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A RAM, JANOU et JOËLLE

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Academic year: 2022

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A RAM, JANOU et JOËLLE

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Collection « A p p r o f o n d i s s e m e n t d e la c o n n a i s s a n c e é c o n o m i q u e », dirigée p a r Bernard Lassudrie Duchêne

l A B O U R S E

E T

l A C O N J O N C T U R E E C O N O M I q U E ESSAI SUR LES FACTEURS DÉTERMINANTS

DU COURS MOYEN DES ACTIONS

C e o r g e s P R A T Chargé de recherche au CNRS

Université de Paris X-Nanterre

PrÉface de Maurice AUAIS

Publié avec le concours du Ministère de l'Education Nationale

ECO NOM ICA 49, rue Héricart, 75015 Paris

1982

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@ Ed. ECONOMICA, 1982

Tous droits de reproduction, de traduction, d'adaptation et d'exécution réservés pour tous pays.

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PRÉFACE

L'évolution du cours des actions est très souvent évoquée par les commentateurs de la conjoncture économique, mais paradoxale- ment les facteurs déterminants de cette évolution sont relativement très peu étudiés. Les analyses quantitatives présentées dans la litté- rature sont partielles, et le plus souvent critiquables ; et à ma con- naissance tout au moins, aucune étude scientifique d'ensemble des relations existant entre le cours moyen des actions et les autres variables économiques n 'a été effectuée jusqu 'ici.

C'est cette lacune que l'ouvrage de Georges Prat se propose de combler en présentant une analyse d'ensemble « des facteurs déterminants du cours moyen des actions » et de son évolution en relation avec « la conjoncture économique ».

Neuf facteurs principaux sont retenus qui f o n t l'objet des n e u f premiers chapitres ; le dixième chapitre donne une vue d'ensemble des principaux résultats obtenus, quant aux régularités numériques constatées et à l'analyse critique de la littérature, ainsi qu'une esquisse d'un modèle général. Chaque chapitre comporte d'une part une analyse circonstanciée des modèles proposés dans la litté- rature relative au facteur considéré et d'autre part une analyse économétrique systématique de ces modèles.

Outre que les exposés sur la littérature donnent une présentation claire de certains travaux d'un très grand intérêt mais dont la compréhension est difficile, comme ceux de Macaulay par exemple, ils montrent à l'évidence, d'une part la diversité des voies de re- cherche dans lesquelles se sont engagés les différents auteurs, et d'autre part le caractère partiel et le plus souvent contestable de leurs résultats et des interprétations qu'ils en ont données. Ces exposés sont accompagnés d'une large bibliographie qui recense l'essentiel des études publiées sur le sujet.

Pour chacun des facteurs considérés G. Prat expose les résultats qu'il a obtenus dans ses recherches économétriques. Considérant les travaux des auteurs analysés, il étudie systématiquement les liaisons susceptibles d'exister entre le cours moyen des actions,

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la conjoncture économique telle qu'elle est habituellement appré- hendée, et les facteurs pouvant être considérés a priori comme

« explicatifs ».

Bien que les domaines d'analyse centraux soient les Etats-Unis et la France, considérés après la seconde guerre mondiale, G. Prat a également examiné des données relatives à d'autres pays (Alle- magne Fédérale, Canada, Italie, Japon, Royaume-Uni,...) et d'autres périodes (XIXe siècle, début du XXe siècle), afin de dégager les interdépendances dynamiques invariantes existant entre le cours moyen des actions et les autres variables conjoncturelles.

L'étude présentée repose sur la dissociation de l'évolution ten- dancielle et des fluctuations conjoncturelles du cours des actions.

L'application systématique de la méthode des corrélations décalées permet de mettre en évidence une structure quasi-périodique sous- jacente des fluctuations conjoncturelles et des décalages moyens entre les séries temporelles étudiées. Une analyse est donnée des résultats obtenus quant aux effets de causalité ou d'interdépen- dance susceptibles d'être envisagés, qu'il s'agisse d'effets hérédi- taires psychologiques ou de propagation, ou de corrélations induites par des facteurs communs endogènes ou exogènes.

Les résultats économétriques les plus suggestifs obtenus par Prat me paraissent être les suivants :

— existence de régularités empiriques invariantes dans le temps et dans l'espace,

— structure quasi-périodique sous-jacente commune à certains indi- cateurs et comparable d'un pays à l'autre (périodicité moyenne principale de 3 à 4 ans),

— ordre de succession invariant des évolutions conjoncturelles de certains indicateurs,

— similitude des évolutions de la composante conjoncturelle du cours des actions et des indicateurs d'opinion représentatifs de la « psychologie collective »,

— représentation de la dérive de Macaulay (« Economic drift ») par le rapport entre le rendement moyen des obligations et le rendement des obligations de premier rang, et analyse de l'inter- dépendance temporelle entre le cours des actions et le cours des obligations,

— nécessité de prendre en considération des quantités « psycholo- giques » pour représenter soit la tendance, soit les fluctuations conjoncturelles du cours des actions.

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Ce livre est le fruit de huit années de travail et de réflexion et le lecteur pourra attribuer aux résultats qu 'il présente une confiance d'autant plus grande que dans toutes les phases de son élaboration il a fait l'objet d'une analyse critique approfondie au sein du Centre Clément Juglar.

R n'est naturellement pas possible de commenter ici d'une ma- nière détaillée les différents résultats présentés dans cet ouvrage.

Mais ils mènent tous à une même conclusion : sous l'apparente complexité des faits existent des régularités incontestables, très remarquables, et qui constituent un apport indéniable quelle que puisse être l'interprétation susceptible de leur être donnée.

