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P

ARTIE

II.

L

ES VAGUES MICROBIENNES DURANT LES VINIFICATIONS

.

I La microflore du moût.

Le nombre de micro-organismes comptés sur une baie de raisin ne correspond pas au nombre de micro-organismes comptés par millilitre de moût de raisin après le foulage. Dès que la microflore de la pellicule entre en contact avec le jus elle est numériquement bien plus élevée. Le tableau XXXI rapporte les données obtenues pendant les trois millésimes étudiées (2003, 2004 et 2005), pour différents cépages. Les vendanges ont été sulfitées à des doses différentes et des moûts avaient des pH allant de 3,39 au minimum à 3,92 au maximum.

Les populations de levures exprimées en UFC/mL de moût (A) sont toujours supérieures à celles exprimées en UFC/baie (B). Les chiffres ne montrent pas de corrélation entre la dose de sulfitage et la population. Il en est de même si l’on considère uniquement le pH. Il faut tenir compte de la population sur la baie au moment des vendanges. Par exemple, en 2003, le lot de Merlot qui présentait une population dans le moût de 3,2×104 UFC/mL peut sembler plus affecté par le sulfitage que le lot de Cabernet-Franc du même millésime qui avait une population de 3,96×106 UFC/mL dans le moût. La différence de pH entre ces lots (3,53 contre 3,78) conforterait même cette hypothèse. Mais il n’en n’est rien puisque pour le lot de Merlot sur la baie était de 2.102 UFC/baie, elle a donc augmenté d’un facteur 160 tandis que celle du lot de Cabernet-Franc n’a progressé que d’un facteur légèrement supérieure à 20. Finalement le pH plus acide du lot de Merlot n’a pas mieux enrayé la multiplication par le sulfitage. De même, on n’observe pas de corrélation entre le rapport A/B des populations ni avec le pH, ni avec le SO2. Le pH pourrait sembler plus déterminant que le SO2 puisque le rapport A/B le

plus élevé (250) correspond au moût qui présente le pH le plus élevé (3,92) malgré un sulfitage relativement important (7 g/hL). De même un des plus faibles rapport A/B (2,0) est obtenu issu du moût le plus acide (3,39) et le plus sulfité (8 g/hL). Mais il existe tout de même un cas où le rapport A/B est élevé (240) pour un pH « classique » (3,55) et un sulfitage moyen (6 g/hL).

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Finalement, l’absence de corrélation entre les populations microbiennes sur le raisin, dans le moût, le pH et la dose de sulfitage de la vendange indique qu’il est difficile de prédire le comportement des micro-organismes dans le moût au tout début de la vinification en tenant compte seulement de niveau de population sur la baie, du pH et de la dose de SO2 ajoutée. Il

est probable que d’autres facteurs chimiques (concentrations en sucres, en composés phénoliques…) doivent être pris en compte. Mais le paramètre déterminant doit évidemment être la nature et la qualité (fermentaires ou non) des espèces détectées sur les baies susceptibles de se développer une fois dans le jus.

Tableau XXXI. Effets du cépage, du millésime, et du SO2 ajouté après le foulage des baies sur la population de levures totales sur les baies de raisins et dans le moût avant le levurage.

Cépages Millésimes pH du SO2

vendange (g/hL)

LT sur les baies lors de la vendange (UFC/baie) [B] LT dans le moût après l’ajout de SO2 et avant l’éventuel levurage (UFC/mL) [A] [B] [A] Merlot 2004 3,65 3 3,75×104 2,50×106 66,7 Merlot 2005 3,72 4 4,00×104 8,50×105 21,3 Cabernet-sauvignon 2003 3,88 4 2,20×103 5,26×105 239,1 Merlot 2003 3,44 5 2,90×103 2,00×104 6,9 Merlot 2004 3,52 5 1,55×104 2,25×104 1,5 Merlot 2005 3,44 6 5,50×104 7,50×105 13,6 Petit-Verdot 2005 3,84 6 2,50×105 1,70×107 68,0 Cabernet-Sauvignon 2003 3,46 6 9,00×103 3,10×104 3,4 Cabernet-Sauvignon 2004 3,55 6 1,00×104 2,40×106 240,0 Cabernet-Sauvignon 2005 3,66 6 1,00×105 2,10×106 21 Merlot 2003 3,53 7 2,00×102 3,20×104 160,0 Cabernet-Franc 2003 3,78 7 1,50×105 3,96×106 26,4 Petit-Verdot 2003 3,92 7 3,25×103 7,96×105 244,9 Cabernet-Sauvignon 2004 3,67 7 1,60×103 1,00×104 6,3 Merlot 2005 3,41 7 3,40×104 1,20×105 3,5 Cabernet-Franc 2005 3,77 7 7,40×106 2,50×107 3,4 Cabernet-Sauvignon 2004 3,63 8 6,00×103 2,00×104 3,3 Merlot 2005 3,39 8 1,10×104 2,20×104 2,0 Merlot 2005 3,55 8 1,00×105 7,50×106 75,0 Cabernet-Sauvignon 2005 3,74 8 5,70×104 3,85×105 6,8

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II La fermentation alcoolique.

II.1 Les cinétiques microbiennes durant une fermentation alcoolique « classique ».

La figure 55 est un exemple de l’évolution des populations microbiennes couramment observée dans le cas des FA « classiques », sans levurage ni macération pré-fermentaire. Après le foulage des baies, toutes les populations microbiennes augmentent. Elles trouvent dans le moût, des conditions (disponibilité en substrats, activité de l’eau) certainement plus favorables qu’à la surface de la baie, notamment pour les espèces fermentaires qui deviennent très rapidement majoritaires. 1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 1E+05 1E+06 1E+07 1E+08 0 3 6 9 12 15 18

Jours après les vendanges

UF C /m L 0,992 1,000 1,008 1,016 1,024 1,032 1,040 1,048 1,056 1,064 1,072 1,080 1,088 1,096 1,104 dens it é ( g/ m L )

Figure 55: Evolution des populations de levures totales (), de levures non-Saccharomyces (▲), de bactéries à Gram positif (◊)et de bactéries à Gram négatif (●), de la densité (×) durant la FA d’un lot de Merlot du domaine IV vinifié en 2005.

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Durant les premières heures, les populations de levures totales et de levures

non-Saccharomyces ne sont pas significativement différentes, ce qui traduit la faible proportion de Saccharomyces dans le moût fraîchement foulé. Il faut attendre le troisième jour après

l’encuvage pour observer une réelle divergence entre ces populations. Dès lors, l’espèce S.

cerevisiae domine. Sa population atteint plus de 107 UFC/mL puis se stabilise. Durant la

phase de croissance de S. cerevisiae, les autres populations diminuent. Les bactéries à Gram négatif disparaissent au comptage, tandis que les populations de bactéries lactiques et les levures non-Saccharomyces se stabilisent à environ 103- 102 UFC/mL.

La prédominance de l’espèce Saccharomyces s’explique par sa meilleure adaptation aux conditions du moût. Ses capacités de développement dans un milieu très riche en sucres et en composés phénoliques sont bien supérieures à celles des autres espèces (Nissen et al. 2003b). Très rapidement elle monopolise l’écosystème et prive les autres espèces des nutriments qu’elle utilise pour sa croissance. Ensuite son activité fermentaire diminue la concentration en sucres mais produit de l’éthanol inhibiteur des autres espèces sensibles. Outre cet effet, des inhibitions directes de type « cell to cell contact » (Nissen et al. 2003a) provoquées par la forte densité cellulaire en S. cerevisiae, mais aussi des interactions indirectes via des toxines produites par S. cerevisiae s’installent (Pérez et al. 2001).

Le SO2 est l’un des produits du métabolisme de S. cerevisiae susceptible d’influencer

les autres micro-organismes. Sa production lors de la FA est fonction des souches de S.

cerevisiae, de la composition du moût (Eschenbruch 1974) et d’autres contraintes

physiologiques. Néanmoins des productions pouvant dépasser les 100 mg/L ont été observées (Dott et al. 1976). De telles quantités qui s’additionnent au SO2 de la vendange ont

probablement un effet inhibiteur sur les espèces les plus sensibles. Durant sa croissance S.

cerevisiae produit également des acides gras à chaînes moyennes comme l’acide décanoïque

et docécanoïque (Edwards et Beelman 1990). Ils agissent normalement sur la levure elle-même mais aussi sur les bactéries lactiques (Lonvaud-Funel et al. 1988). Enfin la richesse du moût en composés phénoliques reconnus pour leur activité antibactérienne doit également contribuer à l’élimination des espèces les plus sensibles (Puupponen-Pimia et al. 2001). Malgré la toxicité croissante du milieu certaines levures non-Saccharomyces et bactéries lactiques arrivent néanmoins à se maintenir. Leur population s’équilibre entre 102 et 103 UFC/mL afin la fin de la FA.

