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Prix de la Ville de Genève et prix de la Fondation Adolphe Neuman 1979: remise officielle des prix de la Ville de Genève samedi 21 avril 1979 au Grand Théâtre à Marc-R. Sauter, Jean Starobinski, Olivier Reverdin, Philippe Lambercy

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Prix de la Ville de Genève et prix de la Fondation Adolphe Neuman 1979: remise officielle des prix de la Ville de Genève samedi 21 avril

1979 au Grand Théâtre à Marc-R. Sauter, Jean Starobinski, Olivier Reverdin, Philippe Lambercy

RAISIN, Pierre, et al.

RAISIN, Pierre, et al. Prix de la Ville de Genève et prix de la Fondation Adolphe

Neuman 1979: remise officielle des prix de la Ville de Genève samedi 21 avril 1979 au Grand Théâtre à Marc-R. Sauter, Jean Starobinski, Olivier Reverdin, Philippe Lambercy. Genève : Ville de Genève, 1979

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:98540

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PRIX

DE LA

VILLE DE GENÈVE

1979

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-

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PRIX DE LA VILLE DE GENÈVE

ET PRIX DE LA FONDATION ADOLPHE NEUMAN

1979

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REMISE OFFICIELLE DES

PRIX DE LA VILLE DE GENÈVE

SAMEDI 21 AVRIL 1979 AU

GRAND THÉATRE A

MARC-R. SAUTER

JEAN STAROBINSKI ÜLIVIER REVERDIN PHILIPPE LAMBERCY

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PRIX DE LA VILLE DE GENÈVE

COMMISSION DE PRÉAVIS PRIX DES SCIENCES MM. ARMAND BUCHS

RONALD CHESSEX Mme JEANNIK DAMI Rapporteur MM. HUBERT GREPPIN

LÉON V AN HOVE

PRIX DE LITTÉRATURE M. JACQUES BUENZOD

Mme ETIENNETTE CHALUT-BACHOFEN Rapporteur MM. JÉROME DESHUSSES

JEAN-CLAUDE FA VEZ JEAN-CLAUDE FONTANET

PRIX DES SCIENCES HUMAINES Rapporteur MM. CHARLES BONNET

PHILIPPE GRA VEN ANDRÉ HURST Mme BARBEL INHELDER

M. GABRIEL-PHILIPPE WIDMER

PRIX DES ARTS PLASTIQUES MM. DOMINIQUE APPIA

DOMINIQUE BOVY Mme ALICE J A QUET

Rapporteur MM. JEAN-JACQUES MEGEVAND MICHEL RAPPO

PRIX DE MUSIQUE M. ALBERTO GINASTERA

Mme GENEVIÈVE GUYONNET-CALAME MM. JEAN-PIERRE SURGET

CLAUDE VIALA ANDRÉ ZUMBACH

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ALLOCUTION DE M. PIERRE RAISIN Maire de la Ville de Genève

Mesdames et Messieurs les représentants des Autorités, Messieurs les lauréats,

Messieurs les rapporteurs, Mesdames et Messieurs,

C

'EST un bien agréable devoir et un honneur qui m' échoient ce soir d'apporter le message du Conseil administratif aux lauréats des Prix de la Ville de Genève, et à tous ceux qui sont venus les entourer et les fêter.

Ils sont nombreux, en effet, ceux qui ont tenu à manifester par leur présence l'intérêt qu'ils portent aux Prix de la Ville de Genève et la joie qu'ils éprouvent à féliciter ceux qui en sont les bénéficiaires.

Vous avez senti et apprécié, sans doute, la haute portée de cette cérémonie organisée en l'honneur et à la gloire de quatre personna­

lités qui ont consacré toute leur vie à la science, aux arts et à la littérature; et vous avez voulu affirmer, aussi, qu'à une époque où le doute règne en maître sur un un vers dominé par l'instabilité morale, le déséquilibre économique et la crainte de conflits armés, vous entendez donner aux valeurs stables, qu'elles soient artistiques, spirituelles ou scientifiques, l'importance prédominante et la signi­

fication profonde que nous avons le devoir de leur conférer.

C'est dans cet esprit qu'est née, en 1944, l'idée d'attribuer périodi­

quement des Prix de la Ville de Genève de littérature, des beaux­

arts et de la musique.

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Les premiers prix furent décernés en 1947 à Messieurs Alexandre Blanchet, Jacques Chenevière et Emile Jaques-Dalcroze.

Par la suite, furent encore créés les prix des sciences et des sciences morales.

Au cours de ces 32 années, un nombre important de personnalités du monde des arts et des sciences a mérité et reçu les Prix de la Ville de Genève.

Ce soir, ce n'est pas pour proclamer les réultats d'un concours que nous sommes réunis ici mais pour récompenser et honorer publiquement, et comme ils le méritent, des hommes éminents qui, par leurs recherches et leurs œuvres, ont brillamment contribué au rayonnement de Genève.

Car s'il est vrai que Genève a eu le privilège d'inscrire au livre de son histoire des citoyens célèbres dans le domaine des arts et des sciences, il nous plaît de constater que, parmi les vivants, ceux que nous fêtons ce soir s'imposent par leur talent, par la richesse de leur imagination, de leur style, de leurs conceptions littéraires, artistiques et morales ou par l'ampleur de leurs connaissances scientifiques, à l'estime et à l'admiration de leurs contemporains.

Puissent-ils vivre longtemps encore et continuer à exprimer avec la même conviction, avec le même entrain et avec le même goût de la recherche, les résultats scientifiques, les sentiments, les couleurs et les pensées qui ont touché si vivement l'âme de leurs concitoyens.

Je tiens à féliciter tout spécialement, parmi les lauréats, Monsieur Philippe Lambercy qui reçoit ce soir le prix dû à la générosité de feu Adolphe Neuman, attribué dans le cadre des Prix de la Ville de Genève.

Je voudrais, avant de conclure, remercier, au nom des autorités municipales, les membres de la Commission consultative, dont la charge est astreignante et délicate, ainsi que les Présidents et Rapporteurs.

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Une pensée de reconnaissance particulière va à ma collègue Madame Lise Girardin, déléguée aux Beaux-Arts, qui préside aujourd'hui pour la dernière fois la cérémonie de remise des Prix de la Ville de Genève, puisqu'elle a décidé de ne pas solliciter une réélection au Conseil administratif, après douze années d'activité intense et fructueuse, consacrée au développement des arts et de la culture à Genève.

Messieurs Philippe Lambercy, Olivier Reverdin, Marc Sauter, Jean Starobinski j'ai l'honneur et le plaisir de saluer en vous les lauréats des prix quadriennaux de la Ville de Genève et de vous présenter les félicitations sincères et cordiales du Conseil administratif.

Du fond du cœur, je vous dis: vous avez bien mérité de Genève, Genève vous en est reconnaissante.

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RAPPORT

DE LA SOUS-COMMISSION DES SCIENCES présenté par

M. HUBERT GREPPIN

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MARC-R. SAUTER

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Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs,

D

EPUIS quelques siècles, il s'est toujours manifesté à Genève, un grand intérêt pour les Sciences. Il est vrai que celles-ci, dès le 18ème siècle, ont eu un développement extraordinaire, en particulier dans le vaste domaine des sciences naturelles et expéri­

mentales. La communauté scientifique genevoise d'aujourd'hui, tout en présentant une palette différente, mais nullement inférieure, s'inscrit pleinement dans la poursuite de ce développement presti­

gieux qui concourt tant à l'adaptation et à l'établissement solide qu'au rayonnement diversifié de la Cité, dans le monde actuel. La remise du prix des sciences me paraît être le signe que cet intérêt, aussi bien des autorités que du grand public, loin d'être émoussé, est toujours bien vivant. Ce témoignage est particulièrement impor­

tant dans la période difficile où nous nous trouvons ...

