en fonction des siècles ________________________________________________ 26
B) Pistes déjà envisagées pour faire évoluer les représentations et nouveautés ______________ 26
IV) TERRAIN D’ETUDE, HYPOTHESE ET DEMARCHE METHODOLOGIQUE _____ 29
A) Présentation du Rézo Addictions 41 et de la réunion de synthèse _____________________ 29
1) Le Rézo Addictions 41 ______________________________________________________ 29
2) La réunion de synthèse : fonctionnement et cadre théorique _________________________ 30
B) Hypothèse sur la réunion de synthèse ___________________________________________ 31
C) Démarche méthodologique ___________________________________________________ 32
1) Population étudiée __________________________________________________________ 32
2) Méthodes d’enquête ________________________________________________________ 32
3) Posture méthodologique _____________________________________________________ 33
V) RESULTATS ______________________________________________________________ 34
A) Caractéristiques de la population enquêtée _______________________________________ 34
B) Fonction de la réunion de synthèse _____________________________________________ 35
1) Apports pour les médecins généralistes _________________________________________ 35
a) Intérêt de la pluralité et de la pluriprofessionnalité ____________________________ 35
b) Constitution d’un réseau de ressources _____________________________________ 38
c) Changement de regard _________________________________________________ 38
2) Apports pour les patients selon le point de vue des médecins généralistes _______________ 39
a) Repositionnement du patient en tant que sujet _______________________________ 39
b) Soutien des patients____________________________________________________ 39
3) Activité de résolution de problème _____________________________________________ 40
a) Faire le point sur la situation du patient ou débloquer une situation _______________ 40
b) Découvrir une nouvelle approche thérapeutique ______________________________ 40
C) Représentations des addictions et des patients addicts à la fin des études de médecine _____ 42
1) Alcool ___________________________________________________________________ 42
2) Substances illicites _________________________________________________________ 43
3) Médicaments ______________________________________________________________ 44
D) Représentation actuelle des addictions, des patients addicts et de leur prise en charge _____ 44
1) Représentations positives ou en accord avec la vision des addictions du réseau __________ 45
2) Représentations négatives ou représentations en désaccord avec la vision des addictions du
réseau 50
E) Facteurs de changement du regard sur les addictions et les patients addicts. _____________ 52
1) La réunion de synthèse ______________________________________________________ 52
2) Les échanges avec l’addictologue du Rézo Addictions 41 ___________________________ 54
3) Les échanges avec les collègues médecins généralistes ou psychiatres hors réseau ________ 54
(11)5) La formation médicale continue _______________________________________________ 55
6) Les échanges avec les associations néphalistes ____________________________________ 55
7) La politique de Santé Publique ________________________________________________ 55
F) Ressenti du déroulement de la réunion de synthèse par le médecin généraliste ___________ 55
1) Originalité de la réunion de la synthèse _________________________________________ 55
2) Représentation du rôle du médecin généraliste dans la réunion _______________________ 56
3) Aspects négatifs de la réunion ________________________________________________ 57
VI) DISCUSSION _____________________________________________________________ 58
A) Principaux Résultats ________________________________________________________ 58
1) Changement massif des représentations _________________________________________ 58
2) Réunion de synthèse moteur du changement _____________________________________ 58
3) Autres facteurs du changement ________________________________________________ 61
4) Réunion de synthèse et Entretien Motivationnel ___________________________________ 62
B) Validité __________________________________________________________________ 63
1) Force de l’étude____________________________________________________________ 63
2) Faiblesses de l’étude ________________________________________________________ 63
C) Perspectives ______________________________________________________________ 64
VII) CONCLUSION ___________________________________________________________ 67
IX) ANNEXES ________________________________________________________________ 71
A) Annexe 1 : le guide d’entretien ________________________________________________ 71
B) Annexe 2 : Caractéristiques de l’échantillon______________________________________ 73
C) Annexe 3 : Exemple de retranscription d’un entretien ______________________________ 75
D) Annexe 4 :Arborescence des codes ____________________________________________ 80
(12)Avant-Propos
Quand j’ai débuté mes études j’ai découvert les patients addicts avec le même regard que mes compagnons d’étude : incompréhension, étonnement, appréhension…
Il me semblait qu’il existait une autre façon de voir les addictions et les patients addicts mais je ne savais pas laquelle.
D’autre part la situation de rejet d’une personne par un groupe m’a toujours étonnée.
Comment des gens différents peuvent s’unir en une seule voix pour mettre en marge un individu ? L’explication consistant à dire que le rejet était automatiquement lié aux caractéristiques de la personne concernée me paraissait un peu simpliste. N’y avait-il pas une pensée commune non rationnelle qui maintenait la cohésion du groupe et qui se transmettait imperceptiblement ?
J’ai décidé de faire un semestre en addictologie au cours de mon internat. Je remercie donc le Département de Médecine Générale de m’avoir permis de réaliser un stage au sein du Rézo Addictions 41 et de rencontrer des personnes qui pensaient différemment.
Cette expérience m’a amené à choisir mon sujet de thèse. J’ai ainsi pu travailler sur le sujet passionnant des représentations dans un domaine qui m’intéressait et faisait l’objet de nombreuses croyances : les addictions.
