G
Arithmétique politique. Quelques remarques sur les élections, les assemblées délibérantes et le système représentatif
Annales de Mathématiques pures et appliquées, tome 6 (1815-1816), p. 1-11
<http://www.numdam.org/item?id=AMPA_1815-1816__6__1_0>
© Annales de Mathématiques pures et appliquées, 1815-1816, tous droits réservés.
L’accès aux archives de la revue « Annales de Mathématiques pures et appliquées » implique l’accord avec les conditions générales d’utilisation (http://www.numdam.org/conditions). Toute utilisation commerciale ou impression systématique est constitutive d’une infraction pénale.
Toute copie ou impression de ce fichier doit contenir la présente mention de copyright.
Article numérisé dans le cadre du programme Numérisation de documents anciens mathématiques
http://www.numdam.org/
I
ARITHMETIQUE POLITIQUE.
Quelques remarques
surles élections, les assemblées
délibérantes et le système représentatif ;
Par M. G E R G O N N E.
ANNALES
DE MATHÉMATIQUES
PURES ET APPLIQUÉES.
JE faisais partie
en I79I de lagarde
nationale deNancy, laquelle
à cette
époque
se trouvaitcomposée
de 32compagnies
de 80hommes chacune,
formantquatre bataillons ;
en tout 2560 individus..Cette
institution ,
comme tant d’autres de la mêmedate, était,
comme l’on
sait ,
extrêmementdémocratique ;
tous leschefs , depuis
le
caporal jusqu’au colonel ,
étaient élus par ceux-là mêmequi
devaient ensuite
devenir
leursubordonnés,
et pour une année seule- ment, sauf réélection. Etait-ce un mal ? était-ce un bien ? c’est làUne
question
tout à faitétrangère
à monsujet.
Le
grade
de colonel nepouvait
êtrepostulé
parbeaucoup
degens ; il
exigeait quelques
tarensmilitaires ,
del’aisance , du
loisir et une sorte de crédit et de considération dans lepublie.
Lessuffrage.
TOM.
VI, n.°1, I.34 juillet I8I5.
ne roulaient donc
guère,
àchaque élection , que
sur deuxindividus,
entre
lesquels
les votansprenaient parti,
souver t assezchaudement,
se traitant
réciproquement
de mauvaiscitoyens,
et se donnant mêmequelquefois
desépithètes
moins honnêtes encore 1 comme cela sepratique
enpareil .
cas.Le colonel en
charge
cette année-laayant
donné sadémission,
les
compagnies
furentconvoquées ,
chez leurscapitaines respectifs,
pour
procéder à
sonremplacement. J’obtins,
non sansquelque peine,
que le
procès-verbal
desopérations
de lacompagnie
dontje
faisaispartie,
demeureraitcharge
dela
totalité des votesémis,
et dontla
plupart
étaientréputés
voixperdues,
par lamajorité
des votans.Mais
on n’avait paspris la même précaution partout ;
et,lorque
les 32
procès-verbaux
descompagnies
furent entre les mains du con-seil
d’administration, qui
devait en fare lerécensement,
ons’aperçut
que la
plupart
sebornaient
à énoncer le nom du candidatqui avait
réuni en sa faveur le v0153u e la
majorité.
Quelques
membres duconseil ,
en fortpetit
nombre ausurplus;
proposèrent
de faire recommencer lesopérations ;
mais on étaitpressé
d’en
finir ;
et il futconséqut mment
décidé que, danschaque procès- verbal,
onréputerait
candidat élu par lacompagnie
celuiqui
auraitréuni le
plus
de voix en safaveur ;
et que , sanségard
aux suf-frages
tombés surd’autres ,
celuiqui
aurait étédésigné
par lamajorité
absolue descompagnies
serait définitivement élu.On supposa donc
tacitement , . et
on crut bonnement eneffet
que la
majorité
absolue. dessuffrages
de lamajorité
absolue descompagnies
devait former lamajorité
absolue dessuffrages
desvotans.
