Membres du jury
Madame le Professeur DE CASABIANCA Catherine | Présidente Monsieur le Pr GARNIER François | Directeur Madame le Professeur BRIET Marie | Membre Monsieur le Dr LAFFILHE Jean-Louis | Membre
Soutenue publiquement le :
22 octobre 2020
2019-2020
THÈSE
pour le
DIPLÔME D’ÉTAT DE DOCTEUR EN MÉDECINE Qualification en Médecine générale
Médicaments génériques : où en sont les médecins
généralistes en 2019 dans leurs prescriptions ?
BELZIC Solenn
Née le 13 décembre 1991 à La Roche sur Yon (85)
Sous la direction du Pr GARNIER François
ENGAGEMENT DE NON PLAGIAT
Je, soussignée Belzic Solenn
déclare être pleinement consciente que le plagiat de documents ou d’une partie d’un document publiée sur toutes formes de support, y compris l’internet, constitue une violation des droits d’auteur ainsi qu’une fraude caractérisée.
En conséquence, je m’engage à citer toutes les sources que j’ai utilisées pour écrire ce rapport ou mémoire.
signé par l'étudiant(e) le 28/04/2020
LISTE DES ENSEIGNANTS DE LA FACULTÉ DE SANTÉ D’ANGERS
Doyen de la Faculté : Pr Nicolas Lerolle
Vice-Doyen de la Faculté et directeur du département de pharmacie : Pr Frédéric Lagarce
Directeur du département de médecine : Pr Cédric Annweiler
PROFESSEURS DES UNIVERSITÉSABRAHAM Pierre Physiologie Médecine
ANNWEILER Cédric Gériatrie et biologie du
vieillissement Médecine
ASFAR Pierre Réanimation Médecine
AUBE Christophe Radiologie et imagerie médicale Médecine
AUGUSTO Jean-François Néphrologie Médecine
AZZOUZI Abdel Rahmène Urologie Médecine
BAUFRETON Christophe Chirurgie thoracique et
cardiovasculaire Médecine
BENOIT Jean-Pierre Pharmacotechnie Pharmacie
BEYDON Laurent Anesthésiologie-réanimation Médecine
BIGOT Pierre Urologie Médecine
BONNEAU Dominique Génétique Médecine
BOUCHARA Jean-Philippe Parasitologie et mycologie Médecine
BOUVARD Béatrice Rhumatologie Médecine
BOURSIER Jérôme Gastroentérologie ; hépatologie Médecine
BRIET Marie Pharmacologie Médecine
CAILLIEZ Eric Médecine générale Médecine
CALES Paul Gastroentérologe ; hépatologie Médecine CAMPONE Mario Cancérologie ; radiothérapie Médecine CAROLI-BOSC François-xavier Gastroentérologie ; hépatologie Médecine CHAPPARD Daniel Cytologie, embryologie et
cytogénétique Médecine
CONNAN Laurent Médecine générale Médecine
COUTANT Régis Pédiatrie Médecine
CUSTAUD Marc-Antoine Physiologie Médecine
DE CASABIANCA Catherine Médecine Générale Médecine DESCAMPS Philippe Gynécologie-obstétrique Médecine D’ESCATHA Alexis Médecine et santé au Travail Médecine DINOMAIS Mickaël Médecine physique et de
réadaptation Médecine
DIQUET Bertrand Pharmacologie Médecine
DUBEE Vincent Maladies Infectieuses et
Tropicales Médecine
DUCANCELLE Alexandra Bactériologie-virologie ; hygiène
hospitalière Médecine
DUVAL Olivier Chimie thérapeutique Pharmacie
DUVERGER Philippe Pédopsychiatrie Médecine
EVEILLARD Mathieu Bactériologie-virologie Pharmacie FAURE Sébastien Pharmacologie physiologie Pharmacie
FOURNIER Henri-Dominique Anatomie Médecine
FURBER Alain Cardiologie Médecine
GAGNADOUX Frédéric Pneumologie Médecine
GARNIER François Médecine générale Médecine
GASCOIN Géraldine Pédiatrie Médecine
GOHIER Bénédicte Psychiatrie d'adultes Médecine GUARDIOLA Philippe Hématologie ; transfusion Médecine
GUILET David Chimie analytique Pharmacie
HAMY Antoine Chirurgie générale Médecine
HENNI Samir Chirurgie Vasculaire, médecine
vasculaire Médecine
HUNAULT-BERGER Mathilde Hématologie ; transfusion Médecine IFRAH Norbert Hématologie ; transfusion Médecine
JEANNIN Pascale Immunologie Médecine
KEMPF Marie Bactériologie-virologie ; hygiène
hospitalière Médecine
LACCOURREYE Laurent Oto-rhino-laryngologie Médecine
LAGARCE Frédéric Biopharmacie Pharmacie
LARCHER Gérald Biochimie et biologie moléculaires Pharmacie LASOCKI Sigismond
LEGENDRE Guillaume Anesthésiologie-réanimation
Gynécologie-obstétrique Médecine Médecine
LEGRAND Erick Rhumatologie Médecine
LERMITE Emilie Chirurgie générale Médecine
LEROLLE Nicolas Médecine Intensive-Réanimation Médecine LUNEL-FABIANI Françoise Bactériologie-virologie ; hygiène
hospitalière Médecine
MARCHAIS Véronique Bactériologie-virologie Pharmacie
MARTIN Ludovic Dermato-vénéréologie Médecine
MAY-PANLOUP Pascale Biologie et médecine du développement et De la reproduction
Médecine
MENEI Philippe Neurochirurgie Médecine
MERCAT Alain Réanimation Médecine
MERCIER Philippe Anatomie Médecine
PAPON Nicolas Parasitologie et mycologie
médicale Pharmacie
PASSIRANI Catherine Chimie générale Pharmacie
PELLIER Isabelle Pédiatrie Médecine
PETIT Audrey Médecine et Santé au Travail Médecine PICQUET Jean Chirurgie vasculaire ; médecine
vasculaire Médecine
PODEVIN Guillaume Chirurgie infantile Médecine
PROCACCIO Vincent Génétique Médecine
PRUNIER Delphine Biochimie et Biologie Moléculaire Médecine
PRUNIER Fabrice Cardiologie Médecine REYNIER Pascal Biochimie et biologie moléculaire Médecine RICHARD Isabelle Médecine physique et de
réadaptation Médecine
RICHOMME Pascal Pharmacognosie Pharmacie
RODIEN Patrice Endocrinologie, diabète et
maladies métaboliques Médecine ROQUELAURE Yves Médecine et santé au travail Médecine ROUGE-MAILLART Clotilde Médecine légale et droit de la
santé Médecine
ROUSSEAU Audrey Anatomie et cytologie
pathologiques Médecine
ROUSSEAU Pascal Chirurgie plastique,
reconstructrice et esthétique Médecine ROUSSELET Marie-Christine Anatomie et cytologie
pathologiques Médecine
ROY Pierre-Marie Thérapeutique Médecine
SAULNIER Patrick Biophysique et biostatistique Pharmacie
SERAPHIN Denis Chimie organique Pharmacie
TRZEPIZUR Wojciech Pneumologie Médecine
UGO Valérie Hématologie ; transfusion Médecine
URBAN Thierry Pneumologie Médecine
VAN BOGAERT Patrick Pédiatrie Médecine
VENIER-JULIENNE Marie-Claire Pharmacotechnie Pharmacie
VERNY Christophe Neurologie Médecine
WILLOTEAUX Serge Radiologie et imagerie médicale Médecine
MAÎTRES DE CONFÉRENCES
ANGOULVANT Cécile Médecine Générale Médecine
BAGLIN Isabelle Chimie thérapeutique Pharmacie