Le choix des membres du jury, après délibération, s'est porté unanimement sur la personne du professeur Marc-R. SAUTER, directeur du département d'anthropologie et enseignant à l'Université la paléontologie humaine, la paléoanthropologie et l'archéologie préhistorique, l'anthropologie physique et l'ethnologie. Ces disci­

plines peuvent être situées à cheval entre les sciences exactes et biologiques d'une part, et d'autre part les sciences humaines.

L'ancrage fait à Genève, contrairement à d'autres universités, ' dans la section de biologie de la Faculté des Sciences, traduit bien l'orientation et l'empreinte que l'on a voulu donner à ces différentes

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approches de l'homme. Toutefois, la double formation du pro­

fesseur SAUTER, à la fois littéraire et scientifique, permet de bien articuler et tempérer cette dialectique nature-culture, indispensable aux progrès de la connaissance en anthropobiologie et en préhistoire.

Les mérites du lauréat, personnalité pondérée, profondément honnête et désintéressée, de même que son apport à la Cité sont multiples et dépassent largement le cadre strictement scientifique;

je ne citerai ici, à titre d'exemple, que son activité au sein du Conseil de fondation de la Faculté de Théologie. Il a toujours su donner largement son temps à la collectivité; je n'en veux pour preuve que sa présence et son action discrète et efficace, à divers moments, au niveau local, suisse et international, dans de nombreux conseils, institutions et sociétés scientifiques, universitaires ou académiques.

En 1949, après des études littéraires et scientifiques à Genève, il succéda à son maître, le professeur Eugène PITTARD, ayant été préalablement privat-docent pendant quelques années. La situation qui lui fut offerte alors, malgré le prestige incontesté de son prédécesseur, fut loin des plus brillantes, puisque l'Institut d'anthropologie ne comptait que deux personnes et disposait d'un très faible apport financier. Ceci l'obligea à exercer diverses activités annexes dont celle de maître de géographie humaine au Collège de Genève (Collège Calvin actuellement).

Nullement découragé par la difficulté, il a su, par son travail et sa volonté de durer, surmonter ce hanrlicap et aboutir à la situa­

tion présente où l'on voit l'Université de Genève dotée d'un impor­

tant département d'anthropologie, jouissant d'une excellente répu­

tation scientifique et composé de nombreux professeurs et colla­

borateurs dans les domaines tels que l' Archéologie préhistorique, l' Anthropobiologie et la Génétique des populations pour n'en citer que quelques-uns ... Si le professeur SAUTER s'est fait par son propre travail, qui est très dense, il a d'autre part créé des conditions très favorables, permettant à ses collaborateurs les plus

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doués de s'épanouir. Il a favorisé une adaptation incessante, en fonction des progrès scientifiques, dans les domaines dont il avait la responsabilité, tout en permettant la mise en place de disciplines nouvelles ainsi que l'articulation avec des orientations plus éloi­

gnées de sa spécialisation, ainsi l'Ecologie humaine dont l'importance et l'actualité n'échapperont certainement à personne ...

Centrées sur l'étude de l'Homme, de l'espèce humaine dans ses variations et sa production technique et culturelle, les préoccupa­

tions de son département portent sur deux plans :

- le synchronique et spatial où sont saisies les variations de l'homme actuel et subactuel, en tant qu' organisme biologique soumis aux lois de la génétique et de l'écologie, sans négliger pour autant ses caractéristiques socio-culturelles.

- le diachronique ou temporel, où l'on recherche à appréhender les mêmes variations dans leur évolution tout en intégrant l'apport technique et culturel.

Il m'est difficile de présenter, par le menu et dans toute sa diversité, la carrière du lauréat du Prix scientifique de la Ville de Genève dont l'œuvre scientifique comporte plus de 230 publications. Je me contenterai, qu'il veuille bien m'en excuser, d'une présentation extrêmement simplifiée. Le professeur SAUTER est un littéraire venu à la Science; ses préoccupations majeures sont la préhistoire et l'anthropologie. Il a réalisé de nombreuses fouilles préhistoriques en Valais et a participé à d'innombrables sauvetages sur le plan anthropologique et préhistorique, en Romandie. Son activité d'archéologue cantonal à Genève, celle qu'il a exercée de la même manière, mais à titre privé, en Valais, ont été très appréciées. La préhistoire valaisanne, dont il a fait un inventaire complet, lui doit beaucoup. On peut le considérer, à juste titre, comme le découvreur du néolithique valaisan. Il s'est aussi fait connaître, tant des spécia­

listes que du grand public, par quelques ouvrages de synthèse

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dont je cite pour mémoire: la préhistoire de la Méditerranée, paru en 1948; les races de l'Europe, édité en 1952 et, en 1976: la Suisse préhistorique des origines aux Helvètes. Il a participé à la rédaction de nombreux ouvrages collectifs sur Genève, le Léman, la Savoie, l' Arc alpin et les Alpes, etc. L'intérêt suscité par ses travaux lui ont valu de nombreuses distinctions de la part de sociétés savantes suisses, françaises, belges, monégasques, allemandes et anglaises.

Les raisons essentielles qui ont amené le jury au choix proposé id, sont fondées sur la valeur des travaux scientifiques et la réputa­

tion du professeur Marc-R. SAUTER, la qualité des ouvrages qu'il a publiés dont l'effet s'est exercé sur un très large public et a contribué largement au rayonnement scientifique et culturel de Genève. Les entreprises nombreuses qu'il a menées pour la sauve­

garde du patrimûine archéûlûgique et anthropûlûgique, la mise en place d'un département d'anthropologie s'intéressant aussi bien aux racines de l'homme et à l'aube de son histoire qu'à la compré­

hension de son fondement biologique et son insertion dans la nature, lui valent toute notre reconnaissance et notre admiration.

J'aimerais ajouter, à titre personnel, qu'il m'est particulièrement agréable, en tant que son ancien élève, de me faire le porte-parole de mes collègues du jury, en lui présentant nos plus vives félicitations.

* * *

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BIOGRAPHIE

1914 Naissance à Genève

1933 Certificat de maturité au Collège classique 1937 Licence ès lettres de l'Université de Genève

1941 Doctorat ès sciences anthropologiques sous la direction du Professeur Eugène PITT ARD

1942 Privat-docent à la Faculté des Sciences

1949 Professeur extraordinaire d'anthropologie et de paléon- tologie humaine.

1956 Professeur ordinaire 1963 Archéologue cantonal

1963-66 Doyen de la Faculté des Sciences 1968-71 Président de la Section de Biologie

Le Professeur SAUTER a été président de diverses sociétés scientifiques (Genève: géographie, physique et histoire naturelle, histoire et archéologie; Suisse: anthropologie et ethnologie, pré­

histofre ). Il a été membre du Conseil permanent et du Conseil exécutif de l'Union internationale des Sciences préhistoriques et protohistoriques, membre du Conseil permanent de l'Union inter­

nationale des Sciences anthropologiques et ethnologiques. Il a occupé différentes fonctions importantes au Fonds National Suisse de la Recherche scientifique.

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QUELQUES PUBLICATIONS IMPORTANTES DE MARC-R. SAUTER

Une bibliographie complète de ses travaux figure dans les « docu­

ments pour servir à l'Histoire de l'Université de Genève», Cata­

logue IX à XVI.

