• Aucun résultat trouvé

ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTÉ

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTÉ "

Copied!
36
0
0

Texte intégral

(1)

t WORLD HEALTH ORGANIZATION

ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTÉ

EB5l/38

27 novembre 1972

CONSEIL EXECUTIF

Cinquante et unième session

Point 2.3 de 1fordre du jour provisoire

RAPPORTS DE GROUPES D'ETUDE

Le Directeur général a 1'honneur de communiquer au Conseil exécutif, conformément au paragraphe 4 du dispositif de la résolution EB17.R13,1 les rapports de groupes d'étude suivants :

a) La jeunesse et la drogue

Le groupe d'étude s'est réuni du 22 au 28 octobre 1971; son rapport est présenté dans le document DDA/72.2

Le groupe d'étude a examiné les facteurs personnels et les conditions de milieu qui semblent jouer un rôle particulièrement important dans 1 ^ s a g e à des fins non médicales de drogues engendrant la dépendance par certains groupes de population ou certaines classes d'âge. Dans la plupart des pays, le nombre des adultes éprouvant les effets adverses graves d'une dépendance à l'égard de 1'alcool ou d * autres drogues traditionnellement admises dépasse probablement de beaucoup celui des jeunes souffrant d feffets analogues dus à 1 utilisation de drogues réprouvées par la société. Il faut donc trouver des moyens de réduire dans tous les groupes df âge les effets adverses résultant, dans 1'immédiat et à longue échéance, de 1Tusage à des fins non médicales de toutes les drogues engendrant une dépendance.

Le groupe a examiné aussi les moyens actuellement employés pour atténuer les problèmes liés à 1'usage de la drogue. Il a noté que 1'information n'exerce pas nécessaire- ment un effet de dissuasion, que les sanctions ne suffisent pas à empêcher les personnes dépendantes de revenir à 1'usage de la drogue et que les moyens de prévention, de traitement et de réadaptation dont on dispose sont loin d fêtr© satisfaisants.

Rappelant que 1Tusage de la drogue implique une interaction entre 1'utilisateur, le milieu socio-culturel et la drogue (nature, quantité consommée et modalités d'utilisation), le groupe dfétude est parvenu à la conclusion que le vrai problème est de trouver les moyens de réduire le plus possible les effets destructeurs de l'usage des drogues à des fins non médicales, sans qu1 il en coûte trop à la société. Le groupe a formulé des recommandations concernant les services communautaires de traitement et de réadaptation, les recherches nécessaires sur 1^épidémiologie de l'usage des drogues, les conséquences de cet usage, et Inefficacité des diverses approches et méthodes préventives et thérapeutiques au regard des objectifs visés. Il a suggéré enfin certaines mesures propres à encourager la recherche et à améliorer la comparabilité des études épidémiologiques et autres.

3

е .

в

r . j L

I û ,

Recueil des résolutions et décisions, onzième édition, page 166.

Joint en annexe (uniquement pour les membres du Conseil exécutif).

(2)

EB51/37 page 2

b) Enseignement et Formation professionnelle préparant à la Planification familiale dans les Services de Santé

Le groupe d'étude s'est réuni du 6 au 10 décembre 1971,

Au cours des dernières années, 1*0MS a réuni plusieurs groupes d'experts pour faire le point des connaissances théoriques et pratiques concernant les aspects sanitaires de la planification familiale. La nécessité d'intégrer la planification familiale dans 1 'activité des services de santé des collectivités est maintenant largement admise mais, dans la pratique, l'un des principaux problèmes qui se posent est celui de l'enseignement et de la formation des personnels de santé appelés à exercer les fonctions très diverses que comporte 1'action de planification familiale.

Dans son rapport, le groupe d'étude^ aborde plusieurs aspects du problème, notamment la contribution qu'on peut attendre des établissements d'enseignement, les stratégies appli- cables à 1'exécution de programmes d•enseignement et de formation préparant à la planification familiale, 11 évaluation de ces programmes, la recherche et les études nécessaires.

Pour donner à tous les personnels de santé certaines notions de planification familiale, le groupe d'étude propose que la reproduction humaine, la planification familiale et la dynamique des populations fassent partie intégrante des programmes d'études de base.

Il souligne que la formation devrait axée sur la performance ou le travail attendu des inté- ressés ,celui-ci déterminant le contenu même du programme; il souligne également la nécessité d'organiser une formation pratique dans des zones de démonstration et d1 entraînement, ce qui non seulement permet aux élèves d'acquérir une expérience en situation réelle, mais peut également produire de nouvelles informations pour le développement des programmes.

En conclusion, le rapport indique que la préparation des enseignants de tous niveaux à l'enseignement de la planification familiale et de la dynamique des populations devrait figurer au premier rang des priorités, et que les théories et pratiques pédagogiques éprouvées devraient être appliquées à 1'enseignement et à la formation préparant à la planification familiale ; il recommande enfin que les universités jouent un plus grand rôle dans la promotion de programmes d*enseignement et de formation appropriés et dans la conduite de recherches et d'études en la matière.

1 Org, mond. Santé Sér, Rapp, techn., 1972, № 508

(3)

WORLD HEALTH ORGANIZATION

DDA/72.1

ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTÉ

ORIGINAL ANGLAIS

LA JEUNESSE ET LA DROGUE Rapport d'un groupe d1 étude de 11 OMS

Genève, 20-28 octobre 1971

Table des matières

Pages

1. Introduction 5

2. Utilisation des substances engendrant la dépendance 5

2.1 Terminologie 5 2.2 Généralités 7 2.3 Tableau épidémiologique 8

2.3.1 Les drogues traditionnelles et leur épidémiologie 8

2.3.2 Tendances nouvelles 10 2.3.3 Modalités d'utilisation 12

3. Circonstances d'utilisation 13 3.1 Causes profondes 13 3.2 Facteurs favorisants 15 3.3 Continuation de l'usage des drogues 18

4. Caractéristiques associées à l'âge 19 5. Attitudes et réactions sociales 20

5.1 Attitudes socio-culturelles 20 5.2 Attitudes de groupes particuliers 21

5.2.1 Personnel professionnel 21 5.2.2 Les adultes et les jeunes 22

5.3 Réactions de la société 23 5.3.1 Laisser faire 23 5.3.2 Tirer profit de 1’usage des drogues 24

5.3.3 Empêcher ou limiter l'usage des drogues 24

The issue of this document does not constitute formal publication. It should not be reviewed, abstracted or quoted without the agreement of the World Health Organization. Authors alone are responsible for views expressed in signed articles.

C e document ne constitue pas une publication.

Il ne doit faire l'objet d'aucun compte rendu ou résumé ni d'aucune citation sans l'autorisation de l'Organisation Mondiale de la Santé. Les opinions exprimées dans les articles signés n'engagent que leurs auteurs.

(4)

- 2 -

Pages 5.3.4 -Sanctionner 1'usage des drogues ou les actes associés à cet usage 25

5.3.5 Traiter l'usager ou les symptômes 26

5.3.6 Modifier 1'environnement 28

5.3.7 Etudier le problème 2 9

6. Conclusions et recommandations 29

6.1 Généralités 2 9

6.2 Services communautaires de traitement et de réadaptation 32

6 • 3 Recherche 3 3

6.3.1 Nature et étendue des problèmes 3 3

6.3.2 Etudes d'évaluation 3 3

6.3.3 Stratégie de la recherche 3 4

(5)

Membres

Dr W. Buikhuisen, Psychologue et Professeur de Criminologie, Université de Groningue, Pays-Bas Dr К. С. Dube, Superintendent, Mental Hospital, Agra, Inde (Président)

Dr H. Isbell, Professor of Medicine, University of Kentucky Medical Center, Lexington, Ky., Etats-Unis d'Amérique

Dr Leong Hon Koon, Medical Officer i/c, Outpatient Services, Maxwell Road, Singapour Dr M. R. Moharreri, P.O. Box 275, Chiraz, Iran

Dr A. N. Oppenheim, London School of Economics and Political Sciences, Londres, Angleterre Dr R. G. Smart, Associât© Research Director, Addiction Research Foundation, Toronto, Canada

(Rapporteur)

Dr R. С. Smith, Executive Director, Marin Open House, San Rafael, Calif., Etats-Unis d'Amérique Dr H. Solms, Médecin-consultant au Centre psycho-social universitaire, Genève, Suisse

(Vice-Président)

Représentants d'autres organisations Organisation des Nations Unies

Mlle M. Bailey, Spécialiste scientifique, Institut de Recherche des Nations Unies sur la Défense sociale, Rome, Italie

M. P. KÍ5nz, Directeur de 1'Institut de Recherche des Nations Unies sur la Défense sociale, Rome, Italie

M. P. Kuenstler, Fonctionnaire chargé du Développement social, Division des Affaires sociales, Organisation des Nations Unies, Genève, Suisse

