J.P. MELCION
INRA Laboratoire de
Technologie Appliquée
à laNutrition,
BP1627,
44316 Nantes Cedex 03
Emploi des liants
pour le pressage des aliments des animaux : aspects
technologiques et
nutritionnels
Les adjuvants de pressage sont utilisables pour l’agglomération des aliments,
enraison de leurs propriétés liantes, assurant la cohésion du
granulé, et lubrifiantes, réduisant la consommation d’énergie électrique
de la presse. Ils n’ont généralement pas de valeur nutritionnelle propre, mais peuvent modifier les paramètres de la digestion.
Le pressage dans la fabrication d’un ali- ment
composé
est uneopération
dont lerésultat est encore aléatoire : le mode d’action des forces
qui régissent
l’association des par- ticules entre elles est engrande partie
incon-nu. Produire des
granulés
de cohésion suffi- sante à bas coût demande unéquilibre
entreles matières
premières utilisées,
les caracté-ristiques
desmatériels,
leur mise en oeuvreopératoire,
et l’additionpossible d’adjuvants
connus pour leurs
propriétés
liantes et/oulubrifiantes
(Olentine 1980).
Ces
propriétés
liantes / lubrifiantes peu- ventprovenir
des matièrespremières
utili-sées
principalement
en raison de leur contri-bution nutritionnelle -
mélasses,
amidonsgélatinisés, glycérides
du suif ou sels d’acides gras - ou bien d’ additifsparticuliers,
lesadjuvants
de pressage,qui
sontincorporés prioritairement
pour leurspropriétés
lianteset/ou
lubrifiantes,
et secondairement pour leur teneur en éléments nutritifs et les modi- fications nutritionnellesqu’ils peuvent
indui-re.
Il nous faut à cet
égard
établir une distinc-tion entre
pouvoir
liant etpouvoir
lubrifiant.Un « lubrifiant » facilite le
glissement
desparticules
entre elles et influe directementsur le rendement de
l’agglomération,
alorsqu’un
« liant » tendplutôt
à cimenter les par-ticules,
donc à favoriser la cohésion del’ag- gloméré.
Enpratique,
le terme « liant »couvre ces deux
aspects parfois opposés.
1 / Origines et propriétés des
--
adjuvants de pressage
Les
adjuvants
de pressagesont,
pour laplupart,
soit dessous-produits d’origine industrielle,
soit desproduits
d’extractionRésumé
-Les liants (ou adjuvants de pressage) sont des additifs
généralement
dépourvusde valeur alimentaire qui sont
incorporés
à faible taux (0,5 à 2,5 %) dans les ali- ments composés dans le seul butd’augmenter
le rendement des presses et la cohésion des granulés. Ces substances peuvent être d’origine organique ou miné-rale. Parmi les substances organiques, les
lignosulfites
sont des sous-produits del’industrie papetière. Les substances minérales
appartiennent
essentiellement à la famille des argiles. D’autres additifs tels que lespolysaccharides
peuvent êtreutilisés dans l’élaboration des aliments pour les animaux aquatiques.
Il existe des tests de laboratoire susceptibles d’évaluer
l’aptitude
liante ou lubri-fiante de ces adjuvants de pressage, en fonction principalement de l’humidité et du type de matière
première.
Les essais à échellepilote
montrentgénéralement
une influence positive de l’addition des lignosulfites sur les
propriétés
méca- niques des agglomérés et une tendance à une réduction de l’énergie consomméepar la presse dans le cas de mélanges riches en céréales (et en amidon). L’effet
des substances minérales est assez variable en
regard
des conditions de pressage.A échelle industrielle, les
petites
différences observées peuvent être masquéespar les variations aléatoires liées aux essais en usine.
Les adjuvants de pressage n’ont pas de valeur nutritionnelle en soi. Les lignosul-
fites et autres composés
organiques
peuvent faire exception en raison de leur teneur - bien que limitée - en sucres simples. Les liants minéraux sont considérés usuellement comme des diluants de la ration. Les effets indirects constatés sur l’indice de consommation peuvent être dûs à uneaugmentation
de dureté desgranulés.
Un effet de tannage desprotéines
de l’aliment estpossible
avec leslignosulfites. Cependant,
la structure et le comportement physique des argiles (bentonite,sépiolite)
peuvent expliquer certains effets sur la digestibilité del’énergie
chez le monogastrique, par une modification de la rétention d’eau et de la durée de transit dans l’intestin de l’animal, et sur l’utilisation de l’azote chez le ruminant.divers,
que l’onpeut
diviser un peu arbitrai- rement en deux groupesprincipaux :
les sub-stances
d’origine
minérale d’unepart, d’origi-
ne
organique
d’autrepart.
l.i / Adjuvants d’origine
minérale
a /
Argiles
à structure lamellaireLes
argiles
sont des silicates d’aluminiumhydratés, comprenant
des atomes de silice et d’aluminium enmajeure partie, disposés
selon une structure en feuillets constitués de mailles cristallines
(phyllosilicates).