Contribution à l'étude anthropologique des populations du haut moyen âge dans le bassin du Léman et le Jura. Le problème des Burgondes. Recherches d'anthropologie historique. (Thèse de doctorat). Genève, 1941, et archives suisses d'anthropologie générale, Genève, 1941, X, p. 1-137.

Les races brachycéphales du Proche-Orient, des origines à nos jours. Archives suisses d'anthropologie générale. Genève, 1945, XI, p. 68-131.

Préhistoire de la Méditerranée. Paléolithique, mésolithique. Paris, Payot, 1948, 1 vol. in-8, 186 p., fig.

Etude des corrélations séro-anthropologiques dans la population féminine de Genève (avec Hélène Kaufmann). - Archiv der Julius Klaus­

Stiftung Festgabe für Prof. Dr. Otto Schlaginhaufen, Zürich, 1949, XXIV, p. 479-496.

Préhistoire du Valais. Des origines aux temps mérovingiens. - Sion, 1950, 1 vol., gr. in-8, Extrait de Vallesia, Sion, 1950, V, 165 p. fig.

17 pl.

Les races de l'Europe. - Paris, Payot, 1952, 1 vol. in-8, 341 p., fig.

cartes.

Préhistoire du Valais. Des origines aux temps mérovingiens. Premier supplément à l'inventaire archéologique (1950-1954). - Vallesia, Sion, 1955, p. 1-38.

Préhistoire du Valais, des origines aux temps mérovingiens. Deuxième supplément à l'inventaire archéologique (1955-1959). - Vallesia, Sion 1960, p. 241-296.

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Le Néolithique du niveau inférieur du Petit-Chasseur à Sion, Valais (avec A. Gallay et L. Chaix). - Annuaire de la société suisse de préhistoire et d'archéologie, Bâle, 1971, 56, p. 17-76.

Anthropologie du Néolithique - La Suisse. Présentation critique de la documentation. Fundamenta, Koln, 3, Reihe B, 1973, p. 235-252.

Switzerland from earliest Times to the Roman Conquest. - London, Thames, 1976, 208, p.

Suisse préhistorique des origines aux Helvètes. Neuchâtel, La Baconnière, 1977.

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RAPPORT

DE LA SOUS-COMMISSION DE LITTÉRATURE présenté par

M. JEROME DESHUSSES

JEAN STAROBINSKI OU LA MÉDIATION

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JEAN STAROBINSKI

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Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs,

N

ous vivons une époque de culture émiettée, c'est-à-dire d'anti­

culture, où ce qui divise pour régner n'est rien d'autre que le désordre régnant. En écrivant: « La connaissance est un pou­

voir», Bacon oubliait la moitié de nos pouvoirs parce qu'il avait entrevu le centième de nos connaissances. Le « gai savoir» ne devait sa gaieté presque pleine qu'à un savoir presque vide, mais son enthousiasme par omission, du Quattrocento à nos positivismes en passant par toutes les sortes de Lumières et d' Aufklarungen, a si bien fait école qu'il demeure le fondement de la scolarité.

« Faites de l'homme un puits de science et vous ferez de la science un réservoir d'humanisme» pourrait être sa devise. « Faites de la connaissance un instrument d'humanisme et vous ferez de l'huma­

nisme un instrument de terreur» pourrait être la réponse. Car Bacon avait négligé de voir que toute prise sur les choses est une emprise sur les gens, que le Mal qu'on alphabétise est une bêtise devenue maligne et qu'alors la culture n'est plus que ce qui mène du Moi inculte au culte du Moi, c'est-à-dire d'un désert de mirages à un désert de miroirs. Elle n'est plus même, cette culture, selon le mot célèbre, « ce qui reste quand on a tout oublié», mais plutôt ce qu'il faut oublier pour qu'il reste quelque chose. Jamais le « gai

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savoir» n'a été plus triste ni, en somme, moins savant, jamais son pouvoir d'intimidation n'a été plus vaste, et jamais il n'y a eu tant de spécialistes aveugles à qui leurs œillères servent de lunettes.

Le mot « culture», qui était encore, au XIXe siècle, proche de ses origines agricoles, devient assez autonome aujourd'hui pour servir d'étiquette à des disciplines qui ne sauraient mieux mériter leur nom, et dont les frontières, une fois tracées, ne se franchissent plus sans passeport. Le psychologue n'est pas sociologue, ]'anthro­

pologiste n'est pas zoologiste, la physique voit X là où les biologistes voient Y - ainsi de suite, et cette suite ne fait malheureusement que commencer. Le savoir, pour être universel, se décompose;

quand son universalité sera complète, sa fragmentation le sera aussi, et nous aurons pris toute vive l'immensité du monde dans un immense filet de mort. « Analyse» dérive d'une racine qui signi­

fie « détruire», et « science» est parent du verbe « scier». L'heure du savoir absolu, donc de la scission totale, sera celle où plus aucun homme n'en comprendra un autre. Or c'est justement dans le domaine de la critique littéraire que le sommet du découpage est atteint. Le radical du mot « critique», signifie, lui aussi, trancher, alors que le texte, qui est un tissu, ne se déchire pas sans devenir haillon. Une critique créatrice est donc la plus haute des contradic­

tions, c'est-à-dire le plus grand des paris. Il me semble que Jean Starobinski a tenu, dès ses premiers travaux, ce pari-là, et que toute son œuvre condamne d'elle-même l'absurde culture émiettée que je viens d'évoquer. j'ai parlé d'analyse. La critique de Starobinski va toujours dans la direction de la synthèse. Jamais elle ne coupe le souffle d'un ouvrage pour en faire comprendre le mécanisme, ni n'explicite ce qui émeut par ce qui ne se meut plus, ni ne fait sortir le Plus du Moins; nulle part elle ne préfère l'œuvre-serrure à l'œuvre-clé, ni ne tente de recréer la fascination par le ressasse­

ment, comme cela arrive lors de ces répétitions musicales si répéti­

tives que la décomposition des compositeurs n'y est jamais trop avancée puisque, sans cesse, c'est la musique qui recule. Baudelaire

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écrivait que tout bon créateur recèle un critique; la démarche de Starobinski suggère qu'à l'inverse tout bon critique est un créateur.

La force d'une voix se mesure aux distances qu'elle franchit. Pour Jean Starobinski, dont je me crois tout ensemble éloigné par le cheminement et proche par le chemin - car la culture réelle est l'obstination d'un humanisme dont tous les chemins mènent à l'Homme - je ne puis expliquer l'écho qu'il trouve en moi que par cette forme supérieure de résonance, où l'on n'existe que parce qu'on résiste, où le réfracté implique le réfractaire et où les points de friction sont toujours des points de contact; là se trouve le secret de la sympathie, c'est-à-dire du « sentir-avec», ou du consen­

tement. « Donner son consentement» n'est qu'une tournure; en réalité tout consentement se gagne, sans violence ni douceur, par un acte de médiation qui, chez Starobinski, est le même d'un bout "''' à l'autre de l'œuvre; une œuvre qui n'est intellectuelle qu'au sens instrumental, mais dont le motif et le moteur ne sont qu'amour, partage et communion. On a dit que chaque créateur de génie ouvre une porte qu'il referme derrière lui. La dialectique transpa­

rence-obstacle règne beaucoup moins sur les écrits de Rousseau que dans l'esprit de Starobinski lui-même, pour qui toute porte fermée est un obstacle qu'on ne peut abattre sans déliter l'œuvre ou l'âme qu'elle abrite ou dissimule, en sorte que le seul éclairage possible résulte de l'ouverture d'une fenêtre. C'est ici que les deux cultures, scientifique et littéraire, se prêtent main-forte. Starobinski les possède toutes deux à fond, et le fait est trop rare pour qu'on n'y discerne pas un des traits distinctifs de son travail. On sait qu'Oppenheimer lisait Louise Labé en français; mais quel poète, aujourd'hui, pourrait lire Oppenheimer? Lorsque la Science impose des concepts que même la philosophie a désertés, et qu'elle les impose par le seul hermétisme de son langage, celui qui connait ce langage-là y verra moins de fantômes que celui qui l'ignore.