M. V. Kusevic, Directeur de la Division des Stupéfiants, Organisation des Nations Unies, Genève, Suisse

Programme des Nations Unies pour le Développement

M. К. N. S. Sarma, Fonctionnaire chargé de la Coordination et des Relations extérieures, Programme des Nations Unies pour le Développement en Europe, Genève, Suisse

Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la Culture

M. E. Naraghi, Directeur de la Division de la Jeunesse, Département de l'Education extra- scolaire , P a r i s , France

Organe international de Contrôle des Stupéfiants

M. J. Dittert, Secrétaire de 11 Organe international de Contrôle des Stupéfiants, Genève, Suisse

M. L. Manueco-Jenkins, Fonctionnaire chargé des Affaires sociales, Organe international de Contrôle des Stupéfiants, Genève, Suisse

(6)

Conseil international sur les Problèmes de 1'Alcoolisme et des Toxicomanies

M. A. Tongue, Directeur général, Conseil international sur les Problèmes de l'Alcoolisme et des Toxicomanies, Lausanne, Suisse

Secrétariat

Dr D. С. Cameron, Chef du Service de la Pharmacodépendance, OMS, Genève, Suisse (Secrétaire) Dr T: L. Chrusciel, Service de la Pharmacodépendance, OMS, Genève, Suisse

(7)

- 5 -

1. INTRODUCTION

Un groupe d1étude de 1'OMS sur la jeunesse et la drogue s'est réuni à Genève du 22 au 28 octobre 1971• Le Dr T. A. Lambo, Sous-Directeur général, a ouvert la réunion au nom du Directeur général et a souhaité la bienvenue aux participants ainsi qufaux représentants de 1fOrganisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la Culture, de lfOrgane inter- national de Contrôle des Stupéfiants, et du Conseil international sur les Problèmes de

l'Alcoolisme et des Toxicomanies. Il a noté que, si 1futilisation de substances psycho-actives à des fins récréatives, médicales et autres remonte probablement à la préhistoire, 1'usage de produits engendrant la dépendance suscite à 11heure actuelle un vaste mouvement df inquiétude dans la mesure où il trouble "les relations interperonnelles du consommateur et ••• entraîne des conséquences sociales, physiques ou économiques fâcheuses,,•1 Les adultes se préoccupent particulièrement des jeunes, dans lesquels ils voient un prolongement dfeux-mêmes et les dépositaires de l'avenir de l'humanité, et s * inquiètent du comportement de certains dfentre eux; с’est ce qui explique sans doute 1 * intérêt porté à 1fusage des drogues chez les jeunes et les efforts entrepris sur le plan de la prophylaxie et de la thérapeutique. Cependant, quand on aborde la question en se référant à des groupes d'âges particuliers, il faut se garder de donner 11 impression, aux jeunes surtout, que leurs aînés se soucient peu des effets adverses de 1fusage abusif que font les adultes, dans de nombreuses cultures, de certaines substances engendrant la dépendance. Le groupe d1 étude était chargé d Examiner dans une perspec- tive très large 1'ampleur et la nature du problème chez les jeunes par comparaison avec les adultes, de déterminer les traits de personnalité et les facteurs de milieu qui paraissent plus particulièrement liés à l'usage de drogues par tel groupe de population ou tel groupe d'âges, d'examiner les attitudes et les positions de la société face aux différentes formes et aux nombreux aspects que revêt 11 usage des drogues et d'indiquer la voie à suivre pour mieux comprendre le phénomène, surtout chez les jeunes, et pour en diminuer la prévalence et 1f incidence.

2. UTILISATION DES SUBSTANCES ENGENDRANT IA DEIÏNDANCE 2.1 Terminologie

Aux fins du présent rapport, le groupe d'étude a adopté les définitions suivantes : Médicament (ou drogue). "Toute substance qui, introduite dans 12 1 organisme vivant, peut modifier une ou plusieurs de ses f o n c t i o n s ,

Pharmacodépendance• "Etat psychique et quelquefois également physique résultant de 1'interaction entre un organisme vivant et un médicament, se caractérisant par des modifications du comportement et par d'autres réactions, qui comprennent toujours une pulsion à prendre le

Org, mond. Santé Sér> Rapp. techn,, 1969, N° 407, p. 7 (section 1.2).

2

L'ensemble des substances énumérées plus loin, qui peuvent avoir ou non des usages médicaux, est désigné couramment en français par le mot "drogue", auquel on attache le plus souvent le sens de "substance engendrant une dépendance et pouvant avoir de sérieux effets psychotoxiques’,.(Vest pourquoi on emploiera ici le mot "drogue" dans ce sens, de préférence à "médicament’,.

3

Org, mond. Santé Sér. Rapp. techn,, 1969, № 407, p. 6 (section 1.1). Cette définition est volontairement plus large que celle qui s'applique aux substances "toujours administrées dans 11 intérêt du sujet". Voir Org. mond_ Santé Sér. Rapp. techn., 1966, № 341, p. 7

(section 2).

(8)

- 6 -

médicament de façon continue ou périodique afin de retrouver ses effets psychiques et quelque- fois d1 éviter le malaise de la privation. Cet état peut s'accompagner ou non de tolérance. Un même individu peut être dépendant de plusieurs médicaments".1 »^

Le risque dfapparition d'une dépendance chez un individu résulte de 11 action

conjuguée de trois facteurs : caractéristiques personnelles et antécédents du sujet ; nature de son milieu socio-culturel général et immédiat; propriétés pharmacodynamiques de la substance en cause, compte tenu de la quantité consommée, de la fréquence d'utilisation et des diffé- rentes voies dfadministration (par exemple digestive, respiratoire, sous-cutanée ou intra- veineuse) 9

Substance engendrant une dépendance. On appelle ainsi toute substance pouvant produire dans un organisme vivant un état de dépendance psychique ou physique, ou les deux.

Cette substance peut être utilisée à des f ins médicales ou non médicales sans produire nécessairement de dépendance; les caractéristiques de celle-ci, une fois qu'elle sera installée, seront fonction du type de substance employé, Certaines, comme celles que

contiennent le thé ou le café, peuvent engendrer une dépendance dans 1'acception très large du terme. Un tel état nfest pas forcément nocif en soi. Il existe cependant plusieurs types de substances qui, par la propriété qu'elles ont de stimuler ou de déprimer le système nerveux central ou de troubler la perception, 11 humeur, la pensée, le comportement ou la fonction motrice, sont généralement considérées comme capables, dans certaines conditions d'emploi de donner lieu à des problèmes pour l'individu, la santé publique et la société. С1 est le cas des substances énumérées ci-après. Dans ce rapport, 11 expression "drogue(s) engendrant une dépendance', désignera une ou plusieurs drogues des types suivants^ :

1) type alcool-barbituriques - par exemple éthanol, barbituriques et certains médi- caments ayant des effets sédatifs comme 1,hydrate de chloral, le chlordiazépoxyde, le diazepam, le méprobamate et le méthaqualone;

2) type amphétaminique - par exemple amphétamine, dexamphétamine, méthamphétamine, méthylphénidate et phenmétrazine;

3) type cannabis - préparations de Cannabis sativa L. comme la marijuana (bhang, dagga, kif, maconha), le ganja et le haschisch (charas);

4) type cocaînique - cocaïne et feuilles de coca;

5) type hallucinogène - par exemple lysergide (LSD), mescaline et psilocybine;

6) type khat - préparations de Сatha edulis Forssk

7) type opiacé 一 par exemple morphine, héroïne et codéine et produits de synthèse à effets morphiniques comme la methadone et la pethidine ;

8) type solvant volatil 一 par exemple toluène, acétone et tétrachlorure de carbone.

1 Org, mond. Santé Sér, Rapp. techn., 1969, № 407, p. 6 (section 1.1).

2 ^ , r

La dépendance psychique a été décrite comme un état dans lequel un médicament produit

"un sentiment de satisfaction et une pulsion psychique exigeant 1 *administration périodique ou continue du médicament pour provoquer le plaisir ou pour éviter le malaise"• La dépendance physique est "un état d1 adaptation qui se manifeste par des troubles physiques intenses quand l'administration d'un médicament est suspendue ••• Ces troubles, сfest-à-dire les syndromes de sevrage ou d Tabstinence, se composent de groupes de symptômes et de signes de nature psychique et physique qui sont caractéristiques de chaque type de médicament". La tolérance est "un état df adaptation caractérisé par des réactions diminuées à la même quantité d‘un médicament1*.

Eddy, N. В., Halbach, H., Isbell, H. & Seevers, M. H. (1965) Bull. Org, mond. Santé, 32, 723.

3

Pour un exposé plus complet de la question voir, par exemple, Eddy, N. В., Halbach, H., Isbell, H. & Seevers, M. H. (1965) Bull, Org, mond. Santé, 32, 721-733.

