ÉTUDE DES LACTICODÉSHYDROGÉNASES PLASMATIQUE
ET HÉPATIQUE CHEZ L’OIE
AU COURS D’UNE STÉATOSE PROVOQUÉE PAR GAVAGE
Odette IVOREC-SZYLIT M. SZYLIT M
me FENDRY MM. ROUSSELOT, MORIN MONACHON
* Station de Reehevches Avicoles,
Centre national de Recherches
zootechniques,
78 -Jouy-en-Josas
Institut national de la Recherche
agronomique
** Laboratoire de
Biologie Physico-çhimique,
Faculté des Sciences, 91 -
Orsay
SOMMAIRE
On étudie l’évolution chez l’Oie, des
lacticodéshydrogénases hépatique (F-LDH)
etplasma- tique (S-LDH)
au cours d’une stéatoseprovoquée
par 3semaines de gavage etaprès l’interruption
de ce dernier à différents stades.
L’analyse quantitative (activité totale)
etqualitative (proportion
relative desiso-enzymes)
montre que l’excès d’activité de la S-LDH
provient principalement
de la LDH du foie. Lesexpé-
riences
d’interruption
de gavage confirment cette relation etsuggèrent
une évolution des mécanismes de libération de la F-LDH au cours du gavage.L’évolution de la S-LDH est discontinue : accroissement
rapide
les 8premiers jours, régression puis
stabilisation oulégère augmentation jusqu’au
zre et dernierjour
de gavage.L’accroissement de la
perméabilité
cellulaire del’hépatocyte,
mesuré par l’élévation du taux de la LDHplasmatique
semble être lapremière réponse
au gavage,bien
avantl’apparition
de toutes manifestationshistologiques.
En fin de gavage, l’activité S-LDH serait une mesure de l’altération cellulaire.INTRODUCTION
La stéatose
hépatique
de l’Oieprovoquée
par une alimentation forcée est carac-térisée par une
perturbation importante
du métabolisme deslipides
et deshydrates
de carbone
(FORENBACHER, 19 6 7 ).
Nous avons peu derenseignements
sur l’évolution des enzymes de la cellulehépatique. Cependant,
desexpériences préliminaires (S ZYL IT
et
I V O R EC-Sz YLIT , ig6 7 ; S ZYII T,
Z;!c!,!xe etIvo RE C-Sz Y i<iT, 1968 )
ont montré enfin de gavage un accroissement
important
de l’activité deslacticodéshydrooénases
duplasma
et du tissuhépatique.
L’étude
de cet enzyme estparticulièrement
intéressante car laI,DH joue
un rôleessentiel
dansl’utilisation
desréserves énergétiques
par la voieglycolytique
et inter-vient
dans les processusgluconéogéniques.
Cet enzymeexiste
sous 5 formes molé- culaires différentes(iso-enzymes) (M ARK E R T
etM OLL E R , 1959 )
enproportions
variablessuivant les tissus considérés. Ces
proportions
dans le sérum sont relativementstables quand
l’activitémétabolique
des différents tissus del’organisme
est normale. Lors-qu’il
y a une altération del’intégrité
cellulaire ou de l’activitésynthétique
d’unorgane, la concentration de la S-LDH est accrue et sa
composition,
modifiée defaçon spécifique,
tend à serapprocher
de celle del’enzyme
de cet organe.Ceci,
enparti- culier,
est vérifié chez l’Homme dans certaines manifestationspathologiques
dutractus
hépatobiliaire (Wxos!;!wsxr
etG R EG ORY , 19 6 1 ). L’étude quantitative
etqualitative
de laS-1,DH permet
donc depréciser l’organe
lésé etl’importance
dudommage.
C’est dans cet
esprit
que nous avonssuivi
l’évolution des LDHhépatique
etplasmatique,
d’unepart
au cours d’une stéatoseprovoquée
par gavage, d’autrepart après interruption
de cette dernière àdifférents stades.
MATÉRIELS
ETMÉTHODES
r. Animaux et conditions de nutrition
L’expérience
estpoursuivie
sur 29oies de race Landaise,âgées de mois, réparties
en 3 lotsA, B et C. Les animaux des deux
premiers
groupes servent de témoins. Le lot A groupe 4 animaux nourris ad libitum avec un alimentcomposé
à base de céréales et d’herbe fraîche. Les autres animauxsont
prégavés pendant
dixjours
avec unrégime
enrichi de 50 p. 100de farine de viande,puis reçoivent
l’aliment de
gavage (maïs bouilli).
