Thesis
Reference
Les facteurs pré-hospitaliers sont-ils des éléments prédictifs de la qualité de vie à long terme après la mise en place d'une prothèse partielle de hanche suite à une fracture du col du fémur : expérience
de quatre hôpitaux neuchâtelois
LÜTHI (VALENTIN), Barbara
Abstract
Cette étude rétrospective sur 5 ans (1995-1999) regroupe 191 patients ayant présenté une fracture du col du fémur proximale dans le canton de Neuchâtel. Son but est de rechercher l'impact éventuel de facteurs pré-hospitaliers (sexe, âge, lieu de vie et risque ASA) sur la qualité de vie à long terme après un tel traumatisme. L'âge (> 85 ans), le stade ASA (III ou IV) ou le lieu de vie (home si II), le lieu de vie (home) et le sexe (masculin) diminuent la qualité de vie. Ces résultats, qui pourraient être étayés par une étude prospective plus large, favorisent une prévention ciblée de la fracture du col du fémur au cabinet du médecin de premier recours.
LÜTHI (VALENTIN), Barbara. Les facteurs pré-hospitaliers sont-ils des éléments prédictifs de la qualité de vie à long terme après la mise en place d'une prothèse partielle de hanche suite à une fracture du col du fémur : expérience de quatre hôpitaux neuchâtelois . Thèse de doctorat : Univ. Genève, 2010, no. Méd. 10611
URN : urn:nbn:ch:unige-53360
DOI : 10.13097/archive-ouverte/unige:5336
Available at:
http://archive-ouverte.unige.ch/unige:5336
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Département de chirurgie
Service de chirurgie orthopédique et Traumatologie de l’appareil locomoteur
Thèse préparée sous la direction
Du Professeur Pierre Hoffmeyer et du Dr Yves Groebli, Privat-docent
"Les facteurs pré-hospitaliers sont-ils des éléments prédictifs de la qualité de vie à long terme après la mise en place d'une prothèse
partielle de hanche suite à une fracture du col du fémur, expérience de quatre hôpitaux neuchâtelois"
Thèse
présentée à la faculté de médecine de l’Université de Genève
pour obtenir le grade de Docteur en médecine
par
Barbara Roswitha Juliette LUTHI (VALENTIN) de
De Chênes-Bougeries (GE) et Lauperswil (BE)
Thèse n° 10611
Neuchâtel
2010
Remerciements :
Je tiens à remercier mon mari, ma famille et mes amis, pour leurs encouragements, leurs conseils et leurs soutiens.
Au Dr Walder qui m’a proposé cette thèse.
Au Dr Groebli qui m’a guidé, soutenu et transmis son énergie pour la conclusion de ce travail.
A la Dresse Zimmerli pour son aide ponctuelle et sa gentillesse.
Au Professeur Hoffmeyer qui a accepté de superviser ma thèse.
1. Résumé:
L’âge de la population ne cesse d’augmenter en Suisse. Actuellement, tout sexe confondu, on estime une espérance de vie moyenne de près de 80 ans. La fracture du col du fémur est fréquente chez la personne âgée. Son incidence ne cesse de croître, avec une répercussion certaine sur l’état de santé de ces patients.
Cette étude rétrospective porte sur 5 ans (1995-1999) et regroupe 191 patients ayant présenté une fracture du col du fémur proximale dans le canton de Neuchâtel. Par rapport à la population du canton de Neuchâtel qui s’élève à 168'000 habitants, ce collectif représente moins d’un cinquième du total des fractures de l’extrémité proximale du fémur prévisible pendant une période de 5 ans (1). Son but est de rechercher l’impact éventuel de facteurs pré-hospitaliers (sexe, âge, lieu de vie et risque ASA) sur la qualité de vie à long terme après un tel traumatisme.
En début 2003, nous avons envoyé un questionnaire d’évaluation aux patients afin de mieux déterminer leur qualité de vie sur des critères tels que la douleur, le besoin de moyens auxiliaires et d’aide aux activités de la vie quotidienne (AVQ). Les réponses ont ensuite été analysées grâce à une évaluation statistique.