(9)

Utilisation de drogues à des fins non médicales# On désigne ainsi 1futilisation sans indication médicale de drogues engendrant une dépendance des types indiqués ci-dessus.

Le tabac doit être mentionné ici. Il est ciair en effet qufil engendre une dépendance, qu'il peut causer un préjudice physique à l'utilisateur et qufl! est d1 un usage assez répandu pour constituer un problème de santé publique. Cependant, à la différence des drogues dont il vient d fêtre question, il ne produit qu1 une stimulation ou une dépression relativement faibles du système nerveux central et altère assez peu la perception, l'humeur, la pensée, le compor- tement ou la fonction motrice. Son action psychotoxique, même à forte dose, est mineure comparée à celle des drogues énumérées plus haut# С'est pourquoi la dépendance à l'égard du tabac

- b i e n que ce soit peut-être la forme de pharmacodépendance la plus répandue 一 nfest pas examinée dans le présent rapport, qui traite exclusivement de 1'utilisation de drogues engendrant une dépendance et pouvant avoir de sérieux effets psychotoxiques.

2.2 Généralités

Depuis longtemps, 11 homme cherche à accroître son plaisir et à soulager ses malaises.

Autrefois, les drogues engendrant une dépendance qufon utilisait pour améliorer sa santé ou à des fins voluptuaires restaient df ordinaire cantonnées dans des régions très limitées. Le choix entre les substances psychoactives quron pouvait se procurer était réduit et 11 une dfelles s'imposait le plus souvent, ici l'alcool, là 11 opium, et le cannabis ailleurs. La position de la société à 11 égard de 1'usage des drogues variait suivant la région, 1 *époque, les circonstances, la nature de la drogue et la dose consommée. Cela reste toujours vrai. Ce qui par contre a changé c'est qu'autrefois 11 usage des drogues engendrant une dépendance était essentiellement réservé aux personnes ayant atteint 1'âge de responsabilité fixé par la

tradition locale, et qu'il était beaucoup plus répandu parmi les hommes que parmi les femmes.

Les personnes qui faisaient usage de drogues engendrant la dépendance à des fins récréatives ou autres ne devenaient pas toutes dépendantes.1 La proportion de celles qui le devenaient n'est pas connue exactement, mais il est probable qufelle nfétait pas seulement fonction de la nature de la drogue et des quantités moyennes absorbées; d'autres facteurs intervenaient sans doute, tels que la plus ou moins grande permissivité de la société à 1 *égard de la drogue, les règles fixant 11 usage de celle-ci, les attitudes au sujet de 1f intoxication spéciale et des autres effets provoqués par la drogue, la fréquence et la régularité de 1fusage, les caractéristiques et les antécédents des usagers. Dfune manière générale on estime que, quand 11 usage d'une drogue est largement accepté par la société (comme c'est le cas de 11 alcool dans de nombreuses régions du monde), les usagers ont tendance à être nombreux, ils présentent des caractéristiques individuelles, très différentes et la proportion de ceux qui deviennent dépendants est relativement faible; mais le nombre absolu des personnes dépendantes peut être très élevé (voir section 2#3#1). Inversement, dans les pays où 11 usage de drogues à des fins non médicales est largement réprouvée par la société (par exemple 1'héroïne en Amérique du Nord et en Europe), les usagers tendent à être moins nombreux que dans les pays

plus tolérants et présentent souvent, avant et après avoir commencé de s'adonner à la drogue, des caractéristiques s'écartant de la normale, indépendamment de celles qui sont liées à l'usage de la drogue.^ Dans ces conditions, la proportion d'utilisateurs devenant dépendants peut être très faible par rapport à la population totale.

1 On sait que la plupart des consommateurs de boissons alcoolisées et de préparations de cannabis ne deviennent pas dépendants. Peut-être sait-on moins que 11 usage non médical de l'opium et de certaines substances ayant des effets analogues n'entraîne pas nécessairement 1'apparition de la dépendance si la consommation est faible et de brève durée. Incontesta- blement le risque de dépendance est beaucoup plus grand pour les drogues du type opiacé que pour 1'éthanol et les préparations de cannabis. La voie d'administration joue aussi un rôle très important à cet égard, 11 administration par voie intraveineuse comportant les plus grands risques de dépendance et de complications parfois mortelles.

о Hill, H. E., Haertzen, C. A. & Glaser, R. (1960) J. Gen. Psychol., 62, 127-139.

(10)

一 8 —

2.3 Tableau épidémiologique

En 1fabsence de renseignements fiables sur la prévalence et 11 incidence de l'usage à des fins non médicales de drogues engendrant la dépendance et sur les facteurs personnels et socio—culturels associés à cet usage, il est impossible de faire un exposé détaillé de la situation. On se contentera donc ici d1 une description générale des aspects prédominants que présente la pharmacodépendance dans certaines régions, en l'illustrant par des données

provenant de quelques pays.

2,3,1 Les drogues traditionnelles et leur épidémiologie

Bien qu'on ne puisse sous-estimer 1f importance des tendances complexes et fluctuantes récemment apparues dans ce domaine - et l'on pense surtout ici à 1'utilisation de drogues

engendrant la dépendance par des pré-adolescents, des adolescents et de jeunes adultes - il faut commencer par examiner les aspects plus traditionnels du phénomène, parce quf ils touchent la majorité des personnes dépendantes dont la plupart devraient être considérées, tout au moins de par leur âge, comme des adultes ayant accédé à la maturité.

Alcool• La consommation "modérée" de boissons alcoolisées par les "adultes" est considérée comme normale et acceptable dans la plupart des pays. Son usage "immodéré", surtout quand il aboutit à une dépendance du type éthylique, nfest admis ou normal dans aucune région du monde.

Des études récentes montrent quf il existe une relation étroite entre la consommation par habitant, le taux de mortalité par cirrhose du foie et la "consommation excessive" i о

(consommation journalière moyenne supérieure à 150 ml d!а1соо1 pur). , Ce niveau de consommation est celui qufon observe chez des alcooliques en traitement et il s‘accompagne d'un risque

considérable de cirrhose du foie. En Amérique du Nord et en Angleterre, on estime que la consommation atteint ce niveau chez environ 2 % de la population âgée de 15 ans et plus. Pour d'autres pays, les estimations sont les suivantes : France 9,4 %; Italie 5,9 %; Portugal 5,6 %;

Suisse 3,9 %; Tchécoslovaquie 2,6 %; Pologne 1,7 %; Pays-Bas 1,4 %; Norvège 0,9 %.3 Les quantités consommées par les individus dans une population donnée présentent une distribution unimodale ; les consommât ions faibles correspondent à la grande majorité des individus, et les fréquences deviennent de plus en plus petites quand on se rapproche des fortes consommations.^

Dans ces conditions, il pourrait être utile d'entreprendre une étude pilote visant à réduire la consommation dfalcool par habitant, puis de voir si cette réduction s'accompagne d Tune

diminution de la poroportion de buveurs consommant en moyenne plus de 150 ml d'alcool par jour, et du nombre d1 accidents de la circulation et autres qui sont en rapport avec la consommation d'alcool.

1 De Lint, J# & Schmidt, W. (1971) Brit, J, Addict,, 1971, 66, 97-107.

2 *

Dans un groupe donné, la proportion des personnes dont la consommation dépasse un

niveau donné doit être rapportée non seulement à la consommation moyenne individuelle du groupe, mais aussi aux écarts sensibles, en plus et en moins, que présente la consommation de certains individus par rapport à la moyenne. Il en résulte que la consommation moyenne d1 alcool peut être la même dans un groupe dont tous les membres boivent à peu près la même quantité (faible variabilité) et dans un groupe où certaines personnes boivent régulièrement beaucoup, les autres buvant relativement peu (grande variabilité)# Il est évident que, pour des raisons biologiques, la quantité d1 alcool qu1 une personne peut consommer ne peut dépasser certaines limites. 3

De Lint, J. & Schmidt, W. (1971) Brit, J* Addict,, 66, 97-107.

4 — — —

Ledermann, S. (1956) Alcool, alcoolisme, alcoolisation, Paris, Institut national

d'Etudes démographiques (Travaux et Documents, Cahier № 29); de Lint, J. & Schmidt, W. (1968) Quart. J# Stud, Alcohol, 29, 968-973; de Lint, J. & Schmidt, W. (1971) Brit. J. Addict,,

6 6 , 9 7 - 1 0 7 . 一 ― — —

(11)

C a n n a b i s L1u s a g e de préparations à base de cannabis est depuis longtemps répandu dans certaines régions très peuplées où la consommation dfalcool est faible, par exemple le sous-continent indo-pakistanais et certaines régions d'Afrique du Nord. On ne possède pas de renseignements précis sur 11 étendue du phénomène, non plus que sur le pourcentage dTusagers devenus dépendants*. En Inde, une forte proportion de la population adulte utilise

occasionnellement des préparations de cannabis, à l'occasion de festivités par exemple. Dans ces cas, le produit est presque toujours ingéré, sous forme de boisson, ou dans des confiseries.

