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Les essais thérapeutiques dans le cadre de la médecine de précision

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Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. V - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2016 152

Les essais thérapeutiques dans le cadre de la médecine de précision

Clinical trials for precision medicine

O. Trédan *, ** , P. Cassier *, ** , D. Pérol *** , J.Y. Blay *, **

* Département de cancéro logie médicale, centre Léon-Bérard, Lyon.

** CNRS UMR5286, Centre de recherche en

cancérologie de Lyon (CRCL), Lyon.

*** Unité de biostatistique et d’évaluation des thérapeutiques (UBET), centre Léon-Bérard, Lyon.

RÉSUMÉ Summary

» Les techniques de séquençage génomique à haut débit permettent d’identifi er des anomalies moléculaires sur les gènes impliqués dans la progression tumorale. Outre la cartographie moléculaire de la tumeur, l’idée est que la conjonction des données cliniques et génomiques avec des thérapies ciblées spécifi ques doit aider à personnaliser chaque traitement (ce que l’on appelle la médecine de précision), afi n de développer des stratégies antitumorales rationnelles et plus effi caces. Dans cet article, nous décrivons plusieurs essais cliniques évaluant diff érentes technologies de screening moléculaire afi n de sélectionner des thérapies ciblées pour des patients atteints de cancer avancé. Nous discutons les résultats de ces premiers essais intégrant des variants / anomalies génomiques tumoraux comme principaux critères d’éligibilité, ainsi que les défi s liés à l’identifi cation et à l’intégration de cette quantité importante de données moléculaires dans les décisions thérapeutiques.

Mots-clés : Médecine de précision – Thérapies ciblées – Essais cliniques.

High-throughput genomic sequencing techniques allow identifying DNA alterations in genes known to drive tumor progression. Besides tumor profiling, the concept is that matching of clinical and genomic data with targeted agents helps to tailor each patient treatment (so called precision medicine), in order to develop more rational and eff ective antitumor strategies. In this article, we focus on several genomics-driven clinical trials assessing diff erent omics- based technologies to select molecular targeted therapies for advanced cancer patients. We discuss the results of these fi rst generation trials that incorporate genomic variants/

alterations as key eligibility criteria, as well as challenges of identifying and translating the huge amount of genomic data into treatment decision.

Keywords: Precision medicine – Targeted agents – Clinical trials.

L

e développement des plates-formes de biologie moléculaire, notamment en Amérique du Nord et en France, permet aujourd’hui de générer, dans un délai raisonnable, des données génomiques tumo- rales. Après extraction de l’ADN tumoral, il est en eff et maintenant possible d’obtenir des données exploitables en termes de mutations et de variations du nombre de copies (CNV) de gènes, afi n d’orienter la prescription de thérapies ciblées. Cela peut se faire dans le cadre de la routine de la prise en charge thérapeutique (typi- quement en recherchant les mutations oncogéniques de l’ Epidermal Growth Factor Receptor [EGFR ] dans le cancer du poumon), ou dans le cadre d’un essai clinique (thérapies ciblées en cours de développement).

La première étape indispensable à l’ implémentation des essais cliniques de médecine de précision a été la meilleure connaissance des anomalies moléculaires présentes dans les diff érents types de cancer. Il est ainsi apparu que des anomalies génomiques récur-

rentes pouvaient se rencontrer dans des maladies cancéreuses ayant des sites initiaux diff érents (ainsi, la mutation V600E du gène BRAF a été mise en évidence dans d’autres types tumoraux que le mélanome [1] ). La deuxième étape importante a été le déploiement des plates-formes de biologie moléculaire, intégrées ou étroitement associées à des unités de biopathologie, dont le rôle est double : la meilleure compréhension des processus moléculaires de cancérogenèse, et le criblage d’aberrations et d’ anomalies génomiques tumorales potentiellement “ciblables”. L’intégration des données de biologie moléculaire avec les données cliniques et anatomopathologiques habituelles reste cependant un défi dans les protocoles d’essai. L’utilisation de plates- formes bio-informatiques performantes est obligatoire dans cet univers dit des “big data” . Enfi n, la troisième étape du formidable essor des essais de médecine de précision a consisté à démontrer qu’une anomalie moléculaire donnée (par exemple l’amplifi cation du

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successivement les techniques de biologie moléculaire nécessaires, les études en cours et les premiers résultats déjà obtenus.

