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Immigration, distribution des revenus et bien-être social

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Immigration, distribution des revenus et bien-être social

MUELLER, Tobias

MUELLER, Tobias. Immigration, distribution des revenus et bien-être social. Swiss Journal of Economics and Statistics , 1995, vol. 131, no. 3, p. 517-533

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:35463

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1. INTRODUCTION

La littérature sur les conséquences économiques de l'immigration1 suggère que l'immi- gration est en général favorable aux résidents du pays d'accueil. Ce résultat provient du fait que l'immigration change les prix des facteurs, ce qui augmente le bien-être.

Pourtant, il y a souvent une résistance contre l'immigration de travailleurs non qualifiés dans les pays d'accueil. Cet article explore l'une des raisons qui pourrait être à la base de cette opposition: les effets redistributifs qui sont engendrés par l'immigration2. En effet, lorsque les immigrants détiennent peu de capital humain ou physique, leur arrivée produit un gain au niveau agrégé et une augmentation de l'inégalité des revenus des résidents. L'un peut-il compenser l'autre?

Nous montrons d'abord que, dans des conditions particulières, l'immigration a un impact plus important sur l'inégalité des revenus des résidents, mesurée par l'indice de Gini, que sur le revenu agrégé. Ces deux effets n'étant cependant pas comparables en général, nous tentons ensuite de les intégrer dans un cadre commun en évaluant F impact de l'immigration sur le bien-être social. Pour ce faire, nous reprenons la fonction de bien-être social d'ATKINSON (1970) qui permet, sur la base de jugements de valeur, de comparer différentes distributions de revenus en tenant compte aussi bien de l'efficacité (revenu agrégé) que de l'inégalité. Le résultat qui pourrait en partie expliquer l'opposi- tion à l'immigration est alors le suivant: un faible afflux d'immigrants non qualifiés (ayant peu de capital) a un effet négatif ou nul sur le bien-être social des résidents, et ceci quels que soient les jugements de valeur qui interviennent dans la spécification de la fonction d'ATKINSON. Dans ce cadre, l'immigration de travailleurs non qualifiés ne produirait un accroissement du bien-être social que si un grand nombre d'entre eux arrivait dans le pays d'accueil sans qu'on les prenne en considération dans le critère du

* Université de Genève, CH-1211 Genève 4. Cet article est basé en partie sur des recherches financées par le FNRS (subsides N° 12-28650.90 et N° 12-42011.94). Je remercie le professeur JAIME DE MELO pour ses commentaires.

1. La littérature dans ce domaine est très vaste et l'objectif de notre article n'est pas d'en faire une synthèse.

BORJAS (1994a) donne une vue d'ensemble du problème de l'immigration et des publications récentes.

RAZIN et SADKA (1992) discutent les interactions entre la migration et le commerce international. Sur le plan suisse, voir notamment les contributions présentées au Congrès annuel 1993 de la société suisse de statistique et d'économie politique publiées dans le volume 129(3) de cette revue.

2. Dans une discussion des politiques de migration européennes, STRAUBHAAR (1992) souligne l'impor- tance des effets de l'immigration sur la distribution des revenus, sans cependant analyser formellement cet aspect.

Rev. suisse d'Economie politique et de Statistique 1995, Vol. 131 (3X517-533

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bien-être. Les fondements éthiques d'une approche qui exclut les résidents étrangers du critère de bien-être social nous paraissent toute fois fort critiquables.

L'approche du bien-être social jette aussi une lumière nouvelle sur la question de savoir s'il est préférable pour un pays d'accueillir des immigrants qualifiés ou non qualifiés (détenant plus ou moins de capital humain). Dans un modèle à deux facteurs, l'analyse des gains agrégés de l'immigration ne peut fournir de réponse claire, puisque ces gains sont fonction de la différence (en valeur absolue) entre la dotation relative en capital des immigrants et celle de l'économie dans son ensemble. Que les immigrants détiennent plus ou moins de capital que les résidents importe peu. En revanche, d'autres arguments ont été avancés pour montrer que l'immigration de travailleurs qualifiés était plus favorable aux pays d'accueil. D'une part, certains auteurs postulent l'existence d'externalités du capital humain, qui peuvent jouer un rôle aussi bien dans un modèle statique que dans un modèle de croissance endogène. De son côté, BORJAS (1994b) invoque une raison empirique: la complémentarité entre travail qualifié et capital impliquerait que les gains agrégés sont plus grands si les immigrants sont qualifiés. Nous pouvons alors ajouter un troisième argument: le bien-être social du pays d'accueil ne s'accroît avec l'immigration que si les immigrants sont plus qualifiés que les résidents.

En effet, dans ce cas, les gains agrégés vont de pair avec une réduction de l'inégalité des revenus parmi les indigènes. Pour cette raison, le bien-être social croît avec le nombre d'immigrants, contrairement au cas des immigrants non qualifiés.

