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QUELQUE PART SUR LA LIGNE MAGINOT

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Academic year: 2022

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QUELQUE PART

SUR LA LIGNE MAGINOT

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L'entrée des Munitions telle qu'elle se présentera de 1964 à 1976...

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A Daniel AUBERT dernier commandant de Fermont

et à Georges MAISTRET

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DANS LA MÊME C O L L E C T I O N DEJA PARU:

J.Y. MARY: "La ligne Maginot ce qu'elle était, ce qu 'il en reste ' '

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JEAN-YVES MARY

Q U E L Q U E P A R T S U R L A

L I G N E M A G I N O T

L'OUVRAGE DE FERMONT 1930-1980

SERCAP EDITIONS

149 Avenue du Maine - 75014 Paris

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LISTE DES ABREVIATIONS CONTENUES DANS CE VOLUME

D'ORIGINE FRANÇAISE A.D. Artillerie Divisionnaire

A.L.C.A. Artillerie Lourde de Corps d'Armée B.C.C. Bataillon de Chars de Combat B.L.M. Brigade Légére Motorisée C.A. Corps d'Armée

C.A. Compagnie d'appui

C.A.F. Corps d'Armée de Forteresse

C.E.F.V. Compagnie d'Engins et Fusiliers Voltigeurs C.E.Z.F. Commission d'Etude des Zônes Fortifiées C.M. Compagnie de Mitrailleurs

C.O.R.F. Commission d'Organisation des Régions Fortifiées D.I. Division d'Infanterie

D.I.N.A. Division d'Infanterie Nord-Africaine D.L.C. Division Légère de Cavalerie

E.H. Entrée des Hommes E.M. Entrée des Munitions E.M. Etat-Major

F.M. Fusil-Mitrailleur G.A. Groupe d'Armées

G.R.C.A. Groupe de Reconnaissance de Corps d'Armée G.R.D.I. Groupe de Reconnaissance de Division d'Infanterie I.D. Infanterie Divisionnaire

J.M. Jumelage de Mitrailleuses

J.M.O. Journal de Marche et d'Opérations L.P.R. Ligne Principale de Résistance M.O.M. Main d'Oeuvre Militaire P.A.L. Position Avancée de Longwy P.A.R. Parc d'Artillerie Régional P.C. Poste de Commandement P.O. Petit Ouvrage

Q. G. Quartier Général

R.A.D. Régiment d'Artillerie Divisionnaire R.A.L. Régiment d'Artillerie Lourde

R.A.L.D. Régiment d'Artillerie Lourde Divisionnaire R.A.L.P. Régiment d'Artillerie Légère Portée

R.A.L.V.F. Régiment d'Artillerie Lourde sur Voie Ferrée R.A.M. Régiment d'Autos-Mitrailleuses

R.A.P. Régiment d'Artillerie de Position

R.A.R.F. Régiment d'Artillerie de Région Fortifiée R.D.P. Régiment de Dragons Portés

R.F.M. Région Fortifiée de Metz R.I. Régiment d'Infanterie

R.I.F. Régiment d'Infanterie de Forteresse S.F. Secteur Fortifié

S.R.A. Service de Renseignement de l'Artillerie S.R.I. Service de Renseignement de l'Infanterie S.R.O. Service de Renseignement d'Ouvrage S.S. Sous-secteur

S.T.G. Section Technique du Génie

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D'ORIGINE A L L E M A N D E

A.K. Armee Korps (Corps d'Armée)

A.R. Artillerie Regiment (Régiment d'Artillerie) F.A. Flak Abteilung (Détachement anti-aérien) I.D. Infanterie Division (Division d'Infanterie) I.R. Infanterie Regiment (Régiment d'Infanterie) H.K. Hôheres K o m m a n d o (Corps d'Armée Statique) H.K.L. H a u p t Kampf Linie (Ligne Principale de Résistance)

Kp Kompanie (Compagnie)

Pz Jg Panzer Jâger

S.A.A. Schwer Artillerie Abteilung (Détachement d'Artillerie Lourde) S.T. Stoss Truppen (Troupes d'Assaut)

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TABLE DES MATIERES

P R E F A C E pag. 11

AVANT-PROPOS » 15

1. LES JOURS D ' E S P O I R » 19

1. Le rapport de la Commission de Défense des Frontières » 20 2. Le tracé de la position -- - - ---» 23

3. La gestation du gros ouvrage de Fermont » 26

4. Autour de Fermont - » 28

a. Le P.O. de Chappy » 28

b. Le gros ouvrage de Latiremont - » 31

c. Les autres organes du secteur » 33

5. Les travaux --- - ---» 38 a. L'organisation du chantier - ---» 38 b. Les travaux de construction - ---» 40

2. LES JOURS D ' A T T E N T E - » 47

1. L'ouvrage de Fermont » 48

a. Les entrées » 48

b. Les dessous -- - » 52

c. Les blocs » 63

d. Les dessus » 91

e. Les missions de l'ouvrage » 92

f. Les arrières ---- - -- - - --- » 95

2. Les travaux de 1935 à 1939 » 99

a. L'infrastructure logistique » 99

b. La poursuite des travaux à Fermont » 103

c. L'organisation du terrain » 104

3. L'attente » 115

a. En garnison dans le S.F. Crusnes --- --- » 115 b. Les années d'avant-guerre à Fermant -- -- - --- - - - - --- --- » 119

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3. LES J O U R S A R D E N T S pag 125

1. La veillée d'armes - » 126

a. Le S.F. Crusnes de Septembre 1939 à Mai 1940 » 127

b. Les travaux au cours de la "Drôle de Guerre" » 128

c. Fermont de Septembre 1939 à Mai 1940 » 134

2. Le sous-secteur d'Arrancy en Mai 1940 --- » 144

3. Fermont résiste et mord » 161

a. Les Allemands font du volume » 161

b. Les Allemands ne jouent pas le jeu » 182

c. Les Allemands laissent venir --- - » 196

d. Les Allemands jouent à "qui perd, gagne..." » 224

4. LES J O U R S D ' O U B L I » 289

1. Les années de guerre » 290

2. L'après-guerre » 293

3. Le déclin » 298

5. L E S J O U R S . . . D ' O U V E R T U R E » 303

1. Naissance d'une Association » 304

a. L'idée prend corps » 304

b. L'Association » 306

c. Une concession contraignante » 306

d. Tribulations et tergiversations » 307

2. Fermont ouvert au public » 310

3. Le Musée de l'Ouvrage de Fermont » 313

a. Les premiers tâtonnements » 313

b. Le front des Alpes » 315

c. La VI°R.M. ouvre quelques portes » 319

d. L'inauguration du Musée » 319

4. Le Mémorial de l'Ouvrage de Fermont » 321

5. Une Association active » 326

a. La vie de l'Association » 327

b. Une récompense inattendue » 329

c. Travaux et récupérations » 331

d. Le Président Maistret s'en va... » 335

6. L'avenir » 337

a. Fermont en 1984 » 337

b. Les projets » 337

Annexe: L'accomplissement d'un destin de soldat: le Cne Daniel Aubert » 345

Remerciements » 350

Sources » 353

Crédit Photographique » 355

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P R E F A C E

M o n s i e u r M A R Y est d u très petit n o m b r e de ceux qui p e u v e n t parler de la Ligne M a g i n o t avec a u t o r i t é n o n pas qu'il y ait vécu et c o m b a t t u , car, à sa naissance, elle n'était d é j à plus q u ' u n souvenir. P o u r t a n t il la c o n n a î t mieux que les Anciens qui n ' e n g a r d e n t q u e le souvenir f r a g m e n t a i r e de leur secteur. E n 1980, M o n s i e u r M A - RY se signalait en p u b l i a n t " L a Ligne M a g i n o t " , répertoire précis et détaillé de tous les ouvrages, y compris ceux des Alpes, avec des exposés r e m a r q u a b l e s sur la c o m p o s i t i o n , l'organisation, l ' é q u i p e m e n t - et aussi le destin de la Ligne M a g i n o t et de ses ouvrages.

