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Croissance des grains dans les métaux
Félix Robin
To cite this version:
Félix Robin. Croissance des grains dans les métaux. J. Phys. Theor. Appl., 1914, 4 (1), pp.37-57.
�10.1051/jphystap:01914004003701�. �jpa-00241905�
37 d’onde. Il est très peu marqué pour les séries principales et les
deuxièmes séries secondaires, très considérable au contraire pour les
premières séries secondaires. Il n’est pas le même pour les séries
correspondantes des divers éléments.
Les analogies avec le phénomène Zeeman se réduisent, comme
on le voit, au fait d’une séparation des raies en composantes pola-
risées et dont l’écart serait proportionnel au champ.
CROISSANCE DES GRAINS DANS LES MÉTAUX (1);
Par M. FÉLIX ROBIN.
Les recherches présentes sont la suite des expériences de Car-
taud (2) sur le passage de l’état liquide à l’état solide (~). La mort
ayant malheureusement interrompu les travaux de ce savant sur
cette question, plusieurs de ses expériences restèrent inachevées et
sans solution. Nous avons entrepris de reprendre ces problèmes, encouragé dans cette voie par le regretté F. Osmond.
Tandis que Cartaud portait ses observations sur des gouttes mé-
talliques liquides rapidement solidifiées dans leur chute sur une sur-
face plane horizontale ou inclinée, en vue de découvrir surtout le processus d’organisation du métal en voie de solidification, nous avons particulièrement cherché à observer au microscope les métaux
chauffés au voisinage de leur point de fusion.
Nous avons ainsi pu apercevoir les mouvements généraux de soli-
.dification superficielle et les mouvements de croissance et d’évolution des grains solides une fois la solidification terminée, ou bien encore
par recuit, à la suite d’un écrouissage.
Les observations ont été faites à chaud, suivant une méthode déjà indiquée (4)@ sur des surfaces polies ou sur les nappes liquides des
métaux peu oxydables qui se solidifient.
L’instrument employé est le microscope binoculaire stéréoscopique
,à grande distance frontale (5).
(1) Comrnunication faite à la Société française de Physique, : Séance du 5 dé- cembre 1913.
(2) Comptes Rendus, 1901, ~1903, 190!~.
(3) OSMOND, Revue de MétalluJ’gie, 1907.
,(4~ Bull. Soc. d’Encourage1nenl, ~9~.2.
(5) Appareil de la maison Nachet, de Paris.
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphystap:01914004003701
38
GRAINS DE CONSTITUTION DES MÉTAUX.
On sait que tout métal est constitué par une agglomération de- grains ou cristaux élémentaires qui n’ont pu se développer que jus- qu’à la rencontre de leurs voisins, et qui forment par conséquent des polyédres d’agglomérat£on sans relation avec leur structure cristal-
line.
On distingue souvent pour la cornmodité du.langage deux sortes
de grains : les gra£ns de solidification ou grains primaires et les
grains de recuit après écrouissage ou grains secondaires.
Les seconds sont, au début, petits, à contours quelquefois recti- lignes, souvent sinueux si le métal est trus cristaliin et s’ils se
forment à une température éloignée du point de fusion. Les premiers
’
sont le plus souvent limités par des contours sinueux dentelés et sont très étendus si la solidification est lente. On y trouve souvent des formations dentritiques qui font défaut dans les seconds.
Dans ce qui suit où il ne s’ag it que de métaux purs ou d’alliage
à très faible teneur en éléments étrangers, nous nous occuperons successivement de ces deux sortes de grains ainsi caractérisés. (En réalité, ces caractéristiques ne sont pas toujours aussi nettes qu’il
vient d’être dit : on peut produire par exception des grains
de ces classes qui ressemblentfortement à ceux de l’autre; certaines
solutions solides et bien des composés définis des alliages donnent toujours par solidification des grains qui ont toules les caractéris-
.
tiques des g rains secondaires; enfin ces derniers se produisent parfois sans qu’il y ait écronissage apparent par action de forces.
extérieures. )
SOLIDIFICATION.
-JOINTS DES GRAINS.
Un métal solidifié présente de grands grains allongés dans le sens.
de la progression de la solidification. A partir d’une paroi froide, le développement donne des figures d’agglomération prismatique dont
la plus parfaite est le prisme hexagonal (structure basaltique). Os-
.
mond et Werlh l’ont décrit dans l’acier, l’or et divers alliages (4).