Les 4animaux du lot B sont nourris ad liôitum ; les zx animaux du lot C sontgavés
à raison de 1300 g d’aliment en moyenne par animal et parjour,
distribués en 3fois. Ce dernier lot est subdivisé en 3groupes :-
Sept
oies sontgavées
normalementpendant
21jours.
-
Sept
sont abattues en cours de gavage au bout de 4et rrjours.
- enfin, le gavage du dernier groupe
(oies
«dégavées »)
estinterrompu après
7, 14et 21jours
et le même
régime
est distribué ad libitum.2
. Prélèvements et
préparations
des échantillonsLe sang est recueilli sur
anticoagulant (citrate
de sodium à 3,8 p. ioo) par desprises de 5 ml
à laveine alaire. Ces
prélèvements
ont lieu deuxfois par
semaine entre 8 et rr heures. Lesplasmas
sontconservés à
4 °C après
avoir écarté les échantillonshémolysés.
Les animaux sont sacrifiés à
jeun
parsaignée.
Le foie et lepancréas
sont immédiatementpré-
levés et
congelés.
Les échantillonsanalysés
de foieproviennent
tous du milieu dupetit
lobe. Le foieest
broyé (broyeur Ultra-Turrax)
à raison de 16 ml de sérumphysiologique
refroidi par gramme de matière fraîche etcentrifugé
20 mn à 14000o g. Leslipides qui
se regroupent à la surface sont éli- minés. Le culot estbroyé
à nouveau 2foispuis rejeté après
une heure decentrifugation.
Les 3sur-nageants sont réunis et on mesure immédiatement l’activité de la
LDH,
la concentration en pro- téines solubles et en acidelactique.
3 . Dosages
Le
dosage spectrophotométrique
de la LDH suivant latechnique
de KUBOWITZ-OTT( 1943 )
aété décrit par ailleurs
(S Z Y LIT
et IvoREc-SZYLIT,19 67) ;
on suit la vitessed’oxydation
de NADH enNAD
+à 3!.o mp, à
pH
7,6 et à25 o C.
Lacinétique
est d’ordre opendant
les 3premières
minutes. Onvérifie que l’activité mesurée est bien
proportionnelle
au volume de l’échantillon : dans le cas dusérum, celui-ci est
compris
entre 5et 50microlitres suivant que l’animal estgavé
ou non. Les homo- génats de foie sont dilués dans une solution tamponphosphate
0,1M àpH 7 ,6
defaçon
à obtenirune variation de densité
optique
de l’ordre de o,05parminute,
pour un volume total de 2,3 ml. En absence de pyruvateexogène,
iln’y
a pasd’oxydation parasite
de NADH.L’activité est
exprimée
en unités internationales :quantité
de LDHqui
réduit une micromolede pyruvate par minute, dans les conditions de
dosage.
Les résultats sontexprimés
en unités inter-nationales par
>1
deplasma
et par foie entier. Lesprotéines
solubles sont estimées par la méthode de WARBURG et CHRISTIAN( 1941 ).
Ledosage
de l’acidelactique
adéjà
été décrit(IVOREC-SZYLIT
et SZYLIT,I96g).
Les
ultracentrifugations analytiques
sont effectuées à 20°C en milieu chlorure de sodium 0, 154
M pour les extraits de foie et en milieu tampon
phosphate
7,6 pour les sérums.L’électropho-
rèse sur
gel d’acrylamide
est conduite suivant une microméthode mise aupoint
par l’un d’entre nous(S ZYLIT
, 19 68).
Lamigration
s’effectuependant
40 mn à7 °C
dans un tampon Tris-EDTA-acideborique
àpH
9,1 sous une différence depotentiel
de 300 volts. Lesprotéines
sont colorées par le Bleu de Comassie suivant CHRAMBACH( 19 6 7 ),
et les zones à activité LDH sontrepérées
in situ parune suite de réactions
d’oxydo-réductions spécifiques
de cet enzyme(D EWE Y
et CONKLIN,19 6 0 ).
Le terme final de ces réactions est un
composé
insoluble et fortement coloré.RÉSULTATS
1
. Résultats
zootechniques
La consommation est contrôlée
chaque jour
pour les trois lots d’animaux. Les résultats sontexprimés
sur lafigure
i a. Dans le cas des animaux témoins des lots Aet
B,
les variations de la consommation moyenne sontquelconques.