« On ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux. »
Le petit prince, Antoine de Saint-Exupéry.
(13)I) INTRODUCTION
A) Définition des addictions
Une addiction est la répétition incontrôlée d’un comportement dans le but de soulager un état de tension interne, de chercher du plaisir puis de recréer le plaisir initial dans une quête incessante de l’effet subjectif ressenti lors des premières utilisations. Ce comportement peut être la prise d’une substance, les jeux de hasard, les jeux vidéo, les relations sexuelles, la prise de nourriture (boulimie). Ce qui est pathologique dans ces situations qui pourraient relever de la vie courante, c’est que le comportement n’a plus pour effet le ressenti du plaisir mais le soulagement d’une souffrance. Cette souffrance peut être primaire c'est-à-dire liée à l’histoire de vie où à la psychopathologie du patient ou secondaire à la culpabilité engendrée par le comportement d’addiction, le patient se rendant compte que le comportement est plus fort que lui. Le plus souvent ces différentes souffrances sont intriquées.
L’addiction se caractérise par l’impossibilité répétée de contrôler un comportement malgré les efforts et la volonté du patient. La poursuite du comportement a lieu en dépit de la connaissance de ses conséquences négatives (1). Il existe une relation de dépendance de la personne à son comportement.
On retrouve cette notion d’esclavage dans l’étymologie même du mot addiction qui vient du latin « addictus » (2). Ce terme était utilisé dans le droit romain pour désigner la situation du débiteur, qui incapable de payer ses dettes, était « adonné » à son créancier. Le créancier avait le droit de disposer entièrement de son débiteur comme d’un esclave. On parle d’une contrainte par corps : la personne redevable donne son corps en gage pour payer sa dette. La dette est insolvable puisque l’esclavage est à vie. Cette notion de dette est retrouvée dans l’explication des addictions selon le modèle psychanalytique : le patient donne son corps en esclavage c'est-à-dire donne son corps à l’addiction pour régler une dette réelle ou supposée ou pour régler la dette d’un tiers.
B) Les addictions sont un problème de santé publique
En 2010, selon le Baromètre santé INPES (Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé), la France compte 14 millions de fumeurs quotidiens, 5 millions d’usagers quotidiens d’alcool et 500 000 usagers quotidiens de cannabis (3)
Les grandes tendances d’usage de substances psychoactives qui se dégagent alors sont contrastées : baisse de l’usage quotidien d’alcool mais une hausse des alcoolisations ponctuelles importantes (binge drinking) et une hausse des épisodes d’ivresse déclarés. La
.
(14)proportion des fumeurs quotidiens est en augmentation par rapport au dernier baromètre de 2005. Le nombre de personne ayant consommé au moins une fois dans l’année 2010 (usage actuel) est stable pour le cannabis, en augmentation pour la cocaïne, et le poppers et en recul pour l’ectasy. L’expérimentation c'est-à-dire l’usage au moins une fois au cours de la vie est en augmentation pour l’héroïne et les champignons hallucinogènes. L’expérimentation n’est pas un indicateur de consommation mais sert principalement à mesurer la diffusion du produit (4).
Selon l’OFDT (Observatoire Français des Drogues et Toxicomanies) en 2013, 73 000 décès par an seraient imputables au tabac, il s’agit de la 1
ère
En raison de la masse de population touchée, des répercussions en terme de morbi-mortalité et des coûts engendrés, la prévention des addictions est devenue une priorité nationale de santé publique. Ainsi le Plan gouvernemental de lutte contre la drogue et les conduites addictives 2013-2017, élaboré par la MILDT (Mission Interministérielle de Lutte contre la Drogue et la Toxicomanie), a été adopté et publié en septembre 2013. Les professionnels de santé sont plus que jamais concernés et appelés à s’investir dans la prise en charges des pratiques addictives.
cause de mortalité évitable. L’alcool serait responsable de 49 000 décès par an (5). On attend une photographie de la situation actuelle avec la parution du Baromètre santé INPES fin 2014.
C) Le médecin généraliste est le premier recours
Le médecin généraliste a une position de premier recours dans le système de soins.
En France, chaque personne, toutes classes d’âges confondues, a consulté en moyenne 4,2 fois un médecin généraliste en consultation ou en visite, selon la FNORS (Fédération nationale des observatoires régionaux de santé) en 2012. Le médecin généraliste a donc une position stratégique du fait de sa proximité et de son accessibilité pour repérer les addictions et délivrer des messages de prévention. C’est un acteur de santé publique.
D) La difficulté de prise en charge des addictions est liée aux représentations négatives chez les Médecins Généralistes
En 2009, d’après le Baromètre Santé sur la prise charge des addictions par les Médecins
Généralistes, 65 % des médecins généralistes déclarent aborder la question de la
consommation de tabac au moins une fois avec chaque patient, illustrant la diffusion des
pratiques de sevrage tabagique en médecine de ville. Pour l’alcool (23 %), et surtout pour le
cannabis (8 %), le repérage se fait de manière moins systématique : les généralistes déclarent
(15)Les mêmes chiffres sont retrouvés dans une thèse d’exercice récente portant sur le ressenti des Médecins Généralistes sur la prise en charge des problèmes d’alcool. En l’absence de signe d’appel faisant penser à un mésusage d’alcool, 22 % des médecins généralistes questionnent leurs patients sur leur consommation d’alcool (7).
