L’histoire ne saurait s’écrire avec les seuls documents qui constituent les archives publiques d’un pays. À côté des dossiers produits par l’administration, les ministères ou les assemblées, les papiers conservés par ceux qui ont participé à l’histoire de leur pays ont une importance primordiale. Les fonds d’archives privées ne sont pas significatifs par leur volume, mais précieux parce qu’ils témoignent du regard et du caractère de ceux qui les ont constitués.
Les Archives nationales sont honorées d’accueillir les papiers de Jean Zay, soixante-six ans après son assassinat par des miliciens. Elles gardent déjà en dépôt les papiers de nombreux de ses contemporains, ainsi Léon Blum, Vincent Auriol ou Édouard Daladier. Avec les documents et les photographies que ses filles, Catherine Martin-Zay et Hélène Mouchard-Zay, donnent aujourd’hui aux Archives nationales, les historiens pourront redécouvrir non seulement une personnalité hors du commun, mais une période cruciale de l’histoire de France.
Juif par son père, protestant par sa mère, franc-maçon, orateur charismatique, homme droit et d’une grande culture, Jean Zay a su convaincre le parti radical d’entrer dans le programme du Front populaire. Pour toutes ces raisons, il fut la cible de l’extrême droite puis assassiné par la Milice. Sa vie interrompue très tôt laisse cependant des traces remarquables.
Cette journée d’étude donnera la parole aux hommes poli- tiques, aux historiens et aux archivistes afin de dégager de nouvelles pistes de recherche sur le début du
xxesiècle et sur les années noires.
Jean Zay et ses deux filles à Riom, [1942]. 667 AP 141.
Visite de Léon Blum à Orléans, 19 octobre 1936. 667 AP 137.
Entrée dans la limite des places disponibles Contact
Archives nationales, Section du
xixesiècle Tél. 01 40 27 62 78
sylvie.saez@culture.gouv.fr
Archives nationales Hôtel de Soubise
60 rue des Francs-Bourgeois 75003 Paris
Journée d’étude organisée dans le cadre de l’ANR R
evLoi (IRICE-IHRF) et coordonnéepar Isabelle R
ouge-D
ucos(Archives de France),
Anne S
imonin(CNRS, IRICE, Université Paris I et Paris IV) et Yann-Arzel D
urelle-M
arc(Université de Franche-Comté)
La publicité de la loi est l’un des legs fondamentaux de la Révolution française. Lorsde la discussion, le 12 décembre 1801, du « Titre préliminaire » du Code civil (1804), intitulé « De la publication, des effets et de l’application des lois en général », le tribun Ludot citait les Commentaires sur les lois anglaises de William Blackstone (traduits entre 1774-1776) pour montrer l’écart séparant la tradition parlementaire anglaise de la tradition républicaine française. William Blackstone (Liv. I, chap. 7) rapporte que
« du moment où un prince a donné sa sanction à un bill du parlement, il acquiert la force de statut ou d’acte de ce parlement ; on le dépose aux archives de l’État, et, à la différence des édits des empereurs romains, dont l’effet était subordonné à la publication, les statuts ou les actes du parlement anglais ne sont sujets à aucune promulgation réelle. On n’en a pas cru la formalité nécessaire, dit le célèbre publiciste qui en rend compte, parce que la loi présume que tout individu a pris part à la discussion du parlement, et en a voté les actes par l’organe de ses représentants.
Cet usage s’observe depuis environ trois siècles. »
Cette « présomption » ne sera jamais celle des juristes révolutionnaires qui, de Barère en l’an II (1794) – « Pour être citoyen, il faut obéir aux lois, et pour leur obéir, il faut les connaître » – à Portalis en l’an VIII (1800) – « Les lois ne peuvent obliger sans être connues » – s’efforceront d’apaiser les inquiétudes du Législateur et d’inventer les procédures lui donnant la certitude non seulement que les lois seront connues du peuple mais aussi que les lois seront effectives, qu’elles seront appliquées. Bref que la loi a bien « force de loi ».
Qu’est-ce qu’une loi ? Réduite à un texte, adopté dans une enceinte publique, le Parlement, la loi n’en demeure pas moins ce « texte mort », ce « discours gisant » dont Pierre Legendre rappelle qu’il est à la fois « surchargé de pouvoir et d’illusion », un
« assemblage formel » qui de « lui-même ne dit rien » (L’Amour du censeur. Essai sur l’ordre dogmatique, Seuil, 1974). Ce sont les différentes opérations, isolées ici en cinq étapes, – sanctionner, promulguer, appliquer, imprimer, diffuser, appliquer – qui vont donner « force de loi » à la loi.
