• Aucun résultat trouvé

Sémantique du nom de personne dans le haut moyen âge (VIe-XIIe siècle)

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Sémantique du nom de personne dans le haut moyen âge (VIe-XIIe siècle)"

Copied!
21
0
0

Texte intégral

(1)

Book Chapter

Reference

Sémantique du nom de personne dans le haut moyen âge (VIe-XIIe siècle)

TILLIETTE, Jean-Yves

TILLIETTE, Jean-Yves. Sémantique du nom de personne dans le haut moyen âge (VIe-XIIe siècle). In: Beck, P. Genèse médiévale de l'anthroponymie moderne. Tours : Presses de l'Université, 1997.

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:85510

Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.

1 / 1

(2)

(VI

e

-XII

e

siècle)*

"Est-il absolument nécessaire qu'un nom signifie quelque chose ?"

(L.Carroll, De l'autre côté du miroir)

Le présent article, promis depuis longtemps aux responsables du groupe de recherche sur la genèse médiévale de l'anthroponymie moderne, se fixait pour objectif de développer, et si possible de vérifier, une hypothèse aventureuse imprudemment émise lors de l'une des réunions du groupe. On peut, en termes simples, la formuler de la façon suivante : existe-t-il une relation, et si oui, de quelle nature, entre l'évolution, ou la révolution, du système anthroponymique au cours des XIe et XIIe siècles que les historiens peuvent documenter sur la base des actes de la pratique, et la réflexion sur le nom propre élaborée par les théoriciens (grammairiens, logiciens) de la même époque ? Quitte à décevoir, nous devons confesser d'emblée que nous n'apporterons pas ici de réponse à cette question. Il est à coup sûr extrêmement commun de noter que le tournant des années 1100 voit la renaissance très vigoureuse d'une philosophie du langage : les noms d'Anselme de Cantorbéry, Guillaume de Champeaux, Pierre Abélard, Guillaume de Conches, Pierre Hélie, que nous aurons maintes fois à citer, suffisent à en témoigner. Et sans doute cet ensemble de spéculations englobe-t-il nécessairement une réflexion sur la nature du nom propre, son statut dans la langue, son "mode de signifier" - interrogations qui ressortissent à la logique, certes, mais aussi à la noétique, voire à l'ontologie. Est-il pour autant légitime d'inférer d'une approximative coïncidence chronologique l'existence d'interactions entre les pratiques sociales et le discours normatif ? Pour des raisons qui apparaîtront peut-être au fil de l'exposé, nous n'en sommes pas très certain et préférons, au moins provisoirement, suspendre notre jugement.

Cette prudence méthodologique trouve aussi sa justification dans la nature même des sources que nous avons interrogées. Elles sont en effet très hétérogènes et répondent à des finalités et à des attentes substantiellement diverses entre elles. Les avatars de l'histoire culturelle occidentale expliquent dans une large mesure cette disparité : de l'avis des meilleurs spécialistes, la science grammaticale aux époques mérovingienne et carolingienne, orientée comme elle l'est vers des fins de pédagogie élémentaire, est d'une

(3)

insigne faiblesse théoriquei ; c'est donc ailleurs, dans la chronique, l'exégèse, la poésie, qu'il nous faudra de préférence chercher les traces d'une pensée altimédiévale du nom propre.

Dès, en revanche, que les commentaires aux Institutions grammaticales de Priscien, aux Catégories d'Aristote, aux Opuscula sacra de Boèce constituent le noyau central d'un enseignement grammatical de haut niveau, la réflexion des maîtres atteindra un degré très élevé d'abstraction conceptuelle, mais l'invention et la rigueur théoriques se paieront au prix d'une certaine indifférence à l'humble réalité des phénomènes. Il faudrait, dans l'idéal, multiplier les angles d'attaque pour rendre raison à la fois des énoncés littéraires qui, comme on le verra, mettent indirectement mais efficacement en scène l'imaginaire onomastique, des prescriptions et descriptions méta-littéraires des analystes de la langue, enfin de données extra-littéraires - nous visons par là, faute d'une meilleure formule, les constituantes anthropologiques, au sens large du terme, de la Weltanschauung de l'époque.

Reconstituer le puzzle à partir de telles pièces nécessiterait une variété de compétences spécialisées que nous sommes loin de maîtriser toutes.

A fortiori s'il s'agit de rapporter cette reconstitution idéale aux manifestations complexes et chatoyantes de l'univers social. Car la difficulté méthodologique se double d'obstacles épistémologiques : jusqu'à quel point peut-on tirer parti, pour pénétrer l'épaisseur du réel, pour mettre au jour la raison d'être de pratiques quasi-spontanées, de discours manifestant l'idéologie des seuls litterati et destinés, par le fait même, à circuler dans l'espace clos de cercles très étroits ? D'autant plus que la théorie, qui s'énonce sub specie aeternitatis, renvoie délibérément à des références inactuelles : le paradigme du nom de personne, pour les logiciens, est immuablement Socrates ou Plato, dans le meilleur des cas Petrus ; quant aux grammairiens, ils fondent, à l'instar de leurs prédécesseurs antiques, tous leurs raisonnements sur le système périmé des tria (ou quatuor) nomina romains. C'est que la pensée linguistique du temps est résolument aveugle aux phénomènes diachroniques : la conviction, encore exprimée par Dante au début du De vulgari eloquentia, selon laquelle seul le latin, du fait de sa stabilité, peut se prêter à une approche grammaticale, est alors presque universellement partagéeii. Au sein d'un tel cadre de référence, une démarche qui s'apparenterait, fût-ce de loin, à celles de la sociolinguistique ou de l'ethnolinguistique ne trouve évidemment guère sa place.

Face à des objections aussi massives, nous nous limiterons donc à juxtaposer les discours altimédiévaux sur le nom propre, laissant à de plus savants que nous le soin d'établir leur éventuelle articulation sur la réalité sociologique et anthropologique. Encore

i. L. Holtz, "Les innovations théoriques de la grammaire carolingienne : peu de chose. Pourquoi ?", dans I. Rosier (éd.) L'héritage des grammairiens latins de l'Antiquité aux Lumières, Paris, 1988, p.133- 145.

ii. Avec cependant quelques nuances qui commencent à se manifester au XIIe siècle, notamment chez Pierre Hélie, dont on reparlera plus bas : cf. S. Lusignan, Parler vulgairement. Les intellectuels et la langue française aux XIIIe et XIVe siècles, Paris-Montréal, 1986, p.20-22.

(4)

faut-il les classer, les mettre en série. La démarche nous a paru commode, parce que dictée par l'intuition et par la nature même des sources, de présenter tour à tour deux définitions médiévales de l'anthroponyme, qui obéissent d'ailleurs approximativement à la succession chronologique, la première étant largement dominante au cours des premiers siècles du moyen âge, la seconde inaugurée par cette vraie révolution intellectuelle qu'est la lecture, par Anselme de Cantorbéry, des Catégories d'Aristote.

