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Article pp.93-97 du Vol.32 n°162 (2006)

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Texte intégral

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D O S S I E R

Recherche marketing

nouvelles tendances

sous la direction de

Michelle Bergadaà

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L

orsqu’il n’est pas regardé comme l’art de mani- puler le consommateur, le marketing est le plus souvent considéré comme une fonction de l’en- treprise. Pendant des décennies, le marketing français ne s’est pas affranchi de cette définition dominante qui pré- vaut outre-Atlantique depuis les années 1970. Ce « mar- keting management » a pour visée le développement de concepts ad hoc, comme la segmentation ou la différen- ciation par la marque et le prix. La recherche d’outils de mesure et les procédures scientifiques se sont affinées au fil des ans. Le marketing a permis de canaliser l’offre de l’entreprise par la promesse d’une vie meilleure pour le plus grand nombre de consommateurs. Notre discipline s’est donc développée dans le cadre d’une logique éco- nomique s’appuyant sur un matérialisme de bon aloi.

Mais, le marketing, avant d’être un ensemble de concepts, de lois et de méthodes spécifiques se définit par son champ d’exercice. Selon le niveau d’analyse avec lequel on aborde ce champ, il est l’interface entre le monde économique et la société, entre l’entreprise et l’individu, entre le manager et le client. Les nouvelles tendances de la recherche marketing en France qu’illus- trent les articles qui constituent ce numéro spécial, s’ar- ticulent d’abord sur la clarification de ce champ.

I N T R O D U C T I O N

PAR MICHELLE BERGADAÀ

Quoi de neuf

dans la recherche

en marketing?

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Par ailleurs, de nombreux chercheurs inter- nationaux proposent aujourd’hui que le rôle de la recherche en marketing ne soit pas celui que lui confère une économie libérale occidentale s’articulant sur la raison maté- rialiste. Leur perspective suggère que le rôle de notre discipline se fonde sur une assise culturelle et qu’elle ait également pour visée l’établissement de liens sociaux.

Un courant de recherche alternatif se déve- loppe ainsi avec des auteurs qui partagent le souci de donner au consommateur une place centrale et qui inscrivent leurs travaux dans une représentation sociale et culturelle (Arnould et Thompson, 2005)1. Chacun de ces chercheurs contribue à une « Consumer Culture Theory », courant qui s’affranchit assez clairement de la simple volonté de mise en œuvre d’un marketing management transactionnel. Quant au mode opératoire du consommateur, on considère aussi que ce dernier fonctionne de manière instru- mentale, en se définissant des moyens d’at- teindre ses buts cognitivement conçus pour le futur, ou au contraire, qu’il consomme de manière autotélique dans un cadre temporel présent en vivant son action comme une expérience ou comme un jeu (Holt, 1995)2. Les auteurs français qui ont contribué à ce numéro spécial inscrivent aujourd’hui leurs recherches à l’aulne de ces perspectives.

Le premier article de ce dossier nous est proposé par Antonella Carù et Bernard Cova. En mal d’initiative, pour lutter contre une concurrence sans cesse plus vive et face à un consommateur toujours plus blasé, les entreprises peuvent choisir de mettre en

place une logique de réenchantement de l’acte d’achat. Les auteurs de cet article, pour leur part, distinguent très clairement l’expérience vécue par le consommateur qui dépasse largement le moment de la ren- contre avec l’entreprise, de l’aide que peut apporter l’entreprise en matière de valorisa- tion de son expérience. En positionnant le marketing expérientiel comme paradigme alternatif, et en le dissociant des politiques managériales de production d’expérience, les auteurs proposent une trame d’analyse qui offre une clarification indispensable à tous ceux qui adoptent cette démarche

« expérientielle », qu’ils soient chercheurs, pédagogues ou managers.

Le second article, de Maud Dempérat, effec- tue également une analyse de ce qui se pré- sente comme un nouveau paradigme, le mar- keting relationnel. En rappelant tout d’abord comment la fonction marketing s’inscrit dans une relation d’échange, l’auteur montre que l’approche relationnelle se fonde dans une logique tant économique que sociale, et ce avec une visée à long terme. L’auteur nous propose ensuite une mise en œuvre de la relation qui s’enracine dans une recherche de proximité. Cette proximité entre parte- naires semble plus opérationnelle que des concepts encore mal cernés tels que celui de climat de la relation ou de confiance, par exemple. Il nous apparaît que cet article est un bon exemple de ce « nouveau marketing » qui ne voit pas d’intérêt à s’épuiser dans une lutte de paradigmes, mais qui cherche à mettre en œuvre parallèlement maîtrise des concepts et pragmatisme.