Dans l'ensemble l'ouvrage de Georges Prat me paraît présenter des éléments de réflexion nouveaux et positifs sur quatre points essentiels :

— une analyse critique et constructive de la littérature est effectuée montrant les insuffisances de la plupart des études réalisées jusqu'ici qui se bornent généralement à l'examen d'un seul pays considéré à une seule époque, et qui très superficiellement interprètent les corrélations constatées en termes de causalité ;

— ,des relations d'interdépendance dynamique entre le cours des actions et différents indicateurs conjoncturels se constatent qui résultent soit d'effets héréditaires dus à la mémorisation du passé, soit d'effets héréditaires dus à la propagation d'effets de causalité de proche en proche ;

— une structure quasi-périodique sous-jacente est mise en évidence dans les différentes séries temporelles étudiées ;

— le cours moyen des actions apparat comme un indicateur très significatif de la psychologie collective quant à la conjoncture économique.

Il reste évidemment de très nombreux points à étudier : quant -au rôle respectif et à l'influence réciproque des liaisons de causalité, des interdépendances héréditaires, et des facteurs exogènes ; quant à la détermination endogène du niveau tendanciel du cours des actions ; quant à la détermination des facteurs les plus représenta- tifs de la psychologie collective ; et quant à la prévision éventuelle de l'évoiution de cette Psychologie. De même les facteurs détermi- nants de 1 Vvolutioîv, relative des cours des différentes actions rela- tivement à leur niveau moyen restent à étudier.

En fait, deux difficultés majeures se, présentent qui sont peut- être insurmontables, au moins daMs l'état actuel de la science.

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Tout d'abord et autant qu'on puisse en juger, il existe dans les fluctuations conjoncturelles du cours des actions une struc- ture quasi-périodique, mais cette structure paraît extrêmement complexe. Elle semble comporter de nombreuses composantes dont les amplitudes, les périodes et les phases varient elles-mêmes au cours du temps. Des phénomènes analogues se constatent dans d'autres domaines, tout particulièrement en géophysique. Les causes de ces fluctuations restent entièrement à déterminer.

En second lieu, il est pratiquement certain que le cours des actions présente des fluctuations longues d'ordre exogène dont les périodes sont de l'ordre de dix à cinquante ans, et au regard des données empiriques relativement réduites disponibles, il paraît extrêmement difficile de distinguer en toute certitude les compo- santes des fluctuations longues du cours des actions qui sont dues à des facteurs économiques endogènes de celles qui peuvent résulter de facteurs exogènes.

Quelles que puissent être ces difficultés, l'ouvrage de Georges Prat constitue incontestablement un point de départ extrêmement précieux pour toute étude ultérieure du cours des actions. Ses apports présentent un très grand intérêt scientifique dont la valeur ne saurait être sous-estimée par quiconque connaît quelque peu l'extraordinaire difficulté du sujet et l'absence frappante dans toute la littérature de résultats solidement établis. En tout état de cause, ils viennent confirmer dans le domaine étudié par Prat l'ensemble des résultats obtènus à ce jour dans le Centre Clément Juglar et la puissance des méthodes d'analyse qu 'il utilise.

Une question tout à fait essentielle reste entièrement à élucider, celle de l'interprétation à donner aux fluctuations conjoncturelles du cours des actions. Pour Georges Prat elles peuvent s'expliquer à partir des fluctuations conjoncturelles d'autres indicateurs écono- miques représentatifs de la psychologie collective et à partir des- quels on pourrait déterminer l'évolution du cours des actions. Pour moi les fluctuations conjoncturelles des différents indicateurs économiques susceptibles de représenter la psychologie collective, dont notamment le cours des actions, sont déterminées par une même « variable latente » exogène dont elles ne sont que des mani- festations. Ces fluctuations sont reliées les unes aux autres ; cer- taines peuvent précéder, les autres suivre, mais elles ne sont les unes et les autres que des effets résultant d'une même cause. C'est là qu'il faut chercher à mon avis la cause profonde de l'impossibilité, qui n'a cessé de se manifester jusqu'ici dans toute la littérature depuis cinquante ans, « d'expliquer » les fluctuations conjonctu- relles du cours des actions par un modèle endogène. Pour moi, la

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conclusion négative qui se dégage de toute la littérature et qui fina- lement s'impose, malgré de très nombreuses tentatives et de très grands efforts, quant à la possibilité d'une détermination endogène de la composante conjoncturelle du cours des actions, constitue un résultat positif d'une importance majeure.

Seul l'avenir pourra apporter une réponse à cette question.

Pour conclure cette préface, je dirai que malgré ses limitations inévitables impliquées par la nature du sujet, ce livre est l'exemple même du genre de travaux qui peuvent faire effectivement pro- gresser la science économique : la recherche patiente, et souvent ingrate, des régularités sous-jacentes à la complexité des faits.

Il constitue un travail sérieux, approfondi, souvent très original, et scientifiquement très valable sur le cours des actions. Rien d'équivalent n'existe dans la littérature antérieure.

Nul ne saurait aujourd'hui prétendre étudier sérieusement le cours des actions sans s'y référer.

Maurice ALLAIS

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AVANT - PROPOS

Le présent ouvrage est issu d'une thèse de Doctorat sur

« La Dynamique du Cours moyen des Actions et la Conjoncture Economique » soutenue à l'Université de Paris-X Nanterre.

Par rapport à cette thèse, l'ouvrage constitue à la fois une version condensée (notamment, le plan a été considérablement modifié) et une version largement remaniée. En effet, de nouveaux développements sont donnés sur la liaison entre le taux d'intérêt à long terme et le cours des actions (Chapitre III, § 3, 22), sur la liaison entre les indicateurs d'opinion et le cours des actions (Cha- pitre IX), et sur la formulation synthétique du cours des actions proposée à la fin de l'ouvrage (Chapitre X, § 10. 3). Enfin, d'une manière générale, l'analyse des décalages temporels moyens à été affinée.