BASTIAT Guillaume Biophysique et biostatistique Pharmacie
BEAUVILLAIN Céline Immunologie Médecine
BELIZNA Cristina Médecine interne Médecine
BELLANGER William Médecine générale Médecine
BELONCLE François Réanimation Médecine
BENOIT Jacqueline Pharmacologie Pharmacie
BIERE Loïc Cardiologie Médecine
BLANCHET Odile Hématologie ; transfusion Médecine
BOISARD Séverine Chimie analytique Pharmacie
CAPITAIN Olivier Cancérologie ; radiothérapie Médecine
CASSEREAU Julien Neurologie Médecine
CHAO DE LA BARCA Juan-Manuel Médecine
CHEVALIER Sylvie Biologie cellulaire Médecine CLERE Nicolas Pharmacologie / physiologie Pharmacie
COLIN Estelle Génétique Médecine
DERBRE Séverine Pharmacognosie Pharmacie
DESHAYES Caroline Bactériologie virologie Pharmacie
FERRE Marc Biologie moléculaire Médecine
FORTRAT Jacques-Olivier Physiologie Médecine
HAMEL Jean-François Biostatistiques, informatique médicale Médicale HELESBEUX Jean-Jacques Chimie organique Pharmacie
HINDRE François Biophysique Médecine
KHIATI Salim Biochimie et biologie moléculaire Médecine JOUSSET-THULLIER Nathalie Médecine légale et droit de la santé Médecine JUDALET-ILLAND Ghislaine Médecine Générale Médecine KUN-DARBOIS Daniel Chirurgie Maxillo-Faciale et
Stomatologie Médecine
LACOEUILLE Franck Biophysique et médecine nucléaire Médecine
LEBDAI Souhil Urologie Médecine
LANDREAU Anne Botanique/ Mycologie Pharmacie
LEBDAI Souhil Urologie Médecine
LEGEAY Samuel Pharmacocinétique Pharmacie
LE RAY-RICHOMME Anne-
Marie Pharmacognosie Pharmacie
LEPELTIER Elise Chimie générale Pharmacie
LETOURNEL Franck Biologie cellulaire Médecine
LIBOUBAN Hélène Histologie Médecine
LUQUE PAZ Damien Hématologie; Transfusion Médecine MABILLEAU Guillaume Histologie, embryologie et
cytogénétique Médecine
MALLET Sabine Chimie Analytique Pharmacie
MAROT Agnès Parasitologie et mycologie médicale Pharmacie
MESLIER Nicole Physiologie Médecine
MOUILLIE Jean-Marc Philosophie Médecine
NAIL BILLAUD Sandrine Immunologie Pharmacie
PAILHORIES Hélène Bactériologie-virologie Médecine
PAPON Xavier Anatomie Médecine
PASCO-PAPON Anne Radiologie et imagerie médicale Médecine
PECH Brigitte Pharmacotechnie Pharmacie
PENCHAUD Anne-Laurence Sociologie Médecine
PIHET Marc Parasitologie et mycologie Médecine
PY Thibaut Médecine Générale Médecine
RAMOND-ROQUIN Aline Médecine Générale Médecine
RINEAU Emmanuel Anesthésiologie réanimation Médecine
RIOU Jérémie Biostatistiques Pharmacie
ROGER Emilie Pharmacotechnie Pharmacie
SAVARY Camille Pharmacologie-Toxicologie Pharmacie
SCHMITT Françoise Chirurgie infantile Médecine
SCHINKOWITZ Andréas Pharmacognosie Pharmacie
SPIESSER-ROBELET
Laurence Pharmacie Clinique et Education
Thérapeutique Pharmacie
TANGUY-SCHMIDT Aline TESSIER-CAZENEUVE Christine
Hématologie ; transfusion
Médecine Générale Médecine
Médecine
VENARA Aurélien Chirurgie générale Médecine
VIAULT Guillaume Chimie organique Pharmacie
PROFESSEURS EMERITES
Philippe MERCIER Neurochirurgie Médecine
Dominique CHABASSE Parasitologie et Médecine Tropicale Médecine
Jean-François SUBRA Néphrologie Médecine
AUTRES ENSEIGNANTS
AUTRET Erwan Anglais Médecine
BARBEROUSSE Michel Informatique Médecine
BRUNOIS-DEBU Isabelle Anglais Pharmacie
CHIKH Yamina Économie-Gestion Médecine
FISBACH Martine Anglais Médecine
O’SULLIVAN Kayleigh Anglais Médecine
Mise à jour au 09/12/2019
REME RC IEM ENTS
A Monsieur le Professeur François GARNIER, pour m’avoir accompagnée tout au long de ce travail. Merci pour votre disponibilité et vos précieux conseils.
A Madame le Professeur Catherine DE CASABIANCA, pour me faire l’honneur de présider mon jury de thèse et d’évaluer mon travail.
A Madame le Professeur Marie BRIET et Monsieur le Docteur Jean-Louis LAFFILHE, pour l’intérêt porté à ce travail en me faisant l’honneur de participer à ce jury.
Aux différents maîtres de stages et praticiens hospitaliers rencontrés, pour leur enseignement et leur accompagnement durant mon internat. Une mention toute particulière pour Gisèle, Sophie et Pascal, mes trois maîtres de stage Prat, avec qui l’envie de faire de la médecine générale est apparue comme encore plus concrète et passionnante.
A mes parents, pour leur soutien inconditionnel pendant ces dix longues années.
Un grand merci à vous deux pour votre confiance et vos encouragements. Merci aussi Maman pour la relecture attentive et la chasse aux fautes d’orthographe ! A mes grands-parents et à ma tante, qui même s’ils ne peuvent être là aujourd’hui, veillent sur moi de là-haut j’en suis sûre.
A Raphaël, pour ta patience, ton optimiste et ta bienveillance. Que cette année 2020 soit pour nous le début d’un nouveau chapitre de notre belle histoire.
A Emeline, pour la relecture de cette thèse avec l’œil du pharmacien, mais aussi et surtout, pour ces longues années d’amitié sans faille. Entre les TP malheureux de chimie, les délires PMS et les joyeuses soirées à la coloc, que de beaux souvenirs avec toi ! Merci pour tout !
A David et ses meufs, Aurélie, Céline, Clémentine, Elise, Laura et Mélanie.
Toutes ces heures à la cafèt ou à la BU à refaire le monde, les soirées, les voyages, les cours de sport … mais aussi le soutien mutuel que nous avons pu nous apporter pendant ces années d’externat ont contribué à nous souder. A la suite de notre amitié !
A Marianne, Ludivine et Marine, en souvenir de nos karaokés en gériatrie, et aux belles rencontres pendant ces trois ans d’internat.
A Marie Christine, pour l’apprentissage de la rigueur, à la danse comme dans la vie.
A Alain, pour ta bienveillance et ta disponibilité. Le simple fait de prendre rendez- vous avec toi me faisait tout de suite sentir moins malade … Tu restes un vrai modèle du médecin de famille auquel j’aimerai tant ressembler.
A Mme R., Mme D., Mr S., le couple K. et le petit A., patients parmi d’autres, mais qui par leurs histoires ou leurs paroles, m’ont touchée d’une façon toute particulière. Merci j’en suis sûre, d’avoir déjà fait de moi un meilleur médecin.