L'article est structuré de la manière suivante. D'abord, nous introduisons le cadre analytique et nous montrons sous quelles conditions les résultats classiques concernant l'effet de l'immigration sur le revenu agrégé (ou le bien-être) des résidents restent valables dans des cas plus généraux. Ensuite, nous abordons, dans le cadre d'un simple modèle à deux facteurs, le problème de la distribution des revenus et nous examinons la question suivante: si le capital est réparti de manière inégale parmi les résidents, quel est l'effet de l'immigration sur l'inégalité des revenus? Dans la dernière section, nous introduisons la fonction de bien-être social et analysons l'influence de l'immigration dans le cas où le capital est distribué selon une loi uniforme. En conclusion, nous discuterons la portée et les limites de nos résultats.

2. LES GAINS AGREGES DE L'IMMIGRATION

L'impact de la migration internationale sur le bien-être a été beaucoup discuté dans la littérature. Nous nous limitons ici au cas d'une petite économie ouverte pour laquelle les termes de l'échange sont exogènes. Dans le cadre d'un modèle à un bien et deux facteurs, les premières contributions théoriques ont établi des résultats qui ont été confirmés par la suite dans des cas plus généraux. Ainsi, GRUBEL et SCOTT (1966) affirment que le départ d'un nombre «infinitésimal» d'émigrants n'affecte pas le bien-être des résidents du pays d'origine. En revanche, BERRY et SOLIGO ( 1968) montrent qu'à la suite du départ d'un nombre fini (non infinitésimal) de personnes, les résidents subissent une perte de

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bien-être3. Ces résultats ont été généralisés par la suite pour un nombre quelconque de biens et de facteurs notamment par GROSSMAN (1984) et WONG (1986).

Dans cette section, nous reconsidérons brièvement ces résultats pour une petite économie ouverte où tous les biens sont supposés échangeables et tous les facteurs immobiles sur le plan international. Un tel réexamen permet de situer les contributions classiques dans le cadre d'analyse que nous emploierons dans la suite de l'article, et nous paraît utile pour deux autres raisons. D'une part, il s'avère que sous certaines conditions (liées au nombre de facteurs et de biens, ainsi qu'à la technologie jointe) on peut généraliser les résultats qualitatifs du modèle à un bien et deux facteurs. D'autre part, les résultats sont mis sous une forme qui, tout en restant assez générale, permet une interprétation économique directe. L'approche duale se prête particulièrement bien à une telle démarche.

2.1 Le modèle d'une petite économie ouverte

Nous supposons que la population du pays d'accueil est composée de deux groupes (que nous appellerons les indigènes et les étrangers) et que chaque groupe peut être décrit par un ménage représentatif. Nous examinons alors l'impact d'un afflux de nouveaux immigrants sur les revenus des résidents indigènes et étrangers. L'hypothèse du ménage représentatif implique que nous ne tenons compte ici que de l'impact agrégé de l'immi- gration. En effet, un gain global pour les indigènes n'empêche pas que parmi eux il y ait des gagnants et des perdants. Ce dernier aspect, lié à la distribution inégale des revenus parmi les indigènes, sera abordé dans la prochaine section.

Le modèle que nous utilisons ici est celui d'une petite économie ouverte qui n'a aucune influence sur les prix des biens. Nous admettons qu'il y a « biens, m facteurs et deux ménages représentatifs: un indigène et un étranger (désignés par les exposants i et e). Les ménages indigènes sont au nombre de N1 (tous identiques) et chacun est doté d'un vecteur x* de facteurs de production. De manière analogue, les Ne ménages étrangers détiennent chacun un vecteur JC* de facteurs. Si l'on suppose de plus que tous les facteurs sont détenus par des résidents, le vecteur total de facteurs dans l'économie est donné par x - Nl xl + Ne Xe et les quantités moyennes de facteurs par ménage sont notées par le vecteur x = (Nl + Ne)~x x.

Pour modéliser l'offre domestique, nous utilisons l'approche duale: elle est représen- tée par une fonction de recette. Ce choix s'inspire de l'approche de DIXIT et NORMAN (1980). Comme dans ce modèle tous les biens sont échangeables et les prix par conséquent exogènes, il n'est pas nécessaire de spécifier la demande des ménages

3. Si dans ces études la question est souvent examinée sous l'angle du pays d'origine des migrants, elle se pose de manière analogue pour le pays d'accueil: un afflux fini d'immigrants produit alors un gain pour les résidents de ce pays. Un tour d'horizon d'autres contributions de cette période peut être trouvé dans

BHAGWATI et RODRIGUEZ (1975).

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indigène et étranger pour évaluer l'effet de l'immigration sur le bien-être. En effet, si chaque ménage dépense tout son revenu, la balance commerciale est équilibrée par la loi de Walras. De plus, la variation du revenu de chaque ménage peut être interprétée comme une variation équivalente ou compensatoire du bien-être puisque les prix sont fixés.

La fonction de recette - que certains auteurs appellent fonction de PIB ou de PNB - est donnée par r(p, x) = max {p'z I (z, x) e T], où z désigne le vecteur des outputs, p le vecteur de leurs prix, x le vecteur des facteurs de production et 7Tensemble des pos- sibilités de production.