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L’identification des colonies isolées sur boîte (Tableaux XXXII et XXXIII) montre l’évolution des proportions des différentes espèces microbiennes au cours d’une FA. Parmi les levures non-Saccharomyces, au début de la FA, les espèces Hanseniaspora uvarum et

Pichia anomala dominent avec les espèces du genre Candida. Ces espèces doivent produire

de nombreux métabolites qui participent à enrichir les qualités aromatiques du vin (Romano et al. 1997, Jolly et al. 2003, Fleet 2003). Mais elles ne supportent que faiblement l’éthanol (Pina et al. 2004). Leur proportion diminue tout au long de la FA. A son terme, il ne subsiste que les plus tolérantes à l’éthanol, et, à l’épuisement du milieu en sucres fermentescibles. C’est le cas de l’espèce B. bruxellensis jusqu’alors minoritaire.

Tableau XXXII. Evolution de la concentration et de la proportion des espèces de levures non-Saccharomyces durant la FA lors des suivis du millésime 2004.

Espèces de levures

non-Saccharomyces Début de la FA (densité= 1,1) Fin de la FA (densité= 0,99) % Concentrations (UFC/mL) % Concentrations (UFC/mL) B. bruxellensis 02 1,1×102 80 0,8×102 Candida cantarelli 12 6,7×102 8 0,08×102 Candida stellata 12 6,7×102 4 0,04×102 Debaryomyces hansenii 14 7,7×102 - - Hanseniaspora uvarum 22 12,2×102 - - Metschnikowia pulcherrima 12 6,7×102 - - Pichia anomala 18 10,0×102 8 0,08×102 Pichia fermentans 08 4,4×102 - - Total 100 5,55×102 100 1×102

Tableau XXXIII. Evolution de la concentration et de la proportion des espèces de bactéries lactiques durant la FA lors des suivis du millésime 2004.

Espèces de bactéries lactiques Début de la FA (densité= 1,1) Fin de la FA (densité= 0,99) % Concentrations (UFC/mL) % Concentrations (UFC/mL) Bacillus sp. 08 0,25×103 - - Lactobacillus casei 04 0,12×103 - - Lactobacillus plantarum 40 1,24×103 12 0,8×102 Lactobacillus sp. 04 0,12×103 - - Leuconostoc mesenteroïdes 12 0,37×103 - - O. oeni 20 0,62×103 80 - Pediococcus damnosus 04 0,12×103 - 5,6×102 Pediococcus parvulus 04 0,12×103 8 - Pediococcus pentosaceus 04 0,12×103 - 0,6×102 Total 100 3,1×103 100 7×102

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B. bruxellensis est une espèce peu exigeante sur le plan nutritionnel (Uscanga et al.

2000) particulièrement tolérante aux fortes concentrations en éthanol (Medawar et al. 2003). Il est donc normal de la détecter en majorité parmi les levures non-Saccharomyces en fin de FA. Une sélection parallèle s’opère chez les bactéries lactiques, où les espèces du genre

Lactobacillus, qui dominaient dans le moût cèdent progressivement la place à l’espèce O. oeni qui domine à la fin de la FA.

Mais, si leur proportion au sein des NS et des BL augmente durant la FA, on remarque que la population des B. bruxellensis et des O. oeni demeure stable durant la fermentation. Les chutes des populations de levures non-Saccharomyces et de bactéries anaérobies à Gram positif découlent de celles des espèces initialement majoritaires tandis que les espèces résistantes (respectivement B. bruxellensis et O. oeni) arrivent à se maintenir à leur concentration initiale.

En ce qui concerne les bactéries acétiques, l’espèce G. oxydans est la seule espèce détectée dans le moût. Elle constitue la population des bactéries à Gram négatif dont la chute commence avec la FA. Cette espèce est peu tolérante à l’éthanol mais elle supporte très bien les concentrations élevées en sucres fermentescibles. Elle entre en compétition avec

S. cerevisiae dans le moût mais elle doit être moins bien adaptée. Puis, la production

d’éthanol provoque son déclin. Les autres BA du raisin sont les espèces du genre Acetobacter. Elles résistent nettement mieux à l’éthanol puisqu’il s’agit de leur substrat carboné préférentiel qu’elles dégradent en acide acétique. Mais comme on peut le remarquer sur les gels de DGGE rpoB les bactéries à Gram négatif sont systématiquement en bas du gel et les espèces du genre Acetobacter en sont même exclues. Leur détection ne peut se faire qu’à partir des colonies isolées sur les boîtes de milieu AGN par PCR-RFLP. Cette étape de culture nécessaire impose un seuil de détection plus élevé que l’analyse directe. Par conséquent, il est probable que les Acetobacter issues du raisin persistent durant la FA mais en deçà des seuils de détection. Elles ne « réapparaissent » que lorsque les conditions sont plus favorables à leur développement mais aussi que la diversité microbienne a diminué, généralement à la suite du sulfitage post-fermentaire.

Sur les gels de PCR-DGGE (Figure 56) les bandes d’O. oeni et de B. bruxellensis sont les seules détectées à la fin de la FA. En ce qui concerne les bactéries on peut donc considérer

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que dès le début du processus de vinification, les bactéries à Gram positif sont exclusivement des espèces de bactéries lactiques. Pour les levures non-Saccharomyces, B. bruxellensis devient nettement majoritaire en fin de FA. Par la suite la population de non-Saccharomyces sera donc assimilée à B. bruxellensis. Lorsque ces correspondances seront désavouées par des cas plus atypiques, ils seront signalés.

Bacillus sp. Bacillus sp. Lactobacillus plantarum O. oeni Lactobacillus casei B. bruxellensis Candida cantarelli Candida stellata Pichia anomala Hanseniaspora uvarum FREMENTATION ALCOOLIQUE PCR DGGE NL1/LS2 PCR DGGE rpoB Bacillus sp. Bacillus sp. Lactobacillus plantarum O. oeni Lactobacillus casei B. bruxellensis Candida cantarelli Candida stellata Pichia anomala Hanseniaspora uvarum FREMENTATION ALCOOLIQUE PCR DGGE NL1/LS2 PCR DGGE rpoB

Figure 56: Gels de DGGE NL1/LS2 et rpoB réalisés à partir des ADN extraits des biomasses

collectées sur les boîtes des NS et des BL.

Concernant la méthode analytique par PCR-DGGE rpoB, il est important de souligner que le faible nombre de séquences rpoB disponibles dans les banques de données pouvait être restrictif pour permettre une identification lors de l’analyse de la surface de la baie de raisin. Mais il n’en est rien dès lors que la vinification a réellement commencé. Puisqu’une banque de séquences rpoB de l’ensemble des espèces de bactéries lactiques précédemment décrites dans les études oenologiques et disponibles au laboratoire avait été constituée.

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Ces résultats démontrent qu’hormis S. cerevisiae qui est naturellement la principale actrice de la FA, la levure B. bruxellensis et la bactérie O. oeni sont les principales espèces à résister à cette première phase de la vinification. La description de ces phénomènes a été approfondie au laboratoire durant des expériences de co-cultures.

II.2 Les interactions entre les micro-organismes durant la fermentation alcoolique - Observations de cultures mixtes au laboratoire.

II.2.1 Les co-cultures bactéries lactiques / S. cerevisiae.

Ces co-cultures sont réalisées dans un moût de raisins rouges stérilisé par filtration puis inoculé avec S. cerevisiae (souche 522 Davis) et les bactéries lactiques : O. oeni, P. parvulus (IOEB 8801) et Lactobacillus hilgardii (IOEB0001). Deux souches d’O. oeni sont inoculées ( IEOB 8406, IOEB 9807). La première (IOEB 8406) dégrade l’arginine (arginine désaminase, métabolisme ADI+). La seconde produit de l’histamine (IOEB 9807) (histidine décarboxylase, métabolisme HDC+). L’évolution des BL durant la FA est estimée directement par PCR-DGGE, mais aussi par dénombrement sur milieu gélosé puis détermination de la proportion de chaque espèces par hybridation sur colonies avec des sondes spécifiques d’espèce. Par ailleurs, des sondes spécifiques des caractères Arg+ et HDC+ font la distinction entre les deux souches d’O. oeni.

