• Aucun résultat trouvé

Etude in vivo des performances nutritionnelles de produits laitiers optimisés pour la population sénior

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Etude in vivo des performances nutritionnelles de produits laitiers optimisés pour la population sénior"

Copied!
50
0
0

Texte intégral

(1)

HAL Id: hal-02790904

https://hal.inrae.fr/hal-02790904

Submitted on 5 Jun 2020

HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés.

Etude in vivo des performances nutritionnelles de

produits laitiers optimisés pour la population sénior

Tingting Mao

To cite this version:

Tingting Mao. Etude in vivo des performances nutritionnelles de produits laitiers optimisés pour la population sénior. Alimentation et Nutrition. 2018. �hal-02790904�

(2)

Premier stage d’études d’Ingénieur – Tingting MAO

Département Biochimie et Biotechnologies

Etude in vivo des performances nutritionnelles de

produits laitiers optimisés pour la population sénior

Rapport sur le stage effectué du 28/08/2017 au 16/02/2018 (dans le cadre du Projet ANR

AlimaSSenS 2014-2018, en collaboration avec le groupe Lactalis)

Société : Agrocampus Ouest / INRA Rennes - UMR 1253 - Science et Technologie du Lait et de l’Œuf

Adresse de la société : 65, rue de Saint Brieuc - 35042 Rennes CEDEX Secteur d’activité : Laboratoire de recherche agro-alimentaire Tuteur en entreprise : Juliane FLOURY, maître de conférences HDR Tuteur académique : Claire ROSSI, enseignant chercheur

(3)

Résumé

En France, d’ici 2060, une personne sur trois sera âgée de plus de 60 ans (INSEE, 2016). La dénutrition touche actuellement 4 à 10% des personnes âgées vivant à domicile (Raynaud et al., 2007) entrainant de nombreuses pathologies comme la sarcopénie et l’ostéoporose. Actuellement plusieurs stratégies nutritionnelles, pour prévenir des maladies liées au vieillissement, sont possibles et sont basées sur la modification quantitative et qualitative des apports protéiques et calciques de la personne âgée.

Les liquides laitiers riches en protéines sériques permettent un afflux précoce et massif d’acides aminés dans le plasma, particulièrement adaptés pour limiter les phénomènes de sarcopénie chez la personne âgée. Cependant, les études actuelles n’ont porté que sur des apports alimentaires liquides. Dans l'objectif de développer de nouveaux produits laitiers alliant plaisir, confort à manger et efficacité nutritionnelle, des produits laitiers solides enrichis en protéines sériques et en calcium ont été développés.

Dans le cadre de mon stage, trois fromages ont été étudiés pour comprendre l’effet de la source protéique (caséines ou protéines sériques) et de l’enrichissement en calcium (CaCO3,

CaP ou calcium du lait) sur les cinétiques de libération des acides aminés et du calcium. Ces fromages ont été distribués sous forme de repas test à des cochettes. Les effluents duodénaux et le sang ont été collectés entre 30min avant le repas et jusqu’à 7h après l’ingestion du repas. La bioaccessibilité et la biodisponibilité du calcium ont été mesurées par spectrométrie d'absorption atomique. Les profils protéiques ont été analysés par électrophorèse SDS-PAGE. Les concentrations plasmatiques en acides aminés ont été mesurées par chromatographie ionique.

Les résultats montrent que la calcémie est très stable tout au long de la journée, même en période postprandiale. D’autre part, alors que les fromages à base de protéines sériques contiennent 25% de leucine en plus que la Mozzarella, la concentration en leucine plasmatique est deux fois plus élevée entre 2h et 5h30 après l’ingestion des fromages à base de protéines sériques que de Mozzarella. De même, la biodisponibilité des acides aminés essentiels est plus élevée après l'ingestion des fromages à base de protéines sériques.

Cette étude montre que les fromages à base de protéines sériques développés pour le projet, permettent une augmentation significative de la biodisponibilité d’acides aminés en période postprandiale, en particulier de la leucine. Aucune différence de calcémie n’a été mise en évidence, cependant les résultats sur la bioaccessibilité du calcium restent à compléter. Les fromages à base de protéines sériques pourraient davantage permettre une prévention de l’ostéoporose et de de la sarcopénie que les fromages traditionnels à base de caséines. Toutefois des études cliniques sont nécessaires pour attester de leur efficacité sur la prévention de ces pathologies.

Mots-clés : personnes âgées, sarcopénie, ostéoporose, fromage, caséines, protéines sériques, calcium

(4)

Remerciements

Je tiens à remercier l’ensemble de l’équipe de l’UMR STLO-AGROCAMPUS OUEST et à témoigner toute ma reconnaissance aux personnes suivantes, pour l’expérience enrichissante et pleine d’intérêts qu’elles m’ont fait vivre durant ces six mois de stage au sein du laboratoire :

Tout d'abord, j'adresse mes remerciements à Martine Yvinec, Coordinatrice des stages de l'Université de technologie de Compiègne, qui m'a beaucoup aidé dans ma recherche de stage et m'a permis de postuler dans ce laboratoire. Et ma tutrice Claire Rossi pour son écoute et ses conseils qui m'ont permis de m’adapter rapidement la vie professionnelle.

Monsieur Didier Dupont, Directeur de l’équipe Bioactivité et Nutrition, ainsi que Madame Juliane Floury, ma tutrice de stage, pour la qualité de leur accueil, le partage de leur connaissance ainsi que de leur expérience professionnelle, qui m’ont été d’une grande aide quant à la décision de mon futur parcours professionnel.

Mademoiselle Lucie Lorieau, doctorante sur le projet AlimaSSenS sous la tutelle de Juliane Floury et Didier Dupont, avec qui j’ai mené à bien le projet. Merci pour la confiance qu’elle m’accordée et la liberté de mes choix et actions, la qualité de la formation dispensée, la précision des réponses à mes interrogations, ainsi que les conseils partagés quant à son expérience en tant que doctorante. Grâce à sa confiance j'ai pu m'accomplir totalement dans mes missions. Elle fut d'une aide précieuse dans les moments les plus délicats.

Finalement, je remercie Yann le Gouar, Gwenaëlle Henry et Arlette Leduc, pour leur soutien et formation technique, informatique, documentaire, me permettant de réaliser ma mission dans les meilleures conditions.

(5)

Sommaire

RESUME... 2 REMERCIEMENTS ... 3 SOMMAIRE ... 4 ABREVIATIONS ... 1 GLOSSAIRE ... 2 INTRODUCTION ... 3 CONTEXTE ... 4

1. L’UNITE DE RECHERCHE INRAUMRSTLO-AGROCAMPUS OUEST ... 4

2. LE GROUPE LACTALIS ... 4 3. LE PROJET ALIMASSENS ... 5 REVUE BIBLIOGRAPHIQUE ... 6 1. PHYSIOLOGIE DIGESTIVE ... 6 1.1. Phases de la digestion ... 6 1.1.1. Digestion orale ... 6 1.1.2. Digestion gastrique ... 6 1.1.3. Digestion intestinale ... 7

1.2. Modèle de digestion in vivo ... 8

1.2.1. La bioaccessibilité et la biodisponibilité ... 8

1.2.2. Modèles animaux : le porc ... 9

2. PERSONNES AGEES ... 9

2.1. Généralités ... 9

2.2. Malnutrition chez les séniors ... 10

2.2.1. Généralités ... 10

2.2.2. Causes : Vieillissement sur la physiologie digestive ... 10

2.2.3. Conséquences ... 11 2.2.3.1. Sarcopénie ... 11 2.2.3.2. Ostéoporose ... 12 2.3. Stratégies nutritionnelles ... 12 3. PRODUITS LAITIERS ... 13 3.1. Généralités ... 13

3.2. Les protéines principales du lait bovin ... 13

3.2.1. Les caséines ... 13

3.2.2. Protéines sériques ... 14

3.2.3. Intérêts nutritionnels des protéines laitières sur la synthèse musculaire ... 15

3.2.4. Qualité nutritionnelle des protéines laitières ... 16

3.2.4.1. Vitesse de vidange gastrique ... 16

3.2.4.2. Composition en acides aminés ... 17

3.3. Le calcium ... 17

3.3.1. Absorption du calcium ... 17

(6)

