EFFICACITÉ DE QUELQUES
PROTIDES ALIMENTAIRES CHEZ LE PORC
V. - INFLUENCE DU TRAITEMENT TECHNOLOGIQUE
SUR LA VALEUR DES PROTÉINES DU TOURTEAU DE SOJA.
VALIDITÉ DE QUELQUES TESTS BIOCHIMIQUES POUR L’APPRÉCIATION
DE LA
QUALITÉ
DES TOURTEAUXJ.
DELORT-LAVALJ.
BOZA LOPEZAvec la collaboration technique de Michèle FISZLEWICZ, Arlette L!ss:vJoux et A. RotsT.an Laboratoire de Recherches sur la Con.servation et
/’7i’!<’af!<<’’
des !/:?f:!nh,1
6, rue Claude-BeynaYd, Paris 5e
SOMMAIRE
La
qualité
du tourteau desoja
est améliorée par le traitementthermique qui
détruit les fac- teurs antinutritionnels contenus dans lagraine
crue. Mais des températures excessivesrisquent
d’entraîner la dénaturation des
protéines
et la diminution de leur efficacitébiologique.
La présente étude concerne six tourteaux industriels traités différemment, par
pression
ou parextraction, et ayant subi des durées et des températures de cuisson différentes. Ces
produits
ont ététestés
parallèlement
sur le porc(valeur biologique
par latechnique
de TIIm!AS-MITCHELL) et 1» vitro,par divers tests
biochimiques (activité uréasique,
test de FRÔUCH, solubilité dans l’eau, solubilitéspepsique
ettrypsique).
L’étude des bilans
complets
d’azote montre que les différences entre tourteaux portent surtoutsur l’utilisation
digestive
apparente et réelle(C U D R)
et non sur la valeurbiologique (V B)
Il existe toutefois une relation nette entre l’intensité du traitement
thermique
et l’utilisation pro’-tidique
nette(V
B X C U D R) des tourteaux.Parmi les tests
biochimiques
pour l’estimation dudegré
de cuisson et donc de l’efficacité azotée des tourteaux, la mesure de l’activitéuréasique
ou de la solubilité en milieu tamponproche
de laneutralité permettent une
première séparation
des tourteaux crus et cuits. Mais laprécision
obtenuepar
application
du test de FxeiLictt ou de la solubilitétrypsique corrigée,
mise aupoint
dans cette étude, est biensupérieure :
les résultats obtenus par ces deux tests sont en accord avec ladigestibilité
vraie mesurée sur le porc et, dans la mesure où peut être
précisé
le traitementthermique,
avec l’in-tensité de ce dernier.
INTRODUCTION
En raison de sa richesse en
protéines
et surtout en acides aminésindispensables,
le tourteau de
soja
est un aliment degrande
valeur pour les animaux de ferme.Vlais la
qualité
desproduits
du commerce est, pour denombreuses raisons,
très variable.La
graine
desoja
contient en effet nombre de substances inhibitrices de la croissance des animaux(I IENER , 195 8) :
ce sont notamment, outre unelipoxydase
et un facteur
qui
provoquel’hypertrophie
de lathyroïde,
unehémagglutinine qui
serait pour une bonne
part responsable
du retard de croissance de rats consommant dusoja
cru(Li!rr!x, 1953 )
et surtout un facteurantitrypsique (H AM
etS ANDS TE DT , 1944
), globuline
isolée(Kü NIT z, 194 6)
etcaractérisée, qui s’oppose
à l’action de latrypsine,
en limitant le taux et la vitesse de libération d’acides aminés essentiels desprotéines
alimentaires(A LMQUI ST
etM!RxrTT,
1951,i953).