’
La surface libre de presque tous les métaux solidifiés à l’ab’ri de
(1 j Théorie cellulaiJ’e. Contl’ibuLion à tétudedes alliages (Bull. Soc. d’Enc., 1901).
39
l’oxydation présente deux sortes de lig nes dessinées en creux : les
joints de grains et le réseau cellulaire étudié par Cartaud (’). Pour
la commodité des explications, nous les étudierons séparément, quoique leur formation soit presque simultanée.
Joints de grains. -D’après nos observations, les joints des grains
sont visibles très peu de temps après la solidification; ils paraissent provenir d’une retassure entre deux grains, produisant une petite gouttière qui s’accentue au refroidissement tant que le métal n’est pas relativement très dur. Lorsqu’on chauffe, c’est ce réseau de joints qui fond le premier, les grains semblent se regonfler et le liquide remplit la gouttière du joint jusqu’à faire parfois une légère
saillie.
Cartaud trouve, d’une part, l’analogie de certains réseaux cellu-
laires avec les figures de retrait des enduits séchés et, d’autre part, la coïncidence imparfaite, mais approchée des joints de grains et des joints de réseaux d’orientation différente. On pouvait alors prévoir
la possibilité d’une certaine relation entre les joints de grains et les figures de retrait ; c’est ce que nous avons cherchée à élucider. Ra- gner Arpi (2), tractionnant un fluide visqueux, a déjà trouvé une res-
semblance entre les figures formées et les densités des alliages r
nous avons reproduit encore ces figures par la simple dessiccation
sur papier de nappes d’eau poussiéreuses. Enfin nous sommes arri- vés, avec quelque patience, à produire des grains en apparence
exactwrnent dans les figures de retrait du lingot, sans aucune
formation dendritique.
L’aspect du métal est alorsidentique à celui des substances amorphe
,
dont l’agglomération des grains constitutifs devient visible par des- siccation ( fig. 1). L’expérience n’a réussi qu’avec des métaux indus- triellernent très purs, aluminium, plomb et étain. L’éprouvette est
un
bloc de métal coulé librement sur une surface plane, et refroidis-
sant sans vibrations ni chocs, ou bien encorel’extrémité d’une plaque
solidifiée après fusion partielle (tlg. 2). ,hussitôt la solidification ter-
minée, les joints en forme de craquelures deviennent très apparents., Les jonctions sont des recoupements à angles égaux, angles de 90°
(deux joints) ou de 120" (trois joints) (3). L’attaque chirnique fait
(1) C. n., 19ûi.
(2) Cité par PORTEVIN, Rev. de Alétallurgie, 1913, p. 695.
(3) Voir ti,,ures de colles desséchées : Os--goND, Rev. cte lJIétallul1gie, 190 î, p. 833, 29.
Il
40
voir que les grains sont bien exactement limités aux joints appa- rents. Une attaque très légère fait deviner en lumière un peu oblique
des lignes enchevêtrées curieuses, probablement des plissements
d’une pellicule superficielle (noires, rectilignes), des frissons li-
mitant des plages liquides plus ou moins oxydées (lignes sinueuses)
et des traces de pellicules d’oxydation déchirées avant solidification.
/ . 1 1
FIG. i. --- Grains solidifiés sui- FiG. 2.
-Solidification progres- vant des figures de retraits. sive de grains métalliques sui-
van des figures de retrait.
Il y a donc parfois accommodation entre les processus de formation amorphe et cristalline.
Le cristal n’apparaît-il qu’après solidification amorphe ou bien
est-il dans certains métaux à température élevée si peu cristallin
qu’il ait tendance à se limiter suivant des fig ures d’amorphisme ? Zieg.ler (1) a paru supposer, au moins pour la solution solide l’er
carbone, que l’état cristallin est précédé d’une solidification amorphe.
Mais l’austénite évolue à chaud suivant des formes tellement ana-
logues à celles des grains secondaires de tous les métaux qu’on ne peut vraiment en tirer d’argument en faveur de cette hypothèse.