Nous adoptons les hypothèses suivantes sur la technologie. Nous supposons notam- ment (i) que l'ensemble des possibilités de production est convexe, (ii) que la technologie est à rendements constants et (iii) que la fonction de recette et ses dérivées premières et secondes sont continues. Par ces hypothèses, nous excluons donc la possibilité de rendements décroissants ou croissants.

2.2 L'impact de l'immigration sur le bien-être agrégé des résidents

Le revenu d'un ménage est donné par l'ensemble des revenus de facteurs qui sont en sa possession. Le revenu de chacun des deux ménages représentatifs h (h- i,e) s'écrit donc:

dx (1) où w désigne le vecteur des prix des facteurs.

Supposons maintenant que de nouveaux immigrants arrivent et que ceux-ci aient la même dotation en facteurs que les étrangers qui résident déjà dans le pays. En différen- ciant la contrainte budgétaire du ménage représentatif indigène par rapport aux facteurs de production, avec dxe = xe dNe, on peut calculer l'impact de l'immigration sur le bien-être des indigènes. On a alors:

d y , .Y y r ( P t X ) x?

dN*-{X) dxdx'

où d2 r(p, x) / (dxdx') est la matrice des dérivées secondes de la fonction de recette par rapport aux facteurs.

Pour être en mesure de déterminer sans ambiguïté le signe de cette expression, nous faisons appel aux hypothèses énoncées ci-dessus. D'une part, nous supposons que tous les facteurs sont détenus par des résidents (indigènes ou étrangers) ce qui implique que x1: = (1 /N') x - (Ne/Nl) Xe. D'autre part, si l'on admet l'existence de rendements d'é- chelle constants4, l'impact de l'immigration sur le bien-être du ménage représentatif indigène est positif ou nul:

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d / V ' ZV' ( } dxdx'

(2) En effet, la variation du revenu du ménage indigène représentatif est donnée par une forme quadratique. L'hypothèse de convexité de l'ensemble des possibilités de produc- tion implique que la fonction de recette est concave par rapport aux facteurs. Par conséquent, la matrice des dérivées secondes de la fonction de recette par rapport aux facteurs est semi-définie négative, ce qui établit l'inégalité (2).

Cette expression montre aussi que l'immigration n'affecte pas le revenu agrégé des indigènes si aucun ménage étranger n'est présent à l'équilibre initial (Ne = 0). On retrouve donc ici l'argument de GRUBEL et SCOTT (1966): une afflux infinitésimal d'immigrants n'influence pas le bien-être des résidents du pays d'accueil.

Dans le cas où des étrangers sont déjà installés dans le pays avant l'arrivée de nouveaux immigrants, que peut-on dire au sujet de l'ampleur des gains des indigènes?

Pour répondre à cette question, il convient de modifier l'équation (2), en utilisant une fois de plus l'hypothèse des rendements constants:

dy' d/V"" N'

v J

(xe

_-

y

B2i^A

(xe

_-

x)

dXOX

(3) Les gains des indigènes dépendent à la fois de la différence entre la dotation en facteurs des étrangers et la dotation moyenne de l'économie et de la matrice des dérivées secondes de la fonction de recette par rapport aux facteurs. Les éléments de cette matrice sont liés aux élasticités de complémentarité de Hicks (c,-,) de la manière suivante:

_ d2 r (p, x) r (p, x)

U dx( dxj WiWj

On dit que deux facteurs i ctj sont complémentaires au sens de Hicks (ou ^-complémen- taires), si ctj est positive. En revanche, on les appelle substituables au sens de Hicks (ou g-substituables) si cette élasticité est négative. Rappelons que cette définition des notions de substituabilité et de complémentarité entre facteurs diffère de celle donnée par Allen, qui décrit la réaction de la quantité demandée d'un facteur suite à une variation du prix de l'autre5.

4. En effet, dans le cas de rendements constants, les fonctions de demandes inverses de facteurs sont homogènes de degré zéro par rapport aux quantités de facteurs, ce qui implique que: x'd rip, x) I (dxdx') = 0.

5. Les relations entre ces deux concepts ont été analysées notamment par HICKS ( 1968) et SATO et KOIZUMI (1973).

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2.3 Nombre de facteurs et de biens, production jointe

Bien que nous ayons montré que, dans le cadre de notre modèle, l'immigration ne peut pas avoir d'effet négatif sur le revenu agrégé des indigènes, nous n'avons pas pu exclure que cet effet soit nul, même dans le cas où Ne * 0. En effet, la matrice des dérivées secondes de la fonction de recette par rapport aux facteurs de production peut être nulle sous certaines conditions. Ces dernières dépendent des caractéristiques de la technologie (production jointe ou non) et du nombre de facteurs et de biens.

Examinons d'abord le cas de la production non jointe. Une technologie est dite non jointe si chaque output est produit selon une fonction de production séparée, l'offre totale de facteurs étant allouée entre les industries6. Les différents cas qui peuvent se présenter ont été abondamment discutés dans la littérature7. Notre but n'est pas de les réexaminer ici de manière rigoureuse et exhaustive mais de les relier à notre outil d'analyse, à savoir la fonction de recette.