L’âge avancé (plus de 85 ans), le stade ASA (III ou IV) ou le lieu de vie (home si âgé de moins de 85 ans) augmentent significativement le taux de la mortalité.
A trois ans, seuls 30 patients peuvent répondre à notre questionnaire sur les 56 survivants. Selon ces 30 réponses, le stade ASA (supérieur à II), le lieu de vie (home) et le sexe (masculin) sont des facteurs associés à la diminution de la qualité de vie (plus grande nécessité de moyens auxiliaires à la marche et d’aide aux activités de la vie quotidienne).
Ces résultats, qui pourraient être étayés par une étude prospective plus large,
favorisent une prévention ciblée de la fracture du col du fémur au cabinet du
médecin de premier recours.
Tables des matières :
1. Résumé p. 3
2. Introduction p. 5
3. La prévention primaire de la fracture du col du fémur p. 7 4. Organisation du système des soins hospitaliers neuchâtelois
dans le bas du canton et le Val-de-Travers p. 9
5. Différentes définitions : p. 11
A. Les fractures de l’extrémité proximale du fémur p. 11
A.1. Classification selon Pauwels p. 12
A.2. Classification selon Garden p. 13
A.3. Traitement des fractures du col du fémur p. 15
B. Le risque ASA p. 15
6. Matériel et méthodes p. 16
7. Résultats
A. Etude de la cohorte (N=191) p. 18
B. Analyse du questionnaire (N=30) p. 22
8. Discussion p. 25
9. Conclusion p. 30
10. Bibliographie p. 31
11. Annexes : p. 34
A. Questionnaire p. 34
B. Les statistiques complètes p. 38
C. Les statistiques du questionnaire p. 61
2. Introduction :
La fracture du col du fémur est fréquente et coûteuse. Elle peut survenir à tout âge et apparaît de manière prépondérante chez le sujet âgé (47).
En 1990, on estimait à 1,66 millions le nombre de fractures de la hanche dans le monde, chiffre qui pourrait s’élever à 6,26 millions en 2050 selon les données démographiques. Cette augmentation est due principalement à un accroissement de la population âgée qui présente une espérance de vie de plus en plus longue.
Actuellement, on recense mondialement 322 millions d’individus âgés de plus de 65 ans et ce chiffre est estimé à 1555 millions en 2050 (1). En Suisse, l’incidence des fractures n’augmente pas, tout au plus leur nombre total absolu pourrait changer. Cela semble être également le cas dans plusieurs pays industrialisés (nord de l’Europe, Amérique du Nord et Australie), probablement grâce aux moyens mis en place dans la prévention ciblée de l’ostéoporose et des risques de chute. (36) (37). Toutefois quelques études ont montré que cette augmentation atteint un plateau, voire même que le risque de fracture avait tendance à diminuer (42) (43) (44) (45).
De 1900 à 2000, la population suisse a plus que doublé, passant de 3,3 millions à 7 millions. Bien que l’ensemble des âges contribue au recul de la mortalité, ce sont pour les âges avancés (65 ans et plus) que nous observons le plus grand recul de ce taux (2). Bientôt dans notre pays, une personne sur six aura plus de 65 ans.
En 2000, l’espérance de vie moyenne à la naissance était de 76,9 ans pour les hommes et de 82,6 ans pour les femmes. L’espérance de vie d’une femme de 65 ans était de 20,7 ans et celle d’un homme de 16,9 ans (3).
Ces dernières décennies dans différents pays, plusieurs études ont été réalisées concernant les fractures de hanche en s’intéressant au taux de mortalité.
En Suisse et notamment à Neuchâtel, peu d’études on été effectuées sur ce sujet (1) (27) (30) (33) (34).
En outre, à l’heure actuelle, le réseau de soins se modifie grandement dans le bas du canton de Neuchâtel. Les différentes chirurgies sont centralisées en vue d’une optimalisation du rapport qualité/prix, dans le souci de diminuer les coûts de la santé. C’est dans cette situation que nous nous sommes penchés sur les patients opérés d’une hémi-arthroplastie de la hanche suite à une fracture du col du fémur dans les principaux hôpitaux du bas du canton de Neuchâtel et du Val-de- Travers, de 1995 à 1999.