OBJECTIF ET STRATEGIE... 21

MATERIEL ET METHODES ... 22

1. LES PRODUITS LAITIERS ... 22

2. REPAS TEST ET PRELEVEMENT DES ECHANTILLONS ... 22

2.1. Les animaux ... 22

2.2. Prélèvement des échantillons ... 23

3. ANALYSE DES PRELEVEMENTS ... 23

3.1. Dosage du calcium ... 23

1.1.1. Principe de la Spectroscopie d’Absorption Atomique... 23

1.1.2. Application du spectromètre d’absorption atomique (SAA) ... 24

1.1.3. Protocole ... 25

3.2. Analyse des peptides... 26

3.2.1. Principe sur l’électrophorèse SDS-PAGE ... 26

3.2.2. Protocole ... 26

3.3. Dosage des acides aminés libres ... 27

3.3.1. Principe de méthode chromatographie ionique (CI) ... 27

3.3.2. Application de chromatographie ionique... 28

3.3.3. Protocole ... 28

4. ANALYSE STATISTIQUE ... 29

RESULTATS ET DISCUSSION ... 30

1. COMPOSITION DES FROMAGES ETUDIES ... 30

2. LE CALCIUM ... 31

2.1. Calcium plasmatique ... 31

2.2. Calcium dans les effluents duodénaux ... 32

3. LES PROTEINES ET ACIDES AMINES ... 34

3.1. Profil protéique des effluents duodénaux ... 34

3.2. Profil d’acides aminés essentiels plasmatiques ... 35

CONCLUSION ET PERSPECTIVES ... 39

(7)

Abréviations

4E-BP1 Eukaryotic initiation factor 4e-binding protein 1

AAE Acide Aminé Essentiel

AlimaSSenS vers une offre Alimentaire Adaptée et Saine à destination des populations SeniorS

BN Bioactivité et Nutrition

CaBP Calcium Binding Protein

CI Chromatographie Ionique

CNERNA Centre national d'études et de recommandations sur la nutrition et l'alimentation

DLC Date Limite de Consommation

DTT Dithiothréitol

GDL Glucono-delta-lactone

HMB ß-hydroxy-β-methylbutyrate

INRA Institut national supérieur des sciences agronomiques, agroalimentaires, horticoles et du paysage

IRS Insulin receptor substrate

OMS Organisation mondiale de la santé

ONU Organisation des Nations unies

PDK1 Phosphoinositide-dependent protein kinase 1

pI Point ionique

PI3K Phosphoinositide 3-kinase

PNNS Programme National Nutrition-Santé

PRAS40 Proline-Rich Akt Substrate of 40kDa

Rheb Ras homolog enriched in brain

S6K1 S6 kinase 1

SAA Spectrométrie d’Absorption Atomique

STLO Science et Technologie du Lait et de l’Œuf

UMR Unité Mixte de Recherche

WP Work Package

α-lac α-lactalbumine

(8)

Glossaire

Analyte

Une substance ou un produit chimique constitue le centre d'intérêt d'une procédure d'analyse chimique. Le terme parfois est considéré comme synonyme de composant (en biochimie clinique), ou espèce chimique.

Bioaccessibilité

La fraction bioaccessible d’un composé est la fraction qui est libérée de la matrice alimentaire et qui devient donc disponible pour l’absorption intestinale (Turgeon and Rioux, 2011).

Biodisponibilité La fraction biodisponible d’un composé est la fraction ingérée qui atteint la zone cible du corps.

Chyme

Substance sous la forme d'une masse crémeuse et semi-liquide retrouvée au niveau de l’estomac, avant le passage par le pylore dans le duodénum. Il correspond au mélange du bol alimentaire partiellement digéré, d’électrolytes, d’acide chlorhydrique, de diverses enzymes de digestion et d’eau.

Excitation

Lorsque qu’un atome à l’état fondamental va recevoir un apport d’énergie correspondant à ces transitions électroniques, l’électron périphérique peut passer sur une orbitale plus externe (en fonction de l’énergie)

Matrice

Elément apportant un support ou une structure permettant d’entourer, de reproduire ou de construire une structure. Dans le cadre alimentaire, la matrice sert de support ou de vecteur pour les composés alimentaires bioactifs.

Ostéoporose Déminéralisation osseuse est liée à la baisse du dépôt de calcium et de phosphore dans les os.

Sarcopénie Diminution progressive de la masse et de la fonction musculaire est observée chez le sujet âgé.

Sénior

Dans cette étude, le terme senior fait référence aux personnes âgées de plus de 65 ans, vivant à domicile et donc considérées comme autonomes.

(9)

Introduction

Dans la plupart des pays développés, la proportion de personnes âgées dans la population augmente rapidement. En janvier 2016, 18,8% de la population française avait plus de 65 ans, cette portion de la population tend à atteindre plus d’un tiers de la population d’ici 2060 (INSEE, 2016). Ce vieillissement de la population devient l’une des transformations sociales du XXIème siècle les plus marquantes et elle a des répercussions dans presque tous les secteurs de la société.

En effet, le vieillissement peut s’accompagner de pathologies, telle que la sarcopénie et l’ostéoporose, dont les fragilités musculaires et osseuses peuvent avoir de graves conséquences sur la qualité de vie des séniors. C’est pourquoi il est important de se soucier davantage du « bien vieillir » grâce au maintien de l’autonomie. L’apparition des altérations de santé liées à ces pathologies peuvent être, en partie, limitée par l’adaptation du régime alimentaire (Ferry, 2008).

Le projet ANR AlimaSSenS a pour but de développer une offre Alimentaire Adaptée et Saine à destination des populations SeniorS vivant à domicile. L’objectif est de comprendre l’impact du changement du statut oral sur la formation du bol et ses conséquences sur le plaisir de manger, ainsi que sur la bioaccessibilité des nutriments. Les produits laitiers présentent l’avantage de pouvoir être consommés sous différentes formes et tout au long de la journée. Par conséquent, des produits laitiers nutritionnellement adaptés et satisfaisants au plan gustatif ont été développés par l’équipe Bioactivité et Nutrition de l’UMR STLO INRA-Agrocampus Ouest, en partenariat avec Lactalis.

Dans une première phase du projet, différents produits laitiers, de composition identique mais de textures différentes, ont été formulés de manière à optimiser leurs performances gustatives et nutritionnelles (richesse en acides aminés essentiels et en calcium) pour la population sénior. Des expérimentations de digestion in vivo sur modèle porc ont été réalisées afin de quantifier la bioaccessibilité et la biodisponibilité des acides aminés et du calcium au cours de la digestion.

Dans ce contexte, mon stage consiste à caractériser les performances nutritionnelles de trois produits laitiers (2 à base de protéines sériques développés pour le projet, et un fromage du commerce), en analysant le calcium, les peptides et les acides aminés dans des effluents duodénaux et le plasma par différentes méthodes d'analyses biochimiques (dosage du calcium par spectrométrie d'absorption atomique, profils des peptides par électrophorèse SDS-PAGE et dosage des acides aminés libres par chromatographie ionique). L'objectif de mon stage a été de comprendre comment la source protéique (caséines ou protéines sériques) et la source calcique (forme chimique du calcium) influencent les cinétiques de libération des acides aminés et du calcium dans des prélèvements collectés sur le porc.

(10)

Contexte

1. L’unité de recherche INRA UMR STLO-Agrocampus Ouest

Le laboratoire Science et Technologie du Lait et de l'Œuf (STLO) est une Unité Mixte de Recherche (UMR), ce qui signifie que des chercheurs (INRA) et des enseignants-chercheurs (Agrocampus Ouest) travaillent ensemble sur un projet scientifique commun et veillent à optimiser les liens recherche/enseignement supérieur.

Créé en 1946, l’INRA est un établissement public français à caractère scientifique et technologique. Aujourd’hui, il est le premier institut de recherche agronomique en Europe et le deuxième mondial en sciences agricoles. L'INRA mène des recherches pour une alimentation saine et de qualité, pour une agriculture durable, et pour un environnement préservé et valorisé (INRA, 2012). Agrocampus Ouest est un établissement d’enseignement supérieur et de recherche interrégional (Bretagne et Pays-de-la-Loire) à caractère scientifique, culturel et professionnel. Établi en 2008, il constitue un ensemble unique en France grâce à sa palette de thématiques et son expertise dans les domaines de l'agronomie, de l'alimentation, de l'environnement, de l'horticulture et du paysage (Agrocampus Ouest, 2016).

L’UMR STLO-Agrocampus Ouest fait partie du Centre de Recherches INRA de Rennes. Il est l'un des 4 laboratoires de l’INRA dédié à l’exploration et à la valorisation du lait et de l’œuf, et il a une forte interaction avec les formations universitaires et les industries laitières et d’ovoproduits de Rennes et de sa région.