Liste des abréviations
CPAM Caisse Primaire d’Assurance Maladie AMM Autorisation de Mise sur le Marché CCP Certificat Complémentaire de Protection
ANSM Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé AFSSAPS Agence Française de Sécurité Sanitaire et des Produits de Santé CNAMTS Caisse Nationale de l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés DCI Dénomination Commune Internationale
TFR Tarif Forfaitaire de Responsabilité
PLFSS Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale NS Non Substituable
CSS Code de la Sécurité Sociale
CESP Comité Economique des Produits de Santé PFHT Prix Fabricant Hors Taxe
EMA European Medicines Agency ECG Electrocardiogramme NDMA N-nitrosoDiMéthylAmine NDEA N-nitrosoDiEthylAmine
SASPAS Stage Ambulatoire en Soins Primaires en Autonomie Supervisée ROSP Rémunération sur Objectifs de Santé Publique
AVC Accident Vasculaire Cérébral
IEC Inhibiteur de l’Enzyme de Conversion HbA1C Hémoglobine glyquée
MTE Marge thérapeutique étroite EFG Generic Pharmaceutical Equivalent CIF Contre-Indication Formelle
CSP Code de la Santé Publique
OCDE Organisation de Coopération et de Développement Economique
Plan
RESUME
INTRODUCTION GENERALITES 1. Définition
1.1. Définition pharmacologique 1.2. Définition administrative
1.3. Fabrication des médicaments génériques et modalités de contrôle 1.3.1. Rappel sur les étapes de développement d’un médicament
1.3.2. Quand les génériques prennent le relai 2. Historique
2.1. Quelques dates clés 2.2. Législation
2.2.1. Médicaments soumis au TFR
2.2.2. Evolution 2019-2020 pour les médicaments non soumis au TFR 3. Assurance Maladie et économie de la santé
3.1. Assurance Maladie et médecins 3.2. Assurance Maladie et pharmaciens 3.3. Qui fixe le prix des médicaments ? 4. Ce qui fait débat
4.1. Représentations négatives des patients sur les médicaments génériques 4.2. Contextes d’utilisation de la mention « non substituable » par les médecins 4.3. Affaires sanitaires autour des génériques
MÉTHODES
1. Schéma de l’étude
2. Elaboration du questionnaire 3. Recrutement des participants 4. Recueil des données
RÉSULTATS
1. Difficultés rencontrées par les médecins 1.1. Le comportement des patients
1.2. L’usage de la DCI 1.3. Les médias
1.4. Le manque de temps
1.5. La qualité des médicaments génériques 2. Autres acteurs impliqués
2.1. Le pharmacien
2.2. La CPAM
3. Connaissances des médecins généralistes autour des médicaments génériques
3.1. Législation
3.2. La fabrication des médicaments génériques
3.3. La délivrance des médicaments génériques
3.4. La question de la formation
4. Comportement des médecins généralistes face à une demande de « non substituable »
4.1. Sentiments ressentis
4.2. Adaptation selon le patient en face 4.3. Arguments économiques
4.4. Arguments législatifs 4.5. Essai du générique 4.6. Explications scientifiques 4.7. Utilisation de la DCI
5. Pistes d’amélioration envisageables 5.1. L’éducation du patient
5.2. Evolutions législatives
5.3. La vérification de la qualité des médicaments génériques DISCUSSION
1. Sur la méthode 1.1. Les biais
2. Sur les résultats
2.1. Comparaison entre princeps et génériques dans la littérature 2.1.1. Tolérance et effets indésirables
2.1.2. Effets sur l’observance
2.2. Que penser des difficultés à argumenter des médecins ?
2.2.1. Représentations des médecins généralistes sur les médicaments génériques 2.2.2. Relations avec le patient et capacité à lui dire non
2.3. Relations médecins-pharmaciens
2.3.1. Nouvelles modalités de substitution depuis le 1/01/2020 2.3.2. Frontières entre les professions de médecin et de pharmacien 2.3.3. Perception des pharmaciens par les médecins généralistes 2.3.4. Coopération médecins-pharmaciens
2.4. Stratégie de promotion des médicaments génériques dans d’autres pays BIBLIOGRAPHIE
LISTE DES FIGURES
LISTE DES TABLEAUX
TABLE DES MATIERES
ANNEXES
RESUME
Introduction : Suite à l’introduction en France des médicaments génériques depuis maintenant une vingtaine d’années, leur intérêt apparaît comme majeur en terme d’économie sur le coût de la santé. Néanmoins, notre pays semble toujours en retard par rapport à ses voisins européens. L’objectif de cette étude était donc de s’intéresser aux pratiques actuelles des médecins généralistes face aux médicaments génériques.
Méthodes : Etude qualitative réalisée par le biais de onze entretiens individuels semi-dirigés, auprès de médecins généralistes mayennais en cours d’exercice.
Résultats : A travers l’échantillon étudié, la plupart des médecins souligne que le sujet des médicaments génériques reste un sujet pouvant les mettre en difficulté, notamment face à des patients avec des représentations défensives très fortes, où toute argumentation apparaît difficile. Ce point est aussi accentué par des connaissances variables parmi les praticiens, concernant notamment les modes de fabrication et de délivrance des traitements. La totalité des médecins prescrit des médicaments génériques, avec cependant des nuances à apporter en fonction bien sûr de la tolérance, mais surtout de l’adaptation face à un patient donné. Ce travail de négociation apparaît également comme le reflet de la relation entre le médecin et son patient.
Conclusion : Une place toute particulière concerne l’éducation du patient, que ce soit par le médecin, mais également en coopération avec d’autres professionnels de santé, et notamment le pharmacien, expert dans le domaine médicamenteux. Associé aux récentes évolutions législatives très attendues par le corps médical, le but in fine reste de trouver un juste équilibre entre propriétés pharmacologiques du traitement et coût de santé publique.
INTRODUCTION
« Docteur, pouvez-vous ajouter « non substituable » à côté du Coaprovel® ? Je préfère ne pas prendre le médicament générique ». Cette phrase, entendue à plusieurs reprises en cabinet libéral, paraissait intéressante pour se demander où en étaient les médecins généralistes dans leurs pratiques par rapport aux médicaments génériques, vingt-trois ans après l’introduction de ces derniers en France (1).
Le bénéfice de l’utilisation des médicaments génériques apparaît comme concret en matière d’économie.
En 2016, 1.2 milliard d’euros ont par exemple été économisés (2). Malgré différentes mesures mises en place par l’Assurance Maladie, la France apparaît toujours en retard dans la prescription de médicaments génériques par rapport à ses voisins européens. En effet, en 2018, 36% des médicaments remboursés par la CPAM sont des médicaments génériques. A noter que ce pourcentage est de 80% en Allemagne et 83% au Royaume Uni (3). La mention « non substituable » était quant à elle retrouvée sur 8.6% des ordonnances en France en 2016 (4).
Les années 2019 et 2020 apparaissent comme charnières dans l’évolution de la politique de santé. En effet, un grand nombre de brevets pharmaceutiques tombent actuellement dans le domaine public. Parallèlement, l’Assurance Maladie vient d’acter le fait de moins bien rembourser les patients qui refuseront les médicaments génériques (5).
Dans ce contexte, l’objectif principal de cette thèse est de dégager les processus décisionnels des médecins généralistes prescripteurs les plus courants actuellement. Ce travail peut s’articuler autour de plusieurs questions : quels sont les principaux comportements des médecins généralistes concernant les médicaments génériques ? L’opinion des médecins généralistes concernant les médicaments génériques a-t-elle évolué au fil des ans ? Comment leurs pratiques s’en sont-elles ressenties ?
GENERALITES
1. Définition
Un médicament générique est conçu à partir de la molécule active d’un médicament déjà autorisé (princeps), dont le brevet est désormais tombé dans le domaine public (6).
1.1. Définition pharmacologique
Un médicament est composé de deux grandes parties : le principe (ou substance) actif et les excipients.
Le principe actif est le composant responsable de l’effet thérapeutique souhaité. Le médicament générique doit avoir la même composition qualitative et quantitative en principe actif, la même voie d’absorption que le princeps et démontrer qu’il a la même efficacité thérapeutique (même biodisponibilité). Les excipients sont toutes les substances présentes dans un médicament, autres que le principe actif. Par opposition, ils n’ont aucun effet pharmacologique recherché. Le rôle des excipients est de faire parvenir le principe actif dans l’organisme à l’endroit où il doit agir. Ils ont un rôle dans l’absorption et la stabilité du médicament, ainsi que dans sa mise en forme. Les excipients sont donc présents dans tous les médicaments, qu’il s’agisse des médicaments princeps ou génériques.
Certains excipients sont dits "à effets notoires" car ils présentent un risque accru de mauvaise tolérance chez des patients sensibles. L’aspartam, par exemple, est une source de phénylalanine ; il est donc contre-indiqué chez les personnes souffrant de phénylcétonurie. La présence des excipients à effets notoires est indiquée dans la notice et sur la boîte du médicament (princeps et générique). Les informations sur les excipients de tous les médicaments commercialisés en France sont consultables sur la base de données publiques des médicaments, accessible aux professionnels de santé comme aux particuliers.