Il s’agit des hôpitaux de la ville (des Cadolles et de Pourtalès), de l’hôpital de la
Providence et de l’hôpital du Val-de-Travers. Ce sont des hôpitaux de soins
physiques, avec respectivement 231, 86 et 48 lits d’hospitalisation. Notre intérêt s’est focalisé sur la qualité de vie et le devenir des patients opérés d’une prothèse partielle de hanche en tenant compte des données pré-hospitalières (telles le sexe, l’âge, le lieu de vie et le risque ASA).
Actuellement la prévention primaire de la fracture du col du fémur se base essentiellement en tentant d’agir sur des facteurs de risques bien connus, soit l’ostéoporose, un index de masse corporel bas, un antécédent de fracture et un risque accru de chute.
Le postulat de cette thèse était de chercher sur la base de simples éléments (l’âge, le sexe, le lieu de vie et le risque ASA), s’il est possible de mettre en évidence un groupe de patients à risque susceptible de présenter une diminution de la qualité de vie après une fracture de la hanche. Les médecins de premier recours disposeraient ainsi d’éléments objectifs pour la prévention primaire de la fracture du col du fémur chez des patients à risque. Cependant, pour l’évaluation de la qualité de vie, nous avons été confronté à une cohorte trop faible (due à la mortalité ou à un manque de discernement du à des troubles cognitifs) et donc à des résultats statistiquement non significatifs. Bien que la qualité de vie étant différente de la survie, nous avons orienté notre étude sur ce dernier élément à la recherche d’un groupe de patient à risque.
3. La prévention primaire de la fracture du col du fémur :
La prévention primaire de la fracture du col du fémur vise trois buts principaux : la lutte contre l’ostéoporose, la diminution du risque de chute et la réduction de l’impact de la chute.
La prise en charge de l’ostéoporose vise principalement l’augmentation de la résistance osseuse. La densité osseuse est un des paramètres mesurables de la résistance osseuse mais il n’est pas le seul élément directement en relation avec la résistance osseuse, d’autres facteurs comme la trabéculation, le cross-linking etc. interviennent. Il faut souligner que, contre les défauts d’architecture osseuse, nous n’avons à ce jour aucun moyen de lutte. La densité osseuse est évaluée par la minéralométrie ou densitométrie à Rayons X. On obtient avec cet examen deux valeurs, le « t-score » et le « z-score ». Le « t-score » équivaut à la déviation standard entre la densité osseuse mesurée et la densité moyenne d’une population jeune. Le z-score équivaut à la déviation standard entre la densité osseuse mesurée et la densité moyenne d’une population d’âge similaire. Un « t- score » inférieur à 2,5 pose le diagnostic d’ostéoporose. Des mesures générales favorisent déjà le maintient de la densité osseuse : l’exercice, une exposition au soleil (apport en vitamine D), un apport calcique et protéinique journalier suffisant. La pharmacologie peut venir en aide avec une suppléance en calcium et vitamine D, la prescription de biphosphonates qui diminue le turnover osseux ainsi que la substitution hormonale chez les femmes (4) (5) (35) (37) (48).
Le risque de chute est une entité multifactorielle qui comprend le risque
individuel, comportemental et environnemental. Une personne âgée de plus de
65 ans sur trois fait au moins une chute dans l’année et les chutes entraînent une
fracture du fémur dans 1% des cas. Le risque individuel comprend les
pathologies chroniques dues au vieillissement (arthrose des membres inférieurs,
séquelles d’AVC, maladie de Parkinson, troubles cognitifs, démence, troubles
de la vision, etc.), ainsi que les troubles de l’équilibre et de la marche. De plus
certaines affections peuvent contribuer à augmenter le risque de chute: une
hypotension orthostatique, une déshydratation, une hypoglycémie, une
malnutrition, une dépression, une infection, une incontinence urinaire de type
urge, etc. Au niveau comportemental, outre une activité à risque (la descente
d’escalier, l’imprudence), l’absence de moyens auxiliaires, des chaussures ne
tenant pas bien le pied, le port de lunettes à double foyer, le manque d’exercice
physique et les médicaments (polymédication, effets secondaires, interactions
médicamenteuses, mauvaise observance) jouent un rôle important dans le risque
de chute. Les facteurs environnementaux se trouvent fréquemment impliqués
dans les chutes, surtout la qualité du sol, un mauvais éclairage et les obstacles au
déplacement. Face au risque de chute, le médecin de premier recours effectue
une évaluation individuelle lui permettant d’estimer les troubles de l’équilibre et de la marche, l’indépendance aux activités de la vie quotidienne, la fonction cognitive et la thymie, la vision, l’état nutritionnel. Cette évaluation lui permet d’intervenir en améliorant la mobilité du patient, en ajustant la médication, en adaptant le logement et en stimulant le patient à faire des exercices et à maintenir des contacts sociaux (5) (6).