Il existe donc un décalage entre le nombre réel de patients présentant une addiction dans une patientèle de médecin généraliste et ce que rapportent les médecins généralistes : ce nombre est largement minimisé par les médecins (8). Cette minimisation ne se fait pas de manière consciente : si l'on ne pose pas la question de l'addiction, l’addiction n’existe pas. Cet écart souligne la difficulté à repérer et donc à intervenir.
Outre la carence en enseignement, d’autres obstacles à la prise en charge sont décrits : la non- acceptation du modèle médical des addictions, le manque de lobbying et d’engagement pour la formation en addictions, la présence dans la vie même du médecin de problèmes d’addiction (8).
A contrario, les études réalisées sur la prise en charge des addictions par les médecins généralistes soulignent que le repérage systématique des consommations de substances psychoactives est très lié au fait d’appartenir à un réseau d’addictologie, à la facilité à aborder ces problèmes et au fait que le médecin généraliste considère que cela fait partie intégrante de son rôle (6).
Pour la réalisation d'une intervention brève on retrouve les mêmes facteurs que pour le repérage : les facteurs qui influencent positivement sont une confiance en soi modérée à élevée pour mener une intervention et la croyance que cela fait partie de la responsabilité de soignant (9).
De plus, les médecins généralistes sont d’autant plus impliqués dans le dépistage et la prise en charge d’une addiction si celle-ci est acceptée socialement (10).
En filigrane se dessine la place des représentations. Si le dépistage et le fait d’intervenir sont conditionnés par la facilité à aborder le sujet et la conviction que cela fait partie du rôle du médecin généraliste, cela suppose que le patient addict est dans l’esprit des soignants un patient comme les autres, que l’addiction est perçue comme une maladie sur laquelle on peut agir. Cela implique pour le médecin un travail sur ses représentations initiales, car ce n’est pas un raisonnement intuitif mais plutôt le fruit d’un cheminement.
Les diverses représentations vis-à-vis des addictions influent donc sur le mode de prise en
charge proposée par le soignant (10). Les représentations guident le comportement du
soignant (11).
(16)La notion de représentation est reprise dans les études sur les obstacles à la prise en charge des patients addicts. Il est retrouvé que la formation ou l’expérience n’est pas le seul facteur justifiant la faiblesse de la prise en charge des patients addicts (12). Les représentations négatives seraient même à l’origine de la carence en formation en addictologie chez les médecins. L’addiction peut revêtir la forme d’une pathologie inéluctable chez certains médecins généralistes, qui ne voient donc pas d’intérêt à se former. Il peut exister également de fausses représentations dans l’esprit des responsables de formation, ce qui freine leur investissement dans l’enseignement de cette entité médicale (13).
Cette notion que la disposition des professionnels de santé envers les addictions puisse influencer leur pratique n'est pas nouvelle. En 1975 déjà, il était démontré que la qualité des soins délivrés aux patients addicts dépendait de la position des médecins généralistes envers les addictions. Les conséquences de ces positions négatives se répercutaient déjà sur leur envie d’acquérir des connaissances sur les addictions et de les appliquer, entraînant un retard diagnostique et donc thérapeutique (14).
Dans cette thèse nous restituons une étude exploratoire qui a pris pour objet l’impact d’une activité clinique singulière – les réunions de synthèse mises en œuvre par un réseau
d’addictologie – sur les représentations des médecins généralistes relatives à cette pathologie.
Nous commencerons par définir le cadre théorique de l’étude que sont les représentations
sociales, puis nous ferons une revue de la littérature sur les représentations actuelles des
médecins généralistes sur les addictions. Le chapitre suivant sera consacré à la présentation de
notre terrain de recherche et à la restitution de notre démarche méthodologique. Les résultats
de notre enquête seront présentés dans le chapitre cinq et discutés dans le sixième avant une
rapide conclusion.
(17)II) CADRE THEORIQUE DE L’ETUDE : LES REPRESENTATIONS SOCIALES
A) Définition des représentations
Les représentations sont des connaissances de sens commun, c'est à dire une construction mentale, plus ou moins élaborée opposée à celle de l'expert où la pensée est rationnelle, fondée sur la logique.
Selon Moscovici, la fabrication d'une représentation comprend deux processus (15). Le premier processus est appelé objectivation, il consiste à transformer l’objet de la représentation, concept abstrait, pour le rendre plus concret. Les fonctions cognitives du sujet opèrent donc une sélection, un filtrage des informations disponibles en fonction de critères normatifs. L’information retenue concernant l’objet est celle qui est en résonance avec les valeurs du groupe. Ensuite, les informations sont utilisées pour construire un noyau figuratif qui va comporter seulement quelques notions qui sont agencées d’une certaine façon et qui vont constituer l’essentiel de la représentation.
