ÉTUDE PRÉLIMINAIRE DE LA PHASE ASCENDANTE DE LA COURBE DE LACTATION DES BREBIS TRAITES
J.-A. IZQUIERDO
PRIMOJ.-C.
FLAMANT G. RICORDEAUStation de
Génétique quantitative et appliquée,
Centre national de Recheyches
zootechniques,
78 -Jouy-en-Josas
Institut national de la Recherche
agronomique
SOMMAIRE
Sur un troupeau de brebis de race pure
Préalpes
et croisées Frisonnes(F,
et 3/4F)
on a étudié lestade
d’apparition
du maximum de la lactation.Les distributions de
fréquence
de cette variable sont trèsdissymétriques
et la transformationlogarithmique
ne permet pas unajustement
à la loi normale. Cetajustement
est réalisé enpartie
avec une transformation racine carrée. La
dissymétrie
constatéepourrait
doncprovenir
du fait que la semained’apparition
du maximum, variable boinée inférieurement à o mais nonsupérieurement, s’applique
à un événement de faibleprobabilité.
Une autreexplication possible, s’appuyant
sur lescaractéristiques
des courbes de descente du lait au cours de la traite, n’est pas vérifiable avec l’en- semble de nos données.Les
principaux
facteurs de variation observés sont le numéro de lactation et la race, les animauxen deuxième lactation et les animaux croisés ayant un maximum de lactation
plus précoce. Après
correction pour le numéro de lactation, la corrélation entre la durée de la
phase
ascendante et le niveau deproduction,
calculée pourchaque
race, reste faible etnégative.
INTRODUCTION
La
phase
ascendante de la courbe de lactation des brebis traites n’a pas été étudiée defaçon
détailléejusqu’à
maintenant. De nombreux auteurs ont obtenu divers résultatsquant
à laposition
du maximum de la lactation en relation avec le niveau deproduction.
Ces étudesportent
en fait sur laquantité
de lait consommée parl’agneau
durant lapériode d’allaitement, quantité
estimée parpesée
avant etaprès
la tétée.Or,
comme le montrent les travaux de RICORDEAUet DENAMUR(ig62), LABUSSiÈRË
etPrTR!Qumv (zg6g),
laquantité
de laitproduite
par une brebis pen-( 1
) Adresse actuelle : Jefatura, agronomica Leon (Espagne).
dant la
période
d’allaitementdépend
du nombred’agneaux
allaités et du stimuluslié à la
présence
del’agneau :
ellerisque
donc de constituer une mauvaise estimation de laquantité
de lait obtenue avec la même brebis à la traite.Dans les conditions habituelles
d’élevage
en ferme de la zone deRoquefort (race Lacaune),
les agneaux sontséparés
de leur mèreaprès
30 à 40jours
d’allaitement : lapériode
de traite débute donc tardivement. En outre,l’interruption
brutale de latétée des agneaux ne
permet
pas d’obtenir immédiatement une traite normale :L
ABUSSI È
RE
etP ETREQUIN (ig6g)
ont montré que dans ce cas, le réflexed’éjection
était presque
toujours
absent etqu’il
fallait attendre 2 à 3 semaines de traitequotidienne
pour le voir s’établir. Si l’on veut étudier l’évolution de laproduction
laitière
journalière
des brebisdepuis l’agnelage jusqu’au
maximum deproduction,
il est donc
indispensable
dedisposer
de contrôles laitiersfréquents
réalisés sur desbrebis soumises à la traite à la fin de la
période
colostrale. C’est la raison pourlaquelle
cette étude
porte,
non pas sur les données du contrôle laitier de larégion
deRoque-
fort, mais sur des observations recueillies enstation,
les brebis étant maintenues enstabulation
pendant
toute lapériode
de lactation.MATÉRIEL
ETMÉTHODES
i. Des mesures
quotidiennes
deproductions
laitières individuelles ont été effectuées durant 4années, à la Fermeexpérimentale
de Brouessy, sur un troupeau constitué à l’occasion d’uneexpé-
rience de croisement entre brebis Préalpes du Sud et béliers Frisons
(Ostfriesisches ;1¡Iilchschaf).
