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Étude sur le phénomène d'émission des rayons anodiques

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Academic year: 2022

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HAL Id: jpa-00205140

https://hal.archives-ouvertes.fr/jpa-00205140

Submitted on 1 Jan 1924

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Étude sur le phénomène d’émission des rayons anodiques

Max Morand

To cite this version:

Max Morand. Étude sur le phénomène d’émission des rayons anodiques. J. Phys. Radium, 1924, 5

(4), pp.105-112. �10.1051/jphysrad:0192400504010500�. �jpa-00205140�

(2)

ÉTUDE SUR LE PHÉNOMÈNE D’ÉMISSION DES RAYONS ANODIQUES (1)

Par M. MAX MORAND.

1.

-

En 1906, Gelucke et Reichenheim observèrent, dans un tube à décharge dans le vide, des faisceaux de rayons d’une espèce nouvelle, émis dans certaines conditions par

une anode composée de sels métalliques. Ils leur donnèrent le nom de rayons anodiques.

L’étude de la déviation électrique et magnétique de ces rayons montra qu’ils étaient consti- tués par des particules métalliques positivement électrisées, lancées dans le vide avec une vitesse de l’ordre de plusieurs centaines de’ kilomètres par seconde. Malgré les

recherches entreprises lors de cette découverte, le phénomène auquel ces particules doivent

d’être émises resta assez mystérieux. On constata bien, à l’anode, l’existence d’une chute de potentiel de grandeur anormale - et cela était tout à fait naturel, mais aucune explica-

tion satisfaisante ne fut donnée pour rendre compte de l’origine de cette chute de tension.

L’étude des rayons anodiques fut ensuite plus ou moins délaissée, et l’attention vient seulement d’être à nouveau attirée sur eux, depuis la découverte des isotopes par Aston. Ils

ont en effet permis d’obtenir des rayons positifs avec la plupart des métaux, précisément

dans les cas où la simple méthode des rayons canaux ne peut convenir. Dempstér a bien essayé d’obtenir le lnême résultat à partir de vapeurs métalliques ionisées à l’intérieur même de l’anode, mais il n’a pas pu réaliser d’émission régulière et durahle (1). Malgré ces

nouveaux essais et malgré l’intérêt théorique et pratique qu’il y aurait à connaître d’une manière précise le mécanisme de leur émission, on s’est généralement contenté d’obtenir

les rayons anodiques d’une manière purement empirique, en utilisant presque sans perfec-

tionnement les procédés antérieurement connus. Le rendement obtenu de la sorte est

pourtant très défectueux. Plusieurs physiciens ont fait la remarque que le phénomène de

l’émission est demeuré très capricieux pendant toute la durée de leurs travaux. Pour essayer d’obtenir un phénomène plus pur, en même temps qu’une émission plus régulière

et plus durable, nous avons entrepris une série d’expériences dont nous indiquerons plus

loin les résultats. Sans résoudre d’une manière parfaite le problème étudié, ces expé-

riences permettent cependant d’établir une nouvelle technique beaucoup plus sûre que les précédentes. Les circonstances de certaines émissions sont, en outre, précisées d’une

manière suffisamment nette pour qu’on puisse établir avec quelque solidité la théorie

générale du phénomène.

2.

-

Afin d’avoir, sur l’ensemble de la question, un exposé à la fois plus clair et plus complet, nous allons d’abord rappeler les faits précédemment connus et les méthodes

auxquelles on a recours pour obtenir l’émission de rayons anodiques.

Il existe deux manières d’opérer, que l’on choisit suivant les conditions de vide dans

lesquelles on veut opérer. La première méthode consiste à introduire dans le tube des vapeurs de métalloïdes de la première famille

-

chlore, brome, ou iode, et la pression

dans le tube est assez élevée. La deuxième méthode consiste à faire un vide aussi élevé que

possible et à chauffer l’anode jusqu’à ce qu’il y ait émission.

Dans le premier cas, l’anode est généralement constituée par un petit tube de quartz

destiné à recevoir le sel choisi Celui-ci est introduit à l’état de mélange, comprimé avec du graphite en poudre, de telle manière que la surface du mélange soit plane et affleure juste

à l’orifice du tube. Une cathode est disposée dans le tube. On introduit de la vapeur d’iode,

par exemple, et l’on fait passer la décharge. Au bout de peu de temps on voit sortir de l’anode des pinceaux de rayons anodiques qui partent normalement à la surface de l’anode

(t) CommunK’aUon faite à la Société française de Physique.

fi lt .il S. Uer., t. 18 (1921), p. 41U.