Tableau I : extrait de la base de données publiques des spécialités pharmaceutiques et des excipients à effets notoires
1.2. Définition administrative
Un médicament princeps est développé et expérimenté sur une période de dix ans. Cette période est ensuite clôturée par l’obtention d’une AMM (Autorisation de Mise sur le Marché), décidée par une autorité compétente, européenne (Commission Européenne, après avis de l’Agence Européenne du Médicament) ou nationale (Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé).
Une fois l’AMM validée, cette dernière permet l’utilisation du médicament, ainsi que la protection des études ayant servi au développement du médicament. La durée de protection administrative dépend de la date de dépôt du dossier princeps : dix ans en France pour les dossiers déposés avant le 30/10/2005, huit ans pour les dossiers déposés après cette date en France ou dans les autres pays membres de l’UE, voire parfois jusqu’à quinze ans dans les cas de Certificat Complémentaire de Protection (CCP) à partir de la première AMM délivrée dans l’Union Européenne.
A la fin de cette période, le laboratoire peut déposer auprès de l’ANSM une demande d’AMM pour un médicament générique. L’ANSM évalue le dossier de demande et autorise la mise sur le marché. Le laboratoire détenteur de l’autorisation ne pourra le commercialiser qu’à la date de fin du brevet. A la date d’échéance du brevet, et donc à la date de retombée du brevet dans le domaine public, le médicament générique autorisé par l’ANSM peut alors être commercialisé par le laboratoire.
Figure 1 : cycle de vie administratif du médicament princeps et du médicament générique
1.3. Fabrication des médicaments génériques et modalités de contrôle
1.3.1. Rappel sur les étapes de développement d’un médicament
Il y a tout d’abord une partie préclinique, consistant en l’étude des effets du médicament sur des cellules en culture (in vitro) et sur des animaux (in vivo). Cette étape permet aussi d’estimer la dose à administrer à l’homme, à partir de la dose sans effet toxique chez l’animal, convertie en équivalent-homme. Il s’agit des données pharmacologiques, pharmacocinétiques et toxicologiques du produit.
La deuxième partie ou phase clinique permet, elle, d’étudier le médicament chez l’homme. On y évalue sa cinétique dans le corps, sa toxicité, la dose minimale efficace avec peu ou pas d’effets indésirables. On évalue ensuite l’efficacité du traitement sur des cohortes de patients plus larges, avec des comparaisons par rapport à un traitement de référence ou à un placebo. Le médicament est alors mis sur le marché, avec fixation de son prix et du taux de remboursement en fonction du service médical rendu. La dernière étape permet de suivre l’utilisation du médicament en conditions de vie réelles, afin de détecter les effets indésirables rares ou les complications tardives ; il s’agit de la pharmacovigilance, qui dure pendant toute la durée de commercialisation du médicament (7).
1.3.2. Quand les génériques prennent le relai
Comme vu précédemment, un laboratoire peut donc faire une demande d’AMM pour un médicament générique, une fois la période de protection administrative terminée. Il existe plusieurs modalités de contrôle à partir de cette étape (8).
• Evaluation :
Le laboratoire demandeur doit alors fournir un dossier pharmaceutique comprenant divers éléments, concernant la qualité du médicament (origine des matières premières des excipients, méthodes de fabrication, contrôle du produit fini), la reproductibilité de cette qualité d’un lot à l’autre (validation des méthodes de fabrication et de contrôle), le maintien de cette qualité (études de stabilité), ainsi que la similarité du médicament générique au médicament d’origine. Les études précliniques et cliniques ne sont pas exigées car le principe actif a déjà fait l’objet de ces études lors de la demande d’AMM du médicament d’origine. L'absence d'étude doit toujours être justifiée dans le dossier de demande d'AMM générique. Les preuves de l’efficacité et de la sécurité du médicament générique sont apportées dans le dossier biopharmaceutique par les données de biodisponibilité.
La biodisponibilité décrit comment un principe actif devient disponible dans l’organisme pour produire son action thérapeutique. Elle est caractérisée par des données de pharmacocinétique, à savoir la quantité de principe actif disponible (qui atteint le sang) et la vitesse de ce processus. Ainsi, pour les médicaments génériques, il faut démontrer que la biodisponibilité du médicament générique est équivalente à celle du médicament de référence.
On parle alors de bioéquivalence. Deux paramètres sont alors pris en compte :
- L’aire sous la courbe des concentrations en fonction du temps, qui permet d’estimer l’étendue de l’absorption ;
- La concentration maximale (Cmax), mesurée en temps (Tmax), qui permet d’évaluer la vitesse à laquelle le principe actif se retrouve dans l’organisme.
Pour conclure à la bioéquivalence entre les deux médicaments, l’intervalle de confiance du ratio médicament Générique / Princeps doit être entièrement compris dans l’intervalle [80 % ; 125 %]. Cet intervalle de [80 % ; 125 %] a été défini au niveau international, en considérant qu’une variation du ratio des moyennes jusqu’à 20 % n’a que peu de conséquences cliniques (efficacité/sécurité). Pour les médicaments à marge thérapeutique étroite (concentrations toxiques proches des concentrations efficaces), de faibles variations de dose ou de concentration peuvent être à l’origine d’importantes différences d’efficacité ou de tolérance. C’est pourquoi, pour ces médicaments, l’intervalle d’acceptabilité de la bioéquivalence est resserré à [90 % ; 111 %].
• Inspection
Cette évaluation peut être complétée par une inspection, notamment en cas de doute sur l’exactitude des données. Il existe différents niveaux d’inspection pour les médicaments, dont les médicaments génériques, tous basés sur la législation européenne du médicament : inspection de fabrication (inspection des fabricants, inspection des importateurs de substances actives et d’excipients, concernant les matières premières puis le médicament fini), inspection des essais cliniques (inspection des essais de bioéquivalence) et inspection des activités de pharmacovigilance.
Si le résultat de l’inspection n’est pas satisfaisant, l’ANSM peut utiliser des injonctions afin de procéder à une régularisation de situation dans un délai donné, décider de suspendre une activité ou un produit, ou appliquer des sanctions financières.
Figure 2 : une chaîne d’inspection internationale pour s’assurer de la qualité des médicaments
• Contrôle :
Les médicaments génériques sont aussi soumis à des contrôles, réalisés par les laboratoires de l’ANSM, permettant d’apporter une expertise technique et scientifique indépendante sur la qualité et la sécurité d’emploi des produits de santé. Ces contrôles comparent le médicament générique avec le médicament de référence (princeps) et un même groupe générique. Il existe un programme de contrôle annuel mis en place en France depuis 1999.
2. Historique
2.1. Quelques dates clés
- 1994 : évocation par le premier ministre E. Balladur de l’utilisation préférentielle des médicaments génériques par souci d’économie. Deux grands laboratoires français, Rhône-Poulenc et Roussel-Uclaf, annoncent la création de départements génériques en 1994 (9).
- -1997 : Jacques Barrot, ministre de la Santé, signe un nouveau décret sur les médicaments génériques, et y introduit la définition médicale en droit français : « tout médicament, comportant un même principe actif, une même présentation et un même dosage, sera jugé générique s’il est démontré qu’il est bioéquivalent, expression qui signifie pour le patient qu’en ingurgitant un produit générique, il est assuré que l’effet du principe actif sur l’organisme est strictement le même qu’avec la molécule originale »
- -1998 : création du Répertoire des groupes génériques, initialement géré par l’AFSSAPS, puis par l’ANSM.
- -1999 : Un droit de substitution entre spécialité prescrite et spécialité appartenant au même groupe générique est conféré aux pharmaciens. Toutefois, la substitution n’est possible que si le médecin ne l’a pas exclue expressément par l’apposition de la mention « non substituable », et qu’elle entraîne une économie pour l’Assurance Maladie. Le décret n° 99-486 du 11 juin 1999 précise les conditions d’application de ce dispositif (10) : la mention doit être portée de manière manuscrite sur l'ordonnance, avant la dénomination de la spécialité prescrite (11).