A u j o u r d ' h u i il fait u n pas de plus sur les traces de M o n s i e u r B R U G E qui s'est fait depuis 1965 l'historien de la Ligne M a g i n o t : M o n s i e u r M A R Y c o n c e n t r e n o t r e in- térêt sur u n seul de ses ouvrages, mais particulièrement glorieux, le F E R M O N T , dans le secteur de la C R U S N E S , près de Longwy.

C o m m e M o n s i e u r B R U G E , l ' a u t e u r ne tente pas de n o u s faire u n récit " é d i f i a n t "

de la c a m p a g n e de 39-40 vue à travers le secteur de la C R U S N E S . C'est sans c o m - plaisance mais avec u n g r a n d souci d ' e x a c t i t u d e qu'il nous décrit la situation, l ' a m b i a n c e , les acteurs de cette période qui couvre la " D r ô l e de G u e r r e " j u s q u ' à l'ultime résistance de juin 40. Il le fait en se m e t t a n t souvent à la place d u simple c o m b a t t a n t . Il utilise les archives de la W e h r m a c h t p o u r m e t t r e c o n s t a m m e n t en parallèle les deux adversaires en présence. C'est ainsi que son o u v r a g e sera une source précieuse p o u r qui s'intéresse aux événements de cette è p o q u e mais aussi s'interroge sur la f o u d r o y a n t e défaite de 1940 et l ' a p p a r e n t e inaction des 500.000 h o m m e s de la Ligne M a g i n o t .

Sa description de la drôle de guerre est t r a n s p o s a b l e à tous les secteurs de la Ligne.

O n relèvera l'impression de lassitude, d ' i n c o h é r e n c e , d ' i n c o m p r é h e n s i o n du com- m a n d e m e n t q u e ressentent les unités d'intervalle dans leur emploi fastidieux et sans cesse modifié. Mais le lecteur aurait tort d ' y voir là c o m m e un p r é l u d e à la dé- faite, car je dois dire que dans les c a m p a g n e s suivantes - et victorieuses -, aux mo- destes échelons où je les ai faites, nous avons eu plus d ' u n e fois la m ê m e impres- sion. La W e h r m a c h t , dès q u ' o n descend aux petites unités motorisées peut en ra- conter a u t a n t . N o t r e Service H i s t o r i q u e possède une intéressante é t u d e sur la célè- bre avance de la G r a n d e A r m é e vers Ièna. A l'échelon des bataillons, ce m o d è l e de l ' A r t Militaire n ' a p p a r a î t plus q u e c o m m e une g r a n d e pagaille où marches et con- tre marches, d é s o r d r e et c o n t r e - o r d r e s justifient le soldat d ' a l o r s d ' a v o i r été un g r o g n a r d . Sans d o u t e , dans u n e A r m é e de masse, est-ce le lot f r é q u e n t du simple c o m b a t t a n t , mais les causes de la défaite s o n t ailleurs.

M o n s i e u r M A R Y n o u s dépeint l'esprit défensif qui d o m i n e et se manifeste dès q u e se précise la poussée allemande.

Le point culminant du récit de Monsieur M A R Y , l'événement sans lequel il ne l'au- rait pas entrepris, c'est assurément la victorieuse résistance du F E R M O N T j u s q u ' à l'armistice. Monsieur M A R Y met bien en évidence que là où le soldat français se sentait en confiance dans son équipement et sa mission, il faisait face avec courage.

Il met aussi en évidence que la conception et la réalisation des ouvrages par l ' A r m é e du Génie a été digne des réalisations de V a u b a n et de Séré de Rivère.

L ' o u v r a g e a tenu dans une situation t o t a l e m e n t imprévue, sans le soutien des trou- pes d'intervalle, a t t a q u é p a r derrière sur sa face la plus vulnérable, pilonné p a r l'artillerie lourde (210 et 305). Avec 500 h o m m e s , il a tenu tête aux 3.000 h o m m e s d ' u n Régiment, son a r m e m e n t a f o n c t i o n n é sans défaillance grave, ses tirs repérés ont été précis. T o u t s'est révélé exact et efficace dans les prévisions d u Génie et la p r é p a r a t i o n de l'équipage.

Il convient de rendre ici au C a p i t a i n e A U B E R T , c o m m a n d a n t l ' o u v r a g e , la part qui lui revient dans ce succès et de souligner son mérite. Mais l ' é q u i p a g e du Fer- m o n t n ' é t a i t pas c o m p o s é de personnels sélectionnés: ceux des troupes d'intervalle étaient les mêmes et je peux t é m o i g n e r , dans u n e situation a n a l o g u e , q u o i q u e un

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p e u m o i n s exposée q u e celle d u F e r m o n t , de la p a r f a i t e t e n u e de l ' é q u i p a g e d a n s des c i r c o n s t a n c e s p o u r t a n t désespérées. Ces soldats de 40 étaient les m ê m e s q u e ceux qui les o n t suivis en 43, 44 et 45.

La d é f a i t e a fixé des images très noires de n o t r e A r m é e de 1940. Elles s u r n a g e n t d a n s les esprits c o m m e la d é m o n s t r a t i o n d ' u n refus de c o m b a t t r e . P o u r t a n t , il y a eu 120.000 m o r t s . N e faut-il pas en c o n c l u r e , q u e l ' o n s'est q u e l q u e fois b a t t u ? Il faut savoir aussi q u ' i l y a, d a n s la défaite, u n seuil au delà d u q u e l t o u t devient la- m e n t a b l e , quelle q u e soit l ' A r m é e en cause. Ce seuil est f r a n c h i q u a n d le c o m b a t - t a n t ne sait plus à q u o i se r a c c r o c h e r : la mission est dépassée, les o r d r e s n ' a r r i v e n t plus, les s u p é r i e u r s hésitent, la s i t u a t i o n est celle d ' u n n a u f r a g e . N o u s a v o n s vu des unités de la W e h r m a c h t en d é c o n f i t u r e en 1944. Elles r e n d a i e n t des points aux vaincus de 40 et faut-il é v o q u e r W a t e r l o o , m o r n e plaine: " S a u v e qui p e u t , Af- f r o n t ! H o r r e u r ! T o u t e s les b o u c h e s c r i a i e n t . . . " il s'agissait p o u r t a n t des vieux gro- g n a r d s . . .

C e u x du F e r m o n t o n t eu u n p o i n t f e r m e d ' a n c r a g e qui était leur o u v r a g e . Ils s'y s o n t s o l i d e m e n t accr o ché s. Ils o n t fait face. Ils n ' o n t pas c o n n u le seuil f a t i d i q u e de la défaite. A u j o u r de l'armistice, ils n ' a v a i e n t pas u n e m e n t a l i t é de vaincus; ils ne l ' é t a i e n t pas. Telle a u r a été leur m i n c e r é c o m p e n s e , ils s o n t a u j o u r d ' h u i un m o - tif de fierté mais leur résistance t é m o i g n e aussi en f a v e u r des soldats de 40. M é d i o - cres soldats, ils n ' a u r a i e n t pas accepté le c o m b a t d a n s les c o n d i t i o n s o ù il se pré- sentait: o u v r a g e c o u p é de t o u t , P a y s e n v a h i , armistice d e m a n d é , c o m m a n d e m e n t , g o u v e r n e m e n t , R é g i m e a u x a b o i s . . . seule c e r t i t u d e , la r e d d i t i o n finale, sinon le sort de l ' é q u i p a g e de la Ferté.

