• Aucun résultat trouvé

Les nouveaux médicaments antituberculeuxne sont pas là où l’on a besoin d’eux

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Les nouveaux médicaments antituberculeuxne sont pas là où l’on a besoin d’eux"

Copied!
2
0
0

Texte intégral

(1)

REVUE MÉDICALE SUISSE

WWW.REVMED.CH 16 décembre 2015

2408

Les nouveaux médicaments antitubercuLeux ne sont pas Là où L’on a besoin d’eux

La bédaquiline et le délamanide re­

présentent, depuis peu, un nouvel espoir dans le traitement des cas de tuberculose résistante. Nouvel espoir, vraiment ? Mé­

decins Sans Frontières (MSF) fait état de nouvelles et sérieuses inquiétudes quant à leur disponibilité là où ces deux médica­

ments seraient les plus utiles.

Début 2014, le laboratoire Janssen annonçait avoir obtenu une première autorisation de mise sur le marché euro­

péenne pour la bédaquiline dans le traite­

ment des tuberculoses pulmonaires mul ti­

résistantes. Il s’agissait alors du premier nouveau médicament antituberculeux dis­

ponible en Europe depuis plus de quarante ans. La bédaquiline avait été enregistrée en décembre 2012 aux Etats­Unis. Cette spécialité est indiquée chez l’adulte, dans le cadre d’associations appropriées avec d’autres médicaments antituberculeux, et ce en cas de résistance ou d’intolérance à d’autres schémas thérapeutiques. Précisons que la bédaquiline agit en inhibant spécifi­

quement l’ATP (adénosine­5’­triphosphate) synthase mycobactérienne, une enzyme indispensable à l’approvisionnement éner­

gétique de Mycobacterium tuberculosis.

Fin 2013, le Comité des médicaments à usage humain de l’Agence européenne des médicaments avait également rendu un avis favorable pour le délamanide, un autre traitement de la tuberculose multi­

résistante. Le délamanide est un dérivé nitro­imidazolé qui inhibe la synthèse de l’acide mycolique. Développé par Otsuka Pharmaceutical, très bactéricide à faible concentration, il présente une excellente activité sur Mycobacterium tuberculosis sen­

sible et résistant.

En 2013, MSF lançait une première mise en garde concernant la bédaquiline dans le cadre de la 44e Conférence mondiale sur la santé respiratoire alors organisée à Paris.

« Sans une nouvelle approche au dévelop­

pement et à la tarification de nouveaux médicaments contre la tuberculose, la ré­

ponse mondiale contre cette maladie sera incapable de délivrer les nouvelles combi­

naisons de médicaments nécessaires pour combler les besoins dans le traitement de la tuberculose résistant aux médicaments » alertait alors MSF.

« Il faut que la recherche se fasse de façon participative et dès le début, au lieu d’avoir des sociétés qui travaillent chacune dans leur coin, expliquait, à Paris, Sharo­

nann Lynch, chargée du dossier Tuber­

culose à la “ Campagne d’accès aux médi­

caments essentiels ” de MSF.1 Nous devons également travailler dès au­

jourd’hui pour que les prix des nouveaux traitements soient accessibles. La structure de prix prévue pour la bédaquiline par Johnson & Johnson oblige les pays à revenu intermédiai re, dont certains sont parmi les plus durement frappés par la tuberculose résistant aux mé­

dicaments (TB­DR), à payer 3000 dollars pour un traite­

ment de six mois. Si les nou­

velles combinaisons de traite­

ment à venir coûtent plusieurs milliers de dollars dans les pays les plus pauvres, comme c’est le cas aujourd’hui, comment ces pays pourront­ils améliorer l’accès à ces médicaments et augmenter le nombre de patients soignés ? »

C’était une bonne question. Où en est­

on fin 2015 ? « Près de trois ans après leur arrivée sur le marché, les deux premiers médicaments antituberculeux développés depuis cinquante ans n’ont été administrés qu’à 2 % des patients atteints de tuber­

culose multirésistante (TB­MDR) dans le monde, vient de faire savoir MSF, depuis Le Cap et Paris. MSF appelle les labora­

toires Johnson & Johnson et Otsuka (qui produisent respectivement la bédaquiline et le délamanide) à accélérer la mise à dis­

position de ces médicaments, par l’enre­

gistrement dans les pays les plus touchés par la TB­MDR et une politique de prix acces­

sibles aux pays en développe­

ment. »

Il faut ici rappeler que, selon les dernières estimations de l’OMS, seul un quart des quelque 500 000 personnes at teintes de TB­MDR ont été mises sous traitement en 2014.