Aux deux pH étudiés, 3,5 et 3,7, l’espèce qui s’implante dans le moût est P. parvulus (Tableau XXXIV). Sur boîte, O. oeni ne devient détectable qu’à la fin de la FA à pH 3,4, mais plus tôt à pH 3,7 et c’est la souche Arg+ qui prédomine. Au pH plus acide, l’implantation de l’espèce O. oeni en général, et de la souche Arg+ en particulier, est plus tardive. Les niveaux de populations sont également inférieurs à ce pH plus faible à la fin de la FA. Néanmoins aux deux pH, l’espèce O. oeni résiste le mieux à la FA.

La PCR-DGGE, de son côté, démontre que les trois espèces de bactéries survivent bien et sont toutes présentes à tout moment de l’expérimentation (Figure 57). En particulier

Lactobacillus hilgardii n’est jamais en population suffisante pour être identifiée par

hybridation sur colonies. Mais la PCR-DGGE rpoB montre sa présence accentuée en fin d’essai alors que P. parvulus diminue. Dans le cadre de mélanges relativement simples,

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l’élimination de l’étape de culture permet donc d’abaisser le seuil de détection relatif des espèces et donc d’améliorer la sensibilité de la mesure.

Parce qu’ils sont les principaux acteurs de la vinification, l’étude des interactions entre la levure S. cerevisiae et la bactérie O. oeni ont fait l’objet de plusieurs travaux. Des interactions directes entre les cellules (Lemaresquier 1987) mais également via des métabolites produits par les unes et agissant sur les autres (SO2, acides gras à chaîne

moyenne) ont été décrits (Kling et Beelman 1986, Lonvaud-Funel et al. 1988). Ces interactions dépendent directement des souches de S. cerevisiae et d’O. oeni mises en jeu (Larsen et al. 2003, Alexandre et al. 2004).

Tableau XXXIV. Résultats des dénombrements et de l’identification des bactéries lactiques durant les

co-cultures de BL et de S. cerevisiae inoculées initialement à 106 UFC/mL.

pH=3,7 Jours 1 3 8 13 (fin de la FA) 17 20 Population (UFC/mL) 1×106 7×105 2×104 3×104 2×106 3×108 L. hilgardii 0 0 0 0 0 0 O. oeni 0 0 10 10 70 90 HDC+ (parmi les O. oeni) - - - 0 0 0

ADI+ (parmi les

O. oeni)

- - - 100 100 100

Identification des colonies par hybridation ADN/ADN (%) P. parvulus 100 100 100 90 30 10 L. hilgardii + + + + + + O. oeni + + + + + + PCR-DGGE rpoB P. parvulus + + + + + + pH=3,5 Jours 1 3 8 13 (fin de la FA) 17 Population (UFC/mL) 5×105 3×105 3×102 2×102 7×105 1×108 L. hilgardii 0 0 0 0 0 0 O. oeni 0 0 0 0 20 50 HDC+ (parmi les O. oeni) - - - - 30 20

ADI+ (parmi les

O. oeni)

- - - - 70 80

Identification des colonies par hybridation ADN/ADN (%) P. parvulus 100 100 100 100 80 50 L. hilgardii + + + + + + O. oeni + + + + + + PCR-DGGE rpoB P. parvulus + + + + + +

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Figure 57: PCR-DGGE rpoB réalisée sur les ADN directement extraits lors du suivi à pH=3,7.

Pratiquement, il est primordial que l’activité de la souche de S. cerevisiae choisie pour la FA ne soit pas antagoniste de l’activité de la souche d’O. oeni. Cela amène au concept de compatibilité entre les levains. Il doit être pris en considération dans le cadre d’une procédure d’ensemencement en levures puis en bactéries. Evidemment, cela est encore plus important pour les protocoles de co-inoculation (Sieczkowski 2004, Jussier et al. 2006), puisque les levures et les bactéries sont ajoutées simultanément dans le vin.

II.2.2 L’interaction S. cerevisiae – B. bruxellensis.

Des cultures de S. cerevisiae (102 UFC/mL) seule, S. cerevisiae et un mélange de levures non-Saccharomyces : B. bruxellensis, Hanseniaspora uvarum, Debaryomyces

hansenii, et Candida cantarelli (102 UFC/mL de chaque espèce), et uniquement le mélange de

NS (102 UFC/mL) ont été suivies au laboratoire dans du moût de raisins rouges (glucose+fructose=200 g/L, pH=3,6, IPT=43) stérilisé par filtration. S. cerevisiae est bien l’espèce de levure la mieux adaptée au moût en début de fermentation. Elle domine très largement les autres espèces et réalise la grande partie de la conversion des sucres en éthanol. Parmi les NS, B. bruxellensis est la seule à subsister et à se multiplier en fin de fermentation (Figure 58). La cinétique fermentaire la plus rapide est d’ailleurs observée lors de la co-culture S. cerevisiae et B. bruxellensis (Figure 59), et non pas dans la co-culture pure de S.

cerevisiae. Tout se passe comme si les cellules de B. bruxellensis qui ont résisté à la

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Figure 58: Evolution de la culture mixte de levures par des dénombrements de S. cerevisiae (◊,

dénombrement LT – dénombrement NS) et du mélange B. bruxellensis, C. cantarelli, D. hansenii, et

H. uvarum (□, dénombrement NS).

D’un autre côté, en absence de S. cerevisiae, c’est toujours B. bruxellensis qui l’emporte sur les autres NS (Figure 60). Seule, elle est capable de dégrader la totalité des sucres, mais la vitesse de consommation est inférieure à celle de S. cerevisiae, surtout en début de FA. Ensuite, dés la moitié de la FA la différence de cinétique diminue pour être insignifiante en fin de FA (Figure 59).

Figure 59: Evolution de la concentration en glucose/ fructose durant les FA réalisées avec S. cerevisiae seule (□), S. cerevisiae avec les NS (◊) et uniquement les NS (Δ).

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Bilan du suivi de la culture mixte des non-Saccharomyces + + + + + + B. bruxellensis -+ + + C. stellata -+ + D. hansenii PCR-DGGE NL1/LS2 100% 100% 100% 100% 70% 50% B. bruxellensis 0% 0% 0% 0% 30% 40% C. stellata 0% 0% 0% 0% 0% 10% D. hansenii Identification des colonies par PCR-RFLP 2.103 2.105 5.106 2.104 7.102 1.103 Population dénombrée sur boîte

(UFC/mL) 45 30 15 7 3 1 Jours + + + + + + B. bruxellensis -+ + + C. stellata -+ + D. hansenii PCR-DGGE NL1/LS2 100% 100% 100% 100% 70% 50% B. bruxellensis 0% 0% 0% 0% 30% 40% C. stellata 0% 0% 0% 0% 0% 10% D. hansenii Identification des colonies par PCR-RFLP 2.103 2.105 5.106 2.104 7.102 1.103 Population dénombrée sur boîte

(UFC/mL) 45 30 15 7 3 1 Jours B. bruxellensis C. stellata D. hansenii J1 J3 J7 J15 J30 J45 B. bruxellensis C. stellata D. hansenii J1 J3 J7 J15 J30 J45

Figure 60: Evolution des espèces dans la culture mixte inoculée uniquement avec les levures non-Saccharomyces.

Ces suivis permettent de mieux comprendre la dynamique des fermentations alcooliques observée à l’échelle du chai. Dans un premier temps, les levures fermentaires

non-Saccharomyces et non-Brettanomyces dominent car elles étaient majoritairement présentes à

la surface de la baie de raisin. Puis S. cerevisiae s’impose car c’est l’espèce la plus apte à utiliser les sucres présents à des concentrations élevées dans le moût. Enfin lorsque le milieu est appauvri en sucres, mais enrichi en éthanol, B. bruxellensis devient l’espèce la plus active.

Cette séquence a également été décrite lors des fermentations alcooliques du cidre. Dans ce cas, Morrissey et al. (2004) qualifient la phase initiale de « phase de fruité », puisque les levures qui y participent produisent de nombreux composés aromatiques qui accentuent les caractères odorants du fruit. Puis c’est la phase de fermentation au sens strict avec l’action de

S. cerevisiae et la production des arômes fermentaires. La dernière phase est appelée « phase

de maturation » avec la domination de B. bruxellensis et la production des phénols volatils appréciés dans le cidre, mais redoutés dans le vin.