- 2002 : signature d’un accord entre les médecins et la CNAMTS (Caisse Nationale de l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés). Cet accord permet la revalorisation du prix de consultation de médecine générale (passant alors de 18,50 € à 20 €), en échange de quoi les médecins s’engagent à prescrire 25%
de leurs ordonnances en DCI et à réduire leur nombre de visites.
- 2012 : dispositif « Tiers payant contre génériques » (12), consistant à réserver le tiers payant (pas d’avance de frais par le patient) aux assurés qui acceptent la délivrance de médicaments génériques. Si un patient refuse que son pharmacien substitue le médicament de marque indiqué sur son ordonnance par un médicament générique, le patient ne bénéficie plus du tiers payant, ni même de la transmission électronique de la feuille de soins. Il doit alors faire l'avance des frais. Le pharmacien établi une feuille de soins papier pour les médicaments pour lesquels la substitution a été refusée. Le patient doit alors l’adresser, accompagnée du double de l'ordonnance, à sa caisse d'Assurance Maladie pour se faire rembourser, dans un délai plus long. À noter que sont exclues du dispositif les molécules dites sensibles telles la L-thyroxine ou les anti-épileptiques, ainsi que les médicaments soumis au TFR.
- 1e janvier 2015 : obligation de prescription en DCI.
- 2020 : le médicament de marque sera désormais remboursé uniquement sur la base du tarif du générique (13).
2.2. Législation
2.2.1. Médicaments soumis au TFR
Le principe de remboursement sur la base du médicament générique évoqué précédemment existe déjà pour les médicaments soumis au TFR, le Tarif Forfaitaire de Responsabilité (14). Ce dispositif concerne aujourd'hui environ 2 600 spécialités (sur un peu plus de 14 000 spécialités remboursables) (15). Le patient peut donc refuser le générique, en préférant le médicament « de marque », mais sera alors remboursé uniquement sur la base du
TFR. Dans ce cas, et donc uniquement pour les médicaments soumis au TFR, le patient n’est pas obligé d’avancer les frais, le tiers payant ne peut être refusé. Il pourra cependant avoir une différence à payer même si, en pratique, le prix du médicament princeps s’aligne le plus souvent sur le TFR.
Exemple : médicament de marque coûte 10 € et dispose d'un TFR égal à 8 € : si le patient refuse que le pharmacien délivre un médicament générique, le tiers payant peut s’appliquer mais uniquement sur la base des 8€ du TFR. Les 2€ restant sont à la charge du patient.
2.2.2. Evolution 2019-2020 pour les médicaments non soumis au TFR
Adopté par l’Assemblée Nationale le 3/12/18, l’exposé des motifs de l’article 43 du projet de loi de financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) pour 2019 formulait clairement le contexte : le recours aux médicaments génériques est encore relativement limité en France, en dépit de l'enjeu essentiel qu'ils constituent pour notre système de santé (garanties en termes d'approvisionnement et de lutte contre la pénurie de médicaments, concurrence efficiente entre laboratoires pharmaceutiques, opportunité d'accès à l'innovation thérapeutique, absence de justification pour l’Assurance Maladie à rembourser plus cher un soin qui n’apporte aucun bénéfice supplémentaire) (16).
En décembre 2018, le taux de substitution est de 89,4 %, soit 0,5 point de plus qu’en décembre 2017.
Sur l’ensemble de l’année 2018, le taux moyen constaté est de 88,4 %. Le ralentissement de la progression de la substitution indique que l’on se rapproche du niveau maximal que peuvent atteindre les officines. Ainsi, en neutralisant le taux de recours à la mention « non substituable (NS) », évalué à 7,7% en 2018 sur le répertoire des génériques, on serait à un taux de substitution moyen en 2018 de 96,1%. Le levier principal de progression de la substitution n’est donc plus l’officine, mais se trouve plutôt dans la réduction du recours à la mention « NS » (17).
3. Assurance Maladie et économie de la santé 3.1. Assurance Maladie et médecins
Le CSS rappelle dans l’article L162-2 que « le respect de la liberté d’exercice et de l’indépendance professionnelle et morale des médecins est assurée conformément aux principes déontologiques fondamentaux que sont le libre choix du médecin par le malade, la liberté de prescription du médecin, le secret professionnel, le paiement direct des honoraires par le malade et la liberté d’installation du médecin » (18).
Le CSS et la convention médicale de 2016 s’accordent pour dire que les prescriptions du médecin doivent se faire dans « la plus stricte économie compatible avec la qualité, la sécurité et l’efficacité des soins » (19).
3.2. Assurance Maladie et pharmaciens
Le CSS (article L162-16-1), ainsi que la convention nationale des pharmaciens de 2012, définissent les rapports entre les organismes d’Assurance Maladie et les pharmaciens titulaires d’officine, avec des points concernant notamment les honoraires de dispensation et les possibilités de substitution (20).
On retrouve dans le CSS une partie traitant d’économie, que tout pharmacien se doit de respecter. En effet, lors de la dispensation d’un traitement, le pharmacien est soumis à la même politique de maîtrise des coûts de santé que le médecin prescripteur. Le CSS précise ainsi que « la délivrance de cette spécialité ne doit pas entraîner une dépense supplémentaire pour l’Assurance Maladie supérieure à la dépense qu’aurait entrainée la délivrance de la spécialité générique la plus chère du même groupe » (18).
Les objectifs de délivrance de spécialités génériques par les pharmaciens sont décrits précisément dans l’article L162-16-7 du Code de la Sécurité Sociale (18). Ces objectifs sont fixés de façon annuelle. Quand un patient accepte que le pharmacien lui délivre un médicament générique, il est alors dispensé de l’avance de frais, c’est le dispositif « tiers payant contre générique ». Ceci est valable en dehors des groupes soumis au tarif forfaitaire de responsabilité ou lorsque des génériques sont commercialisés dans le groupe dont le prix est supérieur ou égal à celui du princeps. Une autre exception est également prévue : s’il existe une mise en danger du patient pouvant être occasionnée par la substitution.
3.3. Qui fixe le prix des médicaments ?
En France, c’est le Comité Economique des Produits de Santé (CEPS), qui fixe le prix des médicaments remboursés par la CPAM. Cet organisme est composé de différents acteurs qui, après avis de la Commission de Transparence, vont négocier avec l’industriel le prix du médicament qu’il souhaite commercialiser (21).
Concernant les médicaments génériques, le PFHT (Prix Fabricant Hors Taxes) équivaut à 60% du prix de la molécule princeps. Le prix de la spécialité commerciale est ensuite secondairement diminué de 20%, lors de la commercialisation de sa forme générique. Après 18 mois d’exploitation, le CEPS peut alors décider entre deux options : soit la mise en place du TFR (Tarif Forfaitaire de Responsabilité) avec un remboursement sur la base du prix du médicament générique concernant un groupe générique donné, ou alors la baisse du prix du princeps (- 12.5%) ainsi que du générique (-7%) (22).
4. Ce qui fait débat
4.1. Représentations négatives des patients sur les médicaments génériques
D’après la thèse de N. Duriez sur l’évaluation de l’acceptation des médicaments génériques par les patients de médecine générale, on peut retrouver cinq grands motifs de refus des médicaments génériques par les patients (23) :
- Peur de la survenue d’effets indésirables
- Pensent qu’ils sont moins efficaces que les princeps
- Ne veulent pas entendre parler des médicaments génériques - Déconseillés par leur médecin traitant
- Différence (goût, forme, couleur, …) trop importante par rapport au princeps
4.2. Contextes d’utilisation de la mention « non substituable » par les médecins
D’après une thèse de médecine générale datant de 2017, on peut trouver différents cas d’utilisation de la mention « non substituable » par les médecins (24) :
- Sur demande du patient
- Pour certains médicaments spécifiques, notamment les antiépileptiques et les hormones thyroïdiennes - En raison d’effets indésirables
- Argument économique peu recevable par les patients - Risque de confusion
- Différence de galénique
- Prescription préalable de la molécule princeps par un spécialiste
On retrouve également la notion de surveillance et contrôles des prescriptions par la CPAM. Ils peuvent être perçus comme des processus coûteux en argent et en temps, qui pourraient avoir pour but de décourager les médecins à toute forme de contestation. Dans le contexte de pénurie médicale actuelle, la crainte est que les jeunes médecins puissent bouder l’installation et l’exercice libéral au profil d’autres modes d’exercice (25).