N o u s s a v o n s q u e la p r é o c c u p a t i o n c o n s t a n t e - et bien vaine - de la W e h r m a c h t a été d ' ê t r e c o n t r e - a t t a q u é e de flanc p a r u n e sortie en force des t r o u p e s de la Ligne M a g i n o t . E t q u e v o y o n s - n o u s ? Les échelons a v a n c é s s o n t retirés p r é v e n t i v e m e n t . O n avait o r g a n i s é L O N G W Y p o u r le d é f e n d r e et, le m o m e n t v e n u , o n s ' e n retire sans c o m b a t . P o u r t a n t les unités d ' i n t e r v a l l e ne m a n q u e n t pas de c o m b a t i v i t é . Le C o m m a n d e m e n t le sait; q u a n d il veut u n c o u p de m a i n , des prisonniers, une résis- t a n c e o p i n i â t r e , il l ' o b t i e n t .

Faut-il alors i n c r i m i n e r la Ligne M a g i n o t d ' a v o i r infecté n o t r e A r m é e d ' u n e m e n - talité p u r e m e n t défensive, c o m m e on le fait c o u r a m m e n t en s'en p r e n a n t à son

" s y s t è m e " ? C ' e s t là le type m ê m e d u j u g e m e n t s o m m a i r e . C o m m e t o u s les systè- mes fortifiés bien c o n ç u s , la ligne des o u v r a g e s se prête t o u t à fait à servir aussi de b a s e de d é p a r t , de b a s e logistique, de recueil à une a c t i o n offensive en p r o f o n d e u r . Elle n ' i m m o b i l i s e guère q u e 1 / 2 0 des effectifs. Les t r o u p e s d ' i n t e r v a l l e s sont arti- culées p o u r la m a n o e u v r e , t o u t c o m m e celles d u C o r p s de bataille. Elles s o n t de b o n n e q u a l i t é et c o m p t e n t plusieurs centaines de milliers d ' h o m m e s .

A l o r s q u ' a t t e n d a i t - o n ? Q u e m a n q u a i t - i l ? l ' a u d a c e ? le c o u p d ' o e i l ? Je crois plus o b j e c t i f de s ' e n p r e n d r e a u x lenteurs de n o t r e m o b i l i s a t i o n industrielle: P r i o r i t é au C o r p s de bataille... M o n s i e u r M A R Y r e m a r q u e bien p o u r q u o i les unités d ' i n t e r - valle ne s o n t pas é q u i p é e s p o u r l'offensive: m o t o r i s a t i o n nulle, p a s d ' e n g i n s blin- dés, pas d ' a p p u i d ' a v i a t i o n . Certes, on a exagéré l ' a t t i t u d e défensive, à laquelle on était c o n d a m n é , en les s u r c h a r g e a n t d ' a r m e s l o u r d e s -mitrailleuses et m o r t i e r s -, en négligeant leur e n t r a i n e m e n t au p r o f i t de la c o n s t r u c t i o n d ' i n n o m b r a b l e s block- h a u s mais de t o u t e s f a ç o n s , en mai 40, c'est u n fait: ces t r o u p e s de m a n o e u v r e , prévues et organisées c o m m e tel, n ' o n t a u c u n e mobilité. L e u r c a p a c i t é offensive est d o n c limitée a u x a b o r d s de la ligne des o u v r a g e s , c o m m e d a n s la W a r n d t en 1939, sans p o r t é e s t r a t é g i q u e p a r c o n s é q u e n t , sans c o n s é q u e n c e sur les o p é r a t i o n s en cours.

O n ne s ' é t o n n e r a d o n c pas q u e la r é a c t i o n des c o m m a n d e m e n t s l o c a u x ait été de s ' a b r i t e r derrière la Ligne M a g i n o t en y a a c c u m u l a n t leurs m o y e n s . O n a u r a i t ai- mé plus de p a n a c h e p a r plus de Combat, mais la s i t u a t i o n générale n ' e n a u r a i t pas été m o d i f i é e . O n s ' é t o n n e r a d a v a n t a g e q u e le H a u t C o m m a n d e m e n t ait lancé ces m a l h e u r e u s e s t r o u p e s d ' i n t e r v a l l e d a n s u n e retraite de plusieurs centaines de kilo- mètres, alors q u ' i l devait exclure t o u t e idée offensive de q u e l q u e e n v e r g u r e , f a u t e de m o b i l i t é . . .

C e t t e i n a d a p t a t i o n des t r o u p e s d ' i n t e r v a l l e à un rôle o f f e n s i f a été d é t e r m i n a n t e d a n s la r a p i d e défaite de 40 mais il ne faut pas en accuser la Ligne M a g i n o t ; elle est

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due à un sous-équipement plus qu'à un état d'esprit ou à un "système". Les peti- tes unités, peu conscientes de ce handicap, ne souffraient nullement d'une "men- talité Maginot" qui les auraient dépourvues d'agressivité. Autant que les équipa- ges d'ouvrage, elles étaient disponibles pour les missions qu'on leur donnait, mais seuls les équipages étaient à l'aise dans leur unique mission de résistance.

A notre époque qui voit réapparaître le thème, tant rebattu avant 1939, de l'absur- dité de la guerre, (comme s'il suffisait de la prévenir), les Anciens du Fermont peu- vent dire: "Quoi de plus absurde que notre combat de 40, ingoré autant qu'isolé?

Pourtant l'envahisseur nazi même sans espoir, ne nous a jamais paru absurde"

Voilà bien où l'histoire du F E R M O N T reste exemplaire: l'absurdité de la guerre n'empêche pas de se sentir mobilisé pour la défense et pour l'honneur de son Pays.

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AVANT-PROPOS

L'Ouvrage de Fermont valait bien un livre: je m'en suis convaincu au fil des années passées à arpenter ses dessus et ses dessous, avant de sauter le pas, avec l'ambition modeste de mettre en valeur une intéressante série de photos collectées peu à peu et de relater succinctement une histoire qui me paraissait digne d'intérêt, même si les faits les plus saillants avaient déjà été contés en d'autres récits.

Le fait d'avoir pu disposer de deux carnets très complets, l'un écrit par le lieu- tenant Braye, commandant l'artillerie d'ouvrage, écrit au jour le jour durant les hostilités, l'autre du sous-lieutenant Delhaye, commandant l'observatoire du bloc 3, reconstitué ultérieurement, m'a certainement permis d'avoir une vue plus élar- gie de la vie de l'ouvrage et de pouvoir aller plus loin. Tous deux étaient bien pla- cés pour suivre les événements, le premier relate fidèlement les faits et l'ambiance mais manque nécessairement de recul, le second comporte quelques inexactitudes inévitables mais bénéficie de témoignages plus larges. Tous deux pris séparément n'apportent qu'une vision déformée des événements et l'un comme l'autre ont ten- dace à donner aux faits vécus une importance ou des résultats parfois disproportionnés par rapport à la réalité.

Soucieux de recouper les points sujets à caution, j'ai consulté archives et docu- ments et interrogé les différents témoins susceptibles d'éclairer les moments les plus flous, mais il m'a bien fallu constater que la vérité historique est chose bien difficile à cerner avec précision, et cela me semble dû en grande partie au fait que certains événements ont été vécus, ressentis,... voire rapportés par d'autres, en di- vergence avec la réalité des faits.

Il n'est pas question - dans la plupart des cas - de mettre en doute la bonne foi des narrateurs mais bien souvent, même des événements marquants - et il y en eut - sont décrits de façons fort différentes suivant les sources; des dates différentes, des mélanges de faits chronologiquement établis ajoutent à la confusion et le plus sou- vent, la trame même de l'action est déformée.