Le sommeil de la raison engendre les monstres, comme l'indique Goya dans un tableau cher à Starobinski; or Starobinski s'est donné

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pour m1ss1on, entre autres, de mettre les monstres en sommeil par le règne de cette Raison qui a connu plusieurs éclats et plusieurs éclipses, mais jamais de nuit totale. S'il n'était pas un peu fallacieux d'appeler « thématique» la méthode de Starobinski - car travailler sur un texte, c'est obligatoirement y repérer des thèmes - on pourrait qualifier ainsi, en revanche, l'ensemble d'une œuvre dont le thème central apparaîtrait déjà dans la seule énumération des titres. Sta­

robinski est avant tout un utopiste rétrospectif, il est l'homme des Lumières - et de leur cercle d'ombre - l'homme de la Raison - et de son halo de folie - l'homme d'un grand rêve obstiné et sublime qui prit naissance avec l'aurore grecque et ne déclinera qu'au cré­

puscule du monde. Au surplus, la curiosité de cet écrivain semble n'avoir aucune limite; quand la science s'égare, le texte parle ; quand le texte défaille, la peinture est encore là ; et quand la pein­

ture s'efface, voilà la musique qui commence. Rien ne me paraît plus helvétique que ce goût de tout assumer et si possible de tout fondre. Avant guerre déjà, Béguin se distançait d'un Thibaudet en abolissant toute distance à l' œuvre: l' Ame Romantique et le Rêve est un livre de contagion, rêveur et romantique, parent en cela seul des tentatives de Mme de Staël ( ou de Constant, ou de Senan­

cour) pour unir la France et la Germanie à travers ces terrae inco­

gnitae où la Suisse se trouve sans doute encore. L'esprit de synthèse, en Suisse, est une seconde nature, puisque la nature de la Suisse est une synthèse réussie. On le voit certes chez Rousset, chez Raymond, mais on en est frappé chez Starobinski. S'intéresser à Füssli et à Paracelse, se servir du miroir plutôt que du crible, lire l'Evangile en analyste ou chercher dans l'analyse un message évan­

gélique: c'est en quoi Béguin et Starobinski rejoignent Jung, ce syncrétiste, dont l'élève Charles Baudoin tente une Psychana{yse de Victor Hugo qui vise ce miracle d'éclairer un phare avec son ombre. Starobinski n'essayera jamais rien de pareil, car en plus de l'esprit synthétique, il a, de son pays, l'esprit de médiation. Peu soucieux de renverser les montagnes, il aime prendre la peine de

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les gravir ; les éclaircissements qu'il donne ressemblent plus à des éclaircies qu'à des éclairages ; ils sont allusifs, raffinés, parfois indirects ; enfin Starobinski n'aime pas les polémiques, sachant qu'il y a de la raison même derrière les torts, comme il y a des forces derrière tous les heurts, et que le mot « brouille », qui désigne généralement l'issue de ces combats, représente l'inverse de la transparence. On a donc l'impression, à lire Starobinski, d'un homme qui se tient au-delà ou en-deça de son temps. Rien n'est plus faux - outre qu'avoir été de son temps est d'abord le propre du fossile. Organisateur des Rencontres Internationales de Genève depuis de nombreuses années, Jean Starobinski joue là encore son rôle de conciliation, quelquefois même il se livre à une sorte de maïeutique ; mais en lisant, par exemple, l' Invention de la Liberté ou Les emblèmes de la Raison, deux livres d'art parmi les plus intelli­

gents, c'est-à-dire les plus cohérents, que je connaisse, comment ne pas sentir qu'un homme qui se penche avec un tel soin sur l'iconographie révolutionnaire cherche dans ce passé quelque chose qui ressemble à la promesse d'un avenir? Dans Montesqttieu par lui-même, qui est sa première œuvre importante, Starobinski parvient à tout suggérer sans rien affirmer, et sa méthode rappelle bien moins le palimpseste, qu'on obtient par grattage, donc par destruc­

tion, que le procédé de Galton, où plusieurs portraits superposés en forment finalement un seul. Montesquieu prélude à l'Encyclo­

pédie, qui prélude à la Révolution ; Starobinski cherche chez lui l'origine sourde d'une origine claire. Quant à l'amour de l'œuvre dont j'ai parlé tout à l'heure, il éclate, bien sûr, dans Rousseau, la transparence et l'obstacle ainsi que dans les Sept essais sur Rousseau qui en forment aujourd'hui la suite. Disons-le au passage, la cri­

tique « objective » qui régnait voici quinze ans était, au sens littéral, une inconséquence : elle plaquait l'appareil (et plus souvent l'appa­

rence) d'un savoir contraignant sur un choix délibéré. La critique d'humeur et la critique scientifique ne divergeaient qu'à partir d'une origine commune - et humorale. Starobinski, là encore, a

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su maintenir ses distances pour demeurer fidèle à ses proximités.

Il s'agissait de faire aimer, non un auteur, mais un ensemble d'idées;

poursuivre Rousseau jusqu'au bout de son idéal revient à poursuivre un idéal jusqu'au fond de Rousseau, pour dépasser ensuite l'un et l'autre. Dans cet ouvrage surtout, et à tout moment, j'ai ressenti, par l'espèce de jubilation tonique de cette très grande culture qui joue d'elle-même sans jamais s'étaler, une sorte de foi dans la Raison dont je connais aujourd'hui peu d'exemples. Cette curiosité à facettes, parfois légèrement empreinte d'inquiétude, se déploie dans deux ouvrages qui se font suite, l'Œil Vivant et La Relation Critique.

Qui ne se souvient du brillant morceau intitulé Stendhal pseudonyme ? Par-delà le goût stendhalien, apparemment accessoire, pour le déguisement verbal, c'est justement la passion de l'apparence, de l'accessoire et même du clinquant que l'homme Beyle laisse percevoir sous le romancier Stendhal, alias Bombet, alias Salviati, alias Dominique- alias alius. Je est un autre, et cet autre n'est per­

sonne. Persona signifie masque, et Stendhal démasqué passe du pseudonyme à l'anonymat: témoin l'un des seuls journaux intimes qui n'aient jamais visé à la publication, si ce n'est, à nouveau, sous un déguisement nommé Henry Brulard. Ce rituel du masque vire au rite de la mascarade dans l'un des plus beaux livres de Sta­

robinski, le Portrait de l' Artiste en Saltimbanque. « Quand le sage montre la Lune, dit Confucius, l'imbécile regarde le doigt». Ainsi l'artiste, identifié par force à ce qu'il montre, et devenu l'illustra­

tion de sa défense, doit-il reculer vers une arrière-scène où personne ne le verra jamais. Ce thème du clown, repris par toute la poésie et qui, à partir du Romantisme, devient une sorte d'obsession, n'est évidemment pas universel ; certains de leur importance et de leur mission, ni Goethe, ni Schiller, ni Hugo ni même Lamar­

tine n'y auraient songé. Mais chez Banville, chez Baudelaire, chez Laforgue et tant d'autres, l'image du saltimbanque est toujours une espèce d'autoportrait, non seulement parce que l'art tout entier, devenu marginal, se reproche sourdement d'être inefficace,

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mais aussi et surtout parce que, comme le montre Diderot dans le Paradoxe sur le Comédien, il y a dans la création une sorte d'insen­

sibilité obligée. Exprimer, c'est expulser. La fameuse distanciation voulue par Brecht a toujours été une règle pour tous les créateurs.