Dans dfautres régions du monde, il est surtout fumé, sous forme de cigarettes ou dans des pipes ou des narguilés. Le cannabis est également fumé en Inde et au Pakistan, mais cette pratique est surtout répandue dans les classes socio-économiques défavorisées• Dans- cette région et ailleurs, le tabac entre souvent dans la composition du mélange à fumer. I/usage du cannabis tend à se répandre dans des pays traditionnellement orientés vers l'usage de 1'opium (Asie du Sud-Est et certains pays de la Méditerranée orientale) ou de 1'alcool (Amériques et Europe) (voir section 2.3.2)#

Coca. Zapata-Ortiz^ a estimé que, dans certaines régions des Andes où la masti- cation de la feuille de coca se pratique depuis des siècles, environ 6 millions de personnes s'y adonnaient, soit près de la moitié de la population totale* Selon Goddard et al.^ "on juge tout à fait 'naturel1 qufun jeune homme qui commence à travailler commence également à mâcher de la coca. Toutefoisf on nTexige pas, et même on n1 attend pas particulièrement de lui qu1 il contracte cette habitude pour le considérer comme membre à part entière du groupe dans lequel il vient d'être admis". Il y a donc loin de là à 1'utilisation à des fins non médicales de la cocaïne extraite du cocaïer,^ qui provoque une stimulation importante du système nerveux central et qui est souvent associée à 11 usage de drogues du type opiacé.

Opiacés. L'usage de 11 opium et de ses dérivés à des fins non médicales est extrê- mement répandu dans certains pays du Moyen-Orient et en Asie du Sud-Est. En Iran par exemple, on estime quf il y a quelque 85 000 opiomanes enregistrés sur une population comptant environ 30 millions d'habitants. Il faut y ajouter les opiomanes non enregistrés pour lesquels on ne possède que des estimations très grossières variant entre 150 000 et 500 000. L'héroïne a commencé à faire son apparition dans le pays après qufon y eut interdit en 1955 la culture du pavot et l'utilisation des opiacés à des fins non médicales. Jusqu'alors, la plupart des opio- manes étaient des hommes df un âge moyen ou assez avancé. Pendant la durée de l'interdiction, un grand nombre d'entre eux ont abandonne lfopium, certains ont continué à s'en procurer, d1 autres sont passés à l'héroïne; il s'est ainsi constitué un nouveau groupe, plus restreint d'héroïnomanes composé d'hommes relativement jeunes. Le pavot a été remis en culture en 1969 et, depuis lors, de 11 opium a été fourni à certaines personnes dépendantes. Lfutilisation de 1'héroïne, qui reste soumise à un contrôle rigoureux, serait en régression en Iran.

L'usage de 1'opium est très répandu dans les régions de collines qui se trouvent aux confins de la Birmanie, du Laos et de la Thaïlande. L'opium, et dans une moindre mesure la morphine, sont généralement les opiacés de prédilection des hommes d fun certain âge à Singapour et en Malaisie. Dans les plaines de Thaïlande et à Hong Kong, les préférences vont à 1'héroïne. Selon des estimations très approximatives, les héroïnomanes se compteraient par centaines de mille dans cette région, et dans certains pays les taux seraient de 1fordre de 300 à 2250 pour 100 000 habitants• Les héroïnomanes semblent surtout se recruter parmi

les hommes dfun certain âge.

Aux Etats-Unis, il y a seulement quelque 35 ans, la morphine était, des différents opiacés, le plus utilisé. Les morphinomanes hospitalisés étaient en eajorité des hommes de

race blanche, dfâge moyen, venant généralement des quartiers pauvres des grandes agglomérations.5

De nos jours, 1,utilisateur type est beaucoup plus jeune; il appartient d'ordinaire à la popu- lation noire ou portoricaine; il s'administre de préférence de 1,héroïne par voie intraveineuse, mais y adjoint un certain nombre d,autres drogues.6

1 Org, mond. Santé Sér, Rapp. techn., 1971, N° 478.

2 Zapata-Ortiz, V# (1970) Int. J. Addict., 5, 287.

3 Goddard, D., Goddard, S. & Whitehead, P. С. (1969) Int. J. Addict., 4, 579.

4 Eddy, N., Halbach, H#, Isbell, H. & Seevers, M# (1965) Bull. Org, mond. Santé, 32. 727.

5 Pescor, M. J. (1968) Publ, Hlth Rep, (Wash.), Suppl” № 143.

6 Robins, L. N. & Murphy, G. E. (1967) Amer. J. Publ. Hlth, 57(0), 1580-1596.

(12)

- 1 0 -

Au Royaume-Uni, jusqu'au début des années soixante, on comptait de 300 à 400 opio- manes ;i l s'agissait d'adultes de race blanche qui étaient devenus dépendants à occasion d'un traitement médical et qui utilisaient des opiacés sur ordonnance médicale.1 La situation nTa guère changé, mais de toutes façons ne saurait se comparer à celle des pays dont il vient d fêtre question. La section 2.3.2 contient des indications générales sur l'évolution enregistrée au cours de la dernière décennie#

2.3.2 Tendances nouvelles

Au cours des 25 à 30 dernières années et plus particulièrement depuis 10 ans, 1fusage des drogues a évolué dans de nombreux pays, y suscitant de nouveaux problèmes qui, la plupart

о о t

du temps, sont venus s'ajouter , aux situations préexistantes notées à la section 2,3.1. Des drogues traditionnellement utilisées dans certaines régions du monde commencent à se répandre ailleurs• C'est le cas par exemple du cannabis qui s*est introduit dans les Amériques et en Europe. En 1970, 18 % des lycéens dfu n | ville du Canada avaient pris du cannabis au moins une fois au cours des six mois précédents. Cette proportion atteignait 26 à 35 % chez les étudiants de certaines universités et, dans la population générale, parmi les jeunes adultes de 18 à 25 a n s A u x Etats-Unis d'Amérique, ces chiffres vont de 20 à 40 % pour les élèves de l'ensei- gnement secondaire et de 30 à 50 % pour les étudiants de certains établissements d*enseignement s u p é r i e u r D a n s quelques pays d*Europe, de 11 à 23 % d'un échantillon représentatif dfélèves du secondaire avaient utilisé du cannabis.7 Au Royaume-Uni, le nombre (^inculpations pour usage du cannabis a brutalement augmenté en 1966.® En Inde, environ 5 % de tous les étudiants dfune université prendraient régulièrement du cannabis; 50 % des étudiants et 8 % des étudiantes 1'auraient essayé au moins une fois.^ Dans ce pays, une certaine consommation régulière de cannabis est essentiellement traditionnelle dans certains groupes, mais, dans une université, le phénomène est nouveau. Il ressort des études sur 1févolution dans le temps que le nombre de personnes ayant pris du cannabis a à peu près doublé pendant les deux dernières années dans certains pays d'Europe et ci ^Amérique du Nord.

Au cours des vingt dernières années, 1*usage des opiacés s*est lui aussi répandu dans des régions où il était jusquealors ignoré et où il revêt souvent des formes nouvelles (par exemple héroïne au R o y a u m e — U n i e n Thaïlande, en Iran et plus récemment en France; opium aux Pays-Bas,11 en Suède et dans d*autres pays)• Parallèlement, la consommation d'alcool - peut- être la substance inebriante la plus ancienne qu'on connaisse - se répand dans des régions où régnait seul 1*usage du cannabis ou des opiacés (par exemple en Inde-Pakistan, et dans certains

• 12

pays d'Afrique du Nord et de la Méditerranée orientale).

S pear, H. B. (1969) Brit. J. Addict” 64, 245-255 2

Manheimer, D. I ” Mellinger, G 1544-1545.

3

D., Laforest, L. & Baiter, M. В, (1969) Science, 166,

179.

(1972) Int. J» Addict. (sous presse), J. (1971) Addictions, 18, 7.

Addiction Research Foundation Substudy 6-7 and 70-71, Whitehead, P. C. & Smart, R. G.

4 Smart, R. G ” Fejer, D. & White,

5 Smart, R. G. & Fejer, D. (1971) Toronto.

g

Berg, D. F. (1970) Illicit use of dangerous drugs in the United States, a compilation of studies, surveys and polls (pamphlet), Washington, D.C., Drug Sciences Division, Office of Science and Drug Abuse Prevention, Bureau of Narcotics and Dangerous Drugs, US Department of Justice.

7

Buikhuisen, W. & Timmerman, H. (1971) Ned, Tijdschr. Crim., Dec., 198; Jongman, R. W. &

Buikhuisen, W. (1970) Ned, Tijdschr. C r i m ” Mar., 7, 1-11; Junger-Tas, J. (1972) Schooljeugd en drugs, Bruxelles; Schmitt, L., Stttckel, F. & Kaiser, L. (1972) Dtsch Aerztebi, 7, 354-358.