La consommation de tourteau cru,qui
provoque une inhibition de la croissance et une réduction de l’effica- cité alimentaire durégime (OsBOR:!E
et MFNDEI,,1917 ), s’accompagne
d’unehyper trophie
dupancréas
chez lepoulet (C HERNICK
etal, 194 8)
et chez le rat(BooTH
etal, 19 6 0 )
et d’une sécrétion accrued’enzymes pancréatiques (L YMAN
et LEPKOWSKY,1957
).
BIRK et G!xT!,Ex( 19 6 1 )
considèrent que les facteursantitrypsiques jouent
un rôle très
important,
car :(i)
la valeur du tourteau desoja
cru n’est que faiblement améliorée par l’extraction del’hémagglutinine, qui
est, parailleurs,
détruite en milieupepsine-HCl
àpH
z,5 ;( 2 )
la fraction résiduelle des facteursantitrypsiques
nonextraite du tourteau par les
techniques adoptées,
résiste à l’action de lapepsine
et
pourrait
exercer, au niveauduodénal,
une actionantiprotéolytique.
L’effet dépressif
du tourteau cru sur la croissancepeut
êtrepartiellement compensé par l’addition d’antibiotiques (B ORCH E R S
et WEAV!R,195 5)
ou d’unmélange
de
plusieurs
acides aminés essentiels(F ISHER
etJ OHNSON , 195 8).
Un tel effet desupplémentation peut
êtrerelié,
aux observations de RWS!u et al(r94!), qui
cons-tatent la faible
hydrolyse
desprotéines
du tourteau desoja
cru par latrypsine
invitro.
Les substances antinutritionnelles
présentes
dans lagraine
et le tourteau cruétant
thermolabiles,
un traitementthermique adéquat permet
d’améliorer laqualité
du
produit.
Les conditions dedurée,
detempérature
et d’humidité subies par lagraine
au cours du traitementtechnologique
déterminent ledegré
d’amélioration du tourteau et influent considérablement sur l’efficacité azotée durégime
et lavitesse de croissance du Rat
(H !ywnRD
etal, 193 6),
dupoulet (WILGUSet N ORRIS , 193 6)
et du Porc
(BEC K E R
etal, i 953 ).
Mais destempératures excessives, plus
encore que delongues
durées dechauffage (ZrMMERM:w:v, 1952 ), risquent d’entraînerledévelop- pement
deréactions,
entre certains acides aminés et d’autressubstances,
donnant naissance à descomplexes
stables et résistant à l’actionenzymatique.
Ilpeut
enrésulter une diminution du taux de
disponibilité biologique
d’acides aminés aussiimportants
que lalysine
ou lacystine
et un amoindrissement corrélatif de la valeur duproduit
final. Il est donc clair que laqualité
d’un tourteau desoja
est aupremier
chef tributaire de la conduite du traitement
thermique qui
accompagne ladélipida- tion ;
un tel traitement n’est correct que dans la mesure où ilpermet
l’inactivation desanti-enzymes
sans dénaturation desprotéines
elles-mêmes.L’estimation
dudegré
de cuisson des tourteaux desoja
par desépreuves
invitro a fait
l’objet
de nombreux travaux(cf.
revue LIENER,195 8).
Cestechniques présentent
un intérêt dans la mesure où leurs résultats sont en accord avec laréponse
de l’animal. C’est
pourquoi
nous avons tenté dans laprésente
étude de mettre aupoint
des testsbiochimiques simples,
pourl’appréciation
de l’intensité du traitementthermique
des tourteaux, et de comparer les données ainsi obtenues à des mesuresd’efficacité
azotée,
effectuées sur porc selon latechnique
de THOMAS-1!IITCI-IELI,.MATÉRIELS
ETTECHNIQUES
Caractéristiques
des tourteaux desoja
Six échantillons
(A,
B, C, D, E,F)
issus d’un même lot degraines
ont étéfabriqués
parpression,
par extraction ou par une combinaison de ces deux
techniques,
selon le schéma décrit dans le tableau i.Pour les
cinq premiers
tourteaux, lesgraines, après
unbroyage grossier,
ont subi deux chauffa- ges successifs(tabl. i), puis
ontpassé
dans une presse Anderson à rotation soitrapide (tour-
teaux A et
C),
soit lente(tourteaux
B et D). Leproduit
E a été soumisaprès
un traitementanalogue
à celui du tourteau C, à une extraction
complémentaire
par l’ « essence B » pour abaisser de 6. p 100 à moins de i p. 100le taux degraisses
résiduelles.Le tourteau F,
après
mise de lagraine
en flocons, a étélégèrement
chauffé avant extraction de l’huile :l’évaporation
de l’essence a eu lieu enatmosphère
sèche à unetempérature
inférieure à 1000C, sans cuisson humide
complémentaire.