Le déroulement du processus alimentaire du gavage est le suivant : la valeur de la rationquoti-
dienne croît de 600g à i 50o g
pendant
lapremière
moitié del’expérience,
reste cons-tante
puis
diminuequelque
peupendant
les derniersjours.
Le
gain
depoids
aégalement
été contrôlé au cours del’expérience. Les
résultatsgroupés
sur lafigure
ib,
montrent que lepoids
des animaux témoinsaugmente
de10p. ioo, celui des oies
gavées
de 50 p. IOO. Les foiesgavés
obtenus étaient dans l’ensemble de bonnequalité.
2
.
Vérification de la
stabilité de la S-LDH et de la F-LDHTous les sérums
composant
une série sontanalysés
le mêmejour
mais les diffé-rentes séries sont étudiées à des intervalles de
temps
variables( 2
à 5jours)
parrapport
à la date duprélèvement.
Demême,
certains foies sont conservés entiers à l’étatcongelé plus longtemps
que d’autres. Lesconséquences possibles
de cesdécalages
sur la mesure de l’activité ont été
analysées.
Les résultatsqui figurent
sur le tableau imontrent
qu’elles
sont nulles dans nos conditions de travail. Leslacticodéshydro- génases
duplasma
et du foie de l’Oie comme celles des autresespèces apparaissent
comme des enzymes très stables
(Sxorrx
etBOXER, ig& 4 ).
3
.
Étude de la lacticodéshydrogénase plasmatique
I,es
résultats d’ensemble concernant l’activitéenzymatique
des différents lots sontreprésentés
sur lafigure
2 a où sontportées
en abscisse les dates deprélève-
ment et en ordonnées les activités
correspondantes.
Onpeut
faire les observations suivantes :a)
Animaux nongavés.
On ne note aucune différence entre l’activité des lots A et B. Il s’ensuit que le
prégavage
ainsi que la nature durégime
sont sans effet sur la concentration de laS-I,DH
des oiseaux nongavés.
b)
Animauxgavés.
I,’activité
S-LDH des oiesgavées
esttoujours supérieure
à celle des oies témoins.Des différences
importantes apparaissent
dès le5 e jour, s’amplifient
et sont maxi-males 8
jours après
le début du gavage. Selon lessujets,
l’activité est 2 à 4 fois celle des témoins. Dans nos conditions deprélèvement,
le 8ejour
marque la fin d’unepremière étape
dans l’évolution de laS-LDH.
La secondeétape
est caractérisée parune baisse d’activité
plus
ou moinsimportante
suivant les animaux. On observe cette évolution pour tous les oiseauxquel
que soit le résultat final de la stéatose. Au cours de laphase finale,
l’activitéaugmente
à nouveau chez certainssujets (oie 93 o),
oureste stationnaire ou encore diminue
légèrement (oie q.go) (fig.
2b).
Les oies dont la concentration de la S-LDH croît
pendant
la3 e phase
sont cellesdont le
plasma possède
laplus grande
activitéenzymatique après
une semaine degavage. Ces variations individuelles ne sont pas aléatoires contrairement à ce que l’on observe dans le cas des
témoins,
et leursignification
en relation avecl’importance
dela stéatose au 2ie
jour
sera discutéeplus
loin.c)
Animaux «dégavés
».L’activité enzymatique
tend à revenir à son niveau normal dès que le gavage estinterrompu
et ceci d’autantplus rapidement
quel’interruption
estplus précoce (fig.
2 a et3 ). L’accroissement
de l’activité est presque totalement réversible si l’in-terruption
du gavage a lieupendant
les z5premiers jours.
Par contre, au bout de la3
e
semaine,
laréversibilité
n’estplus
totale et il faut attendre 20jours
pour que l’activité soit réduite de moitié. Cecisuggère
que l’accroissement de laS-I,DH
résulte de mécanismes différents en fin et en début de gavage.d)
La constante de MICHAELISrelative aupyruvate
mesurée entre1 ,6
et324 . IO - Ó
Mest
égale
à1 , 3 :L 0 , 10 . IO - 4
M àpH 7 ,6
et25 0 C
pour des concentrations en NADHcomprises
entre i,o7et3 , 21 - 10 - 4
M. Cette valeur resteinchangée
au cours du gavage.4
.