Au cours de l'élaboration de cette thèse et de la rédaction de l'ouvrage, nous avons bénéficié de nombreux échanges de vue avec les membres du Centre Clément Juglar d'Analyse Monétaire et en particulier avec notre Directeur de recherche, le Professeur Maurice Allais, avec Madame Jacqueline Allais, et avec Jean-Marie Bethenod, Jean-Jacques Durand et Christian Gomez. L'auteur de cet ouvrage tient à remercier vivement tous les membres du Centre pour leurs précieux apports et conseils.

Nous remercions aussi les Professeurs Babeau, de Montbrial, Munier, Schmitt et Temy des remarques et conseil qu'ils nous o n t adressés lors de la soutenance.

Nous tenons également à exprimer notre reconnaissance envers Monsieur Sorin, directeur du Centre de calcul de l'Université de Paris X Nanterre, Messieurs Hatchikian et Bianchi, respective- ment directeurs des sections « recherche » et « gestion » de ce Cen- tre. Ils nous ont toujours rendu de précieux services dans des condi- tions parfois difficiles. De même, nous remercions particulièrement J.-M. Bethenod des programmes informatiques efficaces qu'il a

bien voulu mettre à notre disposition; qu'il veuille trouver en ces lignes l'expression de notre grande gratitude.

Enfin, nous ne saurions passer SO.lS silence les aides dévouées

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de J.-M. Bouchiat, S. Lescoat, M. Kanga, L. Sina et H. Wilhelm pour l'élaboration des séries numériques respectivement de l'Alle- magne, du Royaume-Uni, du Japon, de l'Italie et du Canada.

Bien sûr, l'auteur de l'ouvrage endosse l'entière responsabili- té des développements présentés et des erreurs ou omissions qui pourraient subsister.

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LISTE DES SYMBOLES

Variables

A Cours moyen des actions B Bénéfices moyens par action D Dividendes moyens par action

j Rendement moyen des obligations des sociétés

jp Rendement des obligations de première qualité (le plus souvent, obligations d'État)

k Taux d'intérêt monétaire

M Masse monétaire au sens strict (sauf indication contraire) P Niveau des prix

Q Production industrielle y Dépense globale

Notations techniques

t Temps

Log Logarithme népérien

XT Composante tendancielle de X (polynôme de degré n) Xc Composante conjoncturelle de X

1 dX

—• Taux de variation de X (dérivée logarithmique) X dt

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< Le renouvellement et la succession des mêmes faits, dans des circons- tances différentes, dans tous les temps, dans tous les pays et sous tous

les régimes, voilà ce qu 'il fallait faire remarquer >

Clément Juglar, Des Crises Commerciales et de leur retour périodique en France, en Angleterre et aux États-Unis, 2ème éd., 1889, p. XIV

« La science n 'a progressé qu 'en isolant les phénomènes, et en faisant rentrer chacun d'eux, à mesure qu 'il était mieux connu,

dans un cadre d'ensemble >

Auguste Detœuf, Construction du Syndicalisme, 1938,p.59

Les phénomènes économiques plongent leurs racines profondes dans le cœur des hommes, là ou s'élaborent, à la lumière de la conscience et souvent inconsciemment,

les volontés qui provoquent les actes »

Jacques Rueff, l'Ordre Social, 2ème éd., 1949, p. 206

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INTRODUCTION

Si l'analyse financière, qui traite de la valeur des actions indi- viduelles, a fait l'objet d'un grand nombre d'ouvrages, par contre, on doit constater qu'il n'existe pas d'ouvrage d'analyse boursière faisant le point sur nos connaissances à propos du cours moyen des actions. Ce livre essaie précisément de combler en partie cette lacune, en adoptant, à l'intérieur de chaque chapitre, un rythme ternaire : analyse critique de la littérature économique sur le sujet;

recherches propres à l'auteur de l'ouvrage; conclusions.

Les différents chapitres présentent une analyse des relations d'interdépendance ou de causalité entre les fluctuations conjonc- turelles (3 à 5 années) ou de longue durée du cours moyen des actions et celles d'autres grandeurs économiques telles que les bénéfices des sociétés, les dividendes, les taux d'intérêt, la masse monétaire, les prix, l'activité économique et des variables repré- sentatives de la « psychologie collective » des individus (indica- teurs du risque financier général, indicateurs d'opinion...). Ces variables caractérisent à un instant donné ce que nous appelons la « conjoncture économique », notion qui a donc ici une accep- tion très large (1).

Si l'ouvrage porte sur le cours moyen des actions (ce qui tend à éliminer les composantes propres à chaque action ou sec- teur d'activité, pour ne retenir que l'élément commun à toutes les actions), les approches individuelles ou sectorielles seront cependant abordées lorsqu'elles peuvent fournir des enseignements utiles pour le cours moyen des actions. Par contre, le champ d'études n'intègre pas l'hypothèse d'un cheminement aléatoire des cours (Random Walk), selon laquelle la valeur d'équilibre des actions dépend instantanément des nouvelles informations reçues par les opérateurs'(Marché efficient), lesquelles suivraient un processus aléatoire, car elles seraient trop nombreuses et diverses pour pou- voir dégager des lignes de comportement : les variations du cours

(1) Pour une discussion sur la notion de « conjoncture économique », voir notam- ment Petel et Bouissou (1974), pp. 8-9 et Vespérini (1979), pp. 7-10 (réf. biblio. Chap.

VIII).

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des actions ne suivraient aucune loi autre que celle du hasard (2).

En ce qui concerne les fluctuations du cours moyen des actions, la composante aléatoire paraît avoir une importance secondaire relativement aux causes fondamentales qui font osciller la bourse, au moins lorsque les observations sont des moyennes trimestriel- les ou annuelles comme c'est la cas le plus souvent dans ce livre;

en effet, il a été possible de représenter les traits essentiels des fluctuations conjoncturelles ou de longue durée du cours des actions par d'autres variables observables, synthétisant vraisem- blablement les très nombreuses informations qui causent les mouve- ments boursiers. Les facteurs structurels ou institutionnels des variations des valeurs mobilières qui dépendent du sexe, de l'âge, de la profession, du revenu, du patrimoine, de la localisation ré- gionale... des opérateurs, ou des comportements des grands groupes intervenant en bourse (investisseurs institutionnels notamment), sortent également du domaine d'étude de ce livre (3), de même que les aspects internationaux (événements mondiaux, interdé- pendance des marchés financiers...) (4). Enfin, la liaison entre le cours des actions et le prix des actifs physiques est également hors du champ d'étude de ce livre (5).