L’attaque à chaud devrait pouvoir nous renseigner ; d’après nos essais, les grains, au moment de la solidification, se colorent tou- jours tous avec la même intensité, mais ce n’est pas un indice cer-
tain, car le réactif d’attaque (vapeurs acides) peut ne pas convenir pour déceler la structure à la température d’expérience. Nous res-
tons donc dans l’incertitude à cet égard : tout ce qu’on peut dire,
c’est que, micrographiquement, rien ne s’oppose à l’existence d’un passage de l’état à l’état cristallin, après solidification.
(1) Revve de ltfétalluJ’gie, 1911, p. fi57.
41
L’expérience nous indique encore que, pour obtenir cette cristal- lisation en figures amorphes, il est indispensable d’opérer avec des
métaux assez purs et de ne pas troubler la solidification. Dans un
moule quelconque, l’expérience n’a jamais réussi. Si l’on jette dans
le liquide des fragments de cristallites solides ou si l’on a introduit des éléments étrangers, la solidification s’opère par avancement de cristallites qui, au moins à la fin, se détachent en relief par suite du retrait du liquide restant (retassure). Certaines impuretés (telles Cu dans Sn) ne sont pas favorables au développement de grandes cris- tallites ; la surface de solidification forme une infinité de rugosités
très accentuées sans orientation apparente.
Lorsque nous plaçons un couple thermo-électrique suffisamment sensible dans le métal qui se solidifie, nous constatons la_ solidifica- tion progressive de tout métal impur, sans surfusion, et la solidifi- cation à température constante de tout métal pur. Dans ce dernier cas, il y a souvent surfusion. On peut se demander s’il n’y aurait
pas une surfusion cristalline d’un ordre semblable dans le métal pur lentement refroidi. Le metaZ se solidifierait aîï),orphe, puis cris-
tall£serait dans ses moules de retrrzit, chaque fraction séparée cristal-
lisant en bloc d’une rnê1ne orientation.
C’est cette dernière hypothèse qui nous semble la moins invrai- semblable.
Nous remarquons qu’en général, dans ce cas, il ne se produit pas de réseau cellulaire (réseau dont nous parlerons dans la suite).
Si, avant solidification complète, on retourne une éprouvette
d’étain pur, elle présente, au lieu des grands cristaux habituels, une
multitude de petits grains à noyau central, paraissant (au moyen (}’une attaque) être en train de s’agglomérer, donnant évidemment l’idée d’une solidification amorphe.
Le plomb, au contraire, donne presque toujours de grands cris-
tallites pyramidaux, sa germination cristalline paraît toujours très vigoureuse.
Il en est de même pour le bismuth, l’antimoine, contrairement au
fer, au nickel, à l’or, à l’aluminium . Les impuretés rendent souvent ces
derniers cristallitiques ; c’est ainsi, par exemple, que nous n’avons
jamais pu obtenir sans grands rameaux cristallins des surfaces so-
lidifiées des alliages d’aluminium additionné de 1 à 3 0/0 de nickel,
cuivre ou fer.
L’action des impuretés implique d’ailleurs une solidification pro-
42
gressive bien connue à partir des éléments purs sur lesquels viennent
se porter successivement des couches de plus en plus riches en impuretés, les impuretés non solubles étant d’autre part souvent placées dans les joints des grains.
Stab£l£té de la structure de solidification lente.
-Les figures de
solidification d’un métal pur paraissent extrêmement stables. Lorsque
le métal a été solidifié lentement à l’abri des influences mécaniques extérieures, les délimitations des grains ne changent plus avant fusion quel que soit le traitement thermique subi.
C’est du moins le résultat que nous donne l’expérience des mé-
taux peu résistants tels que l’étain, le plomb, dans un temps d’étude
limité à quelques heures. Deux ou trois heures à une température
voisine de la fusion n’ont produit aucune modification dans des lin-
gots peu épais solidifiés sans l’intermédiaire d’un moule. Si l’on provoque une légère fusion superficielle, le métal peut même couler
un pen à la surface; il reprend par solidification la structure qu’il
avait auparavant, la ligne de joint fondue est seule un peu modifiée.
Si l’on fond une rég ion entièrê située au milieu d’une éprouvette plate bien horizontale, la solidification reforme les grains devant la partie solide, les joints de grains reprennent presque leur position initiale ; ils sont toutefois modifiés dans le détail de leurs sinuo- sités.
Comme nous le verrons plus loin, les mâcles fines produites par l’écrouissage sont très rarement conservées s’il en reste une amorce
dans la partie solide.