Et que seule la moitié de ces patients a pu être guérie. Pour les patients atteints de formes ultrarésistantes de la maladie (TB­XDR), ce pourcentage est de 25 %. On sait d’autre part que le recours à la bédaquiline, en complément de traitements existants, a montré des résultats encourageants dans des projets menés par MSF (ou par d’autres acteurs) en Arménie, en France, en Russie (Tchétchénie) et en Afrique du Sud. Après six mois de traitement, le bacille de la TB n’était plus présent dans le crachat (après mise en culture) chez, respectivement, 84 %, 97 %, 75 % et 77 % des patients.

Jean-Yves nau jeanyves.nau@gmail.com

La bédaqui- Line et Le déLamanide

n’ont pas encore totaLement compLété Leur

processus de déveLoppement

cLinique

D.R.

avancée thérapeutique

52_53.indd 2408 14.12.15 12:05

(2)

ActuAlité

www.revmed.ch

16 décembre 2015

2409

« L’accès à la bédaquiline et au déla­

manide est aujourd’hui extrêmement res­

treint, regrette­t­on amèrement chez MSF.

En novembre 2015, moins de 3000 per­

sonnes dans le monde avaient eu accès à la bédaquiline, et seulement une centaine au délamanide, dans le cadre d’un usage dit compassionnel. Ce chiffre est à compa­

rer aux quelque 150 000 personnes qu’on estime être atteintes de TB­MDR ou XDR dans le monde, et pour lesquelles l’Orga­

nisation mondiale de la santé préconise un traitement par ces nouveaux médica­

ments. »

Selon l’ONG, un premier obstacle à l’utilisation des deux nouvelles molécules est l’absence de son enregistrement dans les pays : seulement sept pays parmi les vingt­sept les plus touchés par la TB­MDR ont enregistré la bédaquiline, tandis que le délamanide n’est enregistré que dans quatre pays (Japon, Allemagne, Royaume­Uni et Corée du Sud) dont aucun ne présente des taux importants de TB­MDR.

« Johnson & Johnson et Otsuka ont certes mis en place des systèmes de do­

nation, mais ces dispositifs présentent d’importantes limites : le nombre de trai­

tements offerts est en deçà des besoins, et certains pays en sont exclus » explique encore MSF. Il faut en outre savoir que le prix des deux nouveaux médicaments dans les pays qui ne bénéficient pas des dona­

tions est très élevé. Pour six mois de trai­

tement, la bédaquiline coûte entre 900 et 30 000 dollars, selon les revenus des pays, tandis que le délamanide coûte 33 600 dollars au Japon. Ces médicaments sont utilisés en complément de traitements existants, qui coûtent déjà entre 1800 et 5000 dollars par patient.

« Nous avons de plus en plus d’élé­

ments permettant d’apprécier le potentiel de ces deux nouveaux médicaments dans le traitement de la TB­MDR. Pour amélio­

rer les chances de survie des patients, il faut que les médecins puissent prescrire le traitement le mieux adapté à chacun d’entre eux. Pour cela, il faut qu’ils aient accès à tous les médicaments – nouveaux et existants – explique le Dr Grania Brid gen, spécialiste de la tuberculose à la Campagne d’accès aux médicaments essentiels de MSF. Johnson & Johnson et Otsuka doi vent s’engager à rendre leurs médicaments accessibles et abordables dans tous les pays qui en ont besoin. Le coût total d’un traitement ne devrait pas dépasser les 500 dollars par patient, nouveaux médicaments inclus. »

La bédaquiline et le délamanide n’ont pas encore totalement complété leur pro­

cessus de développement clinique. Ils ont reçu des autorisations de mise sur le mar­

ché sur la base d’essais cliniques dits de phase IIb, et conditionnées à la tenue d’essais de phase III. Dans le cas du déla­

manide, un essai de ce type a commencé, et les résultats devraient être connus en 2017. L’essai de phase III de la bédaquiline n’est pas encore commencé.

Usage compassionnel ? On sait qu’il permet l’accès à un médicament dont le processus de développement clinique et règlementaire n’est pas terminé, et ce pour les patients chez qui toutes les options thérapeutiques ont été épuisées. Cette pratique n’est toutefois possible que dans les pays disposant d’un cadre juridique adéquat ; et l’accès compassionnel demeure soumis à l’acceptation de la part des labo­

ratoires pharmaceutiques producteurs.

Selon MSF, Janssen (Johnson & Johnson)

autorise l’usage compassionnel de la bé da­

quiline depuis 2011, mais est aujourd’hui en train de l’arrêter progressivement.