Ledéroulement de cette
expérimentation
et ses résultats ont été décrits et discutés par RICORDEAUet FLAMANT(i 9 6 9 ,
a,b).
Les donnéesprises
ici en considération sont relatives aux brebis de race purePréalpes
du Sud, auxproduits
de croisements depremière génération
F,( 3 3
FrisonX Sj2 Préalpes)
et aux croisements en retour 3/4 F
(C S ’ 3
Frisonx
Fr ; cettecatégorie
contientégalement quelques
animaux 5/8 et 7/8 de sangFrison).
2
.
Après
avoir éliminé les lactations de durée anormalement courte(moins
de 60jours),
nousavons retenu pour notre étude 544 lactations de 282brebis. La totalité des mises bas est intervenue
approximativement
dans un intervalle de 2 mois pourchaque
campagne, les toutespremières
misesbas s’effectuant à la fin de décembre et les dernières au début de mars, la plus grande partie en
janvier.
Les brebis ont mis bas lapremière
fois àl’âge
de un an, sauf 2 lotsqui
ont eu leur premieragnelage
à 2 ans : ceux-ci ont été considérésuniquement
pour l’étude de l’influence de l’âge à la pre- mière mise bas. Les agneaux ont étéséparés
de leur mèreaprès
avoir tété le lait colostral, soit 4jours
au plus tard
après
leur naissance.3
. La traite a été effectuée 2fois par
jour
en2 opérations:
une traite-machine suivie d’unégouttage
manuel
après
enlèvement des gobelets. Laquantité
de lait obtenue au cours de chacune de ces 2opérations
a été mesuréed uotidiennement
matin et soir. Nous avons calculé laproduction
totalejournalière
en additionnant les 4données d’unejournée.
Les critères deproduction
suivants ont étéretenus pour notre
analyse :
niveau maximum pour la traite du matin(machine-matin),
niveaumaximum pour la traite du soir
(machine-soir),
niveau maximum total pour les 2traites quotidiennes.
La durée de la phase ascendante de la lactation a été déterminée
d’après
lejour d’apparition,
par rapport à la date d’agnelage, de la
production
maximum pour les 3critères cités. Si le maximumpersistait plusieurs jours
de suite, nous avons retenu lepremier jour
seulement. DECAEN et PouTous(r 9 6 5
)
ont en effet montré sur les bovins laitiers que le regroupement desproductions
parpériode
de 5
jours
ne permet pasd’apprécier
avecplus
deprécision
laposition
du maximum de la lactation.4
. L’étude de la distribution de
fréquence
de chacunedes variables
a été réalisée par la déter- mination des coefficients étudiés par GEARYet PEARSON : a,’B/0 i
et bz.a = Indice
d’aplatissement
des distributions d’effectifsupérieur
à 10 : déviationmoyenne/écart-type
bz = Indice
d’aplatissement
des distributions d’effectifsupérieur
à100 M 4
...: /- .. ,. ma m2
Vb, !
Indice dedissymétrie : M2 312
m.ml, m2, ni3 et rn9 étant
respectivement
les moments de ier, ze, 3e et 4eordre de la distribution.Pour les tests de normalité
(tabl.
2), les valeurs calculées ont étécomparées
aux valeursthéoriques d’après
les tables de PEnxsorr et HARTLEY( 195 8).
5
. Du fait du déroulement dans le temps du programme de croisement, l’étude des effets des différents facteurs de variation
(âge
à lapremière
mise bas, année, race) a porté sur des schémas nonbalancés. Pour
pallier
enpartie
cet inconvénient,l’analyse
de la variance a été réalisée sur des lots d’animauxcomparables :
- de même race et de même numéro de lactation pour étudier l’effet de
1 âge
à la premièremise bas ;
- de même âge et de même année de
production
pour étudier l’effet de la race ;- de même race et de même âge pour étudier l’effet de l’année de
production :
- de même année de production et de même race pour étudier l’effet de l’âge des brebis.