Une meilleure compréhension des facteurs qui font osciller la bourse semble pouvoir conduire à des enseignements très utiles pour l'analyse d'un grand nombre de phénomènes économiques.

Dans la mesure où le cours des actions se forme sur un marché approximativement libre (6), l'analyse du cours moyen des actions

(2) Sur cette approche, voir notamment l'ouvrage de P.H. Cootner (1962) The Ran- dom Character of Stock Market Prices, The MJ.T. Press, Cambridge, Massachusetts, 1964,536 p.

(3) Sur ces questions voir notamment A. Babeau, La Détention des Valeurs Mobi- lières par les Particuliers. Quelques éléments d'une étude comparative entre plusieurs pays. Revue Économique, novembre 1971, pp. 943-978.

(4) Sur ce point, voir Prat (1980), pp. 864-868, Biblio, chap. VIII.

(5) Un ouvrage pourrait être entièrement consacré à l'étude des liaisons susceptibles d'exister entre le cours des actions et le cours des matières premières, qui serait articulée autour de deux questions : a) existe-t-il un même phénomène d'optimisme ou de pessi- misme affectant les bourses de marchandises et le marché des valeurs mobilières? b) sur quels motifs se fondent les arbitrages qu'effectuent les individus entre les actifs fman- ciers et réels? La question a) soulève de grandes difficultés dans la mesure où il paraît nécessaire « d'éliminer » du cours des matières premières les influences climatiques et les événements politiques qui peuvent avoir un impact considérable (pour ces derniers, voir le cours des métaux). Quant à la question b), elle n'est pas moins complexe, car il faudrait, dans l'optique d'une analyse de portefeuille, établir pratiquement un modèle complet de l'économie pour traiter valablement le sujet !

(6) Sur ce point, voir Prat (1980), pp. 830-56, Biblio. chap. VIII.

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peut apporter des contributions positives sur des questions essen- tielles et générales : détermination des anticipations économiques;

comportement des opérateurs face au risque économique général, oubli du passé et actualisation de l'avenir; réactions des opérateurs face aux variations de la quantité de monnaie, du taux de l'intérêt, des prix ; analyse des fluctuations économiques et de leur prévision.

Par ailleurs, d'un point de vue normatif, nous savons que s'il est possible d'éliminer le risque propre aux actions individuelles en constituant un portefeuille diversifié (7), la grande difficulté est qu'il n'est pas possible d'abaisser le risque systématique résul- tant des variations du marché dans son ensemble. Or, ce « facteur marché » est très important. Par exemple, King a montré que pendant la période 1927-52, 52 % des variations du cours des actions à Wall Street peut être attribué au marché, ce pourcentage s'abaissant à 31 % pour la période 1952-60 (8). Dans ces conditions, une meilleure compréhension de la dynamique du cours moyen des actions peut apporter des éclairages susceptibles d'abaisser le risque résultant du marché.

La littérature économique sur le cours moyen des actions

Cette littérature est constituée par de nombreuses approches partielles privilégiant telle ou telle variable économique pour expli- quer le cours des actions, ce qui donne un ensemble disparate dont les éléments sont parfois contradictoires. Une seconde carac- téristique essentielle de cette littérature, liée à la précédente, est qu'il n'existe aucune approche générale du cours moyen des ac- tions, reposant sur des hypothèses bien spécifiées et vérifiées par les données de l'observation.

Sur un plan plus méthodologique, la littérature relative au cours des actions présente deux principales lacunes. La première est que les vérifications empiriques sont le plus souvent limitées à un pays et une période d'analyse, les États-Unis étant de beau- coup le pays le plus exploré. Il en résulte qu'on ne peut apprécier la généralité et la stabilité des corrélations mises en évidence. La seconde insuffisance est plus fondamentale : les corrélations obser-

(7) Sur ce point, les deux ouvrages de base sont Markowitz (1959) et Sharpe (1970), Biblio. chap. IV.

(8) Voir King (1969), Biblio. chap. VIII. Les facteurs particuliers aux valeurs (émanant des firmes) sont estimés à 7 % et 20 % pour les deux périodes. Le facteur sectoriel serait de 12 % pour les deux périodes, et les « autres facteurs » seraient respectivement de 12 % et 37 %.

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vées sont, dans la très grande majorité des études, interprétées comme des relations de causalité, alors que certaines pourraient tout aussi bien s'interpréter en termes d'interdépendances dyna- miques résultant de facteurs communs, que ces facteurs soient d'ordre endogène au système social (d'autres variables économi- ques, par exemple) ou qu'ils soient d'ordre exogène (influence de phénomènes de nature physique sur la psychologie des indi- dus) (9).

Malgré ses défauts, la littérature nous lègue des bases théori- ques extrêmement précieuses avec certaines approches très ori- ginales qui méritent une analyse. Cette analyse de la littérature est donc nécessaire pour situer le point de départ des recherches entreprises par l'auteur du présent ouvrage.

Les principaux objectifs

Compte tenu de l'état actuel de la littérature sur le sujet, cet ouvrage a quatre objectifs généraux :

- le premier est de présenter une analyse des différentes théories du cours moyen des actions que l'on rencontre dans la littérature, en les soumettant à un examen critique, afin de dégager les voies de recherches qui semblent les plus pertinentes. A ce propos, chaque chapitre opère une distinction nette entre d'une part les résultats de la littérature et les points de vue de ses auteurs, et d'autre part, les recherches et interprétations qui sont propres à l'auteur du présent ouvrage ;

— le second objectif est de savoir s'il existe dans le domaine du cours moyen des actions des régularités numériques, c'est-à- dire des corrélations gardant des caractéristiques proches selon les

(9) Sur la distinction essentielle entre une relation de causalité et une relation d'inter- dépendance, voir les remarques très pertinentes de Vespérini (1979), pp. 10-23 (biblio.