Cependant , pendant qu’on procédait
au récensement desprocès-verbaux, je
fis en mol-même lepetit
calcul que voici Lamajorité
absolue dessuffrages
dans unecompagnie
étant41
et la
majorité
absolue descompagnies
étant 17, il s’ensuit quela
majorité
absolue dessuffrages
de lamajorité
absolue descompagnies
De s’élève
qu’à 41
X 17=697 suffrages ;
et l’élupeut ,
entoute
rigueur, den avoir pas
obtenudavantage.
REPRÉSENTATIF.
3Mais, ajoutai-je ,
s’iln’y
a que deux concurrens, comme il esttrès-possible
et mêmetrès-probable ,
lecompétiteur rejeté
peut avoireu en sa
faveur d’abord 39 suffrages
dans 17compagnies
et ensuitela totalité dans les 15 autres , ce
qui
fait d’unepart
663 et del’autre I200 ;
en tout 1863.Ainsi,
dans cettehypothèse ,
uncandidat ,
avec697 suffrages seulement,
estadmis ;
et un autre, avec 1863suffrages
c’est-àdire , près
dutriple,
estrejeté.
Jerédigeai ,
sur cesujet ,
unecourte note que
je
remis au conseild’administration ;
les yeux furentaussitôt
désillés ,
et il fut décidéqu’à
l’avenir onprocèderait
d’unemanière un peu
plus régulière.
Je sens
qu’on
aurait pum’objecter
queje supposais
les chosesdans une limite extrême assez peu
probable ;
maisj’aurais
purépondre
à mon tour que du nombre de697 suffrages
queje supposais
à l’élu au nombre de 1281qui
lui aurait été nécessaire pour l’êtrerégulièrement,
il y avait une latitude assezraisonnable ;
et que ,
quand
bien même tout ne se serait pas exactementpassé
comme
je
lesupposais , toujours
demeurait-il extrêmementpossible
que l’élu eût eu moins de voix que son adversaire.
On aurait pu
m’objecter
aussi queje supposais
tous lessuffrages partagés
entre deux concurrensseulement,
cequi pouvait
fort bienn’être
point rigoureusement vrai ; mais ,
outre que , commeje
l’aidéjà observé ,
cettesupposition
ne devaitguère
s’écarter de lavérité ;
le cas de
plus
de deux candidatspouvait
offrir un inconvénientbeaucoup plus
grave encore : celui deprésenter
comme candidatayant
obtenu lamajorité
absolue dessuffrages
d’unecompagnie ,
unindividu réellement
repoussé
par cettemajorité.
Pour
faire ,
tout d’un coup, bien ressortir cetinconvénient ,
pous-sons les choses à l’extrème ; supposons que les
suffrages
d’unecompagnie,
aupremier
tour descrutin,
se soientrépartis entre 78
candidats dont
76
aient obtenu une seule voix chacun et les deuxrestans chacun 2.
Quand
bien même ces deux derniers auraient été abhorrés par les76
votansqui ne
leur auraient pas accordé leurssuffrages, ils
nese
seraient pas moinstrouvé obligés de les
faireporter
sur eux seuls a un second tour descrutin ,
etquel qu’ait
été le
vainqueur
dans lalutte ,
il n’en eut pas moins eu réellement76 suffrages
contrelui ;
etcependant
il eut dû êtreprésenté
commeayant
lamajorité
absolue dessuffrages
en sa faveur.Faisons une seconde
hypothèse,
moinséloignée
du train ordinairedes
choses ;
supposons seulement trois candidats A ,B , C , dont,
à un
premier
tour descrutin ,
lepremier
ait obtenu 27suffrages,
le second 27 aussi et le troisième 26
seulement ;
supposons en outreque
le candidat Cagrée
aux votansqui
se sontprononcés
en faveurde A et
B,
mais un peu moinspourtant
que ees deuxderniers ;
supposons
qu’au
contraire tous ceuxqui
n’ont pas voté pour A ou pour B aient une extrêmerépugnance
à les voirélus ;
il n’en faudrapas moins choisir entre ces deux candidats seulement à un nouveau tour de
scrutin ;
et l’un d’eux sera alorsréputé
avoir obtenu lamajorité
absolue dessuffrages :
la vérité serapourtant qu’il
n’enaura eu réellement que 27 et que le candidat C
qui
étaitpréféré
par 26 votans, et vu sans
répugnance
parles 54
autres , aura étéécarté dès le
premier
tour de scrutin.On voit donc que le cas
de plus
de deuxcandidats ,
loin d’atténuer les vices dusystème
queje
viens decombattre,
n’est propre leplus
souvent , aucontraire , qu’à
en rendre lesconséquences plus dangereuses.