Ceci n'est certainement pas un grief mais une simple constatation: plus on s'éloigne de l'épicentre d'une affaire, plus les détails deviennent flous. Passe enco- re pour les témoignages recueillis 40 ans après le drame: il est normal que les sou- venirs se soient estompés et encore, ce ne sont pas ces récits qui présentent le plus d'anomalies. Plus nébuleux sont les rapports établis bien souvent en retour de cap- tivité car ils comportent de trop nombreuses approximations pour être exploités tels quels.

Un témoignage n'est donc qu'une pièce d'un puzzle qui doit nécessairement être recoupé. Il ne suffit pas - en prenant le cas particulier de la forteresse mais c'est valable pour toutes les unités - d'avoir appartenu à l'équipage d'un ouvrage pour connaître tous les détails de son action et le fait d'avoir été fantassin aux en- trées n'apporte pas nécessairement des éclaircissements sur les interventions d'une tourelle d'artillerie. Or les témoignages tendent trop souvent à relater des faits qui n'ont pas été directement vécus par le narrateur.

Pour la rédaction de ce récit, je m'en suis donc tenu aux faits strictement avé- rés soit par un recoupement de sources crédibles différentes, soit par des recher- ches sur le terrain. J'ai en effet parcouru le sous-secteur d'Arrancy en tous sens et suis frappé du nombre de vestiges qui subsistent, les blockhaus bien sûr, mais éga- lement les emplacements de batteries, les chambres de coupures, les tranchées, au- tant d'éléments qui n'accrochent pas le regard en temps normal mais qui prennent une toute autre dimension quand on peut les rattacher à un contexte.

Or ce contexte, il est nécessairement double car l'adversaire aussi a écrit, rendu compte et ressenti les événements... à sa manière et il est frappant de noter la dis-

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torsion entre les sensations ressenties selon que l'on est d'un côté ou de l'autre.

Certes, les archives allemandes sont malheureusement très incomplètes et de nom- breux points n'ont pu être confirmés ou infirmés mais l'essentiel est toutefois ex- ploitable. Il en ressort que l'assaillant a aussi eu des périodes confuses, des man- quements ou des faiblesses passagères et... des angoisses à la veille de s'attaquer à une forteresse dont il ignorait les pièges sournois.

Ce n'est qu'en vivant les événements des deux côtés que l'on parvient à leur re- donner leur juste dimension et force est de constater que les combats autour de Fermont, pour glorieux(l) qu'ils furent, ne représentent qu'un épisode parmi de nombreux autres au cours de ces deux mois malheureux.

Cela ne veut certainement pas dire que la ligne Maginot était un "bastion inuti- le" et que les combats qui y furent livrés n'ont rien apporté au cours de cette cam- pagne perdue. En choisissant délibérément en 1926 de ne pas fortifier derrière la Belgique et d'arrêter la ligne des ouvrages à hauteur de Longuyon, la Commission d'Organisation des Régions Fortifiées avait clairement défini deux hypothèses:

soit l'adversaire attaquait la position de vive force et le combat se déroulait sur un terrain favorablement organisé, soit il la contournait par les ailes et la bataille de rencontre qui en découlait se passait hors du territoire national, en Belgique ou en Suisse suivant l'option adoptée, avec les avantages qui en résultaient. Ce n'est qu'en 1936, lorsque la Belgique a choisi la neutralité, que les données du problème sont devenues différentes: faute de pouvoir monter une action préventive en Belgi- que, on laissait forcément l'initiative des opérations à l'adversaire avec ce que cela comporte de risques. Fallait-il dès lors prolonger la ligne fortifiée jusqu'à la mer du Nord? C'est sans doute la solution la plus hérétique qui soit, car on ne gagne pas des guerres de façon statique, mais à la lumière des événements on peut se po- ser la question, car il est évident q u ' o n ne pouvait guère faire pire que ce choix hy- bride d'une intervention en Belgique alliée à une fortification plus que clairsemée de la frontière...

Dès le début des hostilités, la ligne Maginot avait rempli une grande partie de sa mission: la mobilisation et la concentration des troupes se sont déroulées sans problème, même si l'on peut objecter que l'adversaire n'a pas cherché à troubler le processus, très surpris sans doute de la passivité française. Le 10 Mai 1940, à peine les Allemands avaient-ils franchi la frontière belge que la ligne Maginot avait joué le deuxième de ses rôles: l'assaillant avait fait ce qu'on attendait de lui; pour con- tourner la ligne fortifiée, il avait dû violer la neutralité belge.

A quoi la ligne Maginot pouvait-elle dès lors encore servir? De place d'armes d'où devait déboucher la contre-attaque sur le flanc adverse d'une part, mais le Haut-Commandement n'a pas exploité cette possibilité; de bouclier d'autre part garantissant la frontière Est cependant que la bataille se déroulait dans le nord.

Autant dire un rôle aussi obscur qu'essentiel...

Jusqu'au 13 Juin 1940, la situation est restée - hormis à la Ferté - conforme aux attentes et les équipages d'ouvrages n'ont été que peu engagés. A partir du 13 Juin, le repli des troupes d'intervalles a modifié le processus et affirmé avec netteté la dualité équipages d'ouvrages - troupes d'intervalles, chacun allant dès lors vers sa destinée.

A ce moment, celle des équipages d'ouvrages parut être la plus précaire et cer- tainement bien moins enviable que celle des troupes d'intervalles qui se repliaient puisque le sentiment qui prévalut alors fut qu'on abandonnait les défenseurs de la ligne Maginot à leur sort.

Or, les troupes d'intervalles durent mener de leur côté de durs combats en rase campagne et, avec le recul du temps, lorsqu'on analyse les dix derniers jours de la campagne de 1940, il parait assez évident que malgré l'encerclement dont ils furent victimes, ce ne sont pas les équipages d'ouvrages qui ont le plus souffert de ce repli.

Déjà, au départ, la situation n'est pas égale: on ne peut en effet raisonnable- ment comparer le sort d'un défenseur protégé par 3.50 mètres de béton et 30 mètres de terre à celui d'un combattant à l'air libre.

(1). Dans une lettre du Il Mai 1977, R. Roux, ancien chef du S.R.A. de l'ouvrage a même écrit: "Ce fut parfaitement honorable mais ab- solument pas épique".

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D u 10 M a i a u 13 J u i n 1 9 4 0 , d a n s le s o u s - s e c t e u r d ' A r r a n c y , les t r o u p e s d ' i n t e r - v a l l e s o n t e u à d é p l o r e r d e n o m b r e u s e s v i c t i m e s - d o n t 2 7 p o u r le s e u l 4 J u i n l o r s d ' u n e r e c o n n a i s s a n c e o f f e n s i v e s u r C u t r y - a l o r s q u e les o u v r a g e s n ' e n r e g i s t r a i e n t a u c u n e p e r t e .

L e s c o m b a t s q u i d u r e r o n t j u s q u ' à l ' a r m i s t i c e c a u s e r o n t e n c o r e d e n o m b r e u s e s p e r t e s a u x t r o u p e s d ' i n t e r v a l l e s , c e u x q u i s e r o n t l i v r é s a u t o u r d e F e r m o n t n e c o û - t e r o n t q u e t r o i s m o r t s a u x d é f e n s e u r s . . .