Une
analyse
de variancehiérarchique
considérant les facteurs de classification « race et « brebis »a permis d’étudier
l’impoitance
du facteur brebis sur lescaractéristiques
de la courbe ascendante de la lactation ainsi que les coefficients de corrélation entre les différents critères considérés. L’en- semble des calculs a été réalisé sur les données non transformées.RÉSULTATS
i. Distributions de
fréquence
En moyenne, le maximum de la lactation intervient au début de la
4 e semaine,
les extrêmes étant 2 et 74jours ;
laplus grande fréquence
est observée au cours dela 3esemaine. En
effet,
la durée de laphase
ascendante, etégalement
laproduction maximum,
ont une distributiondissymétrique :
pourchaque
race ou pour l’ensemble desdonnées,
les coefficients1/ b l
sont trèssignificatifs.
Ladissymétrie
est surtout accentuée pour la durée de laphase
ascendante avec un étalement des distributionsvers les valeurs élevées
(tabl.
i,fig. 1 ).
Les écarts parrapport
à une distribution nor-male sont
beaucoup
moinsimportants
pour l’indiced’aplatissement (kurtosis)
et onpeut
admettrequ’il n’y
a pas de différences pour ce caractère. La transformationdes variables selon une échelle
logarithmique
nepermet
pas d’obtenir des distribu- tionssymétriques.
Par contre, les distributions des racines carrées des données pour toutes les variables sontsymétriques
mais avec une tendance àl’aplatissement (tests
a et
b 2 significatifs
dans presque 50 p. 100des cas, tabl.2 ).
Pour la
production maximum,
les coefficients de variation sontcompris
entre25 et 35p. ioo et sont
comparables
à ceuxgénéralement
obtenus pour laproduction
totale par lactation chez les Bovins
(DEC A E N
etP OU T OUS , 19 65)
et chez les Ovins(BoynzoG!,u
etCnTTirr-VrDnt&dquo; r 9 64).
Le coefficient de variation de la durée de laphase
ascendante estbeaucoup plus
élevé(6 0
p.100 ) :
cette variabilitéimportante provient
du nombre nonnégligeable
de lactationsqui
ont unephase
ascendante trèslongue.
2
. Facteurs de variation de la
Production
maximumNous considérons
globalement
les 3 variables étudiées pourlesquelles
les résul-tats des
analyses
ont étéidentiques
etqui présentent
entre elles une liaison trèsétroite : les coefficients de corrélation varient de o,79 à
o, 9 6 (tabl. 3 ).
Les corrélations
phénotypiques,
calculées entre laproduction
maximum et laproduction
en 60jours
de lactation ou laproduction
durant toute lalactation,
sontsupérieures
à 0,73pour chacun des 3types
d’animaux(tabl. 4 ). BOYAZOG!,U,
POLYetPouTOUS
( 19 6 5 ),
trouventégalement,
sur des lactationstronquées
de brebisLacaune,
ne débutant en moyenne
qu’au 35 e jour
delactation,
une forte corrélationphéno- typique
entre laproduction
au contrôle maximum et laproduction
totale(-!- 0 , 75 ).
Plusieurs autres auteurs ont trouvé sur les Bovins comme sur les Ovins laitiers des valeurs aussi élevées
(D ECAEN
etP OUTOUS , 19 6 5 ).
En outre, la corrélationgénétique
entre les 2 variables est estimée à -!- 0,95par BOYAZOGLU, POLYet POUTOUS
( 19 65).
Ces résultats
soulignent
l’intérêt du niveau maximum deproduction
laitière commeestimation
précoce
desaptitudes
laitières des brebis comme des vaches.Age et
numéro de lactation.Les
productions
maxima obtenues enpremière
lactation à 2 ans sont nettementplus
élevées que lors d’unepremière
lactation à i an. La différence entre les 2groupes de brebispersiste
d’ailleurs au cours des lactations suivantes(fig. 2 ).
Le niveau deproduction
maximumaugmente
avecl’âge
toutparticulièrement
pour les animaux3/4
F.Cependant,
pour les animauxPréalpes
etF, ayant
eu leurpremière
lactationà i an, les différences entre Ireet 2e lactation sont souvent très faibles
(tabl. 5 ).