Si l’on agite légèrement l’éprouvette au moment de la solidification
ou bien si la surface de solidification inclinée détermine une traction
sur la ligne de fusion, il se crée de nouveaux germes de grains sur
cette ligne et la nouvelle cristallisation est plus ou moins troublée
par l’introduction de ces nouveaux éléments.
Si, durant la solidification, on comprime le métal ou si de lui-
même il est le jouet de tensions internes ou superficielles, il arrive qu’un peu après la solidification des joints de grains se modifient et
se rectifient. Cartaud avait remarqué des joints géminés ou triplés
dans les métaux bruts de solidification assez brusque.
Nous les reproduisons facilement sur le dessous des éprouvettes solidifiées, sur
«le côté versé », où l’on suppose très logique qu’il
s’exerce des efforts de dislocation provenant d’adhérences partielles
suivies de dilatations ou de retraits inégaux. Le dernier des joints
43 obtenus est nettement définitif dans l’étain, il ne se modifie plus par
chauffage ultérieur de deux heures.
En conclusion de ce qui précède nous pensons que, seuls, des
efforts internes ou des tensions superficielles peuvent permettre la
modification des joints de grains de solidification lors d’un recuit ultérieur. Cette propriété que l’on remarque si souvent dans les
alliages de cuivre, tient vraisemblablement à l’action d’un certain
écrouissage produit dans les alliages durs par des retraits inégaux.
Quelquefois même ce sontdes grains secondaires qni prennent nais-
sance, indiquant par des mâcles leur origine écrouie.
RÉSEAU CELLULAIRE DE SOLIDIFICATION.
,Ce réseau a l’apparence d’un filet à mailles relativement régulières plus ou moins étiré dans certaines directions dépendant des grains.
Cartaud a reconnu ses principales propriétés : il al’apparence de lignes
de retrait ou figures de dessiccation, dessinées en creux a la surface
libre du métal (cellules hexagonales et quelquefois à 5, 4 ou 3 côtés) ;
il existe en profondeur comme les joints de grains, car on le retrouve
dans l’attaque des coupes; enfin il change d’orientation suivant les
grains, mais les limites de deux réseaux différemment orientés ne coïncident pas toujours avec les joints de grains.
Il remarque qu’on obtient ce réseau sur le rétain, le le cadinium, coulés sur verre et qu’au contraire la suri’ace du bismuth
paraîttoujours francliement cristalline. Dans les lames épaisses, elles s’organisent souvent en figures de cristallites à partir d’un centre,
ces dernières seraient peut-être constituées par la soudure des cel- lules. Cartaud remarque ensuite, dans une série d’études sur des
gouttes et des nappes rapidement solidifiées, des analogies avec les
const£tutions tourbillonna£res de Bénard (1), études continuées récem- ment par Dauzère (2) ; des amorces de cloisons donnent l’idée de phé-.
nomènes de scissiparité comme dans les tourbillons liquides. Dans le
,
zinc, il remarque l’existence de noyaux centraux prenant part aux évolutions des cellules (nous avons réussi à les reproduire dans l’étain). Puis il remarque successivement que la structure cellulaire est celle des corps amorphes, gélatine, acide borique, verre ; que
(1) Soc. de Phys., 1900 ; C. R., i9i2.
(2) f. de Phys., t. VI, p. 892; t. p. 930 ; C. R., 1912.
44
l’interdépendance des réseaux cristallin (joints de grains) et cellu-
laire n’est pas absolue, mais résulte d’une accommodation plus ou
moins parfaite, comme dans le cas de sels.
Il pense donc que le réseau cellulaire de solidification est formé de cellules de retrait. Les cellules tourbillonnaires seraient comme
les moules primitifs où viennent s’exercer les tensions de retrait.
Il voit dans les joints rectilignes (de grains) différant de la maille
primitive (du réseau cellulaire) la tendance des cristaux à s’affran- chir de leur moule cellulaire, tendance qui se manifesterait plus net-
tement encore dans les lingots déformés et recuits; les relations entre ces cristaux (secondaires) mâclés et à contours rectilignes et
leur moule d’origine se perd.