E n c o n t o u r n a n t l a l i g n e M a g i n o t le 14 J u i n , les A l l e m a n d s o n t t o t a l e m e n t m o - d i f i é la s i t u a t i o n : les é q u i p a g e s d ' o u v r a g e s n ' a v a i e n t p l u s d ' a u t r e a l t e r n a t i v e q u e d e r é s i s t e r s u r p l a c e , c e q u i d i c t a i t d è s l o r s l e u r c o n d u i t e . L ' o f f i c i e r d e f o r t e r e s s e a d é j à u n a v a n t a g e s u r s o n c o l l è g u e d e s i n t e r v a l l e s , c ' e s t q u ' i l n ' a p a s le d i l e m n e d e la m a n o e u v r e ; il a e n l ' o c c u r r e n c e u n a u t r e a v a n t a g e , c e l u i d e n e p a s a v o i r à r é f l é - c h i r s u r la c o n d u i t e à t e n i r .

L e s t r o u p e s d e f o r t e r e s s e r i v é e s à l e u r b é t o n n e p e u v e n t g u è r e f a i r e p r e u v e d ' i n i t i a t i v e , l e u r a c t i o n e s t l i m i t é e p a r les p o s s i b i l i t é s d e l e u r s a r m e s , les c h a m p s d e t i r s o n t d é f i n i s et les o b j e c t i f s d é s i g n é s à l ' a v a n c e . A u c u n e l a t i t u d e n ' e s t l a i s s é e a u c o m m a n d a n t d ' o u v r a g e q u a n t à l ' o r g a n i s a t i o n d e la d é f e n s e o u l a r é p a r t i t i o n d e ses m o y e n s : t o u t c e l a l u i e s t i m p o s é p a r u n e i m p l a n t a t i o n s t a t i q u e q u ' i l d o i t a s - s u m e r s a n s l ' a v o i r é t a b l i e . L a v i g u e u r d e l a d é f e n s e d é p e n d d o n c e n p r i n c i p e m o i n s d e s h o m m e s q u e d u m a t é r i e l p u i s q u e l a m a n o e u v r e e s t e x c l u e . E l l e d é p e n d a u s s i d u n i v e a u d ' a g r e s s i v i t é d e l ' e n n e m i . O r , il f a u t b i e n le r e c o n n a i t r e , c e l u i - c i n ' a p a s f a i t m o n t r e d ' u n e v o l o n t é a f f i r m é e d e s ' e m p a r e r d e s o u v r a g e s f o r t i f i é s , e s t i m a n t s a n s n u l d o u t e le m o r c e a u t r o p d u r à e n l e v e r .

C e c i n ' e n l è v e r i e n a u m é r i t e d e s é q u i p a g e s q u i n ' a v a i e n t d ' a u t r e p o s s i b i l i t é p o u r d é m o n t r e r l e u r r é s o l u t i o n q u e d e t i r e r s u r t o u t c e q u i b o u g e a i t , d a n s la l i m i t e d e l e u r s m o y e n s . D a n s le L i v r e d ' O r a p o c r y p h e q u ' i l r é d i g e a a p r è s l ' A r m i s t i c e , le C a p i t a i n e A u b e r t , d e r n i e r c o m m a n d a n t d e F e r m o n t , a r é s u m é d ' u n e m a n i è r e s a i - s i s s a n t e l a t e n u e d e s o n é q u i p a g e - m a i s o n p e u t s a n s n u l d o u t e a p p l i q u e r la f o r m u - le à t o u s les é q u i p a g e s d e la l i g n e M a g i n o t -:

" N u l n ' a f a i t p l u s q u e s o n d e v o i r m a i s t o u s l ' o n t f a i t . "

N u l e n e f f e t n ' a f a i t p l u s q u e s o n d e v o i r m ê m e si, e n c e r t a i n e s c i r c o n s t a n c e s , q u e l q u e s - u n s o n t f a i t p l u s q u e d ' a u t r e s , c a r les é q u i p a g e s d ' o u v r a g e s o n t r e m p l i l e u r m i s s i o n , s i m p l e m e n t l e u r m i s s i o n , s e l o n d e s c o n d i t i o n s p l u s o u m o i n s d i f f i c i l e s .

L a l i g n e M a g i n o t a é t é c o n ç u e p o u r ê t r e u n e f o r t i f i c a t i o n a d a p t a b l e e n f o n c - t i o n d e s s i t u a t i o n s : d e s m u r s p o u v a n t r é s i s t e r à t o u s les c a l i b r e s e n s e r v i c e , d e s p i è - c e s t i r a n t t o u s a z i m u t s et m ê m e d e s c h a m b r e s d e t i r o r i e n t é e s v e r s l ' a r r i è r e ( a u x e n - t r é e s ) - c e q u i t e n d à d é m o n t r e r q u ' u n e n c e r c l e m e n t , p o u r e x c e p t i o n n e l q u ' i l p u i s s e ê t r e , e s t u n e é v e n t u a l i t é q u i a v a i t é t é e n v i s a g é e c o m m e le c o n f i r m e n t d u r e s t e les d o t a t i o n s e n v i v r e s e t c o m b u s t i b l e s - le p r o b l è m e d e s m u n i t i o n s e s t d i f f é r e n t - a f - f e c t é e s a u x o u v r a g e s et l e u r d o n n a n t u n e a u t o n o m i e t o t a l e d e t r o i s m o i s .

B i e n s u r , la f o r t i f i c a t i o n a v a i t ses f a i b l e s s e s e t les c o m b a t s d e 1 9 4 0 les o n t p a r t i - c u l i è r e m e n t m i s e s e n é v i d e n c e m a i s il n ' e n d e m e u r e p a s m o i n s v r a i q u e le s y s t è m e f o r t i f i é a f a i t l a p r e u v e d e s o n e f f i c a c i t é e t a c e r t a i n e m e n t é p a r g n é d e n o m b r e u s e s v i e s h u m a i n e s .

L e G é n é r a l V a i l l a n t , q u i e n J u i n 1 9 4 0 c o m m a n d a i t le p e t i t o u v r a g e d e l ' E i n s e - l i n g , a c o u t u m e d e d i r e q u e j a m a i s e n s u i t e il n ' a c o n n u d e s i t u a t i o n p l u s d é s e s p é r é e et j e v e u x b i e n a d m e t t r e s o n p r o p o s c a r , d ' u n e p a r t , s o n o u v r a g e é t a i t m i n u s c u l e et v u l n é r a b l e , e t , d ' a u t r e p a r t , il a é t é a t t a q u é e f f e c t i v e m e n t p a r les A l l e m a n d s . M a i s c e t t e r e m a r q u e e s t - e l l e v a l a b l e p o u r les d é f e n s e u r s d u R o c h o n v i l l e r s , d e M o l v a n g e , d u M é t r i c h o u d u H a c k e n b e r g , c e s m o n s t r e s i n e x p u g n a b l e s q u e l ' e n n e m i n ' a m ê - m e p a s c h e r c h é à a b o r d e r ? L e c o n d u c t e u r d e l o c o - t r a c t e u r , l ' é l e c t r o - m é c a n i c i e n d e l ' u s i n e o u l ' a r t i l l e u r d e s e r v i c e a u M I p e u t - i l d é c e m m e n t a v a n c e r q u e s a s i t u a t i o n é t a i t p l u s d é s e s p é r é e q u e c e l l e d e s t r o u p e s d ' i n t e r v a l l e m e n a n t d e s c o m b a t s s a n s e s p o i r d a n s la r é g i o n d e T o u l ? C e r t e s n o n ! P o u r t a n t t o u s o n t f a i t l e u r d e v o i r c a r la f o r t e r e s s e e s t u n e g i g a n t e s q u e m a c h i n e o ù c h a q u e r o u a g e a s o n i m p o r t a n c e , c h a - q u e h o m m e s a p l a c e et le m é r i t e d e s u n s et d e s a u t r e s e s t le m ê m e , q u e l l e q u e s o i t la m i s s i o n c o n f i é e .