Le deuxième processus dans la fabrication d’une représentation est appelé ancrage, il permet l’enracinement de la représentation dans le système de pensée préexistant du sujet. L’ancrage consiste à intégrer des éléments de connaissance nouveaux dans un réseau de catégories plus familières, donc déjà signifiantes pour le groupe. La catégorisation réduit la complexité de notre environnement physique et social. Elle facilite la reconnaissance des objets qui nous sont connus, mais aussi des objets non ou mal connus.
On comprend donc que les représentations sont un reflet de l’objet et non la réalité. Des parties de l’objet, informations, ont été retenues en fonction des valeurs de la personne et du groupe de personne à qui elle appartient. Le but de cette sélection mentale est de simplifier l’information, qu’elle soit comprise par tous et qu’elle entre dans une cohérence de pensée.
B) Changement des représentations
Abric et Flament développent la théorie de Moscovici et introduisent leur théorie du noyau central : toute représentation sociale est organisée selon un noyau central avec autour un système périphérique. On peut faire l’analogie avec la structure d’un atome qui comporte un noyau composé de protons et neutrons et les électrons qui gravitent autour (16).
Le noyau central est hérité de la mémoire collective et de l’histoire du groupe : il est transmis
au cours de la socialisation primaire (par la famille) puis secondaire (par l’école, les
(18)fréquentations, la formation secondaire). Il est consensuel car c’est par lui que se réalise et se définit l’homogénéité d’un groupe social. Le noyau central est stable, cohérent, rigide. Il résiste au changement permettant d’assurer la permanence et la pérennité de la représentation.
Ce système est relativement indépendant du contexte social et matériel dans lequel la représentation est mise en évidence. Le noyau central a une double fonction : une fonction génératrice donnant à la représentation sa signification et une fonction organisatrice déterminant la nature des liens entre les éléments. C’est un filtre mental au travers duquel la réalité est perçue.
A contrario le système périphérique, sous la dépendance du noyau central, permet l’intégration des expériences et des histoires individuelles dans la représentation de l’objet. Il supporte donc l’hétérogénéité du groupe, les contradictions. C’est en effet au niveau du système périphérique que les éléments contradictoires aux éléments centraux vont être neutralisés par le biais d’une minoration, d’une réinterprétation ou d’une limitation (17). Il est plus souple que le noyau central. Ce système est sensible au contexte immédiat et est ainsi évolutif. Le système périphérique a, lui, pour fonctions : une fonction de concrétisation c'est- à-dire permet l’adaptation de la représentation à la réalité concrète, et une fonction de régulation c'est-à-dire permet de moduler la représentation selon son histoire personnelle et une fonction de défense en protégeant le noyau central (15). Sans les éléments périphériques, les éléments centraux ne sont plus défendus du changement et le groupe perd ses repères face à l’objet.
Le système périphérique est l’interface entre la réalité et le système central, il dicte nos comportements et nos prises de positions (16). Il détermine donc en grande partie nos pratiques sociales et nos jugements émis dans une situation donnée, tout cela sous la direction du noyau central qui donne le sens et la cohérence de la représentation.
Quand on met en cause le noyau ou système central, les sujets ne reconnaissent plus l’objet et il y a effondrement du sens attribué à la représentation. Un seul élément du noyau central mis en cause suffit à remettre en cause l’ensemble de la représentation. Par contre quand on met en cause un élément du système périphérique, les sujets continuent à adhérer à la représentation en reconstruisant de la cohérence et au besoin en rejetant dans la normalité ou dans l’exception ce qui les encombre.
Pour la transformation des représentations, c’est la notion de réversibilité de la situation qui compte.
Si la situation est perçue comme réversible : il y a uniquement une modification du système
(19)d’atteinte du noyau central et les éléments contradictoires avec ce noyau sont minorés, interprétés.
Si la situation est ressentie comme irréversible c'est-à-dire que le système périphérique n’arrive plus à neutraliser les données contradictoires à la représentation : il y a transformation de la représentation. C’est une transformation progressive, sans rupture. Elle peut être assez rapide, déterminée par la mise en œuvre de pratiques nouvelles mettant en cause le noyau central. Elle peut être plus lente, déterminée par l’évolution des idées, par des informations. Le changement du système périphérique est progressif jusqu’à la mise en cause du noyau central.
Troisième cas de figure, la transformation peut être brutale, déterminée par un évènement particulier perçu comme irréversible, par exemple une situation de crise. On assiste alors à un éclatement du noyau central et la transformation de la représentation est rapide, immédiate, massive. Le système périphérique est débordé et ne peut pas mettre en œuvre ses mécanismes défensifs.
On retiendra donc que pour changer une représentation, hors situation de crise, l’observation
d’actes et de pratiques nouvelles à un impact plus rapide que lorsqu’elle passe par des mots,
des informations.
(20)III) ETAT DES CONNAISSANCES SUR LES REPRESENTATIONS DES ADDICTIONS
A) Représentations des addictions, des patients addicts et de leur prise en charge chez les médecins généralistes
Après revue de la littérature, les représentations des addictions ou des patients addicts qu’il est possible de trouver chez certains soignants sont :
- L’addiction est un choix de vie (18). Le patient est responsable de sa situation. Or si on fait le parallèle avec d’autres maladies chroniques comme l’insuffisance cardiaque par exemple, on accepte logiquement que la fonction cardiaque d’un insuffisant cardiaque soit altérée et on ne va pas lui reprocher. Par contre il est beaucoup plus difficile de ne pas reprocher à un patient addict son comportement alors que celui-ci est lié à l’altération de certaines fonctions (19) : utilisation de la substance bien que la personne sache avoir un problème psychologique ou physique, des problèmes interpersonnels ou sociaux persistants causés par cette substance. Cela fait partie intégrante de la définition même de l’addiction, selon le DSM-5 Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux publié en 2013.