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Cette dynamique souligne l’importance de la FA dans le développement ultérieur de

B. bruxellensis. C’est à ce stade de la vinification qu’elle devient pour la première fois une

espèce majoritaire même si les niveaux de populations sont encore relativement faibles. Par conséquent, les opérations qui modifient le déroulement de la FA peuvent probablement affecter l’implantation de B. bruxellensis dans le vin. C’est le cas de la macération initiale à froid ou de l’apport massif de souches industrielles de S. cerevisiae à l’encuvage. Cela concerne également le problème des fermentations alcooliques languissantes.

II.3 Les risques d’altération - La problématique Brettanomyces durant la FA.

La comparaison des profils de REA-PFGE des souches du raisin et des souches du vin en fin de FA montre clairement que la première source de B. bruxellensis dans le vin est bien la baie de raisin elle-même car les profils sont clairement identiques pour les deux prélèvements (Figure 61). De plus, les différentes populations dénombrées sur la baie de raisins, dans le moût puis en en fin de FA, comparées les unes aux autres et avec la détection de B. bruxellensis à ces différentes stades démontrent qu’existe une relation significative entre la population de NS sur la baie au moment de la vendange et la population dans le moût en début de FA. A son tour cette dernière influence significativement la fréquence de la détection de B. bruxellensis durant la FA et sa présence en fin de FA, et ceci malgré l’absence de corrélation avec le population de NS à ce stade. A la fin de la FA, la présence de

B. bruxellensis est reliée à la fréquence de détection sur le raisin. Une population élevée de

NS sur raisins entraîne une fréquence de B. bruxellensis plus forte mais aussi une probabilité de retrouver B. bruxellensis en fin de FA plus importante (Figure 62).

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Figure 61: Comparaison des souches de B. bruxellensis du raisin et du vin par REA-PFGE.

Figure 62: Traitement statistique et corrélation entre les populations sur le raisin et pendant la FA. Les

flèches sont signes de corrélations confirmées par le traitement statistique (p<0,05) et les flèches barrées témoignent d’une absence de corrélation.

La compilation des données obtenues en 2004 permet d’évaluer l’effet du pH et de TAV, que le vin soit levuré ou non, sur la population de B. bruxellensis en fin de FA. (Figure 63). En ce qui concerne le pH, l’effet ne devient réellement significatif qu’au delà des gammes de pH œnologiques classiques. Au-delà de pH=3,8, le vin semble, en effet, plus favorable au développement de B. bruxellensis. De même pour le TAV, un nuage de point autour de 103

(16)

UFC/mL est observable pour une gamme de TAV relativement large. Seuls les TAV extrêmes semblent être moins favorables à B. bruxellensis. Mais ces effets ne sont que descriptifs et aucune corrélation statistique n’a pu être mise en évidence. Dans la grande majorité des cas, B.

bruxellensis qui est initialement présente sur le raisin, mais minoritairement, trouve dans le

vin en fin de FA des conditions relativement favorables à son développement contrairement aux autres levures initialement présentes.

1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 3,4 3,5 3,6 3,7 3,8 3,9 4 4,1 pH UF C /m L 1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 12,4 12,6 12,8 13 13,2 13,4 13,6 13,8 14 14,2 14,4 14,6 TAV (% v/v) UF C /m L

Merlot Cabernet-Sauvignon Cabernet-Franc 1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 3,4 3,5 3,6 3,7 3,8 3,9 4 4,1 pH UF C /m L 1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 12,4 12,6 12,8 13 13,2 13,4 13,6 13,8 14 14,2 14,4 14,6 TAV (% v/v) UF C /m L

Merlot Cabernet-Sauvignon Cabernet-Franc

Figure 63: Effet du pH, du TAV sur la population de B. bruxellensis dénombrée en fin FA.

II.4 L’effet de la macération initiale à froid et de l’utilisation de levain.

Pour la mise en œuvre d’une macération initiale froid (MIF), trois possibilités s’offrent au vinificateur. Il peut faire descendre la température du moût aussitôt après l’encuvage, puis à la fin de la macération réchauffer le moût pour favoriser le développement de la flore

(17)

indigène. Mais généralement la mise en oeuvre d’une macération initiale s’inscrit dans une volonté de maîtrise totale du procédé fermentaire, et la MIF est associée à l’utilisation de levain. Le levurage peut soit se faire à l’encuvage avant la descente en température, soit à la fin de la macération lorsque la température a été remontée.

Au domaine III, il est courant de procéder à une MIF pendant cinq jours à 10°C sans ajout de levain (Figure 64). On constate que les courbes de LT et de NS se superposent durant toute la période de maintien au froid, avec une légère diminution des populations. C’est probablement la conséquence du stress thermique engendré par le brusque passage d’une température d’environ 25°C au moment de l’encuvage à 10°C par ajout de glace carbonique et réfrigération de la cuve. Mais à la fin de la MIF, la population de levure est encore proche de 105 UFC/mL. Dès que la température redevient favorable, les cellules se développent pour atteindre un niveau de population habituel pendant la FA (107 UFC/mL). Durant cette phase de croissance, les courbes de LT et de NS sont encore superposées. Ce sont donc les levures non-Saccharomyces qui se sont multipliées après le chauffage.

Figure 64: Evolution de la population de levures totales () et de levures non-Saccharomyces (▲) durant une macération initiale à froid d’un lot de Merlot au domaine III vinifié en 2005.

(18)

Durant la MIF, les levures Candida sp. et Pichia sp. sont majoritaires (Figure 65). Elles se développent lors de la remontée de la température et débutent la FA. Au milieu de la FA, les deux espèces majoritaires sont encore Candida stellata et Pichia anomala. La tolérance de ces espèces aux faibles températures est prouvée, mais leur capacité fermentaire est néanmoins limitée. Progressivement c’est l’espèce S. cerevisiae qui s’impose et achève la FA. La préservation des levures non-Saccharomyces et non-Brettanomyces semble avoir été favorisée par la MIF. Elle peut donc offrir une possibilité pour augmenter la durée de la phase de fruité précédemment évoquée.

Pour S. cerevisiae, la souche présente en fin de MIF n’est pas la souche majoritaire à la fin de la FA. C’est elle qui pourtant a le mieux résisté au froid. Mais elle n’est pas la plus apte à achever la fermentation. La diversité intraspécifique observée en fin de FA est remarquable (4 profils différents de PCRδ12/δ21) par rapport aux fermentations classiques où généralement un unique profil majoritaire est détecté (Figure 66).

Figure 65: Arbre phylogénétique construit selon la méthode des plus proches voisins pour toutes les

séquences de levures obtenues par la DGGE NL1/LS2 et leur proportion estimée par la PCR-RFLP-ITS à différent moments de la fermentation.

Saccharomyces cerevisiae Zygosaccharomyces florentinus Hanseniaspora meyeri Hanseniaspora uvarum Pichia fermentans Hanseniaspora guillermondii Candida sp. Hanseniaspora lachancei Pichia anomala Candida boidini Candida cidri Metschnikowia andauensis Metschnikowia fructicola Metschnikowia pulcherrima Candida stellata Candida bombi Candida batistae 10 9 10 8 6 9 9 7 9 9 10 9 8 0.0 MIF J1 MIF J3 FA d=1,1 FA d=1,08 FA d=1.05 FA d=0,99 - - - 5% 5% - 25% 35% - 10% - - 10% - - - 10% 5% - - 5% - 5% 15% 5% 25% 5% 5% - - - 10% 10% 10% - 15% - 5% - - 25% - 15% 15% - - 10% 5% 10% - - 10% 20% - - - - 5% - 30% - - - - - 10% 25% - 30% 5% - - - - 5% - 20% 40% - - - - - - - 75% - - - - - - 5% 5% 5% 5% 5% - - - - -

(19)

Figure 66: Les cinq (I, II, III, IV, et V) profils PCR δ12/δ21 des différentes souches de S. cerevisiae

isolées durant la FA. Le profil I est l’unique profil observé jusqu’à une densité de 1,05. Puis se sont les profils II, III, IV et V qui dominent.

Au domaine I, la MIF est précédée par l’ajout de levain industriel. Dans ce cas, on observe, dès le premier remontage d’homogénéisation et le refroidissement du moût, un décalage entre la courbe de LT et la courbe de NS. Il traduit l’implantation du levain. Ce décalage se maintient tout au long du passage au froid. Même si les métabolismes sont ralentis par le froid, la domination du levain se prolonge durant toute la MIF et même au-delà. Lorsque la température augmente, les LT et par conséquent les S. cerevisiae, mais aussi les NS, se développent (Figure 67). Le contrôle d’implantation confirme que la souche majoritaire de S. cerevisiae est bien la souche industrielle inoculée avant le refroidissement du moût. Cette souche a donc parfaitement résisté au froid, tout comme les levures

non-Saccharomyces indigènes. Parmi ces espèces, B. bruxellensis est détectée dès la remontée de

la température, alors que d’ordinaire sa détection n’intervient qu’une fois que la fermentation a réellement débuté (Tableau XXXV). Cet exemple démontre que le froid préserve l’état physiologique les levures indigènes malgré l’ajout d’une souche industrielle.