4.3. Affaires sanitaires autour des génériques
Plusieurs affaires sanitaires récentes ont pu mettre à mal la confiance des usagers envers les génériques.
En août 2015, l’Europe décide par exemple de suspendre 700 médicaments génériques testés par la société GVK Biosciences à Hyderabad en Inde, suite à des irrégularités constatées lors d’une inspection française l’année précédente (26). L’EMA (Agence Européenne du Médicament) reproche à la société indienne d’avoir fourni des renseignements incorrects lors des études de bioéquivalence. En effet, l’inspection préalable avait alors révélé des « manipulations de données d’électrocardiogramme » entre 2008 et 2013 (27). Même si les ECG ne constituent pas une donnée essentielle pour la démonstration de la bioéquivalence, ce procédé ne respecte pas les bonnes pratiques. Cela suscite donc des doutes concernant l’authenticité de tous les autres dossiers cliniques.
Cette affaire soulève des questions, entre autres celle de savoir pour quelles raisons l’Inde devient un pays qui attire de plus en plus les promoteurs des essais cliniques ? Avec près de 16% de la population mondiale, une grande diversité ethnique et près d’une maladie sur cinq recensée sur la planète, l’Inde est idéale pour tester un grand nombre de molécules. Seuls 2,7% des essais cliniques y sont effectués, mais ce chiffre a progressé de 3,7% depuis 2007, alors qu’il a chuté aux Etats-Unis et en Europe. Avec le déplacement massif de la production des matières premières, le véritable motif d’inquiétude pharmaceutique est peut-être là.
Autre affaire datant elle de 2018, où l’ANSM appelle dans un communiqué les patients sous Valsartan à consulter leur médecin en vue de changer de traitement, dans la perspective d’une probable rupture de stock liée à un rappel de lot majeur. En effet, deux impuretés potentiellement cancérigènes (le NDMA et le NDEA) sont découvertes dans des médicaments génériques, dont la matière première était fabriquée en Chine (28). Malgré les rappels et investigations occasionnés, l’ANSM précise que « la présence potentielle de NDMA et NDEA n’induit pas de risque aigu pour la santé des patients ». Les laboratoires commercialisant des médicaments à base de sartans non concernés par ce défaut de qualité sont invités à intensifier leur production (29).
MÉTHODES
1. Schéma de l’étude
L’objectif principal de cette étude était donc de dégager les processus décisionnels les plus courants retrouvés en médecine générale concernant les médicaments génériques.
Ce travail permettait de répertorier les principales difficultés rencontrées par les médecins autour des médicaments génériques, ainsi que les autres acteurs qu’ils estimaient impliqués. On peut aussi y trouver un état des lieux sur la connaissance des prescripteurs en la matière, et leur comportement lors d’une consultation où les médicaments génériques sont évoqués. Enfin, quelques pistes d’amélioration ont pu être évoquées, afin notamment de réduire les difficultés rencontrées.
Il s’agissait donc d’une étude qualitative, réalisée par le biais d’entretiens individuels semi dirigés, destinés à des médecins généralistes en activité.
2. Elaboration du questionnaire
Le guide d’entretien a été élaboré à l’aide de données de littérature et d’hypothèses sous-jacentes.
Les recherches ont débuté sur Google, avec l’utilisation de mots clés tels « opinion médecins médicaments génériques », « perception médecins médicaments génériques », « connaissances médecins médicaments génériques », « freins médecins prescription génériques ». D’autres références ont pu être trouvées via PubMed, Google Scholar ou Cismef. L’élaboration de la bibliographie a été faite à l’aide du logiciel Zotero.
La première partie du questionnaire regroupait le sexe, l’âge, les lieux et la durée d’exercice des différents praticiens. Puis une question ouverte demandant au médecin de raconter une consultation concernant les médicaments génériques lui venant en tête, avant de cibler les connaissances et le ressenti des médecins interrogés par d’autres questions ouvertes.
3. Recrutement des participants
Le recrutement des participants devait donc concerner des médecins généralistes en cours d’exercice.
Ayant pu réaliser un stage ambulatoire de niveau 1 puis de niveau 2 (SASPAS) en Mayenne lors de mon internat, je me suis d’abord mise en relation avec mes anciens maîtres de stage, puis par effet « boule de neige », avec d’autres médecins exerçant dans les mêmes cabinets. La demande de participation aux entretiens a été faite par téléphone ou par mail. Les entretiens ont été menés jusqu’à saturation des données. L’échantillon final regroupait 11 médecins généralistes, de 33 à 73 ans, avec une moyenne d’âge de 53 ans. Le ratio homme/femme était de 5 femmes pour 6 hommes. 4 des médecins interviewés exerçaient en milieu urbain et 7 en milieu rural ou semi rural.
4. Recueil des données
Le recueil des données a eu lieu dans les cabinets respectifs des médecins interrogés, entre février et mai 2019. Les entretiens étaient menés par moi-même et enregistrés à l’aide de deux enregistreurs vocaux différents, après signature des médecins volontaires d’un consentement écrit. Les entretiens duraient en moyenne vingt minutes, avec une amplitude allant de quatorze minutes pour le plus court à trente minutes pour le plus long. La retranscription a ensuite été faite sur le logiciel de traitement de texte Word, de façon anonyme, en numérotant les entretiens de 1 à 11. Le codage des verbatims en code, sous thèmes et thèmes a ensuite été réalisé avec le logiciel Excel, au fur et à mesure des entretiens.
RÉSULTATS
1. Difficultés rencontrées par les médecins 1.1. Le comportement des patients
Ce point revient pour la totalité des médecins interrogés, avec pour la très grande majorité des problèmes de compréhension et de personnalité des patients.
En termes de personnalité, le mot « borné » revient dans plusieurs entretiens : «il y en a qui sont tellement bornés là-dessus » (entretien 2), « Mais quand ils sont bornés, ils sont bornés ... Vraiment ! C’est difficile de les faire changer d’avis » (entretien 3). Un autre aspect de personnalité évoqué et pouvant rendre une prescription de médicaments génériques difficile concerne les patients suspicieux, notamment par rapport au prix, souvent perçu comme un gage de qualité : « c’est le côté un peu suspicieux... « s’il est moins cher, c’est qu’il doit être fabriqué avec des composants bas de gamme » (entretien 2), « Ils ne veulent pas de médicaments moins chers, ce n’est pas un gage de qualité pour eux » (entretien 5).
La moitié des médecins interrogés rapporte un sentiment de baisse de confiance envers le discours du médecin, en faveur d’autres intervenants, qu’ils soient du monde médical : « on a encore des paramédicaux … avec qui on travaille pourtant … qui expliquent aux gens que les génériques, ce n’est pas bien » (entretien 5) ou d’autres domaines : « On est souvent remis en question … Beaucoup plus qu’avant !! » (entretien 2), « Ils parlent quand même plus de Jean Pierre Pernaut que de Michel Cymes ...Même si lui il fait du grand public pour la santé, Jean Pierre Pernaut a plus de poids que Michel Cymes » (entretien 3). Certains évoquent même la peur de la dégradation de la relation médecin-patient : « je cède facilement à leur demande pour ne pas avoir d’histoires » (entretien 1), « quand on est en ville, les gens, si on a une pratique qui ne leur va pas, ils vont voir un autre médecin » (entretien 5).