8 Spear, H. B. (1969) Brit. J. Addict., 64, 247.

9 — Dube, К. С. (1972) Bull. Narcot•, 24, (1), 49-53, et observations non publiées.

10 一

Spear, H. В. (1969) Brit. J. Addict., 64, 245-255.

11

Cohen, H. (1969) Psychologie, sociale psychologie en sociologie van het deviante drug- gebuik, Amsterdam, Instituut voor Sociale Geneeskunde, p. 58.

1 2 Org, mond. Santé Sér, Rapp, techn., 1971, № 478, p. 12 (section 2.3).

(13)

- 1 1 -

On note également que l'utilisation de tous les types de drogues engendrant la dépen- dance s fest répandue parmi les pré-adolescents et les adolescents appartenant aux classes moyennes et supérieures, au lieu d'être cantonnée aux jeunes venant de groupes minoritaires ou de couches socio-écpnomiques défavorisées comme сfétait le cas jusqueà présentФ1'2 C'est ce qui explique dans une large mesure 1'inquiétude des adultes, surtout dans les classes touchées.

Leurs enfants et ceux de leurs proches sont ou peuvent être en cause ! Or on sait qu'un jeune s•adonnant à la drogue, quelle que soit la classe socio-économique à laquelle il appartient, tend à être absorbé par la sous-culture où circule la drogue.

A cela s'ajoute que beaucoup d'adolescents et de jeunes adultes paraissent peu se soucier du maintien du statu quo s o c i a l O n rencontre parmi eux des étudiants, mais aussi des jeunes ayant peu d,attaches sociales et souvent très mobiles. La plupart ont essayé des drogues et une proportion bien plus faible en fait un usage régulier. Beaucoup affichent des vêtements et des coiffures non conformistes et débraillés du genre "hippie’,• Cette mode vestimentaire a été adoptée par un certain nombre de jeunes qui tiennent et qui ont d'ailleurs intérêt à main- tenir et à améliorer le système social actuel. Malgré certaines ressemblances extérieures, les jeunes sont donc loin dfavoir des idées et des comportements identiques, et tous ne prennent pas de drogue. D'assez nombreux adultes ont pourtant le tort d'englober tous ces jeunes dans la même réprobation et de considérer uniquement ou principalement le problème sous 1*angle de la drogue. D'autres adultes - y compris des cadres - ont une conception également unilatérale de la question et voient dans 1eusage actuellement fait des drogues engendrant une dépendance un symptôme dfaliénation et d'anticonformisme•

La polytoxicomanie est une autre caractéristique de notre époque. Certes, 1•utilisa- tion de plusieurs drogues et surtout le passage d'une drogue à une autre quand la drogue de pré- dilection est impossible à trouver ne sont pas chose nouvelle; il en va de même pour 1'usage simultané de plusieurs drogues : barbituriques et alcool pour renforcer 1'effet ou pour masquer 1'odeur de 1féthanol; cocaïne et héroïne ou autres opiacés pour compléter ou modérer Inaction de l'un ou l'autre produit• Ce qui est nouveau, с*est le nombre des drogues engendrant une dépendance (voir section 2.1), qui sont consommées successivement ou simultanément par beaucoup

4 5 s б

de personnes en faisant un usage régulier• ' En Suède par exemple, les opiacés dominaient le tableau jusqufen 1955, mais leur usage n'était pas très répandu. Au début des années cinquante, les stimulants du système nerveux central ont commencé d*être à la mode; leur administration par voie buccale et surtout par voie intraveineuse a posé un très grave problème dans le pays•

Au début des années soixante, la marijuana et le haschisch sont apparus en quantités crois- santes ;l e s hallucinogènes et les solvants volatils sont venus s'y ajouter dans la seconde moitié de la décennie. Plus récemment, la morphine-base est entrée en scène. Les hypnotiques et les sédatifs sont généralement pris par voie buccale, les stimulants du système nerveux

Berg, D. F. (1970) The Non-Medical use of dangerous drugs in the United States, a comprehensive View, Int. J. Addict., 777-8340.

2

Weidmann, M., Ladewig, D., Faust, V., Gastpaar, M., Heise, H., Hobi, V ” Mayer-Boss, S.

& Wyss, P. (sous presse). 3

Suchman, Б. A. (1968) J. Hlth. Soc. Behav., 9, 146-155.

4 Robins, L. N. & Murphy, G. E. (1967) Amer. J. Pub. H l t h ” 57(a), 1580-1596.

5 Cohen, H. (1969) Psychologie, sociale psychologie en sociologie van het deviante drug- gebruik, Amsterdam, Instituut voor Sociale Geneeskunde, p. 32. g

Goldberg, L. (1968) Bull. Narcot,, 20 (1), 1-31; 20 (2), 9-36.

(14)

- 1 2 -

central par voie buccale ou intraveineuse• En 1968, Goldberg estimait que de 25 % à 50 % des personnes s*adonnant à la drogue faisaient des combinaisons de toutes sortes. On s'est penché sur le problème en Suède, non que la situation y soit unique, mais parce que la Suède est un des rares pays où le phénomène ait fait 1fobjet d'investigations assez complètes dès le début de son apparition. Les tendances qui viennent d'être relevées, associées à 1fexistence d*une large gamme de drogues psychotropes et à la présence de moyens de communication et de transport rapides et étendus, expliquent la complexité de la situation et son évolution rapide.

2.3.3 Modalités d'utilisation

Expériences passagères• Beaucoup de jeunes et quelques personnes moins jeunes essaient une ou plusieurs drogues engendrant la dépendance une seule fois ou un certain nombre de fois, puis s ' a r r ê t e n t C e comportement, surtout motivé par la curiosité et par les pres- sions des pairs, est peut-être celui qui est le plus répandu à 1'égard de certaines drogues engendrant la dépendance. Les préparations de cannabis sont le plus souvent utilisées à titre d'expérience dans les Amériques et en Europe, comme dans les pays où leur consommation est plus

о

traditionnelle,° encore que le nombre de personnes qui continuent après les premiers essais tende à augmenter. Il en va de même pour les solvants organiques volatils, utilisés par un ^ groupe beaucoup plus restreint essentiellement composé d'adolescents et de pré-adolescents.

Pratiquement tous les types de drogues engendrant la dépendance, y compris 1fopium et 1fhéroîne, ont été brièvement essayés à titre purement expérimental par certaines personnes•

Utilisation occasionnelle. Il s*agit dans ce cas dfune utilisation intermittente, sans apparition de dépendance psychique ou physique, se caractérisant davantage par le but recherché et par les modalités de 1•utilisation que par sa fréquence, celle-ci représentant toutefois un élément d'appréciation important. La nature des drogues et la voie d'administra- tion (ingestion, inhalation, voie sous-cutanée ou intraveineuse) jouent ici un rôle majeur. Ce mode d,utilisation est celui qui prévaut pour les boissons alcoolisées dans la grande majorité des cas• On peut en dire autant du cannabis, surtout dans les régions où son usage est toléré ou accepté par la société, et même de 1•opium dans certaines régions du monde où la dose consommée, le mode et la fréquence d'utilisation sont fixés par les conventions culturelles locales et par les moeurs. Il convient toutefois d'ajouter que pour 1fopium et surtout les opiacés ce schéma n'est pas celui qui prédomine.

Utilisation par des personnes pharmacodépendantes. Les phénomènes biologiques, y compris les phénomènes comportementaux, ont tendance à présenter un éventail continu de fré- quences . C e l a est vrai de la dépendance à l'égard dfune ou de plusieurs drogues. A une extré- mité il n*existe pas de dépendance psychique ou physique (voir section 2.1) tandis qufà l'autre une des deux formes de dépendance, voire les deux, sont indéniables• Entre ces deux extrêmes, le comportement du sujet ne présente aucune caractéristique assez nette pour qufon puisse se prononcer. Pour juger de la présence ou de l'absence d'une dépendance psychique chez un sujet, il faut savoir 1) s'il emploie une grande partie de son temps et de son énergie à penser à la drogue, à sfen procurer, et à en essayer les effets; et 2) s'il réagit en face des diverses circonstances de sa vie et de ses humeurs personnelles en recourant à la drogue au lieu de faire agir les autres mécanismes qui sont à sa disposition.^

Goldberg, L. (1968) Bull. Narcot., 20, 35-36.

2 Buikhuisen, W. & Timmerman, H. (1971) Ned. Tijdschr, Crim., Dec., 199,

3 — Buikhuisen, W., Dijksterhuis, F. P. H., Hemmel, J. J., Jongman, R. W., Smale, G. J. A.

& Timmerman, H. (1971) Sociología Neerlandica, 75,

4Press, E. & Done, A. К. (1967) J. Pediatrics, 39, 451-461.