Le STLO compte 83 permanents dont 34 scientifiques, 25 doctorants et environ 10 stagiaires Master 1 ou 2. Il possède 4000m² de laboratoires où cinq équipes collaborent étroitement. L’équipe Bioactivité et Nutrition (BN) étudie les liens entre structure des aliments et la nutrition afin de maximiser les bénéfices de notre alimentation en termes de valeur nutritionnelle et biologique. La principale préoccupation de l’équipe BN est de comprendre les mécanismes de la digestion (INRA STLO, 2018). Grâce à leurs compétences dans le domaine des produits laitiers, Lactalis et l’UMR STLO-Agrocampus ont travaillé en collaboration sur le projet AlimaSSenS. Ils avaient pour objectifs de développer une gamme de produits laitiers à destination des personnes âgées.

2. Le Groupe Lactalis

Fondé en 1933 par André Besnier à Laval, le Groupe Lactalis est aujourd’hui le leader mondial des produits laitiers et fromager, et le leader européen du lait de consommation, des beurres et des crèmes. En 2016, son chiffre d’affaires était 17,3 milliards d’euros. Les activités fromagère et le lait de consommation restent les forces du Groupe (Figure 1) (Lactalis, 2016).

Le Groupe Lactalis puise ainsi sa force et son succès dans une stratégie de proximité,

(11)

de ses produits. Lactalis emploie environ 75 000 collaborateurs répartis sur 236 sites de production à travers le monde (43 pays) et commercialise ses transformations laitières dans plus de 150 pays (Lactalis, 2016).

3. Le projet AlimaSSenS

Le projet AlimaSSenS est un projet financé par l’agence nationale de recherche (ANR) sur une période de 4 ans (2014-2018). Ce projet vise à développer et proposer une offre alimentaire adaptée aux difficultés masticatoires des personnes âgées (> 65 ans) afin d’allier plaisir, confort à manger et efficacité nutritionnelle. Financé par l'ANR à hauteur de 1,6 M€ pour un coût total de presque 6,5 millions d'euros, ce projet est également soutenu par les pôles de compétitivité Vitagora, Valorial et le Conseil Régional de Bourgogne. Il regroupe 10 instituts de recherche publics, 1 regroupement de centres techniques et 4 partenaires privés.

Le projet est divisé en 6 groupes de travail (Work Package : WP). L'innovation majeure d'AlimaSSenS est de revisiter les propriétés sensorielles et nutritionnelles de l'aliment via une analyse du bol alimentaire et de son processus de formation chez la personne âgée. Pour ce faire, le WP4 du projet conduira des recherches utilisant des approches in silico, in vitro et in vivo sur trois types de produits alimentaires : les produits céréaliers, les produits laitiers et les produits carnés (Figure 2) (document interne)

Dans le cadre du WP4, l’équipe de recherche “Bioactivité & Nutrition” de l’UMR STLO-Agrocampus Ouest, en collaboration avec le Groupe Lactalis, est responsable du développement de produits laitiers. L’objectif est de « développer une gamme de produits laitiers présentant une bioaccessibilité / biodisponibilité maximale en calcium et acides aminés ».

Figure 2 Approche d’AlimaSSenS (Gilles FERON, Directeur de Recherches à l’INRA)

(12)

Revue bibliographique

1. Physiologie digestive

1.1. Phases de la digestion

La digestion est essentielle à la vie. Elle permet à l'Homme de digérer les aliments afin de fournir les nutriments nécessaires à l’organisme. La digestion a pour fonction de transformer des aliments pour assimiler et absorber les nutriments dans l'organisme. C’est un processus complexe qui se déroule en 3 phases principales : la digestion orale, gastrique et intestinale. La digestion orale sert principalement à désintégrer les aliments en petites particules, la digestion gastrique a pour objectif d’initier la digestion enzymatique et l’hydrolyse acide et la digestion intestinale est responsable de l'absorption des nutriments (Kong and Singh, 2008).

1.1.1. Digestion orale

La digestion orale est la première phase de la digestion. Elle a pour objectif de former un bol alimentaire (Jalabert-Malbos et al., 2007). L’aliment est déstructuré par l’action conjuguée de la mastication et de la salivation. La mastication permet de réduire la taille des aliments en petites particules, puis la salive permet d’hydrater et lubrifier le bol (Kong and Singh, 2008). Au cours de la mastication, le bol alimentaire est également chimiquement dégradé par l’enzyme salivaire : l’alpha-amylase. Cette enzyme est particulière utile lors de l’ingestion d’aliment contenant de l’amidon (Hoebler et al., 2002). Le bol alimentaire est ensuite transporté à travers l’œsophage jusqu’à l’estomac par des mouvements péristaltiques.

1.1.2. Digestion gastrique

Au cours de la digestion gastrique le bol alimentaire est transformé en chyme. Cette transformation à lieu dans l’estomac. Celui-ci est divisé en 4 régions principales : le fundus, le corps, l'antre et le pylore (Figure 3), elle assure quatre fonctions principales : le stockage, le mélange, l’initiation de l’hydrolyse et la vidange du contenu gastrique dans le duodénum (Kong and Singh, 2008).

(13)

A vide, l’estomac contient environ 0,5L de chyme. Après un repas, il peut se développer et en contenir jusqu’à 4L. La digestion gastrique a pour objectif de malaxer le chyme et initier l’hydrolyse de l’aliment. Ces fonctions sont réalisées par l’action conjuguée de sécrétions gastriques et de contractions musculaires. Trois principaux types de cellules sont présentes dans l’estomac : les cellules pariétales, responsables de la sécrétion d’acide chlorhydrique (HCl) et donc de l’acidité de l’estomac (pH d’environ 2-3), les cellules principales secrétant du pepsinogène et de la lipase gastrique, et enfin les cellules sécrétrices de mucus. L’HCl participe à la dénaturation des protéines ingérées. Il permet également l’activation du pepsinogène (forme inactive) en pepsine (principale enzyme protéolytique des sécrétions gastriques). La pepsine est par ailleurs responsable de moins de 20% de la digestion des protéines exogènes (Mat et al., 2018). Le mucus permet la lubrification et la protection des muqueuses (Bornhorst and Singh, 2014). Grâce aux contractions musculaires de la paroi de l’estomac, le contenu gastrique est malaxé et mélangé avec les sécrétions gastriques puis il est évacué par le pylore. La vidange gastrique est contrôlée par le sphincter pylorique. Il joue un rôle clé dans les cinétiques d'absorption des nutriments. Généralement, les particules de moins de 1 à 2mm ne sont pas évacuées de l’estomac (Boland, 2016). La vidange gastrique commence quelques minutes après l’ingestion du repas, mais le pic de libération du contenu stomacal se situe à environ 1h30-2h après l’ingestion (Kong and Singh, 2008).

1.1.3. Digestion intestinale

La phase digestive finale permet l'absorption des nutriments. Elle se déroule dans l’intestin grêle proximal (duodénum et jéjunum) (Figure 4), où le digesta y est dissout dans les sucs du pancréas, du foie et de l'intestin. Les nutriments alors bioaccessibles peuvent être absorbés par la barrière intestinale, tandis que les nutriments non absorbés sont transportés jusqu'au gros intestin pour être fermenté par le microbiote ou être excrété (Kong and Singh, 2008).

L'intestin grêle est anatomiquement découpé en trois régions : le duodénum, le jéjunum et l'iléon (Figure 4). Le duodénum a pour objectif d’hydrolyser les aliments. Il sécrète du bicarbonate qui va neutraliser l'acidité gastrique et fournir un pH approprié pour la poursuite de la digestion enzymatique. Une quantité importante d’autres sécrétions sont déversées dans le duodénum, ces secrétions proviennent du foie et du pancréas (Bornhorst and Singh, 2014). Les enzymes pancréatiques, permettent la majeure partie de l’hydrolyse des protéines (trypsine, chymotrypsine), lipides (lipase) et polysaccharidiques (amylase). De plus, la bile, sécrétée par le foie, est déversée par l’intermédiaire de la vésicule biliaire. Elle permet l’émulsification des lipides, ce qui facilite l’accès des lipases à leurs sites d’activité (Guerra et al., 2012). La majorité de l'absorption des nutriments bioaccessibles se produit au niveau du jéjunum. A cet endroit, la paroi intestinale est constituée de nombreuses villosités elles-mêmes découpées en microvillosités (Figure 4) qui forment la bordure en brosse et permettent d’augmenter la surface d’absorption des nutriments (Guerra et al., 2012). Une fois que les nutriments ont passé la barrière intestinale, ils sont véhiculés dans la circulation sanguine.

(14)

Figure 4. Le schéma de l'intestin grêle (à gauche) et sa paroi (à droite)

1.2. Modèle de digestion in vivo

En fonction des phases de la digestion et des objectifs, une multitude de modèles d’études sont envisageables. Il est très difficile d’étudier la digestion gastro-intestinale dans son ensemble directement chez l’Homme car ces études sont très invasives, assez lourdes et difficile à monter. Pour pallier à ces difficultés, des méthodes alternatives ont été développées avec des modèles de digestions animaux et des digestions simulées (modèles in vitro).