D’où Osmond conclut que dans les cellules tourbillons du liquide
s’isoleraient par refroidissement des filaments et des germes (métal- loblastes) anîorplîes constituant les noyaux des cellules, puis ces der-
niers se transformeraient en germes cristallins (cristalloblastes) susceptibles de polarisation. Ces cristalloblastes, seraient d’abord orientés en fonction de leurs axes par le mouvement tourbillonnaire et réagiraient les uns sur les autres de façon à faire des cristallites.
Le cristal se formerait par fusion des cristalloblastes et disparition
des cellules initiales.
Les corps étrangers favoriseraient la cristallisation en réduisant
ou supprimant les états précristallins.
D’après ses propres observations, Osmond constate l’absence de cellules dans le cuivre fondu refroidi dans le vide; en engageant à
continuer l’étude de ces particularités, il termine en disant qu’on peut invoquer pour la formation des .cellules le retrait des parties solidi-
fiées les dernières, l’accumulation des impuretés, notamment des gaz dans les régions de première et dernière consolidation, les difrérences de densité entre ces impuretés et la masse principale.
Observations personnelles.
-Xotre méthode consiste, comme on
l’a vu, à observer au microscope la solidification ei le recuit sur
éprouvettes polies.
,Dans le liquide nous n’avons jamais rien pu apercevoir, la
solidification proprement dite n’y montre pas de processus intéres- sant. Lorsqu’il ne se produit pas de cristallites, un frisson ou un
bourrelet infiniment léger passe sous les yeux au moment de la soli- dification ou de la fusion du métal pur, sans orientation ni mouvement t
spéciaux. Les joints de grains sont liquides longtemps avant la fusion
45
complète; au moment même de la solidification, on ne voit pas de
joints à moins d’être en présence d’une solidification par cristallites.
A part cela, tout se passe comme dans la fusion d’une cire. Nos expé-
riences ont doue moins bien permis que celles de Cartaud d’étudier le passage de l’état liquide au début de l’état solide. Par contre, il
nous a semblé plus facile d’observer ce qui se passe ensuite.
D’après nos observations, les manières de voir précédentes restent
exactes. La question de génération des cellules semble toutefois se
préciser dans un sens légèrement différent.
Sur une nappe de métal de préférence légèrement impur, nous
voyons la solidification commencer sur les bords, puis progresser
jusque vers le centre en montrant ou non des traces de dendrites en
saillie, et enfin produire une légère retassure où s’accentue la net- teté des derniers dendrites, si le métal en forme. Les joints de grains
sont très légèrement visibles, puis s’accentuent progressivement. Si
le métal est pur, n’a pas formé de dendrites et n’est pas comprimé,
le réseau ne se forme pas.
Dans le cas contraire, ccu moment précis où la retassure se
on voit le réseccu cellulaire des bords de celle-ci et envahir
brusquernent l’éprouvette.
La formation du réseau cellulaire peut donc être postérieure à l’ap- parition des joints des grains. Si la pièce est secouée ou comprimée,
le réseau peut se déceler en cours de solidification, mais il est très
peu visible. A la fin de la solidification, il prend très rapidement un
relief accentué. Un couple sensible placé dans l’éprouvette en solidi-
fication indique que la température est légèrement plus basse que la
normale, elle baisse volontiers encore un peu, puis se relève brus-’
quement au moment de la formation de la retassure et du réseau
(cessation d’un état de surfusion).
Le métal est dur et présente la fragilité intercristalline.
Pendant le refroidissement à l’état solide, on remarque encore
pendant longtemps une accentuation des reliefs, souvent accompa-
gnée de tintements vifs dans les alliag es d’étain, par exernple. Si les impuretés sont en quantité suffisante, il se produit des fissures dans
la retassure aussitôt la fin de la solidification. Les lèvres de ces fis-
sures s’ouvrent rapidement pendant la formation du réseau cellu-
laire, puis s’accroissent encore lentement au refroidissement.
Le réseau peut ne se produire que sur certains grains ; il n’en
dépasse pas en apparence les joints sans changer d’orientation.
46
Si l’éprouvette est grande, les parties éloignées de la retassure
semblent trop refroidies pour se modifier, et le réseau cellulaire
s’arrête en cllemin, les dernières mailles étant généralement les plus grosses(fig. 3).