Chap. VIII). Pour l'auteur, une corrélation entre deux variables peut être le reflet de trois types de relations radicalement différents :

- une « relation de dépendance » (unilatérale ou réciproque) : c'est ce que j'ap- pelle une relation de causalité directe ;

- un « lien de transitivité » : s'il existe une influence de X sur Y et une influence de Y sur Z, il n'existe aucune influence directe de X sur Z, avec pourtant l'apparition d'une corrélation empirique entre ces deux dernières variables. C'est ce que j'appelle une relation de causalité indirecte ;

- une relation de « dépendance commune à l'égard du milieu » : c'est ce que j'appelle une interdépendance dynamique résultant de facteurs communs.

A ces trois types de relations, il faut encore ajouter l'existence de corrélations fortuites pouvant résulter notamment de la structure cyclique des séries numériques.

Une corrélation est fortuite si elle n'entre pas dans les trois catégories de relations vi- sées ci-dessus.

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pays et les périodes analysées ;

— le troisième objectif est de tenter d'apprécier, dans la mesu- re où il existe des régularités, si ces dernières reflètent des interdé- pendances dynamiques ou des relations de causalité. A ce propos, un critère important dans cette interprétation sera le sens et la durée des décalages temporels mis en évidence ;

— enfin, le quatrième objectif est de proposer une formula- tion synthétique du cours moyen des actions, dont les hypothèses sont en accord avec l'ensemble des régularités observées. Cepen- dant, aucune vérification empirique de ce modèle ne sera présentée dans cet ouvrage en raison de l'état d'avancement insuffisant des travaux sur ce point (10).

Les domaines privilégiés du point de vue des applications empiriques sont les Etats-Unis et la France après la seconde guerre mondiale. Cependant, des explorations ont été faites dans d'autres périodes (seconde moitié du XIXe siècle, première moitié du XXe siècle) et d'autres pays (Allemagne Fédérale, Canada, Belgique, Italie, Japon, Royaume-Uni, Suisse) afin de comparer mes propres résultats avec ceux de la littérature, ou de vérifier la persistance des phénomènes observés à travers le temps et l'espace.

Le choix des Etats-Unis se justifie par le fait que Wall Street est la bourse de très loin la plus importante du monde, et qu'elle représente, plus que partout ailleurs, un véritable marché où les cours s'établissent en fonction des offres et des demandes libre- ment exprimées. Le choix de la France repose sur deux raisons essentielles : la première est qu'il existe relativement peu d'études économétriques sur le cours moyen des actions dans ce pays; la seconde est que la bourse de Paris a des structures, des institu- tions, une dimension et un environnement économique et politi- que très différents de ceux de la bourse de New York : or, il est intéressant de constater les mêmes régularités dans des environne- ments divers, et les bourses de Paris et de New York, qui sont deux places extrêmement différentes, peuvent permettre de déceler de telles régularités, si elles existent (11).

(10) Comme on le voit, l'objectif de l'ouvrage n'est pas d'établir une méthode de prévi- sion boursière. Il est d'établir les faits et de les interpréter.

(11) Je ne crois pas utile de commenter ici les méthodes économétriques utilisées dans cet ouvrage. Elles sont simples et connues, ainsi que leurs limitations. Pour appréhender les fluctuations conjoncturelles des variables, j'ai eu recours à deux méthodes : la méthode des taux de variation et celle des écarts par rapport à la tendance (sur ces méthodes, voir 1es commentaires de Granelle (1977), pp. 48-53 et de Vespérini (1979), pp. 8-9 ainsi que Prat (1980), pp. 442-49, biblio. Chap. VIII). En outre, la méthode des corré- lations décalées a été utilisée pour analyser le sens et la durée des décalages temporels

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Le plan de l'ouvrage

Les différents facteurs conjoncturels visés ci-dessus consti- tuent en réalité autant de théories partielles du cours des actions.

C'est pourquoi, chacun de ces facteurs fait l'objet d'un chapitre : 1 Bénéfices, dividendes et cours des actions

II Les plus-values boursières et le cours des actions

III Le taux d'intérêt à long terme indicateur du taux d'actua- lisation pour les actions ?

IV Le risque financier général et le cours moyen des actions V Le taux d'intérêt monétaire et le cours des actions VI La monnaie et le cours des actions

VII Le prix des biens et services et le cours des actions VIII L'activité économique et le cours des actions

IX Les sondages d'opinions, la « psychologie collective » et le cours des actions

Malgré cette multitude d'approches partielles privilégiant tel ou tel facteur pour l'analyse du cours moyen des actions, cer- tains regroupements et rapprochements doivent naturellement être faits. En effet, les chapitres I, II, III et IV examinent les fac- teurs intervenant dans le cadre du modèle actuariel (revenu des actions, taux d'actualisation, risque), qui constitue l'approche

« fondamentale » du cours des actions. Les chapitres V et VI étudient les facteurs monétaires, qu'il s'agisse de la quantité de monnaie ou du coût d'opportunité de la détention d'encaisses, coût mesuré par le taux d'intérêt monétaire. Ces deux facteurs interviennent au niveau des arbitrages que font les individus entre les divers actifs financiers qui leur sont offerts (monnaie, créances, actions). Alors que les facteurs considérés dans les quatre premiers chapitres ont des fondements essentiellement micro-économiques, les facteurs monétaires sont communs à l'ensemble des titres échangés sur le marché financier.