Celui qui parle ne connaît pas de plus grand péril que de succomber à sa propre éloquence. D'où le paradoxe de Diderot : exprimer le mieux c'est ressentir le moins. Comment ne pas penser aussi à Schelling, pour qui la sensibilité est en raison inverse de l'irrita­

bilité? Il en résulte, là aussi, que Je est un autre et, pour paraphraser encore Rimbaud, que la vraie vie est ailleurs. Si limpide que veuille être le discours, la source dont il procède n'est pas celle qu'il engen­

dre. Nous sommes l'obstacle de nos transparences et le comédien de nos tragédies. Nerval, on le sait, vivra ce déchirement jusqu'à en mourir. C'est encore à une dissimulation - hypothétique - que s'attaque Starobinski dans Les Mots sous les Mots ; il ne fait qu'y suivre Saussure sur les pistes brouillées, ou inexistantes, de ses anagrammes. La tentative anagrammatique de Saussure repose sur deux principes saussuriens centraux : d'abord l'arbitraire du signe, ensuite le fait qu'il ne peut y avoir de linguistique diachronique.

Si tout signe est effectivement arbitraire ( sans quoi, naturellement, il serait sens et non plus signe) pourquoi le réarrangement arbitraire d'un ensemble de signes ne ferait-il pas apparaître une parenté de sens ? Et puisque l'étymologie n'a rien de scientifique (car on n'expli­

que pas la fonction d'une structure par son histoire), pourquoi les parentés dites synchroniques, c'est-à-dire actuelles et formelles, ne dissimuleraient-elles pas un apparentement profond ? Après tout, du grec au latin, n'est-pas un anagramme qui change « morphè » en « formae »? Le surréalisme a poussé plus loin que Saussure la chasse aux analogies, aux anagrammes et même aux calembours, mais la folie pousse toutes ces chasses à la fois plus loin que le surréalisme. Et c'est à la folie enfin que Starobinski s'adresse dans son ouvrage le plus étrange, les Trois Fureurs, où sont traités suc­

cessivement l' Ajax furieux de Sophocle, le possédé de Gerasa 3 5

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(Evangile selon Saint Marc) et le célèbre Cauchemar de Füssli.

Pour l'historien passionné de la Raison, il y aurait du paradoxe dans l'examen de ces trois délires si l'expression « perdre la raison » n'était totalement fausse, et si la raison n'était au contraire la der­

nière chose que la démence sache perdre. Le délire n'est rien d'autre, et Starobinski le montre bien, que l'ensemble des conséquences rationnelles qu'on peut tirer d'un ensemble d'intuitions fausses.

S'il n'y a pas, dans tout homme éveillé, un fou iui sommeille, c'est qu'il y a déjà dans tout homme qui sommeille une folie qui se lève, et que chaque démence peut nous lancer, à peine modifiée l'invective baudelairienne: « Hypocrite rêveur, mon semblable, mon frère ». Starobinski nous rend ici cette fraternité plus évidente, dans ce style aisé, limpide et généreux qui a toujours été le sien.

A considérer encore le nombre et la valeur de tous les écrits que Jean Starobinski dissémine dans tant de revues ou de collectifs, et dont certains, comme son dernier « Voltaire», sont admirables;

à considérer la carrière d'un écrivain qui, docteur en médecine, explore la psychiatrie, qui, docteur en lettres, pousse son étude très avant dans la philosophie ou qui, parfait connaisseur de l'his­

toire picturale européenne, consacre à la musique, et plus exacte­

ment au piano, une partie de son temps ; à considérer enfin les quelque douze ou treize distinctions qu'a pu recevoir déjà ce cri­

tique qui fut toujours maître plutôt que professeur - à considérer tout cela, j'avoue que l'éloge se décourage. Mais s'il est vain de blanchir les lys, il est indispensable de leur donner toute la lumière qu'ils réclament, surtout lorsqu'ils pourraient la réclamer en retour parce qu'elle est, simplement, réfléchie. Jean Starobinski a fait rayonner Genève, il était temps que Genève le lui rende. Je n'éton­

nerai certainement personne en disant que l'unanimité du jury a été immédiate et totale. L'évidence ne se choisit pas, elle s'impose.

Jean Starobinski n'ayant pas été cette année l'un des jurés de ce prix, l'occasion devait être saisie. Ainsi arrive-t-il qu'une absence comble un vide.

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Né en 1920, Starobinski est aujourd'hui à son zénith. Mais il y a des sommets d'où l'on ne redescend pas: ce sont ceux dont on s'envole ; de même qu'il existe des intelligences qui ne peuvent pas s'éteindre: ce sont celles qui ont pour passion d'en allumer d'autres. L'intelligence, dont le nom indique qu'elle doit lier les choses entre elles, commence par relier les hommes entre eux, faisant de chacun l'alter ego de l'autre - alter pour la forme, ego pour le fond. « Lecteur insensé qui crois que je ne suis pas toi»

s'exclame Hugo dans la Préface des Contemplations. Mais si nous sommes tous le Même, toute l'histoire de la Vie ne serait-elle pas celle d'une immense Personnalité indéfiniment dédoublée - Dieu Schizophrène? Alors, l'identité que nous avons pour source, comment ne l'aurions-nous pas pour but? Mais but et source sont une seule chose, comme début et fin, alpha et oméga. Les sources ne sont jamais en aval ; on n'y retourne qu'en montant ; elles nous ont déjà touchés mais nous ne les avons pas encore atteintes. Au commencement était le Verbe, mais le Verbe avait un sens dont tout esprit ne fait que rechercher la trace, patiemment, de la Raison qui veut que deux et deux fassent quatre, en passant par cette raison supérieure qui voulut qu'alter et ego fassent deux, jusqu'à cette raison suprême qui nous fait espérer, et même nous prédit, qu'un jour, un jour sans fin, à la fois premier et dernier jour du monde, Dieu et Dieu ne feront qu'Un.