1.2.1. La bioaccessibilité et la biodisponibilité

Avant toute chose, il est important de bien définir deux termes essentiels lorsque l’on étudie la digestion : la bioaccessibilité et la biodisponibilité.

La bioaccessibilité est la fraction du nutriment ingéré libéré par la matrice alimentaire et disponible pour l'absorption intestinale. Généralement la bioaccessibilité est étudiée et mesurée lors de digestion

in vitro, mais on peut aussi l’étudier à l’aide de digesta

prélevés, chez l’Homme ou sur des animaux, à l’aide de sonde ou de canules. Cette fraction est représentée par les triangles rouge sur la Figure 5.

La biodisponibilité est la fraction des composants ingérés disponibles pour une utilisation dans des fonctions physiologiques normales (déterminée par des dosages in vivo dans des prélèvements sanguins). Cette fraction est représentée par les triangles jaune sur la Figure 5. Le principal problème consiste à déterminer quelle fraction des nutriments ingérés, peut être réellement utilisée par l'organisme pour exercer un effet sur la santé.

Figure 5. Représentation schématique des fractions de nutriments bioaccessibles et biodisponibles (Guerra et al., 2012)

(15)

1.2.2. Modèles animaux : le porc

Les modèles animaux sont efficaces et nécessaires pour étudier la digestion humaine. A l’inverse des études sur l’Hommes, il est possible de réaliser des études plus invasives, ayant l’avantage d’analyser plus en détails les mécanismes de la digestion. Deux modèles animaux sont principalement utilisés : le rat et le porc (Deglaire and Moughan, 2012).

Cependant, en tenant compte des différences d’anatomie et de physiologie digestive entre le rat et l’Homme, le porc est plus couramment utilisé pour les études nutritionnelles (Deglaire and Moughan, 2012). En plus d’avoir une physiologique digestive proche de l’humain (Guilloteau et al., 2010), le porc est un animal omnivore qui peut prendre ces repas en une seule prise alimentaire. De plus, il est possible de poser des canules à différents niveaux du tube digestif pour avoir accès aux effluents gastriques ou intestinaux, permettant l’étude de la dégradation de l’aliment au cours du transit (Barbé et al., 2014).

2. Personnes âgées 2.1. Généralités

Au niveau mondial, l'organisation mondiale de la santé (OMS) et l’organisation des Nations unies (ONU) considèrent que les personnes âgées sont les adultes de plus de 60 ans. Du fait de l’augmentation de l’espérance de vie et de l’espérance de vie en bonne santé, les pays développés ont choisi le seuil de 65 ans pour définir les personnes âgées.

A présent, le vieillissement de la population est un phénomène mondial qui n’exclut que quelques très rares pays (Nations Unies, 2016). En Europe, alors qu’en 2016 19,2% de la population avait de plus de 65 ans et 5,4% avait de plus de 80 ans (Eurostat, 2017), les estimations indiquent qu’en 2060, les plus de 65 ans représenteront près de 30% de la population et les plus de 80 ans en représenteront 12% (Mak and Louro Caldeira, 2014).

L’accroissement de la part relative des personnes âgées peut s’expliquer par une plus grande longévité ; cette évolution est souvent appelée le « vieillissement par le sommet » de la pyramide démographique. Cependant l’objectif actuel n’est pas d’augmenter l’espérance de vie mais plutôt l’espérance de vie en bonne santé (Mak and Louro Caldeira, 2014). De façon générale on considère que le « bien vieillir » passe par le maintien de l’autonomie. Chez les personnes âgées, l’autonomie peut être préservée par le maintien d’une l’activité physique et sociale, et l’adaptation de l’alimentation aux besoins de l’organisme.

En effet, la malnutrition est l'une des causes les plus répandues, influençant négativement la santé des personnes âgées, et pouvant être liée à des morts prématurées (Söderström et al., 2014). De plus, la malnutrition est fréquente chez les séniors, mais elle est souvent sous-estimée (Vetta et al., 1999). L’étude de Kaiser et al. (2010) en base de données répertoriant 4507 sujets âgés d’en moyenne 82,3 ans, (méta analyse de 24 études provenant de 12 pays, principalement européen) a révélé que la prévalence de la malnutrition était de 22,8% en moyenne et que la prévalence pour le risque de dénutrition était de 46,2%. Cette étude a aussi montré des différences très importante de la prévalence de la malnutrition en fonction du lieu d’habitation avec une prévalence de 50,5% dans les lieux de réadaptation gériatrique, 38,7 % dans les hôpitaux, 13,8% dans les maisons de retraite et 5,8% à domicile (Kaiser et al., 2010).

(16)

2.2. Malnutrition chez les séniors

2.2.1. Généralités

L'OMS définit la malnutrition comme l’inadéquation entre les apports alimentaires et les besoins de l’organisme (de Onís et al., 1993). Cependant, les personnes âgées les plus à risques, sont les personnes dénutries (ayant un apport alimentaire insuffisant) plutôt que les personnes suralimentées (ayant apport alimentaire important mais ne répondant pas aux besoins nutritionnels) car la dénutrition est plus fortement associée à une augmentation de la morbidité et la mortalité que la suralimentation (Kondrup et al., 2003).

Plusieurs causes sont à l’origine de la malnutrition. Elles sont qui sont divisées en trois catégories principales : physiologiques, psychologique et sociale.

- Le vieillissement s’accompagne de modifications physiologiques, pouvant être à l’origine d’une diminution, voire de la perte de l’odorat et du goût. Cette atrophie a pour conséquence une diminution de l’appétit chez le sénior.

- La dépression, un problème psychologique fréquent chez les personnes âgées. Elle est souvent accompagnée d'une perte d'appétit et d’une diminution de la consommation alimentaire (Ramic et al., 2011).

- Les facteurs sociaux, incluant l'isolement social, la pauvreté ou un changement d'environnement, peuvent avoir un impact négatif sur les habitudes alimentaires des séniors. Les repas sont moins fréquemment préparés, il y a une diminution de la diversité alimentaire, ainsi qu’une perte du plaisir de manger (Ramic et al., 2011).

2.2.2. Causes : Vieillissement sur la physiologie digestive

Bien que le vieillissement ne soit pas nécessairement accompagné de malnutrition, de nombreuses altérations lors du vieillissement peuvent amener à des situations de vieillissement pathologique (Landi et al., 1999). Mon stage étant plus particulièrement centré sur l’étude de la digestion de différent produis laitiers à destinations de la population sénior, nous portons une attention plus particulière aux modifications pouvant intervenir sur le système digestif lors du vieillissement. Actuellement les différentes études aboutissent à des conclusions parfois contradictoires, principalement en raison de la variabilité des mesures et de grande variabilité de l’état de santé des personnes âgée. La Figure 6 résume clairement l’objectif de chacune des phases de la digestion et les altérations pouvant survenir lors du vieillissement. Les principales modifications sont la baisse des sécrétions enzymatiques, la baisse de la force musculaire et le ralentissement de la fonction digestive. Il semble que dans le cadre d’un vieillissement physiologique et en l’absence de pathologies associées, ces modifications de la fonction digestive s’installent lentement et sont peu pénalisantes. Par contre, dans le cas d’un vieillissement pathologique les modifications de la fonction digestives sont plus marquées, on observe en particulier un ralentissement plus important de la fonction digestive, souvent lié à des problèmes de malabsorption des nutriments (Rémond et al., 2015).

(17)

Figure 6. Schéma récapitulatif de l’objectif de chacune des phases de la digestion (Bornhorst and Singh, 2014) et des altérations lors du vieillissement (Chantarojanasiri et al., 2015; Doherty, 2003; Hatch et al., 2001; Madsen and Graff, 2004; Müller et al., 2007; Rémond et al., 2015; Russell et al., 1993; Vandenberghe-Descamps et al., 2016)

2.2.3. Conséquences

Les modifications des habitudes alimentaires des séniors se manifestent alors par des carences en oligoéléments, vitamines et en protéines, essentiels à l’organisme. Ces carences peuvent avoir de grave répercussion sur la santé des personnes âgées en particulier avec la manifestation de la sarcopénie et de l’ostéoporose.