Si, au moment de la solidification, on exerce une action rnécanique
sur un métal pur, qui ne donne pas d’ordinaire de réseau, si on com-
prime le moule, ou si seulement on donne un moule à certains mé- taux, les cristallites de la retassure se forment, et le réseau cellulaire
est visible, tout de suite très accentué. Une compression énergique
.déterminée en outre la fissuration intergranulaire.
FiG. 3.
-Réseau cellulaire FIG. 4.
-Réseau et joints de grains
abordant
unepartie solide formés
sur unelame partiellement (partie inférieure). fondue et solidifiée (la ligne fine et
dentelée représente, à la partie infé- rieure, la limite atteinte par la fusion).
Réseau au contact des grains seeonda£res. - Lorsqu’on fond par-
tiellement une éprouvette de métal écroui et recuit, c’est-à-dire for- mée de grains secondaires, la solidification se produit à partir du
bord solide au moyen de grains à développement basaltique amorcées
par les plus énergiques des grains secondaires solides; puis le ré-
seau cellulaire apparaît jusqu’au bord fondu, il s’arrête entre la ligne
de début de fusion (bourrelet visible) et la ligne de début des grains
nouveaux de solidification .
Les mailles grandissent et sont incomplètes en arrivant dans cette région transitoire. On remarque que parfois les dernières lignes du
réseau déforment à leur profit doe joints de grains secondaires qui
étaient droits auparavant (fla. 4). Dans les régions pâteuses existant
soit dans les alliages, soit dans les métaux purs dont la surface
47 libre semble encore solide, tandis que les régions sous-jacentes sont fondues, le réseau épouse les contours des grains, il se confond
avec le réseau des joints. Les joints se rectifient ou non par la suite,
d’où une coïncidence incomplète de ces lignes voisines. Les dendrites
assez volumineuses formées parfois au cours de la solidification, pré-
sentent de même des mailles de réseau incomplètes et très larges.
Les impuretés, l’introduction de cristallites solides, d’oxyde, de dé-
bris siliceux de fabrication augmentent nettement l’apparition de
tous ces phénomènes.
Conclusz’ons.
-Il semble donc, d’après ce qui précède, que l’hypo-
thèse du nETRA’ïï d’une retassure, sans exclure nécessairement toute influence des impuretés ou des gaz, se confirme par l’expérience.
L’action de différences de densité ne doit guère se manifester, étant
donnée la rapidité de formation du réseau et sa production possible
dans les métaux purs.
Le réseau cellulaire de Cartaud serait donc une figure de retrait provoquée par retassure, d’après les constatations suivantes :
1° Il se forme brusquement après la fin de la solidification et appa- raît en creux comme une retassure ;
2° Il augmente fortement au refroidissement, souvent accompagné
de tintements, jusqu’à une température très éloignée du point de
fusion ; -.
~3° Il représente bien les figures de retrait des matières amorphes;
4° Il n’apparaît pas sur le bismuth, qui n’a pas de retrait, et diffi-
cilement dans les métaux purs, qui ont peu de retrait ;
5° La compression le fait apparaître ou l’accentue s’il se produit déjà normalement.
La coulée sur verre (Cartaud) le favorise (inégalités de dilatation).
La formation du réseau serait due à une sorte de rupture d’équi-
libre possible, par suite du peu de cohésion à la température de soli-
dification. Un retrait homogène se produirait seul dans le cas où le réseau ne s’amorce pas.
-
1. Peut-être le réseau orienté par le retrait d’un
grain a-t-il tendance à dépasser sa limite, par entraînement méca-
nique ; mais il semble certain que la rectification des joints est sou-
vent postérieure à la présence du réseau, provoqué vraisemblable- ment par la déformation mécanique dont il est cause.
Il. Le réseau s’étire par laminage, comme l’a déjà remarqué Car-
taud, il peut apparaître à l’attaque sous forme de lignes sombres. On
48
le retrouve après recuit, il s’oxyde le premier par chauffage; mais
des recuits répétés le font disparaître. Les joints de grains de soli-
dification restentde même longtemps visibles après traitements mé-
caniques et thermiques. Les impuretés paraissent dans ce dernier
cas en aug menter peut-être la persistance.
GRAINS DE RECUIT APRÈS ECROUISSAGE.
Le laminage écrase les cristaux de solidification et détermine l’ap- parition de sur lequel on n’a encore que des notions vagues. Le métal devient dur et brisant, excepté le bismutl, qui de-
vient au contraire malléable. Le microscope ne révèle plus aucune figure nette. Des granules sont parfois visibles, donnant l’idée d’une
’
décristallisation partielle on complète.