5 — Cameron, D. С. (1971) Chronique OMS, 25, page 9.

(15)

- 1 3 -

Chez les personnes pharmacodépendantes, l*usage de la drogue peut revtir différentes formes étroitement imbriquées. Citons d*abord la consommation régulière deune drogue déterminée plusieurs fois par jour pendant une longue période. Ce schéma est plus particulièrement associé aux drogues des types opiacé, barbiturique et alcoolique qui peuvent engendrer une dépendance physique notable. On peut également le rencontrer che)z des sujets dépendants de préparations de cannabis ou de doses relativement modérées d'amphétamines prises par voie buccale•

Vient ensuite 1eusage épisodique, lié à la "bringue", les épisodes pouvant durer de quelques heures à plusieurs jours, voire à une semaine ou deux. Ce schéma s'observe pour tous les types de drogues engendrant une dépendance, mais surtout pour ceux qui produisent peu ou pas de dépendance physique (types amphétaminique, cocaînique et hallucinogène) et pour les sti- mulants du système nerveux central administrés par voie intraveineuse• La consommation épiso—

dique d*alcool est bien connue. Il est à préciser que 1^utilisation épisodique d'une ou de plusieurs drogues peut se surajouter à 1'utilisation régulière dfune autre drogue, ou de la même drogue.

Dans la plupart des régions du monde, la pharmacodépendance est nettement plus répandue parmi les hommes que parmi les femmes, à 1'exception toutefois de 1'ingestion de drogues du type barbiturique seules ou associées à 1'alcool, qui prédomine chez les femmes, surtout dans les

pays "occidentaux"1 mais la différence tend à s'estomper dans de nombreux pays, les femmes ^ étant de plus en plus nombreuses à faire des essais ou à utiliser des drogues occasionnellement.

3. CIRCONSTANCES DeUTILISATION 3.1 Causes profondes

De nombreux facteurs contribuent à ce que 1'individu commence, continue et cesse de prendre des drogues engendrant une dépendance. Il nfa pas été possible de mettre en évidence une "cause" unique; par contre, les motifs et les hypothèses indiqués ci-après sont parmi ceux qui ont été le plus fréquemment avancés pour "expliquer" pourquoi on commence ou 1fon continue de prendre des drogues.

Les personnes qui prennent des drogues engendrant la dépendance y sont apparemment poussées par toutes sortes de raisons dont elles ont ou non conscience, et qui peuvent dfailleurs changer avec le temps• Cela dit, une ou plusieurs des motivations suivantes sont souvent asso- ciées aux premières expériences et à leur répétition : 1) satisfaire une curiosité concernant les effets de la drogue; 2) accéder à un sentiment d•appartenance, se faire "accepter" par les autres; 3) faire acte d•indépendance et parfois d,hostilité; 4) faire des expériences agréables, nouvelles, excitantes ou dangereuses; 5) accéder à un degré supérieur de "compréhension,, ou de créativité"; 6) éprouver un sentiment de bien-être ou de détente; et 7) échapper à quelque chose•

Il faut noter que ces motivations ne sont pas nécessairement associées à la psycho- pathologie individuelle, non plus q ufà des influences nocives de la société. Elles existent chez des personnes normales, aussi bien que chez des personnes anormales, qu'elles soient ou non satisfaites de la structure sociale et de leur situation. De plus, elles ne débouchent pas néces- sairement sur la toxicomanie et, en fait, conduisent la plupart des gens à obtenir des satisfac- tions par des activités autres que la drogue.

Devenyi, P. & Wilson, M. (1971) Canad. Med. Ass. J., 104, 215-218; Smart, R. G., Laforest, L. & Whitehead, P. С. (1971) Brit. J. Addict., 295.

2

Buikhuisen, W. & Timmerman, H. (1971) Ned, Tijdschr. Crim., Dec., 201; Smart, R. G., Fejer, D. & White, J. (1971) Addictions, 18 (1), 9 . ~

(16)

- 1 4 -

La curiosité est une des principales caractéristiques de 1•homme; elle apparaît chez le tout jeune enfant qu*elle pousse à explorer le monde• Aussi nfest-il pas surprenant que beaucoup de jeunes désirent essayer certaines drogues, afin d'en connaître directement les effets. Comme cet essai (surtout en ce qui concerne l'alcool et le cannabis) se fait généra- lement en compagnie de camarades, le novice peut découvrir qufen s*efforçant de satisfaire sa curiosité, il a également accédé à un sentiment dtf'appartenance11 au groupe ou d*indépendance.

En fait, le premier essai et ceux qui le suivent s'expliquent peut-être davantage par le besoin d'être accepté en tant que personne ou de se sentir autonome que par la curiosité.1 On comprend dès lors que ces puissants facteurs,^ renforcés par les effets pharmacologiques des drogues rendent celles-ci attrayantes pour certaines personnes qui les ont essayées. Par leurs propriétés pharmacodynamiques, différents types de drogues engendrant une dépendance agissent sur la

douleur, 1'anxiété, la peur, les inhibitions et une passivité excessive, procurent un sentiment de bien-être, de détente, et df émou s semen t de la conscience, diminuent la sensation de fatigue et exacerbent, parfois intensément, la sensibilité aux stimuli sensoriels ou autres, externes et internes, donnent une impression de compréhension, d'intuition ou de créativité accrues et produisent des états de rêverie ou d'euphorie.

La connaissance de 1 *interaction pharmacologique entre la drogue et 1^utilisateur et de 1finteraction entre 1,utilisateur et 1*environnement est indispensable pour comprendre la pharmacodépendance• L'existence de facteurs pharmacologiques, humains et écologiques amène à retenir, parmi les nombreuses hypothèses proposées pour rendre compte de la pharmacodépendance, les explications suivantes :

M1 . La pharmacodépendance serait une manifestation d*un trouble caractériel sous-jacent, qui pousse à la recherche de satisfactions immédiates, dussent-elles entraîner à long terme des effets adverses, et au prix, dans 1,immédiat, dfune démission devant les responsabilités de 1eâ g e adulte•

2• Il s'agirait d'une forme de délinquance ou de déviation du comportement dans laquelle le sujet recherche son plaisir dans la violation des conventions sociales : le problème serait alors essentiellement deordre moral.

3 • La pharmacodépendance procéderait dfune tentative dTauto-traitement chez des sujets : a ) souffrant de détresse psychique, soit du type habituel, qufon observe notamment au cours de 1^adolescence, ou en réaction à des difficultés sociales ou économiques, à une frustration ou à 1 *échec d'une ambition, soit du type plus durable provoqué par une maladie dépressive, 1fanxiété chronique ou deautres troubles psychiques;

b) souffrant de détresse physique - sous-alimentation, fatigue chronique ou maladie;

c) croyant à la vertu spéciale de la drogue de prévenir la maladie ou d'augmenter la puissance sexuelle.

4. La pharmacodépendance fournirait, notamment à 1'inadapté social, un moyen de se faire admettre au sein d'un clan social.

5. La pharmacodépendance serait la traduction d*une lésion métabolique, permanente ou réversible, provoquée par un usage répété et à fortes doses de la substance en cause•

6. La pharmacodépendance serait une forme de rébellion contre les valeurs sociales établies en matière de plaisir, de tradition, de succès et de position.

1 Buikhuisen, W., Timmerman, H., Jongema, S. & Wagenaar (1970) Ned, Tijdschr. Crim., S e p t ” 192,

2 一 Crawley, T. J. (1972) Comprehens. Psychiat” 13, 51-62.

(17)

- 1 5 -

7. Môme en lfabsence de psychopathologie préexistante, la pharmacodépendance résulterait de 1facquisition deun ensemble complexe de conduites opératoires classiquement conditionnées•

Il sfagirait alors d'un comportement acquis par un apprentissage•

8. Même en 1'absence de toute psychopathologie sous—jacente, la pharmacodépendance serait le résultat de pressions socio-culturelles qui ont conduit à 1fusage excessif de certaines substances, par exemple de l'alcool.