Autant de biens que de facteurs. Si tous les biens sont produits en quantité non nulle, les prix des facteurs sont entièrement déterminés par les prix des biens, indépendamment de la dotation en facteurs du pays. Par conséquent, une variation de l'offre de facteurs induite par l'immigration n'influence pas les prix des facteurs8 et n'a donc aucun impact sur le revenu des indigènes. En ce qui concerne la fonction de recette, la matrice des dérivées secondes par rapport aux quantités de facteurs est nulle dans ce cas9.

Plus de biens que de facteurs. Ce cas de figure est semblable au précédent. Toutefois, si tous les biens ne sont pas produits (mais que leur nombre est supérieur au nombre de facteurs), la dotation en facteurs du pays peut intervenir dans le choix des biens produits.

Par conséquent, l'immigration n'a d'effet sur les prix des facteurs que si elle est suffisamment importante pour changer l'éventail des biens produits.

Plus de facteurs que de biens. Dans ce cas, les prix des facteurs ne sont en général pas déterminés à partir des seuls prix des outputs et un déplacement de facteurs peut les modifier. La matrice des dérivées secondes de la fonction de recette est alors en général non nulle et les prix des facteurs dépendent de la dotation relative en facteurs du pays.

Pour cette raison, beaucoup de contributions théoriques adoptent ce cas de figure. Parmi les modèles souvent utilisés qui tombent dans cette catégorie, citons le modèle à facteurs spécifiques (aussi appelé modèle Ricardo-Viner), le modèle à trois facteurs et deux biens et le modèle à deux facteurs et un bien (parfois appelé modèle MacDougall-Kemp).

6. Pour une discussion formelle de ce concept, voir KOHLI (1991, chap.4) qui distingue quatre types de technologies non jointes. Nous nous référons au premier type qui est le plus courant dans les modèles du commerce international et que Kohli appelle «nonjointness in input quantities».

7. La contribution pionnière est de SAMUELSON (1953). Une discussion plus récente de cette question, qui intègre la dualité, peut être trouvée par exemple dans WOODLAND (1982, section 4.3).

8. Si les prix d'équilibre des facteurs ne sont pas uniques, la dotation en facteurs peut influencer les prix des facteurs. Pour exclure cela, il faut (i) que la matrice des coefficients input-ouput soit de rang complet et (ii) que la variation des quantités de facteurs soit suffisamment petite pour que le vecteur des dotations en facteurs reste dans le même cône de diversification.

9. Une démonstration formelle de cette affirmation peut être trouvée dans MÜLLER (1993, annexe A2).

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Production jointe. Si la production est jointe, même le cas où il y a autant de biens que de facteurs n'est pas trivial, c'est-à-dire que la matrice des dérivées secondes de r par rapport à x n'est pas nulle. Par conséquent, l'immigration a un impact favorable sur le revenu agrégé des indigènes.

2.4 Cas particulier: deux facteurs, un bien

Si l'analyse des gains agrégés peut être effectuée facilement dans le cas d'un nombre quelconque de facteurs, l'introduction des aspects distributifs complique considérable- ment le modèle puisqu'il faut définir une distribution des facteurs sur l'ensemble des ménages. Pour cette raison, nous limiterons l'examen des effets de l'immigration sur la distribution des revenus à un modèle à deux facteurs: le travail (L) et le capital (K). Nous avons vu que dans ce cas l'immigration n'affecte le revenu des indigènes que s'il y a un seul output ou si la production de deux outputs est jointe. Par souci de simplicité, nous retenons la première hypothèse. Dans ce cas, si le prix du bien est considéré comme le numéraire, la fonction de recette est simplement égale à la fonction de production du bien (qui est unique).

Nous admettons de plus que chaque ménage est «doté» d'une unité de travail. Cette hypothèse n'est ici qu'une règle de normalisation qui implique que N' = l!} Ne = Z/, et L - N[ + Ne. Les ménages représentatifs indigène et étranger détiennent respectivement k' et k? unités de capital. Leur revenu provient de la rémunération du capital et du travail.

Pour un ménage h(h = i,e), ce revenu s'écrit donc:

h ,h d r , . d r

yh = WKkh + WL= kh +

oK ÖL ^

L'effet de l'immigration sur le revenu des indigènes est donné par l'équation (3) qui se simplifie ici à l'expression suivante:

où Tc = K/L est le rapport capital-travail de l'économie dans son ensemble. Admettons que Le * 0. On voit que plus la dotation relative en facteurs (le rapport capital-travail) des immigrants diffère de celle des indigènes et donc de la moyenne de l'économie, plus les indigènes profitent de l'immigration. Ce fait est illustré dans la figure 1, qui montre le gain relatif de bien-être des indigènes, suite à un afflux d'immigrants, en fonction de la différence entre le rapport capital-travail des immigrants et celui de l'économie dans son ensemble. Notre résultat rappelle ce que BERRY et SOLIGO (1969) avaient mis en

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évidence: l'impact d'un afflux fini (non infinitésimal) d'immigrants sur le bien-être des indigènes est strictement positif si Ke /Le*K/L,zi zéro uniquement si Ke / U - K/L.