Le triomphe de Cratyle

Au commencement était Isidore de Séville. Les vingt livres de ses Etymologies, "le livre fondamental du moyen âge", selon Ernst Robert Curtius, ont servi de fondement à toute connaissance scientifique jusqu'au XIIe siècle au moins. Les présupposés de sa démarche cognitive, même s'il ne les énonce pas de façon explicite, sont parfaitement clairs : pour lui, selon une formule lapidaire et pertinente de Jacques Fontaine, "nommer est l'acte essentiel et premier de la connaissance"iii - en vertu du principe qui fait dériver nomen du verbe noscoiv. D'où, sous forme de litote, ce verdict sans appel de l'évêque de Séville : "si l'on ne sait pas leurs noms, la connaissance des choses périt"v. L'analyse fine du signifiant dans ses composantes graphiques et phoniques - ce qu'Isidore appelle "étymologie" - a donc une toute autre fonction que celle de description pure et simple du langage. Les conséquences ultimes d'une telle démarche sont d'ordre, non historique, mais gnoséologique : à travers la compréhension des mots, c'est un savoir sur l'être qui est donné. L'étymo-logie est donc bien "discours du vrai", herméneutique du réel.

Certes, pas plus sur ce point que sur d'autres, Isidore n'est un innovateur : la méthode qu'il met en oeuvre dans sa monumentale encyclopédie ne fait que généraliser et systématiser un corps de doctrine qui lui préexiste. Dans sa thèse magistrale, Jacques Fontaine a dressé l'inventaire des sources auxquelles s'abreuve, plus ou moins consciemment, l'évêque de Séville : sans aucun doute la grammaire et l'allégorie stoïciennes, quelque peu mâtinées de néo-platonismevi. En-deçà, c'est à la pensée sur l'organisation du cosmos de philosophes présocratiques comme Héraclite qu'il faut remonter. On sait avec quel brio Platon met (ironiquement ?) en scène leur discours dans la première partie du Cratyle. A la racine de la croyance en la justesse des noms qui s'y exprime, gît cette conviction métaphysique que le nomenclateur primordial "au moyen des

iii. Fontaine, 1983, p.30.

iv. Notamment, avant Isidore, selon Servius et Cassiodore (cf. Fontaine, loc.cit.).

v. Etym., 1,7,1.

vi. Sur l'herméneutique de l'Antiquité, on renverra à l'ouvrage fondamental de J. Pépin, Mythe et Allégorie. Les origines grecques et les contestations judéo-chrétiennes, Paris, 19813.

(5)

lettres et des syllabes, a saisi l'être de manière à en reproduire l'essence"vii. Il n'y a rien de très étonnant à ce que le christianisme des premiers siècles du moyen âge, pénétré comme il l'est de néoplatonisme, ait repris à son compte une telle propositionviii.

L'application de ce principe d'interprétation au nom propre, et en particulier à l'anthroponyme, pose néanmoins un problème théorique : si l'on comprend que la lecture étymologique du nom commun permette de mettre au jour les caractères spécifiques partagés par une collection d'êtres, comment des combinaisons de lettres et de syllabes, qui sont par définition en nombre fini, parviendraient-elles à rendre raison de chacun des noms propres, dans la mesure où ceux-ci désignent, de l'avis unanime des grammairiens, le singulier, l'individuel, donc une série en droit infinie, ou au moins indéfinie, d'essences ? Isidore esquive le problème, en s'abstenant tout bonnement d'étymologiser les anthroponymes hormis quelques exemples traditionnels, cités au passage, comme ceux de César (Etym.,9,3,12) et de Scipion (18,2,5) - sauf en ce qui concerne deux séries de noms (on devrait d'ailleurs plutôt parler, pour la première, de "théonymes") : ceux des divinités mythologiques (8,11) et ceux des personnages de la Bible (7,6-8). Passons rapidement sur la première série, dont l'analyse s'inscrit dans la mouvance stoïcienne, également illustrée - de quelle surprenante façon ! - par Fulgence le Mythographe : si les dieux païens ne sont que la personnification de forces naturelles élémentaires, on peut se demander jusqu'à quel point les termes par lesquels on les désigne appartiennent encore à la catégorie grammaticale du nom propreix. L'exemple des noms bibliques est en revanche, pour notre propos, plus intéressant. Là, Isidore ne fait que paraphraser servilement le Liber interpretationum hebraicorum nominum de Jérôme, dont l'impact sur la perception qu'avaient les hommes du moyen âge des noms de lieux et surtout de personnes ne peut en aucun cas être sous-estimé. Dans l'opuscule en question, le rédacteur de la Vulgate, sur la base des spéculations judéo-alexandrines (Philon, Origène) et de sa propre expérience de traducteur, s'emploie à fournir l'équivalent latin des racines hébraïques sous-jacentes aux noms des personnages de l'Ecriture sainte. C'est ainsi que Melchisedech signifie "roi juste"

et Nemrod "tyran", Loth, "celui qui refuse" (le péché de Sodome) ; Lia, à la nombreuse progéniture, c'est "celle qui est en travail" (laboriosa) et Rachel "la brebis", car c'est pour

vii. Cratyle, 424 a.

viii. Cf. E.R. Curtius, "L'étymologie considérée comme forme de pensée", in La Littérature européenne et le moyen âge latin (trad.fr.), 19862, t.2, p.317-326; R.Klinck, Die lateinische Etymologie des Mittelalters, Munich, 1970. Quant à R.H. Bloch (Bloch, 1989), il développe une analyse stimulante, même si un peu spéculative, de l'interaction entre cette quête des origines du langage qu'est l'étymologie et la réflexion sur le lignage et la parenté dont témoigne la littérature chevaleresque et courtoise des XIIe et XIIIe siècles.

ix. A titre d'exemple, le nom de l'épouse de Neptune, Amphitrite, symbolise l'élément aquatique, qui entoure (amphi-) les trois (-trite) autres éléments. Comme si, inversant le processus décrit par Bertrand Russell (Russell, 1905), la "description définie" se faisait nom propre.

(6)

l'obtenir que Jacob garda les troupeaux de Laban ; Job est "le souffrant", le guerrier David

"main forte" (manu fortis), et ainsi de suite... Autrement dit, les anthroponymes bibliques non seulement sont descriptifs, mais connotent le rôle joué par leur porteur dans l'histoire du Salut.

A vrai dire, il n'y a rien que de très normal à ce que soient ainsi motivés les noms de la Bible, puisque celle-ci est écrite sous la dictée même de Dieu. Mais les écrivains ecclésiastiques ne tarderont pas à appliquer l'adage nomen - omen à d'autres héros de la foi. D'après les sermons d'Augustin - textes adressés non à une poignée d'intellectuels, mais au public le plus large -, le martyr Vincent était d'emblée voué à vaincre (vincere), et c'est le bonheur éternel que leur nom promettait aux jeunes Perpétue et Félicité. Il n'est pas étonnant que, diffusée par de tels patronages, cette conviction que les noms disent quelque chose des qualités et du destin de ceux qui les portent soit largement partagée dans les premiers siècles du moyen âge. L'inventaire de ces "noms parlants" a été établi par les savants allemands de l'école de la Bedeutungsforschung, auxquels nous empruntons sans vergogne quelques-uns des exemples qui suiventx. Pour Hincmar de Reims, son illustre prédécesseur Remi (Remigius) a, comme il se devait, mené la barque de la chrétienté parmi les écueils de la barbarie (remex, remigis : le rameur) ; saint Maïeul de Cluny est, selon son biographe, insigne pour sa clairvoyance (Maiolus = maior oculus) ;Benoît (Benedictus) et Boniface se passent de commentaires. L'onomastique latine n'est pas la seule à être soumise au traitement étymologique : il en va de même pour les noms d'origine grecque - Christophe (Christo-phorus) est "porte-Christ", Georgia, selon Grégoire de Tours, a si bien cultivé son esprit (géorgein : labourer) qu'elle a récolté la récompense céleste -, mais plus encore peut-être pour les noms germaniques : Lambert (Land-bert [rempart]) est defensor patriae, Lébuin (Lief-vuyn) carus amicus, selon le mot du Christ qui appelle ses serviteurs ses amis (Jn. 15,15), Wiborade (Weib-Rat) consilium mulierum, etc... Au même genre d'analyse sont encore soumis des anthroponymes d'origine slave ou irlandaise. Retenons-en d'ores et déjà que l'une des propriétés du nom propre "parlant", c'est sa traductibilité.