Étude
de laLacticodéshydrogénase
dufoie a)
Animauxgavés.
Les différences d’activité mesurées à différents niveaux du
petit
lobe ne sont passignificatives, aussi,
l’activité totale du foie est calculée ensupposant
une distribution uniforme del’enzyme.
Onprend
comme terme decomparaison
la valeur mesuréeau 2ie
jour
dans le cas des animaux témoins(3! o0o
t2 oooUI). L’activité
par gramme deprotéine ( 2 , 2 . io- 3 UI)
est du même ordre que cellemesurée
sur d’autresespèces : i,6. io- 3
UI et2 ,6. zo- 3
UIrespectivement
chez le veau(GUTT!,!R
etC!AU-
S E N
,
19 6 7 )
et le rat(ScxamDT
etal., ig66).
Les variations de laF-I,DH
en fonction dutemps
sontreprésentées
sur lafigure
4a. Sur ce mêmegraphique,
nousportons
les résultats obtenus au cours d’uneexpérience précédente (S Z Y I , I T, I,!CI,!RCQ
et IVOREC-S
ZYI , I
T, zg68).
Le gavage est caractérisé par unesynthèse importante
de cet enzymependant
les 5premiers jours, puis
l’activitéenzymatique
cessed’augmenter
alorsque la stéatose évolue
toujours (fig.
4b).
b)
Animaux «dégavés
».Après interruption
du gavage, le taux de laF-I,DH
revient à sa valeurnormale,
et très
rapidement
il devient difficile d’établir une distinction entre animaux témoins et «dégavés
»(fig.
4a). Cependant,
il n’en est pas de même en cequi
concerne lepoids
du foie
(fig.
4b)
et celui de l’animal(fig.
4c). Après interruption
du gavage au 2,ejour,
la réversibilité
partielle
dans le cas del’enzyme plasmatique,
est totale dans celui de laF-I,DH. Si,
comme nous le pensons(S Z’VII T
etIVOR!c-SZYr,I2, 19 67 ; S ZYL IT,
LeCL E RC
Q
etIvoREc-SZYLIT, i 9 68),
l’accroissement de laS-LDH
estd’origine hépa- tique,
cela reviendrait à supposer que dans certainesconditions,
l’activitésynthétique
du foie revient à son niveau normal alors que les mécanismes
responsables
de la libé-ration de la
F-!DH
dans la circulationgénérale
restentperturbés.
c)
Les variations de l’activitérapportées
au gramme de foie frais sontportées
sur lafigure
5a.d)
La constante de MICHAELIS relative aupyruvate
estégale
à1 , 15 Z L 0,13.10*!
Mà
pH 7 ,6
et25 °C.
5
.
Analyse électrophorétique de
la LDH duPlasma et
dufoie
Dans la
figure 6,
nous montrons des échantillons deplasmas
etd’homogénats
defoie
correspondant
à des oies témoins etgavées. L’analyse électrophorétique
confirmeles
résultats
obtenus par ledosage spectrophométrique :
la concentration des lactico-déshydrogénases
estsupérieure
chez l’animalgavé.
Ces enzymes ne sont pas homo-gènes :
ondistingue plusieurs
bandesrégulièrement espacées
entreelles,
que l’ondésigne
parLDH 5 , LDH 4 ... LDH I
suivant laterminologie
de WI!!,AND et Px!ID!RER(ig5 7
). I,DH b
est la fraction laplus
lente.L’enzyme
duplasma
de l’oie nongavée
renferme essentiellement lesisoenzymes
5, 4et 3.L’importance
relative de la fraction 5parrapport
à la fraction 4est variable suivantl’animal ;
ces 2isoenzymes représentent
go p. 100 de l’activité totale. A la suite du gavage, la concentration dechaque
fraction est accrue fortement et les2 bandes mineures
LDH 5
etLDH 5 apparaissent plus
nettement. Ces dernières sontdifficiles à mettre en évidence sur le cliché
photographique,
par suite de leur dilution.Enfin,
on observe unphénomène
nouveau d’ordrequalitatif :
la concentration de lafraction
4
devientsupérieure,
defaçon systématique
à celle de la fraction 5.L’enzyme
extrait du foie renferme les mêmesisoenzymes
3, q. et 5 mais la frac-tion
4
esttoujours prédominante.