Figure 1: Variation relative du revenu agrégé des indigènes suite à l'immigration

/

V x

<

^^^—

\ ^

y

Uy

K" K

>

Nous venons de voir qu'il n'y a gain pour les indigènes que si des étrangers résident déjà dans le pays avant l'arrivée des nouveaux immigrants. Le revenu des étrangers résidents est-il affecté par l'immigration? Nous avons supposé que la dotation en facteurs des nouveaux immigrants est identique à celle des étrangers résidents. Par conséquent, la situation de ces derniers est beaucoup moins confortable puisque les prix des facteurs varient en leur défaveur. En effet, l'impact de l'immigration sur leur revenu est négatif sans ambiguïté:

En résumé, une analyse des effets de l'immigration qui ne considère que deux classes de ménages supposées homogènes aboutit au résultat que les gains des indigènes, s'ils se réalisent, se font aux dépens des étrangers résidents. Quant aux «nouveaux» immi- grants, il est évidemment impossible d'évaluer la variation de leur revenu dans le cadre de ce modèle à un pays. Cependant, on peut admettre que s'ils ont choisi de migrer, ils révèlent par là une préférence pour la situation qu'ils peuvent atteindre dans le pays d'accueil. Leur bien-être ne devrait donc pas se détériorer avec la migration.

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3. DISTRIBUTION DU CAPITAL, IMMIGRATION ET INEGALITE DES REVENUS Le but de cette section est de montrer que l'inégalité des revenus des résidents du pays d'accueil est affectée de manière significative par l'immigration. Cet effet semble être de plus grande ampleur que celui sur le revenu agrégé. En effet, l'impact d'un afflux infinitésimal d'immigrants sur l'inégalité est non nul, alors que l'accroissement du revenu agrégé des résidents est égal à zéro dans ce cas.

Nous avons vu qu'un afflux d'immigrants accroît sous certaines conditions le revenu agrégé des indigènes, et ce d'autant plus que le rapport capital-travail des immigrants diffère de celui des indigènes. Ce gain est généré par des variations des prix des facteurs qui, dans le cas de deux facteurs, sont toujours de signe contraire. En ce qui concerne le bénéfice agrégé pour les indigènes, il importe peu que les immigrants aient un rapport capital-travail élevé ou faible, pourvu qu'il soit différent du rapport K/L moyen de l'économie. Cependant, si l'on considère que le capital est distribué de manière inégale parmi les indigènes, cette symétrie, illustrée par la figure 1, ne tient plus. En effet, l'arrivée d'immigrants détenant moins de capital que les indigènes fait augmenter le prix du capital et diminuer le taux de salaire. Par conséquent, les ménages indigènes riches (détenant beaucoup de capital) profitent de l'immigration, contrairement aux pauvres dont le rapport capital-travail est inférieur à la moyenne de l'économie. Le résultat agrégé cache donc le fait qu'il y a des gagnants et des perdants, même parmi les indigènes.

Dans cette section, nous admettons donc que le capital est distribué de manière inégale parmi les résidents du pays d'accueil. Nous discutons d'abord les implications de cette hypothèse pour la distribution des revenus et nous examinons l'effet de l'immigration sur une mesure d'inégalité (l'indice de Gini). Nous montrons que, contrairement à l'effet sur le revenu agrégé, l'impact d'un afflux infinitésimal d'immigrants sur l'inégalité est non nul.

3.1 Distribution du capital et du revenu

Nous abandonnons donc l'hypothèse que tous les ménages indigènes sont identiques et nous supposons que les dotations en capital des ménages indigènes sont distribuées de manière continue. Le revenu d'un ménage h détenant kh unités de capital est donné par l'équation (4). La distribution du revenu dépend donc à la fois de la distribution du capital et des prix des facteurs.

Pour illustrer ce lien, nous prenons un exemple. Supposons que le capital est distribué d'après une loi uniforme sur l'intervalle [ko, kj] parmi les ménages indigènes. Le revenu des indigènes suit alors également une distribution uniforme, sur l'intervalle [yo, yj] où Comment peut-on faire le lien entre l'analyse en termes de ménages représentatifs et l'approche qui admet une distribution inégale du capital et du revenu? Les résultats de la section 2 restent valables si la dotation en capital k1 du ménage représentatif indigène

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est égale à la moyenne de la distribution du capital parmi les indigènes. Dans ce cas, le revenu y du ménage représentatif indigène et le revenu moyen des indigènes sont aussi identiques.

3.2 Effet de l'immigration sur les prix des facteurs

Puisque l'impact de l'immigration sur la distribution des revenus passe par une variation des prix des facteurs, il est utile d'en donner une évaluation plus précise. En effet, en différenciant les dérivées premières de la fonction de recette, on a:

d Wjt , _,_ d2 r dwr __ ,_ d2 r

(5) Si le rapport capital-travail des immigrants est inférieur à la moyenne de l'économie, l'immigration fait augmenter le prix du capital wK et diminuer le taux de salaire wL. En revanche, l'arrivée d'immigrants dont le rapport capital-travail est supérieur à celui de l'économie a l'effet contraire.