Cecis’explique
par les besoinsimportants (gestation
etlactation) imposés
àpartir
deIOmois aux
agnelles pendant
leur proprepériode
de croissancequi
ne s’achève vrai-ment
qu’à
3ou 4ans(RicoRD!nu
etFLAMANT, 19 6 9 b) ;
il en résulte un retard dansle
développement qui
doit être comblé au cours de la deuxième lactation et limite ainsi le niveau desperformances
laitières. Pour les animaux3/4 F,
les différences entre les 2premières
lactations sont nettes, une amélioration des conditionsd’élevage
du
troupeau
étant intervenue l’année de naissance de cesanimaux ;
mais ces brebisont pu avoir
également
une meilleureprécocité
dedéveloppement
due à leur pour-centage
de sang Frisonplus important (R I C ORDEAU
etFLAMANT, ig6g b).
Année de
production.
Le facteur « année » intervient sur le niveau de
production
maximum mais defaçon
variable selon les races et toutparticulièrement
si l’on considère les brebisqui
mettent bas à i an.Ainsi,
lesproductions
moyennes des antenaisesPréalpes,
varient
beaucoup plus
d’une année à l’autre que celles des brebis croisées de mêmeâge.
Pour les années19 6 3
et19 6 5 ,
les brebis croisées manifestent unesupériorité
de210 p. 100par
rapport
auxPréalpes,
contre 157p. 100en19 6 2
et19 6 4 ,
alors que le niveau moyen deproduction
des brebis croisées a peu varié au cours de ces 4 années(tabl. 5 ).
Cecomportement
différent s’est traduit dans lesanalyses statistiques
par des interactions années-races hautementsignificatives.
Comme nous l’avons montréprécédemment (RICORD!AU
etFLAMANT, 19 6 9 b),
il semble que les animaux issus du croisement soient dedéveloppement plus précoce,
cequi
les rend moins sensibles à des variations de conditionsd’élevage
notamment dans le cas d’unepremière
lacta-tion à i an.
Race.
L’utilisation
de béliers Frisons sur les brebisPréalpes apporte
un accroissement de laproduction
maximumjournalière
hautementsignificatif
et de l’ordre de 80 à85
p 100, résultatqui
recoupe nos observations antérieures(R I C ORDEAU
etFLAMANT, ig6g b).
Nous constatons, làaussi,
que les écarts entreF i
et animauxpossédant plus
de 50p. 100 de sang Frison ne sont pas
significatifs. Remarquons également
que lasupériorité
des animaux croisés estlégèrement plus
élevée( 4
à 6 p.100 )
pour la pro-duction en 60
jours
que pour le maximumjournalier,
cequi
traduit vraisemblable- ment leur meilleurepersistance
au-delà du maximum(tabl. 5 ).
B y ebis.
Le facteur brebis
intra-race,
estimé àpartir
des éléments del’analyse
de variancehiérarchique, apparaît
hautementsignificatif
pour le niveau deproduction
maximumchez les animaux de race pure
Préalpes
duSud,
peusignificatif
chez lesF,
et nonsignificatifs
chez les3/4
F.Le coefficient de
répétabilité
calculéaprès
correction des variables pour le numéro de lactation estgénéralement
de même ordre pour les 3variables deproduction
consi-dérées à l’intérieur d’une même race. Pour les différentes
races, les
valeurs obtenues sontlégèrement plus
faibles que celles habituellement admises pour laproduction
totale
(Préalpes:
v =!- 0,52
P < 0,01 ;Fi :
v =+ 0 ,35
P < o,oI ;314
F: r + 0,32 o,oi < P <0 , 05 ).