Par suitedes substitutions
ioniques
dans la maille duminéral, chaque grain d’argile
estchargé
d’électricité
négative
sur sa surface et lesfeuillets
qui
lecomposent
sontplus
ou moinsreliés fortement les uns aux autres.
Chaque grain d’argile
estenveloppé
d’un film d’eau denature
spéciale (eau adsorbée) et,
en fonctiondes cations
associés,
de l’eau intersticiellepeut s’ajouter
à laprécédente
et venir s’insé-rer entre les feuillets. Cette structure
suggère
un effet lubrifiant par le
glissement
desfeuillets l’un sur l’autre.
Lorsque
la teneur eneau
diminue,
lesparticules
serapprochent,
chassant l’eau intersticielle
puis
l’eau adsor- bée pour établir desponts
solides.Ainsi,
enprésence
d’eau ou de vapeur, lesargiles
seraient
capables
d’unepart
deprévenir
leblocage
des presses, et d’autrepart
de cimen-ter les
particules après
refroidissement(et séchage)
par un effet de rétraction des feuillets. Ontrouve,
dans ce groupe, des pro- duitspulvérulents (tableau 1),
dont la cou-leur va du
gris
aublanc,
et dont lesappella-
tions commerciales ne recouvrent pas
toujours
les nomsminéralogiques
véritables.La clé de l’utilisation des
argiles
commeadjuvants
est laprésence
dequantités
d’eauadéquates
dans lemélange argile-aliment.
L’agglomération (ou
pressage ou encore « gra- nulation»)
intervient à la fin de la fabrication d’un alimentcomposé.
Elle consiste à com-pacter
lemélange
dans une presse(figure 1), après généralement injection
de vapeur vive dans la masse à l’aide d’un conditionneur(David
et Lefumeux1973).
Comme lesargiles
n’absorbent pas l’eau liée
qui
se trouve dansl’aliment,
celle-ci estapportée
par la conden- sation de la vapeur dans leconditionneur,
oupar
apport
direct en amont de la presse dans lamélangeuse,
ou par la mélasse. Une bassepression
de vapeur estgénéralement
recom-mandée,
de manière à favoriser une conden-sation
plus importante
dans le conditionneur.En se fondant sur les
pratiques cimentières,
l’idéal seraitd’ajouter l’argile après
humidifi-cation de l’aliment
qui
adsorbe l’eau etagit
comme un concurrent. Une filière dite « peu
comprimante
», dont lerapport longueur
decanal / diamètre de canal est inférieur à 10 est
également
recommandée enprésence
d’ar-gile,
cequi permet
d’utiliserdavantage
devapeur sans
bloquer
le fonctionnement de la presse. Les tauxd’incorporation
sontgénéra-
lement de 1 à 2 %.
Bentonites
Les bentonites
(Fort-Benton, USA)
sontparmi
lespremiers
liants apparus en alimen-tation animale. Les bentonites contiennent
plus
ou moins de montmorillonite(Montmo- rillon, Vienne, France), qui
est uneargile
à3 feuillets associée à des
composés
colloïdaux.Plus la teneur en montmorillonite est
impor- tante, plus
élevées sont lespropriétés
lubri-fiantes. Les feuillets sont liés par des
ponts ioniques
dûs à laprésence
de cations. La liai-son est si faible
qu’elle
se brise sous lasimple
action de l’eau
(Caillère
et al1982).
La capa- citéd’échange
est élevée et décroît dans l’ordre suivant(Ça&dquo;, Mg**, K’, H’, Na ’ ).
On utilise le terme bentonite de sodium ou bento- nite de calcium en fonction de la nature de l’ionéchangeable.
La bentonite de sodium agénéralement
uneplus grande capacité
à selier à l’eau que la bentonite de calcium. A l’état pur, elle
peut
absorber au moins 5 foissa masse d’eau.
Lorsqu’elle
est totalementsaturée,
elle expanse : ungel
estobtenu, qui perd
saplasticité
et. sedisperse
sans formerde
pâte
liante. La bentonite de calcium par contre n’absorbequ’une
à une fois et demie samasse d’eau
(Olentine 1980).
Kaolinites
Les kaolinites sont
également
desargiles
en feuillets. Leur structure
(2 feuillets)
et leurcomposition globale
sont semblables à celle des bentonites(tableau 1),
mais lesfeuillets sont liés étroitement par des liaisons
hydrogène -
d’où unecapacité d’échange
trèsfaible
(tableau 2) qui
les rendentincapables
de se
gonfler
dans l’eau et de donner naissan-ce à des
gels.