Jepourrai donc ,
dans cequi
vasuivre,
continuer à supposerqu’il n’y
a que deuxcandidats
seulement(*).
(*) Le peu
qui précède
est propre en mêmetemps à
faire entrevoircombien
l’art des scrutins est difficile ; et c’est pourtant sur cet art que reposent les destinées des états libres. Les
géomètres
ont bien trouvé des méthodesparfaites
en théorie ; mais ces méthodes portent sur tlne
hypothèse
malheureusement inad-missible ; celle de votans tous éclaires et de bonne foi. C’est sans doute dans la vue de balancer en
partie
les inconvéniens queje
viens designaler
en passant, qu’on a inventé, à diversesépoques,
les scrutins de liste , les listes de rejetetc.; mais ces palliatifs ne sont pas eux-mêmes sans
quelque ranger.,
et veulentREPRESENTATIF.
5Pour mieux faire sentir encore le vice de la
substitution
des votes parcorporation
aux votes parindividus ;
supposons toute lagarde
nationale d’undépartement
distribuée en 12régimens
com-posés
chacuncomme
l’était en I79I lagarde
nationale deNancy ;
et supposons en otftre que , pour l’élection d’un commandant en chef de ces I2
régimens,
on veuille suivre un modeanalogue
àcelui que
j’ai
dit avoir été suivi pour l’élection du colonel de lagarde
nationale deNancy ;
lessuffrages
de 8régirnens
suffirontà
l’élu ;
or , nous avons vu ci-dessus que lesuffrage
de l’un d’euxpouvait,
à larigueur ,
nereprésenter
que697
votesseulement ;
d’où il suit que les
suffrages
de ces 8régimens pourront
n’enreprésenter
que697 8=5576. Mais,
d’un autrecôté,
le nombretotal d.es votans est 2560
I2=30720;
il s’ensuit donc que , dans le cas de deux concurrensseulement ,
le concurrentrejeté peut
avoir en sa faveur un nombre de
suffrages égal à 30720-5576= 25I44, c’est-à-dire , près
descinq-sixièmes
des voix.Poussons
plus
loin encore, et supposons que , voulant élire ungénéralissime
de toutes lesgardes
nationales deFrance ,
on désireen faire un choix conforme au voeu de la
majorité absolue
desdépartemens.
Nous encomptons 87 ;
il faudra donc que l’éluen réunisse
44
en safaveur ;
mais nous venons de faire voir que dans chacun d’eux5576 suffrages
seulementpouvaient
former unemajorité apparente :
l’clu n’auradonc,
à larigueur ,
besoin que de5576 44=245344 suffrages. Or,
le nombre total des votans est ici30720 87 = 2572640;
d’où il suit que , dans le cas de deuxconcurrens
seulement ,
son adversaire aura pu êtrerejeté
avec2692640-245344=222296 suffrages, c’est-à-dire y
avecprès
desdix-onzièmes des voix.
être
employés
avecménagement.