2.2.3.1. Sarcopénie

Une des conséquences les plus délétères au maintien de l’autonomie des personnes âgées est le développement de la sarcopénie. Le maintien de la masse musculaire squelettique résulte d’un équilibre dynamique entre la synthèse et la dégradation des protéines musculaires. Cet équilibre est perturbé dès l’âge de 50 ans, avec une dégradation supérieure à la synthèse des protéines musculaires. Ce déséquilibre, amenant une fonte musculaire, est appelé sarcopénie. La sarcopénie correspond à une diminution graduelle de la masse musculaire squelettique liée au vieillissement souvent lié à une résistance anabolique au repas, une réduction de l’activité physique et à une alimentation moins riche en protéines. Ainsi, la masse musculaire squelettique est réduite d’en moyenne 50% entre 50 et 80 ans (Walston, 2012) avec une fonte musculaire allant de 0,7% à 1% par an entre 50 à 75 ans. Puis, cette baisse de la masse musculaire s’intensifie à mesure que la sarcopénie s’installe (Mitchell et al., 2016).

La sarcopénie peut entraîner des chutes et des fractures ayant de graves répercussions sur la qualité de vie des personnes âgées. De nombreuses études ont mis en évidence que l’adaptation du régime alimentaire ainsi que le maintien de l’activité physique sont les deux principaux facteurs à moduler afin de prévenir et réduire le développement de la sarcopénie.

(18)

2.2.3.2. Ostéoporose

L'ostéoporose (déminéralisation osseuse) est caractérisée par une fragilité excessive du squelette, due à la baisse du dépôt de calcium et de phosphore dans les os. Cette fragilité osseuse est parfois liée à de minuscules déformations qui peuvent déclencher des douleurs ou encore des tassement-fracture chez les sujets âgés (Theobald, 2005). La masse osseuse se développe jusqu’à 25 ans, puis après s’être maintenue une vingtaine d’années, elle décroit de 0,2 à 0,3% par an à partir de 45 ans. La déminéralisation osseuse est accentuée chez les femmes après la ménopause, elle atteint alors un déclin de 2 à 4% pendant les cinq premières années suivant la ménopause. Ces effets sont dus à la réduction des concentrations circulantes d'œstrogène, qui entraine une augmentation de la résorption osseuse en libérant des ions calcium dans le plasma (Theobald, 2005).

Un apport suffisant en calcium et en vitamine D permettrait de limiter les phénomènes de fracture lié à l’ostéoporose. Alors que l’effet d’une supplémentation en calcium sur la déminéralisation osseuse est parfois contesté, l’effet de la vitamine D est cependant prouvé depuis maintenant plusieurs années. Ainsi selon un avis largement partagé, la supplémentation en calcium et de vitamine D, en particulier dans des populations carencées, permet une inhibition de la déminéralisation osseuse (Masuyama et al., 2003).

2.3. Stratégies nutritionnelles

La malnutrition augmente le risque de fragilité chez les personnes âgées et, à son tour, le processus de vieillissement augmente le risque de malnutrition. Pour rompre cette spirale, l’objectif principal est de maintenir une bonne santé et une haute qualité de vie des personnes âgées, par le maintien d’une alimentation adaptée. Ainsi, l’ANSES a émis des recommandations d’apports alimentaires spécifiques aux besoins des séniors.

Tout d’abord, les apports nutritionnels conseillés en protéines sont de 1 à 1,2g/kg corporel/jour pour les personnes de plus de 65 ans, alors qu’ils ne sont que de 0,8g/Kg/j pour les jeunes adultes sains (ANSES, 2016a; Bauer et al., 2013). Cet apport nutritionnel conseillé est augmenté car les acides aminés essentiels sont connus pour jouer un rôle important dans la synthèse musculaire, en particulier la leucine. Les mécanismes cellulaires impliqués sont exposés dans la partie 3.2.3 du rapport. Cependant, comme cet acide aminé n’est pas synthétisé par l’Homme, il doit être apporté par le biais de l’alimentation. Les recommandations actuelles suggèrent aux adultes sains de consommer 1000mg/jour de calcium, et cette recommandation est de 1200mg/jour pour les personnes âgées de plus de 65 ans (ANSES, 2016b).

Il existe sur le marché de nombreux produits appropriés aux séniors fragilisés. Ces produits sont pour la majorité des compléments alimentaires vendus sous ordonnance en pharmacie. Ces produits sont très couteux et parfois ils ne conviennent pas aux personnes âgées car ils peuvent avoir une texture et un goût particuliers. Il est donc devenu très intéressant de développer des produits enrichis en protéines et en calcium, disponibles en grandes surfaces. Ces produits devront être abordables en prix et ressembler à des produits classiques retrouvés dans le commerce. Afin d’éviter une monotonie, le choix des saveurs et des textures devront être en adéquation avec les attentes du consommateur. Parmi les

(19)

stratégies nutritionnelles envisageables, les produits laitiers sont particulièrement adaptés car ils sont riches en protéines et en calcium, ils sont populaires auprès des consommateurs français et la gamme des produits est très vaste en goût et en texture.

3. Produits laitiers 3.1. Généralités

Les produits laitiers regroupent les laits et les transformations alimentaires obtenues grâce aux laits (fromages, beurre, crème, yaourts, protéines de lait). Les produits laitiers sont riches en protéines et en calcium et sont souvent enrichis en vitamines D. Ces produits peuvent permettent la prévention de l’ostéoporose de de la sarcopénie.

Dans le régime alimentaire européen environ 50-75% du calcium est apporté par des produits laitiers. Ainsi, le PNNS (Programme National Nutrition-Santé) recommande de consommer 3 portions de produits laitiers variés par jour pour les adultes sains et 4 pour les adolescents et séniors, afin de couvrir leurs besoins. Selon Paddon-Jones et Rasmussen (2009) 25 à 30g de protéines par repas (apportant environ 10g d'acides aminés essentiels) sont nécessaires pour stimuler la synthèse protéiques du muscle squelettique chez les jeunes et séniors.

3.2. Les protéines principales du lait bovin

Le lait contient majoritairement 2 types de protéines : des caséines à 80%, et des protéines sériques à 20%. Les caséines sont non-solubles et forme des micelles en suspension. A l’inverse, les protéines sériques sont solubles et de petite tailles (3 à 6nm). Le Tableau 1 permet de comparer les caractéristiques physico-chimiques des caséines et les protéines sériques.

Tableau 1. Caractéristiques physico-chimiques des principales protéines du lait bovin (Boland et al., 2014) Cas : caséine, β-lac : β-lactoglobuline, α-lac : α-lactalbumine

Caséines Protéines sériques

Proportion dans le lait bovin 80% 20%

Température de dénaturation >100°C 70°C

Taille 150 à 200 nm 3 à 6nm

Composant majoritaire cas αs1 cas αs2 cas β cas κ β-lac α-lac

Proportion 40% 10% 35% 15% 60% 20%

Masse moléculaire (kDa) 23,6 25,2 24,0 19,0 18,3 14,2

Résidus en acides aminés 199 207 209 169 162 123

3.2.1. Les caséines

Les caséines sont les protéines majoritaires du lait bovin, représentant environ 80% des protéines totales. Elles sont subdivisées en quatre types : les caséines αs1, αs2, β et κ représentant respectivement 40%, 10%, 35% et 15% des caséines totales (Dalgleish and Corredig, 2012). Dans le lait, les caséines sont principalement organisées sous forme de micelles, autrement dit sous une forme sphérique d’environ 150 à 200nm de diamètre formée

(20)

par l’association des différentes caséines et de composants salins tels que le calcium et le phosphate (Dalgleish and Corredig, 2012). La plupart des propriétés fonctionnelles des micelles de caséines dépendent des propriétés de surface plutôt que de celles de l'intérieur de la micelle. Dans une certaine mesure, les micelles peuvent être considérées comme des sphères dures avec une cage protectrice (de Kruif, 1999).

Au cours des années, plusieurs modèles de structure des micelles caséiniques ont été présentées. Le modèle le plus récent est celui de de Kruif et al. (2012), pour qui la micelle est la résultante de l’assemblage de submicelles de 10 à 15nm de diamètre (Figure 7). Au sein de son cœur hydrophobe sont retrouvées les caséines α et β, tandis que la périphérie hydrophile est composée des caséines α et κ. Ce sont les ponts de phosphate de calcium colloïdaux qui permettent la cohésion de l’ensemble de la micelle. Les caséines ont la particularité de précipiter à pH acide (pH 4,6) et d’être résistantes au traitement thermique car leur température de dénaturation supérieure à 100°C (Dalgleish and Corredig, 2012). Les caractéristiques principales des caséines sont exposées dans le Tableau 1.

3.2.2. Protéines sériques

Les protéines sériques (aussi appelées protéines du lactosérum) représentent environ 20% des protéines totales du lait bovin. Elles sont un mélange de protéines globulaires (la β-lactoglobuline : β-lac et l’α-lactalbumine : α-lac) de petites tailles (entre 3 et 6 nm) qui ont d'excellentes propriétés nutritionnelles en particulier grâce à leur richesse en acides aminés essentiels. Contrairement aux caséines, leur structure est compacte et elles sont thermosensibles.