,

Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphysrad:0192400504010500

(3)

106

et se propagent en ligne droite jusqu’à l’extrémité du tube. La pression peut varier de quelques millimètres de mercure à quelques centièmes de millimètre. L’analyse du faisceau de rayons anodiques montre que les particules possèdent toutes sensiblement la même

vitesse, égale à celle que leur communique la chute de potentiel à l’anode. Si l’on n’intro-

duisait pas de vapeur d’iode dans le tube, cetle chute anodillue n’existerait pas, et l’énlis-

.

sion n’aurait pas lieu. L’étude spectroscopique de la lumière émise dans la direction des rayons montre l’existence des raies caractéristiques du métal de l’anode. Mais ces raies sont dédoublées : la raie de beaucoup la plus intense occupe la position normale ; la deuxième

raie, plus faible (il faut plusieurs heures de pose pour la déceler), est déplacée par rapport

à la première par suite de l’effet Doppler, et, en général, elle n’est pas très fine. Ceci montre : i° qu’il y a dans le tube des vapeurs du métal contenu dans le sel, et qu’elles sont

illuminées par le passage de la décharge j 2° que les particules du faisceau de rayons

anodiques peuvent devenir lumineuses dans certaines conditions de pression ; ~" que les vitesses des particules d’un même faisceau sont loin d’être les mêmes puisque la raie déplacée n’est pas très fine. Ce fait est vraisemblablement la conséquence de ce que la pres- sion régnant dans le tube est assez grande. Les chocs entre une particule et les molécules du gaz sont nombreux pendant un parcours ; il peut y avoir neutralisation de la particule

avant qu’elle n’ait traversé toute la chute anodique, de la, ce manque d’homogénéité très important. Si l’on veut avoir un faisceau parfaitement homogène, il est donc nécessaire de travailler dans un vide aussi bon que possible, et c’est ainsi que l’on est amené à préférer

la seconde méthode. On serait également conduit à augmenter considérablement le vide si l’on voulait obtenir des rayons anodiques de très grande vitesse. La dééharge passe, en effet,

librement dans le tube, à cause de la pression qui y règne, et l’échauffement deviendrait

rapidement dangereux pour celui-ci si l’oii mettait une trop grande différence de potentiel

aux bornes du tube. Aussi est-il difficile, pour cette raison, de dépasser une dizaine de milliers de volts.

La deuxième méthode consiste à recouvrir de sels métalliques une anode généralement

constituée par une lame ou un filament de platine que l’on peut chauffer grâce à une

batterie d’accumulateurs convenablement isolée. Si l’on fait alors clalls le tube un vide suffisamment poussé (à moins de précautions toutes spéciales on ne dépasse guère un deux-

millième de millimètre), et si l’on chauffe l’anode au rouge sombre, on voit apparaître à la

surface de celle-ci de petites touffes lumineuses, dont la couleur correspond aux raies carac- téristiques du métal, et, en même temps, il y a émission de rayons anodiques. Ces rayons sont complètement obscurs, ce qui prouve que le mouvement d’une particule, accéléré ou

non, ne suffit pas à lui faire émettre de la lumière. Ils ne se décèlent que par des taches de couleur caractéristique sur les surfaces qui les arrêtent. Par exemple, pour le lithium, la couleur de ces taches est rouge et correspond à la raie 6 7071. Les petites touffes de lumino- sité qui apparaissent sur l’anode sont dues à des vapeurs métalliques ordinaires dont la densité est seulement plus grande au point d’émission des rayons anodiques que dans le

,

reste du tube et qui sont illuminées par leur passage, Là où l’émission de rayons anodiques

a lieu, il y a une sorte d’évaporation et de dissociation des sels de l’anorle: L’émission a lieu

beaucoup plus facilelnent avec les sels halogénés des métaux, et surtout avec ceux qui sont

aisément décomposables. Si l’on ne peut employer un sel halogéné, il est bon de mélanger

au sel utilisé un se[ halogéné de métal alcalin ; on améliore ainsi rémission dans de

grandes proportions. Nous verrons plus loin comment ces faits peuvent s’expliquer.