Otsuka fournit pour sa part un accès en usage compassionnel au délamanide depuis 2014.

Quant à Médecins Sans Frontières, l’ONG a ouvert son premier projet de prise en charge de la tuberculose résis­

tante en 1999, et représente aujourd’hui l’un des principaux fournisseurs privés de soins pour la TB­MDR au monde. En 2014, MSF a fourni un traitement contre la TB à 21 500 patients, dont 1800 atteints de TB­

MDR, et ce dans plus de vingt pays. Com­

ment sortir des impasses actuelles ?

lu pour vous

Les gonalgies sont un motif fréquent de con­

sultation en médecine de premier recours. Face à un genou douloureux, le médecin se pose souvent les questions suivantes : y a­t­il des lésions intra­articulaires ? Puis­je commencer avec un traitement conservateur ? Dois­je référer pour une imagerie ou un avis spécialisé ? Des chercheurs des Pays­Bas ont souhaité aider le médecin dans sa démarche décisionnelle en proposant un score clinique pour le diagnostic (ou son exclusion) des déchirures méniscales.

Suite à une revue de la littérature, les auteurs ont dressé la liste des éléments d’anamnèse et d’examen clinique habituellement associés aux déchirures méniscales. Ils ont ensuite évalué, au sein d’une consultation de médecine de premier recours, 121 patients, âgés de 18 à 65 ans, avec une douleur au genou depuis moins

de six mois. Chaque patient a eu une anamnèse standardisée, un examen clinique (comprenant un test méniscal nommé le deep squat test correspondant au fait de s’accroupir) et une imagerie par résonance magnétique (IRM) pour poser le diagnostic de déchirure méniscale. Les chercheurs ont ensuite sélectionné la meilleure combinaison de facteurs prédictifs, associés à ces déchirures méniscales. Huit items ont été retenus pour créer le score clinique : le sexe masculin (84 points), l’âge (moins de 28 ans 0 point, puis 30 points pour chaque intervalle de 10 ans jusqu’à 58 ans, 108 points pour les 59­65 ans), le port de charge lors du trauma­

tisme (49 points), la pratique d’un sport (15 points), la présence d’un épanchement (60 points), la chaleur de l’articulation à la palpation (4 points), la discoloration rouge ou bleue cutanée (30 points) et la douleur lors du deep squat test (3 points). Ils ont déterminé que par rapport à l’IRM, une valeur seuil de 150 points donne les valeurs prédictives suivantes : une sensibilité de 86 %, une spécificité de 45 %, une valeur prédictive positive de 55 % et une valeur prédictive négative de 81 %. La discrimi­

nation du score est bonne avec une aire sous la courbe de 0,76 (IC 95 % : 0,72­0,80).

commentaire : Un score de plus, direz­vous ? Basé sur une évaluation clinique simple, le score proposé pourrait être utile pour exclure une déchirure méniscale, mais certaines étapes de validation du score sont encore nécessaires pour entrer dans la pratique quotidienne.

dr emilie Fasel

Policlinique médicale universitaire, Lausanne snoeker ba, et al. a clinical prediction rule for meniscal tears in primary care : development and internal validation using a multicentre study. br J Gen pract 2015;65:e523-9.

D.R.

un score clinique prédictif des déchirures méniscales ?

1 nau JY. Questions sur la bivalirudine (infarctus) et la bédaquiline (tuberculose). rev med suisse 2013;9:2130-1.

52_53.indd 2409 14.12.15 12:05

Références

Documents relatifs

Pour atteindre l’accès universel, il faudra mobiliser des investissements considérablement plus importants que les 13,7 milliards de dollars mis en 2008 à la disposition

La pièce principale est équipée d’un placard une porte stratifiée, garni d’une tringle et d’une étagère ainsi qu’un matelas deux places avec tête de lit

pourrait avoir dans un avenir très proche un rôle “plus important”, avec sa position géostratégique et son potentiel énergétique: “Les ré- serves de gaz de

Les murs sont pour partie en lambris bois peint et pour autre partie recouvert d'une faïence de protection et toile de verre de peinte.. Présence de traces

Etant donné que les ménages pauvres dépensent une plus grande part de leur revenu à l’achat de nourriture que les ménages riches, les hausses de prix des denrées alimentaires

La lecture et l’écriture sont systématiquement liées : elles font l’objet d’exercices quotidiens, non seulement en français, mais aussi dans le cadre de tous les

[r]

Between August and December 1970, six cases of suspected smallpox were detected m three African countries, of which two (Liberia and Sierra Leone) had observed