(20)

Figure 67: Evolution de la population en levures totales () et en levures non-Saccharomyces (▲)durant une MIF de 7 jours pratiquée au domaine I sur un lot de Merlot vinifié en 2003.

Tableau XXXV. Evolution de la proportion des espèces de levures non-Saccharomyces identifées par

PCR-RFLP-ITS durant la vinification du lot de Merlot au domaine I en 2003.

Jour 1 Jour 3 Jour 5 Jour 7 (fin de la MIF) Jour 10 Jour 15 Jour 18 (fin de la FA) B. bruxellensis <5% <5% 10% 10% 20% 60% 80% Candida sp. 5% 10% 20% 30% 20% 10% 5% Hanseniaspora uvarum 90% 60% 25% 5% <5% <5% <5% Pichia sp. 5% 30% 45% 55% 60% 30% 15%

La MIF provoque chez les micro-organismes un stress thermique qui nécessite une réponse cellulaire de protection et d’adaptation. Ces phénomènes sont bien décrits en panification où les levains sont couramment congelés et des efforts sont réalisés pour améliorer la résistance au froid des souches de levures sélectionnées (Randez-Gil et al. 2003). A une température d’une dizaine de degré, le métabolisme des levures est ralenti. Mais les cellules ne meurent pas. Elles entrent dans une phase de latence durant laquelle la majorité

(21)

des activités anaboliques sont orientées vers la production de composés de protection contre le froid comme le tréhalose et le glycérol (Izawa et al. 2004). Ces molécules amphiphiles préservent l’intégrité des fonctions biologiques de la membrane cellulaire, dont les caractéristiques de fluidité et d’activité sont directement affectées par les changements de température. Les autres stress environnementaux possibles : la forte concentration en sucre du moût et la teneur élevée en éthanol, agissent également sur l’édifice membranaire (Beney et Gervais 2001). Par conséquent, les cellules qui ont résisté au froid sont parfaitement armées pour se développer dès que la température est augmentée. Ce phénomène qualifié de tolérance croisée entre le stress thermique et la capacité de développement dans un milieu hydroalcoolique est remarquable (Lewis et al. 1997). Il est étudié pour favoriser la préadaptation des micro-organismes à des conditions difficiles d’inoculation (Maicas et al. 2000, Chu-Ky et al. 2005).

L’ajout du levain peut également être pratiqué après la MIF et le réchauffement du moût. Ce cas a été étudié au domaine VI, lors du millésime 2005, avec différents levains qui se sont plus ou moins bien implantés. Lorsque le levain s’implante correctement, il se produit une évolution très clairement différente entre LT et NS. Les levures indigènes ont été contenues pendant la MIF comme cela était observé dans les deux cas précédents. Puis, lorsque la température augmente, la différence de populations entre les S. cerevisiae ajoutées et les levures qui ont résisté au froid est très nette. Ces dernières sont adaptées à survivre dans des conditions environnementales difficiles, mais pas à une compétition avec des levures ajoutées en masse. Dans l’exemple présenté sur la figure 68, la population de NS devient même inférieure à 1 UFC/mL. Sur cet exemple on constate que les bactéries lactiques arrivent à se maintenir à un niveau de population de 103 UFC/mL durant la MIF. Ce n’est pas le cas des bactéries à Gram négatif dont la chute amorcée durant la MIF se poursuit durant la FA.

Bien que chaque cuve représente un cas individuel, l’ensemble de ces suivis conduit à des interprétations d’ordre général. La mise en œuvre d’une MIF modifie significativement les cinétiques microbiennes. Le passage rapide au froid affecte notamment la phase initiale de multiplication des micro-organismes dans le moût observée sur la figure 55. Lorsque la MIF n’est pas associée à un levurage ces développements ne sont pas inhibés par le froid mais juste décalés. Ils se produisent lorsque l’on réchauffe le moût. Le froid fait entrer les micro-organismes indigènes dans une phase de latence. Mais il est probable que les espèces de la baie les plus sensibles aux conditions du moût (sucres, pH…) disparaissent tout de même et

(22)

qu’une sélection des espèces les plus résistantes s’opère. Cela peut poser problème si

B bruxellensis devient majoritaire, parmi les NS, à ce moment, comme dans le cas rencontré

au domaine I. Elle peut alors profiter de la FA pour se développer précocement alors qu’habituellement elle devient majoritaire uniquement en fin de FA. Une nouvelle fois la nature des espèces initialement présentes dans le moût est déterminante, et la mise en œuvre d’une macération initiale à froid est une pratique risquée. Pour la maîtriser le meilleur moyen semble d’être de l’associer avec un levurage des le réchauffement du moût pour contenir les NS qui ont résisté au froid. Mais le levurage inhibe-t-il vraiment la multiplication des levures indigènes ?

Longtemps l’ajout massif de S. cerevisiae a été préconisé pour inhiber le développement des levures indigènes. Mais en absence de MIF, les résultats obtenus montrent que le levurage n’empêche pas nécessairement la croissance des levures non-Saccharomyces qui participent à la phase initiale de la FA. Par contre, après cette augmentation transitoire, la population de NS chute et l’établissement d’une population élevée de S. cerevisiae active est nécessaire pour occuper l’écosystème durant toute la FA. C’est essentiel pour prévenir la croissance de

B. bruxellensis qui parmi les levures non-Saccharomyces est sans aucun doute l’espèce la

mieux adaptée aux conditions de fin de fermentation.

1E+00 1E+03 1E+06 1E+09

0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20

Jours après vendanges

UF C /m L Fin de la MIF et levurage 1E+00 1E+03 1E+06 1E+09 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20

Jours après vendanges

UF C /m L Fin de la MIF et levurage

Figure 68: Evolution des populations de LT (■), de NS (▲), de BL (◊) et de BA (○) durant la FA d’un lot de Cabernet-Sauvignon du domaine VI vinifié en 2005 avec une MIF de 4 jours puis un levurage.

(23)

II.5 L’effet du contenant.

Les cinétiques microbiennes ont été suivies dans des lots homogènes de moût répartis dans différents contenants comparés deux à deux : foudre bois/ cuve inox, cuve inox/ cuve béton et foudre bois ancien/ foudre bois neuf utilisée pour la première fois. D’un point de vue cinétique aucun n’effet notable n’a pu être mis en évidence dans les différentes situations observées. Mais la comparaison entre l’ancien et le nouveau foudre en bois est très intéressante (Figure 69). Elle confirme l’importance de la flore naturellement présente sur le raisin. En effet, au niveau de la diversité interspécifique on retrouve les mêmes espèces dans les deux contenants durant la fermentation. Le bois déjà utilisé n’apporte pas d’espèce supplémentaire. Concernant la diversité intraspécifique des espèces S. cerevisiae, O. oeni et

B. bruxellensis, il n’y a pas non plus de différence. Les profils majoritaires sont identiques. Le

levain ajouté s’implante aussi bien dans l’ancien foudre que dans le neuf. Les profils majoritaires de B. bruxellensis et d’O. oeni sont identiques. Ils correspondent aux profils observés à la sortie du fouloir. Ces souches proviennent bien de la matière première, le raisin, et pas du bois.

(24)

Figure 69: Comparaison des espèces majoritaires de levures et de bactéries (tableaux) et souches

majoritaires de S. cerevisiae, de B. bruxellensis et d’O. oeni (profils d’électrophorèses) isolées durant la FA d’un lot homogène de Merlot réparti dans un ancien foudre (10 ans) et un foudre neuf au domaine VIII en 2005.

II.6 Les fermentations alcooliques languissantes.