Une autre difficulté à la prescription de médicaments génériques mise en avant est la question de la tolérance et des allergies : « des sujets qui ont fait une réaction de type allergique, une intolérance … bah on est obligé d’admettre qu’il vaut mieux rester avec la molécule princeps » (entretien 1), avec toute la difficulté à objectiver la plainte du patient : « difficile de savoir si c’est une réaction psychologique ou une vraie réaction à certains excipients » (entretien 2), « comment vérifier ? On les croit … » (entretien 5).
Le problème de compréhension est lui aussi fortement évoqué, avec notamment une confusion entre le nom du médicament et du laboratoire, pouvant entraîner plusieurs prises d’un même traitement : « Pour eux, le
médicament, c’est Mylan, c’est Biogaran … » (entretien 2), « On s’est aperçu que cette petite dame prenait trois fois du Ramipril dans la journée … Parce qu’elle prenait du Biogaran, elle prenait du Biogalenic et encore une autre marque de générique » (entretien 6).
1.2. L’usage de la DCI
Malgré l’obligation de prescrire en DCI depuis 2015, cette notion est aussi évoquée comme une difficulté, avec notamment un apprentissage en noms commerciaux pour une partie des médecins interrogés : « j’ai toujours mes habitudes de prescription … Les noms commerciaux, moi j’ai appris comme ça » (entretien 4), la complexité de certaines DCI : « c’est long, je prends par exemple la pilule qui est génériquée, je ne vais pas m’amuser à mettre désoxymachinchose ... » (entretien 7), mais aussi la difficulté à retenir deux noms différents pour un même traitement. Une minorité souligne également le fait de revenir en arrière sur des prescriptions princeps anciennes : « j’ai succédé à un médecin qui n’était pas persuadé de l’efficacité des génériques. Donc ce n’était pas évident … toutes les ordonnances étaient « non substituables » en entier » (entretien 5).
1.3. Les médias
Ils sont également incriminés chez la plupart des médecins interrogés, avec un rôle plutôt ressenti comme négatif : « Les médias, ça nous sape…Les émissions aussi » (entretien 1), donnant ainsi une image assez négative du monde pharmaceutique : « Les médias sont en général assez hostiles à tout ce qui est pharmaceutique ... » (entretien 10). Les affaires médiatisées à type de scandales sanitaires sont aussi évoquées, décrites comme entretenant le doute sur les génériques : « Plus tous les problèmes qui ont été médiatisés depuis ces dernières années … qui à mon avis ne sont pas non plus très positifs » (entretien 8), « Il y a eu des affaires médiatisées aussi […] par exemple les Sartans, oui, quand même ! » (entretien 9).
1.4. Le manque de temps
La plupart des médecins interrogés évoquent également le manque de temps pour des explications ou négociations concernant les génériques : « là où c’est compliqué, c’est quand on n’a pas le temps, c’est le soir quand on est fatigué et que ça nous saoule d’expliquer » (entretien 2), « il y a bien presque un tiers des cas où je sens que je ne vais pas les convaincre … Et après, je ne vais pas y passer une demi-heure parce que dans une journée, ce n’est pas possible quoi ! » (Entretien 11)
1.5. La qualité des médicaments génériques
Il s’agit d’un point faisant débat et pouvant amener le médecin prescripteur à douter du bien-fondé de leur utilisation. Plusieurs praticiens mettent en évidence une différence d’effet constatée entre médicament princeps et générique : « quand je prends le zolmitriptan, j’ai des migraines, qui ne passent pas ... Et quand je prends le Zomig®, c’est très bien… » (entretien 3), « (à propos du Physiotens®) : "dès qu’il a été génériqué, toutes les tensions ont été déstabilisées" (entretien 7). L’avis de spécialistes ou la lecture d’articles scientifiques peuvent aussi amener les médecins généralistes à douter de l’efficacité des médicaments génériques : « quand la Dépakine® a été génériquée, bah très vite les neurologues nous ont fait comprendre qu’il ne fallait pas prescrire le générique … Mais ça remet en cause tout le principe des génériques ! » (entretien 7), « J’ai lu une étude récemment qui comparait différents médicaments […] Et bien apparemment, il y aurait plus de tentatives de suicides avec les molécules génériques qu’avec les anti dépresseurs princeps » (entretien 10).
Certains évoquent également leur incompréhension par rapport aux ruptures de stock : « Valsartan, il est en rupture, on se retrouve à remettre du Tareg® … » (entretien 2). Une autre incompréhension est mise en avant, celle sur le prix, qu’il s’agisse de la différence entre deux génériques : « Moi je ne comprends pas pourquoi un médicament générique coûte plus cher à fabriquer qu’un autre » (entretien 3), ou parfois avec des médicaments génériques plus chers que les princeps : « […] des génériques qui sont plus chers que le princeps.
Donc là moi, en tant que citoyen et en tant que médecin, je ne comprends rien » (entretien 8).
2. Autres acteurs impliqués 2.1. Le pharmacien
Son rôle et son implication sont évoqués dans la totalité des entretiens. Les échanges entre médecins et pharmaciens à propos des médicaments génériques sont variables.
Certains évoquent une absence totale d'échanges : « Non, non […] pas d’échanges directs avec le pharmacien » (entretien 9), ou d’autres se sentant comme intermédiaires entre le patient désireux d’un médicament princeps et le pharmacien l’ayant refusé : « c’est plutôt les patients, qui eux après me disent « le pharmacien n’a pas voulu me donner » ou « il m’a fait payer cette boîte-là » (entretien 3).
Quelques médecins évoquent eux une discussion préalable avec le pharmacien sur la conduite à tenir :
« on en a parlé avec la pharmacie en disant « non, non, il faut leur dire que la délivrance du médicament commercial est possible mais que les patients doivent payer » (entretien 5), « je dis au pharmacien « tant pis, vous mettez le générique » … voilà, c’était entendu comme ça entre nous … » (entretien 11).
Plusieurs praticiens interviewés soulignent le fait que le pharmacien n’a de toute façon pas le choix que de substituer : « ils sont un peu plus intransigeants maintenant au niveau de la pharmacie, ils ne tergiversent plus » (entretien 2).
Le rôle du pharmacien est considéré comme primordial dans la majorité des cas concernant l’information sur les médicaments génériques. Plusieurs médecins interrogés semblent même avoir tendance à trouver que le débat sur les médicaments génériques est plus une affaire pharmacien-patient que médecin-patient : « après tout ce n’est pas mon travail de chercher l’autre nom, la pharmacie verra » (entretien 4), « mais moi, je dirai le problème des génériques, ce n’est pas notre problème ! C’est le problème des pharmaciens ! » (entretien 7).
Cela met aussi parfois en exergue des avis négatifs sur le partage de compétences entre médecins et pharmaciens : « il y a une espèce de mélange des genres … cette histoire de compétences … Il y a encore dix ans, les choses étaient claires, le médecin prescrivait, le pharmacien respectait la prescription du médecin » (entretien 8), « On veut justement donner plein de rôles au pharmacien en ce moment, les angines, les cystites, les machins … On ferait mieux de leur donner ce rôle-là sur l’explication des médicaments, ce sur quoi ils sont bien formés » (entretien 10).
2.2. La CPAM
L’allusion à la CPAM revient également à de nombreuses reprises lorsque l’on cite les autres acteurs impliqués sur les médicaments génériques. La moitié des médecins évoquent l’aspect économique de la santé :
« L’intérêt économique, il est majeur, c’est évident…surtout pour des médicaments qui valent très cher » (entretien 1), « quand on voit les conseillers de la Caisse, on sent bien que voilà ... il y a aussi cette volonté globalement de prescrire de plus en plus de génériques pour faire des économies » (entretien 8). Une notion de
« surveillance » est soulignée : « le délégué à l’Assurance Maladie, il essaye de nous faire une espèce de pression sur les coûts » (entretien 6), « Quand on n’en mettait pas assez […] nous on avait un rappel de la Sécu … Donc là, on faisait un peu plus attention » (entretien 7). Il en découle la notion de « récompense » financière, notamment en termes de ROSP en cas de prescription suffisante de médicaments génériques : « avec le ROSP … Plus on prescrit de génériques, plus on a des sous. Donc bon … par la force des choses, on s’y met ! » (entretien 7). Il se dégage pour certains entretiens un sentiment d’opposition entre efficacité et coût de la santé : « c’est l’opposition économique et scientifique » (entretien 4), avec notamment des doutes sur la pertinence scientifique des délégués de la CPAM : « on ne va pas me dire que le délégué de la caisse il est formé en chimie, qu’il va pouvoir m’expliquer en long en large le mécanisme » (entretien 4).