Au
point
de vue de l’intensité du traitementthermique,
les six échantillons peuvent êtrerépartis
en trois groupes distincts comprenantrespectivement
lesproduits
A, B — C. D, E, - F.Les tourteaux les
plus
chauffés sont ceux dupremier
groupe (A et B). Le tourteau E,qui
a subi uneextraction par solvants et par
pression,
se classelogiquement
entre les groupes AB et CD, mais ilest très
proche
de ces derniers en raison de la faibleapplication
de chaleurqui
accompagne l’élimi- nation du solvant résiduel. Le tourteau de diffusion F est le moins cuit. Dans la mesure où l’effet du type de presse estnégligeable
par rapport à celui destempératures
dechauffage,
les trois groupes deproduits
définis ci-dessus peuvent être considérés commehomogènes
et différant nettement les unsdes autres.
La
composition
des tourteaux estindiquée
dans le tableau 2.Pour les études in vitro, nous avons utilisé en outre un tourteau industriel G
qui
neprovient
pas du même lot de
graines ;
il a subi une cuissoncomplémentaire postérieurement
à l’extraction auxsolvants et ne
présente plus
d’activitéuréasique.
Mesure de la valeur
biologique
des tourteaux desoja
chez le PorcLa
majorité
des travaux conduits surpoulet (E VANS
et McGINrrIS,194 6)
et sur rat(JA C -
QUOT et al, 1947 ; LIENER,
195 8)
montrent l’influence dudegré
de cuisson sur l’utilisation in vivo desprotides
dusoja.
Peu de données existent sur le porc,cependant
gros consommateur de tourteau desoja.
Il nous a paru intéressant, pour étudier cette influence dans cetteespèce,
de choisircomme test d’efficacité
protéique
la mesure de la valeurbiologique
par la méthode de THOntns-MiT-CHELL (MITCHELL
19 23).
L’essai porte sur six porcs mâles castrés
(R.
U ; S. V ; T. W) de raceLarge
White,qui provien-
nent de trois
portées
différentes. Au début del’expérience,
lespoids
de ces animaux varient entre 22,
3et 26,1
kg
et leurâge
moyen est de m6jours.
Le tourteau de
soja,
seule source deprotéines,
est distribué de façon à fournir, dans lerégime,
un taux de 100g de matières azotées digestibles par unité fourragère et
complète
l’aliment ternaire à 8 p. 100depoudre
depapier-filtre,
dont lacomposition
est décrite dans un mémoire antérieur(ZELTER
et CHARLET-LÉRY, 1961). La ration estrépartie
en deux repas. La matière sèche distribuée est calculée sur la base de 4 p. 100dupoids
vif ; elle estajustée régulièrement
en fonction dupoids
et de
l’appétit
des animaux, auplus
tard troisjours
avant le début de la mesure de bilan. Les refus sont pesésaprès chaque
repas.Les animaux sont
placés
en cages à métabolisme individuelles. Lestechniques
de collecte des excreta et les méthodesd’analyses
des échantillons de fécès frais et d’urine ont été décrites dans unmémoire antérieur
(ZELTER
et CHARLET-LÉRY, i96r).Le schéma
expérimental adopté
a été établi de manière à éliminer l’effetpériode (tabl.