3
. Facteurs de variation de la durée de la
phase
ascendan.teLa corrélation entre les durées de la
phase
ascendantematin,
soir et total estbeaucoup plus
faible que pour laquantité maximum,
surtout entre durée-matin et durée-soir( 0 , 3 8
à0 ,85 ;
tabl.3 ),
par suite vraisemblablement del’imprécision
aveclaquelle
on détermine la date deproduction
maximum.Néanmoins,
les résultats obtenus au cours desanalyses
sont semblables pour les 3 variables considérées.Age
et numévo de lactation.La durée de la
phase
ascendante estgénéralement plus longue
pour les animauxayant
eu leurpremière
lactation à i an.Cependant,
les différences sont très faibles(i
à 6jours, fig. 3 )
et sontbeaucoup
moinsimportantes
que les différences entre numéros de lactation : le maximum deproduction
est en effet atteint nettementplus
tardivement
(5
à 10jours)
enpremière
lactation que lors des lactations suivantes(tabl. 5) quel
que soitl’âge
à lapremière
mise bas.Année de
production.
Contrairement à ce
qui
est observé pour laproduction maximum,
l’année deproduction
n’a pas d’influence sur la durée de laphase
ascendante(tabl. 5 ).
Race.
Le maximum de la lactation
apparaît
en moyenne le25 e jour
pour les 126 brebis croisées(F i
et314 F)
de i an et le r5ejour
pour les 118 de 2 et 3 ans ; pour les75
Préalpes
de J an et les 82 de 2 et 3ans, il se manifesterespectivement
le 3oeet le22
e
jour.
Ces écarts entre racesatteignent quelquefois
le seuil designification
statis-tique ;
résultat confirmé parl’analyse
de variancehiérarchique
réalisée sur toutesles données. Notons que la situation du maximum trouvé sur les
Préalpes
corres-pond
bien à celui observé antérieurement( 25 e jour
delactation)
sur 126 lactationsde brebis de tous
âges
par RICORDEAUet DENAMUR(rg62).
B y ebis.
Les coefficients de corrélation intra-brebis de la durée de la
phase
ascendantecalculés pour
chaque
race ne sont passignificativement
différents de o(respective-
ment o,og,
0 , 0 6
et o,ypourPréalpes, F,
et3/4 F).
Niveau de
production.
La corrélation entre le niveau de
production
maximum et la durée de laphase
ascendante est
toujours négative (—
0,29 à - 0,79, tabl.3 ).
Une correction des données pour le numéro de lactation conduit à des valeursplus
faibles maistoujours négatives ( Y
= — 0,20 et - 0,25 pour lesF,
et3/4 F)
ou non différentes de o(r
= - 0,04pour les.P!M!M).
DISCUSSION
Facteuvs de variation de ta durée de La
phase
ascendanteLe numéro de lactation et la race des brebis constituent les 2
principaux
facteursde variation de la durée de la
phase
ascendante de la lactation. Sur les bovins lai-tiers,
DECAENet PouTOUS( 19 65)
constatentégalement
que le maximum deproduc-
tion
apparaît plus précocement
en deuxième lactation. Ces effets doivent être inter-prétés
différemment selon lasignification biologique
accordée au staded’apparition
du maximum de la lactation.
L’évolution
de laproduction
laitière au cours de la lactation reflétantl’impor-
tance du tissu mammaire et son activité
sécrétrice,
laphase
ascendante de la lacta- tion caractérise donc lapériode
d’activation de la mamelle.D’après
nosrésultats,
celle-ci atteindrait sacapacité
maximum deproduction plus
tardivement enpremière lactation,
le tissu mammaire étant à un niveau dedéveloppement
inférieur à celuidu début des lactations ultérieures. En outre, les brebis croisées manifesteraient pour
ce caractère une meilleure
précocité, déjà
constatée par ailleurs pour d’autres cri- tères(R I C ORD E AU
etFLAMANT, 19 69 b).
La
phase
ascendante de la lactationpeut également
traduire l’intervention de facteurs limitants : absence du réflexed’éjection
du lait lors de la traite et insuffisance desapports
alimentaires.Une
phase
ascendante courtepeut
donc refléter uneadaptation rapide
à la traite.Les effets
inhibiteurs,
liés dans notre casparticulier
à une traitemécanique
dès lespremiers jours après
la misebas,
seraient alors moinsimportants
en deuxième lacta- tionqu’au
début de lapremière
lactationquel
que soitl’âge
des brebis. Parailleurs,
les brebis croisées manifesteraient de cepoint
de vue une meilleure facilité de traite bien que RICORDEAU et FLAMANT( 19 6 9 b)
aient montré que ces animaux ont un volumed’égouttage plus important.