Une faible surfacespécifique
etl’absence de
charges
entraînent une bassecapacité d’échange.
D’autresargiles
comme lamuscovite ou
l’attapulgite peuvent également
se trouver associées à la
kaolinite,
avec descomportements
similaires.Vermiculites
La vermiculite est une roche formée de couches micacées
séparées
par deux molé- cules d’eau contenant des ionshydratés, qui
assurent de faibles forces de liaison entre feuillets. La
capacité d’échange
et lesproprié-
tés
d’absorption
sontimportantes
etpeuvent
être accrues par
expansion
à la chaleur à800 &dquo;C. Ces
argiles peuvent
aussi être utili- sées pour absorber desliquides
tels que lamélasse,
le chlorure de choline ou l’urée.b /
Argiles
à structure tubulaireSépiolite
La
sépiolite appartient
à une famille d’ar-giles (Alvarez
1984) dont les feuillets sont orientés de manière à modifier le faciès lamellaireclassique
en lui faisantprendre
une structure tubulaire
(«
minéral àpseudo-
feuillets
»).
La structure d’ensemble est alorscomparable
à unebrique
creuse(Wolter
et al1990).
La section de cesmicro-canaux,
danslesquels
desliquides
et des gaz comme l’eauou l’ammoniac
peuvent s’insérer,
est de0,38
nm’. Ces canaux sont àl’origine
de lasurface
spécifique
élevée(plus
de 300m z /g)
etde la
capacité d’absorption
(1 à1,5
fois sonpoids d’eau)
du minéral. Cetteargile
est richeen
magnésium (tableau 1)
car il y aremplace-
ment
partiel
de l’aluminium par lemagné-
sium. Sa
capacité d’échange ionique
est faible(tableau 2).
Par ses mécanismes
d’action,
lasépiolite peut
être classée dans le même grouped’adju-
Les
argiles
ont unestructure en
feuillets qui peuvent glisser
l’un sur l’autre
lorsque
la teneuren eau est
suffisante.
vants que les autres
argiles :
il a été démon-tré
qu’une
humidification correcte de la sur-face en vue de
l’agglomération peut
êtreapportée
par0,5
à2,0 %
d’eau. Sonpouvoir
absorbantpeut
être mis àprofit
dans desrations contenant des taux élevés de matières grasses
(Lopez
et Alvarez1991)
pour en accroître la durabilité.c /
Aluminate
de calciumL’aluminate de calcium est le résultat de la fusion de minerai d’aluminium
mélangé
à ducarbonate de calcium à très haute
températu-
re
(>
1 500°C) produit
par l’industrie cimen- tière.Après
unbroyage
très fin(100 %
< 100
um),
il seprésente
comme unepoudre
foncée et de masse
volumique
élevée(tableau 2) qui
contient environ 38 %d’équi-
valent CaO. La cristallisation du
produit après hydratation (40
% en masse par rap-port
auproduit sec)
semble être la clé ducomportement
liant. La chaleur estgénérale-
ment un
catalyseur
de la réaction de cristalli-sation, qui peut
s’effectuer de manière lente et différéeaprès incorporation
dans un ali-ment
aggloméré. L’enrobage
desparticules
par la matière grasse dans certains aliments exerce,
semble-t-il,
un effet contraire. Le tauxd’incorporation
recommandé est de0,6
à1,0 %.
1.
2 / Adjuvants d’origine organique
a /
Lignosulfites
Les
lignosulfites (ou lignosulfonates
pour lesanglo-saxons)
constituent un groupe desubstances dérivées de l’industrie
papetière (Dumée
et Michelin1970).
Les copeaux de bois sont traités en autoclave sous 8 à 9 bar depression
à hautetempérature (150
à 162° C)
par une solution aqueuse de bisulfite d’ammonium ou de calcium contenant de l’an-hydride
sulfureux libre.Pratiquement
tousles
composants ligneux
du bois sont solubili-sés pour ne laisser subsister que la cellulose.
Il y a
également hydrolyse partielle
des hémi-celluloses et solubilisation des
composés
rési-neux du bois. La solution est
séparée
par pressageet, après
neutralisation par la soudeou la
magnésie,
la «liqueur
» obtenuequi
contient 50 à 55 de matière sèche est alors concentrée et séchée. Elle se
présente
com- mercialement sous forme depoudre
brunetrès
hygroscopique.
Selon leprocédé
et letype
de boistraité,
la matière sèche contient 40 à 53 % delignine,
23 à 41 %d’oligosaccha- rides, principalement
des hexoses(fermentes- cibles)
et despentoses (non fermentescibles),
2 à 13 % de matières minérales
(Hogan 1974,
Kivimâe 1978 : tableau
3).
La teneur ensoufre varie de 2 à 5 %.