A la suite du gavage, on observe un accroissement uniforme de la concentration de ces bandes et les fractions i et 2deviennent visibles.6.
Évolution
desprotéines
duPlasma
et dufoie
Le gavage est caractérisé par un faible accroissement non
significatif
de la pro- téinémie(fig. 7 ). L’analyse
parultracentrifugation
du sérum de l’oie normale montre l’existence de 3 constituantsA,
G et M. Les valeurs des coefficients de sédimentation à 20°Cextrapolées
pour une concentration nulle sontrespectivement 4 ,8-6,5
et 18.L’albumine représente 85
p. 100dumélange
et les macroconstituants 5p. 100environ(sérum
dilué 6fois).
Nous n’avons pas constaté de différence entre lesplasmas
desanimaux témoins et
gavés.
L’évolution
desprotéines hydrosolubles
du foie pour les lotsA,
B et C est indi-quée
dans lafigure 4 d
surlaquelle
on a aussireprésenté
les résultatscorrespondant
àune autre
expérience (Sz y iiT, I,!CLERCQ
etIvoRne-Szvrir, 19 68).
Cette fractionprotéique
s’accroîtrégulièrement
au cours du gavage, mais par suite de l’accumula- tionimportante
delipides,
lerapport protéines hydrosolubles/poids
frais diminue.Rapportée
au gramme de foiefrais,
la vitesse desynthèse
desprotéines (fis.
5b)
estinférieure à celle de la
F-I,DH. L’évolution
de la LDH dont la concentration cessed’augmenter
àpartir
du5 e jour
est donc différente de celle de la fractionprotéique.
Quand
le gavage estinterrompu,
le taux desprotéines hydrosolubles
redevientnormal,
suivant en cela l’évolution de laF-I,DH. L’électrophorèse permet
dedistinguer
15 à20zones
protéiques :
il ne nous a pas étépossible
d’établir des différencessignificatives
entre les
homogénats
de foie des oies normales etgavées. D’après l’ultracentrifugation analytique,
cette fraction est unmélange complexe
formé d’au moins4 constitu-
ants.
Nous avons montré
(SzvijT, LBCi<ERCQ, IvoRtc-Sz y iiT, 19 68)
que la stéatoses’accompagne
d’uneaugmentation
considérable(multiplication
par10 )
de la teneuren acide
lactique
dans le foie. On note aussi un accroissement de la teneur en ARNsoluble, plus important proportionnellement
que celui de la fractionprotéique (Szv-
LIT
, non
publié).
DISCUSSION
Rema y
gues
concernant l’évolution de la S-LDH des oies témoinsLes variations de concentration de la
S-I,DH présentent
un doubleaspect
car certainsphénomènes
évolutifs concernent non seulement tous les oiseauxgavés
dulot C mais aussi tous les oiseaux témoins des lots A et B.
Ainsi,
laS-I,DH
des oies témoins évolue defaçon parfois importante
alorsqu’apparemment,
les conditions del’expérience
sontinchangées.
Deplus,
ces variations sont aussi visibles sur la courbe deprotéinémie (fig. 7 ).
Ces fluctuations sont donc laconséquence
d’un facteurcommun à tous les animaux et reflètent des
perturbations physiologiques
d’ordregénéral.
Il est difficile de seprononcer
surl’origine
de cesfluctuations ;
WROBLEWSKI(ig6i)
en observe de similaires chez lelapin.
Certaines causes de
perturbations
sont incontrôlables : chocphysiologique
consécutif autransport,
au
changement d’habitat,
aux diverses
manipulations quotidienne,
etc.Comme l’expérience
s’est déroulée en hiver dans un bâtiment nonchauffé,
nousavons
pensé
à un effetpossible
de latempérature
ambiante. Dans lafigure
i, nouscomparons l’évolution de la
S-LDH (fig. i d)
aux variations de latempérature
moyenne
quotidienne (fig.
ic)
et à celles de la consommation d’aliments(fig.
ia).
Nous constatons que les variations aléatoires de la consommation des oies témoins
ne
peuvent
rendrecompte
duphénomène
observé. On remarque par contre, sansqu’il
soit
permis
deconclure,
que le maximum au 8ejour
et le minimum aum e jour
de lacourbe relative à
l’enzyme
suivent de 24 heures un maximum et un minimum trèsprononcé
de la courbe detempérature.
Dans cet intervalle detemps (du
8eau I2ejour)
l’accroissement du
poids
des oiseaux est ralenti(fig.
ib).