3).Il comporte
cinq périodes
de bilans d’azote de huitjours (réparties
en 2sous-périodes
de mêmedurée) précédées
chacune d’un tempsd’adaptation
au moinségal.
Unepériode
dedéplétion
azotéeplacée
au milieu du
dispositif expérimental (tabl. 3 )
sert à l’estimation desdépenses endogènes.
Elleest suivie de vingt
jours
d’alimentation azotée avant le début de lapériode
suivante.Le calcul de la valeur
biologique
s’effectue selon la méthode décrite dans un mémoire antérieur(D ELORT
-LAVAL
et ZELTER, 1963).Tests
biochimiques d’ap!réciation
dudegré de
cuisson des tourteaux desoja
C’est
principalement
à la détermination de l’activité résiduelle des substances antinutrition- nelles et surtout des enzymes thermolabiles présentes àl’origine
dans lagraine
crue que l’on a cherché à relier ledegré
de cuisson des tourteaux desoja.
Les travaux sur l’inactivation des enzymes par la chaleur concernent notamment
l’amylase (DAN
GO t’
M
AU
et al, 1951), lalipoxydase (SuMNEtt
et ’I’ttESSt,Ex, r943) et surtoutl’uréase(CASKEY
et KNnPt!, 1044) dont la teneur dans la
graine
atteint 0,012 p. 100(SUMNFx
etSoMEtts,
194i).La mesure de l’activité
uréasique
résiduelle permet de reconnaître un tourteau insuffisamment cuit.Mais au-delà du seuil de l’inactivation totale des enzymes, il
risque
de seproduire
sous l’action du traitementthermique,
une dénaturation des protéines. Selon certains auteurs, l’effet de surcuissonpourrait
être mis en évidence par d’autrestechniques analytiques :
formol-titration(AL!IQUtsT
et MAURER, r9;3) et surtout fixation d’un colorant ; si la méthode à
l’orange
G se révèle infructueuse dans le cas dusoja
comme le montre un examen attentif des résultats de !IORAN et al.( 19 6 3 ),
letest de fixation du rouge de crésol par le tourteau semble lié à l’intensité du traitement
thermique (FRÔLIC
l
I, 1954 ).
D’autre part, la modification despropriétés physiques
des protéines sous l’influence de la chaleur se marque par un abaissement de leur solubilité en phase aqueuse(B ELTER
et SMITH, 1952). Mais cette solubilité, faible pour un
produit
de bonnequalité,
n’est que peu modifiée par unsurchauffage (Bnt,I,ouN et al, z953). D’autres méthodes de fractionnement des
protéines
par solubi- lisatinn dans divers solvants ont étéproposées
par LUNn et SnNDSTtt6n(t 943 ),
DANGOUMAU etD
EBRUYNE
(195!),
et Arrwnx( 19 6 2 ).
La mesure de solubilité en présence de
trypsine
sembleplus spécifique
en raison de l’existence du facteurantitrypsique
et de l’actionpossible
de la chaleur sur la sensibilité desprotides
du sojaà l’attaque des enzymes
protéolytiques.
RtESEN et al.( 1947 )
obtiennent,après cinq jours
dediges-
tion
pancréatique,
une libérationplus
faible d’acides aminés d’unproduit
cru ou surcuit que d’un tourteau convenablement chauffé. Il faut cependant noter que CI,,INDININ et lloia BLEE(i 95 z)
mettenten doute la valeur de ce test, l’amélioration de la
qualité
des tourteaux traités par la chaleur dans les conditions dn laboratoire necorrespondant
pastoujours
v des taux maximum de libération d’azote aminé. Toutefois, comme le seuilthermique
de destruction du facteurantitrypsique
sembleplus
élevé que celui de l’uréase
(I3oacnExs
et al., 1947), nous avonspensé
que l’élaboration d’un test d’activitéantitrypsique
suffisamment sensiblepermettrait
une meilleureappréciation
de l’intensité de la cuisson que les épreuves actuellementpréconisées.