Exploration des anomalies moléculaires en clinique

Afin d’avoir une identification large des anomalies moléculaires oncogéniques, il est nécessaire de dis- poser d’outils de “screening” massif comprenant des panels multigéniques. L’objectif est bien d’obtenir, pour un patient donné, une notion de la présence éventuelle d’anomalies rares mais potentiellement à cibler par des molécules de traitement spécifi ques. L’aboutissement ultime reste la mise en évidence d’une anomalie dite

“driver” , c’est-à-dire causale et/ou primordiale dans la cancérogenèse de la tumeur considérée. Par ailleurs, il est possible de détecter des mutations liées à la résistance aux traitements (typiquement, T790M pour le gène EGFR , ou D538G /Y537N / Y537S pour le gène ESR1 ).

Le séquençage à haut débit de nouvelle génération ( Next- Generation Sequencing [NGS ] ) autorise une détection précise et validée de plusieurs dizaines de gènes en même temps (3) . Actuellement, la majorité des programmes cliniques de médecine de précision utilise l’ADN tumoral ; cependant, l’ARN tumoral (avec la recherche de gènes de fusion) ou les acides nucléiques circulants pourraient s’avérer, dans le futur, plus utiles ou plus performants pour la détection et le suivi des anomalies moléculaires cliniquement pertinentes. Il est probable que près de 300 gènes (sur nos 20 000 gènes) sont d’intérêt dans cette situation, même si certains auteurs considèrent que le séquençage de l’ensemble des exomes ( Whole-Exome Sequencing [WES]) pourrait être plus informatif (4, 5) . Les conditions préanalytiques , qu’elles concernent le site et la qualité du prélèvement, la cellularité, la qualité de l’ADN, la couverture du panel ou la profondeur de lecture, doivent être irréprochables et contrôlées . Les variants mis en évi- dence sont parfois claire ment connus comme ayant un rôle dans la cancérogenèse et peuvent avoir été plusieurs fois décrits dans la littérature (répertoriés dans la base COSMIC [Catalogue Of Somatic Mutations In Cancer ] ), mais de nombreux variants restent de signifi cation biologique inconnue. Les essais cliniques de médecine de précision visent à traiter les patients lorsqu’une mutation activatrice

cibles thérapeutiques.

En parallèle, des analyses de CNV (gains, amplifi cations, pertes, délétions de gènes) sont le plus souvent réa- lisées. Les diff érentes technologies à disposition sont robustes (l’hybridation génomique comparative [CGH array] permet ainsi d’explorer l’ensemble du génome à la recherche de déséquilibres chromosomiques) , mais l’interprétation des résultats reste diffi cile (notions de clonalité et de ploïdie à prendre en compte). En eff et, les réelles amplifi cations focales (avec plus de 6 copies du gène et un amplicon de taille restreinte) sur des onco- gènes représentent des cibles évidentes. En revanche, les délétions homozygotes sur des gènes suppresseurs de tumeurs ne sont pas encore des cibles validées (par exemple, PTEN ou CDKN2A apparaissent comme souvent délétés, mais les traitements ciblés des voies correspondantes ne sont pas toujours effi caces). De plus, les gains ou les pertes des gènes ne se traduisent pas systématiquement par des surexpressions ou des absences des protéines correspondantes.

L’absence des protéines anti-oncogènes peut être sup- posée en cas d’inactivation biallélique (les 2 copies du gène sont anormales) sur des gènes suppresseurs de t umeurs. Là encore, les données cliniques disponibles pour proposer une intervention thérapeutique sur ces aberrations spécifi ques restent limitées. Ainsi, l’effi ca- cité des inhibiteurs de mTOR (mammalian Target of Rapamycin) en cas de perte de la protéine (phosphatase) PTEN est très discutée (6, 7) .

Des réunions de concertation doivent se tenir régu- lièrement afi n que les anomalies moléculaires soient analysées et proposées comme potentielles cibles théra- peutiques. Tous les dossiers de patients ayant eu accès à un programme de screening moléculaire doivent être discutés dans ces réunions. Plusieurs experts doivent y être présents : les biologistes moléculaires, les patho- logistes, les oncologues et les biostatisticiens. Il convient de hiérarchiser les anomalies, afi n de pouvoir propo- ser le traitement le plus pertinent. De façon simpliste, l’ampli fi cation et/ou la mutation activatrice d’un gène dit “driver” est toujours une cible à privilégier. À l’op- posé, l’activation supposée d’une voie (par exemple PI3K/AKT/mTOR) par la perte d’un régulateur négatif (eff et “levée de frein”) off re des opportunités de trai- tement (inhibiteurs de PI3K, d’AKT ou de mTOR), mais n’est que rarement prédictive de l’effi cacité réelle de ces inhibiteurs (6-8) .