L’un des objets de cette journée d’étude est de clarifier ces différentes étapes, de rappeler en particulier les procédures qui les régissent ; d’illustrer, par des exemples, l’imperfection ou la difficulté de leur application ; de travailler leur imbrication…
Si l’idée de la loi domine la Révolution, au point, comme le souligne Jean-Louis Halpérin, de monopoliser alors l’incarnation du droit, savoir quand précisément la loi devient loi entre 1790 et 1801 est aujourd’hui encore sujet à débats. Quant à la certitude que le peuple dans la République connaît la loi, elle repose au final sur une fiction juridique, formalisée en 1819 seulement comme l’a montré Katia Weidenfeld (« Nul n’est censé ignorer la loi », Informer : institutions et communication (xiiif-
xve siècles), éd. K. Fianu, PU de la Sorbonne, 2005).
La contribution à une histoire juridique et positive de la loi eût été incomplète sans l’exploration du substrat qui renouvelle les questions débattues : la connaissance et la mobilisation des fonds conservés aux Archives nationales. L’institution même des Archives fut créée sous la Révolution pour être le dépôt des lois de l’Assemblée nationale constituante, son trésor législatif. La matérialité des lois, l’existence de différents statuts d’originaux, leur processus de fabrication, comme leur organisation en tant qu’archives, nous apportent un éclairage nouveau sur l’histoire de la loi, sur les processus législatifs et l’équilibre des pouvoirs.
archives nationales paris
Journée d’étude du 15 novembre 2011
Conception, réalisation : Archives nationales - Pôle image.
les sources
matérielles de la loi
sous la révolution
Serment du Jeu de Paume, signatures autographes des députés de l’Assemblée, apposées du 20 au 22 juin, à la suite du procès-verbal de la séance du 20 juin 1789 (AE/I/5).
Donner force à la loi
11 h 15 Sanctionner : parfaire la loi, par Guillaume Glenard, professeur de droit public, Université d’Artois 11 h 45 Discutant :
Jean-Philippe Heurtin,
professeur de sciences politiques, Université de Strasbourg 12 h 00 Débat
Appliquer la loi
Président :
Jean-Louis Halperin,
professeur d’histoire du droit, École normale supérieure-Ulm 14 h 00 Promulguer :
rendre la loi exécutoire, par Jérôme Ferrand, maître de conférences en histoire du droit, Université Grenoble II- Pierre-Mendès-France 14 h 30 Publier :
le Bureau de l’envoi des lois (an II-an IV) par Yann-Arzel Durelle-Marc
maître de conférences en histoire du droit, Université de Franche-Comté 15 h 00 Discutant :
Marie-Françoise Limon-Bonnet, conservateur général,
responsable du Minutier central des notaires de Paris,
Archives nationales 15 h 15 Pause
Faire connaître la loi
15 h 30 Imprimer sous la Terreur : François-Jean Baudouin, imprimeur de la Convention nationale,
par Anne Simonin, directeur de recherche, CNRS IRICE, Université Paris I- Panthéon-Sorbonne et Paris IV-Sorbonne
16 h 00 Diffuser : le cabinet des lois de Louis Rondonneau par Noëlle Choublier-Grimbert, chargée d’études documentaires (h.), Archives nationales
16 h 30 Discutant : Pierre Serna,
professeur d’histoire moderne, Université Paris I-
Panthéon-Sorbonne,
directeur de l’Institut d’histoire de la Révolution française 16 h 45 Débat
17 h 15 Conclusion
François Saint-Bonnet, professeur d’histoire du droit, Université Paris II-
Panthéon-Assas
Constitution de 1791, exemplaire sur parchemin recouvert de plats de cuivre, pilonnée par le mouton national en mai 1793 (AE/I/9).
1re page. Lettres patentes du 23 juin 1790 abolissant la noblesse héréditaire sur un décret du 19 juin, collection des Lois de l’Assemblée constituante (A/15).
Registre de la collection des copies non authentiques
des décrets de l’Assemblée constituante (A* 186).
Boîte en bois contenant les rectifications de décrets de liquidations d’offices et d’états de pensions (A* 292).
9 h 00 Accueil des participants 9 h 15 Ouverture
par Agnès Magnien,
directrice des Archives nationales 9 h 20 La confection de la loi,
par Julien Boudon, professeur de droit public, Université de Reims-Champagne- Ardennes
Président : Catherine Mérot, conservateur général,
responsable des Sections du xixe et du xxe siècles, Archives nationales 10 h 00 Légalité et intégrité de la loi :
le rôle des Archives nationales, par Isabelle Rouge-Ducos, conservateur chargé de mission pour les archives privées, Service interministériel des Archives de France 10 h 30 Discutants :
Denise Ogilvie, conservateur en chef, et Nicole Brondel,
chargée d’études documentaires, à la Section du xixe siècle,
Archives nationales 11 h 00 Pause