Les différents tests
biochimiques
étudiéscomparativement
sontexposés ci-après :
-
a)
l’activitéuréasique
est mesurée par la méthode de SCHttnMM et AtNES( 1959 )
modifiéepar DELORT-LAVALet ZELTER (1960).
-
b)
laquantité
de rouge de crésol fixée par le tourteau est déterminée dans les conditions de durée et depH
définies par FRijLICH(x 954 ) ;
J- c) les solubilités azotées sont déterminées en l’absence et en présence
d’enzymes
sur i g de tourteau mis ensuspension
dans environ 100ml d’eau distillée, à 40° C et sansagitation.
Dans tousles cas, l’azote initial et l’azote résiduel, sont dosés,
après
filtration sur entonnoir BUCnNEx, par lamicrotechnique
de K1ELDAHL. Les conditionsexpérimentales adoptées
sont les suivantes :- la solubilité en milieu
pepsine-IICI
se déroule durant 48 heures àplI
2,0 enprésence
de50 mg de pepsine
(pouvoir
200) ;- la solubilité dans l’eau est mesurée en présence de o,5g de
phosphate monopotassique,
lasolution étant
ajustée
àpH
!,5 :- 0,1 par addition de soude normale et incubée durant huit heures:l’adoption
d’un pli fixe nous a parus’imposer
à la suite d’une série d’essais sur le taux de solubilité et sur la reproductibilité de la mesure(fig.
i).- le test de solubilité
trypsique
s’effectue dans les mêmes conditions quel’épreuve
de solubi- lité dans l’eau enprésence
de 5 mg detrypsine (8 00 o
U. S. T. CttonY,Paris).
Un essaipréalable
amontré que la zone d’action
optimum
de latrypsine
dans nos conditionsexpérimentales
était com-prise
entrepH
et 8.(fig.
2) ;- outre la solubilité azotée globale, l’azote x-aminé formé au cours de
l’hydrolyse trypsique
est dosé par la méthode de MICHEL (1961). Le taux d’azote a-aminé libéré sous l’action de cet enzyme est obtenu par différence entre les taux mesurés en
présence
et en absence detrypsine.
RÉSULTATS
Bilans azotés in vivo
Les résultats moyens pour
chaque période
etchaque
animal sontgroupés
dansle tableau 4.
Durant tout
l’essai,
la croissance des animauxpeut
être considérée comme nor-male. Le traitement
thermique
des tourteaux n’a pas d’effet sur l’utilisationdiges-
tive de la matière sèche des
régimes.
L’examen du tableau 5
permet
de constater des différences entre les coefficients d’utilisationdigestive apparente
et réelle de l’azote des 6 tourteaux. Par contre, les valeursbiologiques
de cesproduits
ne diffèrent pour ainsi dire pas. L’utilisationprotidique
nette(UPN)
de l’azote varie !en fonction’ du traitementthermique,
mais les écarts observés sont dus aux
variations,
non de la valeurbiologique,
maisde la
digestibilité
réelle(CUDR).
I,’étudestatistique
de ces différences(tabl. 6)
montre l’influence
significative
du mode d’extraction deslipides
sur le CUDRet l’UPN et celle
de
latempérature
’duchauffage précédent
le passage à la pressesur la
digestibilité
desprotéines
des tourteaux desoja.
Tests
biochimiques
Il existe
(fig. i)
une corrélation très élevée entre le taux de solubilité azotéeglobale
et lepH
du milieu solvant(r
= 0,971 ± 0,015 pour F et r = 0,950 ± 0,027 pourG.)
lareproductibilité
et laprécision
de cette mesureimpliquent
donc néces-sairement le maintien d’un
pH
constant. Cela confirme les résultats de SMITH(ig 5 s) qui
montrent la très forte influence dupH
sur la solubilitéazotée, lorsque
celui-ciest inférieur
à 7.