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Enfi n, il est à noter qu’il est parfois nécessaire de mieux préciser les anomalies en utilisant des techniques complémentaires comme la FISH (Fluorescent In Situ Hybridization), le séquençage ciblé ( par Sanger) ou l’im- munohistochimie (IHC) [pour vérifi er la surexpression ou l’absence d’expression des protéines cibles].

Exemples de programmes de screening moléculaire

Nous n’aborderons ici que les essais cliniques portant sur plusieurs types de tumeurs. En effet, plusieurs études, terminées ou en cours, évaluent l’apport du criblage moléculaire dans des situations cliniques précises ayant un seul modèle tumoral (essais dits

“parapluie”, comme dans les programmes SAFIR du groupe Unicancer).

Un des premiers essais thérapeutiques de médecine de précision multi tumeurs a été réalisé au MD Anderson Cancer Center. Dans cet essai, diff érentes anomalies génomiques et protéiques étaient recherchées (chez 66 patients). Cette étude a le mérite de montrer la faisabilité du concept (cribler des anomalies molé- culaires pour sélectionner les traitements) et a donné des résultats encourageants pour poursuivre les essais de médecine de précision (9) .

De façon simultanée, plusieurs essais thérapeutiques ont donc été conduits en Amérique du Nord et en Europe, et notamment en France. L’expérience du groupe des essais de phases précoces du MD Anderson Cancer Center a été plusieurs fois rapportée. Il ne s’agit pas à proprement parler d’essais thérapeutiques, mais plutôt de larges programmes de screening des ano- malies moléculaires chez des patients éligibles pour des études de phase I. En ce qui concerne les 500 premiers patients de ce programme, il est apparu que la grande

majorité d’entre eux présentait un variant dans le panel des gènes testés. Cependant, in fi ne, seuls 188 patients présentaient une mutation d’intérêt avec un traitement approprié (38 % des patients). De grandes diff érences existent entre les diff érentes tumeurs en termes de fréquence d’anomalies moléculaires actionnables (nom- breuses anomalies dans les cancers du sein mais peu dans les sarcomes). Plus il y a d’anomalies moléculaires correspondant à des thérapies ciblées, plus il y a de chances d’obtenir une réponse et un bénéfi ce pour le patient (10, 11) , notamment lorsque des combinaisons de thérapies ciblées sont envisagées. Il y a cependant un biais, car certaines tumeurs font “spontanément”

l’objet de recherches plus systématiques et approfon- dies que d’autres et la notion d’anomalie actionnable est évolutive dans le temps (en fonction de l’évolution des thérapeutiques disponibles et des biomarqueurs associés). De façon plus intéressante, il apparaît que, lorsque la tumeur initiale et une métastase sont testées en parallèle, une forte concordance est relevée dans les anomalies mises en évidence (seuls 2 cas sur les 64 testés présentaient des discordances) [12] .

Il a été recensé plus de 50 programmes de screening moléculaire à travers le monde, essentiellement en Amérique du Nord et en Europe. Une quarantaine de programmes est spécialement dédiée à la mise en évidence d’anomalies génomiques pour la pres- cription de thérapies ciblées (quelques exemples sont rapportés dans le tableau I ), dont une trentaine spécifi quement pour les essais de phase I. En France, des programmes similaires sont en cours afin de permettre aux cliniciens d’obtenir une cartographie d’anomalies génomiques tumorales et, ainsi, d’orienter les patients vers des essais thérapeutiques de phase précoce. Dans le programme MOSCATO de l’institut Gustave-Roussy, plusieurs centaines de patients inclus ont une biopsie spécifi que pour la réalisation d’une

Tableau I. Résultats de quelques études de screening moléculaire dans des essais portant sur toutes tumeurs.

Institution Nombre de patients Technologies Nombre de patients traités par thérapie ciblée adaptée MD Anderson Cancer Center,

Houston, États-Unis 2 000 Panel de 11 à 50 gènes 83 (4 %)

Princess Margaret, Toronto,

Canada 1 640 Panel de 23 à 48 gènes 92 (5,6 %)

Cleveland Clinic, États-Unis 223 FoundationOne® avec 315 gènes

et 28 réarrangements 24 (11 %)

Institut Gustave-Roussy, Paris 708 Panel de 30 à 75 gènes + CNV 140 (19 %)

Institut Curie, Paris 741 Panel de 45 gènes + CNV 195 potentiels (26 %)

Centre Léon-Bérard, Lyon 2 275 Panel de 59 gènes + CNV En cours

CNV : variations du nombre de copies de gènes.