3.3 Effet de l'immigration sur l'inégalité des revenus

L'inégalité des revenus des indigènes peut être caractérisée par différents indices. Le coefficient de Gini est certainement la mesure la plus répandue. De plus, elle peut être exprimée de manière simple en fonction des paramètres de la distribution du capital, qui sont exogènes, et des prix des facteurs. En effet, en utilisant un résultat mettant en relation l'indice de Gini et les indices de concentration de différentes composantes du revenu (voir p.ex. KAKWANI, 1980), nous pouvons écrire:

\ik + wL/wK

où G est l'indice de Gini, Q est l'indice de concentration de la distribution du capital et

\ik est la moyenne de cette distribution. Notons que le coefficient de Gini dépend du prix relatif des facteurs. Une augmentation équiproportionnelle des prix du capital et du travail n'affecte donc pas cette mesure de l'inégalité, comme on pouvait s'y attendre.

Nous pouvons dès lors préciser le lien entre immigration et inégalité. L'immigration accroît (diminue) l'inégalité des revenus parmi les indigènes si le rapport capital-travail des immigrants est inférieur (supérieur) à celui de l'économie dans son ensemble. En effet, les équations (5) montrent que le prix relatif des facteurs wL/wK diminue lorsque ke < £, et augmente lorsque ke > le.

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Ce qui est plus remarquable, c'est qu'un afflux infinitésimal d'immigrants a en général un effet non nul sur le coefficient de Gini, même si aucun ménage étranger ne réside dans le pays à l'équilibre initial. En effet, la variation des prix des facteurs est non nulle et de sens opposé. Ce résultat est à mettre en contraste avec l'effet d'une arrivée d'un nombre infinitésimal d'immigrants (avec U - 0) sur le revenu agrégé qui, comme nous l'avons vu, est égal à zéro.

Les résultats peuvent être résumés comme suit. L'arrivée d'immigrants détenant plus de capital que le K/L moyen de l'économie produit des gains agrégés et diminue l'inégalité des revenus parmi les indigènes. Cette forme d'immigration paraît donc favorable pour le pays d'accueil10. En revanche, si les immigrants arrivent avec peu de capital, l'effet sur le pays d'accueil est plus contrasté: à un gain agrégé correspond un accroissement de l'inégalité. De plus, on a vu que le deuxième effet est plus fort que le premier si aucun étranger n'est présent dans le pays.

On peut alors se poser la question de savoir si le gain au niveau agrégé peut compenser l'accroissement de l'inégalité des revenus, voire la diminution des revenus des pauvres.

Il est clair qu'un transfert forfaitaire des riches vers les pauvres qui serait simultané à l'arrivée d'immigrants permettrait à tous les indigènes d'en profiter. Cela supposerait cependant qu'un schéma de transfert forfaitaire soit élaboré expressément en fonction de la politique d'immigration, ce qui est une hypothèse peu réaliste. D'autres moyens de redistribution ne permettent en général pas d'éviter complètement l'accroissement de l'inégalité. La seule existence d'un impôt progressif sur le revenu, par exemple, ne suffirait ni à corriger entièrement la baisse des revenus des pauvres suite à l'immigration ni à neutraliser l'effet sur l'inégalité11.

Par conséquent, s'il est vrai que les possibilités de redistribution sont limitées dans le contexte de l'immigration, l'arrivée d'immigrants ne conduit en général pas à une amélioration de la situation des indigènes selon le critère de Pareto. Cependant, nous estimons que ce critère est trop restrictif pour évaluer les conséquences de l'immigration.

En revanche, la perspective du bien-être social nous paraît plus adaptée dans ce contexte.

En effet, une fonction de bien-être social est un outil qui, sur la base de jugements éthiques, permet de répondre à la question de savoir si les variations de revenus induites par l'immigration sont favorables pour la société dans son ensemble. Ce problème sera abordé dans la prochaine section.

10. Précisons toutefois que même dans une telle situation favorable, l'immigration ne produit pas pour les indigènes une amélioration au sens de Pareto. En effet, les indigènes détenant plus de capital que le K/L moyen de l'économie voient leurs revenus diminuer avec l'immigration.

11. De plus, les politiques de redistribution peuvent devenir plus coûteuses (en termes d'efficacité) en présence d'une libre circulation des personnes (RAZIN et SADKA, 1994). Dans une telle situation, tous les indigènes profiteraient d'une restriction de l'immigration. Ces auteurs avancent donc l'hypothèse que l'existence de l'Etat social pourrait être une des causes de la résistance contre l'immigration.

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4. IMMIGRATION ET BIEN-ETRE SOCIAL

La fonction de bien-être social de ATKINSON (1970), que nous utilisons dans cette section, tient compte de toute la distribution des revenus des membres de la société. La mesure du bien-être social qui est dérivée de cette fonction, le « revenu équivalent distribué équitablement », permet notamment de décomposer tout changement de bien- être en une variation de l'inégalité et une modification du revenu moyen. Par conséquent, cette approche constitue un cadre d'analyse approprié pour savoir si, du point de vue de la société, l'accroissement de l'inégalité provoqué par l'immigration de travailleurs ayant peu de capital est plus important que l'augmentation du revenu agrégé.