Les tests de solubilité azotée
globale
et de libération d’azote «-aminé sousl’action de la
trypsine, appliqués
à deux tourteaux cru(F)
et cuit(G) permettent
dedistinguer
les deuxproduits (fig.
i eta).
Les données concernant les six tourteaux
expérimentaux (A
àF)
sont réuniesdans la
figure
3. Elles montrent que :- les solubilités dans l’eau varient en fonction inverse de l’intensité du trai-
tement
thermique
et constituent unpremier
testparallèle
à celui de l’activité uréa-sique (fig.
3 a et 3e).
Il fautcependant
remarquer que l’activitéuréasique
et lasolubilité azotée du tourteau E sont inférieures à celles du tourteau
C,
alors que les traitementsthermiques
subis par ces deuxproduits
sont peudifférents ;
- le test de solubilité
trypsique
n’est pas assez sensible pourpermettre
unediscrimination nette entre échantillons
(fig.
3c) ;
par contre, le taux de « solubilitétrypsique corrigée
» calculé par différence entre les taux de solubilité azotéeglobale
en
présence
et en absence detrypsine permet
un classement satisfaisant des tourteaux en fonction de l’intensité du traitementthermique (fig.
3d). Remarquons
toutefois que nos données ne
représentent
pas des valeurs absolues car ellespeuvent
varier
largement
en fonction de l’activité de lapréparation enzymatique
et durapport enzyme-substrat.
Dans la
présente expérience,
le testpepsine-HCl
nepermet
pas nonplus
unediscrimination entre les 6 échantillons en cause
(fig. 3 J).
Le test de FROLICHau rouge de crésol offre par contre une bonne corrélation avec ledegré
de cuisson des tour- teaux(fig. 3 ,;).
Le taux de libération d’azote x-aminé
paraît,
à cetégard,
un test d’autantmoins intéressant que la
précision
dudosage
estfaible,
en raison desquantités
limi-tées de cette forme d’azote libérées au cours de
l’hydrolyse enzymatique.
DISCUSSION
Les
températures
dechauffage
de nos tourteaux ont été mesurées par desappareils
de contrôle industriel. La
précision
de ces données n’est pas trèsélevée,
mais corres-pond
aux conditions de lapratique.
L’origine
et les conditions de conservation des six tourteaux sontidentiques
et les résultats obtenus reflètent donc bien l’influence de la
technologie.
Ces six pro- duits nereprésentent
toutefoisqu’un
éventail de traitement assez restreint : le tour- teau « cru a F a été chauffé lors du conditionnement de lagraine (tabl. i)
et pourl’évaporation
du solvantrésiduel, après
extraction del’huile ;
d’autrepart,
les tour-teaux « cuits » A et B
possèdent
encore unelégère
activitéuréasique.
Nos essais nepeuvent
donc pastoujours
se comparer aux étudesportant
soit sur desgraines
crues,soit sur des
produits
très cuits.Les travaux que nous avons menés
parallèlement
nouspermettent,
àpartir
des bilans effectués sur porcs en
croissance,
de comparer les divers coefficients d’uti-lisation
azotée àplusieurs
testsbiochimiques
d’estimation dudegré
de cuisson.Bilans azotés in vivo
Les données in vivo relatives aux tourteaux les
plus
cuits(A
etB)
sont en bonaccord avec celles de la
littérature ;
le coefficient d’utilisationdigestive
réelle(CUDR)
et la valeur
biologique (VB)
du tourteau sontrespectivement
chez le rat :8g,6
et 71,3(HENRY
etal, rg6r) et chez le
porc,88, 7
et 73,3(C OI ,UMBUS, ig5o),
93,5 et76 (ARMS-
T
RONGet 31ITCHEI,1,,
ig55)
tandis que nos valeurs sont de 91,2 et6 9 ,8.