Les exemples présentés jusqu’à présent sont des cas idéaux pour lesquels la FA est allée à son terme sans encombre. Mais dans certains cas les fins de fermentations peuvent être problématiques. Elles peuvent tout simplement s’arrêter avant la consommation totale du glucose et du fructose, mais aussi se terminer de façon très languissante. Pour comprendre et élucider ces problèmes de nombreuses études ont été réalisées. Généralement les arguments avancés sont de nature biochimique (Bisson 1999). Une forte concentration en sucres aboutit à une teneur en éthanol trop élevée pour maintenir une viabilité des levures suffisante durant toute la FA. Une mauvaise gestion de l’oxygénation et / ou de la température gêne la croissance et la survie des levures (Strehaiano 1990). La pauvreté de certains moûts en azote assimilable (Bely et al. 1990) et en vitamines (Bataillon et al. 1996) sont également des explications couramment avancées. Mais jamais l’écologie microbienne du raisin et du moût n’a réellement été prise en compte dans sa globalité car les travaux antérieurs se sont focalisés uniquement sur l’espèce S. cerevisiae. Les données accumulées durant ce travail ont pour but

(25)

d’apprécier les effets de la microflore dans son intégralité sur les cinétiques fermentaires problématiques.

Parmi les trois millésimes étudiés, les FA languissantes ont été nettement plus fréquentes lors du millésime 2005, alors que la population de levures sur la baie de raisin et la proportion de levures fermentaires étaient les plus importantes. Parmi ces levures certaines NS ont débuté la FA et S. cerevisiae est intervenue plus tardivement.

S. cerevisiae est l’espèce œnologique dont la vitesse spécifique de dégradation des

sucres dans le moût est la plus élevée. Le maintien d’une population élevée de NS se traduit donc par un rallongement des durées de fermentation qui pourrait donc expliquer la lenteur de certaines FA. Si cette hypothèse était confirmée le contrôle de la qualité des levures de la baie, au moment des vendanges, pourrait aider au choix des modes de vinifications. En cas de présence importante de levures NS sur la vendange, le protocole devra limiter le maintien prolongé de ces levures fermentaires non-Saccharomyces et favoriser rapidement la domination de S. cerevisiae pour réduire les risques de FA languissantes (Figure 70).

(26)

Développement des levures

non-Saccharomyces dans le moût CONSEQUENCES AROMATIQUES - Pas de risques de phénols volatils puisque B. bruxellensis est minoritaire - Bénéfique dans la recherche d’une diversité des arômes

levuriens

CONSEQUENCES CINETIQUES

-Ralentissement de la cinétique fermentaire

car ces levures consomment moins rapidement les sucres

que S. cerevisiae - Risque de fermentations languissantes si S.

cerevisiae ne prend pas

rapidement le relais car la tolérance de ces levures à l’éthanol est

limitée

MOYENS DE CONTRÔLE:

Pour favoriser ce développement une MIF sans levurage est une possibilité

Pour limiter ce développement un levurage sans MIF est indiqué

ORIGINE:

Concentration et proportion importante de levures non-Saccharomyces avec des

qualités fermentaires (Pichia sp.,

Candida sp., Metschnikowia sp., Torulaspora sp.) sur la baie de raisin

Développement des levures

non-Saccharomyces dans le moût CONSEQUENCES AROMATIQUES - Pas de risques de phénols volatils puisque B. bruxellensis est minoritaire - Bénéfique dans la recherche d’une diversité des arômes

levuriens

CONSEQUENCES CINETIQUES

-Ralentissement de la cinétique fermentaire

car ces levures consomment moins rapidement les sucres

que S. cerevisiae - Risque de fermentations languissantes si S.

cerevisiae ne prend pas

rapidement le relais car la tolérance de ces levures à l’éthanol est

limitée

MOYENS DE CONTRÔLE:

Pour favoriser ce développement une MIF sans levurage est une possibilité

Pour limiter ce développement un levurage sans MIF est indiqué

ORIGINE:

Concentration et proportion importante de levures non-Saccharomyces avec des

qualités fermentaires (Pichia sp.,

Candida sp., Metschnikowia sp., Torulaspora sp.) sur la baie de raisin

Figure 70: Bilan sur le développement des levures non-Saccharomyces observé dans le moût.

Mais les cas les plus atypiques ont été observés lors de l’utilisation de levains. Dans certains cas, après une implantation positive au début de la FA, la cinétique fermentaire s’est nettement ralentie lorsque le TAV dépassait 12,5 % v/v. Alors que les souches industrielles de

S. cerevisiae peinent à achever la FA, les NS, exclusivement composées de B. bruxellensis,

profitent de la baisse d’activité des S. cerevisiae pour se développer (Figure 71). Dans le vin inoculé pour lequel l’implantation du levain n’a été contrôlée positive qu’au début de la FA, la population de B. bruxellensis est la plus élevée en fin de suivi. Ces observations confirment les cultures mixtes des micro-vinifications précédemment évoquées. A la fin de la FA, B.

bruxellensis semble bien être la seule espèce à pouvoir se développer. Pour réduire les risques

d’altération à ce stade précoce de la vinification, il est essentiel d’obtenir une FA rapide avec une population de S. cerevisiae suffisamment élevée et active pour monopoliser l’écosystème jusqu’à l’épuisement total des sucres. Même si B. bruxellensis ne se développe pas

(27)

nécessairement en fin de FA c’est à ce moment qu’elle s’implante comme une espèce majoritaire. Densité 0,992 1,042 1,092 0 5 10 15 20

Jours après les vendanges

NS

1E+00 1E+02 1E+04

0 5 10 15 20

Jours après les vendanges

UF C /m L LT 1E+03 1E+06 1E+09 0 5 10 15 20

Jours après les vendanges

UF C /m L Densité 0,992 1,042 1,092 0 5 10 15 20

Jours après les vendanges

NS

1E+00 1E+02 1E+04

0 5 10 15 20

Jours après les vendanges

UF C /m L LT 1E+03 1E+06 1E+09 0 5 10 15 20

Jours après les vendanges

UF

C

/m

L

Figure 71: Evolution de la densité, des populations de LT et de NS durant la FA d’un lot de

Cabernet-Sauvignon au domaine VI en 2005.◊ : vin non-inoculé, Δ : vin inoculé dont l’implantation du levain est positive durant toute la FA et ● : vin inoculé dont l’implantation du levain n’a été positive qu’au début de la FA.

(28)

III La comparaison avec les vinifications en blancs.

La comparaison de la vinification des vins blancs secs et celle des vins rouges n’est pas évidente car les procédés mis en jeu sont radicalement différents. Néanmoins, il semble important de souligner deux particularités microbiologiques remarquables de la vinification des moûts de raisins blancs.

La première correspond à l’évolution des bactéries à Gram négatif. Ces bactéries, en proportion notable sur le raisin rouge disparaissent très rapidement dès que la FA commence dans les moûts rouges, alors qu’elles se maintiennent dans les moûts blancs durant toute la FA. C’est seulement le sulfitage post-fermentaire qui permet leur élimination (Figure 72). En outre la diversité interspécifique est plus élevée d’après les analyses en DGGE rpoB (Figure 73). Par exemple, l’espèce Burkholderia vietnamiensis, qui est une des espèces prédominantes à la surface des baies, se maintient durant toute la FA dans les vins blanc tandis qu’elle disparaît très vite dans les vins rouges. Mais comme les populations totales de bactéries totales sont du même ordre de grandeur durant la FA dans les deux types de moût (environ 103 – 102 UFC/mL), l’absence de détection de Burkholderia vietnamiensis dans les moûts rouges dès le début de la FA n’est pas imputable à un camouflage de cette espèce par les espèces majoritaires mais bien à une capacité de Burkholderia vietnamiensis à résister préférentiellement à la FA dans les moûts blancs. Son élimination dans les vins rouges n’est probablement pas la seule conséquence d’une faible tolérance à l’éthanol. Les tanins et les composés phénoliques présents en importante quantité dans les moûts rouges peuvent expliquer ce phénomène.

Cette hypothèse est confortée par l’estimation des CMI sur boîte de l’espèce

Burkholderia vietnamiensis pour certains de ces composés (Tableau XXXVI). Cette espèce

apparaît en effet significativement plus sensible que les bactéries lactiques à ces composés issus directement du raisin et décrits comme inhibiteurs de la croissance d’autres bactéries comme Listeria monocytogenes, Pseudomonas aeruginosa, Serratia marcescens… (Wen et al. 2003, Puupponen-Pimia et al. 2001, 2005, Rodriguez-Vaquero et al. 2006). Ces composés sont plus concentrés dans les moûts rouges (Häkkinen et al. 1999). Ils pourraient concourir avec d’autres typicités de ces moûts (TAV généralement plus élevé, pH différent…) à réduire plus rapidement la population de bactéries à Gram négatif lors de la FA.