On pourrait déduire de ces quelques exemples, tous empruntés, parmi bien d'autres, à l'hagiographie, que seuls les individus ayant bénéficié de cette élection spéciale de la part de Dieu qu'est la sainteté sont prédestinés par leur nom. Il n'en va pas du tout ainsi et la poésie de cour carolingienne fourmille d'interprétations comparables à celles-là à propos du nom de personnages contemporains. Pour Raban Maur, à qui il arrive de traduire son propre nom corvulus ou de le gloser ramus, et qui semble par ailleurs avoir été particulièrement habile à l'étymologisation des noms propres et en avoir transmis le goût à ses innombrables disciples, l'évêque Erchambert de Freising est Praeclarus d'après la dernière syllabe de son nom (cf. berühmt), le guerrier Isambert (Eisen-bert) Clarus ferro ; Walahfrid Stabon fait de

x. Haubrichs, 1975.

(7)

l'abbé Erbald de Reichenau Vir audax (Hêr-bald), Agius de Corvey de l'évêque Rimbert de Brême, expert en comput, Numero clarus (Rîm-bert)xi. Les noms des princes n'échappent pas à ces analyses : pour l'auteur anonyme du fragment de l'épopée de Paderborn, Charles (Carolus) est Cara lux xii, pour Ermold le Noir, Louis (Hludowicus) Mars praeclarus xiii. La croyance en l'exordium nominis ne cesse pas avec l'époque carolingienne : selon le poète Baudri de Bourgueil, à la fin du XIe siècle, la venue de son ami Létaud (Letaudus) est une invitation à se réjouir (letandum) et la comtesse Adèle de Blois doit sa noblesse à l'antiquité de ses origines puisque, si verba notes, velut Adela fiat ab Adam...xiv Enfin, toutes les techniques d'étymologisation énumérées par Isidore sont mises à contribution. Ainsi l'étymologie per contrarium : une matrone nommée Justa, de la suite de Brunehaut, est en fait une mégère cruelle, l'évêque Aper de Toul se distingue par sa douceur. Ou encore celle qui recourt à l'anagramme : Eugenius Vulgarius n'hésite pas à lire valet fons le nom de prince de Bénévent Atenolfus et celui du comte Gregorius Orgigerus (c'est-à-dire : omnia sacra gerens, puisque le mot grec orgia se traduit en latin ceremonia)xv.

On pourrait poursuivre fort longuement ce genre d'énumération, qui ne manquerait pas de devenir fastidieuse. Le fait étant établi, il est préférable pour nous de nous demander si ces pratiques linguistiques à nos yeux bien incongrues relèvent du pur jeu de lettrés ou si elles étaient susceptibles d'éveiller, dans la mentalité des hommes du haut moyen âge, des résonances plus profondes. Or, il nous semble, sur la base des données recueillies tant par l'anthropologie historique que par l'histoire de la théologie, que toute la période du haut moyen âge est pénétrée d'une sorte de "réalisme sauvage" qui considère l'univers créé comme un tout parfaitement clos et cohérent, où chaque chose a de toute éternité sa place marquée. Dans ces conditions, il est parfaitement logique de penser que le lien entre celle-là et le nom qui la désigne relève de la plus stricte nécessité. Ce type de croyance n'aurait peut-être cependant pas eu la même efficacité si elle n'avait rencontré un terrain favorable. Il paraît bien que, parmi les peuples germaniques, la foi en la valeur augurale du nom ait été largement répandue. Nous n'en voulons pour indice que ce propos prêté par Grégoire de Tours au roi Gontran, lors du baptême de son neveu Clotaire II : "Que cet enfant grandisse et qu'il réalise ce que ce nom signifie (= célèbre dans la guerre, clarus bello), qu'il jouisse de

xi. Ibid., p.244-246.

xii. Karolus magnus et Leo papa, v.55-56 (éd. E. Dümmler, MGH, Poetae latini aevi carolini, t.1, réimpr.

Munich, 1978, p.367).

xiii. Carmen in honorem Hludowici, 1,84 (éd. E. Faral, Paris, 1932, p.10) : "Nempe sonat Hluto 'preaclarum', Wicgch quoque 'Mars' est".

xiv. Cc. 101 (Ad diem in qua letatus est), v.15-18 et 129 (Ad Avitum ut ad eum veniret), v.43 (éd.

Hilbert, Heidelberg, 1979, p.119 et 146).

xv. Haubrichs, 1975, p.251 et 252.

(8)

la même puissance que jadis celui de qui il a reçu le nom (Clotaire Ier)"xvi. Ici, exordium nominis et stratégies familiales de nomination se rejoignent. Faute de documentation accessible à nos compétences, nous ne suivrons pas plus avant cette piste, que nous nous limitons à indiquer aux spécialistes.

Il ne faudrait pas abandonner ce chapitre sans tirer les éventuels enseignements de ce que disent sur le sujet la grammaire et la rhétorique. Comme nous l'avons déjà suggéré, l'enseignement que l'on peut en retirer est assez mince. Toutefois, il nous semble discerner dans l'Ars Bernensis (début IXe siècle) et, de façon plus concise et allusive, les Fragmenta Bobiensia (VIIe siècle ?)xvii une tentative pour tirer la description que Priscien fait du nom propre dans le sens de l'étymologie. La base de la discussion est, comme elle le restera jusqu'à l'avénement de la grammaire spéculative, le système romain des quatuor nomina (praenomen, nomen, cognomen, agnomen). Or, au prix de quelques confusions, le grammairien anonyme du manuscrit de Berne enseigne que trois d'entre eux sont motivés : le nomen, qui est gentilice, l'agnomen (accedens nomen) qui est dit "ab actu" - Scipion, ainsi, est Africanus en raison de sa victoire sur Hannibal - ou encore "a corpore" (la longueur de son nez fait surnommer Ovide Naso). Rien jusqu'alors de très original. Ce qui l'est plus, c'est l'analyse du praenomen, réputé être imposé par les parents en fonction de la destinée qu'ils souhaitent pour leur fils : Lucius brillera par son savoir (scientia lucebit), Publius sera dévoué à l'état (respublica). La nomination est en outre le reflet de stratifications sociales : ainsi, les esclaves et non-nobles (ignobiles) se voient-ils privés de prénomxviii. De tous les textes d'époque carolingienne que nous avons rencontrés, celui-ci, quelque peu cohérent qu'il soit, est peut-être le plus apte à fournir du grain à moudre aux historiens de l'anthroponymie médiévale.