Malgré les avantages de cette méthode, qui ne nécessite pas l’introduction dans le tube de vapeurs désagréables, on n’avait pas, jusqu’ici, réalisé un dispositif dépourvu de graves inconvénients. Aston (1) a employé une anode formée par une petite lame de platine très mince, tendue verticalement, et dont le bas était recourbé de manière à recueillir les sels fondus. La cathode, percée d’une large ouverture, était placée à 1 centimètre environ devant l’anode. Dans ces conditions, la décharge est assez irrégulière et ne peut durer longtemps

car le sel, qui doit être chauffé assez fortement, disparaît rapidement (par suite d’évaporation

ou de dissociation) sans donner des rayons anodiques aussi intenses qu’on pourrait

( ) ASTON. Phil. t. 42, p..436.

(4)

107 l’attendre. Le rendement est donc mauvais. D’autre part, Aston n’est pas parvenu à diriger

convenablement les rayons anodiques ainsi produits et les variations subites de leur direc- tion ont considérablement augmenté la difficulté de ses expérience. Le vide est générale-

ment tel que la décllarge cathodique passe difficilement sous 15000 à 20 000 volts, mais

non sous une différence de potentiel plus grande. As ton avait espéré réaliser, par cette méthode, les mêmes progrès que ceux qui avaient été réalisés pour les rayons cathodiques

par l’ampoule Coolidge. Il n’y. est malheureusement parvenu que d’une manière assez

incomplète. Sa réussite aurait donné une importance toute nouvelle aux rayons

anodiques.

3.

-

C’est en nous laissant guider par les mêmes considérations, et en cherchant à atteindre le même but, que nous avons réalisé les expériences suivantes. Elles nous ont conduit à la production presque pure de rayons anodiques d’une grande constance, ce qui correspond précisément au renversement de l’ampoule Coolidge cherché par Aston.

Pour obtenir, dans le tube à décharge, un vide aussi poussé que possible, malgré l’abon-

dant dégagement de gaz et de vapeurs dont les sels chauffés sont la source, nous avons uti- lisé un système de pompe à grand débit donnant un vide limite élevé. Pour le vide prépara- toire, nous avons adopté la pompe double à huile Gaiffe, Gallot et Pilon, donnant un vide

limite compris entre un millième et un dix-millième de milliinélre de mercure ; pour le bon.

vide, nous avons eu la chance d’avoir une pompe Holweck. Ces deux pompes nous ont donné la plus parfaite satisfaction : la pression dans le tube n’est jamais remontée au-dessus

de un millième de millimètre de mercure.

Comme source de courant à haute tension, nous avons employé une bobine de Rhum- korff alimentée par un interrupteur tournant à mercure dans le gaz d’éclairage, recevant le

courant continu du secteur à 110 volts. Le courant de la bobine était redressé par un kénotron de la maison Gaiffe et Pilon. Les tensions utilisées sont restées comprises eii[re 5 000 et 20000 volts. Mais les dernières expériences ont été poussées jusqu’à la limite de tension que

peut donner la bobine c’est-à-dire environ 60 ou 70 000 volts. Nous espérons d’ailleurs pou- voir remplacer l’installation actuelle par une installation de courant continu à haute tension

qui présenterait

1

de précieux avantages.

Étant donné le problème posé, il s’agissait de déterminer expérimentalement la meilleure

position relative à donner à l’anode et à la cathode, ainsi que leur forme, et de trouver le

degré optimum de chauffage de l’anode. Les expériences que nous avons faites ont surtout

porté sur les sels de lithium : chlorure, bromure et iodure.

4-.

-

Dans les premières expériences, l’anode était constituée par un petit tube de quartz chauffé au moyen d’une spirale de platine qui l’entourait, et dans lequel se trouvait

une certaine quantité de sels de lithium purs (fig. i). Le tube était muni de deux autres

électrodes, constituées par de simples fils de platine; la première était voisine de l’anode à 1 cm environ; l’autre plus éloignée, à 8 cm. Les résultats obtenus furent négatifs, sans

doute faute de chauffage suffisant du tube de quartz qui absorbait réellement trop de

chaleur. Le tube de quartz fut alors enlevé et l’anode remplacée par une spirale de platine

(5)