D a n s c e s c o n d i t i o n s , la f o r t e r e s s e et ses d é f e n s e u r s n e f o r m e n t q u ' u n t o u t d o n t l ' a c t i o n e s t i n d i s s o c i a b l e . Si l ' u n d e s é l é m e n t s v i e n t à f a i l l i r , il e n t r a i n e l ' a u t r e d a n s

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son échec. Cela n ' a certainement pas été le cas sur la ligne Maginot: la forteresse devait tenir, elle a tenu, la guerre a été perdue ailleurs.

On pourra cependant rappeler que par deux fois, les troupes de forteresse fi- rent preuve d'une belle résolution dans des circonstances défavorables.

La première fois lorsque ne cédant pas au découragement devant une situation sans issue, elles continuèrent le combat face à un adversaire qui les pressait sur l'avant et les attaquait sur l'arrière: elles n'avaient plus rien à espérer, leur résis- tance elle-même paraissait vaine et personne sans doute n'aurait pu leur tenir ri- gueur de leur reddition. Au lieu de cela, elles ont rendu coup pour coup et n'ont laissé d'autre alternative à l'assaillant que d'attendre l'armistice pour prendre pos- session des ouvrages.

La seconde, lorsque, les combats ayant cessé, les équipages refusèrent de ren- dre les ouvrages à l'assaillant sans avoir reçu d'ordres du gouvernement français'".

Pourtant, en ce qui concerne Fermont, le Capitaine Aubert ne verra là qu'une simple application des ordres reçus. C'est ainsi que dans son ordre du jour du 14 Juin 1940, il écrira:

"L'Ouvrage de Fermont doit défendre jusqu'à épuisement de ses vivres et des ses munitions la zône de terre française où il est implanté. Ce sont là les termes du réglement: y manquer serait manquer à l'honneur et faillir à la mission reçue".

Pour ce qui est de l'Armistice, il sera plus catégorique encore:

" E t a n t donné le mode de transmission employé, ces nouvelles officieuses ne peuvent être considérées comme officielles par un Commandant d'Ouvrage, avant de lui avoir été transmises en bonne et dûe forme par un Officier ou représentant accrédité par le gouvernement français". (Ordre du 24 Juin 1940)

Rien donc pour le Capitaine Aubert qui sorte du cadre de la mission reçue et c'est dans cet esprit qu'a été rédigé ce livre: ce n'est pas un panégyrique à la gloire de Fermont mais simplement l'histoire d'un ouvrage, de ses origines à aujourd'hui, un ouvrage qui s'est battu, un ouvrage qui a tenu et des hommes qui ont fait leur de- voir, rien que leur devoir mais tout leur devoir. Dans cette malheureuse campagne de Mai-Juin 1940, c'est déjà beaucoup...

(1). Cette situation qui se prolongera pour certains ouvrages j u s q u ' a u début Juillet est parfois assimilée à une résistance après l'armisti- ce, ce qui n'est pas tout à fait exact: les hostilités ont cessé, chacun occupe ses positions dans l'attente des modalités d'application de l'armistice et le cessez-le-feu sera respecté de part et d'autre. Les officiers de Fermont qui le 26 Juin se sont promenés tranquille- ment sur les dessus de l'ouvrage sont là pour en attester.

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LES JOURS D'ESPOIR

1926-36

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1. LES JOURS D'ESPOIR (1926-1936)

Lorsque commence en 1931 la construction de l'ouvrage de Fermont, la situation internationale, sans être calme pour autant, n'est cependant pas trop préoccupante pour la France: l'Allemagne est revenue - en apparence du moins - à de meilleurs sentiments et elle entretient désormais des rapports cordiaux avec son ennemi d'hier, ce qui lui a valu d'assister l'année précédente à l'évacuation antici- pée de la rive gauche du Rhin par les troupes d'oc- cupation françaises; la Belgique reste une alliée, si- non inconditionnelle du moins fidèle; la Grande Bretagne ne manifeste aucune animosité particulière même si elle ne fait pas preuve d'une francophilie excessive, la Russie est loin et les Etats-Unis se sont enfermés dans un isolationnisme dont ils ne sorti- ront que dix ans plus tard.

Quelques accords militaires sont certes de nature à laisser craindre des problèmes dans un avenir plus ou moins proche mais, dans l'immédiat, plus que les contraintes, on apprécie les avantages de ces allian- ces qui enserrent l'Allemagne dans un carcan et tempèrent son ardeur belliqueuse(l).

Seule l'Italie s'avère quelque peu menaçante par la voix de son Seigneur et Maître qui revendique l'an- cien comté de Savoie et la Corse, mais bien que l'on prenne cette menace très au sérieux - et l'on fortifie du reste solidement la frontière franco-italienne -, on n'en demeure pas moins serein, d'autant que la XV°

Région Militaire qui couvre cette partie du territoire est animée des plus belles vertus guerrières, et qu'elle a déjà établi une série de positions sur la frontière même, pour le cas où les transalpins voudraient en découdrem.

S'il n'y avait la crise économique mondiale qui affecte aussi bien le vieux que le nouveau continent, on pourrait croire que l'Europe s'engage dans une deuxième décennie de paix à défaut de prospérité.

Malheureusement, le bonheur est toujours fragi- le et depuis 1919, fidèles au vieil adage: "Si tu veux la paix, prépare la guerre!", les Hautes Autorités Militaires françaises restent obsédées par la menace allemande: le spectre d'une défaite totale évitée de justesse en 1914, la dévastation d'une grande partie du pays, les ruines, l'occupation et son cortège de malheurs et d'humiliations, tout cela constitue un ta- bleau des plus sombres, encore présent dans toutes les mémoires, qu'on ne veut plus jamais revivre dans l'avenir.

S'armer pour faire face est certes la solution la plus évidente mais peut-on jamais être sûr que le sort des armes sera favorable? La tentation est alors gran- de de se retirer derrière un rempart que l'on établira le plus solide possible pour y être, quoi qu'il arrive, en sécurité, une muraille sur laquelle viendront se bri- ser les assauts ennemis si tant est que l'adversaire n'ait pas été dissuadé par un tel obstacle!

Comment ne pas comprendre cet état d'esprit au lendemain d'une guerre qui a ravagé toutes les pro- vinces du nord-est et fauché une grande partie de la jeunesse du pays!

Ainsi en sera-t-il de 1920 à 1925, l'idée mûrira lentement. Le véritable point de départ de l'oeuvre à venir se situe le 25 Décembre 1925 lorsque par sa let- tre 01555 - 3/11 - 2, le Ministre de la Guerre131 or- donne la création d'une Commission de Défense des Frontières (C.D.F.) chargée d'étudier le tracé et les formes à donner à la future position fortifiée: le processus est engagé, il ne s'arrêtera qu'avec la dé- faite de 1940.

1. LE R A P P O R T DE LA COMMISSION DE DEFENSE DES FRONTIERES

Le 6 Novembre 1926, moins d'un an après sa création, la C.D.F. composée de sommités militai- res de l'époque(4\ fait rapport au Ministre de la Guerre du résultat de ses travaux.

Ce rapport qui envisage toutes les éventualités151 est vraiment le document de base qui conditionnera toute la construction de la ligne fortifiée, puisque malgré quelques modifications inévitables, les gran- des lignes ébauchées deviendront, moins de 10 ans plus tard, une réalité tangible.

Sur le front nord-est(6" la C.D.F. a déterminé trois zones principales qui apparaissent plus particu- lièrement vulnérables aux invasions et doivent, se- lon elle, être couvertes par une fortification puissan- te dotée de "tous les perfectionnements mécaniques que la fixation au sol permet de réaliser" pour éviter une brusque irruption allemande et constituer ensui- te l'ossature du champ de bataille.