Relations entre S-LDH et F-LDH au cours du gavage
A ces fluctuations
s’ajoutent
les variations propres aux animaux du lotC,
donc consécutives au gavage.On n’attribue pas de rôle
métabolique
à lalactico-déshydrogénas!
duplasma,
considérée comme un débris cellulaire et dont la concentration est inférieure à celle des enzymes tissulaires. Dans des conditions
physiologiques normales,
la concentra- tion enS-I,DH,
relativementstable,
traduit unéquilibre
entrel’apport (diffusion
etlyse cellulaire)
et le catabolisme de cette enzyme. Nous montrons que cet étatd’équilibre
est altéré
quantitativement
etqualitativement
à la suite du gavage. D’unepart,
la concentration enS-I,DH augmente
defaçon
très nette : un microlitre deplasma
réduit4
.ro- 1
°
moles depyruvate
par minute en début de gavage et 16. Io -1° en fin de gavage.Le
premier
chiffre est du même ordre que celuirapporté
par ZIMMERMAN( 19 65) :
1,2.10-!&dquo;.
D’autrepart, l’importance
relative desisoenzymes
est modifiée :la propor-
tion de la
forme 4
est accrue.L’excès
deLDH
observé dans leplasma provient
sans contested’organes profon-
dément affectés par le gavage. La stéatose
hépatique
en est la manifestation laplus importante :
lafigure
8 montrequ’il n’y
a aucune commune mesure entre l’accroisse- ment dupoids
du foie et celui dupoids
vif de l’animal ou de celui d’un autre organe tel que lepancréas.
Onpeut
donc penser quel’enzyme plasmatique
excédentaireprovient
essentiellement du foie. Cettehypothèse
se déduit entre autre del’analyse électrophorétique comparative
de la LDH du foie et duplasma qui
montrequ’au
cours du gavage, les
diagrammes électrophorétiques
deviennent très ressemblants(fig.
6a).
D’autres faits sont en faveur de cette
hypothèse.
Nous observons une corrélation entrel’importance
de la stéatose et la concentration enS-LDH
au moins à 2étapes
du gavage, au 8e et au 2W
jour.
Lafigure
9a montre que cette concentration estd’autant
plus
élevée que lepoids
du foie estplus important.
C’est d’ailleurs chez les oies les mieuxgavées
que le taux de laS-I,DH
croît au cours de la dernière semaine alorsqu’il
reste constant pour les autres oiseaux(fig.
2b).
L’exemple
d’un animalqui
aprésenté
une réactivité anormale estparticulière-
ment
suggestif.
La stéatose était considérablementdéveloppée
àmi-gavage,
et à uneactivité
F-LDH exceptionnelle correspondait
une activitéS->!DH
trèsimportante (tabl. 2 ).
Mécanismes
possibles de
la libération de F-LDH dans la circulation Pendant les 5premiers jours
du gavage, le foie est le lieu d’une trèsgrande
activitésynthétique qui porte
sur lesprotéines solubles,
l’ARN soluble(SzYMT,
nonpublié)
etla LDH. Il s’ensuit un renforcement du
gradient
de concentration entre le milieu intracellulaire et le sangcirculant,
cequi
provoque uneaugmentation
de la vitesse de.diffusion de la
F-I,DH
del’hépatocyte
vers lapériphérie.
La localisationpresqu’exclu-
sive de cet enzyme dans le
compartiment cytoplasmique (S CHMIDT
etal., 19 66)
nepeut
que faciliter ce mouvement.Cette
augmentation
de la vitesse de diffusion doits’accompagner
àpartir
du5
e jour
d’uneperméabilité
accrue de la membrane cellulaire aux molécules deF-I,DH.
En effet,
la concentration enS-I,DH
croît brutalement sansqu’on puisse
observer delésions cellulaires à ce stade
(W YPSYKOWSKI
etB I E LIN S KY , 1967 ; LABIE, 1967)
alors.que l’activité
F-I,DH
cessed’augmenter.
Pendant la deuxième semaine de
l’expérience,
ces deux enzymes évoluentplus.
faiblement
(fig.
3et 4a)
traduisantpeut-être
l’établissement d’un nouvel étatd’équi-
libre
après
le choc dû à l’instauration du gavage. Deplus,
laquantité d’enzyme qui quitte
le foie nepeut
diminuer defaçon
notable le taux deF-I,DH.