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Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. V - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2016 155 AKT pour 84 patients ; FGFR/FGF pour 46 patients ;

KRAS/NRAS/HRAS pour 24 patients ; HER2/EGFR pour 22 et 18 patients, respectivement). Cent quarante et un patients ont reçu une thérapie personnalisée ou participé à un essai de phase I adapté (13) .

Dans le programme Profi LER du SIRIC lyonnais (site de recherche intégrée sur le cancer de Lyon, appelé Lyric), plus de 2 000 patients ont été inclus, et les inclusions sont toujours en cours. À ce stade, plus de 1 600 tumeurs ont pu être analysées, essentiellement des cancers colorectaux (10 %), des cancers mammaires (9 %), des cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS) [7 % ] , des cancers du système nerveux central (7 %) et des sarcomes (6 %). La moitié des tumeurs porte au moins une anomalie moléculaire potentiellement éligible à une thérapie ciblée. Plus de 300 tumeurs pré- sentaient plus de 2 altérations moléculaires d’intérêt. Les anomalies les plus fréquentes concernaient les gènes PIK3CA (n = 138 ; 8 %), KRAS (n = 121 ; 7 %), CDKN2A (n = 148 ; 9 %) et PTEN (n = 42 ; 3 %). Le nombre de patients traités eff ectivement par des thérapies ciblées spécifi ques n’est pas encore établi.

Premiers résultats des essais de médecine de précision

La première étude publiée qui a posé la question de l’intérêt clinique de la médecine de précision est l’essai SHIVA, promu par l’institut Curie, dans lequel les patients ayant un cancer avancé étaient inclus et avaient une biopsie systématique d’une des lésions métastatiques. Près de 200 patients ont fi nalement été randomisés entre un traitement ciblé sur une anomalie moléculaire donnée (génomique ou pro- téique détectée par IHC) et un traitement considéré comme standard par l’investigateur (comme la chimio- thérapie). L’objectif principal de cette étude n’a pas été atteint, sans supériorité du bras expérimental par rapport au bras de référence (14) . Il est à noter que, sur un plan purement méthodologique, ce type d’étude dite “de stratégie” ne permet de toute façon pas de s’assurer que le traitement ciblé est sans bénéfi ce chez les patients chez lesquels une anomalie moléculaire a pu être dépistée (15) . De fait, une étude utilisant ce plan expérimental et qui présenterait des résultats positifs ne permettrait de conclure qu’à la supériorité

biologie moléculaire, la sélection des patients devant recevoir le traitement ciblé en fonction de la présence de l’anomalie est bien cliniquement utile (seul un plan expérimental avec une double rando misation des stra- tégies thérapeutiques comparées – une dans chaque sous-population identifi ée par son statut positif ou négatif pour la présence d’une anomalie moléculaire – pourrait être conclusif).

Cependant, plusieurs informations intéressantes ont été extraites de cette étude SHIVA, notamment des signaux d’activité détectés pour certains sous-groupes de patients (en particulier lors d’une anomalie de la voie des MAP-kinases). L’absence globale de bénéfi ce de la stratégie fondée sur une analyse moléculaire de la tumeur peut avoir diff érents facteurs, notamment l’accès à un nombre limité de thérapies ciblées. Le petit nombre de molécules thérapeutiques acces- sibles dans ces situations d’études cliniques spécifi ques reste un problème, car il ne permet pas de disposer, pour chaque patient, d’une proposition de traitement optimale (par exemple une combinaison). Un quart des patients présentaient ainsi plusieurs anomalies moléculaires, mais une seule cible était choisie pour le traitement expérimental selon un algorithme déci- sionnel qui sembl e nécessaire à l’analyse adéquate des données (16) . Néanmoins, des opportunités de traitements restent ainsi inexplorées, limitant donc la portée de ces résultats.

Cette année, au Congrès américain d’oncologie clinique, ont été présentées les données préliminaires de l’étude My Pathway (Genentech Inc.). Le screening moléculaire était limité à certaines voies, concernant les gènes HER2 (amplifi cation), BRAF (mutation activatrice), EGFR (muta- tion activatrice), ainsi que la voie Hedgehog. Sur les 129 premiers patients inclus (objectif de 500 patients), le nombre de réponses objectives (objectif principal de l’étude) est assez variable d’une voie à l’autre : 28 % pour les patients ayant une anomalie d’ HER2 , 24 % pour les patients ayant la mutation activatrice V600E du gène BRAF , mais les réponses étaient rares pour les autres anomalies (17) .