- L’addiction est un vice : « celui qui s'adonnait au vice était un ivrogne et les synonymes dévalorisants d'ivrogne n'ont jamais disparus du langage populaire : alcoolo, pochtron, soiffard, saoulo. Les représentations restent péjoratives mêmes chez les médecins, avec l’utilisation d'un langage codé : oenolisme, éthylisme... » (19).
Elle est lié à un manque de volonté donc le médecin ne voit pas en quoi il pourrait intervenir puisqu’il ne s’agirait pas d’une maladie mais d’un défaut, d’où une attitude moralisatrice, essayant de raisonner la personne.
- L’addiction est une fatalité, elle n’est pas accessible à un traitement, il est donc peut utile de la diagnostiquer car il n’y a pas de solutions à proposer derrière (13). Or un patient sur trois réduit sa consommation d’alcool suite à une observation du médecin ou à un rappel des normes de tempérance (12).
- Et quand bien même il y aurait des choses à proposer au patient addict, il ne suit pas
les conseils. Il est récalcitrant (20). Il rentre difficilement dans un projet de soins :
nomadisme médical, non respect des horaires de rendez-vous, oubli des rendez-vous,
mauvaise observance des prescriptions (20).
(21)- Le patient addict est un marginal. Il incarne la décadence, le degré zéro de l’humanité.
Il fait peur car il est différent, il n’est pas conforme et ne se conforme pas aux normes de notre société basée autour de l’argent, de la propreté, de l’apparence.
Mais cette marginalisation a aussi une autre fonction : elle « permet de nous rassurer sur notre statut, de pouvoir dire : on est mieux qu'eux, de pouvoir se comparer à une personne plus en difficultés que soi-même et d'en conclure qu'on se débrouille mieux, qu'on est plus fort. Il existe donc une véritable inclusion des personnes addicts dans notre société, ne serait-ce que pour se comparer. Elles servent d'échelle de réussite comme si elles étaient le degré zéro » (19).
- Le patient addict est un manipulateur et un menteur, capable de tout pour obtenir sa substance ou continuer à répéter son comportement (19). Il est tricheur (19) et peut être menaçant (21).
- Le patient addict est un patient particulier qui a besoin des médecins pour continuer à perpétuer son addiction (11). Le médecin se sent assimilé à un dealer s’il prescrit des psychotropes ou un traitement de substitution. Le patient addict va détourner leurs usages au profit de son addiction. Il vaut mieux ne rien prescrire car ça serait néfaste pour le patient. Il y a pour le patient addict une surestimation de son inobservance alors que pour un patient non addict les études montrent que le médecin à tendance à surestimer l’observance des patients en général (22). En revanche, les médecins qui acceptent de prescrire un traitement de substitution ou des psychotropes considèrent que le besoin d'aide est une caractéristique principale du patient addict. On passe alors dans un autre registre de représentation : un patient addict est un patient en souffrance (11).
- Le patient addict est immature (comparaison avec l’adolescent) : il peut changer rapidement d’affect, il a du mal à accepter les limites ou le cadre, il est impatient, influençable (23). Or ses caractéristiques, bien qu’elles existent, ne sont pas liées au caractère de la personne mais à l’addiction elle-même.
- Le patient addict a un manque de motivation, il a peur d’affronter le monde extérieur, il a eu une éduction laxiste (12).
Les freins évoqués par les médecins à aborder le sujet des addictions en consultation sont liés également à leurs représentations. Les arguments avancés fréquemment sont :
- La peur de contrarier le patient, la peur du rejet, que la question des addictions soit
mal perçue par le patient et qu’il y ait une rupture dans le lien « Parler d’alcool à un
(22)patient équivaudrait à le suspecter d’être alcoolique » (20). Or la plupart des patients réagissent bien à cette question et trouvent normal que leur médecin leur pose la question (24) (12).
- L’investissement en temps est trop lourd et mal rémunéré, il n’est donc pas rentable de parler des addictions (9). Effectivement il est fastidieux de prendre en charge un patient addict seul d’où l’importance des réseaux et de connaître les structures de soins qui existent à proximité.
- Prendre en charge des patients addicts risque de faire perdre une partie de leur clientèle aux médecins. Le fait de devoir partager la même salle d’attente va faire fuir les patients non addicts, car ils vont être gênés de se retrouver en présence de personnes si différentes. Cette attitude est difficilement compatible avec certains des principes du Serment d’Hippocrate qui stipulent de donner « des soins à l’indigent et à quiconque le demandera » et de respecter « toutes le personnes […] sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. »
Si on reprend le schéma d’une représentation selon Abric et Flament, on pourrait retenir comme noyau central de la représentation d’une addiction : l’irréversibilité, la faiblesse, la décadence ou la perte d’humanité. Le système périphérique contiendrait les notions de perte de temps et échec, moralisation et dédain, rejet, peur.