108

chauffée (fig. ~). La spirale était simplement recouverte de sel par immersion dans du sel fondu. Chauffée aux environs du point de fusion du sel, l’anode s’est alors mise à émettre très faiblement des rayons anodiques fort capricieux, apparaissant à peine quelques

secondes, et disparaissant brusquement. Le phénomène était le même avec n’importe quelle

cathode et semblait dû à une volatilisation momentanée des sels recouvrant l’anode. La preuve en est que le sel allait se déposer au bout de peu de tgnps sur les parties froides du

tube. En chauffant l’anode nettement au-dessous du point de fusion du sel, et en disposant

la cathode au voisinage immédiat de l’anode (à moins d’un centimètre), il fut possible

d’obtenir pendant près d’une heure une émission très régulière de rayons anodiques présentant le caractère suivant : sur l’anode, un point lumineux brillant, entouré d’une

houppe lumineuse rouge s’étendant tout autour à 1 mm environ; sur la paroi du tube, en face, une tache rouge, et au bout d’un certain temps, un dépôt métallique très net. Entre les deux, on n’apercevait rien. Le phénomène disparaissait complètement ou presque quand

on employait une cathode éloignée de l’anode.

Cette constatation pouvait faire penser que l’émission des rayons anodiques n’est pas

sans relation avec la grandeur du champ électrostatique régnant autour de l’anode. C’est ce

que les expériences suivantes ont parfaitement démontré. Une nouvelle cathode fut cons-

tituée par une toile de platine placée à quelques millimètres devant l’anode (fig 3). Celle-ci

/yJ

était faite d’une spirale chauffée et tendue devant la toile de platine parallèlement à elle. Le

filament de platine étant alors progressivement chauffé, la décharge commença par ne pas passer dans le tube, le champ autour de l’anode étant donc le champ électrostatique ; puis,

à un moment déterminé

-

et avant la fusion du sel,

-

l’émission des rayons anodiques se produisit parfaitement, comme si les ions de lithium étaient extraits du sel par le champ électrique. Cette explication était d’ailleurs confirmée par le fait que les parties pointues de l’anode, ou les parties voisines de la cathode, émdttaient seules des rayons anodiques abon- dants. Il suffit alors de disposer la spirale de platine, non plus parallèlement à la cathode mais perpendiculairement, pour bénéficier de tous les avantages possibles (fig4). L’émission

de rayons anodiques devient tout à fait régulière et peut durer longtemps. Le vide est tel que

la décharge cathodique est faible. Malheureusement, la quantité de sel est toujours assez

considérable, et si le bombardement par les rayons cathodiques fait monter la température

(6)

109

un peu trop haut, le sel fond, il se dégage des gaz et le phénomène devient beaucoup moins tranquille. D’autre part, le faisceau de rayons anodiques est généralement très divergent,

au moins 60° (à cause de la forme de l’extrémité de l’anode). On ne peut obtenir de pinceaux

étroits qu’en perdant une grande quantité de rayons. Le rendement est encore mauvais. Un dernier perfectionnement fut réalisé. Le nettoyage préalable du tube fut fait aussi soigneu-

sement que possible à l’acide chromique chaud ; la graisse des rodages fut remplacée par de la piscéine, et la spirale de platine fut munie, suivant son axe, d’une pointe de platine très

effilée et recouverte de sels. Dans ces conditions, il fut possible de réaliser un vide considé- rablement meilleur et d’augmenter la différence de potentiel aux bornes du tube jusqu’à

50 000 volts et plus, sans que la décharge passe, En chauffant très légèrement la pointe de l’anode, celle-ci émit d’une façon parfaitement régulière d’étroits faisceaux de rayons ano-

diques, d’une ouverture de 8 à 10° et dirigés suivant l’axe de la pointe. Ces pinceaux n’étaient

décelables que par des taches rouges sur la cathode, taches que l’on pouvait déplacer en

faisant tourner le rodage de l’anode. La petite houppe lumineuse qui existait précédemment

à l’anode avait complètement disparu; l’émission ne se signalait plus que par la tache sur la cathode. Quant aux rayons cathodiques, ils n’existaient pas du tout. Ainsi se trouvait réalisé le phénomène d’émission sous une forme parfaitement pure. Lorsque le sel est épuisé