(29)

Le second élément apporté par le suivi des vins blancs est la présence de l’espèce B.

bruxellensis. L’identification des levures non-Saccharomyces en fin de FA dans les vins

blancs aboutit au même résultat que pour les vins rouges. Dans les deux cas, B. bruxellensis domine le groupe des NS en fin de FA. La comparaison des souches de B. bruxellensis isolées de moûts de raisins rouges et celles isolées de moûts de raisins blancs dans un même domaine révèle que certaines sont identiques et notamment celle(s) issue(s) du vignoble. Pourtant les problèmes d’altération par les phénols volatils affectent rarement les vins blancs. Cela amène à s’interroger sur les paramètres réels qui conduisent à la production de phénols volatils par les B. bruxellensis dans les vins rouges et notamment l’importance de la matière première.

1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 1E+05 0 5 10 15 20 25 30

Jours après les vendanges

U F C //m L Fin de la FA Fin de la FA et addition du SO2 1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 1E+05 0 5 10 15 20 25 30

Jours après les vendanges

U F C //m L Fin de la FA Fin de la FA et addition du SO2 Merlot Sémillon 1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 1E+05 0 5 10 15 20 25 30

Jours après les vendanges

U F C //m L Fin de la FA Fin de la FA et addition du SO2 1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 1E+05 0 5 10 15 20 25 30

Jours après les vendanges

U F C //m L Fin de la FA Fin de la FA et addition du SO2 Merlot Sémillon

Figure 72: Evolution de la population en bactéries à Gram négatif lors de la vinification d’un lot de

Merlot (●) et d’un lot de Sémillon (■) au domaine III en 2005.

(30)

Tableau XXXVI. Comparaison de CMI de l’espèce Burkholderia vietnamiensis avec celles de

quelques bactéries œnologiques pour quelques composés du raisin.

Acide coumarique (g/L) Acide férulique (g/L) Acide vanillique (g/L) Quercétine (mg/L) Burkholderia vietnamiensis 0,4±0,1 0,5±2 0,20±0,05 5±2 O. oeni 2,2±0,4 2,5±0,5 1,4±0,7 60±2 Lactobacillus plantarum 3,5±0,5 2,5±1,0 1,8±0,6 160±20 Leuconostoc mesenteroides 2,2±0,6 2±0,2 0,7±0,2 65±5 P. parvulus 2,5±0,4 4,5±1,0 0,8±0,2 80±10 Acetobacter pomorum 4,0±0,2 2,5±0,2 0,4±0,1 40±5

IV La microflore du vin entre les deux fermentations.

IV.1 L’effet de la macération et de l’écoulage.

Après l’épuisement du vin en sucres fermentescibles, l’écosystème microbien entre dans un état apparent quasi-stationnaire durant l’étape de macération. Le nombre de LT est stable. En soustrayant la population de NS à celle de LT, on constate que les levures Saccharomyces et les levures Brettanomyces (qui représentent à présent la quasi-totalité des NS) sont du même ordre de grandeur. Cette stabilité est remarquable puisque les B. bruxellensis paraissent particulièrement actives et les S. cerevisiae en déclin en fin de FA. Les BL et les BA sont à leur minimum.

La durée de la macération est variable selon le « pouvoir tannant » que souhaite atteindre le vinificateur. Mais il est rare d’observer d’importants changements microbiens durant cette période. En revanche, l’écoulage modifie cet état quasi-stationnaire. Transitoirement le nombre de BA augmente, ce qui est probablement la conséquence de l’apport d’oxygène. Si les BL ont déjà commencé leur multiplication avant, l’écoulage les freine (Figure 74). Une diminution de la population des NS est également observée après l’écoulage.

(31)

1E+00 1E+02 1E+04 1E+06 1E+08 15 18 21 24 27 30

Jours après les vendanges

UF C /m L Fin de la FA Ecoulage Macération 1E+00 1E+02 1E+04 1E+06 1E+08 15 18 21 24 27 30

Jours après les vendanges

UF C /m L Fin de la FA Ecoulage Macération

Figure 74: Exemple de la macération et de l’écoulage sur les populations de LT (■), de NS (▲), de BL (◊) et de BA (○).

IV.2 Les différences entre le vin de goutte et les vins de presse.

Après la récupération du vin de goutte, le marc et les particules solides sont pressés pour récupérer les vins de presse. Selon les barèmes de pressions plusieurs types de vin de presse sont extraits. Plus la pression est forte plus le vin est coloré, astringent, rustique et amer car il récupère les désagréments issus des pépins et des lies. Il ne saurait convenir à l’élaboration des vins de qualité. Néanmoins lors de certains millésimes, certains vins de presse peuvent corriger la légèreté du vin de goutte par un assemblage après les vinifications.

D’un point de vue microbiologique, les vins de presse sont singuliers car ils sont plus chargés en micro-organismes et notamment en bactéries lactiques (O. oeni) et en levures

non-Saccharomyces (B. bruxellensis). Dans le cidre, Del Campo et al. (2003) ont remarqué que les

populations de BL récupérées dans les différentes presses étaient directement corrélées aux barèmes de pression appliquée. Par conséquent la chute de ces populations du vin de goutte après l’écoulage dans le vin de goutte pourrait venir d’un phénomène de concentration de ces populations dans les vins de presse et donc à leur soustraction du vin de goutte (Figure 75). Un phénomène purement physique de concentration liée au pressurage est probable mais la préférence des micro-organismes pour les conditions physicochimiques des vins de presse doit également être en cause. Dans la cuve de fermentation, les micro-organismes s’adsorbent aux particules solides en suspension qui se retrouvent nécessairement dans les

(32)

vins de presse. Mais certaines espèces, comme B. bruxellensis, doivent également être attirées préférentiellement par les conditions physico-chimiques (substrats résiduels, composés phénoliques…) des vins de presse, et les BL par le pH plus élevé.

1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 VG VP1 VP2 VP3 UF C /m L 1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 1E+05 1E+06 VG VP1 VP2 VP3 UF C /m L

Vin de première presse 1: VP1 : 0<p<300 mbar Vin de seconde presseVP2 : 300<p<900 mbar Vin de troisième presseVP3 : 900<p<1400 mbar

Population de levures non-Saccharomyces Population de bactéries lactiques

1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 VG VP1 VP2 VP3 UF C /m L 1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 1E+05 1E+06 VG VP1 VP2 VP3 UF C /m L

Vin de première presse 1: VP1 : 0<p<300 mbar Vin de seconde presseVP2 : 300<p<900 mbar Vin de troisième presseVP3 : 900<p<1400 mbar

Population de levures non-Saccharomyces Population de bactéries lactiques

Figure 75: Exemple de différences de populations de NS et de BL dans le vin de goutte et dans les

vins de presses correspondants.

V La fermentation malolactique.

V.1 L’évolution de la microflore durant la fermentation malolactique.

Une fois l’équilibre retrouvé après l’écoulage et une phase de latence plus ou moins longue, les BL, quasi-exclusivement composées de l’espèce O. oeni, se multiplient pour passer de 102 à 107 – 108 UFC/mL. Elles dégradent l’acide-L-malique. C’est la FML. Cette étape est déterminante non seulement pour la vinification mais aussi au plan microbiologique. En effet, il est fréquent d’observer à ce moment un couplage entre la croissance d’O. oeni et celle de B. bruxellensis (Figure 76).

A la fin de la FML, la population de B. bruxellensis va finalement dépasser celle de

S. cerevisiae qui a repris son déclin. B. bruxellensis est devenue la principale espèce de levure

(33)

collectée à la surface des boites LT par PCR-ITS. Le profil de S. cerevisiae observable en fin de FA cohabite en début de FML avec celui de B. bruxellensis, puis il va disparaît et enfin laisse la place à ce dernier avant le sulfitage post-fermentaire (Figure 77).

1E+00 1E+02 1E+04 1E+06 1E+08 30 35 40 45 50 55 60 65 70

Jours après les vendanges

UF C /m L 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 [A c ide m a li que ] g/ L Fin de FML et ajout de SO2 1E+00 1E+02 1E+04 1E+06 1E+08 30 35 40 45 50 55 60 65 70

Jours après les vendanges

UF C /m L 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 [A c ide m a li que ] g/ L Fin de FML et ajout de SO2

Figure 76: Evolution des populations de LT (■), de NS (▲), de BL () et de BA (○) durant la fermentation malolactique d’un lot de Cabernet-Sauvignon du domaine IV vinifié en 2004.

M I II III IV V VI VII M

Figure 77: Gel de PCR-ITS réalisé sur l’ADN extrait des biomasses collectées sur les boîtes LT à la

fin de la FA (I), lors de l’écoulage (II,), au début de la FML (IV) et à la fin de la FML (IV), avec une souche pure de S. cerevisiae (V) et une souche pure de B. bruxellensis comme témoins de migration. (M : marqueur 100 pb et VII : control négatif de la PCR).