La β-lac est la protéine sérique la plus abondante (58% des protéines sériques) dans le lait bovin (Madureira et al., 2007). Son poids moléculaire est de 18,3kDa (162 acides aminés) et son point isoélectrique est de 5,13 (Farrell et al., 2004). Elle existe sous différents états oligomériques (du dimère à l’octamère), selon le pH, la température et la force ionique du milieu (Croguennec et al., 2004). La forme dimérique reste cependant majoritaire dans le lait bovin (Boland et al., 2014). D’un point de vue structurel, 45% des acides aminés sont impliqués dans des feuillets antiparallèles β et 15% dans des feuillets α, ce qui explique sa structure tertiaire très compacte (Farrell et al., 2004).

L’α-lac est la seconde protéine majoritaire des protéines sériques, elle représente environ 20% des protéines sériques (Madureira et al., 2007). C’est une métalloprotéine globulaire de poids moléculaire de 14,2kDa (123 acides aminés), dont le point isoélectrique est de 4,2 (Lucy et al., 2008). La présence d’ion calcium au cœur de la protéine lui confère une certaine rigidité, ainsi qu’une résistance aux traitements thermiques (Permyakov and Berliner, 2000).

Figure 7. La structure des micelles de caséines avec des groupements phosphate de calcium dispersés à l'intérieur (Kruif 2012)

(21)

3.2.3. Intérêts nutritionnels des protéines laitières sur la synthèse musculaire

Il a été montré que les acides aminés essentiels, en particulier la leucine, sont responsables de la stimulation de la synthèse des protéines musculaires (Volpi et al. 2003). En effet, la leucine est à la fois un substrat et un stimulateur des facteurs et kinases intracellulaires impliqués dans les voies de signalisation contrôlant la traduction des protéines (Figure 8). Plus précisément, la leucine induit, par une cascade réactionnelle, la synthèse de la protéine kinase mTOR (Ham et al., 2014). Or, la stimulation de la synthèse des protéines dans le muscle, après une prise alimentaire, fait appel à cette kinase (Figure 9). Cette kinase a un rôle-clé dans la régulation de l'équilibre entre la synthèse et la dégradation des protéines. En effet, les mécanismes impliqués dans l'effet régulateur de la leucine sur le métabolisme des protéines incluent : l’augmentation de la disponibilité du substrat, l’augmentation la sécrétion d'hormones anabolisantes comme l'insuline, la modulation directe des voies de signalisation anabolisantes dans le muscle squelettique et la stimulation d’effets secondaires comme les métabolites HMB (ß-hydroxy-β-methylbutyrate) (Ham et al., 2014).

Figure 8. Voies de signalisation régulées par l’insuline et la leucine dans la synthèse des protéines (Ham et al., 2014) La leucine module la synthèse et la dégradation des protéines musculaires par deux mécanismes distincts sur la voie PI3K-Akt-mTOR. La leucine stimule directement les cellules du pancréas pour produire de l'insuline, puis l’activation des récepteurs par l’insuline active l’IRS (insulin receptor substrate), recrute les PI3K (PI3 kinases). En aval de la PI3K, les voies de contrôle de la croissance cellulaire impliquent PDK1 (phosphoinositide-dependent protein kinase 1) qui active Akt par phosphorylation. Akt activité conduit à l'inhibition subséquente du complexe TSC1/TSC2 et du substrat Akt riche en proline de 40 kDa (PRAS40) par phosphorylation. Le complexe TSC1/TSC2 se comporte d’inhiber Rheb (ras homolog enriched in brain) qui active normalement les complexes mTORC1. La leucine stimule également mTORC1 par un mécanisme indépendant de l'insuline, qui peut impliquer les Rags, Vps34 ou MAP4K. Les flèches indiquent une stimulation, et les blunts indiquent une inhibition.

(22)

Figure 9. mTOR régule l’activité traductionnelle (Anthony et al., 2001) L'activation de mTORC1 stimule la synthèse des protéines par la phosphorylation de S6K1 (S6 kinase 1) et 4E-BP1 (eukaryotic initiation factor 4e-binding protein 1). MTOR phosphoryle et active la S6K1, qui, à son tour, phosphoryle la protéine ribosomique S6, augmentant donc de la traduction de l'ARNm. MTOR phosphoryle également 4E-BP1 qui est un inhibiteur de la traduction. Lorsque 4E-BP1 est phosphorylée, elle se dissocie du facteur traductionnel eIF4E qui peut alors se lier à la coiffe de ARNm et former un complexe initiateur de leur traduction. Ce complexe, appelé eIF4F, comporte l’hélicase eIF4A et la protéine de structure eIF4G, et facilite la liaison de la sous-unité ribosomale 40S à l’ARNm. L’inhibition de mTOR empêche donc la phosphorylation de 4E-BP1 et, par conséquent, la libération du facteur traductionnel eIF4E.

3.2.4. Qualité nutritionnelle des protéines laitières

Chez la personne âgée, de nombreuses études ont montré que pour un même apport protéique, les protéines sériques stimulent d’avantage la synthèse musculaire que les caséines (Burd et al., 2012; Devries and Phillips, 2015; Dideriksen et al., 2011; Katsanos et al., 2008; Martin et al., 2013; Pennings et al., 2011; Tipton et al., 2007). Deux points majeurs expliquent cette différence : la vitesse de vidange gastrique des protéines et leur composition en acides aminés.

3.2.4.1. Vitesse de vidange gastrique

Les protéines sériques solubles dans l’estomac sont rapidement digérées, tandis que les caséines, qui précipitent sous l’effet de l’acidité gastrique, ont donc ont une vitesse de vidange gastrique plus lente (Mahé et al., 1996). Le concept de protéines « rapides » et « lentes » a été introduit par Boirie et al. (1997) (Figure 10) pour décrire ces différences de la biodisponibilité des acides aminés. Les caséines sont nommées protéines « lentes » alors que les protéines sériques sont appelées protéines « rapides ».

Figure 10. La concentration plasmatique en leucine (Boirie et al., 1997). Les différences statistiques entre les deux repas protéiques : * P<0,05, ** P<0,01 Après l’ingestion d'un seul repas contenant soit des protéines sériques soit des caséines. Les protéines sériques (Δ) induisent un pic rapide et transitoire de la concentration plasmatique en leucine tandis que les caséines

(23)

Ces modulations de la vitesse de vidange gastrique, modulent l’absorption des acides aminés et la rétention protéique postprandiale chez l’Homme (Barbé et al., 2013; Boland et al., 2014; Sah et al., 2016). Chez le sujet âgé sain, les protéines sériques, à vidange gastrique rapide, stimulant la synthèse protéique après le repas alors que les protéines à vidange gastrique lente restent quasiment sans effet (Boirie et al., 1997). La digestibilité du lait mesuré dans l’iléon est d’en moyenne 95%. Cette digestibilité varie en fonction des sources protéiques, elle est de 94% lors de la digestion des caséines chez l’Homme et est plus élevée pour les protéines sériques (environ 97-98% en fonction des modèles animaux) (Boland et al., 2014).

3.2.4.2. Composition en acides aminés

Comme dit précédemment, la leucine joue un rôle important dans la synthèse musculaire. Les protéines sériques sont riches en acides aminés essentiels, en particulier en leucine, ce qui pourrait en partie expliquer (en plus du fait qu’elles soient solubles et plus vite vidangées) leur effet bénéfique sur la synthèse des protéines. La Figure 11 illustre ce phénomène en indiquant l’effet significatif de l’augmentation de la synthèse des protéines musculaires après un repas riche en leucine en comparaison à un repas contrôle (Rieu et al., 2006).

De ce fait, dans le cadre du projet AlimaSSenS, les protéines sériques ont été sélectionnées comme source protéique majeure lors du développement des matrices laitières optimisées pour les séniors, afin d’augmenter leurs performances nutritionnelles par rapport aux produits laitiers traditionnels.

3.3. Le calcium

Le développement de l’ostéoporose est une deuxième pathologie pouvant gravement impacter l’autonomie des personnes âgées. Cette pathologie est souvent liée à une carence en calcium (Theobald, 2005). Il est reconnu qu’un apport suffisant en calcium et en vitamine D permettrait de limiter les phénomènes de fracture lié à l’ostéoporose.

