Max Weber
Marcel Gauchet
RESUME
Cette recherche s’inscrit dans le cadre des études sociologiques de la religion, elle considère le fait religieux comme une forme particulière d’interaction et d’action collective. C’est dire qu’elle s’intègre dans la
thématique inaugurée par les grands sociologues que sont Max Weber pour les classiques et Marcel Gauchet pour les contemporains. Aujourd’hui la question de la religion est augmentée par celle de la modernité. La distance entre ces deux niveaux de la réalité constitue désormais un axe central dans la recherche sur les questions de la religion.
Le monde arabe connait présentement des changements majeurs allant de sociétés ayant la religion pour instance rectrice de leurs actions et projets à des sociétés sécularisées et individualistes où la religion ne joue plus le même rôle que par le passé. Dans ce dernier cas, il faut préciser que la religion ne quitte pas pour autant l’arène sociale ; bien au contraire elle est omniprésente et bien
encrée mais se cantonne au niveau rituel sans plus.
L’importance de notre objet de recherche se situe à ce niveau précis ; celui de mettre en exergue les nouvelles formes de religiosité, les rapports ambigüs à l’Au-delà et l’Ici-bas et l’appréhension de l’avenir dans la vision d’un musulman désormais rationnel, calculateur et individualisé.
Le but de cette recherche est donc de parvenir à une meilleure
compréhension de l’adaptation du musulman à la modernité envahissante, et à une mise en relief des stratégies qu’il déploie à cette même fin.
Problématique :
L’Algérie connait depuis les années 70 un déploiement de l’islamisme, notamment au niveau politique et social. Concrètement il s’agit pour les masses d’opérer un retour au patrimoine islamique afin de revérifier la Umma
musulmane. La question est de savoir s’il faut considérer cette volonté manifeste de renouer avec le passé comme un refus du présent dans sa version modernité ; c'est-à-dire un rejet de l’organisation institutionnelle, technologique et éthique de l’occident. S’agit-il au contraire d’une quête laborieuse de l’identité, de l’identité agressée ; ainsi que la recherche d’un équilibre et d’un accord avec soi devenus chancelants ?
L’attitude négative du musulman envers l’occident et contre l’invasion culturelle qu’il impose, au non d’un Islam ancestral et par une intensification
des pratiques rituelles, est-elle vraiment un refus (ou même une résistance) de la modernité pour des sociétés profondément inféodées économiquement,
technologiquement, politiquement à l’étranger ?
Il va sans dire que la modernité est loin d’être neutre encore moins innocente. Aussi, accepter les technologies occidentales et rechercher les biens de consommation modernes, c’est accepter le déclassement et le déclin d’une bonne partie des ses valeurs, traditions et coutumes devenues par là-même désuètes et obsolètes.
Cette non mentalité culturelle se vérifie également dans les institutions politiques (démocratiques), les libertés individuelles et collectives…etc
Partant de ces constats, notre hypothèse de recherche se décline comme suite : L’intensification et la généralisation de la pratique virtuelle en Algérie dite "réislamisation de l’Algérien" n’est autre qu’une tentative (désespérée ?) de restaurer l’équilibre entre l’homme algérien et son vécu social réel, autrement dit une tentative de réappropriation d’une modernité difficilement domptable.
La présente recherche à voulu mettre en avant l’individualisation de l’homme algérien dans toute ses dimensions. Une individualisation
instrumentale où se pratique le calcul : Cout et profit. Cette terminologie en apparence économique traduit au mieux l’attitude des sujets d’enquête, en l’occurrence les étudiants, qui font preuve d’un comportement individualiste et rationnel tant dans le domaine religieux que dans le domaine temporel. Discours
et pratiques de ces derniers infirment la thèse du déclin de la religion et confirment l’incapacité totale de celle-ci à organiser la société et à produire du
sens.
Ce que nous constatons aujourd’hui, c’est une reconstruction moderne du religieux. C’est un islam dit, vu et vécu autrement. Un islam qui à l’instar des autres religions s’adapte sans cesse à la modernité, sans quoi il ne peut survivre.