Eneffet,
l’activitéF-LDH
totale estprès
de 300 foissupérieure
à celle de laS-IrDH
si on suppose que leplasma représente
6 p. 100 dupoids
vif de l’animal. Comme à la fin de la Ire,semaine,
l’accroissement du taux de laS-LDH
est aussi totalement reversible en fin.de 2e semaine.
Mais au cours de la
3 e semaine, apparaissent
desphénomènes
nouveauxqui
semblent
indiquer
une modification des mécanismesresponsables
de la libération de la LDH. On a vu que laS-I,DH
croît à nouveau chez certainesoies ; ainsi,
en fin degavage, les activités
S-LDH
des oies dont le foie est inférieur etsupérieur
à 600g sont dans lerapport
1,4-4. Donc à cestade,
l’activité de la S-LDHdépend
fortement del’importance
de lastéatose,
contrairement à ce que l’on observe pour l’activité de laF-I,DH (fig.
9b).
Dans cesconditions,
nous ne pensons pasqu’une simple augmenta-
tion deperméabilité
cellulairepuisse
rendrecompte
à elle seule de ces différences maisqu’elle
doits’accompagner
d’unerupture
de la membrane de certaines cellules commele laisserait supposer
l’augmentation
des transminasessériques (F ORENBACHER , ig6 7 );
c’est
justement
dans des foies trèslourds, présentant
unesurcharge graisseuse impor-
tante du
type
macro-vacuolaire que l’éclatement de la membrane cellulaire a pu être observé(LABIE, 19 6 7 ).
Les altérations du foie sont à leur maximumaprès
une4
e
semaine de gavage ; à côté d’une gravedégénérescence parenchymateuse,
il appa- raît dessymptômes
de nécrobiose et même un commencement de processus cirrho-gène (F ORENBACHER , 19 6 7 ).
Les résultats desexpériences d’interruption
de gavageau 2ie
jour
sont en accord avec cettehypothèse. L’activité
LDH du foie redevient normale bien que lepoids
del’organe
reste élevé(fig.
3b)
et sa structurespongieuse.
Par contre, le taux de la
S-I,DH
ne diminue que lentement et reste à un niveau d’autantplus
élevé que le foie estplus
lourd.D’ailleurs,
3 semainesaprès l’interrup- tion,
ce taux est encore le double de celui d’une oie nongavée (fig. 2 ). I,’activité S-LDH résiduelle, après interruption
du gavage, serait donc une mesure del’impor-
tance de l’altération cellulaire. Des observations du même ordre faites chez le rat montrent une
augmentation
de la vitesse de libération de certaines enzymes au coursde
l’étape nécrotique qui
suit ladégénérescence graisseuse
induite par la thioacéta- mide(W y R z y Kows y i
etBŒLINSKI, 1967).
Inter!rétation de
cesphénomènes
Nous avons vu que l’évolution de la F-I,DH n’est pas un
phénomène
isolé.W
YRZYKOWSKI
( 19 6 7 ),
a d’ailleurs observé uneaugmentation
du nombre descellules,
Cette intense activitéanabolique peut
être laconséquence
d’undérèglement
hormonalcomme le
suggèrent
les travaux de WEBER( 19 63),
de GOODFRŒND( 19 64)
et deB AR G
ONI
( 19 6 1 ) qui
montrent que lacortisone,
l’oestradiol et les hormonesthyroï-
diennes favorisent la
synthèse
de laF-I,DH, particulièrement
des formes 5 et q..Il est intéressant de connaître
plus précisément
le mécanisme de cette fuite extra- cellulaire et le moment où elle nepeut plus
être considérée comme une réactiond’adap-
tation
physiologique.
A côté de cas extrêmes pourlesquels
la nécrose cellulaire est unfait bien
établi,
certainsexemples
montrent que cette fuite transmembranaire appa-raît,
en absence de toutchangement histologique apparent
del’hépatocyte (SCH!T
et
al., 19 66 ;
HENLEV etal., 1959).
Le mécanisme de la
perméabilité
cellulaire est encore inconnu en cequi
concernele mouvement des grosses molécules comme la LDH
(poids
moléculaire voisin dei 3
o ooo).
La distension de la membraneprovoquée
par les inclusionslipidiques pourrait
à elle seuleexpliquer
l’accroissement réversible de laperméabilité,
soit parune
augmentation
de la surfaced’échange,
soit par une dilatation de « poresn hypo- thétiques.