Par contre, lavaleur
biologique
mesurée par N!HRmG et LAUBE( I9 6 I )
chez ce dernier animal est nettementplus
faible(6 0 , 0 ).
La
digestibilité apparente
et réelle de l’azote de notre tourteau « cru » estsigni-
ficativement
plus
basse que celle de nos tourteaux lesplus cuits,
cequi
recoupe les résultats recueillis sur lepoulet (I:vArs
et1BIcGIN,’!IS, 194 6)
et sur le rat,(G EBHART
et COI,UMBUS,
r 957 ).
Cet effetpourrait
êtrerapporté
à un retard(CARROLL et al, 1953 )
ou à un
blocage (A LUMOT
et NzTSn:v,19 6 1 )
de laprotéolyse intestinale,
par formation decomplexes
insolubles entre latrypsine
et son inhibiteur(LE PKOWSKY
etal, i959)!
Il
pourrait
être aussi être relié à une sécrétion accrued’enzymes pancréatiques (LYMAN
et LEPKOWSKY,1957 )
conduisant à un accroissement de ladépense
métabo-lique
fécale et à des besoins accrus en certains acides aminés nécessaires à cette secrétion(HAINES
et LYMAN,19 6 1 ).
Il s’ensuivrait une modification dupool métabolique
entraînant une excrétionplus
élevée d’azote etdonc,
dans certainscas, une diminution de la
rétention, phénomène
que nous n’observons pas cheznos porcs.
Malgré
la différence des conditionstechnologiques
subies par les tourteaux, leurs valeursbiologiques
restent trèsproches
les unes des autres. Ce résultats’oppose
à ceux que citentJACQUOT
et al(r94!)
et LIENER( 195 8)
chez le rat,pour
lequel
l’intensité du traitementthermique
entraîne des modifications de la valeurbiologique
desprotéines
du tourteau ; mais il s’accorde avec les données de RI C H TE
Ret SCHIILER
( 1959 ) qui,
dans un travail trèscomplet
effectuéégalement
surrat, constatent que, si
graine
crue et tourteau cru diffèrent surtout par leur valeurbiologique,
tourteaux crus et tourteaux cuits se différencient essentiellement par le coefficient d’utilisationdigestive
de leursprotéines.
LI E N
ER
( 195 8)
attribue l’amélioration de la valeurbiologique
du tourteau cuità une meilleure utilisation de sa
méthionine ;
l’un des rôlesmétaboliques
de cetacide aminé étant celui de donateur de
méthyl,
onpourrait
penser que laprésence
dans le
régime
de nos porcs dequantités
élevées de choline et de vitamineB 12
aatténué l’effet de la carence de méthionine et pu masquer l’influence du traitement
thermique
sur ladisponibilité
de cet acide aminé.Dans la limite d’un
chauffage
nettement insuffisant(tourteau F), légèrement
insuffisant
(tourteaux CDE.)
ou correct(tourteaux
A etB),
notre essai fait res-sortir l’existence d’une relation entre traitement
thermique
et utilisationprotéique
nette ou
plus
exactement coefficient dedigestibilité réelle,
car les valeursbiologiques
sont
identiques ;
par contre il ne donne pas d’indications sur l’influence d’un surchauf-fage.
Tests
biochimiques
Les tests d’activité
uréasique
et de solubilité dans l’eaupermettent
de reconnaîtreparmi
divers échantillons celuiqui
est insuffisamment cuit(fig.
3 a ;3
e).
C’est à une même conclusionqu’aboutissent
les travaux de BIRD et al.(19 47
) qui
tendent à relier le test d’activitéuréasique
à une mesure de croissancesur
poulet.
De même, WoTTr.rNG et P!rrcxrNnT( 19 6 2 )
trouvent, dans laplupart
descas, une bonne corrélation entre la croissance du
poulet,
l’activitéuréasique
et lasolubilité de la fraction azotée dans une solution aqueuse à 0,2 p. 100 de soude.