En ce
qui
concerne l’influence du niveaud’alimentation,
la discussion estplus
difficile. Il est certain que les
apports
alimentaires sont presquetoujours
inférieursaux besoins des bonnes
laitières,
toutparticulièrement
en début delactation,
etsupérieurs
à ceux des médiocresproductrices.
Nous sommes donc amenés àenvisager
les relations entre le volume du maximum de la lactation et sa
position
parrapport
à la mise bas. RICORDEAUet DENAMUR(ig62),
PEART(rg6 7 ),
observent sur des brebisallaitantes que les animaux avec deux agneaux
atteignent
leur maximum deproduc-
tion
quelques jours plus
tôt que les brebis avec un seul agneau. Mais ce résultatpeut s’expliquer
par le fait que lesjumeaux
tètentplus fréquemment lorsqu’ils
sontjeunes
et
lorsqu’ils
se nourrissent exclusivement de lait.D’ailleurs,
en considérant une mêmecatégorie
debrebis,
RICORDEAU et DENAMUR ne trouvent pas de liaison entre le niveau maximum et le stadeauquel
il intervient. STARKE( 1953 )
et HUNTER( 195 6)
arrivent à la même conclusion. D’autres auteurs, considérant
toujours
des brebisallaitantes,
estiment que les médiocresproductrices atteignent
le maximumplus
tôtquelle
quesoit, semble-t-il, l’origine
des différences deproduction (génétique
ou condi-tions de
milieu).
C’est le cas de BONSMA(ig 39 ),
WALLACE(rg48), BA R N I COAT,
LoG:wet GRavT
(zg 4 g).
Ils’agit
là en fait de résultats observés parpesée
des agneaux avant etaprès tétée,
à la suite de contrôles effectués toutes les semaines.Sur des brebis
Préalpes
traitesdepuis
le début de lalactation,
RiCORDEAuet DENAMUR
( 19 6 9 )
obtiennent comme nous une liaisonnégative (r
= —0,39)
entre le niveau de
production
maximum et la durée de laphase
ascendante etremarquent
enparticulier
que le maximum deproduction
des meilleures laitières est trèsprononcé
et atteintprécocement.
Chez les Bovins
laitiers,
les résultats sontégalement
contradictoires. MAYMONE et Mar,ossiNt(rg6z),
DECAEN et PouTous( 19 65)
obtiennent une liaisonnégative,
tandis que
T URNER ,
RAGSDAI,$ et BRODY( 1923 )
etJ OURN ET
etJ ARRI GE (I(!E)O?
enregistrent
le contraire. Dans tous les cas, les valeurs trouvées sont très faibles.Pour comparer valablement ces
résultats,
il faudrait tenircompte
du programme de rationnement avant etaprès
levêlage.
Onpeut
en effet admettrequ’avec
une ali-mentation individuelle en fonction du niveau de
production,
les meilleures lai- tières tendent à atteindre leur maximum deproduction plus
tardivement par suite desajustements
successifs de rations. Par contre, dans lestroupeaux
ovinslaitiers,
où le rationnement est effectuéglobalement
pour tous les animaux en vue d’assurer des besoins deproduction
moyens, les meilleures laitières sont limitées dès le début de laproduction :
cetype
de conduite dutroupeau expliquerait
donc aussipourquoi
les maxima de
production, plus
élevés en deuxième lactation et avec les brebis croi-sées,
sont atteintsplus précocement.
Caractéristiques
des distributions defréquence
La
dissymétrie
des distributions de la durée de laphase
ascendante de la lacta- tion a étéégalement
observée sur la vache par DRAK!I,!Y et BVHITE(I92!),
MAY-mont et MAI,OSSINI
(1959-1961),
RAKES et Glt.(I(!5(!),
IVIAKF’.I,A(1962 b)
et DECAENet PouTous
(IC!65).