Le recuit fait naître des cristaux qui se limitent suivant des grains
nets à joints bien déterminés formant des polygones plus ou moins irréguliers de 3 à 7 côtés en général. Les grains développés sont
d’autant plus réguliers que la température est plus voisine du point
de fusion; leur forme la plus parfaite est le dodécaèdre pentagonal.
Appar£tion des joinls de grains.
-Si l’on chauffe progressive-
ment un métal poli, en particulier constitué par des grains de recuit,
on voit, à partir d’une certaine température, apparaître des frag-
ments de joints de grains, puis ceux-ci tout entiers très nets(1).
Cette température du début du phénomène est d’environ : 60° pour
l’étain, 7ÕO pour le bismuth, 80° pour le zinc, 200-250° pour l’or,
260° pour l’antimoine, 380’ pour le fer, vers 500° pour le nickel,
enfin entre 250 et 500° pour les alliages de cuivre, entre 380° et 500°
pour les alliages de fer.
Ce phénomène parait dû à l’inégale dilatation des grains cris-
tallins voisins d’orientation cristalline différente, surpassant à par- tir d’une certaine température la résistance de cohésion de ces
grains. L’apparition des joints ne coïncide pas avec le début du re-
cuit, et par conséquent avec le début du mouvement des grains, elle
se produit à une température supérieure (’).
Si l’on recuit une tôle d’étain pur laminée polie, formée de très petits grains (par recuit spontané à la température ambiante),
ceux-ci g rossissent d’abord et n’apparaissent qu’une fois grands.
(1) Bulletin de la Société août 1912
,49 La température ou le temps de chauffage croissant, les grains se développent, les joints se modifient, on les voit se déplacer lentement.
Si l’on refroidit, ces joints restent fixés. Au réchauffage, les joints
actuels apparaissent. Sur une même surface polie, des alternatives de
chauffage et de refroidissement arrivent à produire toute une série
de lig nes de ,joints qui nous indiquent la marche et la croissance de ces
grains. Malheureusement, avec le temps de chauffage et la tempé-
rature, les joints les plus anciens s’estompent peu à peu et dispa-
raissent.
Au voisinage de la fusion, les grains se disjoignent en s’accusant
avec une netteté remarquable, pendant que les joints anciens s’ef-
facent complètement. Les mouvements s’observent facilernent au
microscope.
Enfin une attaque légère différencie les grains par des teintes variables et grave nettement leurs joints.
D’après ce qui précède, en procédant par chauffages répétés et en faisant de temps à autres des attaques, nous arrivons
à enregistrer le mouvement des grains, ou au moins quelque chose qui s’y rapporte. Les grains polyédriques ne sont en effet décelés que par leur trace polygonale sur le plan de la coupe polie.
Les chauffages et attaques répétées pour les mouvements à basse
température, l’observation directe au microscope pour les mouve- rnents à température voisine de la fusion, nous conduisent aux
remarques suivantes :
Resultats d’observation.
-1. Températures élevées.
--Au voisi-
nage de la fusion, les joints de grains secondaires sont très réguliers,
Fie. 5.
-Grains de recuit développés
à
unetempérature voisine de la fusion.
d’une courbure uniforme ou parfois rectilignes. Les surfaces polygo-
nales tendent à s’égaliser ainsi que les angles adjacents aux sommets
du réseau des joints. Les polygones à trois côtés sont fortement cur-
J. de Phys., 5e t. IV. (Janvier 1914.) 4
50
vilignes et convexes; ceux à quatre côtés le sont faiblement (pg. 5)«
Les figures 6 et 7 montrent l’apparition des nouveaux grains.
FIG. 6.
-Développement d’un grain FIG. 7.
-Développement d’un grain
à
unsommet ternaire. à
unsommet quaternaire.