9. L'étiologi© de la pharmacodépendance chez un sujet donné peut faire intervenir nfimporte lequel de ces facteurs ou leur ensemble

On notera que la plupart de ces hypothèses ne valent pas uniquement pour 1fusage de la drogue, mais pourraient s'appliquer à bien dfautres types de comportement• Cela est également vrai pour les facteurs précipitants suivants : "a) le sujet est abandonné ou séparé dfune per- sonne dont il dépendait sur le plan affectif; b) il se trouve confronté à un rôle d*adulte plus exigeant que par le passé, comportant par exemple des responsabilités professionnelles, des relations sexuelles, le mariage et la paternité ou la maternité; et c) il se trouve soumis à une situation particulièrement éprouvante ou à une grave maladie physique"

3.2 Facteurs favorisants

Indépendamment des facteurs énumérés à la section 3.1, certaines circonstances

peuvent encourager une personne donnée à essayer telle ou telle drogue engendrant la dépendance•

On citera notamment à cet égard : a) la facilité d'obtention des drogues dans une localité donnée, b) la permissivité de la société à 1•égard de l*emploi de drogues pour soulager un état de malaise ou modifier 11 humeur ou la perception, c) la mobilité géographique actuelle des personnes, des idées et des objets. Il faut également considérer 1 *influence de la famille, des pairs, des sous—groupes culturels et celle du prosélytisme des utilisateurs invétérés, ainsi que l'origine et la qualité de 1•information sur 1fusage des drogues, et voir pourquoi certaines personnes passent rapidement à 1'usage abusif de n'importe quelles drogues, tandis que d'autres sfen tiennent à des essais et que certains s'en abstiennent totalement•

Disponibilité des drogues. Dans les pays où certaines drogues sont très difficiles à trouver, les utilisateurs sont nécessairement peu nombreux. Ainsi, les feuilles fraîches de khat et de coca se trouvent en abondance dans certaines régions bien circonscrites, alors qu'elles manquent totalement ailleurs. Cela dit, il ney a guère de région où 1fon ne puisse se procurer certains types de drogues engendrant la dépendance, ne serait-ce que des drogues fabriquées sur place. Malgré la relative facilité avec laquelle on peut, dans ces conditions, se procurer des drogues engendrant la dépendance, on constate qufun grand nombre de personnes neen font pas usage ou en font un usage modéré.^

Permissivité de la société» A la facilité dfobtention de différentes drogues engen- drant la dépendance s'allient dans certaines régions les influences culturelles qui favorisent plus ou moins leur consommation. Jeune s et moins jeunes sont alors soumis à des pressions culturelles tendant à leur faire accepter et apprécier les modifications de 1 *humeur et de la perception provoquées par ces substances. Ces pressions peuvent s'exercer par 1'intermédiaire d'articles ou dfémissions à sensation où il sera question par exemple de 1fusage de drogues chez une personnalité en vogue; ou encore par la publicité en faveur des drogues toujours plus nombreuses qui sont admises par la société (boissons alcoolisées, tabac, nombreux médicaments),

1 Org, mond. Santé Sér. Rapp. techn.t 1970, № 460, p. 12 (section 3.1.1).

2 Org, mond. Santé Sér. Rapp. techn., 1970, № 460, p. 13 (section 3.1.1).

3 — Chien, I., Gerard, D. L., Lee, R. S. & Rosenfeld, E. (1964) The road to H, New York,

Basic Books. —^

(18)

- 1 6 -

publicité qui fait le jeu tant des gouvernement s qui perçoivent des taxes sur la vente, que des entreprises et des individus qui en tirent profit. Ces différentes influences se combinent pour pousser à la consommation de produits modificateurs de 1 *humeur, y compris ceux qui peuvent engendrer une dépendance.

On utilise certaines drogues pour obtenir un effet ou une sensation particulière.

Ainsi, certaines personnes prennent des stimulants parce qufelles sont convaincues que leurs facultés intellectuelles ou leur puissance sexuelle, par exemple, en seront augmentées. D'autres personnes, voire les mêmes personnes à un autre moment, chercheront par ce moyen à dissiper une fatigue résultant d*un effort soutenu (par exemple études, travail, conduite automobile).

Dans quelques drogues comme l'alcool et le cannabis,1 on recherche une détente, le développe- ment de la sociabilité, la diminution de 1fanxiété et des inhibitions.

Mobilité• Grâce au développement et à la rapidité des communications de masse et des transports, il est maintenant possible de se tenir au courant de ce qui se passe aux anti- podes, de se procurer des drogues qui ne se dégradent pas trop rapidement, et de parcourir le monde. Jeunes et adultes profitent largement des possibilités de voyage qui leur sont offertes•

Or, les voyages facilitent les contacts avec des groupes sociaux et des sous-groupes culturels inaccessibles à ceux qui restent chez eux. De plus, les contrôles externes (par opposition aux contrôles internes) exercés par les parents, les voisins, les connaissances et les différents facteurs socio-culturéis perdent de leur efficacité dès lors qu*une personne échappe à leur influence immédiate. Le phénomène est général, mais les jeunes y sont plus sensibles que des adultes qui ont eu davantage de temps pour se construire un certain mode de vie. De plus, il semble qufon puisse se procurer facilement des drogues engendrant la dépendance dans quelques régions fréquentées par les touristes jeunes.

Groupes affinitaires• Les intérêts et les attentes des groupes affinitaires contri- buent dans une large mesure à déterminer si une personne essaiera ou non une drogue engendrant la dépendance. La majorité des jeunes reçoivent de personnes de leur âge et non d,adultes les drogues réprouvées par la société^ : les garçons de leurs camarades, et les filles de leurs flirts ou d'hommes un peu plus âgés qu'elles. C'est généralement un ami ou un groupe affini- taire qui renseigne sur les moyens de se procurer de la drogue et sur ses effets présumés• Par ailleurs, le désir de s'intégrer au groupe et d*y avoir des échanges sociaux peut être à l'origine d*un premier essai suivi d'autres, s'il se trouve que des membres influents du groupe font un usage intermittent ou régulier de drogue. On peut généralement dire d'une personne qui entre dans un sous-groupe culturel s'adonnant à la drogue qu*elle a dépassé le^

stade exploratoire et s*engage sur la voie dfun usage plus abusif et moins discriminatoire.

Il ne faut pas sous-estimer l'importance du groupe égalitaire pour l'individu faisant un usage plus ou moins fréquent de la drogue. C'est là qu *il apprend à reconnaître les drogues et à en obtenir 1'effet désiré. C'est également là que s*échangent des informations sur les drogues nouvelles et intéressantes, ou bien sur les types de drogues ou les lots particuliers qui sont sans effet ou nocifs. Telle personne qui réagit mal à une drogue ou qui traverse une crise affective trouvera de l'aide dans le groupe; par contre, si elle désire abandonner 1'usage de la drogue, elle peut en être détournée par la pression des autres membres ou par la peur de perdre le contact. Enfin, les groupes affinitaires et les sous-groupes culturels s'adonnant à la drogue fournissent un cadre dans lequel 1'usager peut soumettre à un examen critique son mode de vie et celui des autres.

1 Org, mond. Santé Sér, Rapp. techn., 1971, № 478, p. 16 (section 3.2).

2 Buikhuisen, W., Di jksterhuis, F. P. H ” Hemmel, J. J ” Jongman, R. W ” Smale, G. J. A.

& Timmerman, H. (1971) Sociología Neerlandica, 7, 76; Cohen, H. (1969) Psychologie, sociale psychologie en sociologie van het deviante druggebruik, Amsterdam, Instituut Voor Sociale Geneeskunde (Part II, p. 8).

3 de Alarcon, R. (1969) Bull> Narcot,, 21 (3), 17-22.

4

Alampur, G. & Smart, R. G. (1969) The Yorkville subculture : a study of the life styles and interactions of hippies and non-hippies, Toronto, Addiction Research Foundation,

(19)

- 1 7 -

I n c i t a t e u r s . L a q u e s t i o n d e 1 • " i n c i t a t i o n " à 1 ' u s a g e d e la d r o g u e a é t é l o n g u e m e n t d é b a t t u e . D a n s la p l u p a r t d e s p a y s , d e n o m b r e u s e s p e r s o n n e s s ' a d o n n a n t à d e s d r o g u e s e n g e n d r a n t u n e d é p e n d a n c e d o n n e n t c e l l e s - c i à l e u r s a m i s ou a s s o c i é s , ou l e s l e u r v e n d e n t s a n s r e c h e r c h e r d e p r o f i t . P l u s lar d r o g u e e s t r a r e et c o û t e u s e , e t m o i n s c e t t e p r a t i q u e a é v i d e m m e n t c o u r s . L e c a n n a b i s o c c u p e u n e p l a c e u n p e u à p a r t , p a r c e q u ' i l s e c o n s o m m e g é n é r a l e m e n t e n g r o u p e e t q u e le p a r t a g e e s t d o n c d e r è g l e . O n p e n s e q u e p r e s q u e p a r t o u t l e s u t i l i s a t e u r s d e d r o g u e s p r e n n e n t g é n é r a l e m e n t ( d i r e c t e m e n t ou i n d i r e c t e m e n t ) l ' i n i t i a t i v e d e la p r e m i è r e e x p é r i e n c e , a u t r e m e n t d i t r e c h e r c h e n t c e t t e e x p é r i e n c e . Il s e r a i t a s s e z e x c e p t i o n n e l q u ' o n p o u s s e 1 ' i n c i - t a t i o n à la c o n s o m m a t i o n d e d r o g u e j u s q ufà p e r s u a d e r o u c o n t r a i n d r e d e s n o n - u t i l i s a t e u r s d ' a c h e t e r et d ' e s s a y e r d e s d r o g u e s c o n t r e leur g r é . N é a n m o i n s , si u n n o n - u t i l i s a t e u r d é s i r e e n t r e r d a n s u n g r o u p e a f f i n i t a i r e s ' a d o n n a n t à la d r o g u e , on p e u t fort b i e n l u i i m p o s e r c o m m e c o n d i t i o n d e p r e n d r e l u i - m ê m e d e la d r o g u e D ' a u t r e p a r t , q u a n d les d r o g u e s sont a b o n d a n t e s , on l e s o f f r e s o u v e n t à b a s p r i x a u x j e u n e s , p l u s r a r e m e n t a u x a d u l t e s . Il s e m b l e q u ' e n g é n é r a l la p l u p a r t d e s d r o g u e s e n g e n d r a n t u n e d é p e n d a n c e s o i e n t r e m i s e s à d e s p e r s o n n e s q u i v e u l e n t , o u q u i d é s i r e n t l e s p r e n d r e , et q u ' o n n e f o r c e p a s la m a i n a u x autres; m a i s c e r t a i n e s d r o g u e s sont t r è s f a c i l e s à se p r o c u r e r d a n s d e n o m b r e u s e s r é g i o n s , m ê m e si on n e p o u s s e p a s a c t i v e m e n t à la c o n s o m m a t i o n . P a r c u r i o s i t é (voir s e c t i o n 3 . 1 ) , à d é f a u t d *autre r a i s o n , b e a u c o u p d e p e r s o n n e s se t r o u v a n t d a n s c e s r é g i o n s s e m b l e n t s o u h a i t e r l e s e s s a y e r o u , t o u t a u m o i n s , ê t r e d i s p o s é e s à le f a i r e .