1) Regard en fonction des substances
Les médecins généralistes ne traitent pas de la même façon les problèmes de tabac et d’alcool, et encore moins ceux liés à la consommation de cannabis ou au autres substances illicites (4).
Ils dépistent et prennent en charge plus facilement la consommation de tabac chez leurs patients. Ils ont une position intermédiaire vis-à-vis de l’alcool et ont plus de difficulté avec la consommation de cannabis et d’opiacés
:
quand le dépistage est réalisé, les patients addicts sont adressés en majorité à une structure (10).
Contrairement aux patients addicts au tabac et à l’alcool qui ont pour contrepoint le bien buvant ou le fumeur de tabac occasionnel en soirée ou au café, il est souvent impensable pour un médecin qu’un patient puisse consommer occasionnellement de l’héroïne, de la cocaïne, du cannabis, goûter le produit et ses effets, travailler en même temps, s’occuper de ses enfants. Dans nos esprits de médecin comme en population générale, il suffit d’une fois pour être dépendant et les consommateurs de substances illicites sont en marge de la société.
Certes, l’équilibre est précaire avec une consommation occasionnelle de ce type de substances
(23)avec un risque de basculer dans la dépendance et la désinsertion mais néanmoins elle existe (19).
De manière décroissante les médecins généralistes sont donc plus impliqués dans la prise en charge du tabac puis de l’alcool, du cannabis et des opiacés. Cela pourrait s’expliquer par le fait que les médecins généralistes sont plus enclins à dépister et à prendre en charge une addiction si celle-ci est acceptée socialement (10).
Les représentations des substances ne sont pas figées et évoluent dans la tête des médecins généralistes en fonction des représentations sociales pour ensuite se répercuter dans leurs pratiques. Par exemple l’image du cannabis s’est dégradée entre 1998 et 2009 en population générale, les médecins généralistes ont suivi cette tendance générale et sont devenus plus méfiants vis-à-vis du cannabis avec un discours plus ferme (4).
La différence du regard du médecin en fonction de la substance montre que le terme addiction n’est donc pas encore devenue une entité générale. Même si l’addiction aux différentes substances ou comportements utilise les mêmes mécanismes neurobiologiques, il est encore difficile de se détacher de la nature du produit lors de la prise en charge (6). Il est probable qu’il faudra du temps pour que les représentations générées par « ce nouveau concept d'addiction, détaché qu'il est de la notion de produits, chassent les anciennes représentations liées au produit lui-même et à sa culture » (19).
2) Regard en fonction du sexe de la personne addict
Les femmes addicts sont souvent jugées plus sévèrement par les professionnels de santé. Il
existe une stigmatisation des femmes consommatrices, l’addiction entraînant une perte des
attributs féminins idéaux de la fonction maternelle. Ce stigmate associé au stéréotype féminin
de la vulnérabilité concourent à la sévérité du jugement des femmes consommatrices de la
part des professionnels du secteur social et médical (25). En effet la femme est, dans l’esprit
commun, plus impliquée dans l’éducation des enfants et responsable directement du bon
déroulement de la croissance de l’enfant, surtout dans les premières années. Une défaillance
maternelle liée à l’addiction est considérée souvent comme plus délétère qu’une défaillance
paternelle de même nature. Un enfant qui a une mère addict sera plus facilement considéré en
danger qu’un enfant dont le père est addict.
(24)3) Regard en fonction du pays
Il est étonnant de constater que malgré les différences de culture, les représentations des addictions dans différents pays du monde se ressemblent et les soignants sont de ce fait confrontés aux mêmes difficultés.
En Australie : il en ressort que les professionnels considèrent que soigner des patients ayant des problèmes d'alcool ou de drogues est une expérience difficile et déplaisante (14).
En Finlande : infirmières et médecins ne détectent que 23 % de leurs patients ayant des problèmes d'addiction (14).
En Irlande du Nord : les professionnels de santé ont non seulement des lacunes dans leur connaissances et capacités à aider les patients addicts mais ils n'aspirent pas non plus à acquérir ces connaissances, pensant que ça va attirer encore plus de personnes addicts dans leur patientèle (14).
Aux USA : une étude démontre que plus les étudiants en médecine progressent dans leur formation, plus ils sont convaincus que les patients ayant des problèmes d'addiction surconsomment des soins médicaux sans rien donner en retour. De plus ils pensent que prendre en charge des addictions affecte négativement les soins des autres patients (les non addicts) à cause du temps et de l'argent dépensés pour les patients addicts (14).
En Chine : la plupart des médecins chinois considèrent que l'addiction est plus une mauvaise habitude qu'un trouble. Il existe une philosophie punitive en Chine : population et professionnels argumentent que les patients addicts sont responsables de leur comportement et qu'ils doivent tirer une leçon de leurs fautes. Et même parmi les professionnels traitant les addictions seulement un peu plus de la moitié pensent que c'est un trouble psychique. Les patients, même ceux qui y sont obligés par la loi, doivent payer leur traitement, les centres de soins ne recevant que très peu de subventions de l’Etat . Les professionnels de santé sont peu attirés par l’addictologie (conditions de travail difficiles, mauvaise rémunération) et pour ceux qui le sont leur enthousiasme décroît avec le temps passé à travailler (26).