Ces auteurs trouvent uneposition
moyenne du maximum de lactation entre le 25eet le4 o e jour,
soit de une à deux semainesplus
tard environ que chez la brebisd’après
nos résultats.Quant
aumode,
il se situe entre le Ioe et leI5
e jour,
c’est-à-dire à peuprès
dans les limites observées dans notre étude. DECA!!r et PouTous( 19 6 5 )
trouvent un coefficient de variationlégèrement supérieur
aunôtre
( 75
p. 100contre 60p.I oo),
valeur élevéequ’ils
attribuentégalement
à l’exis-tence de maxima de lactation très tardifs
(jusqu’à
8ojours).
Peut-on donner une
explication
de cettedissymétrie, compte
tenu desajuste-
ments
possibles
à des distributions defréquence théoriques ?
MAYMONE et MALOSSINI(
19 6 1
) parviennent,
chez lavache,
à une distribution normale en réalisant une trans- formationlogarithmique
des données. Dans notre cas, cette transformationaugmente
encore les écarts par
rapport
à une distribution normale. Par contre, la transforma- tion racine carrée rend toutes les distributionssymétriques,
ycompris
les distribu- tions de laquantité maximum ;
des écarts avec la loi normale subsistentcependant
pour l’indice
d’aplatissement (tabl. 2 ).
Ces résultatsindiquent
une certaine propor- tionnalité entre la moyenne etl’écart-type
des distributions. Nous avons testél’ajustement
à une distribution de Poisson par le testdu X Z
en utilisant commevariable non pas le
jour d’apparition
des maxima deproduction,
mais la semaine.Les écarts à une distribution de Poisson ne sont pas
significatifs
pour les donnéesPréalpes
etF I ,
maisl’ajustement
n’est paspossible
avec les3!4
Fqui
ne constituent d’ailleurs pas un groupehomogène.
Si nous retenons
l’hypothèse
d’une distribution dePoisson,
nous pouvons alors considérer que dans une racedonnée,
la semained’apparition
du maximum de lac- tation d’unebrebis,
variable bornée inférieurement à o mais nonsupérieure-rent, s’applique
à un événement de faibleprobabilité
lié à un certain nombre de facteurs de variation. Il n’est donc passurprenant
que nous ayonstrouvé,
pour la durée de laphase ascendante,
des coefficients derépétabilité
non différents de o.La
dissymétrie
constatéepeut
résulterégalement
de l’existence de 2 sous-popu- lations de moyennes et de variances différentes. C’est ainsi que LABUSSI!R!( 19 66)
a mis en
évidence,
dans le mêmetroupeau,
deuxcatégories
de brebis : cellesqui présentent
une seule émission de lait au cours de la traite ont un maximum de pro- duction peu élevé etprécoce,
alors que les brebis à « 2 émissions ont, en moyenne,un maximum très
prononcé
et tardif. La relation décelée parL ABUSSI È R E
entre les2
types
de descente du lait au cours de la traite et le niveau deproduction pourrait
donc
expliquer
ladissymétrie
trouvée dans la durée de laphase
ascendante et le niveau deproduction maximum ;
mais cela suppose une corrélationpositive
entreles 2 variables alors que nous avons obtenu une corrélation
négative.
D’autrepart,
la
caractéristique
de traite(i
ou 2émissions)
est un caractère relativement constant d’une lactation à l’autre alors que les variables considérées sont peurépétables.
Lavalidité de cette tentative
d’explication
de la forme des distributions par des consi- dérationsphysiologiques
est limitée par le faitqu’en plus
des brebis à i et 2émissions,
il existe d’autresbrebis,
bonnes laitières dansl’ensemble, qui
nepeuvent
être clas- sées nettement dans l’une des deuxcatégories.