* * *

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RAPPORT

DE LA SOUS-COMMISSION DES SCIENCES HUMAINES

présenté par

M. CHARLES BONNET

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Photo Mandanis

OLIVIER REVERDIN

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Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs,

L

E lauréat du prix des sciences humaines est largement connu du public : journaliste lancé dans le débat politique, parlemen­

taire, homme d'action sur le plan international, Olivier Reverdin s'est fait connaître dans les milieux les plus larges et l'on s'étonne parfois de découvrir que cet homme d'action est fondamentalement un homme de science. Or, si l'on y regarde de plus près, il apparaît que le spécialiste de la Grèce antique n'est jamais entièrement absent. Un paragraphe extrait de son œuvre en témoigne avec éloquence : « Pourquoi est-il aujourd'hui, plus que jamais, indis­

pensable de connaitre l'homme? En raison du pouvoir démesuré que la technologie, fille de la science, lui donne sur l'Univers et sur ses semblables. N'est-il pas en passe de changer la face de la Terre, et, qui sait, de la rendre un jour, pour lui, inhabitable. Il capte la force des fleuves, des mers, des vents et il la soumet à ses caprices ; il libère les énergies que recèle la nature et les met à son service, il explore le cosmos et rêve de l'utiliser pour satisfaire ses besoins. Cet homme, qui réalise tout cela, qui est-il? A quelles motivations obéit-il? D'où tire-t-il son esprit d'invention, son audace, sa puissance? Sans doute psychologues et sociologues ont-ils leurs réponses. Elles ne sont que les résultats partiels de disciplines encore jeunes et qui ne maîtrisent qu'imparfaitement

4 3

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leurs méthodes. Ecouter la voix des millénaires, se familiariser avec les expressions successives du génie humain, observer le comportement de l'homme au gré des événements de l'histoire et des situations auxquelles il a été successivement confronté, n'est­

ce pas une des meilleures, sinon la meilleure manière de le connaître réellement? En d'autres termes, n'est-ce pas la meilleure manière d'observer le précepte delphique : gnôthi seauton ( connais-toi toi­

même)? » (Réflexions sur le rôle des études classiques dans le cadre de la civilisation technologique, tiré de l'ouvrage en l'honneur de M.H.P. Tschudi, conseiller fédéral, Berne 1973, p. 7). Dans cette mise en garde qui reflète les inquiétudes de beaucoup, on entend certes résonner l'enseignement socratique, ainsi que tel célèbre chœur de Sophocle sur la condition humaine ou telle page du « Gorgias» de Platon sur le danger que l'on court lorsqu'on augmente le pouvoir de l'homme sans le rendre meilleur, mais du même coup, c'est la cause des sciences humaines dans notre société qui est embrassée.

Ainsi, dans la perspective du prix qui le récompense, on est amené à distinguer deux volets dans l'activité du lauréat, deux volets qui sont d'ailleurs solidaires l'un de l'autre. Tout d'abord, il y a l'activité scientifique à proprement parler de l'helléniste doublé d'un con­

naisseur de l'histoire de Genève : à côté de livres comme La religion de la cité platonicienne (Paris 1945) ou La Crète, berceau de la civilisation européenne (Lausanne-Paris 1960), Olivier Reverdin est l'auteur d'études sur l'imprimerie genevoise et sur les travaux d'édition de textes grecs qui furent accomplis au seizième siècle à Genève.

Ses publications témoignent par ailleurs que son goût de l'histoire locale s'inscrit dans la perspective d'une vision historique plus large, à la fois nationale et européenne : sa Connaissance de la Suisse, un petit livre écrit à l'occasion de l'exposition nationale de 1964, a été traduit dans de nombreuses langues; il faut mentionner égale­

ment des études comme La Suisse et l'intégration européenne (1962) ou Réflexions sur la politique étrangère de la Suisse (1965). Tout récem-

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ment encore, lorsque la banque nationale de Grèce a célébré le bicentenaire de la naissance de son fondateur genevois J. G. Eynard, en présence du conseiller fédéral G.-A. Chevallaz et du conseiller d'Etat genevois A. Chavanne, c'est Olivier Reverdin qui fut invité à retracer l'histoire du philhelléniste genevois tel qu'il se reflète dans « Le Journal de Genève» (1975).

Le second volet est constitué par la partie de ses activités témoi­

gnant de son dévouement à la cause de la science dans le cadre de ses structures d'organisation et de promotion. C'est là un domaine où ce Genevois s'est fait connaître et apprécier tant chez lui qu'à l'étranger. Dans sa charge universitaire tout d'abord, Olivier Reverdin a su créer l'enthousiasme pour la Grèce ancienne et susciter la recherche alors même qu'ailleurs on connaissait des difficultés de recrutement ; nul doute qu'on lui doit beaucoup dans le succès dont cette discipline jouit actuellement auprès de nos étudiants. Sa passion de l'antiquité l'a conduit également à présider l'une des institutions internationales qu'abrite Genève: la Fondation Hardt pour l'étude de l'antiquité classique. Depuis vingt ans, Olivier Reverdin anime ce centre mondialement connu qui attire chaque année à Genève soixante-dix savants venus d'Europe, d'Amérique et d'Afrique; c'est là que se déroulent les « Entretiens»

désormais célèbres à l'occasion desquels les meilleurs spécialistes d'une question sont conviés à écrire ensemble un livre. Or, c'est à Olivier Reverdin qu'incombe, outre ses préfaces et ses contribu­

tions personnelles, la responsabilité de ces importantes publica­

tions que l'on retrouve sur les rayons de toutes les bonnes bibliothè­

ques du monde. Par le biais de la Fondation Hardt et de l'activité qu'y déploie le lauréat, Genève est en bonne place dans la recherche en sciences de l'antiquité.

On entend souvent dire que la Suisse romande n'est pas suffisam­

ment présente à Berne : lorsqu'une institution nationale est dirigée par un Genevois, l'honneur en rejaillit d'autant plus sur sa ville.

4 5

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Olivier Reverdin préside le Fonds national de la recherche scien­

tifique depuis 1968, après avoir fait partie du conseil de cette institution depuis 1963. Est-il besoin de rappeler l'importance capitale de cet organe : dans une large mesure, il permet à l'Université de faire face à ses tâches de recherche, à Genève comme ailleurs en Suisse, mais on devrait y être tout particulièrement sensible dans une ville comme la nôtre, qui a prouvé lors d'une récente votation son attachement à l'Université. La formation et les intérêts très vastes d'Olivier Reverdin le désignaient non seulement pour exercer la présidence du Fonds national, mais aussi pour y défendre un équilibre qui menace parfois de se rompre au détriment des sciences humaines.

Pour cette raison, le lauréat a été amené à prendre part à la création de la Fondation européenne de la science ; il en est le vice-président et préside la commission pour la coopération européenne dans le domaine des sciences auxiliaires de l'archéologie. Ce talent et ce dévouement à la cause des sciences et des sciences humaines en particulier, ce don de rendre la recherche possible ont été reconnus une nouvelle fois à Genève lorsqu'Olivier Reverdin s'est vu confier en 197 4 la présidence des « Archives Jean Piaget»: là encore, l'homme que l'on recherchait en se tournant vers lui, c'était l'homme qui avait largement démontré son envergure de promoteur de la recher­

che. Lorsque l'on sait que ces diverses responsabilités sont venues se greffer sur celles de l'homme politique - président du Conseil de l'Europe, parlementaire fédéral - on ne peut s'empêcher de penser que chez Olivier Reverdin la vision de l'hellénisme est en rapport très étroit avec la manière dont il conçoit l'engagement dans les affaires publiques: on sait quelles hautes exigences les cités grecques de l'antiquité imposaient souvent à leurs citoyens.

Ainsi, notre lauréat, sans abandonner la recherche personnelle, a largement consacré son temps et ses forces à la recherche d'autrui.

On en revient ainsi à la solidarité des deux volets considérés : le 46

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savant et le promoteur scientifique, et l'on constate que l'activité et la carrière du lauréat peuvent se concevoir comme directement et indirectement au service du renom de Genève. Directement de par les écrits relatifs à Genève, par une infatigable activité liée à l'Université et à la Fondation Hardt; indirectement par une présence dans des instances scientifiques où les responsabilités qu'il assume font briller le nom de Genève.

* * *

BIOGRAPHIE

REVERDIN, Olivier. Né à Genève le 15 juillet 1913. Licencié ès lettres classiques, Genève 1935. Etudes à Paris (1935-36). Membre étranger de l'Ecole française d'Athènes (1936-38). Docteur ès lettres, Genève 1945. Privat-docent, 1945. Suppléant partiel des professeurs Paul Collart ( été 1954) et Victor Martin (1955-1958).