(34)

Les modifications des paramètres chimiques, comme l’augmentation du pH et la baisse de la concentration en acide-L-malique, semblent favoriser le développement des

Brettanomyces durant la FML, à moins que cela ne soit l’effet d’interactions directes entre les

cellules d’O. oeni et celles de B. bruxellensis. Dans tous les cas, cela souligne l’importance d’une MLF rapide. Cela est démontré par les essais de levains malolactiques réalisés au domaine VI lors du millésime 2004. La FML s’est déroulée plus ou moins rapidement sur un lot initialement homogène, en raison d’une implantation plus ou moins réussie des souches inoculées. Dans tous les cas, les B. bruxellensis ont commencé leur multiplication lorsque la FML débutait. Mais le fait le plus remarquable est que plus la FML était lente plus la population de B. bruxellensis augmentait. Dans le cas des fermentations malolactiques les plus languissantes, des populations de B. bruxellensis de plus 104 UFC/mL ont été dénombrées avant que la FML soit achevée et le vin protégé par le sulfitage post-fermentaire (Figure 78). 1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 1E+05 0 20 40 60 80 100

Nombre de jours après l'ajout de levains malolactiques

[B . b ru xe lle n sis ] U F C /m L 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 1,4 1,6 1,8 A ci d e M al ique g/ L Fin de la FML « rapide » et ajout de SO2 Fin de la FML « languissante » et ajout de SO2 1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 1E+05 0 20 40 60 80 100

Nombre de jours après l'ajout de levains malolactiques

[B . b ru xe lle n sis ] U F C /m L 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 1,4 1,6 1,8 A ci d e M al ique g/ L Fin de la FML « rapide » et ajout de SO2 Fin de la FML « languissante » et ajout de SO2

Figure 78: Comparaison de l’évolution de la population en B. bruxellensis (■) et de l’acide malique

(35)

Plus la durée de la FML est longue, plus les B. bruxellensis ont le temps de se développer. Le calcul de l’intégrale délimitée par la courbe de la population de B. bruxellensis et l’axe des abscisses sur l’intervalle de temps nécessaire à la FML permet d’estimer la biomasse totale formée durant cette période. Dans les cas précédemment évoqués, ce calcul a été effectué pour chaque FML entre le jour j0 correspondant à l’ensemencement et le jour jn

correspondant à l’achèvement de la FML dans le cas de la cinétique la plus lente. D’après la figure 79 il existe une corrélation exponentielle entre l’intégrale de la population de

B. bruxellensis et le temps mis pour effectuer la FML. Il ne s’agit évidement pas d’une

relation généralisable à tous les vins et à toutes les FML mais cela démontre l’intérêt d’une FML rapide pour limiter le développement de B. bruxellensis.

Figure 79: Corrélation entre l’intégrale de la population de B. bruxellensis (B. b) et le temps mis pour

effectuer la FML. temps

e

mL

t

UFC

en

b

B

Intégrale

.

]

(

Δ

)

=

40

0,08×

[

98

,

0

2

=

r

0 2 4 6 8 10 12 14 16 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110

Nombre de jours nécessaires pour achever la FML

Ln ( in té g ra le B . br ux el le ns is ) temps

e

mL

t

UFC

en

b

B

Intégrale

.

]

(

Δ

)

=

40

0,08×

[

98

,

0

2

=

r

0 2 4 6 8 10 12 14 16 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110

Nombre de jours nécessaires pour achever la FML

Ln ( in té g ra le B . br ux el le ns is )

(36)

V.2 L’interaction entre O. oeni et B. bruxellensis.

Plusieurs hypothèses (Figure 80) peuvent être avancées pour expliquer pourquoi la MFL coïncide souvent avec la première phase de multiplication significative de B. bruxellensis.

La première hypothèse est suggérée par les observations réalisées lors de la FA. Dès que la population de S. cerevisiae en déclin rejoint la population latente de B. bruxellensis (102 – 103 UFC/mL), ce qui intervient généralement au début de la FML, B. bruxellensis pourrait en profiter pour se développer. Mais certains cas de FML tardives (Figure 81) suggèrent que même si les S. cerevisiae ont chuté et que la FML a tardée à se déclencher, les B. bruxellensis restent latentes et ne profitent pas de ce délai pour se multiplier. Dans l’exemple présenté, il est probable que les paramètres physico-chimiques du vin : TAV très élevé (14,6 % v/v), une teneur en SO2 libre résiduel relativement élevée à ce stade de la vinification (16 mg/L)

rendent le vin particulièrement difficile pour le développement d’O. oeni (retard de la FML) mais aussi pour B. bruxellensis (délai de la phase de croissance).

Figure 80: Hypothèses pour expliquer le développement de B. bruxellensis observé dans les vins lors

de la FML.

Différentes hypothèses pour expliquer le développement quasi-systématique de B. bruxellensis observé dans les vins lors de la FML

Pas d’effet direct de la FML.

Auparavant,

l’écosystème était monopolisé par les S. cerevisiae, mais la forte tolérance à l’éthanol permet à B. bruxellensis de profiter du déclin des premières pour se développer.

Effet de l’activité

malolactique. Effet d’ O. oeni.

La FML rend le vin plus favorable au développement de B. bruxellensis. Augmentation du pH. Baisse de la concentration en acide-L-malique. Interaction bénéfique entre B. bruxellensis et O. oeni. Produit du métabolisme d’O. oeni est bénéfique à B. bruxellensis. Interaction commensalisme ou mutualisme. Interaction directe entre les cellules. Interaction symbiotique.

?

?

?

?

?

1èrehypothèse 2ndhypothèse 3èmehypothèse 4èmehypothèse 5èmehypothèse

Différentes hypothèses pour expliquer le développement quasi-systématique de B. bruxellensis observé dans les vins lors de la FML

Pas d’effet direct de la FML.

Auparavant,

l’écosystème était monopolisé par les S. cerevisiae, mais la forte tolérance à l’éthanol permet à B. bruxellensis de profiter du déclin des premières pour se développer.

Effet de l’activité

malolactique. Effet d’ O. oeni.

La FML rend le vin plus favorable au développement de B. bruxellensis. Augmentation du pH. Baisse de la concentration en acide-L-malique. Interaction bénéfique entre B. bruxellensis et O. oeni. Produit du métabolisme d’O. oeni est bénéfique à B. bruxellensis. Interaction commensalisme ou mutualisme. Interaction directe entre les cellules. Interaction symbiotique.

?

?

?

?

?

?

?

?

?

(37)

Figure 81: Exemple de l’évolution des populations de LT (■), des NS (▲) et de BL (◊) dans le cas d’une FML tardive observée au domaine V en 2005.

La seconde hypothèse concerne le pH. L’augmentation moyenne du pH observée sur les lots étudiés durant ce travail est de 6,2 ± 1,9 % du pH initial (calcul réalisé sur l’ensemble des lots étudiés). Un vin avec un pH égal à 3,6 avant la FML aura donc un pH proche de 3,82 après la FML. Inoculées à 103 UFC/mL, dans un vin avant FML, les B. bruxellensis ne s’implantent qu’à partir d’un pH égal à 3,4. En dessous de cette valeur la population chute progressivement et disparaît au bout de 10 jours. Au-delà de 3,4, la population de B.

bruxellensis se maintient autour de 103 UFC/mL mais ne présente pas de réelle phase de

croissance. Au bout de 10 jours c’est dans le vin à pH 4,0 que la population de B. bruxellensis est la plus élevée (Tableau XXXVII). Ces résultats rejoignent les observations précédentes (Chapitre II.3). Les pH les plus acides freinent le développement de B. bruxellensis tandis que les pH les plus basiques l’encouragent. Mais l’effet n’est sensible qu’à des pH extrêmes rarement rencontrés dans les vins. L’augmentation du pH consécutive à la dégradation de l’acide-L-malique dans le vin, faible et progressive, n’est pas suffisante pour expliquer la croissance de B. bruxellensis durant la FML.

1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 1E+05 1E+06 1E+07 1E+08 44 69 94 119 144 169 194

Jours après les vendanges

UF

C

/m

L

Ecoulage Retard « involontaire »du déclenchement de la FML Ajout de levain malolactique Fin de la FML 1E+00 1E+01 1E+02 1E+03 1E+04 1E+05 1E+06 1E+07 1E+08 44 69 94 119 144 169 194

Jours après les vendanges

UF

C

/m

L

Ecoulage Retard « involontaire »du déclenchement de la FML

Ajout de levain

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