Les chapitres VII, VIII et IX ont chacun une problématique qui leur est propre. Cependant, en anticipant sur les résultats, on peut d'ores et déjà dire que l'inflation et la croissance, ainsi que la monnaie et le taux d'intérêt monétaire, sont apparus comme des facteurs importants de « l'opinion collective » (économique

moyens entre le cours des actions et les autres variables étudiées (sur ce point, voir Malin- vaud, 1969, Méthodes Statistiques de l'Économétrie, Dunod, Paris, Chap. 11 et 12).

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et politique) estimée par des sondages (12). Par conséquent, le chapitre IX apparaît pour partie comme un début de synthèse sur les facteurs des fluctuations conjoncturelles du cours des actions analysés dans les chapitres précédents.

Quant au dernier chapitre,

X - Vers une approche synthétique du cours moyen des actions ?

son objet est, comme l'indique le titre, de donner une interpréta- tion d'ensemble des régularités numériques observées dans les précédents chapitres, et d'en déduire une formulation générale du cours des actions, après avoir toutefois présenté une critique des modèles généraux du cours moyen des actions qui existent dans la littérature.

(12) Notons également que la monnaie, les prix et la production interviennent souvent dans les modèles généraux du cours des actions en tant que facteurs en amont des causes directes dans le cadre du modèle actuariel, ce qui confère à ces variables un rôle indirect dans l'explication du cours des actions.

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CHAPITRE I

BENEFICES, DIVIDENDES ET COURS DES ACTIONS L'idée selon laquelle la valeur des actions dépend des revenus que les actionnaires tirent de la possession de leurs titres n'est niée par aucun auteur, à ma connaissance. Cependant, les études portant sur la liaison entre le cours et le revenu des actions doi- vent d'efforcer de surmonter deux difficultés essentielles.

La première tient à la définition du revenu des actions : cer- tains auteurs sont partisans des dividendes, d'autres des bénéfices.

Il arrive aussi que le débat — dividendes ou bénéfices — prenne une tournure plus subtile en reposant sur l'idée q u ' à la fois les dividendes et les bénéfices non distribués influencent le cours des actions, mais dans des proportions différentes devant être précisées.

La seconde difficulté tient au fait que le cours se forme non pas en fonction de la situation actuelle, mais en fonction de l'évo- lution attendue. Il faut dans ces conditions pouvoir évaluer les bénéfices ou dividendes anticipés, qui sont les éléments de base de la valeur des actions. Cette question est étroitement liée à celle de la distinction entre les influences de court terme ou de longue durée des bénéfices ou dividendes sur le cours des actions.

Avant d'exposer mes contributions à ces questions (Section II), il est nécessaire de résumer les apports essentiels de la littéra-

ture sur le sujet (Section I).

I - Les principaux débats et résultats de la littérature A - Le débat bénéfices et/ou dividendes

1.11. L'analyse de Molodovsky (1962) consistant à étudier la liaison entre les évolutions de l'indice général du cours des actions et des bénéfices ou dividendes moyens par action aux Etats-Unis (1871-1960, données annuelles) a montré l'existence d'une interdépendance indéniable entre les principaux mouve-

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ments de ces trois grandeurs macro-économiques (1). Cependant, cette approche globale n'a pas permis de trancher la question de savoir si ce sont les bénéfices ou les dividendes qu'il convient de retenir pour représenter le revenu des actions. C'est pourquoi, tant les partisans des dividendes que ceux des bénéfices fondent le plus souvent leur argumentation au niveau des secteurs d'acti- vité ou à celui des sociétés.

1. Les arguments avancés par les partisans des dividendes 1.111. Trois groupes d'arguments sont présentés :

a) la nature des dividendes et des bénéfices non distribués.

Les dividendes sont un revenu monétaire effectivement perçu.

Par contre pour que les bénéfices non distribués puissent être perçus, il est nécessaire que les cours les enregistrent en plus- value, ce qui est loin d'être une nécessité (2). C'est pourquoi d'après Williams (1938), les bénéfices non distribués n'intéressent les actionnaires que dans la mesure où ils sont annonciateurs de divi- dendes pour l'avenir, ce qui suppose que les investissements auto- fmancés seront effectivement profitables : « Les bénéfices sont seulement un moyen pour une fin et ce moyen ne doit pas être confondu avec la fin. On doit dire qu'une action tire sa valeur des dividendes et non des bénéfices » (3).

Cette thèse paraît trouver quelque fondement avec les obser- vations empiriques de Graham, Dodd et Cottle (1962) et de la

« Cowles Commission », d'après lesquelles il existerait pour un nombre important de sociétés américaines une proportionnalité approximative entre. les cours et les dividendes, alors que les béné- fices non distribués ne seraient le plus souvent que faiblement pris en compte par le marché des actions (4).

b) La corrélation entre les rapports cours/bénéfices et divi- dendes/ bénéfices

Un grand nombre d'études remplacent l'analyse de la liaison entre le cours des actions et les dividendes par l'analyse de la liaison entre les ratios cours/bénéfices et dividendes/bénéfices,

(1) Voir Molodovsky (1962), pp. 12 et 16.

(2) Sur ce point, voir chapitre II, § 2.12 et § 2.22.

(3) Williams (1938), p. 57.

(4) Voir notamment Graham, Dodd et Cottle (1962), p. 481 et pp. 485-86.

(26)

grandeurs sans doute plus significatives pour les opérateurs. D'une manière générale, la corrélation observée entre ces deux ratios est positive (5) ce qui tend à indiquer une « préférence pour les divi- dendes », malgré la prudence que l'on doit garder dans l'interpré- tation de cette corrélation, les bénéfices figurant des deux côtés de l'équation de régression. Cependant, même si cette corrélation tend à montrer que plus la proportion distribuée des bénéfices est élevée, plus le cours de l'action sera élevé, elle ne démontre pas pour autant que les bénéfices non distribués n'ont aucune influence sur les cours.

c) Les réactions du marché des actions aux variations des dividendes

Cette approche consiste à analyser, pour chaque action, les réactions du marché consécutives aux annonces ou aux distribu- tions de dividendes. Par exemple, l'étude de Pettit (1971) sur un échantillon de 625 actions à la bourse de New York (janvier 1964- juin 1968) a montré que le marché réagit très violemment aux annonces de hausse ou de baisse des dividendes, ce qui « confirme de toute évidence la proposition selon laquelle le marché utilise les annonces de variation des dividendes versés pour fixer la valeur d'une action » (6), alors que, d'après la même étude, l'effet des bénéfices n'a pas paru significatif.