Chargé de cours à l'Université de Lausanne ( été 1957). Professeur ordinaire de langue et littérature grecques, 16 juillet 1958. Membre du Conseil académique 1961-1970. Membre, puis président (1963- 68) du Conseil de fondation de la Faculté autonome de théologie protestante. Membre du Comité et président, (1965-1968), de la Société académique de Genève. Membre de la Commission de la science atomique du Fonds national suisse de la recherche scien­

tifique (1958-1962), puis du Conseil national suisse de la recherche ( dès 1963 ; président dès 1968). Membre du Conseil suisse de la science ( dès 1968) et de la Commission pour l'encouragement de la recherche scientifique ( dès 1968). Président de la Société suisse des sciences humaines (1960-68). Président du Conseil de la

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Fondation Hardt pour l'étude de l' Antiquité classique ( dès 1959).

Président de la Conférence européenne de biologie moléculaire (1967-68). Président de la Troisième conférence parlementaire et scientifique (Lausanne 1972). Chef de la délégation suisse à la 17e Conférence générale de l'UNESCO (1972). Conseiller national (1955-71 ). Conseiller aux Etats ( dès 1971 ). Membre de l'Assemblée consultative du Conseil de l'Europe dès 1963, président de la com­

mission culturelle (1966), puis de sa comnùssion de la science et de la technologie (1967-69) et président de l'Assemblée elle­

même (1969-72). Membre d'honneur de la Société polonaise de philologie classique. Consejero de honor du Consejo superior de investigaciones cientificas (Madrid).

Olivier Reverdin collabore régulièrement et depuis longtemps à divers journaux, revues, périodiques suisses et étrangers. Il est l'auteur de nombreuses préfaces d'ouvrages. Depuis 1956, ses interventions parlementaires ont été imprimées dans le Bulletin officiel de l'Assemblée fédérale. En outre, ses rapports relatifs au Conseil de l'Europe figurent dans les comptes-rendus de cette Assemblée. Sa fonction de Président de la Fondation Hardt l'a également amené à publier de nombreux ouvrages et articles relatifs aux activités de cette institution.

* * *

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BIBLIOGRAPHIE PAR TIELLE

Une nouvelle station néolithique près de Génissiat ( département de l'Ain). - Genava, 1932, X, p. 33-42.

La religion de la cité platonicienne. ( Ecole française d'Athènes, travaux et mémoires publiés par les membres étrangers de l'Ecole, fascicule V 1). - de Boccard, Paris, 1945, 1 vol., gr. in-8, XII, 280 p., 1 fig.

Napoléon correcteur de style de Rousseau. - Annales de la Société Jean-Jacques Rousseau, 1945, tome XXX, p. 143-148.

Pierre Enoe, poète genevois. - Bulletin de la Société d'Histoire et d' Archéologie de Genève, 1946, VIII, p. 203-216.

La guerre du Sonderbund vue par le Général Dufour. - Editions du Journal de Genève, 1948, 1 vol., gr. in-8, 142 p., 23 pl. hors texte et 2 fig.

Le Conseil fédéral. - La Démocratie suisse, 1848-1948, ouvrage commémoratif publié à l'occasion du centenaire de la Constitution fédérale, Editions patriotiques, Morat, 1948, p. 50-55.

Chronique bibliographique, XIXe siècle (bibliographie analytique et critique des publications relatives à Genève au XIXe siècle), années 1948, 1949, 1950, 1951. - Bulletin de la Société d'histoire et d'archéologie de Genève, IX, p. 154-156, 254-256, 362-364, et X, p. 90-93.

Il faut soulager les conseillers fédéraux pour que le Conseil fédéral puisse gouverner. -La Suisse, annuaire national, publié par la Nouvelle Société helvétique, XXIII, 1952, p. 47-53.

Statuts professionnels et étatisme. - Etudes d'économie et de politique suisses, Zurich, LVI, plaquette de 12 p.

Chronique suisse pour 19 51. - L'actualité suisse, annuaire, Lausanne, 1952, p. 1-44.

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(53)

Vers des temps plus difficiles pour notre politique de neutralité.

- La Suisse, annuaire national publié par la J.Vouvelle Société Helvétique, XXIV, 1953, p. 13-17.

Quatorze calvinistes chez les Topinambous. Histoire d'une mission genevoise au Brésil. - Edition du Journal de Genève, juin 1957, 1 vol. in-8°, 110 p., 10 fig.

L'énergie atomique nous interdit de poser en termes d'hier les problèmes d'aujourd'hui. - De la démocratie industrielle, La Bacon­

nière, Neuchâtel, 1959, tome I, p. 145-154.

La Crète, berceau de la civilisation européenne. - La Bibliothèqtte des Arts, Lausanne et Paris, 1960, 1 vol. in-4°, 152 p., 87 reprod.

en couleurs, 2 fig.

Préface de « Les sources de Plotin». - Entretiens sur l' Antiquité classique, Fondation Hardt, Genève- Vandœuvres, 1960, tome V.

Crete in Colour. - Thames and Hudson, Londres, 1961, 1 vol. in-4°, 152 p., 87 reprod. en couleurs, 2 fig. (traduction anglaise du No 54).

Crise spirituelle et évasion in « Grecs et Barbares», par H. Schwabl, H. Diller, O. Reverdin, W. Peremans, H.C. Baldry, A. Dihle. - Entretiens sur !'Antiquité classique, Fondation Hardt, Vandœuvres­

Genève, 1962, tome VIII, p. 83-120.

Genève, un destin hors série. « Genève carrefour des Nations». - Editions Générales, Genève, 1963, p. 13-27.

Connaissance de la Suisse. - Editions OSEC, Lausanne, 1964, 1 vol. 112 p., 40 pl. (2e édition revue, 1966).

La Suisse devant l'intégration européenne. Aspects fondamentaux.

- Edité par les Associations patronales suisses, Zurich, 1964.

Réflexion sur les méthodes empiriques que la Suisse applique en __matiè_r_e_de __ dé_v__cloppemenLdes __ uni:v_ersités_ et de __ la __ recherche. ---=

Annuaire de l'Association suisse de science politique, 1966, IV, p. 52-60.

(54)

Archiloque. - Entretiens sur l' Antiquité classique, Fondation Hardt, Vandœuvres, Genève, 1964, tome X, (organisation, participation aux discussions, édition, index).

Petits pays, petites entreprises à l'âge des grandes concentrations. - Editions UBAH, 1964, 16 pages.

Genève, 1814-1964. - Edité par la Chancellerie d'Etat, Genève, 1964 (texte).

L' Anthologie de la poésie grecque. - Hommage à Robert Brasillach, Lausanne, 1965, p. 323-328. (A paru aussi dans la Gazette littéraire, 16 octobre 1965).

Préface ( et collaboration à la traduction de l'italien) de Benedetto Croce, Galéas Caracciolo, marquis de Vico. - Editions du Journal de Genève, 1965 (a paru également aux Editions Droz, Genève, 1965).

Préfaces, édition, rédaction des discussions et établissement des index des tomes XI ( a « Politique» d'Aristote), XII (Porphyre) et XIII (Les origines de la République romaine), des Entretiens sur l' Antiquité classique, Fondation Hardt, Vandœuvres-Genève, 1965-67.

Le Conseil de l'Europe, le CIME et l'Amérique latine. - Vingt années consacrées au libre mouvement des personnes, Genève, CIME, 1972, pp. 121-129.