La structure moléculaire de la
lignine
sul-fonée n’est pas bien connue. La
présence
d’union sulfonate
chargé négativement près
de la surface de la moléculepeut expliquer
ses pro-priétés hydrophiles
et tensio-actives(Chan
et al1976).
Dans lesaliments,
cespropriétés expliquent
l’effet lubrifiant deslignosulfites.
Leur
viscosité,
associée à celle descomposés glucidiques,
accroît les forces de liaison entre lesparticules
d’aliment. Le tauxd’incorpora-
tion recommandé est de 1 à
2,5
%.De
plus,
lesgroupements
aminés des pro- téines de l’alimentpeuvent
se combiner auxgroupements
sulfonates par une véritableréaction de
tannage.
Un tiers de ces liaisons seraient irréversibles selon Gustavson(1956), principalement
avec leslignines
sulfonées de hautpoids
moléculaire.b / Extraits d’hémicellulose
Les « extraits d’hémicellulose » sont des
produits
issus de laproduction
des panneaux departicules
debois, disponibles
essentielle- ment sur le marché nord-américain. Les copeaux de bois sont dilacérés par action de la vapeur à hautespression
ettempérature, puis
lavés à l’eau. Lesproduits
solublesentraînés par les eaux de ruissellement sont
recueillis,
concentrés et séchés. L’extrait seprésente
sous forme d’unepoudre
brun clairqui
contient 80 à 84 % depolysaccharides
etpeu de
lignine (tableau 3).
Leur viscosité enprésence
d’eaupeut expliquer
leur effet liant dans un aliment.c / Celluloses substituées
Les éthers de la cellulose
(carboxy-méthyl-
cellulose par
exemple),
courammentemployés
en industrie alimentaire comme
agents épais-
sissants ou
gélifiant.s,
ont étéadaptés
à l’ali-mentation animale. Plus le
degré
d’éthérifica- tion est élevé(0,2
à0,8), plus
leur affinité pour l’eau est élevée etplus
basse est leurviscosité en
phase hydratée.
Ils sontcapables
d’absorber l’eau en
proportions
très élevéesjusqu’à
se solubiliser. Ceciexplique
leurs pro-priétés filmogènes
et lubrifiantes enprésence
d’uneproportion
d’eau suffisanteajoutée
lors du conditionnement. Le tauxd’incorporation
recommandé est bas
(0,1 %)
enpartie
pour limiter les inconvénientsphysiologiques.
Uneffet inhibiteur sur
l’hydrolyse
par lapepsine
de
protéines
pures a été mis en évidence(Valaris
etHarper 1973).
d / Gommes
végétales
Les « gommes
» végétales
sont despolysac-
charides de haut
poids
moléculaire extraitsd’algues (alginates, caraghénanes),
ou degraines
delégumineuses (guar, caroube).
Elles sont traitées
chimiquement
pour accroître leur affinité pour l’eau ainsi que leurspouvoirs gélifiant
etépaississant.
Enraison de leur
prix
et de leur relative ineffica- cité en milieu peuhydraté,
elles sont utiliséesdavantage
en milieu humide (40-45 %d’eau)
pour des
applications particulières.
Leuremploi
estbénéfique
dans les aliments pourpoissons
et crustacés en vue d’accroître leur stabilité à l’eau et de réduire lapollution
desbassins
d’élevage (Storebakken 1985, Meyers 1991).
Ellespeuvent également
se trouversur le marché en association avec d’autres
composés (pâtes
de neutralisation issues del’huilerie).
e /
Mélanges
Plusieurs
types
demélanges, qui
visent àcombiner les
propriétés
desadjuvants simples
décritsci-dessus,
sont commercialiséscomme liants ou lubrifiants. L’un des
plus
connus est une association de
carboxy- méthyl-cellulose (CMC), d’hydrolysats
pro-téiques
et d’extraits de sassafras(lauracée
de Chine etd’Amérique
duNord).
Le taux d’in-corporation
dumélange
estplus
élevé que celui de la CMC pure(1,25-2,5
%). Les pro-priétés filmogène
et lubrifiante de la CMC sont associées à l’odeuragréable
depetites quantités
de sassafras. L’eau et latempératu-
re
sont,
làaussi,
essentielles à unepleine
effi-cacité du
mélange,
mais cette efficacitédécroît avec des aliments riches en fibres ou
contenant des
proportions
élevées deliquides (mélasse,
matièresgrasses)
selon Olentine(1980).
2 / Aspects technologiques
2.i 1 Evaluation du
comportement liant et
lubrifiant
a / Méthode par
compaction
L’aptitude
d’une substance à cimenter lesparticules peut
s’évaluerindépendamment
dela variabilité des conditions propres du pres- sage :
substrat, type
defilière,
vapeurajou- tée,
vitesse derotation,
etc. Dans leprincipe,
le liant est
ajouté
à unmélange
de sable etd’eau
(10 %), qui
estcompacté
sous une pres- sion connue dans un moulecylindrique.