En somme, formulée en termes théoriques, la conception étymologique du langage assimilerait tout anthroponyme, comme d'ailleurs tout terme signifiant de la langue, à ce que les logiciens modernes appellent une "description définie"xix. La relation entre l'individu nommé et le nom qu'il porte ne peut s'exprimer que sous forme d'énoncés tautologiques, du type : "Clotaire (en tant que res : le roi mérovingien) est Clotaire (en tant que verbum : la valeur militaire)", où le verbe être définit une relation d'identité rigoureuse entre l'être et les propriétés nécessaires et suffisantes à le décrire intégralement. Lucius peut se gloser "être- humain-d'origine-non-servile (non-absence du prénom)-de-sexe-masculin (-us)-tel qu'il-a- des lumières (Luc-)". Dès lors, l'imposition du nom revêt une importance cruciale : les

xvi. Historia Francorum 10,28 (trad. R. Latouche).

xvii. Grammatici latini, t.7, p.540.

xviii. Ars Bernensis, p.65.

xix. Russell, 1905; critique de cette notion dans le remarquable article de J.-C. Pariente, "Le nom propre et la prédication dans les langues naturelles", in Molino, 1982, p.37-65.

(9)

parents romains, en prénommant leur fils Lucius, le roi Gontran, lorsqu'il tient son neveu Clotaire sur les fonts baptismaux, définissent leur place dans le monde. Le rhéteur n'hésitera pas à en tirer parti, qui peut accuser son adversaire au tribunal de "prendre des décisions hasardeuses et brusques" parce qu'il s'appelle Caldusxx. Aussi le changement de nom signale-t-il une modification de l'être : Windfrid, lorsqu'il part évangéliser la Frise, devient Boniface; futur fondateur de l'abbaye de Lobbes, le brigand Morosus, lorsqu'il se convertit, reprend le nom de Landelin (le pacificateur de la terre)xxi.

Cette fonction référentielle (le moyen âge dirait peut-être "allégorique") du nom de personne est particulièrement bien illustrée par l'usage qu'en fait la poétique. Sans pénétrer trop avant dans un domaine qui est quelque peu étranger à notre propos, nous rappellerons que la nomination de ces êtres fictifs que sont les personnages littéraires obéit à une double motivation, contextuelle bien sûr (le prince de Guermantes ne saurait s'appeler Bardamu non plus que le héros du Voyage au bout de la nuit Hannibal de Bréauté), mais également, au moyen âge, étymologique : ainsi, le nom du héros de la grande épopée carolingienne, Waltharius, s'interprète-t-il Silvanus, "l'homme des bois" (wald = silva) - nom qui connote en outre les errances et combats de Gauthier dans la forêt vosgienne, qui constituent le sujet même du poème. Mais c'est la littérature en langue vulgaire qui tire des "noms parlants" le parti le plus fécond : de la lyrique occitane (voir le rôle du "senhal" dans cette poésie) au roman de chevalerie, en passant par la chanson de geste, le nom de l'être de langage mis en scène par l'auteur informe d'emblée sur ses qualités spécifiques et sur son destin le lecteur ou l'auditeur. Voire le héros même de la fiction: on sait que la révélation tardive au personnage de son propre nom, une fois seulement qu'il a accompli son initiation, et donc est enfin devenu ce qu'il doit être, est l'un des moteurs de la narration romanesque, les exemples de Perceval et du Bel Inconnu étant à cet égard les plus célèbres. A telle enseigne que l'herméneutique lacanienne, illustrée par des critiques comme Roger Dragonetti ou Charles Mélaxxii, verrait volontiers l'entreprise romanesque médiévale comme l'expansion et la "mise en récit" de cette cellule signifiante primordiale qu'est le nom propre, dans sa structure phono-sémantique. Les romanciers médiévaux tireraient donc ainsi de la démarche étymologique, "cratylienne" ses plus extrêmes conséquences. On nous objectera sans doute, avec raison, que d'une part la vérité poétique n'est pas référentielle, de l'autre que l'attribution de "noms parlants" à des êtres de fiction n'est pas réservée au moyen âge (il suffit de songer à Proust !). Il n'en reste pas moins que jamais, à notre connaissance - en Occident du moins -, la littérature n'a fait usage de ce procédé de façon à ce point

xx. Cicéron, De Inventione, 2, 9, 28.

xxi. Vita S. Landelini, v.178-179 (éd. K.Strecker in MGH, Poetae latini medii aevi, t,5, Munich, 1937, p.215-216).

xxii. Dragonetti, 1980; Ch.Méla, La Reine et le Graal, Paris, 1984.

(10)

systématiquexxiii. "Par le sornon conoist en l'ome", enseigne à son fils la mère de Perceval.

Nous serions assez enclin à considérer que cette conviction était largement partagée par les lecteurs de Chrétien de Troyes.

Retour d'Hermogène ?

Des voix discordantes, toutefois, se font entendre. Ainsi, pour rester dans le domaine des sources littéraires, celle du poète comique Vital de Blois (première moitié du XIIe siècle).

Le protagoniste de sa pièce intitulée Aulularia, un certain Querulus ("le geignard", "le grincheux") se lamente sur la misère de son sort; il hésite à l'imputer à l'omen nominis, avant de conclure : "si je m'étais appelé Jules, je serais tout aussi malheureux. On peut changer de nom, l'adversité subsiste"xxiv. On ne sait pas grand-chose de la biographie de Vital, mais il ressort de ses écrits qu'il était frotté de dialectique, et avait dû fréquenter, même de loin, les écoles parisiennes, notamment celle d'Abélard, qu'il raille avec une verve pleine de méchancetéxxv. Il nous fournit ainsi malgré lui une transition commode pour évoquer d'autres discours médiévaux sur le nom propre, ceux des logiciens et grammairiens du début du XIIe siècle.

Il est impossible, comme nous l'avons dit, de les mettre en série avec ceux que nous venons d'analyser. Nous étions là en présence d'indices épars, révélés par des exemples ponctuels, mais dont l'accumulation nous semblait significative. Nous voici maintenant face à des écrits théoriques, compacts et abstraits. Aussi convient-il de préciser de nouveau que la mutation de la nature des sources invoquées ne reflète pas nécessairement une évolution dans la conscience que les individus pouvaient avoir de leur propre nom ou de ceux de leurs ancêtres et de leurs enfants, mais indique une nouvelle façon de penser le problème de la nomination. Elle s'inscrit, cette mutation, dans le cadre plus vaste de la renaissance des études séculières et du recours, dans cette perspective, à des textes quelque peu oubliés comme les Institutions grammaticales de Priscien et la Logica vetus d'Aristote. Car les nouvelles formes de l'attention portée au monde et aux phénomènes débouchent très vite sur des problèmes de philosophie du langage. Problèmes logiques - le rapport entre les mots et les choses -, ontologiques - le rapport entre les êtres et leurs noms -, mais aussi grammaticaux - les rapports de signification entre les différentes "parties du discours", donc la syntaxe - et, peut-être surtout, théologiques - la question des Noms de Dieu, qui est à la racine des ardentes et inventives spéculations trinitaires du XIIe siècle.

xxiii. Genette, 1976, considère tout au contraire que la tradition "mimographiste" (cratylienne) "a subi [au cours du moyen âge] une véritable éclipse" (p.428). On mettra ce jugement surprenant sur le compte d'une ignorance des sources, d'ailleurs honnêtement avouée.

xxiv. V. 49-52 (éd. F.Bertini, Commedie latine del XII e XIII secolo, t.1, Gênes, 1976, p.60-63).

xxv. F. Bertini, "Il 'Geta' di Vitale di Blois e la scuola di Abelardo", Sandalion, 2, 1979, p.257-265.