Mais
l’application
de ces tests se révèleparfois
insuffisante pour caractériser certainsproduits.
Dans un travail antérieur
(D!!,oRT-Lava!,
et ZEi<TER,ig6o), l’épreuve
à lapepsine
n’avait paspermis
de différencier un tourteau cru d’un tourteaugrillé.
Dans la
présente expérience,
ce test nepermet
pas nonplus
une discrimination entre nos 6 échantillons. Onpeut
penserqu’en l’occurrence,
les zonesthermiques
étudiées(io 5
°C-i2o°C ;
cf, tabl.i)
n’ont pas été suffisamment étendues pour modifier lecomportement
desprotéines
dusoja
envers cette enzyme.I,’indice
de FROLICH offre une corrélation très étroite(r
=o,g 5 )
avec les coeffi- cients d’utilisationdigestive
réelle desprotéines
de nos 6produits.
Cette observationrejoint
celles de cet auteur etcelles, plus récentes,
d’AsCAREUI et GESTETNER(rg62)
pour
lesquels
la fixation du rouge de crésol est,parmi
les tests étudiés(uréase, lysine disponible,
activitéantitrypsique,
méthioninedisponible),
celuiqui présente
lameilleure corrélation avec la croissance du
poulet.
I,a solubilité
trypsique corrigée,
telle que nous l’avons définie, montre une cor-rélation très étroite
(r
=o, 9 6)
avec les coefficients d’utilisationdigestive
réelledes
protéines
de nos six échantillons. Il n’en va pas de même du taux de libération d’azoteoc-aminé,
en raison notamment de laprécision
insuffisante dudosage. D’ailleurs,
contrairement à IVGRaM et al( 1952 ),
Cr,a!Dm!r et ROBBLEE(
1952
)
ne considèrent pasl’hydrolyse enzymatique
comme un test sûr de laqualité
destourteaux : des
produits,
dont le rendementbiologique
estexcellent, peuvent
en effet fournir parhydrolyse enzymatique
desquantités
d’acides aminés ou d’azote aminé très différentes. Cepoint
de vue est confirmé par les travaux d’A:!wax(ig62), lequel
ne trouve pas de relation entre croissance du
poulet
et taux de libération d’azote aminé.Aucun des échantillons étudiés
n’ayant
subi desurcuisson,
il n’est paspossible
de dire que le test de solubilité
trypsique corrigée
enpermettrait
lediagnostic ;
etcompte
tenu des zonesthermiques
danslesquelles
nos tourteaux ont ététravaillés,
ce test n’autorise pas
davantage
à affirmer que l’activitéantitrypsique
a été totale-ment inhibée.
Toutefois,
sasignification,
dupoint
de vue de la destruction des fac- teurs antinutritionnels de lagraine
desoja,
est vraisemblablementplus large
que celle del’uréase,
dont le seuil d’inactivation estplus
bas.Enfin,
aucun des testsbiochimiques
mentionnés nepeut
se relier aux valeursbiologiques,
similaires pour tous lesproduits.
Reçu pour publication
en octobre i96!.SUMMARY
EFFICIENCY OF SOME DIETARY PROTEINS IN THE PIG.
V. - INFLUENCE OF TIIE MODE OF OIL EXTRACTION ON THE PROTEIN EFFICIENCY OF SOYBEAN OII. MEALS.
VALUE OF SOME BIOCHEMICAL TESTS FOR THE ESTIMATION OF THEIR Qi7ALITY
The well-known
improvement
ofsoybean quality by
heat treatment can beexplained by
theinactivation or destruction of some toxic substances. But excessive heat may denaturate the pro- teins and decrease their
biological
value. Thus, theknowledge
of theintensity
of heat treatment isimportant
for the estimation of theprotein efflciency
ofsoybean
oil meals.This