3.3.1. Absorption du calcium

La biodisponibilité du calcium est assez faible, elle se situe entre 25 et 35% en moyenne (Bonjour et al., 2009; Theobald, 2005). L’absorption du calcium se déroule au niveau de l’intestin grêle selon deux voies : la voie paracellulaire et la voie transcellulaire (Kopic and Geibel, 2013) (Figure12).

L’absorption par la voie paracellulaire se réalise par diffusion passive, par des jonctions plus ou moins lâches permettant le passage d’ion en fonction du gradient de concentration ionique (Kopic and Geibel, 2013). Cette voie est peu efficiente mais non saturable et

Figure 11. Synthèse des protéines musculaires après absorption d'un repas normal « Contrôle » et enrichi en leucine « Leucine » chez l'Homme (Rieu et al, 2006) 20 hommes âgées en bonne santé (69,6 ± 0,8 ans) ont participé à l'étude. Les deux repas sont en même quantité de caséines, mais le repas « Leucine » est supplémentaire avec la leucine.

(24)

représente entre 8 et 23% de l’absorption du calcium (McCormick, 2002). Ce type d’absorption est possible sur l’ensemble de l’intestin mais favorisé au niveau de l’iléon (Christakos, 2012).

L’absorption du calcium par la voie transcellulaire est une absorption active nécessitant de l’ATP. Celle-ci a essentiellement lieu au niveau du duodénum mais peut aussi avoir lieu dans le jéjunum. L’absorption active est très efficace mais saturable et dépendante du calcitriol (forme active de la vitamine D) (Kopic and Geibel, 2013). Cette hormone va activer les récepteurs du calcium TRPV6 et TRPV5 au niveau de la membrane de la cellule épithéliale puis, la molécule de liaison, la Calcium Binding Protein (CaBP), va permettre de transporter le calcium au travers la cellule (Figure 12) (Kopic and Geibel, 2013; Pérez et al., 2008). L’activation de la vitamine D est régulée par la calcémie. Chez l’Homme, lorsque la calcémie est sous 1,1mmol/L, la vitamine D est activée, permettant d’augmenter l’absorption du calcium. A l’inverse, si les concentrations dépassent 1,3mmol/L, la vitamine D n’est plus activée et l'absorption du calcium est réduite (Theobald, 2005).

Figure 12. L'absorption du calcium transcellulaire et paracellulaire (Kopic and Geibel, 2013) L’absorption transcellulaire du calcium repose sur l'entrée du calcium à travers le canal TRPV6, puis son transport par le calbindin-D9k, et enfin sa sortie de la cellule via l’échangeur d’ion NCX ou la protéine de transport PMCA. Le calcitriol (forme active de la vitamine D) régule la plupart de ces protéines et la perméabilité des jonctions serrées.

Plusieurs facteurs sont liés à une diminution de l’absorption du calcium lors du vieillissement, mais ils touchent en majorité l’absorption active du calcium.

La toute première cause est la diminution de la concentration en vitamine D dans l’organisme dû à une moindre exposition cutanée à la lumière du soleil, qui est souvent liée à une diminution globale de l'activité physique. De plus, lors du vieillissement, la peau est moins capable de synthétiser de la vitamine D suite à une exposition au soleil (Bonjour et al., 2009; Christakos, 2012). Par conséquent, de par la moindre concentration en vitamine D dans l’organisme, l’absorption active du calcium est diminuée. De plus, lors du vieillissement on observe une résistance au calcitriol, qui entraîne une diminution de l’expression de l’ensemble

(25)

des molécules de transport essentielles à l’absorption du calcium par la voie active (Pérez et al., 2008).

La deuxième cause est l’augmentation du pH gastrique chez certaines personnes âgées. Un pH plus proche de la neutralité seraient moins favorable l’absorption calcique, car le calcium ne pourrait pas être solubilisé dans l’estomac, en amont de l’absorption intestinale. Les études cliniques montrent un lien entre la réduction de la sécrétion d'acide gastrique, une moindre absorption du calcium et/ou le risque accru de fractures osseuses (Recker, 1985; Theobald, 2005).

3.3.2. Enrichissements en calcium

Depuis de nombreuses années, certains aliments sont enrichis en calcium afin d’augmenter la quantité de calcium absorbé par l’organisme. Ces enrichissements sont très multiples et l’absorption du calcium semble pouvoir être modulée en fonction de la source de calcium ajouté dans l’aliment.

Le calcium est un élément uniquement disponible associé à divers autres éléments.En fonction des priorités des industriels et des caractéristiques des aliments, la source de calcium utilisée pour enrichir le produit pourra varier. Le carbonate de calcium est la source de calcium la plus utilisée car elle est économique et riche en calcium (40%) (Preedy, 2015). La biodisponibilité du calcium est d’en moyenne 30% quel que soit la source. Cependant, quelques études ont montré que le bisglycinate de calcium était plus absorbé (44%) que le carbonate de calcium (29%), le tricalcium de phosphate (25 %), et le calcium citrate (24%) (Heaney et al., 1990). Ces études ont l’avantage d’être réalisées sur l’Homme, cependant les variations interindividuelles sont très élevées (la valeur de la fraction absorbée varie entre de 10 et 40% quelques soit les études et les sources de calcium). Le Tableau 2 présente les caractéristiques de différentes sources de calcium.

Tableau 2 Caractéristiques des sources de calcium disponible pour l’enrichissement en calcium dans l’alimentation (Reinwald et al., 2008) Source de calcium Formule chimique Poids moléculaire % de calcium dans la formule Caractéristiq ue sensoriels % de solubilité dans l'eau (Température) Fraction absorbée (Heaney et al., 1990) Carbonate de calcium CaCO3 100,09 40,04 Goût de "savon" 0,005 (25°C) 29 Tricalcium de phosphate Ca3(PO4)2 310,18 39,00 Granuleux dans les liquides 0,002 (25°C) 25 Citrate de calcium Ca3(C6H5O7) 498,44 24,12 Amer 0,1 (25°C) 24 Bisglycinate de calcium Ca(C2H4NO2)2 188,20 21,30 44 Lactate de

calcium Ca(C3H5O3)2 218,22 18,37 Neutre 9 (20°C) 32 Calcium

lactate gluconate

(26)

Malgré les limites de ces études cliniques, il semble que la biodisponibilité de ces sources de calcium soit majoritairement liée à leur variation de solubilité dans l’estomac et l’intestin. Ainsi, il est admis que les sources de calcium se solubilisant entièrement dans l’estomac, puis restant soluble dans le duodénum, seraient absorbées en plus grande quantité par l’organisme.

Le calcium ne semble pas être le seul nutriment capable d’améliorer la minéralisation osseuse. En effet, le calcium étant principalement apporté par les produits laitiers (de 40 à 70% des apports en fonction des pays (U.S. Department of Agriculture/Economic Research Service, 2007; Vavrusova and Skibsted, 2014), il est difficile de connaitre l’effet du calcium seul sur la minéralisation osseuse car les produits laitiers sont aussi riches en protéines. Ces protéines ne sont pas simplement essentielles par la synthèse de la masse musculaire, elles jouent aussi un rôle primordial dans le développement de la masse osseuse (Girgis et al., 2015; Langsetmo et al., 2017; Tagliaferri et al., 2015).

(27)

Objectif et stratégie

Au cours de mon stage, nous souhaitons répondre à la question de recherche suivante : comment la source protéique et la source calcique influencent les cinétiques de libération des acides aminés et du calcium au cours de la digestion sur modèle porcin ?

Pour répondre à cette question, nous nous sommes consacrés à étudier la digestion, sur un modèle porcin, de trois produits laitiers : 2 fromages à base de protéines sériques enrichis en carbonate de calcium ou phosphate de calcium, et un fromage du commerce à base de caséines.

Afin d’évaluer la bioaccessibilité et biodisponibilité des acides aminés et du calcium, les produits laitiers ont été distribués sous formes de repas tests à 16 porcs, équipés d’une canule duodénale ainsi que d’un cathéter placé au niveau de la veine jugulaire. Les prélèvements d’effluents duodénaux et de sang ont été collectés en cinétique jusqu’à 7h après le prise du repas (ces expérimentations ont été conduites avant mon arrivée en stage).

Mon stage a consisté à analyser les échantillons prélevés au cours de l’ensemble de cette étude in vivo : la bioaccessibilité et la biodisponibilité du calcium et des acides aminés ont été évaluées par des dosages de calcium (spectrométrie d'absorption atomique), d’acides aminés (chromatographie ionique) ainsi que par l’analyse des profils peptidiques (électrophorèse SDS-PAGE). Les quantifications dans les effluents duodénaux nous permettent d’estimer la cinétique de bioaccessibilité, tandis que les quantifications dans le plasma nous indiquent leur biodisponibilité. La Figure 13 représente la stratégie expérimentale mise en place pour répondre à notre question de recherche.