Cependant, la spécification d'une telle fonction dépend de jugements de valeurs, qui portent notamment sur la pondération des classes de revenus. Heureusement, nos résultats sont valables pour une classe de fonctions relativement générale et ne dépendent donc pas, du moins qualitativement, des jugements de valeurs.

Pour rendre opérationnel le concept de fonction de bien-être social, on est obligé d'adopter des hypothèses assez restrictives, à savoir que les fonctions d'utilité sont cardinales et que des comparaisons interpersonnelles sont possibles. Suivant ATKINSON

(1970), nous supposons de plus que la fonction de bien-être social est symétrique et additivement separable. Elle peut alors s'écrire sous la forme:

W = ju(y)fty)dy

o

où u(y) est la fonction d'utilité (supposée identique pour tous les ménages) ctfiy) la fonction de densité des revenus des résidents.

Dans le but de définir un indicateur du bien-être social qui soit le produit du revenu moyen et d'un indicateur d'égalité, ATKINSON introduit le concept de «equally distribu- ted equivalent income» (y*). Il est défini comme étant le niveau de revenu par ménage qui donnerait, si les revenus étaient distribués de manière égalitaire, le même niveau de bien-être social que la distribution effective. Il est donc donné de manière implicite par:

u(y*) = W. Comme u est une fonction croissante, y* peut être interprété comme un indicateur de bien-être.

Un indice d'égalité E peut alors être défini en admettant que le revenu équivalent y*

est égal au produit de E et du revenu moyen12. Par conséquent, pour que dans ce cadre l'immigration soit favorable aux résidents, il faut qu'à une diminution de l'indice d'égalité corresponde une augmentation plus que proportionnelle du revenu moyen. Les

12. La mesure d'inégalité définie par Atkinson est égale à 1 - E. Comme, du moins dans le cas d'une distribution uniforme, les courbes de Lorenz d'avant et d'après l'arrivée des immigrants ne se coupent pas, cette mesure d'inégalité varie dans le même sens que l'indice de Gini.

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résultats de la section précédente tendent à indiquer que dans le cas de l'immigration de personnes faiblement dotées en capital, il y a peu de chance que cela se produise.

Pour le montrer de manière formelle, il faut cependant spécifier la fonction de bien-être social. ATKINSON (1970) prouve que si l'on admet que l'indicateur d'(in)égalité est invariant par rapport à un déplacement proportionnel de toute la distribution des revenus, et que la fonction d'utilité est homothétique, cette dernière doit prendre la forme suivante:

ry-

«OOH 1 - e

si e * 1

\ny si £ = 1

où e > 0 peut être interprété comme une mesure d'aversion pour l'inégalité. Plus 8 est grand, plus on a d'égards pour les pauvres. Pour e = 0, la fonction de bien-être social se réduit à une fonction de type utilitariste où le bien-être est simplement mesuré par la somme des revenus. A l'autre extrême, lorsque e tend vers l'infini, la fonction de bien-être social se rapproche du critère de Rawls, car elle ne tient alors compte que du revenu du ménage le plus pauvre. Par conséquent, en faisant varier ce paramètre, on couvre un large spectre de jugements de valeur.

Evaluons maintenant l'impact de l'immigration sur le revenu équivalent y*. Par souci de simplicité, nous supposons que le capital est distribué parmi les indigènes selon une loi uniforme sur l'intervalle [k^kj]. En différenciant y* par rapport aux quantités des facteurs de production, on obtient l'expression suivante:

d log y*, dU

d log wK

dU

•-s / V - *

WK dKd2l 1

(6) où y = wK le + wL est le revenu moyen de tous les ménages résidents (indigènes et étrangers) et Fest une expression qui dépend de la distribution des revenus et de la valeur du paramètre 8. En effet, on a:

Y = f l - i 2 - e

v2 - e _ A,2 - e

y\~£-ylo- , e * 1, e * 2

On vérifie facilement que dans le cas utilitariste (e = 0), Kest égal au revenu moyen des indigènes y'. On retrouve donc le résultat que nous avons discuté en détail dans la section 2, à savoir que l'impact de l'immigration est nul si aucun étranger n'est présent à l'équilibre initial.

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En revanche, si e > 013, Kest plus petit que le revenu moyen des indigènes y (et donc plus petit que le revenu moyen de tous les ménages résidents y si Le - 0). Par conséquent, si Le = 0, la variation du bien-être social est négative si les immigrants détiennent moins de capital que le K/L moyen de l'économie et positive dans le cas contraire. Plus l'aversion pour l'inégalité (8) est grande, plus ces variations sont accentuées. Un gouvernement ayant plus d'égards pour les pauvres serait donc moins favorable à l'immigration de travailleurs non qualifiés. On peut aussi montrer que la perte de bien-être social provenant de ce type d'immigration est aggravée si les revenus sont distribués de manière très inégalitaire parmi les résidents.

L'équation (6) montre que du point de vue du bien-être social, l'immigration de travailleurs détenant peu de capital ne peut produire des gains que si le revenu moyen des indigènes y1 est beaucoup plus grand que le revenu moyen de tous les résidents y.