à l’extrémité de la pointe, on chauffe un peu plus la spirale, le sel qui y est contenu fond et recouvre à nouveau la pointe, on n’a plus qu’à laisser refroidir et à régler de nouveau la décharge. Il convient de remarquer que la distance de la pointe à la cathode et le chauffage

des sels doivent varier en sens inverse. L’agitation thermique des ions dans le sel a besoin d’être d’autant moins grande que le champ électrique est plus puissant. Malheureusement,

comme nous l’avons déjà constaté plusieurs fois, les rayons anodiques ne sont plus lumineux

sur leur parcours. On perd un précieux moyen d’observation. Cela tient certainement à ce qu’ils ne rencontrent plus suffisamment de molécules ou d’ions capables, par leur choc,

de leur faire émettre de la lumière.

5.

-

Nous pouvons maintenant essayer de tracer une théorie complète du phénomène

d’émission des rayons anodiques. Pour que les rayons anodiques puissent prendre naissance

nous admettrons qu’il est nécessaire de créer une certaine chute de potentiel autour de

l’anode. Cette chute de potentiel crée un champ électrique grâce auquel les ions métalliques

sont extraits du sel et sont mis en mouvement. Si la chute de potentiel cesse, le phénomène

s’arrête. Il est d’ailleurs nécessaire de chauffer le sel pour que le phénomène prenne nais-

sance et continue. Et il parait assez naturel de rattacher cette émission d’ions positifs par un

sel du phénomène d’émission d’électricité positive par les sels chauffés et étudié par Richardson.

On a, en effet, constaté que des sels chauffés émettent, en très faible quantité, des ions positifs.

Malheureusement, l’émission de ces ions présente un tout autre caractère,d’abordcomme ordre dé grandeur, ensuite comme variation en fonction du temps. Malgré cette grosse différence, il

est possible et même probable qu’un phénomène semblable aux phénomènes thermo-ioniques

donne lieu à l’émission d’ions par l’anode. Les deux phénomènes sont cependant d’un ordre de grandeur très différent et il faut voir, dans le grand nombre d’ions émis par l’anode, le

fait que le champ régnant autour de celle-ci joue le plus grand rôle. L’agitation thermique ne

suffit pas, il faut encore que le champ électrique provoque l’extraction des ions. Si le sel est

fondu, comme dans les expériences d’Aston, on a une évaporation électrique. D’ailleurs, on

a, en même temps que des ions métalliques, émission d’atomes neutres (sans doute par dis- sociation thermique, ou réduction cathodique); et le rendement peut être très mauvais si tout t le sel disparait ainsi. Plusieurs faits montrent qu’il y a émission de vapeurs ; d’abord, la présence d’une houppe lumineuse entourant l’anode et provenant de la luminescence de

ces vapeurs ; ensuite, si l’on bombarde par des électrons lents les gaz contenus à l’intérieur du tube, on obtient, en plus du spectre du métal contenu dans le sel, le spectre de bande du

chlore, du brome ou de l’iode que l’on a introduit avec le sel. Si le sel reste à l’état solide

sur l’anode, c’est une véritable sublimation électrique que l’on observe. Et c’est dans ces con- ditions que le rendement est maximum. En effet, il ne semble pas y avoir dans ce cas décom-

position du sel, qui est beaucoup moins chauffé, et tout le sel s’évapore en ions. Ceci semble

(7)

110

nettement confirmé par la disparition complète des lueurs entourant l’anode, qui étaient

dues aux vapeurs émises par celle-ci.

Une fois le phénomène d’émission commencé, si la cause qui crée la chute anodique vient

à disparaître, le phénomène cesse, car l’émission de particules positives tend à annuler la chute anodique. Voyons donc comment la chute de potentiel anodique peut être créée dans les différents cas.

Il Le vide dans le tube n’est pas très grand. La décharge passe librement ; la chute cathodique absorbe normalement toute la différence de potentiel, et la chute anodique est généralement beaucoup trop faible pour que le phénomène soit possible. On introduit alors de la vapeur cl’iode, par exemple, qui a la propriété de donner des ions négatifs. Ces ions, attirés

par l’anode, se précipitent sur elle en la bombardant. Aussi est-il inutile de chauffer. Le mouvement de ces ions négatifs et leur concentration autour de l’anode crée une chute ano-

dique. Lorsque certains points de l’anode sont à une température suffisante, l’émission de rayons anodiques commence et se continue tant qu’il arrive des ions négatils. On retrouve

un phénomène absolument semblable à celui qui donne lieu à l’émission de rayons catho-

diques. Mais tandis que les gaz ordinaires donnent facilement des ions positifs qui cons-

tituent l’afflux positif grâce auquel la chute cathodique prend naissance, il est nécessaire d’introduire dans le tube des vapeurs spéciales capables de donner des ions négatifs. Les

rayons anodiques résultent uniquement de cet afflux négatif.