Le risque de fracture de la hanche peut également être estimé à travers un score clinique, reprenant entre autre les deux paramètres discutés ci-dessus. Plusieurs scores cliniques sont proposés, comprenant des éléments non modifiables (p ex : anamnèse familiale, antécédents, âge et état général, poids, taille, pouls) et modifiables (p ex : médicaments, mobilité, vision), dérivés d’études cliniques observationnelles (39) (40). Chacun a ses avantages et limites. Parmi ceux-ci, un outil validé par l'Organisation mondiale de la santé permettant de calculer le risque pour une personne donnée d'avoir une fracture liée à l'ostéoporose dans les dix ans semble prometteur. Ce modèle, appelé FRAX, a été développé à partir de cohortes de populations (environ 60000 personnes) étudiées en Europe, en Amérique du Nord, en Asie et en Australie. Il calcule un risque individuel, par rapport à la population environnante et ajusté pour le sexe, l’âge et l’ethnie, d’avoir une fracture de hanche et une fracture majeur d’origine ostéoporotique.
Les valeurs limites de recommandations pour débuter un traitement, établies par la fondation internationale de l’ostéoporose, sont de 3% ou plus pour le risque de fracture de hanche et 20% ou plus pour le risque de fracture majeur d’origine ostéoporotique (41)
Pour finir, la réduction de l’impact de la chute est réalisée par le port de protège- hanches. Il s’agit de coques qui absorbent le choc et distribuent l’impact de la chute sur les tissus mous entourant l’articulation coxo-fémorale. Plusieurs études ont mis en évidence que l’efficacité de ce moyen préventif ne s’observe que chez les patients à haut risque de fracture et résidant dans des homes. De plus des nettes difficultés d’observance ont été démontrées. Actuellement, le port de protège-hanches est recommandé dans les EMS auprès de patients motivés à haut risque de fracture (7) (8) (9).
4. Organisation du système des soins hospitaliers neuchâtelois dans le bas du canton et le Val-de-Travers :
En l’an 2000, le canton de Neuchâtel compte 166'476 âmes avec 48,4%
d’hommes et 51,6% de femmes. Parmi cette population 11'146 hommes et 19'447 femmes ont plus de 65 ans, soit 36,4% et 63,6% respectivement. Par rapport à la population totale du canton, il y a 18,3% de personnes en âge d’AVS, soit un peu plus d’une personne sur six. (10)
Nous décrivons le système de soins du bas du canton de Neuchâtel et du Val-de- Travers tel qu’il était en place durant les 5 années d’observations de cette thèse.
Comme mentionné plus haut, le système de santé s’est actuellement modifié dans le canton de Neuchâtel.
Les principaux hôpitaux du bas du canton (Cadolles, Pourtalès et Providence) sont situés dans la ville même de Neuchâtel et drainent la population du district de Neuchâtel, une partie du district du Val-de-Ruz (les habitants peuvent se rendre aussi à la Chaux-de-Fonds ou à l’hôpital de Landeyeux dans le Val-de- Ruz) et de Boudry (l’hôpital de la Béroche accueille les autres patients du district). L’hôpital du Val-de-Travers draine les citoyens du district du Val-de- Travers et une petite partie du district de Le Locle (l’hôpital du Locle ou de la Chaux-de-Fonds prennent en charge la majorité de la population de ce district).