Après
extraction de la carotte ainsi formée et stabilisation à 25 &dquo;Cpendant
24heures,
lacohésion est évaluée par la résistance à l’écrasement.
Un
dispositif
dérivé (Le Deschault de Mon- redon 1990) consiste àcomprimer
de la mêmemanière le
mélange
additif-farine entre deuxpoinçons (figure 2a)
à unepression
fixée(200 MPa)
et àenregistrer
la courbe force-déplacement.
Lecomportement
de la farine(pouvoir lubrifiant)
est caractérisé par un seuil deplasticité repéré
sur la courbe et par le travail decompression (figure 2b).
Le seuilde
plasticité représente
lapression théorique requise
pour passer de l’état divisé à un état cohérent semi-continu. La massevolumique,
le module d’élasticité
apparent
et la résistan-ce à l’écrasement sont mesurés sur la carotte obtenue
(pouvoir liant).
La valeurprédictive
des critères mesurés à l’aide de cette méthode
a été validée par
comparaison
avec le pressa- ge à échellepilote
(Le Deschault de Monre- don et al1993). L’énergie spécifique
absorbéepar la presse est corrélée au travail de com-
pression,
sauf avec des aliments riches en fibresqui
sontplus élastiques,
et la duretédes
granulés
avec la résistance à l’écrasement des carottes. Unexemple
de relation sur des aliments contenant différents taux desépioli-
te et de matière grasse est donné dans la
figure
3.Les
lignosulfites
sont les
adjuvants d’origine
organique
lesplus
utilisés. Ils contiennent notamment de la
lignine sulfonée.
La
présence
d’union
sulfonate
ensurface
de cettemolécule
peut expliquer
sespropriétés hydrophiles
ettensio-actives.
b / Méthode par extrusion
Un
dispositif
deprincipe
différent a étéconstruit
(Melcion 1974)
etadapté
à l’étudede l’efficacité des liants
(Melcion
et Delort- Laval1977).
Entre les deuxplateaux
d’unepresse
hydraulique
delaboratoire,
undisposi-
tif d’extrusion a été mis en
place.
Il se compo-se d’un
cylindre percé
à sapartie
inférieured’un orifice de dimensions données
(la
« filiè-re
»).
A travers cet orifice s’écoule lapoudre comprimée
par unpiston
mobile dans l’axe ducylindre.
Un manchon chauffant thermo-régulé peut
maintenir lecylindre
à une tem-pérature
fixée. Ledéplacement
dupiston
ainsi que la force
appliquée
sontenregistrés
par l’intermédiaire de
capteurs
et servent à définir un travailspécifique
d’extrusion(pou-
voir
lubrifiant) représenté
par l’aire sous la courbeforce-déplacement.
La farinepeut
être traitée à la vapeur ou non. La dureté des gra- nulés obtenus à la sortie de lafilière,
iden-tiques d’aspect
à ceux élaborés à l’aide d’une presseclassique, peut
être mesurée à l’issue d’unepériode
de stabilisation àtempérature
et
hygrométrie
contrôlée(pouvoir liant).
A titre
d’exemple,
ce test apermis
demettre en évidence un effet lubrifiant du
lignosulfite
et de la kaolinite dans des matièrespremières
pures riches en amidontelles que
l’orge,
le maïs ou le son. Cet effetest réduit avec des matières
premières
cellu-losiques
comme la farine de luzerne etpeut
êtrenégatif
avec des tourteaux(soja),
en par- ticulier avec la kaolinite(figure 4).
L’effetlubrifiant est
rapidement tamponné
enpré-
sence d’eau
ajoutée
aumélange.
2.
2 / Evaluation à échelle pilote
et industrielle
a / Précautions
méthodologiques
Les lubrifiants sont utilisés dans le but de réduire la consommation
d’énergie
et d’ac-croître,
sipossible,
le débit horaire.L’opéra-
teur doit mesurer ces deux critères avec la meilleure
précision possible.
Enparticulier,
l’intensité
électrique
absorbée par la presse doit êtreenregistrée
afin d’obtenir des infor- mationssupplémentaires
sur larégularité
dufonctionnement de la machine durant l’essai.
De
plus,
il est nécessaire deprendre
en comp- te lesparticules
finesséparées
partamisage
à la sortie du refroidisseur et habituellement
recyclées
sur la presse. Bien des informationsdisponibles
sont rendues inutilisables(ou partiales)
en raison de l’absence de certains de ces critères.Les liants sont utilisés dans le but d’ac- croître la cohésion du
granulé,
c’est-à-dire sadureté et sa durabilité. La durabilité semble être le
principal
facteur à mesurer : un indus- triel souhaite obtenir desgranulés qui
ne sebrisent pas lors des
manutentions,
du trans-port
et de la distribution à la ferme. La méthode laplus
connue est celle dite des« caissons tournants
» qui
faitl’objet
d’unenorme américaine ASAE S358
(Pfost
et Allen1962),
ainsi que la méthodepneumatique développée
par la firme suédoise Holmen(Payne 1979).
