• Aucun résultat trouvé

L Fernand Léger, le peintre ouvrier

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "L Fernand Léger, le peintre ouvrier"

Copied!
2
0
0

Texte intégral

(1)

44 > VIE NOUVELLE N° 169 • juin/juillet 2012

L

es Constructeurs, 1950, six ouvriers plantés en plein ciel travaillent à l’assem- blage de poutres métal- liques, suspendus à leur échafaudage sur un fond bleu azur, clairsemé de petits nuages. Chacun d’eux n’est pas une forme mais un être vivant et vrai. Des mouvements d’hommes au travail, le dessin des plis du pantalon sur les jambes écar- tées, les mains déformées par les callosités, les épaules voûtées par le poids trop lourd des fardeaux, des mouvements d’hommes non plus abandonnés à la peine du labeur, mais tout à sa réussite dans une architecture qui monte très haut et dont ils prennent possession.

En regard du rythme, du monu- mental, de la distribution des per- sonnages dans l’espace, de ces éclatantes et joyeuses couleurs cernées de noir - bleu, jaune, rouge - ce qui domine, à présent, c’est la

réalité. La réalité au lendemain de la guerre, en période de pleine re- construction du pays accompagnée des nouveaux acquis sociaux du Conseil national de la Résistance, c’est la célébration du travail libéré dans une société nouvelle, une re- conquête de la dignité des ouvriers représentés dans la forme idéali- sée de l’édification d’une société meilleure.

La force des hommes devient symbole, avec tout l’optimisme et l’engagement du peintre, témoin des misères du travail qui veut rendre à l’homme sa place dans l’univers industriel et mécanique et qui affirme ici l’orientation de son œuvre dans un engagement clair et sincère envers la classe ouvrière.

Avec cette architecture de poutres entre lesquelles se faufilent des nuages, des hommes robustes et confiants font une maison.

Comme lui, maître de la couleur

et des formes, fait un tableau, sans inquiétude, pour nous montrer un monde à construire, dans cet uni- vers de couleurs où nous vivons, où nous pouvons vouloir vivre, où nous voulons pouvoir vivre…

L’OBJET

PERSONNAGE PRINCIPAL

Semblable à ces hommes trans- portant des poutres, dressés en plein ciel sur des échafaudages, les mains fermées sur le manche des outils, Fernand Léger le construc- teur s’est peint lui-même… La soli- dité de la construction est pareille à la présence solide du constructeur.

En abordant le thème des Constructeurs, Fernand Léger semble revenir à ses œuvres de jeu- nesse. Avant la guerre de 1914-1918, il mène une véritable bataille sur les volumes avec des formes construc- tives, plutôt grisâtres, qui s’apparen-

« La guerre de 1914-1918 a été pour moi une chance ; elle m’a permis de découvrir le peuple et de me

renouveler entièrement… J’ai été versé dans le

génie… le génie est un corps d’ouvriers, de terrassiers, de mineurs… C’est là vraiment que j’ai compris ce que

c’est qu’un homme du peuple. C’est un type d’un ordre parfait ; si bien que j’ai pu constater que j’étais moi-

même un parfait désordre… J’ai appris leur langage, car ils ont un langage, un argot. Nous, peintres, nous avons des mots, c’est surtout nos tableaux. C’est pour cela qu’il doit y avoir un moyen de s’entendre entre eux et nous… » De son propre aveu, la guerre fut bien pour Fernand Léger une expérience humaine. C’est ainsi que l’homme du peuple devint un grand sujet dans son monde artistique. Omniprésent, il occupa le centre de ses méditations.

Fernand Léger, le peintre ouvrier

1881-1955

(2)

> VIE NOUVELLE N° 169 • juin/juillet 2012 45 tent au cubisme. Puis, il

mène une autre bataille, celle de la couleur. Ce qu’il expliquera par la loi des contrastes qu’il n’appliquera pas que pour les couleurs, mais aussi pour les plans, les lignes, les formes, par une bagarre de droites et de courbes, de sur- faces plates à des formes modelées.

Pour suivant son explication, il nous don- nera à voir que, dans ce monde moderne, le sujet n’est plus le personnage principal, c’est l’objet, la machine, l’arbre, le nuage, la charpente qui le remplace. À ses yeux, ce sont des éléments de même intérêt que les per- sonnages puisque la loi des contrastes domine la vie humaine dans toutes ses manifestations.

Aucune évolution ne remettra en cause cette théorie qui, pour lui, est fondamentale : traits noirs épais cernant des volumes simplifiés et grossis avec des couleurs pures zébrées, parfois ré- duites aux trois couleurs primaires, rouge, jaune, bleu.

Fernand Léger est sans doute le plus mo- derne des peintres en ce sens qu’il traduit au-delà des aspects nouveaux du monde moderne, la conscience nouvelle qu’ont les hommes du peuple, d’être ceux qui font le monde…

Betty Gavazzi

Les Constructeurs, 1950, toile 300 x 217 cm, Musée national Fernand Léger, Chemin du Val de Pome - 06410 Biot - Tél. : 04 92 91 50 20.

le mag

Fernand Léger, le peintre ouvrier

Références

Documents relatifs

un neutre accusatif, une féminin accusatif, un masculin accusatif Voc en PRODUCTION — A1 E13.. vous = 2ème personne

Evoquant la tendance prédominante dans le domaine péda - gogique contempora in de ((l'éducation spécialisée )) qui impose une ((pédagogie curative)) , cette vague

Les chiffres so nt là.. Qu e je

[r]

[r]

"Les autres palmarès de ce genre ne comptent que 30 à 40 critères et ne concernent pas l'ensemble des communes, défend Thierry Saussez, président de l'association Villes et

Il est nommé conservateur du Muséum d’histoire naturelle en 1847, mais il est également préparateur affecté à la zoologie en 1848 à la Faculté des sciences de Grenoble où

À partir des éléments suivants (cellules, coquille, quatre membres, 8 pattes, squelette interne, crocs) composer l’arbre de parenté des espèces suivantes : Tigre,