Les admissions pour suspicion de fracture du col du fémur étant bien plus
faibles dans les hôpitaux de la Béroche et de Landeyeux en comparaison de
celles de la ville de Neuchâtel et du Val-de-Travers, nous n’avons pas effectué
de recherches de dossiers dans ces établissements.
Dans le bas du canton de Neuchâtel, lorsqu’un patient chute et présente une suspicion de fracture du col du fémur, soit il est dans un état stable et une ambulance est dépêchée sur place pour le transporter, soit il est dans un état instable et il est possible de faire appel 24h/24 au SMUR (Service Mobile d’Urgence et de Réanimation, assuré par les médecins de l’hôpital de Cadolles) pour les premiers soins avant le transport. Dans le cas d’un patient stable, il peut se rendre à l’hôpital des Cadolles, à l’hôpital de Pourtalès ou à l’hôpital de la Providence. Les patients instables sont transportés directement à l’hôpital des Cadolles, seul hôpital du bas du canton à bénéficier de soins intensifs. L’hôpital des Cadolles comprend 65 lits de chirurgie, l’hôpital de Pourtalès 28 et celui de la Providence 42 lits.
Dans le Val-de-Travers le service de SMUR est assuré 24h/24 par trois médecins installés et un médecin-anesthésiste mais l’hôpital du Val-de-Travers, comprenant 20 lits de chirurgie, n’a pas un service de soins intensifs. Les patients instables sont adressés à l’hôpital des Cadolles.
A partir d’octobre 2005, l’hôpital des Cadolles ferme définitivement ses portes et les patients sont tous regroupés à l’hôpital de Pourtalès où le SMUR et les soins intensifs sont aussi transférés.
5. Différentes définitions :
Il nous paraît important de définir la classification, le traitement des fractures du col du fémur ainsi que la classification ASA (American Society of Anesthesiologists) utilisée.
A. Les fractures de l’extrémité du fémur proximal:
La situation particulière de la tête fémorale, avec sa vascularisation provenant exclusivement des artères circonflexes situées à la base du col, met en péril la consolidation des fractures survenant à cet endroit, voire la vitalité de la tête fémorale.
On distingue les fractures du fémur cervicales avec un trait de fracture intra- articulaire et une vascularisation de la tête fémorale compromise, les fractures per-trochantériennes ou inter-trochantériennes, extra-capsulaires avec comme problème majeur celui de la stabilisation et les fractures sous-trochantériennes, dues souvent à un traumatisme de haute énergie et survenant chez les jeunes (11).
Notre étude n’a retenu que les fractures cervicales fémorales. Leur pronostic
dépend de facteurs mécaniques et biologiques, qui sont pris en compte
respectivement dans les deux classifications habituelles, celles de Pauwels et de
Garden. Nous avons opté dans notre étude pour la classification selon Garden
qui est celle que nous rencontrons le plus souvent dans la littérature.
A.1. Classification selon Pauwels :
La classification selon Pauwels (11) prend en considération le facteur mécanique. L’angle du trait de fracture avec l’horizontale, sur les clichés radiologiques de la hanche de face, associé aux forces de compression, de cisaillement et de la résultante de ces deux forces déterminent les risques de pseudarthrose et de nécrose. Cette classification comprend trois types de fracture :
Pauwels I :
Le trait de fracture fait avec l’horizontale un angle inférieur à 30°, la tête fémorale est engrenée en valgus et la situation mécanique est stable.
Pauwels II :
L’angle est de 30 à 50°, les forces de cisaillement croissent et le risque de
pseudarthrose augmente.
Pauwels III :
L’angle avec l’horizontale est supérieur à 50° et la situation mécanique est très défavorable.
A.2. Classification selon Garden :
La classification selon Garden (11) s’établit à l’aide d’un cliché radiographique de la hanche de face et de profil. Elle est basée sur des facteurs biologiques, soit la rupture de la trabéculation du col fémoral, au niveau de son renforcement partant de la corticale inférieure du col en direction du pôle céphalique supérieur. Cette rupture induit un changement d’orientation des trabécules au niveau de la tête fémorale, dont on en distingue la bascule, ce qui permet de classifier les fractures selon Garden en quatre types :
Garden I :
La tête est basculée en valgus, une pseudarthrose est improbable, mais une
nécrose ne peut être exclue, les vaisseaux abordant le pôle supérieur de la tête
peuvent avoir été coudés.