Cela suppose la présence d'un grand nombre d'étrangers qui ont peu de capital et dont on ne tient pas compte dans la fonction de bien-être social14.

Il serait intéressant de vérifier si cette conclusion peut être mise en rapport avec les expériences des pays européens. En simplifiant à l'extrême, l'argument pourrait être le suivant. Les pays (comme la Suisse ou l'Allemagne) ayant dans le passé surtout délivré des permis de travail temporaires aux travailleurs étrangers les ont en quelque sorte exclus de leur fonction de bien-être social. D'après notre modèle, il ne serait donc pas étonnant que ces pays aient accepté un plus grand nombre de travailleurs étrangers que les pays qui ont misé plutôt sur l'intégration sociale et politique des étrangers. En effet, en Suède ou au Royaume-Uni, par exemple, la politique d'insertion des étrangers allait de pair avec des mesures de contrôle très strictes de l'immigration (HAMMAR et

LITHMAN, 1987).

Ce constat soulève un problème central de l'analyse de la migration: qui faut-il inclure dans le critère de bien-être? Dans ce contexte, la question qui est souvent posée est de savoir si l'on tient compte des migrants dans le bien-être du pays de départ ou d'accueil.

Il est clair que la réponse dépend autant de jugements éthiques que des réalités sociales.

Si dans les années soixante les guestworkers en Suisse ou en Allemagne étaient considérés comme appartenant à leur pays d'origine, une telle conception simpliste ne paraît plus tenable aujourd'hui: ces migrants ont en général des attaches avec les deux pays. Pour cette raison, une analyse qui ne prendrait en compte que les indigènes dans

13. Lorsque e = 1, y est égal à la moyenne harmonique des revenus des indigènes / . Pour e = 2, Y est égal àyoyi/y'.

14. Ce résultat s'explique de la manière suivante. D'une part, lorsque le nombre d'étrangers (ayant peu de capital) augmente, le rapport capital-travail moyen de l'économie baisse. D'autre part, si la dotation en capital d'un ménage est supérieure à ce rapport, son revenu augmente avec un accroissement marginal du nombre d'étrangers. La proportion des ménages indigènes qui profitent de l'immigration croît donc avec le nombre d'étrangers. Par conséquent, lorsque le nombre d'étrangers augmente, le bien-être social (s'il ne tient pas compte des résidents étrangers) décroît d'abord, passe par un minimum et augmente ensuite.

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le calcul du bien-être social du pays d'accueil et qui en exclurait les étrangers repose sur des bases éthiques fort discutables.

5. CONCLUSION

Cet article constitue un premier pas vers une prise en compte de la distribution des revenus dans l'analyse des conséquences économiques de l'immigration. Le résultat principal est que l'immigration de travailleurs dotés de peu de capital a en général un impact négatif sur le bien-être social du pays d'accueil. En revanche, les conséquences de l'arrivée d'immigrants ayant beaucoup de capital sont favorables du point de vue du bien-être social.

Les limites de notre étude doivent être soulignées. Les effets sur la distribution des revenus sont étudiés dans un modèle à deux facteurs de production et certains résultats sont obtenus dans des cas particuliers (distribution du capital selon une loi uniforme par exemple). Une généralisation de ces résultats nous paraît souhaitable, notamment en explicitant le rôle du capital humain. Il faudrait aussi tenir compte du fait que le marché du travail est segmenté et que les immigrants peu qualifiés n'ont souvent pas accès aux mêmes emplois que les indigènes.

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RESUME

Cet article examine les effets de l'immigration sur le revenu agrégé et sur la distribution des revenus. D'une part, l'immigration augmente en général le revenu agrégé des résidents, d'autre part, elle rend la distribution des revenus plus inégalitaire, si les immigrants apportent peu de capital. Ces deux effets peuvent être analysés conjointement à l'aide d'une mesure de bien-être social. En général, l'immigration de travailleurs ayant peu de capital fait baisser le bien-être social des résidents. Par contre, l'arrivée d'immi- grants détenant beaucoup de capital est favorable selon cette mesure.

SUMMARY

This paper explores the consequences of immigration for aggregate income and income distribution. On the one hand, immigration generally increases the residents' aggregate income, on the other hand, it makes income distribution more unequal if immigrants bring little capital with them. These two effects can be analyzed jointly using a measure of social welfare. In general, the arrival of immigrants owning little capital lowers social welfare of residents and immigration of capital-rich persons increases it.

ZUSAMMENFASSUNG

In diesem Artikel werden die Auswirkungen der Immigration auf das Gesamteinkommen und die Einkommensverteilung des Gastlandes untersucht. Einerseits erhöht die Einwan- derung im allgemeinen das Gesamteinkommen, anderseits wird die Einkommensvertei- lung ungleichmässiger, wenn die Immigranten wenig Kapital mitbringen. Diese beiden Auswirkungen können gemeinsam anhand eines Indikators von sozialer Wohlfahrt analysiert werden. Im allgemeinen sinkt die soziale Wohlfahrt durch die Ankunft von Immigranten mit wenig Kapital und steigt durch die Einwanderung von Leuten, die viel Kapital besitzen.

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