Ces trois régions sont la Région Fortifiée de Haute-Alsace couvrant la trouée de Belfort, la Ré- gion Fortifiée de la Lauter formant saillant de la Sarre au Rhin et enfin la Région Fortifiée de Metz barrant les voies d'invasion vers Metz et Nancy. En- tre chacune d'elles, des zones moins perméables et donc facilement défendables moyennant quelques destructions assurent la continuité de l'arc de cercle qui s'étend ainsi de la Suisse à la Belgique.

En ce qui concerne la Région Fortifiée de Metz (R.F.M.) qui nous intéresse plus particulièrement, le tracé de la position est défini de Faulquemont à Longuyon et la C.D.F. justifie ainsi ses options (pa- ges 25, 26, 27 et 28 du rapport):

(1). Alliances avec la Tchécoslovaquie (1924), la Pologne (1925), la Roumanie (1925) et la Yougoslavie (1927).

(2). Position d'avant-postes de type Main d ' O e u v r e Militaire.

(3). En l'occurrence Monsieur Paul Painlevé, en poste depuis le 28 No- vembre 1935.

(4). Cette Commission était présidée par le G1 Guillaumat.

(5). Y compris l'hostilité éventuelle de pays amis comme l'Angleterre ou la Belgique. Seule la future neutralité belge ne semble pas avoir été prévue.

(6). Le front du sud-est sort du cadre de cette étude.

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" L a r é g i o n f o r t i f i é e M e t z , T h i o n v i l l e , L o n g w y e s t l a p l u s i m p o r t a n t e . S e s b u t s s o n t o f f e n s i f s e t d é - f e n s i f s .

A u p o i n t d e v u e o f f e n s i f : n o u s p r o c u r e r l ' e s p a c e v o u l u p o u r f a i r e e n s é c u r i t é , s u r e t à d r o i t e d e l a M o s e l l e , t o u s p r é p a r a t i f s d e c o n t r e - a t t a q u e o u d ' a t - t a q u e s u r d e s a r m é e s d é b o u c h a n t d e l a S a r r e m o y e n - n e e n d i r e c t i o n d e C h â t e a u - S a l i n s .

A u p o i n t d e v u e d é f e n s i f : c o u v r i r n o s v o i e s f e r - r é e s d e c o n c e n t r a t i o n . P r o t é g e r l e b a s s i n i n d u s t r i e l d e B r i e y , d e T h i o n v i l l e , d e l a v a l l é e d e l ' O r n e . G a r a n t i r l e f l a n c g a u c h e e t l e s a r r i è r e s d e s f o r c e s f r a n ç a i s e s o p é r a n t e n t r e M e t z e t V o s g e s , c o n t r e u n e o f f e n s i v e a l l e m a n d e p a s s a n t p a r l ' O u e s t d e l a M o s e l l e d a n s l e L u x e m b o u r g e t l a B e l g i q u e s u d - o r i e n t a l e .

E n f i n , e n c a s d ' u n e v i o l a t i o n é t e n d u e d e l a B e l - g i q u e : a s s u r e r l a l i a i s o n e n t r e n o s A r m é e s d e l ' E s t e t n o s a r m é e s d u N o r d , c o u v r i r l e s é c h a n g e s d e f o r c e s e n t r e e l l e s , f o r m e r c h a r n i è r e d u m o u v e m e n t d e c o n - v e r s i o n à d r o i t e d e n o s a r m é e s d u n o r d .

P o u r j o u e r c e s r ô l e s , l a r é g i o n f o r t i f i é e c o m - p r e n d u n f l a n c E s t t r a c é d e s a b o r d s d e K o e n i g s m a c - k e r p a r A n z e l i n g , B o u c h e p o r n j u s q u e v e r s F a u l q u e - m o n t , e t u n f r o n t N o r d s ' é t e n d a n t d e s e n v i r o n s d e S i e r c k à L o n g u y o n .

L e f l a n c E s t - S o n t r a c é a é t é d é t e r m i n é p a r l e s c o n s i d é r a t i o n s s u i v a n t e s :

L e p l a t e a u l o r r a i n e s t c o u p é e n d e u x p a r l e s f o - r ê t s d e S t A v o l d , d u W a r n d t e t d e l a H o u v e , o b s t a - c l e s s é r i e u x c o m p r i m é s e n t r e l a S a r r e e t l e p l a t e a u d e B o u c h e p o r n .

D a n s l e c a s d ' u n e o f f e n s i v e a l l e m a n d s , l ' o c c u p a - t i o n d e c e p l a t e a u c o m m a n d e l e s c o m m u n i c a t i o n s d a n s l a f o r ê t d e S t A v o l d , m a i n t i e n t p a r c o n s é q u e n t l a s é p a r a t i o n e n t r e l e s d e u x c o u l o i r s d e l ' E s t e t d e l ' O u e s t e t m e n a c e l e f l a n c i n t é r i e u r d e s a t t a q u e s q u i y p r o g r e s s e r a i e n t .

D a n s l e c a s d ' u n e o f f e n s i v e f r a n ç a i s e , l a p o s s e s - s i o n d e c e p l a t e a u e s t i n d i s p e n s a b l e p o u r p e r m e t t r e d e d o n n e r à n o s o p é r a t i o n s l ' a m p l e u r n é c e s s a i r e e t s o m m e t o u t e p o u r d é b o u c h e r . E l l e n o u s p r o c u r e u n e p r o f o n d e u r d e t e r r a i n s u f f i s a n t e p o u r a s s u r e r n o s p r é p a r a t i f s s u r l a r i v e d r o i t e d e l a M o s e l l e e t e n m a î t r i s a n t l a f o r ê t d e S t A v o l d , f a c i l i t e r a l e m a i n t i e n d ' u n e l i a i s o n e f f e c t i v e e n t r e n o s t r o u p e s o p é r a n t p a r l e s c o u l o i r s d e s d e u x c ô t é s d e c e m a s s i f . C e t t e c o n s i - d é r a t i o n d u d é b o u c h é e s t d ' u n e g r a n d e i m p o r t a n c e c a r l a r é g i o n d e M e t z , d é j à a m é n a g é e p a r l e s A l l e - m a n d s à c e t t e m ê m e f i n , c o n s t i t u e n o t r e v é r i t a b l e a r s e n a l o f f e n s i f g r â c e à s e s n o m b r e u s e s v o i e s f e r - r é e s , s e s p u i s s a n t s c h a n t i e r s d e d é b a r q u e m e n t , s e s i n s t a l l a t i o n s d e t o u t e n a t u r e .

Q u e c e s o i t d o n c p o u r c o u v r i r n o s c h e m i n s d e f e r , o u p o u r n o u s a s s u r e r l a m a î t r i s e d e s o p é r a t i o n s s u r l e p l a t e a u l o r r a i n , q u e c e s o i t a u p o i n t d e v u e d é - f e n s i f o u o f f e n s i f , il i m p o r t e d e p o r t e r j u s q u ' a u p l a - t e a u d e B o u c h e p o r n à 3 0 k i l o m . E s t d e M e t z , l e t r a - c é d u f l a n c d e l a r é g i o n f o r t i f i é e .

P l u s e n a r r i è r e , l e s " F e s t e " o r i e n t a l e s d e M e t z ( l )

serviront de postes de commandement, de centraux de transmissions, d'abris pour les réserves, de P.C., de postes de secours etc... Elles jalonneront aussi une position de barrage dont elles constitueront les centres de résistance; mais pour jouer ce rôle, elles seront à compléter:

- par des organes de flanquement (mitrailleuses et lance-grenades) pour la défense de leur réseau pé- riphérique;

- par des organes de flanquement des intervalles (canons, obusiers, lance-bombes).

Par ailleurs, la place de Metz peut actuellement encore servir de double tête de pont sur la Moselle -et ce fait n'est pas sans importance.