S o u r c e s et i n f l u e n c e d e 1 ' i n f o r m a t i o n . O n e s t i n s u f f i s a m m e n t r e n s e i g n é s u r la m a n i è r e d o n t l e s d i f f é r e n t e s c a t é g o r i e s d e p e r s o n n e s ( u t i l i s a t e u r s et n o n - u t i l i s a t e u r s d e

t o u s â g e s ) o b t i e n n e n t l e u r s i n f o r m a t i o n s s u r la d r o g u e , o u s u r la m a n i è r e d o n t c e s i n f o r m a t i o n s c o n d i t i o n n e n t l e u r d é c i s i o n d ' e s s a y e r ou n o n tel o u t e l p r o d u i t . U n e é t u d e a m o n t r é q u e l e s u t i l i s a t e u r s d e m a r i j u a n a et l e s n o n - u t i l i s a t e u r s d i s a n t q u ' i l s l ' e s s a y e r a i e n t " p e u t - ê t r e "

c o m p t a i e n t s u r t o u t s u r l e u r s a m i s et s u r l e u r e x p é r i e n c e p e r s o n n e l l e p o u r s ' i n f o r m e r . ^ Il faut t o u t e f o i s a j o u t e r q u e c e s d o n n é e s ont é t é f o u r n i e s p a r d e s p e r s o n n e s q u i s ' a d o n n a i e n t d é j à d e p u i s u n c e r t a i n t e m p s à la m a r i j u a n a , a l o r s q u1i l a u r a i t é t é i n t é r e s s a n t d ' i n t e r r o g e r les s u j e t s a u m o m e n t m ê m e d e leur p r e m i è r e e x p é r i e n c e d e la d r o g u e . O n s a i t p a r a i l l e u r s q u e l e s n o n - u t i l i s a t e u r s c o n f i r m é s p u i s e n t d e p r é f é r e n c e l e u r s r e n s e i g n e m e n t s d a n s l e s o r g a n e s d e g r a n d e i n f o r m a t i o n ou d a n s 1 ' e n t o u r a g e s c o l a i r e et p a s n é c e s s a i r e m e n t a u p r è s d e l e u r s a m i s .

Il s e r a i t p l u s i m p o r t a n t e n c o r e d e s a v o i r si l e s i d é e s r e ç u e s s u r la d r o g u e s o n t c o n f o r m e s à la r é a l i t é . Il r e s s o r t d e s e n q u ê t e s m e n é e s a u x P a y s - B a s q u e l e s j e u n e s u t i l i s a t e u r s et n o n - u t i l i s a t e u r s et l e u r s p a r e n t s a d m e t t e n t s o u v e n t c o m m e v r a i e s d e s i n f o r m a t i o n s q u i s o n t e n r é a l i t é f a u s s e s . ^ M a i s on n e c o n n a î t p a s e x a c t e m e n t 11 i n f l u e n c e d e c e t é t a t d e c h o s e s s u r les i n d i v i d u s q u i se m e t t e n t à f a i r e u s a g e d e d r o g u e s .

L a f a m i l l e . L e m i l i e u f a m i l i a l p e u t i n c i t e r l e s j e u n e s à faire u s a g e d e d r o g u e ou a u c o n t r a i r e l e s e n d é t o u r n e r . On p a r l e s o u v e n t d e s fils q u i s o n t d e v e n u s a l c o o l i q u e s c o m m e l e u r p è r e , ou q u i ne le s o n t p a s d e v e n u s p a r c e q u e 1 ' a l c o o l i s m e d e l e u r p è r e (ou d ' a u t r e s m e m b r e s d e l e u r f a m i l l e ) l e u r f a i s a i t h o r r e u r . C e r t a i n e s é t u d e s o n t fait a p p a r a î t r e u n e a s s o c i a t i o n (mais n o n p a s u n e r e l a t i o n d e c a u s e à e f f e t ) e n t r e 1 ' u t i l i s a t i o n " t h é r a p e u t i q u e "

d e d r o g u e s p s y c h o t r o p e s e t d u t a b a c p a r l e s p a r e n t s et 1 ' u t i l i s a t i o n i l l i c i t e d e d r o g u e s p a r

O n e n t e n d p a r " i n c i t a t i o n " , d a n s le p r é s e n t r a p p o r t , 1 ' a c t e c o n s i s t a n t à e s s a y e r d e r e c r u t e r d e n o u v e a u x c l i e n t s ( u t i l i s a t e u r s o u n o n - u t i l i s a t e u r s ) p o u r e n t i r e r p r o f i t , o u à f a i r e du p r o s é l y t i s m e p o u r q u e l q u e r a i s o n q u e c e s o i t .

2 A l a m p u r , G . & S m a r t , R . G . ( 1 9 6 9 ) T h e Y o r k v i l l e s u b c u l t u r e : a s t u d y of the l i f e s t y l e s and i n t e r a c t i o n s of h i p p i e s a n d n o n - h i p p i e s , T o r o n t o , A d d i c t i o n R e s e a r c h F o u n d a t i o n .

S m a r t , R . G . & F e j e r , D . ( 1 9 7 1 ) C r e d i b i l i t y of s o u r c e s of d r u g i n f o r m a t i o n for h i g h s c h o o l s t u d e n t s , T o r o n t o , A d d i c t i o n R e s e a r c h F o u n d a t i o n ( S u b s t u d y 7 - 7 a n d J O - 7 1 ) .

“ 4

B u i k h u i s e n , W . , D i j k s t e r h u i s , F . P . H . , H e m m e l , J . J . , J o n g m a n , R . W . , S m a l e , G . J . A .

& T i m m e r m a n , H . ( 1 9 7 0 ) D r u g g e b r u i k in G i e t e n : e e n v e l d o n d e r z o e k • G r o n i n g u e , I n s t i t u t d e C r i m i n o l o g i e .

Références

Documents relatifs

INSTRUCTS the Director-General to continue liaison with UNESCO regarding High Altitude Research Stations in order to study the medioal aspects of such research'. EMPOWERS

Le Conseil Exécutif sera chargé d'établir au соигз de sa première session un Comité d'experts qui sera dénommé s "Comité d'experts de l'Organisation Mondiale de la

r irj^ccordciic</^rith up-^to-date information as to the type and size of buildings, number of beds, the clinical equipment and provision of staff. In this ooimexj.oa, we

L'Assemblée note encore "qu'il y a tout lieu d'attendre pour 1‘avenir de grandes découvertes dans les domaines de la biologie et de la médecine qui pourraient avoir d'impor-

Tenant compte de l'immense importance des travaux relatifs à l'hygiène- de la maternité et de l'enfance, travaux dont le dévelop- pement intéresse tous les pays - ce qui les

Enterada del establecimiento de un Comité Especial del Consejo Ejecutivo con la misión de formular recomendaciones sobre todas las actividades de la OMS en el sector del

Having considered resolution EB19.R59 of the Executive Board at its nineteenth session together with the report of the Director-General on the Organizational

2) Il est souhaitable que ce Comité de l'Enfance chargé de la répartition des crédits dispose d'un FONDS. Ce Fonds serait chargé de recueillir l'argent nécessaire, de procurer et