Pour pallier un accès limité aux thérapies ciblées, les essais dits “baskets” permettent de tester, toujours pour diff érentes tumeurs initiales, une ou des anomalies moléculaires données (tableau II, p. 156 ) . Ainsi, le pro- gramme français AcSé, lancé en 2013, est coordonné par UNICANCER et cofinancé par la fondation ARC.

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Il permet aux patients porteurs d’altérations sur les gènes ALK , MET , RON ou ROS1 (retrouvées dans plus de 20 types de cancers) de recevoir du crizotinib. Pour la mutation activatrice V600E du gène BRAF , l’étude VE-BASKET (phase II) a testé spécifi quement le vému- rafénib chez des patients ayant des tumeurs autres que des mélanomes (où le traitement a déjà son autorisa- tion de mise sur le marché [ AMM ). Plusieurs réponses ont été observées chez des patients porteurs de can- cers bronchiques, d’histiocytose langer hansienne ou d’autres types tumoraux ( tumeur anaplasique de la

thyroïde, cholangiocarcinome, sarcomes), mais peu de réponses ont été observées chez des patients atteints de cancer colorectal (1) .

De nombreux autres essais sont en cours, notamment en Amérique du Nord. Par exemple, de nombreuses anomalies moléculaires sont testées et ciblées dans l’étude NCI-MATCH (tableau III) . Les anomalies molé- culaires les moins fréquentes sont ainsi plus systémati- quement recherchées, mais cela nécessite l’inclusion de très nombreux patients et, donc, un eff ort collaboratif conséquent (18) .

Tableau II. Exemples de quelques études dites “baskets”.

Nom Promotion Anomalie(s) ciblée(s) Nombre de tumeurs

à traiter Identifi ant ClinicalTrials.gov

AcSé crizotinib UNICANCER ALK/MET/RON/ROS 1

CREATE EORTC ALK/MET 582 NCT01524926

VE-BASKET Hoff mann-La Roche BRAFV600E 160 NCT01524978

Combinaison

dabra fénib/tramétinib GlaxoSmithKline BRAFV600E 135 NCT02034110

SIGNATURE Novartis Activation de la voie

PI3K

Activation de la voie RAF/RAS/MEK CDK 4/6

Activation de FGFR, d’ALK ou de ROS

145 110 90 70 70

NCT01833169 NCT01885195 NCT02187783 NCT02160041 NCT02186821

Tableau III. Exemple de l’étude américaine NCI-MATCH (NCT02465060).

Thérapies ciblées testées Anomalies moléculaires ciblées

Afatinib Activation de la voie EGFR Activation d’HER2

AZD9291 Mutation d’EGFR T790M Autres mutations rares d’EGFR

Crizotinib Translocation d’ALK/ROS 1 Amplifi cation de MET

Dabrafénib et tramétinib Mutation V600 de BRAF

Tasélisib Mutation de PIK3CA

GSK2636771 Perte de PTEN

T-DM1 Amplifi cation d’HER2

Tramétinib Anomalies de BRAF (hors V600) Mutation de NF1

Vismodégib Mutation de SMO/PTCH1

Défactinib Perte de NF2

Sunitinib Mutation de cKIT

Dasatinib Mutation de DDR2

AZD4547 Mutation de FGFR Amplifi cation/fusion de FGFR

AZD5363 Mutation d’AKT

Binimétinib Mutation de NRAS

Palbociclib Amplifi cation de CCND 1,2,3

Nivolumab Instabilité microsatellitaire

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Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. V - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2016 157 la majorité des anomalies moléculaires sont extrême-

ment rares. Or, lorsque cette anomalie moléculaire est primordiale, causale, particulièrement importante dans la progression du cancer, la cibler aboutit à une régression tumorale. Il est donc nécessaire d’inclure plusieurs cen- taines de patients afi n d’obtenir des données fi ables pour chacune de ces mutations rares. À l’opposé, certaines mutations fréquentes comme celle du gène PIK3CA , non validées comme prédictives d’une réponse aux inhibi- teurs de mTOR/PI3K, limitent les chances de positivité de la plupart de ces essais cliniques.

Un eff ort d’homogénéisation des pratiques est donc en cours, avec des recommandations qui pourraient permettre, dans les années à venir, de mieux défi nir les objectifs et les méthodologies de tous ces essais (18, 19). De plus, la structuration homogène des données bio-informatiques permettra une meilleure cohésion entre essais cliniques, ce qui autorisera le partage des données et des analyses biostatistiques groupées (poolées) , comme cela est déjà en cours en Amérique du Nord (CancerLinQ, GENIE) ou en France (projet

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R é f é r e n c e s

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