Editorial : Italie, paysage et identité

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Editorial : Italie, paysage et identité

SCARIATI, Renato, HOCHKOFLER, Gianni

SCARIATI, Renato, HOCHKOFLER, Gianni. Editorial : Italie, paysage et identité.

, 2016, vol. 156, p. 5-6

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:155390

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LE GLOBE - TOME 156 - 2016 EDITORIAL : ITALIE, PAYSAGE ET IDENTITE

L'année où paraît ce tome consacré à l'Italie est à nouveau une année où la nature profonde de ce pays se rappelle à l'homme, par plusieurs séismes destructeurs dans la longue chaîne des Apennins, suivis par des inondations et des éboulements, événements ordinaires dans cette région, entre le Piémont et la Ligurie, qui n'avait pas été touchée par les tremblements de terre. Dans un très bel article, Paolo Rumiz (2016) se demande combien de temps encore il faudra pour comprendre la vraie et profonde nature de l'Italie, et en dresse un portrait, des "portes de l'Afrique aux Alpes", en relevant que l'"âme du pays" est enfouie peut-être dans son sol. L'étonnement consécutif à chaque nouvel événement sismique, tout comme les réticences de la part de la population et des autorités à tenir compte de la nature du sous-sol lors de la construction des maisons, des édifices en général, montrent à quel point nous sommes déconnectés de notre environnement. Armand Frémont a mis en évidence cette abstraction de nos rapports avec les lieux, qui va s'accentuant depuis la fin du siècle dernier, et il est vrai que lorsque nous nous préoccupons de notre environnement, c'est surtout en matière de ressources (en tirer parti), ou en matière de risques (nous en protéger).

Le paysage italien est un signe de cette abstraction et de cet usage qui est fait de l'environnement. Depuis les années 1960, plusieurs facteurs ont contribué à cette transformation profonde des paysages, en Italie comme dans les autres pays occidentaux, sur lesquels nous ne reviendrons pas ici.

Cette transformation a été ressentie le plus souvent comme une

"défiguration", une "destruction" du paysage, par un grand nombre d'auteurs, en littérature comme en sciences sociales et en géographie en particulier. De Guido Ceronetti à Eugenio Turri, on dresse un constat alarmant sur l'état du pays, avec pour toile de fond une profonde nostalgie pour les paysages anciens, ceux d'une "Italie authentique et admirable qui existe encore : celle des campagnes demeurées intactes, des régions isolées où l'art et l'histoire peuvent se manifester librement", comme l'exprime Turri dans un ouvrage illustré sur les paysages d'Italie, datant de 1985, mais où quasiment toutes les photos auraient pu être prises avant les années 1950 !

Depuis lors, une attention particulière est portée sur la qualité des paysages. Ainsi, en 2000, la Convention européenne du paysage du

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Conseil de l'Europe a pour objet de "promouvoir la protection, la gestion et l’aménagement des paysages européens", reconnaissant le paysage comme "un élément essentiel du bien-être individuel et social comme de la qualité de vie des populations, contribuant à l’épanouissement des êtres humains et à la consolidation de l’identité européenne".

Ce lien unissant explicitement paysage et identité, appliqué à l'Italie, a été le fil conducteur de ce volume.

Evoquer les Paysages d'Italie fait penser immédiatement aux Voyages en Italie, que de nombreux touristes et artistes étrangers ont entrepris durant des siècles. L'histoire de l'art est pleine de ces représentations d'un pays vu de l'extérieur, empreint des imaginaires de chaque époque et de chaque école culturelle. Cette Italie et ses paysages est bien réelle aujourd'hui, et ses hauts-lieux continuent à attirer des foules de touristes du monde entier. Mais l'option que nous avons choisie dans ce volume est tout autre. Donnant la parole à des auteurs exclusivement italiens, d'horizons intellectuels différents, nous avons voulu présenter un tableau différent du pays, tel qu'il est vu, vécu, pensé ou ressenti de l'intérieur.

Les textes présentés ici montrent de façon réjouissante que ces représentations du paysage italien vont bien au-delà d'une vision esthétisante et abstraite de l'environnement. Le lien avec la nature du sol et de son sous-sol, et une attitude plus harmonieuse avec les lieux, l'importance donnée aux paysages ordinaires de la vie quotidienne, donnent à penser que l'identité se confond avec un rapport plus intime avec le pays. Ces textes font une large place aux études de géographie et littérature, ainsi qu'aux paysages biographiques, évoqués par des auteurs italiens résidant en Suisse.

Gianni Hochkofler, Renato Scariati Société de Géographie de Genève

Références :

Ceronetti G., Le lorgnon mélancolique, Paris, A. Michel, 1990.

Convention Européenne du Paysage : www.coe.int/fr/web/landscape.

Frémont A., La mémoire d'un port : Le Havre, Paris, Arléa, 2009.

Rumiz P., "Terremoto : da Pantelleria al Friuli, la memoria corta del sottosuolo", La Repubblica (LaRepubblica.it, 31.10.2016).

Turri E., Paysages d'Italie, Fribourg, Office du livre, 1985.

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