L’aspect général est une figure d’agglomération rappelant celui
des matières amorphes. On a l’apparence exacte d’une mousse; si
on écrase par un verre, par exemple, l’agglomération de bulles de
savon qu’on a produite dans un récipient, et qu’on insuffle de l’air à
sa partie inférieure, on obtient une figure identique à celle des grains
secondaires au voisinage de la fusion; les joints cheminent comme
ceux des grains. Les différences constatées sont les suivantes : la matière métallique diffuse d’un grain à l’autre, le joint des grains ne paraît pas être une membrane étanche, de sorte qu’un grain grossit
aux dépens des voisins sans que ceux-ci paraissent, comme dans les
mousses, chassés par simple déplacement (ce ne sont pas nécessaire-
ment les plus gros qui absorbent leurs voisins).
ljorsque deux grains s’unissent dans les mousses, la membrane
qui les sépare éclate et la jonction se fait violemment avec formation d’un nouveau polygone. Dans le métal, on ne constate pas de rupture de joints ; les grains absorbés paraissent subir pour ainsi dire une sorte de dégonflement sur place.
L’apparition sur la surface observée d’un grain nouveau est très
curieuse. Elle se produit toujours à un sommet du réseau au point
où un angle de polyèdre vient toucher la surface observée, le poly-
gone croît plus vite le long des joints qu’il rencontre, de façon à for-
mer sur la surface une figure d’autant de sommets que de joints
attenant au sommet précédent.
Dans une mousse, par suite des effets de tension superficielle, le polygone nouveau se développe très brusquement.
Dans le métal, il apparaît ou disparaît sans que les grains voisins
51 soient rcpoussés ; ce mouvement est aussi très rapide relativement
aux mouvements voisins, ce qui paraît indiquer, comme dans les
mousses, l’influence importante de la tension superficielle.
II. Loin d?,c ,joint de fusion, les grains évoluent d’une façon ana- logue, mais bien moins rég ulière ; les forces cristallines se manifestent nettement.
Les grains ont une autre façon de progresser qui ne se met pas facilement en évidence à température élevée : c’est de se joindre deux
à deux (ce qui a déjà été supposé par Osmond autrefois).
Leur orientation cristalline se rapproche peu à peu, ce qu’on
observe par la diminution de différence de teinte à l’attaque, puis ils
sont définitivement joints et croissent de concert. Leur joint reste tou-
tefois visible, il ne disparaît qu’après un temps assez long. On trouve
ainsi quelquefois, dans un métal longtemps recuit, un ensemble de
plusieurs grains se comportant à l’attaque normale comme un seul
tandis qu’une attaque spécialement faible ne fait apparaître que les
joints de leurs composants.
L’attaque à chaud ne permet guère de voir nettement si le phéno-
mène se produit à température voisine de la fusion. Toutefois l’en- semble de deux grains progressant côte à côte semble indiquer qu’ils sont joints, cela prouverait peut-être aussi qu’ils sont encore orientés cristallographiquement.
A la température de début de recuit, la croissance des grains est
très lente; mais, tandis qu’aux températures supérieures les grains
cherchent à grandir tous à la fois et se trouvent limités par leurs
voisins, certains grains ne paraissent pas se développer et se laissent envahir; seuls les grains les plus
«énergiques » se développent.
Il en résulte deux maxima de grosseur des grains dans l’échelle
des recuits : au voisinage de la fusion et au début exact du recuit rapide ; les expériences sur ce point sont délicates, elles réussissent bien avec le fer, l’étain et ses alliages, le zinc, l’aluminium (4).
,
ÉCROUISSAGE LOCAIL
Si l’écrouissage a été produit locale1nent au sein d’un métal recuit,
les grains croissent par recuit ultérieur à partir de la région défor-
Inée. Dans celle-ci, ils paraissent se limiter les uns par les autres et
(1) Revue de Alétailiiî-,qie, juin 1913.
52
n’atteignent pas de grande dimensions. Au contraire ils s’étendent
vers les régions recuiles qu’ils enyahissent progressivement (1).
Ilumphrey (2) trouva que la recristallisation s’étend aux régions
moins déformées; Cartaud, Ewing et Itosenhain, Sauveur, semblent
le penser également; mais il ne paraît pas ressortir de leurs expé-
riences qu’elle atteigne les régions franchement recuites. Ce n’est
qu’après les expériences de Collen et Hasslinger (3) qu’on peut avoir
l’idée de ce genre de contagion.
On ne peut dire que la grosseur d es grains formés croît en sens
inverse de la pression snpportée, car les expériences de Sauveur (4)
ont montré le contraire et les nôtres prouvent la discontinuité du
phénomène.
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