(11)

Il est bien entendu hors de propos de donner ici la description, même sommaire, de ces débats profonds et complexes. On s'efforcera donc de concentrer son attention sur la part qu'y tiennent les noms propres (chose assez malaisée, car ils font rarement l'objet d'un traitement spécifique, distinct de celui réservé aux noms "appellatifs", ou communs - décidément, cette catégorie lexicale a toujours embarrassé les logiciens !). Il faut toutefois remonter à la racine du problème que sont conduits à affronter les philosophes du langage à partir de la fin du XIe siècle. Pour le dire d'un mot (anachronique), c'est celui de la référence - par opposition à la période précédente où la question (n')était (que) celle du sens, le rapport entre le mot et la chose étant en quelque sorte pensé comme non-médiat, ainsi que nous espérons l'avoir montré plus haut. Autrement dit : qu'est-ce que je vise, quelle est mon intentio mentis lorsque je dis "Pierre" ou "Socrate" (ou aussi bien "homme", "blanc",

"cheval") ? Cette question, dont les implications dans les domaines de la noétique et de la théologie sont évidemment incalculables, tire modestement son origine de la mise en évidence d'une contradiction apparente entre la définition grammaticale que Priscien donne du nom et celle, logico-philosophique, proposée par Aristote : pour le premier, "le propre du nom est de signifier la substance et la qualité"xxvi; pour le second, il dénote soit la substance, soit la qualitéxxvii. C'est à Anselme de Cantorbéry que revient le mérite non seulement d'avoir identifié le problèmexxviii, mais aussi d'en avoir proposé une esquisse de solution, sur le mode de la synthèse conciliante. Son opuscule De grammatico jette en effet les bases d'une sémantique de la référence, et à cet égard, il n'est pas exagéré de dire qu'il détermine l'orientation de toute la spéculation linguistique, jusqu'au XIVe siècle inclus. Avec cet ouvrage, "un monde est en train de naître", écrit Alain de Liberaxxix.

Nous n'entrerons pas dans le détail des subtils raisonnements d'Anselme. Il nous suffira de dire qu'il établit que le nom signifie doublement : de façon intransitive, per se, il renvoie à la qualité, et de façon transitive, per aliud, c'est-à-dire à travers cette qualité, à la substance qui en est porteuse. Ces deux significations ne se situent pas exactement sur le même plan, le sujet d'inhérence étant simplement supposé par la qualité inhérente. Ainsi,

"grammairien" signifie per se "sachant la grammaire" et per aliud (cette qualité) "homme (sachant la grammaire)". Les spécialistes nous feront sans doute grief de cette simplification hâtive, mais il nous semble que ce qui s'amorce là, c'est la distinction destinée à devenir canonique entre "signification" et "appellation". Si cette dernière désigne le rapport qui unit le

xxvi. Priscien, 1855, t.2, p.55 (Inst.gramm., 2,18).

xxvii. Aristote, 1983, p.30 (Cat., 5, 3b 15).

xxviii. Parmi les grammairiens antérieurs, seul Sedulius Scottus, dans son commentaire hélas fragmentaire sur Priscien, amorce une discussion philosophique des notions de substance et de qualité (Sedulius Scottus, 1977, p.76-78).

xxix. De Libera, 1993, p.294.

(12)

mot à la chose réelle - en termes modernes : la dénotation -, l'autre renvoie à l'association qui se fait dans l'intellect, et à l'intérieur d'un univers de discours déterminé, entre le mot et un certain nombre de propriétés, de prédicats, d'unités sémantiques minimales (voces significativae). Ainsi, "cheval" est-il "ce cheval-ci" (appellatio), mais aussi "animal",

"quadrupède", "coursier", etc.. (significatio)xxx.

La question qui se pose à nous est de savoir si ce genre d'analyse sémantique peut aussi s'appliquer au nom propre. Et à cet égard, Anselme, qui semble toutefois le tenir pour acquis, n'est pas très explicite. Tentons toutefois de faire l'essai de la théorie sur un exemple. Le nom "Aristote", c'est incontestable, appelle un individu (né en Grèce au IVe siècle); mais pour le lettré du XIIe siècle, il signifie également le philosophe auteur des Catégories, le précepteur d'Alexandre, l'amant ridicule de Thaïs, etc... Ainsi, une proposition comme "Anselmus est Aristoteles" peut-elle être soumise à une double vérification. Du point de vue de l'appellatio, elle est absurde : in re, l'individu Anselme n'a aucun point de rencontre avec l'individu Aristote; in intellectu, en revanche, la ou les propriété(s) signifiée(s) par le nom "Aristote" peuvent être attribuées à Anselme - mettons "la qualité de logicien".

Notre énoncé est alors pourvu d'un sens, que la traduction française explicitera sous la forme : "Anselme est un Aristote" (formulation que la théorie rhétorique répertorie sous le nom d'"antonomase", et dont la littérature médiolatine, notamment dans le cadre de la topique de l'éloge ou du blâme, fournit d'innombrables exemples)xxxi. De même pourrait-on imaginer une phrase du type : "Gerbertus est Ottonis Aristoteles", "Gerbert est l'Aristote d'Otton", la vox significativa assumée par le nom "Aristote" étant alors celle de précepteur royal. Notons au passage que l'absence d'article en latin, qui sera bientôt ressentie comme un manque gênant par les logiciens, rend nécessaires de tels détours analytiques.

On mesure dès lors, nous l'espérons, le chemin parcouru depuis la conception étymologique, essentialiste du nom propre. Dans une phrase telle que Lucius est lucens scientia, le verbe être désigne une relation d'identité substantielle entre le sujet et une réalité extramentale, une chose-en-soi. Dans notre exemple Anselmus est Aristoteles, la copule

xxx. J. Jolivet, dans sa préface à Anselme 1986 (p.15) rappelle que le De grammatico a été composé par l'abbé de Bec sur la requête expresse de ses moines, et suggère à ce propos que ceux-ci, désormais issus pour la plupart de la classe des milites, sont porteurs d' "exigences juridiques nouvelles". Il y aurait donc un lien entre le droit de la famille et le développement de la dialectique. La piste indiquée ici de façon un peu confuse et elliptique nous paraît mériter d'être suivie par les historiens... On peut notamment imaginer que la question juridique du nom se pose d'abord dans les familles féodales.

xxxi. Les "arts poétiques" des XIIe et XIIIe siècles connaissent bien cette figure. Dans son Ars versificatoria (ca.1160), 1, 60-61, Mathieu de Vendôme la décrit en ces termes : "nomen speciale generalis nominis vicarium ad maneriem rei, non ad rem maneriei reduc(i)tur", distinguant à ce propos l'effectus sermonis (nous dirions : l'énoncé) et l'affectus sermocinantis (l'énonciation) (éd. F.Munari, Rome, 1988, p.89-90). Quant à Geoffroy de Vinsauf, il en fournit plusieurs exemples dans sa Poetria nova (ca.1210), v.923-935 (éd. E.Faral, Les arts poétiques du XIIe et du XIIIe siècle..., Paris, 1926, p.226).