Il serait tout a faitdigne,
soit des gouverne-mens soit des sociétés savantes, de proposer l’intéressant sujet du meilleur mode de scrutin pratique à l’émulation de ceux pour qui les recherches de cette nature
peuvent
avoir quelque attrait.Il en
serait à peu près
de mêmesi ,
lescompagnies n’ayant que
la faculté d’élire leurscapitaines ,
l’assemblée descapitaines
élisaitle
colonel ,
celle des colonels legénéral ,
et celle desgénéraux
legénéralissime ;
etceci ,
ensupposant
même quechaque capitaine
devint le fidèle
interprète
du v0153u de sacompagnie, chaque
colonelcelui du voeu des
capitaines ,
etchaque général
celui du voeu descolonels. Encore ici
l’opinion
d’un peuplus
d’un II.e descitoyens,
composant
lagarde
nationalepourrait l’emporter
sur celle des dixautres IIes.
Si ,
aucontraire ,
laplupart
des mandataires s’écartaientplus
ou moins du v0153u de leurs commettans , celapourrait
tantôtajouter
encore auxinconvéniens
dusystème
mis en usage, et tantôten atténuer l’influence.
On voit donc
qu’en général
les votes recueillis parcorporation
ou par
représentans peuvent
être fort différens des votes recueillis parindividus. Ainsi,
parexemple ,
lepeuple
romainqui
murmuraitde la tenue des comices par
centuries, à
raison de leu.rcomposition hétérogène ,
aurait puaussi ,
à bondroit ,
réclamer contre la tenuedes comices par tribus et même par
curies;
mais, les vices de cesdeux derniers modes de recueillir les
suffrages
n’étaient sans doutepas assez apparens pour
offusquer
lepeuple-roi.
Lessuffrages
re-cueillis par cantons, en
Suisse, présentent
le même inconvénient.Faisons encore une autre
supposition.
Nouscomptons
actuellementen France
87 départemens.
Au taux moyen, chacund’eux
a 3 arron-dissemens, chaque
arrondissement 13cantons , chaque canton 9
communes , et enfin
chaque
communeI59
votans ; cequi porte
le nombre total descitoyens français ayant
droit de voter,à I59 9 I3
3 87=4855383.
Supposons
ensuitequ’il
soit statuéqu’il
y aura des assem-blées
primaires
descollèges
électoraux de cantons , d’arron- disse-ment et dedépartement,
subordonnas les uns aux autres, etune
chambre
dedéputés
élusuniquement
par cesderniers ; les-quels,.
à leur
tour,
seront nommés par lescollégps d’arrondissemens,
ceux-REPRESENTATIF.
7ci par les
collèges
de cantons et ces derniers par lesassemblée$
primaires.
La
majorité
absolue sera, savoirPour les communes 80 votans,
Pour les cantons ... 5 communes, Pour les
arrondissemens... 7
cantons ,Pour les
départemens ... 2 arrondissemens
Pour la chambre des
députés.... 44 départemens ;
D’où il
suit ,
en raisonnant commeci-dessus , qu’en supposant
mêmeque les mandataires de
chaque
ordreremplissent
fidèlement levoeu de leurs commettans , une délibération
prise
ou une électionfaite dans la chambre des
représentans,
à lamajorité
absolue dessuffrages ,
pourra à larigueur
nereprésenter
quel’opinion
d’unnombre des
citoyens exprimé
parc’est-à-dire, l’opinion
d’environ unvingtième
descitoyens
exerçant leurs droitspolitiques ;
tandis que les dix-neuf autresvingtièmes pourraient
être unanimes dansl’opinion
diamétralementopposée
àcelle-là,
etconséquemment rejetée.
Voilà donc un vice assez grave absolument inhérent au
système
représentatif.
On aquelquefois objecte
contre cesystème
que les mandatairespouvaient
s’écarterplus
ou moins du mandat formelou tacite
qu’ils
avaient reçu ; mais il avait été peuremarqué jusqu’ici
que , même en demeurant
scrupuleusement
fidèles à cemandat, leurs
déterminationspouvaient
très-bien être enopposition
avec cequ’on
doitappeler l’opinion publique ; je
veux dire avecl’opinion
de la
majorité
descitoyens
admis à voter dans lesassemblées
du
peuple.