3 Produits laitiers en gel Iso-protéique : 24% Iso-calorique ≈ 280 kcal /100g CaCO3 : 500mg Ca Protéines sériques (>92%) Calcium du lait : 700mg Ca Caséine (>95%) Concentré de minéraux du lait : 500mg Ca Protéines sériques (>92%) Mozzarella Pontivy Gel Fondant CaCO

3

Gel Fondant CaP

4*4 Cochettes Opération chirurgicale : canulées et cathétérisés Repas Test Repas test Collecte des effluents Bioaccessibilité et biodisponibilité Suivi calcium soluble et acides aminésduodénaux (Bioaccessibilité) Suivi calcium soluble et acides aminés sanguins (Biodisponibilité) Semaine 1 2 Habituation 3 4 Repas test Collecte du sang

(28)

Matériel et méthodes

1. Les produits laitiers

Les matrices fromagères étudiées (Gel de protéines sériques enrichis en carbonate de calcium (CaCO3) ou calcium de phosphate (CaP) et Mozzarella) ont une composition identique

(24% de protéines, 20% de matière grasse) mais diffèrent par leur source protéique (caséine ou protéine sérique) et leur enrichissement en calcium.

La Mozzarella est un fromage traditionnel, à base de caséines, pouvant se trouver dans le commerce (fourni par Lactalis et fabriquée à Pontivy (56)).

Les gels de protéines sériques sont préparés au sein du laboratoire (STLO, INRA Agrocampus). Ils contiennent 20% de matière grasse, 24% de protéine sérique (Prolacta® 95, Lactalis Ingrédients, Bourgbarré, France), 0,6% (w/w) de sel, 0,7% de calcium (CaCO3-Quimdis

ou Concentré de minéraux du lait, Calciane®, Lactalis), et 1,5% de Glucono-delta-lactone (GDL) (Roquette, Lestrem, France). La GDL permet d’acidifier les produits par une acidification lente. La matière grasse est apportée par de la crème fraîche fleurette commerciale (Casino, Saint Etienne, France) contenant 30% de matière grasse. Après avoir mélangé tous les ingrédients pendant 1h à 37°C et 300rmp dans un thermomix (TM5, Vorwerk, France), la préparation liquide est transférée dans des boyaux synthétiques de 36cm de long (Darmini Darmex Casing caliber 28, MCM Casing, Lucenay, France). Puis les boyaux synthétiques sont immergés dans un bain-marie à 75°C pendant 20 minutes afin de former des gels fromagers par thermo-coagulation.

2. Repas test et prélèvement des échantillons 2.1. Les animaux

L’étude a été menée sur 16 cochettes (jeune truie n’ayant jamais mis bas) en croissance Large White × Land Race × Piétrain, d’environ 3 mois et 30-35kg de poids vif. Elle a été réalisée en 4 séries de 4 cochettes. Une série se déroulait sur un mois. Sur les 16 cochettes, seules 12 ont été étudiées pour l’analyse des échantillons. En effet, 4 animaux ont consommé moins de 50% des repas test, et 2 animaux ont eu des soucis de santé suite à l’opération chirurgicale.

Dans un premier temps, les animaux ont subi une intervention chirurgicale, dont la pose d’une canule duodénale et d’un cathéter sanguin au niveau d’une ramification de la veine jugulaire externe. La canule et le cathéter permettent de collecter des effluents duodénaux et du sang à tout moment.

Une semaine après l’opération chirurgicale les produits laitiers étudiés ont été présentés aux animaux, dans l’objectif de les habituer à ces nouveaux aliments et afin d’éviter les refus le jour des repas test.

Durant les deux semaines de convalescence suite à l’opération et entre les repas test les animaux ont été nourris avec un aliment de croissance COOPERL ARC ATLANTIQUE®. La prise alimentaire se résumait à une prise de 800g le soir. Lors du repas test, un complément d’environ 500g a été distribué après le dernier prélèvement. Pour une portion de 1kg,

(29)

les animaux ont été mis à jeun la veille au soir et l’eau était coupée 1h avant l’ingestion du repas test.

Les repas test ont été réalisés deux semaines après l’opération des animaux. Une portion de 545g de produits laitiers a été présentée aux animaux. Cette portion représentait un apport calorique de 1526kcal, un apport protéique de 131g et un apport calcique de 3,8g. Les produits ayant une durée de conservation d’un mois, un nouveau lot a été fabriqué pour chaque série de 4 cochettes. Les repas ont été distribués aux animaux en suivant un carré latin. Le repas devait être mangé en moins de 20min. Si moins de 50% du repas était ingéré au bout des 20 min, la cochette était exclue de l’étude.

2.2. Prélèvement des échantillons

Les effluents duodénaux ont été collectés lors de la première semaine de repas test, et les prélèvements sanguins ont été réalisés lors de la deuxième semaine de repas test (Figure 13).

Les effluents duodénaux ont été collectés 30min avant le repas, lors de la mise à disposition du repas (temps 0) et puis en cinétique (10min, 20min, 50min, 1h45, 2h45, 3h45, 5h15 et 6h45) après l’ingestion du repas. Les échantillons des effluents duodénaux ont aussi été aliquotés en trois tubes : une partie des échantillons a été conservée brute, une deuxième partie a été ultrafiltrée à 10KDa (Vivaspin® 20, 10KDa MWCO Polyethersulfone) et une dernière partie est conservée avec des inhibiteurs d’enzyme (Pepstatine A P5318 [0,5 mg/mL] à raison de 10µL/mL et Pefabloc® SC 76307 [0,1 M] à raison de 50µL pour 1mL, l’ensemble des inhibiteurs d’enzymes sont fournis par Sigma Aldrich).

Les prélèvements sanguins ont eu lieu 30min avant le repas puis 7min, 15min, 30min, 1h, 2h, 3h, 4h, 5h30 et 7h après de l’ingestion du repas test. A chaque temps, 3mL de sang sont prélevés dans des tubes contenant de l’héparine (Hép-Li, SARSTEDT, Allemagne) comme anticoagulant (soit 2mL de plasma après centrifugation). Les plasmas obtenus sont conservés à -20°C.

3. Analyse des prélèvements 3.1. Dosage du calcium

Le dosage du calcium est réalisé par spectrométrie d’absorption atomique. Ce dosage nous permet de connaitre la concentration plasmatique de calcium en période postprandiale ainsi que la quantité de calcium sous forme soluble (<10kDa) et au total dans les effluents, après un repas test.

1.1.1. Principe de la Spectroscopie d’Absorption Atomique

La spectroscopie d'absorption atomiqueest une technique décrite pour la 1ère fois par

Walsh (1955), qui étudie les absorptions de lumière par l'atome libre. C’est une des principales techniques mettant en jeu la spectroscopie atomique dans le domaine UV-visible utilisée en analyse chimique. Elle est basée sur la théorie de la quantification de l’énergie de l’atome. Celui-ci voit qu’une population d’atomes à l’état E0 peut absorber des photons d’énergie hν

pour réaliser un passage d'un de ses électrons externes d'une orbite électronique à une autre. Les photons absorbés étant caractéristiques des éléments absorbants, une estimation du nombre de photons absorbés peut être reliée à la concentration de l’élément à doser selon la loi de répartition de Boltzmann (Jacques et al., 1997).

Références

Documents relatifs

320 millions de litres de lait bio, 14 000 tonnes de beurre bio, 80 000 tonnes de produits laitiers frais (yaourts, desserts lactés…) et 34 000 tonnes de fromages bio ont été

Il passe en revue les évolutions prévues en termes de prix, de production, de consommation et d’échanges pour le lait, les produits laitiers frais, le beurre, le

Certaines bactéries saprophytes sont régulièrement rencontrées dans le lait et constituent la flore spécifique ; ce sont les bactéries lactiques dont certaines espèces sont

Il passe en revue les évolutions prévues en termes de prix, de production, de consommation et d’échanges pour le lait, les produits laitiers frais, le beurre, le fromage, le

Cow-buffalo's milk represents 66 % of production, cow's milk 32 % and small ruminants milk 2 X The General Society of Animal intends to develop collection, processing

Les produits de la Fromagerie Guilloteau se sont distingués ces dernières années : en 2019 avec la médaille de bronze pour le Pavé d’Affinois au Concours Général Agricole et plus

Au contraire, dans l'étude américaine des professionnels de la santé, aucune association entre lait consommé au cours de l'adolescence et fracture de hanche n'a été détectée chez

Par ailleurs, deux souches de bactéries lactiques, Lactobacillus fermentum et Weissella cibaria, isolées des échantillons de lait fermenté du Niger et identifiées au