~° Quand le vide dans le tube augmente suffisamment, la chute cathodique diminue, par suite de la diminution du nombre d’ions positifs, et la chute anodique augmente. Dans un

vide suffisamment bon, le phénomène peut donc prendre naissance si l’on chauffe convena-

blement l’anode. Au lieu du tube à gaz, on a « l’ampoule Coolidge. » Celle-ci est parfaite-

ment réalisée si le vide est tel que la décharge ne passe pas, même sous une très grande dif-

férence de potentiel : le champ électrostatique régnant entre l’anode et la cathode suffit à créer le phénomène. Mais si le vide est tel que la décharge cathodique passe plus ou moins

,

facilement, la chute anodique naturelle n’est pas suffisante, en général, pour que le phéno-

mène prenne naissance. Et c’est là que les sels de chlore, de brome ou d’iode jouent un rôle

décisif. On a en effet remarqué que ceux de ces sels qui sont assez aisément dissociables facilitent considérablement l’émission de rayons anodiques C). Cela proyient tout simplement

de ce que les vapeurs de gaz halogènes dégagées en chauffant suffisamment le sel, donnent un

afflux négatif convenable et le phénomène est amorcé. Mais il ne durera que tant qu’il y aura des vapeurs halogènes ; aussi le phénomène peut-il être capricieux et nécessite-t-il un chauf-

fage un peu plus intense de l’anode; de là beaucoup d’inconvénients et, en particulier,

culté de maintenir le vide dans de bonnes limites. Cette explication très naturelle à laquelle l’expérience nous a conduit devient encore plus plausible si l’on remarque qu’en étudiant

la composition des gaz du tube nous y avons trouvé principalement des vapeurs halogènes,

comme nous le faisions remarquer plus haut; et il est à noter que ces vapeurs existent dans le tube avant que l’on fasse passer la décharge. Le bombardement de l’anode par les rayons

cathodiques suffit quelquefois à créer l’émission de rayons anodiques en provoquant une

réduction suffisante des sels et une quantité notable de chlore, de brome ou d’iode. Mais, au point de vue de la sécurité de l’émission et des avantages possibles, rien ne vaut le dispo-

sitif équivalant à une ampoule Coolidge renversée dans un aussi parfait que possible.

Ces expériences ont été faites au laboratoire de 1B1. Fabry à la Sorbonne ; la plupart des appareils utilisés ont été acquis au moyen d’une subvention de la fondation Rothschild. Grâce (i Dans un article publié récemment [Phil. Afag., février 1921J, Aston a donné les reultats de nom-elles expériences entreprises sur les isotopes des éléments métalliques au moyen de rayons anodiques.

Abandonnant le système de l’anode chauffée artificiellement par une batterie auxiliaire, Aston a repris le dispositif de l’anode de sel et de graphite chauffée au moyen des rayons cathodiques produis par la décharge et concentrés sur elles. Dans ces conditions, la décharge une fois commencée, les rayons catho- diques maintiennent à une température assez éleyée le sel de l’anode. Celui-ci, plus ou moins décomposé,

émet des vapeurs produisant nu at’Hnx négatif et de rayons anodiques peut avoir lieu. Si l’on

arrête la décharge, refroidit et il devient impossible d’en faire sortir des rayons positifs, le

champ n’étant pas suffisant avec la forme d’anode employée pour qu’on puisse extraire directement les

ions métalliques du sel. Il faut alors introduite du ga~ pour que la décharge puisse recommencer.

(8)

111 aux heureux résultats que nous a permis d’atteindre cette étutle des rayons anodiques, nous espérons pouvoir aborder bientôt quelclues-uns des problèmes importants liés à la produc-

tion régulière de ces rayons.

Manuscrit reçu le 7 août 1 J~a.

ajoulee à la correction mars 1924).