Le front Nord - A droite, il s'appuie à la Feste Koenigsmacker.

En arrière, la Feste d'Illange et celle de Guen- trange que relie à la Moselle une série d'ouvrages bé- tonnés construits pendant la guerre, amorcent une deuxième position nécessaire à l'angle d'épaule de la région fortifiée.

Plus à l'ouest, le front est projeté à proximité immédiate (3 à 6 km) des frontières méridionales du Luxembourg et de la Belgique. Il couvre Briey à 22 km, les établissements industriels de Thionville- Hayange à 12 km seulement, mais passe à proximité immédiate de Villerupt, d'Audun le Tiche et englo- be Longwy.

Egalement la protection de nos voies ferrées n'est que partiellement assurée. Les deux lignes du Nord sont à bonne portée de l'artillerie lourde moyenne (12 km), le débouché de la troisième ligne sur la Moselle n'échapperait pas aux tirs d'interdic- tion de pièces telles que le 155 GPF (20 km).

L'assaillant avançant de 30 km serait en posses- sion des trois lignes ci-dessus et tiendrait les deux suivantes sous les feux du canon de campagne.

Ainsi, quoique à quelques kilomètres seulement en deçà de la frontière, le front de Thionville à Lon- guyon ne confère que des garanties insuffisantes mais il n'en est pas moins indispensable parce qu'il offrira dans cette importante région une suprême ressource. L'impossibilité de faire mieux est due au tracé défectueux de la frontière et au développement inoui d'une industrie récente qui a réagi à son tour sur l'extension et l'agencement du réseau ferré.

Vers l'Ouest, l'organisation permanente doit s'étendre au moins jusqu'à Longuyon car c'est seu- lement à partir de la Chiers qu'il devient possible de préserver le territoire national par un système de de- structions. La fortification suivrait ainsi la frontière franco-belge sur une longueur de 25 km au delà de Longwy qui est au droit de la limite entre Luxem- bourg et Belgique. De cette façon, même si les des- tructions ne jouaient pas, l'assaillant serait amené à passer bien à l'Ouest de la route Arlon-Virton, il violerait une partie non négligeable du territoire de

(1). Les " F e s t e " étaient les ouvrages construits par les Allemands au- tour des villes de Thionville, Metz et Strasbourg.

(24)

la Belgique qui serait incitée à entrer en ligne à nos côtés.

La protection de l'aile gauche de la Région forti- fiée n'est pas assurée par un flanc, mais seulement par un prolongement du front à l'aide d'un système de destructions sévères échelonnées en profondeur sur les voies pénétrantes, notamment à leur passage sur les cours d'eau parallèles de la Semoy et de la Chiers, puis sur la Meuse en aval de Sedan. Les dis- positifs de mines sont à construire dès le temps de paix et à mettre en oeuvre à la demande des opéra- tions.

La Meuse qui s'infléchit vers le Sud-est en amont de Sedan ne peut être traitée que comme un cloisonnement destiné à faciliter, en cas d'évène- ments graves, l'évacuation de la région fortifiée.

L'orientation de ce fleuve situe Verdun trop en retrait et diminue le rôle que la place pourrait jouer.

Toutefois, elle peut encore être utilisée:

- par sa face nord-est comme amorce d'une posi- tion de barrage suivant le cours de l'Orne et s'accro- chant à la face Nord de Metz;

- par sa face Sud comme barrage postérieur de la région fortifiée.

L a place de Verdun doit donc être conservée et entretenue, sans cependant y faire de nouveaux aménagements en temps de paix, ni reconstruire les ouvrages et les forts démolis durant la dernière guer- re. Le fort de Génicourt est à conserver également".

Cette longue analyse que nous avons reproduite

"in extenso" appelle quelques commentaires:

,o tout d'abord, on note que dans l'esprit des concepteurs, le système fortifié a aussi bien un rôle offensif que défensif à jouer. Il n'est donc pas ques- tion uniquement d'une ligne de défense mais surtout d'une organisation poussée du terrain destinée à fa- ciliter la manoeuvre.

Le choix de la défensive et les errements auquel il conduira résultent d'une mauvaise appréhension des possibilités de la ligne fortifiée: en ne voulant voir en elle qu'une muraille réputée infranchissable, on s'enferma dans un système statique ne laissant que peu de place à l'offensive et au lieu de manoeu- vrer dans les intervalles, on s'ingénia à les boucher vaille que vaille pour créer un rideau continu qui est la pire des choses en matière de défense.

e ensuite, on remarque que la C.D.F. n'est pas satisfaite du tracé adopté de Villerupt à Longuyon.

Il est vrai que le découpage de la frontière ne facilite pas la défense et la C.D.F. ne voit guère d'autre so- lution que d'englober les centres sidérurgiques lo- caux, notamment Longwy, pour éviter que ces indu- stries ne tombent aux mains de l'ennemi dès les pre- mières heures d'une invasion.

e enfin, la ligne fortifiée s'arrête à Longuyon car la C.D.F. estime que la position est suffisamment couverte par la Belgique. Ce point est très important car il démontre que la C.D.F. n'a jamais fait ab-

straction d'un risque d'invasion par la Belgique, bien au contraire! Sans aller jusq'à prétendre qu'el- le le souhaitait, on peut avancer qu'il s'agit d'un des buts avoués de la fortification. En effet, en con- struisant un rempart que l'on souhaite le plus dis- suasif possible le long de la frontière allemande, on ne peut qu'inciter l'adversaire à le contourner et la C.D.F. en est consciente qui écrit:

e page 5

" L a Commission a été amenée à envisager le cas où les conditions politiques du moment créeraient en avant de nos frontières des régions où les hostili- tés seraient appelées à se dérouler. Dans cette hypo- thèse, le Haut Commandement pourrait trouver in- térêt à préluder aux opérations par un bond au-delà de telle partie de notre frontière à l'effet d'éloigner du sol national les dévastations de la guerre.

De pareils bonds s'imposeront également pour venir en aide à une puissance alliée ou pour secourir sur sa demande un Etat voisin dont le territoire aura été violé p a r un agresseur cherchant à envahir notre Pays en suivant une voie qu'il estime avantageuse".

• page 13

" D a n s leur ensemble, les régions fortifiées ont pour buts essentiels de:

1° - Obliger l'envahisseur à des attaques de for- me générale frontale.

2° - S'il s'étend aux ailes, en profitant de la supé- riorité numérique de sa population, amener la Belgi- que et la Suisse à entrer dans le conflit à nos côtés.

3° -

Il ne fait donc aucun doute que l'éventualité d'une action à travers la Belgique avait été claire- ment envisagée et on y trouvait même certains avan- tages:

- tout d'abord, l'obtention d'un délai avant la prise de contact avec l'adversaire;

- ensuite, l'entrée en guerre de la Belgique à nos côtés;

- enfin, le report de la ligne de front en avant des frontières ce qui entr'autres choses mettait les indu- stries du nord à l'abri de destructions massives.

Pour toutes ces raisons, la C.D.F. rejette l'idée d'une fortification puissante le long de la frontière belge pour lui préférer la constitution de parcs mo- biles destinés à la création de "champs de bataille fortifiés du moment".

Le rapport de la C.D.F. définit ensuite la forme de la fortification nouvelle. Nous n'y reviendrons pas car cela s'inscrit dans le cadre plus général de l'évolution des idées en matière de fortification.

Bornons nous à rappeler que les enseignements de 1914 -18 ont permis de déboucher sur un type d'ou- vrage de forme palmée dont les émergences sont constituées par des "blocs" autonomes armés de pièces d'artillerie ou d'infanterie sous casemate ou sous tourelle.

Ce type de construction présentait divers avanta- ges dont le moindre n'était certes pas la possibilité

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