Les modifications de laperméabilité
cellulairepeuvent
être induites par deschangements
de lapolarisation 4 embtahaire
créés par uneperturbation
du méta-bolisme
hydrominéral (D ELAHAVES ,
DE I,!IRIS etC ORABO E UF , 19 65)
ou encore parcertains effecteurs tels que les corticostéroïdes
(J ACEY
etScHA!!!R, ig6 7 ).
Le problème
des lésionscellulaires
liées audéveloppement
de la stéatosehépa- tique
chez l’oie reste très controversé. Tous les auteurs s’accordent pour décrire unaccroissement de la taille de
l’hépatocyte
par suite d’unesurcharge lipidique qui
réduit le
cytoplasme
à une mincepellicule périphérique
et àquelques
filets inter-vacuolaires. Certains seulement décrivent en fin de gavage
l’apparition
de lésionsdiscrètes du noyau et de la membrane
(W YRZYKOWSKV
etB IELINSKI , ig6 7 ;
MAHY etRowsorr, ig6 5 ).
Nous avons vuqu’il
suffit d’un trèspetit
nombred’hépatocytes
léséspour que l’activité de la
S-LDH
s’accroisse defaçon
considérable et c’est sans doute pour cette raison que les lésions sont difficilement détectables par les méthodes histo-logiques
usuelles.Quelle
que soitl’espèce considérée, l’interprétation
deschangements
de la LDHrend
compte
bienplus
de la nature del’organe
« lésé » que de la nature del’agent responsable
de cet étatpathologique. Ainsi,
l’irradiation gamma(H AWRY i.Ewicz
et
BLAIR, ig66),
l’administrationd’agents toxiques
tel que le tétrachlorure de carbone(W I E M
E
etDE M E ULENA E R E, 1959 ),
certaines formes de cancer(B ODANSKI
etSC
HOLL E R
, 195 6) produisent qualitativement
les mêmes effets que le gavage au niveau de laS-LDH. L’accroissement
de laperméabilité
cellulaire del’hépatocyte
mesuré par l’élévation du taux de la LDHplasmatique,
semble être lapremière réponse
augavage bien avant
l’apparition
de toutes modificationshistologiques.
Reçu pour publication en janvier ig6g.
SUMMARY
STUDY OF LACTIC DEHYDROGENASE IN PLASMA AND LIVER IN GEESE DURING STEATOSIS CAUSED BY CRAMMING
Lactic
dehydrogenases
were studied in liver(F-LDH)
andplasma (S-LDH)
in geeseduring
stea-tosis
produced by cramming
for 3weekscontinuously
or afterinterruption
at different stages.During
the first 5days
ofcramming
there was extensivesynthesis
of F-LDH(fig. 4 )
whichconcerned
equally
theisoenzymes
4,5 and
3 ; fraction 4was the greatest(fig. 6).
Concentration of S-LDH increased
during cramming (fig. 2 ).
Threephases
were seen in thisdevelopment : rapid
increase from the fifthday
and maximum concentration at theeighth ;
a smalldecrease
during
the secondweek ;
stabilization or another small increaseduring
the third week.Concentrations on the
eighth
andtwenty-first days
were greater when livers were heavier at 21days (fig. 9 A).
The increase wasessentially
inisoenzyme
4so that aftercramming
theelectrophoretic diagrams
became very similar. Thequalitative and quantitative changes in S-LDH can be interpreted
as
resulting
from liberation of F-LDH into thegeneral
blood circulation.If
cramming
wasstopped during
the first rdays
F-LDH and S-LDH activitiesrapidly
returnedto their normal values. On the other hand, at the end of
cramming only
F-LDH returned to normal(fig. 4 )
and S-LDH continued todepend
on thedegree
of stetatosis(fig. 3 ).
The results suggest a
change
in the mechanism of release of F-LDH :following
a reversibleincrease in membrane
permeability,
at the end ofcramming
there maypossibly
be cellular lesions.The causes of this intense metabolic
activity
and the mechanismsresponsible
for the movement ofF-LDH are discussed. Increase in
permeability
of the liver cells, measuredby
the increase in S-LDH,seems to be the first response to
cramming,
even before the appearance of anyhistological
modifica-tions. At the end of
cramming activity
of S-LDH would be a measure ofchanges
in cells.RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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