2. Les arguments avancés par les partisans des bénéfices

1.112. L'idée maîtresse des partisans des bénéfices est que l'actionnaire reçoit les bénéfices non distribués en augmentation du cours des actions, de sorte que s'il désire de la monnaie, il peut toujours vendre une partie de son portefeuille. Deux groupes d'observations empiriques semblent aller dans le sens de cette thèse.

Le premier est l'existence d'une corrélation systématique entre le taux de variation des bénéfices et celui du cours des ac- tions. Par exemple, le Graphique 1-1, construit à partir des résul- tats de Murphy (1968), montre une corrélation positive entre le taux de croissance du cours des actions de 203 sociétés américaines entre 1955 et 1964, et les taux de croissance des bénéfices par

(5) Voir Whitbeck and Kisor (1963); Malkiel and Cragg (1970) Bower and Bower (1969) et Harkavy (195 3).

(6) Pettit (1971), p. 1006. Voir également Peyrard (1974) et Sigalla (1977) qui confir- ment ces résultats pour la bourse de Paris.

(27)

Graphique 1-1 : États-Unis : 1955 à 1964

Cours des actions et bénéfices par action : taux de variation

(28)

action correspondants (7). Comme auparavant, Murphy (1966) avait montré le caractère aléatoire des variations des bénéfices des firmes, l'auteur en conclut que « ... la forte corrélation entre les taux de variation des bénéfices et des cours pendant la même période fournit une explication partielle au caractère aléatoire du cours des actions » (8).

D'autre part, le contre exemple des sociétés de croissance montre l'importance que peuvent prendre les bénéfices non dis- tribués. A ce propos, Lorie et Hamilton (1973) soulignent qu'

«... il y a des actions n'ayant jamais reçu de dividendes et un nom- bre plus important d'actions qui n'ont pas reçu de dividendes depuis plusieurs années, et ces actions appartiennent à des sociétés en vogue dont les actionnaires ont pu profiter de taux de rende- ment élevés » (9).

3. Les influences respectives des dividendes et des bénéfices non distribués 1.113. Jusqu'à l'article de Modigliani et Miller (1958), la

« Thèse traditionnelle » démontrait la non neutralité des décisions financières pour la valeur de la firme sur le marché. En juin 1958, les deux auteurs ont en quelque sorte « révolutionné » la théorie financière de l'entreprise en démontrant que si deux firmes appar- tiennent à la même catégorie de risque d'entreprise, la valeur de leurs actions est indépendante de la répartition entre dividendes et bénéfices non distribués, le marché ne tenant compte que des bénéfices futurs espérés. La démonstration reposait essentielle- ment sur l'idée que, si les dividendes augmentent, les bénéfices non distribués seront insuffisants pour financer les investissements nécessaires — lesquels sont une donnée résultant des conditions économiques extérieures à la firme — ce qui nécessitera de nou- velles émissions d'actions, défavorables au cours des anciennes actions (10). Or, d'après les hypothèses du modèle (11), les auteurs

(7) Il est intéressant de noter que la pente de la droite ajustant les classes d'observa- tions est proche de l'unité.

(8) Murphy (1968), p. 99.

(9) Lorie et Hamilton (1973), p. 118. Voir également Tieulé (1976), pp. 1235-36.

Ces observations, indéniables pour certaines sociétés, doivent être fortement nuancées car, pour le marché dans son ensemble, les plus-values boursières paraissent indépendantes des bénéfices non distribués (voir chapitre II, § 2.12 et § 2.22).

(10) Voir Miller et Modigliani (1961), pp. 412-15.

(11) Les hypothèses sont les suivantes (voir Miller et Modigliani, 1961, p. 412) : 1. L'investissement est une nécessité exogène à la firme.

(29)

montrent qu'il y aura exactement compensation entre « l'effet dividendes » qui est positif pour la valeur des actions, et « l'effet nouvelles actions » qui est négatif, cette compensation ne s'opé- rant que dans la mesure où les dirigeants sont supposés gérer au mieux les intérêts de leurs actionnaires.

Cependant, cette neutralité de la politique de distribution des dividendes pour la valeur des actions a été contestée par d'autres auteurs, et notamment par Gordon (1959 et 1962) qui a montré que l'influence de cette politique sur le cours d'une action dépend des valeurs respectives du taux de rentablité r des investissements et du taux d'actualisation k des actionnaires (12) :

- si r < k, la rétention de bénéfices a une influence négative sur le cours des actions (cas des sociétés en stagnation) ;

— si r > k, la rétention des bénéfices aura un effet positif sur le cours des actions (cas des sociétés de croissance) ;

- si r = k, le cours des actions reste indépendant du taux de distribution.

Par conséquent, la neutralité n'existe que dans le cas très particulier et très peu probable de l'égalité entre r et k, de telle manière que généralement «... le cours d'une action n'est pas indé- pendant de la distribution du revenu de la société entre les divi- dendes et la rétention » (13) (14).

Quant aux observations empiriques, elles conduisent dans l ensemble à des résultats assez partagés. D'après Graham, Dodd et Cottle (1962) et Gordon (1959 et 1962), l'influence sur le cours de 1 $ de bénéfices distribués tend à être beaucoup plus im- portante que l'influence de 1 $ de bénéfices retenus, le rapport

2. La firme a pour objectif de maximiser sa valeur boursière.

3. Marché parfait sans coût transactionnel, sans impôts différents sur les dividen- des et les plus-values.

4. Comportement « rationnel » des investisseurs (notamment, indifférence que leurs gains soient sous forme de dividendes ou de plus-values)

5. Certitude sur les bénéfices et investissements futurs.

(12) Pour la démonstration, voir Gordon (1962), pp. 38-40.