(13)

indique une relation d'inhérence, de participation accidentelle du sujet à un ensemble de qualités. Dans l'opération de nomination, l'attention s'est transférée de la chose réelle à la dimension intellectuelle intervenant dans le processus signifiant. Ces analyses fort abstraites ont-elles quelque incidence sur l'attribution des noms de personnes dans la vie sociale ? Nous hésiterions assurément à l'affirmer. Hasardons toutefois l'hypothèse selon laquelle la multiplication des surnoms de type professionnel ou de type sobriquet, qui signifient participation d'un sujet à tel ou tel prédicat, n'est peut-être pas absolument sans rapport, même si elle est aussi induite par d'autres motivations plus pratiques, à ces descriptions théoriques du nom propre. Et si l'on ose énoncer une proposition encore plus conjecturale, ne pourrait-on imaginer que l'imposition du prénom, une fois leur part faite aux contraintes généalogiques et aux phénomènes de mode, reflète le passage, manifesté dans l'hagiographie, d'une "sainteté admirable" (donc incarnant une essence, comme le montrent les quelques exemples empruntés ci-dessus aux vies de saints altimédiévales) à une

"sainteté imitable" (donc participable), pour reprendre les termes d'André Vauchez ?xxxii C'est donc au De grammatico d'Anselme que l'on doit d'avoir jeté les bases de la réflexion du moyen âge central et tardif sur le langage et sur son rapport à l'être. Telle qu'elle s'y énonce, elle conserve toutefois une certaine rigidité formelle et fera l'objet de la part des penseurs du XIIe siècle et au-delà d'un certain nombre de critiques, adjonctions ou précisions. Au cours de la période qui nous occupe (première moitié du XIIe siècle), l'oeuvre de Pierre Abélard joue évidemment un rôle crucial dans ce travail d'approfondissement. Nul n'ignore en effet que le logicien du Pallet, à travers sa réfutation des thèses réalistes de Guillaume de Champeaux et vocalistes de Roscelin de Compiègne, développe une pensée très originale de l'individuel. Il ne nous semble pourtant pas d'une utilité décisive pour notre propos d'entrer dans le détail de sa réflexion sur le nom de personne, en tant qu'elle s'inscrit dans le cadre beaucoup plus large de la querelle des universaux, dont les tenants et aboutissants sont aujourd'hui bien connusxxxiii.

Le commentaire rapide d'un très intéressant passage du premier traité sur les Catégories nous aidera toutefois à concevoir quel est le statut réservé au nom propre par Abélardxxxiv. Son apport essentiel à la philosophie médiévale du langage est, comme on sait, l'attention qu'il porte à la dimension contextuelle, énonciative de l'usage des mots - ce que les spécialistes appellent leur "statut propositionnel". Prenant acte de la dimension temporelle (in tempore) de l'acte de parole, il montre que les mots signifient selon l'intentio

xxxii. A. Vauchez, "Saints admirables et saints imitables : les fonctions de l'hagiographie ont-elles changé aux derniers siècles du Moyen Age ?", in Les fonctions des saints dans le monde occidental (IIIe-XIIIe siècle), Rome, 1991, p.161-172.

xxxiii. De Libera, 1996.

xxxiv. Pierre Abélard, 1970, p.121-142.

(14)

imponentis; or, les usages du nom propre semblent bien résister à cette description grammaticale (per constructionem) de la signification : "même si nul ne m'appelle", la proposition ego nuncnpor Petrus reste vraie. Elle constitue d'autre part le strict équivalent logique de : ego sum Petrus. Le verbe "nuncupatif" doit donc être assimilé au verbe

"substantif" (être)xxxv. Au terme de cette analyse, dont les conclusions restent en partie implicites, nous pensons pouvoir déduire que, pour Abélard, le nom propre est pure référence (à l'individu qui le porte, non bien sûr à quelque réalité extramentalexxxvi) et non pas signe (de telle ou telle qualité). Autrement dit, l'acte de nomination n'est motivé ni par des contraintes externes du langage (dire l'être de la chose), ni par des nécessités qui lui seraient internes (exprimer ceci, à ce moment-ci) : il vise à désigner l'individu, rien de plus, rien de moins. C'est dans ce sens qu'un logicien un peu plus tardif déclarera qu'à la différence du nom appellatif, qui signifie pour l'intellect, le nom propre signifie pour l'imagination, en ce qu'il réfère aux propriétés sensibles, donc immanentes, de son porteurxxxvii. Certes, Abélard n'est pas nominaliste, mais il semble que, pour ce qui est de la catégorie particulière de mots qui nous intéresse, la nomination soit à ses yeux le pur effet d'un acte souverain, donc arbitraire, d'imposition. Puisqu'il en est ainsi, il s'agit donc de se garder de toute confusion entre les divers plans d'analyse de la signification : dans la Logica Ingredientibus, Abélard déclare que l'opposition grammaticale entre nom appellatif et nom propre ne recoupe pas la distinction logique entre universel et singulierxxxviii. Si nous comprenons bien, cela veut dire que le nom "Socrate" peut grammaticalement être prédiqué de plusieurs (comme dans le cas des figures d'antonomase que nous avons évoquées plus haut), mais que, logiquement, il n'est attribuable qu'à un seul être. Il n'y a donc pas coïncidence nécessaire entre l'exactitude grammaticale (donc relative à l'environnement contextuel) de l'énonciation et la vérité logique (donc absolue des déterminations accidentelles) de l'énoncé - deux plans que les analyses d'Anselme avaient quelque peu tendance à ne pas distinguer. La démarche du grammairien et celle du logicien, qui se confondaient chez l'abbé du Bec, tendent donc désormais à se différencier.

Voyons donc ce qu'il en est du nom propre du côté de la grammaire du XIIe siècle.

Nous nous bornerons à commenter brièvement un extrait de l'énorme Summa super

xxxv. Ibid., p.133-134.

xxxvi. Dans le même passage (p.128), Abélard épingle la faiblesse de la description étymologique du nom propre sur la base d'un exemple pittoresque, celui de la dérivation du nom Brito (Breton) à partir de brutus (brute). C'est, dit en substance Abélard, le hasard d'une rencontre avec un Breton particulièrement borné qui a inspiré le nomenclateur. Mais il ne sont ni tous ni les seuls bruti. Le nom, en déduirons-nous, ne dit donc pas l'Etre.

xxxvii. Logica modernorum, éd. L.M. De Rijk, Assen, 1967, t.II-2, p.709. Telle est aussi l'hypothèse développée par le bel article de Pariente cité supra (note 19).

xxxviii. Pierre Abélard, 1945, p.102-106.

(15)

Priscianum (ca.1140) du maître parisien Pierre Hélie, qui synthétise toute l'expérience en matière de réflexion sur le langage du demi-siècle qui la précède - à savoir celle d'Anselme, Abélard, Guillaume de Conches et surtout Guillaume de Champeaux, à qui il faut sans doute attribuer les Glosule super Priscianumxxxix qui constituent la source majeure de l'ouvrage de Pierre. Les quelques pages que Priscien, au livre 2 des Institutions grammaticalesxl, dédie au nom propre sont pour l'essentiel consacrées à la description du système anthroponymique romain des quatuor nomina qui, selon la tradition stoïcienne, sont expliqués, de façon d'ailleurs un peu confuse, par leur origine. C'est ensuite seulement qu'est posée par le grammairien romain la définition du nom propre comme signifiant naturellement la substance et la qualité d'un individu singulier - par opposition à l'appellatif, qui désigne également substance et qualité, mais de plusieurs, et à l'adjectif, qui ne renvoie qu'à la qualité. Les homonymies résultent de rencontres phoniques purement accidentelles (fortuitu et sola voce). Quelques brèves allusions sont enfin faites aux usages antonomastiques du nom propre. La glose dont Pierre Hélie, qui suit ici principalement Guillaume de Conches, équipe ces considérations un peu désordonnéesxli nous semble fort intéressante, en ce qu'elle explicite clairement de quelle manière le nom de personne fonctionne comme opérateur d'individualisation. Nous retiendrons de cet exposé trois aspects :

- le caractère motivé de la désignation anthroponymique. L'origine de la prénomination (inventio prenominis), dit Pierre Hélie, est double : d'une part et avant tout, la nécessité de distinguer des homonymes (differentia); c'est donc, dans la chaîne nominale, au prénom que revient le rôle de singulariser l'individu à l'intérieur du groupe. D'autre part, des circonstances aléatoires (casus), qu'il serait erroné d'interpréter comme renvoyant au caractère arbitraire de l'imposition du prénom; en fait, ce mot de casus se réfère à un mythe d'origine emprunté à Priscien : pour sceller leur entente avec les Sabins, les Romains des premiers temps décidèrent de donner à leurs fils en guise de prénom le nom maternel, sabin. Nous ne pensons pas qu'il faille voir dans cette alliance ethnique inscrite dans l'anthroponymie une métaphore des rapports qui ont pu s'établir au moyen âge entre noms romains et germaniques. Mais ce qui apparaît clairement là, c'est que l'imposition du nom a partie étroitement liée avec des stratégies politiques et familiales.