Soient,
engénéral, 2n+i
le nombre des votans dans les asssembléèsprimaires ,
2n’+I le nombre de celles de ces assembléesqui
doiventnommer les électeurs
d’une
même assemblée du secondordre.
2n"+I
lenombre
des assemblées du second ordrequi
doiventconcourir
à l’élection d’une même assemblée dutroisième,
et ainside
suite , jusqu’à
l’assemblée centralequi
seule estsupposée avoir
le droit de
prendre
des déterminationsobligatoires
pour tous lesvotans ;
le nombre total de ces votans seraet une décision
prise à
lamajorité
absolue dessuffrages
dansl’assemblée
centrale pourra , à larigueur ,
nereprésenter que
lev0153u d’un
nombre
decitoyens exprimé
parc’est-à-dire,
le voeu d’une fraction du nombre descitoyens ayant droit
desuffrage exprimée
parSi n, n’, n",...
sont detrès-grands nombres,
onpourra,
sans erreur
sensible, négliger
l’unité vis-à-vis de chacund’eux,
et , àplus
forteraison ,
vis-à-vis de leursdoubles ;
en sorte que , mexprimant
le nombre des assembléessuccessives ,
subordonnées lesunes- aux
autres)
la fraction (n-dessusdeviendra
sensiblementfraction d’autant plus petite
que m seraplus* grand. Ainsi ,
lev0153u manifesté par la
puissance législative
pourra êtreopposé
à celui’d’une
majoriré
d’autantplus grande
descitoyens ayant
droit deconcourir médiatement à la formation de la
loi, qu’on
auraemployé
un
plus grand nombre
d’intermédiairesdans
l’élection desfonctionnaires
qui composent
cettepuissance.
Si
REPRÉSENTATIF.
9Si l’état est
très-étendu,
on ne pourraguère
sedispenser,
mêmeen
prenant
pourn,n’, n",...
detrès-grands nombres,
deprendre
aussi m assez
grand. Ainsi, l’inconvénient
queje signale ici,
commeétant inévitablement attaché au
système représentatif,
pourra devenir deplus
enplus sensible ,
à mesure que l’état seraplus
étendu.Le nombre total des
citoyens ayant
droit de voter demeurant lemême, plus
les nombres n,n’,n",...
serontpetits
etplus aussi
m devra être
grand ;
m sera donc leplus grand possible lorsqu’on prendra
pour n,n’, nll,...
lesplus petits
nombrespossibles ; c’est-à-dire, lorsque
chacun de ces nombres sera l’unité. 3mexprimera
alors le nombre total des votans ; et le v0153u de l’assemblée
légis-
lative pourra ne
répondre qu’à
celui d’une fraction du nombre descitoyens exprimée
parEn
France,
parexemple ,
le nombre descitoyens
exerçant des droitspolitiques
nes’éloigne guère
de4782969=3I4.
On a doncm=I4;
au moyen dequoi
la fraction ci-dessus devientSupposons
donc que y la Franceayant
à élire unchef ,
il soicréglé
que , pourprocéder
à sonélection,
lescitoyens
se réuniront3 par
3 ,
pour élire un d’entre eux, comme électeur dupremier degré ;
que les électeurs dupremier degré
se réunirontégalement
3 par 3 pour nommer des électeurs du second
degré,
et ainsiprogressivement, jusqu’à
ce que toute la France se trouverepré-
sentée par une assemblée
unique
de troisindividus, laquelle
nommera -enfin l’un d’entre eux pour chef de l’état.