-

une interruption cle quelques mois, les expé- riences ont pu être reprises dans des conditions tout à fait satisfaisantes: la bobine de Rhumkorff, dont le courant était simplement redressé par un kénotron, a été remplacée par une installation de courant continu à haute tension (des établissements Gaiffe, Gallot et Pilon) permettant d’obtenir très aisément un

courant continu de quelques milliampères sous des tensions constantes de 10 000 à 130 000 volts ; le tube à décharge, aménagé en tenant compte des observations faites dans les précédentes expériences, comporte

un appendice qu’on peut refroidir dans l’air liquide. L’anode, toujours constituée par une pointe entourée d’une spirale chauffante est recouverte de sel par le même procétlé d’immersion dans du sel fondu. La cathode, en nickel, est disposée devant l’anode à des distances variables de 10 mm à 20mm,. Le vide dans le tube, aussi élevé que possible, est toujours obtenu au moyen de la pompe Holweck.

Les expériencee réalisées en utilisant ce dispositif ont été particulièrement concluantes et leurs résul- tats confirnlent de la manière la plus complète ceux que nous avion précédemment obtenus, ainsi que

l’explicatioo que nous en avons donnée. Enfin., un dernier perfectionnement, qui consiste à cn tourc!’

l’anode d’nn e cupule c1P concentration, a permis d’obtenir des faisceaux de rayons positifs beaucoup plus

fins eu même temps qu’un débit beaucoup plus régulier. Le tube actuellement employé pour faire des rayons positifs, et dans lequel l’anode est simplement une spirale pointue entourée d’une cupule de concen- tration, réalise rigoureusement le même dispositif que l’ampoule Coolidge utilisée avec tant d’avan- tages dans la technique rayons l’importance des débits en rayons positifs, obtenus au moins

avec certains sels, étant données d’autre part la grande simplicité du dispositif et la facilité du réglage, il semble que l’on puisse espérer résoudre prochainement le très important problème de la séparation des isotopes métalliques en quanLKé suffisante pour permettre de faire sur ces corps des analyses d’ordre purement chimique. M. Becquerel, que je remercie bien vivement, a eu l’obligeance de vouloir bien me

prêter le puissant électroaimant dunt il dispose au Muséum d’histoire naturelle, à Paris. Son installation

au laboratoire de 31. Fabry est maintenant terminée, et une série d’expériences va être iticessamitient commencée.

Voici, en résumé, les principaux résultats des dernières expériences et les lois qu’elles ont permis de dégager :

1. Un vide de l’ordre de 10-4 mm est nécessaire dans le tube pour que celui-ci fonctionne.

2. Pour une certaine température du sel déposé sur la pointe cle l’anode, l’émission ne commence que

quand le champ atteint une valeur déterminée. Lorsque l’on fait croître la tension entre l’anode et la calhode, le phénomène prend donc brusquement naissance pour une certaine différence de potentiel minimum et croît ensuite rapidement. La courbe du débit n’indique aucune saturation. Le délit varie également avec la température de l’anode; il est d’autant plus grand que l’on approche davantage du point de fusion du sel; mais, si l’on veut avoir un excellent rendement (tout le sel étant utilisé unique- ment pour produire des rayons positifs), il faut maintenir le sel à une température nettement inférieure à sa

tempéralure de fusion. Par exemple, si le sel fond sur l’anode pour un chauffage de celle-ci qui correspond

au passage d’un courant de 0,8 ampère dans la spirale chauffante, il faut maintenir le courant aux

environs de 0,6 à 0,’ï ampère. Le débit peut atteindre plusieurs milliampères avec une grande stabilité de régime. La cathode se recouvre alors de couches de métal pur en lames minces. Lorsque le sel est très éloigné de sa température de fusion, il faut cles champs très considérables pour que le phénomène prendre naissance, et les débits sont alors de l’ordre de quelques microampères. La forme pointue de l’anode joue, dans ce cas, un rôle prépondérant et c’est en grande partie grâce au pouvoir des pointes que nous

avons pu mettre en évidence ce nouveau phénomène d’émission de rayons positifs par des sels solides faiblement chauffés. Il a d’ailleurs été possible de tracer de bonnes courbes du débit en fonction de la température de 1 anode (ou de son chauffage) et en fonction de la différence de potentiels appliquée aux bornes du tube. Si l’on essaie les différents sels d’un même mélal, on constate qu’il y a un avantage considérable à prendre des sels facilement dissociables. Les métaux de poids atomique faible semblent plus faciles à extraire que les métaux de poids atomique élevé.