- le double niveau de signification du nom de personne. C'est à propos de l'agnomen et surtout du cognomen (fourvoyé par Priscien, il l'identifie au nom gentilice) que Pierre Hélie

xxxix. Selon L. Reilly, l'éditeur de la Summa (Pierre Hélie, 1993, p.22-26). Cf. aussi K.M. Fredborg,

"Tractatus Glosarum Prisciani in MS Vat.Lat.1486", Cahiers de l'Institut du Moyen Age grec et latin, 21, 1977, p.21-44.

xl. Priscien, 1855, t.2, p.57-59 (Inst.gram. II, 22-25).

xli. Pierre Hélie, 1993, p.214-221.

(16)

rejoint les analyses d'Anselme sur "grammairien". En effet, si le praenomen, imposé propter differentiam, a pour fonction spécifique d'individualiser, le cognomen, donné propter cognationem, assimile la personne à l'ensemble de sa parentèle et, constituant ainsi un facteur d'indifférenciation, pourrait être analysé comme appellatif, ou commun. S'il n'en va pas ainsi, c'est que le cognomen signifie doublement : en premier lieu (principaliter - Anselme aurait dit per se ), il renvoie à la famille, donc à un prédicat, en second lieu (secundario ou per aliud) à la substance, au sujet. Il n'est donc équivoque que par rapport à sa signification première, mais univoque quant à la seconde. Ce couple d'adverbes principaliter/secundario rythme toute la description que Pierre Hélie fait du nom propre. Il serait puéril de voir dans cette insistance sur la dualité la trace d'une réflexion ayant en perspective un système anthroponymique à deux éléments. Néanmoins, il apparaît ici, beaucoup plus nettement que dans toutes les sources antérieures, que le nom de personne a simultanément pour fonction d' "appeler" un être et de "signifier" sa participation à tel ou tel attribut (le groupe familial à travers le cognomen, professionnel ou autre à travers l'agnomen). Sur le nomen proprement dit, Pierre Hélie garde - et pour cause ! - un silence embarrassé : il n'a plus sa place dans le système.

- la transmission du nom. On se bornera à faire ici un sort rapide à une notation figurant vers la fin du passage commenté. Le problème soulevé est toujours celui de la communio nominum, de l'homonymie, génératrice d'équivocité. Elle peut, dit le grammairien, revêtir trois formes : naturelle, dans le cas des noms appellatifs, accidentelle (casualis), comme dans l'exemple classique de "Pyrrhus", qui désigne à la fois le fils d'Achille et le roi des Epirotes, qui n'ont entre eux aucun trait commun, ou intentionnelle (rationalis), "comme lorsqu'un filleul (filiolus) se voit imposer le nom de ses ancêtres (nomina patrum)xlii". Pierre Hélie ne s'avance pas plus sur cette voie anthropologique. Nous ne le ferons donc pas non plus. Mais il nous paraissait que cette indication cursive méritait d'être signalée à l'attention des historiens.

Peut-être, au moment de conclure, convient-il de signaler que le signataire de ces lignes n'est ni philosophe, ni linguiste. D'où le caractère assurément superficiel des analyses présentées ci-dessus. D'où notre répugnance aussi à nous aventurer dans le taillis de la grammaire "modiste" des maîtres universitaires du XIIIe sièclexliii. Auraient-ils d'ailleurs apporté beaucoup d'eau à notre moulin ? Ce qu'il nous a semblé percevoir, et que nous

xlii. Ibid., p. 218.

xliii. Parmi les textes de cette école que nous avons examinés, la réflexion la plus riche et la plus profonde sur notre sujet nous paraît être due à Jean de Dacie (Summa grammatica, éd. A.Otto, Copenhague, 1953, p.338-347) : le nom propre, qui n'est susceptible de recevoir aucun accident, y est décrit comme totalement arbitraire. Depuis les spéculations isidoriennes, la boucle est donc bouclée.

Bloch 1989 retrace le même parcours dans la perspective qui est la sienne de jeter des passerelles entre l'analyse anthropologique et l'herméneutique littéraire.

(17)

avons essayé d'exprimer, c'est en effet que ce sont les années 1080-1140 qui voient une mutation profonde dans la façon de penser le langage et, à l'intérieur de celui-ci, le nom propre. Qu'elle soit concomitante d'une évolution de système anthroponymique ne prouve, à la limite, rien. Ou en tous cas, nous laissons à la sagacité d'autrui le soin d'établir d'éventuelles passerelles interdisciplinaires.

Nous sommes peut-être, cependant, enfin en mesure d'expliciter les doutes que nous exprimions au début de cet article quant à la possibilité de définir l'existence et les caractères d'une homologie entre les théories successives (parfois si peu théoriques) du nom propre et les pratiques concrètes d'imposition du nom. La démarche étymologique prégnante au cours des premiers siècles du moyen âge doit se déchiffrer dans le cadre le plus large du rapport entre l'homme et le monde. Pour une pensée essentialiste, le contingent, l'accidentel ne sont pas dignes d'attention. Aussi l'analyse per etymologiam des noms de personnes n'a-t-elle aucune prétention à décrire le fonctionnement réel des pratiques de nomination. Il faut plutôt comprendre qu'à l'inverse, c'est par une sorte de déchirure providentielle dans le tissu des phénomènes que le nom d'un être peut (ou devrait) nous dire quelque chose de son essence. Aussi bien n'est-ce que dans le monde idéal de la création littéraire que cette coïncidence entre nom et essence se réalise pleinement. La théorie, qui vise l'idéalité, a pour seul rôle de poser en principe son existence latente : pour elle, ce n'est pas parce qu'un phénomène n'est pas vérifiable, ou plus exactement que l'on n'est pas intéressé à le vérifier systématiquement, qu'il n'est pas, au niveau plus profond de la Réalité essentielle, vrai. La nouvelle analyse, vers la fin du XIe siècle, de la signification par Anselme - ultérieurement approfondie par les Glosule super Priscianum et par Abélard - va fournir à Pierre Hélie les outils conceptuels pour décrire, même au moyen d'une grille de lecture désuète (les quatuor nomina), quelque chose qui fait penser à la réalité anthroponymique de son tempsxliv. On est donc en présence de deux démarches intellectuelles foncièrement différentes, la première envisageant in abstracto le nom comme totem, la seconde seule s'efforçant, mais de façon encore tâtonnante, de repérer des points de rencontre entre fonctionnement linguistique et fonctionnement social.