Beaucoup
de gens,j’en
suis sûr , seraient tentés de
regarder
cetteopération
comme fortrégulière ;
etpourtant
cequi
vient d’être dit prouveévidemment
que l’élupourrait avoir ,
à larigueur ,
les199 200
de la nation contre lui.Tom. Vi. 2
Tout ce que
j’ai
dit ci-dessuspeut ,
entre autreschoses ,
con-courir à
expliquer
comment il est souventarrivé ,
dans la chambre desdéputés
deI8I4,
quel’opinion
durapporteur
de la commis-sion centrale se trouvait en
opposition
avec celle de lamajorité
decette chambre.
Supposons,
eneffet ,
une chambre de36g
membresdivisée,
commecelle-là ,
en 9bureaux ; chaque
bureau seracomposé
de
41 membres,
dont lamajorité
absolue sera 2I. Pourvu doncque , dans 5
bureaux,
21 membres soient d’un mêmeavis ,
5 membres de la commissioncentrale,
formant lamajorité
de cettecommission ,
etconséquemment
lerapporteur
nommé parelle,
par-tageront
aussi cetavis ;
l’avis durapporteur
pourra donc nerepré-
senter que celui de 5 2I=I05
membres lequel
pourra être absolumentopposé
à celui des264
membres restans , et formant parconséquent
latrès-grande majorité
de la chambre.Il est
pourtant
bien loin de mapensée
que la division d’une assemblée délibérante enbureaux,
formés par la voie du sort,et
périodiquement
renouvelés soitvicieuse ; je
laregarde
mêmecomme tout à fait
indispensable ,
sur-toutlorsque
l’assemblée estnombreuse. Elle
régularise
les conciliabulesqui
se formeraientinévitablement,
maisqui, composés
d’individus attachés aux mêmesidées,
loin de s’éclairer par le choc desopinions,
ne feraient aucontraire que s’obstiner
davantage
en faveur de cellesqu’ils
auraientd’abord embrassées.
D’ailleurs,
la division enbureaux ,
en ébauchantles
discussions ,
leur donne à la foisplus
de décence et de maturité : ellepeut
mettre deshommes ,
d’abord peu au courant des matièresauxquelles
ces discussions sontrelatives,
mieux en étatd’y prendre part;
elle
perrnet
de mettre àprofit
les lumières debeaucoup
d’hommesrecommandables qui ,
à des connaissances très - étendues et à unesprit droit,
nejoignent
pas un talent oratoiretrés-prononcé ;
enfinelle neutralise les efforts que ceux
qui
ont ce talent enpartage pourraient
tenter, dans la vue de maîtriser ceux de leurscollègues
à
qui
latactique
de la tribune est peu familière.L’espèce d’oppo-
sition
qui
peut existerquelquefois
entrel’avis
de la commissionPROBLÈMES
DEGÉOMETRIE.
11centrale et celui de la
majorité
de la chambre est d’ailleurs sans aucune sorted’inconvénient, puisqu’en
définitif c’est l’avis de cettemajorité
et non celui de la commissionqui
estadopté.
Ceci nous montre en même
temps
le remède naturel à l’incon- vénient quej’ai
montré être inhérent ausystème représentatif.
Nousvoyons que , s’il est à la fois absurde et
impraticable d’appeler
di-rectement le
peuple
à discuter et à delibérer sur une multitude de matières tout à fait hors de laportée
moyenne de son intelli- gence, c’estpourtant
sonopinion qu’il
faut en venir àconsulter, lorsqu’il s’agit d’objets majeurs
etsimples
à lafois ,
surlesquels
il peut
s’expliquer
par oui et non ; et lapuissance législative
ne doit
plus
alors se considérer à sonégard
que comme unesimple
commission centrale. C’est enparticulier
cequ’on devroit
tou-jours
faire àl’égard
des lois fondamentales de l’état.15
juin
1815.GÉOMÉTRIE ANALITIQUE.
Solution de quelques problémes ;
Par M. BRET, professeur de mathématiques à la faculté
des sciences de l’académie de Grenoble.
J’AI déjà
insistéplusieurs
fois dans ce recueil surl’avantage qu’il
peut souvent y avoir à
représenter
par deuxéquations
uneligne
droite sur un