(13) Gordon (1962), p. 38.

(14) Il faut ajouter qu'un certain nombre d'études (voir Bauman (1965) ; Walter (1956), pp. 34-36; Gordon (1959), p. 103; Harkavy (1953), p. 283; Brealey (1972), p. 47), in- sistent sur le fait que l'impact des dividendes et des bénéfices investis sur le cours des actions dépend également de l'imposition différente des gains en capital et des dividendes, pour un actionnaire donné. Par conséquent, les conditions de Gordon définissant les situations d'influence des dividendes et des bénéfices non distribués sur le cours des actions, doivent être complétées afin de tenir compte du taux d'imposition différent sur les plus-values et les dividendes.

(30)

pouvant être de l'ordre de 1 à 4 en moyenne pour les sociétés américaines. Mais ces résultats ne sont guère convaincants (15) et il parait difficile de les généraliser. La conclusion nuancée que tirent Friend et Puckett (1964) de leur étude empirique (U.S.A., 1956 et 1958) pour les secteurs industriel, chimique, électronique et de l'acier paraît plus proche de la réalité : «... il est possible, dans une certaine mesure au moins, de pouvoir accroître le cours des actions dans les entreprises en stagnation en augmentant les dividendes, et dans les industries de croissance par une plus forte rétention » (16).

B. Bénéfices et dividendes « normaux » ou « anticipés »

1.12. Examinons d'abord l'hypothèse de bénéfices « nor- maux », puis celle de dividendes « normaux ».

1. Les bénéfices « normaux » ou « anticipés »

1.121. Il y a lieu de distinguer les approches micro et macro- économiques.

a) Les approches micro-économiques.

D'après Graham, Dodd et Cottle, «... le marché des actions n'attribue jamais la même importance aux bénéfices courants...

les bénéfices courants ne sont pris en compte que dans la mesure où ils sont considérés comme « normaux »... Ainsi, l'analyste intéressé par l'évaluation est conduit à attribuer une importance mineure à l'évolution des bénéfices dans le court terme » (17).

Pour déterminer leurs prévisions, les analystes financiers tiennent compte non seulement de l'évolution passée des bénéfices (bénéfices « normaux ») mais encore des informations recueillies par les contacts directs qu'ils ont avec les dirigeants des sociétés, de telle sorte qu'il convient de distinguer les variables résultant de la seule extrapolation du passé (historical variable) des variables prévisionnelles (expectational variable). D'une manière générale,

(15) Notamment, l'analyse de Gordon (1959) consiste à étudier pour plusieurs sec- teurs les corrélations multiples entre d'une part le cours des actions et d'autre part les dividendes et les bénéfices non distribués (coupes transversales). L'auteur interprète les coefficients de régression comme des coefficients mesurant l'influence des deux variables explicatives, ce qui est très discutable. Voir également G.R. Fisher (1961).

(16) Friend et Puckett (1964), p. 678.

(17) Graham, Dodd et Cottle (1962), pp. 477-79.

(31)

Gragg et Malkiel (1968) ont montré pour les sociétés américaines que s'il existe une forte corrélation entre les prévisions des analys- tes financiers et les taux de croissance passés des bénéfices, par contre la corrélation obtenue entre le taux de croissance prévu des bénéfices et le taux constaté a posteriori reste toujours très faible. En d'autres termes, les prévisions sur les bénéfices ne se réa- lisent que très rarement. Mais si les opérateurs se trompent sur 1 évolution future des bénéfices, les cours « subiront » cette erreur, et il reste opportun d'analyser la liaison entre les bénéfices prévus et les cours observés.

Sur ce dernier point, les études convergent pour montrer une influence importante des bénéfices « historiques » ou « prévus » sur le cours des actions individuelles (coupes transversales). L'étude de Molodovsky, May et Chottiner (1965) est très significative : 86 % du cours des 30 actions individuelles qui composent la moyenne Dow-Jones des actions industrielles peut s'expliquer en 1965 par les bénéfices passés, en extrapolant dans le cadre du modèle actua- riel à la fois le niveau et le taux de croissance des bénéfices. De même, Malkiel et Cragg (1970) montrent l'existence d'une forte corrélation entre les ratios cours/bénéfices « normalisés » et le taux de croissance moyen des bénéfices observés dans le passé.

Un point original est que les auteurs obtiennent des résultats nettement meilleurs en utilisant les prévisions des analystes finan- ciers (expectational variable) qu'avec les variables résultant d'une extrapolation du passé (historical variable) (18) (19).

Enfin, certaines études tendent à indiquer que les dividendes observés peuvent être considérés comme un indicateur du niveau

« normal » des bénéfices, dans la mesure où «... les dirigeants | veulent éviter des augmentations de dividendes qui ne pourraient j être maintenues dans l'avenir » (20). L'analyse économétrique J de Goffm, consistant à relier les dividendes à une moyenne pondé j rée des niveaux passés des bénéfices, les coefficients de pondéra- \ tion décroissant exponentiellement avec le passé, paraît assez bien 1 vérifiée sur les sociétés françaises cotées en bourse, pour les,années

1964 à 1967 (coupes transversales) (21). j .

(18) Voir également Bell (1974) et Brealey (1971), pp. 69-72.

(19) Signalons que dans le cadre d'une approche très différente, des études ont tenté de montrer que le marché des actions réagit aux variations non attendues des bénéfices.

Voir notamment Brown et Bail (1968) et Beaver and Dukes (1972).

(20) Goffin (1970), p. 957.

(21) Voir Goffin (1970), pp. 947-48.

(32)

VESPERINI 'JP.) (1979) L'Interdépendance des Conjonctures des Principaux Pays Occidentaux,Économica, 1979, 308 p.

CHAPITRE X

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