3. Connaissances des médecins généralistes autour des médicaments génériques
3.1. Législation
Une première partie se dégage, en termes de connaissances des médecins généralistes sur la législation autour des médicaments génériques.
L’usage justifié obligatoire de la mention « non substituable » sur les ordonnances est connu par certains d’entre eux : « j’avais lu un truc sinon où on devait justifier médicalement pour noter non substituable » (entretien 3). Il semble cependant que l’obligation de justification médicale apparaît comme plutôt floue pour la plupart des praticiens interrogés : « c’est vrai que je ne précise pas sur l’ordonnance pour raison médicale … Normalement, je crois qu’il faut le noter ? Il me semble … C’est ça ? (sourire)» (entretien 2), « Euh … je n’en ai jamais vraiment entendu parler, pas que ce soit obligatoire en tout cas … » (entretien 9).
De même, l’usage de la DCI n’est pas le même pour tous : « je ne sais même pas quelle obligation on a de prescrire en DCI » (entretien 3).
Par ailleurs, plusieurs médecins avaient, lors des interviews, entendu parler du projet de diminution du remboursement pour les patients refusant les génériques : « je crois que c’est en discussion de rembourser sur le médicament le moins cher » (entretien 7).
3.2. La fabrication des médicaments génériques
Certains mettent en avant le fait qu’un même laboratoire puisse fabriquer son propre générique, gage d’équivalence entre princeps et générique : « le laboratoire fabrique lui-même son générique donc en fait, c’est le même » (entretien 1). A contrario, le fait qu’un même médicament soit fabriqué dans des laboratoires différents peut poser question : « Moi ça m’intrigue, un labo sort un truc, et puis c’est un autre labo qui reprend ... ça fonctionne comment concrètement ? » (entretien 4). Ce doute sur l’équivalence stricte est d’autant plus important avec la fabrication de médicaments à l’étranger, notamment concernant les contrôles et les normes de qualité :
« La fabrication en Chine ... Bon … voilà quoi, on n’a pas les mêmes normes de qualité je pense ! (sourire) » (entretien 10).
Plusieurs médecins pointent l’absence de nouvelles études concernant les médicaments génériques :
« J’ai entendu récemment, le nouveau labo, il ne refait pas toute l’étude clinique » (entretien 4). Cela semble pour certains d’entre eux être matière à scepticisme sur la bioéquivalence stricte : « Le périndopril est le
générique du Coversy®l … sauf que le Coversyl®, on a du cinq et du dix milligrammes. Le périndopril, c’est du quatre et du huit ! Elle est où la bioéquivalence là ? » (entretien 7).
La plupart des généralistes sont d’accord sur le fait que les différences peuvent venir du conditionnement : « il y a certains traitements qui ont des goûts, qui ont des disponibilités différentes lorsqu’ils sont en génériques ou pas » (entretien 6), donc des excipients : « Je pense que les différences majeures concernant les excipients ... » (entretien 11).
Le sentiment général semble être un manque de connaissances de la part des médecins sur les procédés de fabrication et les coûts engendrés : « on ne connaît pas bien le détail, les circuits, les modes de fabrication » (entretien 10).
3.3. La délivrance des médicaments génériques
Cette partie est également plus ou moins connue des médecins interviewés. La plupart s’accorde à dire que seuls les médicaments à marge thérapeutique étroite sont à ne pas substituer : « Si vraiment j’écris « non substituable », c’est qu’il ne faut pas substituer pour des cas particuliers … genre Levothyrox®, certains produits à visée neurologique, les antiépileptiques, et cetera » (entretien 11). Quelques-uns reconnaissent ne pas connaître les coûts des médicaments : « dans certains cas, le coût de la boîte de médicaments … je ne le connais même pas » (entretien 8). Dans ce même registre financier, certains évoquent spontanément le principe du
« tiers payant contre générique » : « c’est le principe du tiers payant contre générique. Les patients peuvent refuser le générique mais ils n’ont pas le tiers payant » (entretien 5).
La délivrance se faisant à l’officine, il est intéressant de voir quelles connaissances ont les médecins sur les obligations du pharmacien : « il a plus pour mission de délivrer des génériques » (entretien 8). La moitié des médecins interrogés soulève également un aspect « commercial » du pharmacien, qui va travailler selon eux avec tel ou tel laboratoire selon les avantages économiques : « le pharmacien va privilégier tel ou tel labo selon ses avantages » (entretien 1), « Les pharmaciens, ce sont des commerçants. A partir du moment où ils ont tel labo qui leur fait des prix … Et puis après, un autre labo de générique qui fait mieux, où le pharmacien gagne plus de sous … bah il va changer ! » (entretien 7). Plusieurs médecins semblent déplorer ces changements de laboratoire et donc potentiels changements de formule du médicament : « on peut voir au dos des ordonnances quel médicament de quel labo ont eu les gens ... mais est-ce que c’est toujours le même ? » (entretien 7).
3.4. La question de la formation
La plupart se décrit comme insuffisamment informée. La communication, à l’instauration et lors du développement des médicaments génériques, semble ne pas avoir été suffisante à leurs yeux : « On n’a pas été vraiment formés … On cherche nous même à droite à gauche … On n’a jamais eu d’infos très claires là-dessus » (entretien 2), « Au début, quand les génériques sont arrivés, on avait peu d’infos, on a continué à prescrire en noms commerciaux » (entretien 7). Plusieurs médecins soulignent le fait de devoir rechercher des informations par eux-mêmes : « c’est vrai que moi j’étais abonné à pas mal de revues médicales … le Quotidien du Médecin, le Généraliste, la Revue du Prat … donc c’est là que j’ai pu lire des articles, en allant chercher des arguments ou explications par moi-même » (entretien 11). La majorité aspire d’ailleurs à une meilleure formation, notamment pour faciliter l’argumentation auprès des patients réfractaires : « je suis toujours intéressé pour avoir plus d’informations. Ne serait-ce pour expliquer aux patients » (entretien 5). Des explications sur les excipients et les mécanismes d’allergie semblent aussi être souhaitées : « Je voudrais bien comprendre comment c’est susceptible d’agir, le mécanisme de la réaction avec l’excipient ... De comprendre vraiment les réactions, si ça peut être véridique ou pas, de savoir pourquoi un patient ne peut pas le supporter » (entretien 4).
On retrouve par ailleurs, principalement chez les jeunes médecins, peu ou pas de remise en question concernant les médicaments génériques : « Nous, on a appris l’Evidence Based Medecine, je ne vais pas remettre en question l’intérêt du générique. Je ne me verrai pas pour moi-même prendre autre chose que des génériques » (entretien 3).
4. Comportement des médecins généralistes face à une demande de « non substituable »
4.1. Sentiments ressentis
De façon quasi unanime, le sentiment de résignation semble dominer les discours : « maintenant, je ne lutte plus ! Ils me demandent, je note « non substituable » et voilà … Pas le temps, pas l’envie … » (entretien 7).
Le sentiment d’énervement est lui aussi prédominant : « Quand ça arrive en dernier, que vous avez déjà passé plein de temps à éplucher plein de problèmes, c’est assez énervant » (entretien 1), avec un sentiment d’opposition entre économie de la santé et qualité de soins : « ça fait partie des tracasseries qu’on peut avoir par ces autorités de tutelles qui sont enclins à nous embêter sur des problèmes économiques plutôt qu’à nous demander de faire de la qualité de soins » (entretien 6).