Les termes durabilité ou friabi- litépeuvent
être utilisés indifféremment : lafriabilité, qui
est lepourcentage
departicules
arrachées à l’aliment
après
abrasion estégale
à
(100 - durabilité).
Il fautcependant prêter
attention à la manière
d’exprimer
les résul- tatsqui peut
conduire à uneinterprétation parfois
«optimiste
» de l’addition d’un liant :une réduction de friabilité de 10 à 5 %
équi-
vaut à un accroissement de durabilité de 90 à 95 %. Il s’ensuit que l’efficacité relative obtenue
Le
lignosulfite
etla kaolinite ont un
effet lubrifiant
surtout dans les matières
premières
richesen amidon comme
l’orge
ou le maïs.est de 50 % dans le
premier
cas et seulementde
5,6
% dans le second. Ladureté,
évaluéepar la résistance à l’écrasement des
granulés (Delort-Laval
et Drevet1970)
a une connota- tionquelque
peu différente et se relie davan-tage
aucomportement
alimentaire de l’ani- mal(durée
de repas ou demastication, prise d’aliment).
La
production
degranulés
est connue pourdépendre
de nombreuxparamètres :
débitd’alimentation de la presse,
quantité
devapeur
incorporée, type
de matièrepremière, géométrie
et usure de la filière. En raison des interrelations entre cesparamètres,
il semblenécessaire de
procéder
à unecomparaison
avec ou sans liants dans les mêmes condi- tions de fonctionnement dans un
premier temps,
avantd’optimiser
les résultats pourune substance donnée dans un second
temps.
Il est connu par
exemple qu’un
débit d’ali-mentation
plus élevé,
donc untemps
deséjour plus
faible dans lafilière,
conduit àune détérioration de la
qualité
desgranulés :
l’influence propre du débit
peut
alors interfé-rer avec celle du liant que l’on souhaite mettre en évidence. Les
performances
dumatériel aux
plans technique
etéconomique (production spécifique
et débithoraire)
seraient à établir sur la base d’une durabilité de
référence,
96 % parexemple
selon Friedrich(1983).
Deplus chaque
test en atelierpilote
ou en usine devrait être effectué en double ou en
triple.
b / Tendances
technologiques
- essais au stade
pilote :
Les études
complètes
évaluant l’efficacitétechnologique
des liants ne sont pas nom- breuses. Laplupart
des auteurs reconnais-sent
cependant
auxlignosulfites
une influen-ce favorable
lorsque
ceux-ci sontajoutés
à desmélanges
riches en matièrespremières
amy-lacées,
à la fois sur la durabilité et sur la consommationd’énergie,
avec une interactionpositive
entre le taux de vapeurincorporée
etle taux de liant
(Friedrich
et Robohm1970, Payne 1979)
surtout en cequi
concernel’énergie spécifique.
Cette influencedisparaît
en
présence
de sucres ou de lait enpoudre
dans les aliments pour
porcelets (Bruggeman
et al
1964),
ou si laproportion
de tourteau desoja
parrapport
aux céréales et au manioc(Pfost 1964)
croît. Leur effet enprésence
dematière grasse est
plus
incertain. Dans les essais conduits à débitconstant,
et pour des tauxd’incorporation
de 1 à 2%,
la réductiond’énergie spécifique
estplus faible,
inférieureà 10
%,
et souventmasquée
par l’addition d’eau ou de vapeur. Lelignosulfite
s’avèresouvent être
davantage
un liantqu’un
lubri-fiant. La kaolinite et une
carboxy-méthyl-cel-
lulose dans un aliment pour
lapin plus
richeen
fibres,
n’ont pas entraîné d’effetpratique significatif
sur la consommationd’énergie spécifique. Exprimée
en termes defriabilité,
la cohésion de l’aliment a étécependant
réduite de
façon plus marquée (Melcion
etDelort-Laval
1977).
D’autrepart,
iln’y
agénéralement
pas deproportionnalité
appa- rente entre lepourcentage
de liantajouté, quel qu’il soit,
et le résultattechnologique.
En vue d’éviter la variabilité due à la com-
plexité
desmélanges,
kaolinite etlignosulfite
ont été
ajoutés
à des matièrespremières
pures
agglomérées
à sec(sans vapeur).