En Israël : Les médecins éprouvent moins de satisfaction à soigner des patients addicts en comparaison avec les autres patients et rapportent des taux d’agression plus importants avec les patients addicts qu’avec les non addicts (27).
En Suisse : le corps médical, étudiants et médecins, a parfois une attitude négative et
pessimiste vis-à-vis de l'addiction. Les médecins expriment souvent un sentiment
d'incompétence envers ces problèmes et n'aiment pas s'en occuper (28).
(25)4) Regard en fonction du niveau social du patient addict
Les médecins généralistes dépistent plus facilement les addictions dans les zones urbanisées et parmi les patients ayant un faible niveau socio-économique (29).
5) Regard du médecin généraliste versus regard des psychiatres et addictologues
Les regards diffèrent entre les trois disciplines. Les regards sont plus positifs si le professionnel est familier des problèmes d'addiction, si il travaille fréquemment avec des patients addicts et s'il a confiance dans les traitements des addictions.
Les addictologues ont un regard plus positif sur le travail avec les patients ayant des problèmes d'addiction que les médecins généralistes ou les psychiatres. Pour améliorer le regard de ces derniers, une amélioration de leur formation et le partage avec eux d'un système de soins où ils peuvent être épaulés par des addictologues semblent être des pistes (30) .
6) Regard en fonction des siècles
La notion d’addiction est très récente au regard de l’histoire alors que des substances sont consommées depuis l’antiquité. Ce n’est qu’à partir de la fin du 19
ème
B) Pistes déjà envisagées pour faire évoluer les représentations et nouveautés siècle qu'on s’aperçoit de l'effet toxique des produits et que naît le concept de drogues. Ces substances sont à cette époque consommées de façon assez banale dans les milieux artistiques et intellectuels. Elles sont alors plutôt synonymes d’élévation sociale ou culturelle ! Le terme de drogue prend progressivement une connotation péjorative pour aboutir au terme de toxicomanie au début du 20ème siècle. Le suffixe « manie » suggérant la passion, la folie fait entrer ce terme dans le registre de la maladie psychiatrique. Ensuite la connotation du terme reste péjorative et le toxicomane est synonyme de délinquant. Il faut attendre les années 1980 pour qu'on abandonne le terme de toxicomane pour personne addict ou personne présentant des conduites addictives, on entre dans la notion de maladie (20).
Une des pistes habituellement proposée est de dispenser davantage de formation en addictologie. Le constat est que partout dans le monde le nombre d’heures consacrées à l’enseignement des addictions est ridicule rapporté à la prévalence de cette pathologie.
Plusieurs auteurs soulignent que la formation influe sur le sens de l'engagement et augmente
le sens des responsabilités à détecter les problèmes d'addiction (8) (9) (13).
(26)Des études se sont intéressées aux modalités d'enseignement des addictions : la période propice à l’enseignement durant les études médicales. Certaines préconisent qu’une évaluation précoce soit faite, c'est-à-dire dès le premier cycle, et régulière des étudiants portant sur leur compréhension des addictions. Ces évaluations doivent permettre de cibler ce qui doit être enseigné et encourager un changement des pratiques (31). Le fait d’enseigner précocement permettrait de travailler les représentations plus facilement car les étudiants ne seraient pas encore empreints des images fausses véhiculées par les pairs lors des stages hospitaliers.
D’autres modalités sont proposées : enseignement obligatoire et plus conséquent aux étudiants de 3ème cycle de toutes spécialités, associer un stage en CSAPA (Centre de Soins Ambulatoires et de Prévention en Addictologie) ou auprès d'un médecin d’un réseau addiction, faire témoigner des patients (21). Rencontrer des patients addicts lors de stages encadrés par un addictologue ou faire témoigner des patients partent de l’observation que connaître une personne qui a une addiction a une influence positive sur le comportement vis à vis des addicts (32). De plus comme il a été dit dans le chapitre sur le changement des représentations, l’observation d’actes et de pratiques nouvelles lors du stage en CSAPA ou en réseau addiction a un impact beaucoup plus fort et rapide sur les représentations.
Des recherches doivent être menées en parallèle sur le contenu de cet enseignement (31). La formation peut-être l’occasion de faire passer des idées peu répandues durant les études, souvent novatrices : transmettre que le patient addict est un patient en souffrance, faire prendre conscience qu'il y a nécessité d'une motivation partagée, apprendre aux étudiants que le patient est détenteur d'un savoir, que le médecin a ses limites… Les capacités de communication, l’aptitude à gérer l’échec, la relation dans la durée, l’aptitude à prescrire des traitements de substitution et à orienter correctement pour passer le relais doivent être développées. C’est par l’apprentissage de la tolérance et de l'ouverture d'esprit que les représentations évolueront (20).