L' Image de Nauplie, dans Etudes et témoignages. Denis de Rouge­

mont. L'écrivain, !'Européen, Neuchâtel, 1976, pp. 280-288.

Entre la chute de Missolonghi et la bataille de Navarin: Le Journal de Genève moniteur du philhellénisme européen (à paraître en grec, à Athènes, septembre 1977).

Continuation de la recherche sur les Testimonia de l'histoire d'Erétrie, en collaboration avec MM. Denis Knoepfler et Bernard Grange.

Continuation de la recherche sur les imprimés grecs de Genève pendant la seconde moitié du 16e et la première moitié du 17 e siècle.

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RAPPORT

DE LA SOUS-COMMISSION DES ARTS PLASTIQUES

présenté par

M. JEAN-JACQUES MEGEVAND

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PHILIPPE LAMBERCY

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Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs,

L

A sous-commission des arts plastiques propose d'honorer cette année, avec le Prix quadriennal de la Ville de Genève, un créateur discret et généreux qui a largement contribué au rayonne­

ment de notre cité par la qualité de son œuvre et celle de son ensei­

gnement: Philippe LAMBERCY. Céramiste, il a su transformer une technique en art, passer de l'objet utilitaire à la dimension architecturale et donner un très haut niveau et une réputation européenne à l'enseignement de la céramique à Genève. Il s'est tellement livré à sa fonction de maître que son rôle d'enseignant est indissociable de son évolution créatrice.

Né à Yverdon en 1919, formé comme modeleur et décorateur à l'Ecole Professionnelle de Renens, il travaille dans l'industrie avant d'être appelé à enseigner à l'Ecole des Arts Décoratifs de Genève en 1952. Il allait dès lors pouvoir se consacrer à la recherche et à la création.

La céramique traditionnelle était entrée en crise; l'évolution indus­

trielle et mécanique ruinait la fabrique artisanale où se perpétuait la division du travail entre tourneur et décorateur. La réalisation

« à la main» n'étant plus compétitive dans la production de l'utili­

taire, il restait à rendre une qualité à une pratique condamnée par

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la machine. S'il ne fut pas le seul, Philippe Lambercy compte parmi ceux qui surent donner à i'objet une présence et un sens qui reievaient traditionnellement de la sculpture.

Dans l'atelier personnel qu'il put alors ouvrir à Montagny près d'Yverdon, puis bientôt dans celui de Confignon où il travaille encore, comme à l'Ecole des Arts Décoratifs dont il va réformer l'atelier en même temps que les programmes, Lambercy va relancer la pratique de la céramique par sa curiosité technologique et ses exigences créatrices. L'histoire le retiendra comme un des premiers céramistes indépendants de notre époque, parmi ceux qui mar­

quèrent le passage d'une production quantitative à une production qualitative. S'exprimant d'abord dans les techniques de basse température de la poterie régionale, il subit bientôt l'influence de la céramique orientale qui lui fit découvrir la cuisson de haute température, le grès et la porcelaine. Il innovait alors totalement et ses premiers élèves se rappellent avec émotion ce moment décisif de l'installation de son premier four à gaz, les premiers grès et les premières porcelaines qui ne soient pas industriels.

La création et l'enseignement de Lambercy sont caractérisés par sa passion du feu. Il aime la manière dont il transforme la matière et la lumière qu'il donne à l'émail. Si les conquêtes techno­

lnaim,P<: vnnt <:r�nrlP1" <:nn hrnh,tinn PllP<: nP ÎP rlPhnu1P1"nn1- 1�n,�1<:

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tout en lui donnant cette philosophie qui empreint son œuvre.

On ne saurait manquer d'associer à cet hommage son épouse qui collabora très fertilement à son œuvre. Ses connaissances de chimiste leur permettront d'aller très loin dans la transformation des émaux par la chaleur.

Lambercy a parfaitement résumé sa position: « Dans ma concep­

tion d'un objet céramique, l'émail qui en est un des composants nourrit intensément mon imagination. Le feu, en effet, dont on parletant�lorsqu'il�ag1tâe matière céramique, et pour cause,

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Photo R. Funk

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est un agent de transformation qui polarise les propriétés de cette matière entre dureté et fluidité, opacité et transparence, surdité et sonorité, par exemple. Ces données qualitatives sont spécifiques à cet art; elles en appellent au tempérament du créateur et délimitent également le champ dans lequel sa personnalité se manifestera.

Ces faits ne sont pas d'ordre technique, même s'ils demandent une technologie attentive. Ils témoignent d'une approche du métier où la lumière « collaboratrice plastique» non seulement révèle la forme et concourt à sa présence, mais la pénètre à travers le verre et lui confère une substantialité différenciée tout en aidant la lecture.

Une lecture qui par là même se voudrait complexe et révélatrice d'un art au service duquel je me suis mis». (197 6, catalogue 18 artistes de la terre, St. Rémy).

Dans la dernière partie de cette citation, Lambercy nous montre comment il approche plastiquement la forme en même temps qu'il se distance du travail du sculpteur par la manière dont la couleur transforme et qualifie le volume. Son œuvre est faite d'objets qui peuvent garder une fonction mais qui agissent surtout par la résonance de leur présence et que recherchent les collection­

neurs de sculpture de petite dimension. C'est à sa curiosité techno­

logique qu'H dut encore d'avoir pu réaliser ses rêves à une échelle architecturale, comme en témoignent ses murs des Ecoles de la Petite Ourse ou de la Jonction, de la Clinique Bel Air et surtout de l'Observatoire de Sauverny, un exemple du genre.

Lambercy s'est encore tellement donné à son enseignement qu'il a fait école. Généreux, il a totalement communiqué à ses étudiants tout ce qu'il découvrait. En démystifiant la technologie, il l'a renouvelée et découvrait beaucoup de nouvelles manières de s'ex­

primer. Attentif et tolérant, il transforma un enseignement technique en expérience de création et fit de son atelier des Ecoles d'Art un _des principa_ux__œ ntres deJa cr.éation__céramique, en Suisse-et même�

en Europe.

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Photo E. Tschanz

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Lambercy n'a jamais couru les honneurs, la qualité de ses élèves

,. " ' • ' 1 ·11 11 ' 1

a tait sa reputat1on et 1nc1te .1es me1.ueurs coi1êctl.onneurs a recr1eÏ- cher les œuvres d'un tel maître. Et ils découvrirent que chacune de ses créations a sa propre individualité, garde l'empreinte d'une expérience de la matière à l'épreuve du feu sublimant la connais­

sance par l'intervention de la vie.

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Photo E. Tschanz

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ALLOCUTION DE MME LISE GIRARDIN Vice-présidente du Conseil Administratif

Messieurs les lauréats, Mesdames et Messieurs,

P

ERMETTEZ-MOI avant tout d'évoquer avec émotion la figure de M. Virginia Malnati qui avait accepté avec joie la présidence d'une sous-commission et qui est décédé peu avant la séance plé­

nière de la commission de préavis. Le Conseil administratif est reconnaissant à M.

J.-J.

Mégevand d'avoir accepté de prendre la place laissée vide.

Il est usuel et naturel à la fin d'une cérémonie comme celle-là d'adresser des remerciements à tous les membres de la commission de préavis, aux présidents et aux rapporteurs des sous-commissions.

Tous consacrent temps, travail et réflexion avant d'opérer un choix qui peut parfois être difficile, voire délicat.

Quatre sous-commissions ont pu formuler des propositions qui avaient suscité leur accord spontané et unanime et nous venons de remettre les Prix de la Ville de Genève aux personnalités qu'elles ont choisies.

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