Parrapport
aux témoins sansadjuvants,
laconsommation
d’énergie
est réduite avec lescéréales et le son de
blé, identique
avec lafarine de luzerne et accrue avec le tourteau de
soja quels
que soient lesadjuvants
testés.La friabilité des
granulés
estréduite,
davan-tage
avec lelignosulfite qu’avec
lakaolinite,
sauf pour les matièrespremières (luzerne, soja)
dont lesproduits
sontdéjà
très peu friables(Melcion
etDelort-Laval 1977).
En raison de leur
capacité d’absorption
éle-vée des
liquides,
certainesargiles (bentonite, sépiolite) peuvent
être utilisées comme sup-port d’incorporation
des matières grasses en limitant laperte
de cohésion dugranulé (Lopez
et Alvarez1991).
A débit d’alimenta- tion constant sur des aliments pour volaille contenant 3 ou 6 % de matière grasse(suif),
on
note,
sur ladureté,
un effetsignificatif
del’addition de 2 ou 4 % de
sépiolite (+
28 et+ 74 % en moyenne
respectivement
en valeurrelative par
rapport
aux témoins dont la cohésion est bien connue pour êtremédiocre) (figure
3déjà citée).
Parcontre,
la durabilitédes aliments est peu modifiée. Le
prémélange
de la
graisse
àl’argile
avant del’ajouter
àl’aliment
n’apporte
pasd’avantage supplé-
mentaire.
D’une
façon générale,
les résultats obtenus sont encorefragmentaires
et demandentd’autres recherches.
- essais au stade industriel:
A l’échelle
industrielle,
avec différentstypes d’aliments, plus
le niveaud’énergie
consommée est bas
(la production spécifique
de la presse
exprimée
enkg/kWh
estplus
éle-vée),
etplus
l’efficacité relative de l’additiond’adjuvants paraît
faible. C’est le cas avecl’aluminate de calcium
(Nivet 1993,
tableau4).
D’un autre
coté,
les différences constatéesen milieu industriel sont souvent limitées
(tableau 5)
etpeuvent
êtremasquées
par des événements aléatoires difficiles à éviter pen- dant les essais en usine.3 / Efficacité zootechnique des adjuvants de pressage
Les
adjuvants
minéraux nepossèdent
aucune valeur alimentaire par eux-mêmes.
Les
lignosulfites, qui
contiennent 11 à 35 % deglucides, peuvent
avoir une certaine valeurénergétique.
La variabilité de laréponse
animale décrite dans la littérature est reliée autype d’animal,
à lacomposition
de l’aliment et au
type d’adjuvant,
ycompris
dans une même famille deproduits,
et à sespropriétés physiques
face à la mise en ceuvretechnologique.
Ces dernières informations sont d’ailleurs souvent absentes.3.
1 / Chez le ruminant
La bentonite a été utilisée chez le ruminant
comme un moyen de contrôle du
pH
dans lerumen, comme source de
minéraux,
ou commeagent
liant. Unmélange
(en milieuhumide)
debentonite de sodium et de tourteau de
soja
accroît l’utilisation de l’azote chez
l’agneau (Britton
et al1978).
Cet effetbénéfique
a étéattribué à des interactions
d’adsorption
entreles
protozoaires
ciliés du rumen ou leur sub- strat decroissance,
et la bentonite. A l’aide d’unetechnique
de simulation in vitro durumen
(Rusitec),
Wallace et Newbold (1991)ont mis en évidence une réduction du nombre de
protozoaires accompagnée
d’une baisse de laproduction d’ammoniac,
attribuée à unesorte
d’enrobage
desprotozoaires
ciliés. La bentoniteapparaîtrait
finalement comme unmoyen de réduire
partiellement
l’activité de lamicro-faune,
conduisant ainsi à une augmen- tation du flux deprotéines
sortant du rumen.Les
lignosulfites
sont utilisésdepuis long- temps
dans les aliments duruminant,
soitcomme
liants,
soit comme additifs dans lescompléments liquides.
La vache laitièredemande un certain délai d’accoutumance
(3 jours)
à une ration contenant 2 % deligno- sulfite,
mais en aucun cas il n’a été observéune diminution des
quantités
de matièresèche
ingérées.
Les essais in vitro menés auGrassland Research Institute
(1968) suggè-
rent que les sucres du
lignosulfite
de calciumsont fermentés pour
produire
des acides gras volatils avec très peu d’influence sur ladiges-
tibilité des
fourrages lorsque
lelignosulfite
est
ajouté
à2,5
%. A tauxplus
élevés(2
à 8 %MS),
lelignosulfite
d’ammonium devient une source d’azote nonprotéique
pour le mouton et le bovin àl’engrais.
La valeur alimentaireL’addition de
lignosulfite,
à untaux <
2%,
aux rations des ruminants a très peud’effet
sur ladigestibilité
desfourrages.
Au-delàde 2
%,
lelignosulfite
d’ammonium devient une source
d’azote non
protéique.