L’autre piste peu abordée jusque-là est que travailler en réseau pourrait améliorer les
représentations des médecins en post-internat. La formation continue n’est pas suffisante pour
inciter les médecins de premier recours à s'occuper de façon plus active des problèmes
d’addiction. Il apparaît que les médecins qui prennent bien en charge les addictions sont en
général plutôt bien formés, et ceux qui ne s'en occupent guère ne le font pas seulement par
manque de formation mais plus parce qu'ils ne se sentent pas suffisamment soutenus ou pour
des questions de représentation : fatalité de l’addiction (12). Pire, les représentations négatives
(27)l’enseignement pour que les représentations changent et que les médecins aient envie de se former de façon pratique (13). L’impact de la formation est faible et de courte durée s'il n'y a pas régulièrement des rappels et surtout si les médecins en formation ne peuvent identifier cette médecine à des images positives et valorisantes » (28).
C’est là qu’intervient le réseau : le médecin de premier recours a besoin de s'appuyer sur un réseau en addictologie pour être conseillé et donner rapidement la main pour les situations devenues trop difficiles à gérer au cabinet médical (28). L’addiction est une pathologie très complexe où il est indispensable de travailler ensemble. On comprend aisément qu’un médecin généraliste isolé dans son cabinet ne fasse pas le dépistage des addictions s’il n’est pas épaulé par un réseau. Prendre en charge tout seul certaines addictions aboutit à l'échec. Le maintien de réseaux addictions territoriaux et l’individualisation au sein des réseaux polyvalents est indispensable pour que les médecins généralistes aient des interlocuteurs de terrain et de proximité (26). Mais outre l’aide technique que peut apporter le réseau, le partage avec les addictologues d'un système de soins semble avoir un impact positif sur les représentations (30).
Ces pistes sont inscrites dans le Plan gouvernemental de lutte contre la drogue et les conduites addictives 2013-2017, élaboré par la MILDT (Mission Interministérielle de Lutte contre la Drogue et la Toxicomanie). Renforcer la formation initiale sur les conduites addictives et favoriser le partage des cultures professionnelles sont deux des grands axes de ce projet.
Actuellement 5,3 % des médecins généralistes appartiennent à un réseau d’addictologie (6).
La réunion au sein d'une même structure de professionnels d'horizons différents génère des confrontations d'expériences différentes. Lors de ces rencontres, tout comme les étudiants en médecine s’ils font un stage en CSAPA ou dans un réseau, les médecins généralistes vont être amenés à observer des pratiques nouvelles. Ceci pourrait conduire les médecins à modifier leurs représentations et leurs pratiques professionnelles dans le but d’améliorer la qualité des soins (21). Cette hypothèse a été peu étudiée et c’est ce que nous proposons de tenter ici dans cette étude pilote.
Le
Plan inscrit l’intervention brève et l’entretien motivationnel comme thématiques prioritaires
dans le développement professionnel continu des médecins généralistes afin qu’ils puissent
intervenir dans le cadre de leur consultation avant l’apparition de dommages sanitaires et
sociaux chez leur patient (27).
(28)IV) TERRAIN D’ETUDE, HYPOTHESE ET DEMARCHE METHODOLOGIQUE
A) Présentation du Rézo Addictions 41 et de la réunion de synthèse
1) Le Rézo Addictions 41
Le Rézo Addiction 41 existe depuis 2000 avec pour fondation une volonté des professionnels de santé tant publics que privés de répondre ensemble à la complexité médicale, psychologique et sociale engendrée par les conduites addictives. D’abord informel, le réseau s’est organisé pour devenir l’outil de coordination de soins et d’accès aux soins dans le département 41. La création en 2003 de l’association MG ADDOC a permis de regrouper les médecins généralistes du Loir-et-Cher autour de cette structure. Environ 70 % des médecins généralistes du département y ont adhéré ou travaillent avec le Rézo, ce qui est bien supérieur à la moyenne nationale évaluée à 5,3 % (6). Les médecins généralistes travaillent en réseau avec le soutien d’une équipe mobile d’infirmières et l’expertise d’un médecin addictologue.
Le Rézo se compose d’une médecin addictologue à mi-temps, de deux infirmières en addictologie à mi-temps qui se répartissent le territoire : une au nord du département et l’autre au sud. Ainsi les patients ont une infirmière référente unique. Le Rézo comprend également une secrétaire et un cadre administratif à mi-temps.
Les principaux objectifs du réseau sont de répondre aux difficultés des partenaires devant une situation d’addiction, répondre à la demande de formation des médecins généralistes et de tous les professionnels et/ou bénévoles des champs médico-psycho-sociaux, améliorer la coordination des soins des patients addicts présentant des situations complexes sur le département.
Pour faire partie du Rézo les médecins signent une charte et reçoivent alors régulièrement des informations sur le Rézo par le biais d’un courrier. Pour qu’un patient soit inclus dans le Rézo, il faut que son médecin généraliste, l’assistante sociale, un membre de sa famille ou lui- même fassent la demande. La demande est examinée par l’addictologue qui rappelle le demandeur de l’inclusion et le patient. Il demande au patient son accord pour contacter son médecin généraliste afin de recueillir les éléments et les comptes rendus pertinents pour son accompagnement.
Il valide l’inclusion si l’addiction a au moins des répercussions dans deux des champs
suivants : biomédicale, psychologique, sociale, judiciaire ; ce qui signifie qu’au moins deux