Garden II :
Les trabécules sont en continuité sur le cliché de face mais ils montrent un angle antérieur sur le profil. Cette situation n’est pas fréquente avec un risque de bascule secondaire, de pseudarthrose et de nécrose (vaisseaux postérieurs coudés).
Garden III :
La tête est basculée en varus, situation défavorable avec un haut risque de déchirure des vaisseaux supérieurs du col et par conséquence de nécrose.
Garden IV :
Les trabécules sont brisés et la tête a retrouvé son orientation anatomique
primitive dans le cotyle. Il y a une séparation complète de la tête fémorale avec
perte de contact tête-col et une bascule postérieure. Tous les éléments
vasculaires sont déchirés et la nécrose de la tête est plus que probable, même si
l’ostéosynthèse rétablit le contact de la tête avec le col.
A.3. : Le traitement des fractures du col du fémur :
Le traitement des fractures fémorales cervicales est basé sur l’âge et le niveau de bascule de la tête fémorale. Chez le patient jeune, si la bascule le permet, le traitement chirurgical consiste en un triple vissage ou la mise en place d’une vis à compression de type DHS™ (Dynamic Hip Screw, Synthes, Oberdorf). Chez le patient âgé, il existe deux options de traitement, conservateur ou chirurgical, en fonction du déplacement du fragment céphalique, de l’état de santé physique et mental. Pour le traitement chirurgical on peut proposer : Soit une réduction et fixation par triple vissage ou par vis à compression pour éviter un déplacement secondaire, soit la mise en place d’une prothèse partielle voire totale de la hanche selon le niveau d’activité ou la présence d’un modelé arthrosique.
B. Le risque ASA :
Face au risque que peut encourir le patient lors d’une anesthésie, la « American Society of Anesthesiologists » (ASA) a proposé une classification afin de standardiser l’état clinique du patient. Il ne s’agit pas d’une évaluation du risque anesthésique proprement dit, mais d’une échelle visant à évaluer le devenir du patient en post-opératoire. La corrélation entre le score ASA, les complications et la mortalité post-opératoire a été validée. Cette classification se base sur l’importance des co-morbidités du patient et va d’un score de 1 à 5 (12).
Classe Etat physique
1 Patient en bonne santé et en bon état général
2 Patient présentant une atteinte du système, mais tout à fait bien contrôlée (p.ex. : diabète compensé par le traitement)
3 Patient présentant une atteinte sévère d’un système, limitant son activité (p.ex. : maladie coronarienne symptomatique)
4 Patient présentant une pathologie invalidante, mettant sa vie en danger (p.ex. : insuffisance cardiaque décompensée)
5 Patient moribond, qui ne survivrait pas au-delà de 24
heures (p.ex. : anévrisme de l’aorte rompu)
6. Matériel et méthodes :
Notre étude rétrospective s’est basée sur les dossiers de patients hospitalisés dans la période du 1
erjanvier 1995 au 31 décembre 1999 dans les quatre hôpitaux déjà mentionnés. A travers les registres des blocs opératoires et des protocoles opératoires, nous avons relevé un total de 218 patients opérés d’une hémi-arthroplastie de hanche durant cette période. Nous n’avons pu en retenir que 191. Nous avons récusé 24 cas par manque de certaines données (principalement la provenance) et trois en raison d’une fracture pathologique (deux sur métastase d’un cancer du sein et une sur métastase d’un cancer de la prostate). Au final, la cohorte étudiée comprend 38 patients de l’hôpital des Cadolles, 65 de l’hôpital de Pourtalès, 37 de l’hôpital de Couvet et 51 de l’hôpital de la Providence. A relever que nous n’avons pas fait appel à une commission d’éthique.
Nous avons classé les patients en trois catégories, soit les patients de moins de 75 ans, les patients entre 75 à 84 ans et les patients de plus de 85 ans. La plupart des études rencontrées comprennent en effet ces catégories ou au moins une partie (plus de 85 ans) (14) (16) (18) (20) (30).