Chez le
porcelet
etle porc en
croissance-
finition,
lesperformances
ne
sont pas modi f’cées
parl’incorporation d’argile
àl’aliment.
de l’azote
provenant
de l’ion ammonium asso-cié est semblable à celle de l’urée
(Croyle
et al1975),
mais l’efficacité alimentaire semblelégèrement
réduite au-delà du tauxd’incorpo-
ration de 4 % de la matière sèche
(Chang
et al1977).
Le traitement de tourteau de
soja
ou decolza par le
lignosulfite (5-10 %)
àtempératu-
re élevée
(90-95 ° C)
met àprofit
la réactionentre les
groupements
sulfonates dulignosul-
fite et les
groupements
aminés desprotéines.
Il entraîne in situ un effet de
tannage
et une réduction de leurdégradabilité (McAllister
etal 1993).
3.
2 / Chez le porc
D’après Collings
et al(1980),
la bentonite de sodium(2,5 %)
tend à accroître l’efficacité ali- mentairependant
lapériode
dedémarrage,
mais pas en
période
de croissance ou de fini- tion. Elle n’a aucune incidence sur laqualité
de la carcasse. Un effet de substitution semble alors s’exercer entre la bentonite et un antibio-
tique (la lincomycine)
en termes de niveau de consommation et degain
depoids.
Ces résul-tats sont différents de ceux de Rivera et al
(1978)
avec la kaolinite.L’adjonction
de 1 à3 % de kaolinite dans la ration du
porcelet
nemodifie en rien la vitesse de croissance ou l’in- dice de consommation. Dans d’autres essais
rapportés
parDunoyer (1986),
seule la vitesse de croissance estlégèrement améliorée, peut-
être en raison d’une réduction des diarrhées.
Ces effets ne sont pas
toujours
bien com-pris.
L’additiond’argile équivaut
à une dilu-tion de l’aliment conduisant
théoriquement
àdes
performances
réduites si l’onexprime
les résultats parrapport
à la ration totale. Plu- sieurshypothèses
sur les mécanismes d’ac- tion de ces substances ont étéproposées.
Avecla
sépiolite, l’hypothèse
la mieuxacceptée
serait un ralentissement du transit intestinal dû à la modification de la viscosité du conte-
nu
grâce
à lacapacité d’absorption
d’eau del’argile.
L’action des enzymes intestinaux seraitprolongée,
accroissant ainsi l’efficacité de ladigestion
etl’absorption
des nutriments(Lopez
et Alvarez1991).
Une autreexplica-
tion
pourrait
être une interaction entre la dureté et/ou l’élévation detempérature
desgranulés quittant
lafilière,
liée à laprésence
de
l’adjuvant,
et la consommation par l’ani-mal. Une dureté excessive tend à réduire le niveau de
consommation,
destempératures plus
élevées accroissent ladigestibilité
del’énergie
de rations contenant de l’amidon de céréales ou delégumineuses.
Des interactionsavec la microflore intestinale
peuvent égale-
ment être
invoquées.
Chez le
porcelet,
l’accroissement de durabi- lité reliée à l’addition desépiolite (2
% en sub-stitution au
maïs)
semble conduire à une réduction de la consommation alimentaire mais aussi de la croissance avec des rations peuénergétiques (Castaing 1989).
L’indice de consommation estidentique
dans ce cas àcelui du
témoin,
mais meilleur avec desrations à
plus
haute teneur enénergie (tableau 6).
Dans les deux cas, l’indice de conversion del’énergie
est accru(2,8
et4,5
%en valeur relative
respectivement)
avecl’argi-
le. Chez le porc en croissance ou en finition
(20-100
et même 150kg
depoids vif),
les per- formances ne different passignificativement
entre groupes
expérimentaux
et groupestémoins,
montrant par là un effet de compen- sation de la dilution de la ration avec le liant(Parisini
et al1993).
Si mâles et femelles sont étudiésséparément (Castaing 1989), l’incorpo-
ration du liant a un
léger
effetdépressif (2,5
à3
%)
chez les mâlescastrés,
de même ordre degrandeur
que celui de la dilution del’aliment,
mais non
significatif
chez la femelle. L’indice de conversion del’énergie
est alorsplus
élevé.Une couleur
plus
claire de la viande avec les animaux(103 kg)
recevant de lasépiolite
aété notée
(Parisini
et al1993),
ainsiqu’une
tendance à un
dépôt plus important
de lardchez le porc lourd italien
(150 kg).
3.
3 / Chez la volaille
L’influence des
lignosulfites
a étéparticuliè-
rement étudiée chez la volaille. Les aliments pour
poulet
de chair contiennent en effet desproportions
élevées de matières grassesqui
nécessitent
parfois
de recourir à desadjuvants
de pressage. :
D’une manière
générale,
enprésence
de3 % de
lignosulfite
decalcium,
ladigestibilité
des