"Nommer, c'est classer". Tous les intellectuels du moyen âge auraient sans doute souscrit à cette assertion. Mais sans donner au second verbe toujours le même sens. Pour

xliv. Sur l'attention réelle portée par Pierre Hélie aux phénomènes linguistiques de son époque, voir Lusignan, loc.cit.supra (note 2).

M-JYT\SEMANTI.DOC - WINWORD

(18)

les cratyliens du haut moyen âge, le nom revêt une valeur en quelque sorte paradigmatique.

Il assigne à l'individu sa place dans le cosmos, le fait en somme coïncider avec son essence. Nommer un être, c'est le connaître substantiellement, puisque nomen vient de nosco. Le XIIe siècle revient à l'étymologie proposée par Priscien, qui associe nomen au verbe grec nemein, distribuer, attribuer, partager. Le nom situe désormais l'être nommé dans une chaîne syntagmatique, l'individu dans le groupe, le mot dans le système de la langue. Comme le suggère fortement Abélard, le nom ne signifie dès lors que contextuellement. Doit-on choisir entre ces deux approches ? Si l'on en juge par les incertitudes et par les discussions des linguistes et logiciens modernes, le débat n'est pas clos ...

Jean-Yves TILLIETTE

(19)

BIBLIOGRAPHIE

TEXTES

Platon, Cratyle, éd. et trad. L.Méridier, Paris, 1931.

Aristote, Les Attributions (Catégories). Le texte aristotélicien et les prolégomènes d'Ammonios d'Hermeias, présentés, traduits et annotés par Y.Pelletier, Montréal - Paris, 1983.

Jérôme, Liber interpretationum hebraicorum nominum, éd. P.de Lagarde, Turnhout (CCSL 72), 1959, p. 57-161.

Priscien, Institutiones Grammaticae, éd. M.Hertz, in H.Keil, Grammatici latini, t. 2 et 3, Leipzig, 1855 (réimpr. Hildesheim, 1971).

Isidore de Séville, Etymologiarum sive Originum libri XX, éd. W.M. Lindsay, Oxford, 1911, 2 vol.

Ars Bernensis, éd. H.Hagen in Keil, op.cit., t.8, p.62-412.

Sedulius Scottus, In Donati artem minorem. In Priscianum. In Eutychem, éd. B.Löfstedt, Turnhout (CCCM 40 C), 1977.

Anselme de Cantorbéry, De grammatico, éd. et trad. par A.Galonnier, in M.Corbin, L'oeuvre de S.Anselme de Cantorbéry, t.2, Paris, 1986, p.23-105.

Pierre Abélard, Logica "Ingredientibus" (Glosae super Porphyrium), trad. par M.de Gandillac, in Oeuvres choisies d'Abélard, Paris, 1945, p.77-127.

Dialectica, éd. L.M. De Rijk, Assen, 1970, 1 vol.

Pierre Hélie, Summa super Priscianum, éd. L.Reilly, Toronto, 1993, 2 vol.

LITTÉRATURE SECONDAIRE

A. Bisanti, dans Filologia mediolatina 10 (2003)

R.H. Bloch, Etymologie et généalogie. Une anthropologie littéraire du Moyen Age français (trad.fr.), Paris, 1989.

M. Bourin et alii, Genèse médiévale de l'anthroponymie moderne, Tours, 1989-1995, 3 t. en 5 vol.

A. Chalanset, C. Danziger (sous la direction de), "Nom, prénom. La règle et le jeu", Autrement, 147, septembre 1994.

R. Dragonetti, La vie de la lettre au Moyen Age, Paris, 1980.

J. Fontaine, Isidore de Séville et la culture classique dans l'Espagne wisigothique, Paris, 19832, 3 vol.

B. Fraenkel, La signature. Genèse d’un signe, Paris, 1992, p. 98-121.

(20)

G. Frege, "Sens et dénotation" (trad.fr. de "Sinn und Bedeutung"), dans Ecrits logiques et philosophiques, Paris, 1971, p.102-126.

A.H. Gardiner, The Theory of Proper Names, Londres-Oxford, 1957.

M.-N. Gary-Prieur, Grammaire du nom propre, Paris, 1994.

G. Genette, Mimologiques. Voyage en Cratylie, Paris, 1976.

W. Haubrichs, "Veriloquium nominis. Zur Namenexegese im frühen Mittelalter. Nebst einer Hypothese über die Identität des 'Heliand'-Autors", in Verbum et Signum. Beiträge zur mediävistischen Bedeutungsforschung [= Mélanges Friedrich Ohly], Munich, 1975, vol.1, p.231-266.

J. Jolivet, Arts du langage et théologie chez Abélard, Paris, 19822.

S. Kripke, La logique des noms propres (trad.fr. de : Naming and Necessity), Paris, 1982.

C. Levi-Strauss, La pensée sauvage, Paris, 1962.

A. de Libera, La philosophie médiévale, Paris, 1993.

La querelle des universaux. De Platon à la fin du Moyen Age, Paris, 1996.

A. de Libera et I. Rosier, "La pensée linguistique médiévale", in S. Auroux, Histoire des idées linguistiques, t.2, Paris, 1992.

L. Linsky, Le problème de la référence (trad.fr.de : Referring), Paris, 1974.

J.S. Mill, Système de logique (trad.fr.), Bruxelles, 1988 (réimpr. de l'éd. de 1866).

J. Molino, (sous la direction de) "Le nom propre", Langages, 66, juin 1982.

J.-Cl. Pariente, Le langage et l'individuel, Paris, 1973.

F. Rigolot, "Rhétorique du nom poétique", Poétique, 7, 1976, p.466-483.

B. Russell, "On Denoting", Mind, 1905, p.478-493.

F. Zonabend, "Le Nom de personne", L'Homme, 20, 1980, p.7-22.

(21)

N O T E S

*

Les références abrégées renvoient aux ouvrages mentionnés dans la bibliographie sommaire figurant en appendice à cet article.

M-JYT\SEMANTI.DOC 47491 CARACTERES

Références

Documents relatifs

699 Nous comprenons « substancia » comme la substance, l’essence, c’est-à-dire ce qu’il y a d’essentiel : les analyses donnent bien les éléments essentiels, fondamentaux

UN ENSEMBLE SÉPULCRAL DU HAUT MOYEN-ÂGE À BOZEL, LIEU-DIT LES TOMBETTES (SAVOIE) 3 Plusieurs sépultures ont été anciennement mises au jour dans le quartier des Tombettes au nord-

Dans la série « collège autour d'un thème », cet article présente la réalisation de quelques expériences simples (et peu coûteuses) à réaliser sur 2 séances d'une heure,

[D’autres pourront bien chercher de meilleures sources d’inspiration et compléter ce texte avec l’aide du Saint Esprit] ; mais mettons-nous déjà à l’ouvrage et racontons :

Mais surtout, il n’y a plus de dieux huma- nisés avec leurs caprices, leurs amitiés et leurs haines, maintenant c’est le Christ, Dieu fait homme, qui se montre après avoir

- une activité dans laquelle les états mentaux comme les intentions, les représentations, les croyances, les différentes émotions des enseignants et des

Le réseau de drainage à l'est de Lunata, dans la zone la plus humide de la plaine orientale de Lucques, au nord du Lac de Bientina, semble lui- aussi lié à cette

Celui-ci avait fait de la construction d’un premier ouvrage en terre, réputé inefficace, un signe de la paresse et de la bêtise des Bretons, obligés dans un se- cond temps de faire