Trois catégories de taux de survie ont été établies : Moins d’un an, de 1 à 3 ans et de plus de 3 ans après la date de l’opération, ce qui a prolongé la période d’observation de la mortalité jusqu’à fin 2002.
La provenance des patients a été classé en deux groupes selon leur lieu de vie avant l’hospitalisation : domicile ou home. Le groupe « domicile » comprend les patients habitant dans un logement privé. Le groupe « home » comprend les patients vivant en EMS, les patients des hôpitaux psychiatriques (puisqu’ils nécessitaient une prise en charge à long terme en institution) ainsi que les patients en provenance d’autres hôpitaux ou cliniques (car ils séjournaient déjà dans des homes avant cette première hospitalisation).
Pour l’étude statistique, nous avons utilisé le programme Systat en analyse bi-
variée et la fonction du Chi-carré, utilisés fréquemment en biostatistique. Le test
du Chi
2est utilisé pour vérifier une association entre deux variables mesurées
sur une échelle nominale (comme l’âge et le sexe). Le Chi
2repose sur le postulat
que les données proviennent d’un échantillon aléatoire. Il ne faut pas que
l’échantillon soit trop petit et que dans plus de 1/5 de cellules il y ait moins de
5% d’individus. L’hypothèse nulle du test est que l’association observée entre
les deux variables tient uniquement du hasard. Pour rejeter cette hypothèse, il
faut calculer la probabilité que la distribution observée ne soit due uniquement
qu’au hasard. Pour ce faire, on compare les fréquences observées dans chaque
cellule du tableau croisé de la distribution des observations avec les fréquences
attendues, qui sont le nombre d’observations qui apparaîtrait dans chaque cellule
si la distribution était parfaitement proportionnelle à la distribution générale dans le tableau. Le test du Chi
2permet d’établir les probabilités que la distribution observée n’est pas due uniquement au hasard. Formellement, le Chi
2est la somme des carrés des écarts entre les fréquences attendues et observées, divisée par les fréquences attendues. Plus le Chi
2est élevé, plus les chances que la distribution soit due au hasard sont minces.
Les mesures statistiques sont faites en parallèle avec la valeur de probabilité
«p ». Pour mémoire, la valeur « p » indique la probabilité que le résultat d'une étude épidémiologique puisse être attribué au seul fait du hasard. A strictement parler, la valeur p désigne le risque que l'hypothèse nulle soit rejetée à tort (et que la différence observée entre les groupes soit en réalité due au hasard). Si la valeur « p » est inférieure à 0,05, la probabilité que le résultat soit dû au hasard est inférieure à 5 %, ce qu'on désigne comme un résultat «statistiquement significatif». Donc, plus la valeur « p » est faible, moins il est probable que le résultat de l’étude soit le fruit du hasard.
En début 2003, nous avons envoyé un questionnaire d’évaluation aux patients
sous forme de QCM (voir annexe 1), afin de mieux déterminer leur qualité de
vie sur des critères tels que la douleur, le besoin de moyens auxiliaires et d’aide
aux activités de la vie quotidienne (AVQ).
7. Résultats :
A. Etude de la cohorte (N=191)
Comme attendu en regard des statistiques actuelles de démographie (6) (13), nous avons un total de 31 hommes et 160 femmes, soit 16,2 % d’hommes pour 83,8 % de femmes. La moyenne d’âge s’élève à 79,86 ans, avec des extrêmes de 38 à 98 ans. L’âge moyen des hommes est de 76,9 ans et celui des femmes de 80,43 ans.
La proportion des patients dans les différentes catégories d’âge est toutefois différente si nous observons les patients venant du domicile par rapport à ceux venant d’un home.
Domicile Home Total
Nombre % Nombre % Nombre %
Age
< 75 ans 26 24,53 10 11,76 36 18,85
75-84 ans 54 50,94 23 27,06 77 40,31
> 85 ans 26 24,53 52 61,18 78 40,84
Total 106 100 85 100 191 100
La moyenne d’âge des patients à domicile est de 77,7 ans (de 38 à 93 ans) et celle des patients institutionnalisés est de 84,4 ans (de 60 à 98 ans).