CONCLUSION
Ce travail est encore
incomplet
car il ne tient pascompte
de l’évolution de laproduction depuis
lepremier jour
detraite,
et de sa variation depart
et d’autre du maximum. D’autrepart,
les brebis étant alimentées parlots,
il n’a pas étépossible
decomparer le niveau d’alimentation individuel avec le niveau maximum. Cette étude
a
permis cependant
decompléter
les observationsdéjà
réalisées sur lasupériorité
des brebis croisées Frisonnes par
rapport
auxPréalpes
pour laproduction laitière,
la
persistance
de la lactation et laprécocité
dedéveloppement.
Nous avons pu aussimettre en évidence l’influence du numéro de lactation et de la race sur la durée de la
phase
ascendante. Mais il estdifficile,
faute d’observationsplus
fines au niveau de la mamelle(activité
du tissusécrétoire,
courbes de descente delait),
de déterminerparfaitement
les causesbiologiques
des différences observées entrepremière
lactationet lactations
ultérieures,
entre brebisPréalpes
et croisées : il est vraisemblable que le niveau d’alimentation constitue un facteur de variation en liaison avec l’établisse- ment de l’activité sécrétrice etl’adaptation
à la traite. Une difficultésupplémentaire apparaît,
d’ordrestatistique celle-ci,
du fait de la nature des distributions des va-riables considérées : comme chez les
Bovins, l’ajustement
à une distribution normalene
peut
êtreenvisagé
mêmeaprès
diverses transformations. Dans notre cas, la transformation racine carrée seraitcependant susceptible
de donner de bons résultats.L’ensemble des observations réalisées au cours de cette étude ne sont pas différentes de celles effectuées par d’autres auteurs sur les Bovins : sur le
plan alimentaire,
dans les 2espèces,
l’accroissement des besoins est considérable de la fin de lagestation
auxpremières
semaines de la lactation et doit être mis en com-paraison
avec l’évolution del’appétit
des animaux durant la mêmepériode.
Toutefois,
chez les Ovins traditionnellement soumis à latraite,
il fautenvisager
lecas
particulier
de laséparation
des agneauxaprès
30 à 4ojours
d’allaitement. Nos résultats montrent que le maximum de la lactation se situe à la mêmepériode
pour les brebis allaitantes et les brebis traites :6 5
à 8o p. 100des lactations selon les races ont atteint leur maximum avant la 5esemaine,
c’est-à-dire avant le sevrage. En con-sidérant
également
les travaux deI,aBUSSW RE
etP!TxEQmN (ig6g),
nous consta-tons que pour les « brebis laitières », le passage de l’allaitement à la traite consti- tue un stade
critique
sur leplan physiologique
de la sécrétion et del’éjection
dulait,
au moment du maximum d’activité de la mamelle.Reçu pour
publication
en mai r969.REMERCIEMENTS
Nous tenons à remercier MM. BOYAZOGLU, DENAMUR,
JARR IGE
et ‘ISSAC pour les conseilsCl ll’11 S
nous ont donnés au cours de la rédaction de ce mémoire.
SUMMARY
PRELIMINARY STUDY OF THE ASCENDING PHASE OF THE LACTATION CURVE IN MILKING EWES
We studied the maximum lactation stage in 544 lactations in a flock of pure-bred Prialpes
du Sud and Friesland cross ewes. The respective performances of pure-bred and crossed ewes
been previously studied (RICORDEAUand FLAMANT, 1969a and b).
The frequency distributions of the ascending lactation phase are very dissymetrical (table I,
fig. i), and logarithmic transformation does not permit an adjustement to the normal distribution.
This adjustement may be partially accomplished by a square root transformation. The observed
dissymetry may occur, because the week when maximum lactation appears is a variable having
a lower limit of zero, but no upper limit, and it is applied to an occurence of weak probability.
The main variation factors observed are the lactation number and breed. Those animals in second or third lactations, no matter what their age, have an earlier maximum lactation than
during the first lactation (5to 10days). Maximum lactation appears on an average on day 25 in one-year old crossed ewes, and on day 15 in 2-3 year old crossed ewes. The corresponding days
in the Prealpes du Sud breed are the thirtieth and twenty-second days (table 5). After correction for the lactation number, the correlation between the length of the ascending phase and produc-
tion level (computed for each breed) remains weak and negative (— 0.04to - 0.25).
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