On pouvait se demander quelle peut bien être la valeur du champ électrique qui agit réellement à la surface de l’anode et qui est d’ailleurs nécessaire pour extraire du sel solide les ions métalliques qui s’y trouvent et dont l’existence a été confirmée par les expériences de Debye et Scherrer sur la diffraction des rayons X par les cristaux. On pouvait essayer de calculer l’ordre de grandeur de ces champs ; mais ce

calcul a été inutile et l’ou a pu en obtenir directement la valeur grâce au phénomène suiv ant : dans

certains cas et, en particulier,,- quand le débit est assez grand, la pointe de l’anode est entourée d’une

minuscule petite touffe lumineuse ; il était à présunier que l’effet Stark suhi par les raies émises au Yoisi-

nage de la pointe permettrait de déterminer directement la valeur du champ et c’est ce qui s’est hien

(9)

112

trouvé vérifié. Lors du fonctionnement du tube sous 30 000 volts environ, avec un débit d’environ 1 milli- ampère, une photographie de l’anode et de la cathode a été prise au moyen de la méthode du prisme objectif. Le sel déposé sur l’anode était un sel de lithium (’). Les images de la pointe correspondant aux

raies 6708 et 6fO:3 Â n’ont donné aucun effet Stark par décomposition de la raie sous l’effet du champ électrique; il fallait d’ailleurs s’y attendre puisqu’on n’a encore jamais observé ett effet sur ces raies. Mais la raie h602À a donné quelque chose de très intéressant : au centre, deux images de la pointe assez intenses

et nettement séparées, avec, sans doute, une composante plus faible au milieu. Puis de chaque coté, un fond continu s’étendant comme deux ailes et s’arrêtant, à droite et à gauche, en un certain point bien marqué. Les deux images centrales correspondent [d’après les données de Howell, Astroph. Journ., t. 2 (1916),

p. à l’effet Stark qui serait produit par un champ de 80 000 v: cm; les deux points les plus éloignés correspondent à un champ maximum de i00 000 v : cm (les déplacements des composantes de chaque coté de la raie sont de l’ordre de !0 à 50 À). La série des points intermédiaires donnant l’apparence d’un fond continu correspond aux champs compris entre 700 000 v : cm et 80 000 v : cm, c’est-à-dire aux champs décroissants que l’on rencontre en s’éloignant de l’anode pour arriver à l’endroit où la luminosité est maximum et où le champ vaut environ 2 à 3 fois le champ moyen régnant entre l’anode et la cathode. Il n’a pas été possible de déterminer d’une manière précise dans quel espace sont localisés ces champs, mais

il semble que cet espace est d’environ un dixième de millimètre, ce qui est très acceptable. Il faut donc un

champ de l’ordre du demi-million de volts par centimètre pour extraire les ions de lithium de leurs sels solides légèrement chauffés. Il est très intéressant d’avoir pu atteindre directement la mesure de ces

champs.

Les rayons positifs émettent de la lumière en frappant la cathode. On y trouve, avec une grande inten- sité, toutes les raies d’arc du métal constituant les ions positifs. On y voit également d’autres raies qui semblent être des raies d’étincelle. Dans le cas du lithium, il semble que l’on doive attribuer à ce spectrp plusieurs raies nouvellesqu’il ne semble pas possible d’attribuer iL une impureté. (Il est tout à fait remar.

quable, en particulier, qu’en utilisant des sels de lithium contenant assez de sodium, la raie D soit à peine

visible et quelquefois pas du tout). Les résultats des expériences en cours seront prochainement publiés, j’indique seulement que j’ai retrouvé avec une grande exactitude la raie y = 2931, 1 1 signalée par Moliler

[Scie.nce, t. 58 (19-23), p. 468]. D’autres raies paraissent compléter le spectre du lithium ionisé et semblent

permettre d’établir une correspondance entre ce spectre et celui de l’hélium.

(*) Pendant la pose, le lithium sc trouvait, à l’état solidn, un p«>n au-de3sous de son point de fusion.

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