96 Revue française de gestion – N° 162/2006

1. Arnould E. J. et Thomson C. J., “Consumer Culture Theory (CCT): Twenty Years of research”, Journal of Consu- mer Research, vol. 31, March 2005, p. 868-882.

2. D. B. Holt, “How Consumers Consume: A Typology of Consumption Practices”, Journal of Consumer Research, vol. 22, June 1995, p. 1-16.

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Dans leur article sur le risque alimentaire, Michelle Bergadaà et Bertrand Urien s’ins- crivent clairement dans le champ d’un mar- keting culturel. Les auteurs s’efforcent de réconcilier les points de vue holiste et indi- viduel qui, en France, se sont longtemps opposés. Entre la gestion sociale du risque mise en œuvre par les autorités, et sa ges- tion individuelle, nous retrouvons la coges- tion du risque par l’entreprise et son client.

Cette mise en perspective permet de distin- guer un champ d’exercice du marketing et ses niveaux d’appréhension. Pour chacun de ces trois niveaux d’analyse, les auteurs proposent des pistes de recherches spéci- fiques. On peut imaginer que la méthode d’analyse mise en œuvre ici soit applicable à d’autres objets de recherche sociétaux que le risque alimentaire, et qu’elle permette de s’affranchir de la classique analyse multi- disciplinaire descriptive effectuée par tout débutant en recherche.

Le quatrième article que nous proposent Fatiha Fort et François Fort est également significatif de la nouvelle vague en marke- ting. D’une part, il porte sur un objet véri- table culturel : les produits alimentaires de terroir. D’autre part, il s’inscrit de facto, dans l’optique d’un marketing expérientiel et d’un marketing relationnel. Ce double éclairage a un intérêt évident : celui de res- pecter tant les producteurs de ces produits spécifiques, que leurs consommateurs.

L’équilibre de l’ensemble repose sur l’adé- quation entre approfondissement des concepts et pragmatisme. Par exemple, les auteurs concluent par la demande d’une cohérence produite en alliant stabilité de la qualité du produit et conservation de son originalité. Notons que le point de départ de la proposition des auteurs n’est ni le pro- ducteur, ni le distributeur, ni même le

consommateur. La vedette est ce produit culturel, lequel appelle une entente de qua- lité entre consommateurs, producteurs et distributeurs.

L’article proposé par Souad Djelassi et Jean-Marc Ferrandi clôt ce dossier. Contrai- rement aux articles précédents, les auteurs adhèrent à la perspective d’un marketing transactionnel, et ils conçoivent un consom- mateur guidé par une logique instrumentale de mise en place de « moyens-fins » cogni- tivement élaborés. Mais, les auteurs revisi- tent leur objet de recherche : c’est au travers d’un cadre temporel intrinsèque que l’indi- vidu va positionner son action. À partir de ce point, les auteurs proposent une nouvelle manière d’envisager le concept central de la segmentation en suggérant l’existence anté- rieure de profils temporels. La recherche se conclut en suggérant que l’individu ne soit, ni totalement soumis à l’influence de son environnement social, ni tout à fait indé- pendant dans sa manière de concevoir son action dans le temps.

Les années 2000 apportent à la recherche marketing leur lot de doutes face à un déve- loppement ralenti au plan économique, alors même que la mondialisation induit l’émergence de nouvelles questions socié- tales dues à la complexité des relations et à l’introduction de nouveaux moyens de communication et de commerce. Les auteurs qui ont contribué à ce numéro spé- cial démontrent qu’un réel dynamisme de recherche existe. Le marketing français semble bien sorti de l’adolescence, être prêt à s’affranchir de modèles externes – tant disciplinaire que nord-américain – et pro- poser des angles d’attaque des perspectives réellement originales, alliant champs social et culturel, conceptualisation et pragma- tisme. Il y a tout lieu d’être optimiste.

Quoi de neuf dans la recherche en marketing ? 97

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