Plus de la moitié des patients admis dans un des quatre hôpitaux proviennent du domicile (107) et un peu plus d’un tiers des patients (70) sont des pensionnaires définitifs des différents homes de la région.
Provenance des patients avant l'hospitalisation
7%
37% 56%
Domicile Home
Autre
Provenance des patients "Autre"
7%
7%
79%
7%
Hôpital psychiatrique de Perreux
Maison de santé de Préfargier Service de
médecine Clinique de
Montana
La majorité des patients font partie de la catégorie ASA II et III et moins de 10%
de la catégorie ASA I et IV.
Répartition des patients dans les catégories de risque ASA
26%
7% 2%
65%
ASA I ASA II ASA III ASA IV
Nbre de patients Moyenne d’âge (ans) Ecarts d’âge (ans) Stade ASA
I 4 75 71 à 89
II 50 77,76 51 à 98
III 123 81,68 41 à 96
IV 14 84,71 74 à 96
Après les 5 années d’observation, nous ne retrouvons que 122 patients vivants, ce qui correspond à un taux de mortalité de 36,125% sur cette période. Sur les 191 patients vivants au début de l’étude, ils ne sont plus que 56 en début 2003, ce qui correspond à un taux de mortalité à 3 ans post-opératoire de 41,89% .
Notre cohorte étant de 191 patients, nous nous sommes retrouvés à plusieurs reprises avec des échantillons d’individus par catégorie trop faibles pour pouvoir obtenir des résultats représentatifs (notamment peu de patients de catégorie ASA I et IV. Nous avons du écarter souvent ces groupes dans nos statistiques pour pouvoir émettre des résultats plausibles.
Si nous confrontons l’âge au sexe, il n’y a pas de différence statistiquement
significative (p > 0,05). Toutefois nous observons que les femmes à domicile
sont âgées majoritairement de 75 à 84 ans (45,3%, p < 0,05) et qu’au home elles
sont âgées principalement de 85 ans ou plus (55,3%, p < 0,05). Les hommes sont
représentés de manière homogène dans les différentes catégories d’âge, au
domicile ou au home.
En regardant le rapport entre l’âge et la provenance, nous remarquons une différence significative (Chi-carré à 26,267, « p » à 0,00) entre les moins de 75 ans et les plus de 85 ans principalement.
Rapport âge-provenance
0 20 40 60 80
Domicile Home
Provenance
%
< 75 ans 75-84 ans
> 85 ans
Dans le lien entre l’âge et le stade ASA, nous considérerons uniquement les stades ASA II, III et IV, en raison du petit nombre de patients de stade ASA I rendant l’échantillon non représentatif. Nous nous retrouvons avec une valeur de Chi-carré à 8,964 pour un « p » à 0,062. Il n’y a donc pas de lien entre l’âge et le stade ASA.
Par contre si nous confrontons l’âge à la survie, la valeur du Chi-carré s’élève à 18,673 pour un « p » significatif à 0,001. Plus nous devenons âgé, plus notre espérance de vie diminue et ceci surtout après avoir dépassé l’espérance de vie moyenne.
Rapport âge - survie
0 20 40 60 80
< 1 an 1 à 3 ans > 3 ans Survie
%
< 75 ans 75-84 ans
> 85 ans
Si nous comparons le sexe à la provenance, au stade ASA et à la survie, il n’y a
pas de différence statistiquement significative entre les deux sexes (p > 0,05).
Nous obtenons un rapport significatif entre la provenance et le stade ASA, la valeur « p » étant de 0,045 et le Chi-carré de 6,202, mais en excluant le stade ASA I en raison d’un échantillon non représentatif.
Rapport provenance - risque ASA
0 10 20 30 40 50 60 70 80
II III IV
risque ASA
% Domicile
Home
Les patients venant d’un home ont une survie plus courte que ceux venant du domicile (Chi-carré 15,75, p = 0,00).
Rapport provenance - survie
0 10 20 30 40 50 60 70 80
< 1 an 1-3 ans > 3 ans survie
% Domicile
Home