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Vers une ville augmentée ?. Planification et nouveaux régimes d’information

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Academic year: 2022

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Techniques & Culture

Revue semestrielle d’anthropologie des techniques

 

67 | 2017

Low Tech ? Wild Tech !

Vers une ville augmentée ?

Planification et nouveaux régimes d’information

The Postcolonial City in India. From Planning to Information?

Ravi Sundaram

Édition électronique

URL : http://journals.openedition.org/tc/8532 DOI : 10.4000/tc.8532

ISSN : 1952-420X Éditeur

Éditions de l’EHESS Édition imprimée

Date de publication : 6 juin 2017 Pagination : 150-153

ISBN : 978-2-7132-2707-3 ISSN : 0248-6016 Référence électronique

Ravi Sundaram, « Vers une ville augmentée ? », Techniques & Culture [En ligne], 67 | 2017, mis en ligne le 06 novembre 2017, consulté le 15 septembre 2020. URL : http://journals.openedition.org/tc/8532

Tous droits réservés

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151 Ravi Sundaram

Vers une ville augmentée ?

Planification et nouveaux régimes d’information

Les villes indiennes ont connu l’émergence d’infrastructures informationnelles massives qui sont sans équivalent dans les autres sociétés postcoloniales. Identification biométrique, cartographie SIG, systèmes d’information sur les transports et caméras de surveillance à l’échelle des villes figurent parmi les nombreux projets en cours. Face à ce « virage informationnel », de nouvelles questions se posent pour le citadin : relations entre la puissance sociale et les populations urbaines pauvres, modes de visibilité et de désorganisation au sein de la ville, fractures dans les régimes urbains lorsque des structures informationnelles sont mises en place par des acteurs étatiques concurrents, etc.

J’étudie ici l’archéologie du plan colonial, l’élaboration du plan d’aménagement par des experts dirigés par les États-Unis, et les transitions qui s’opèrent actuellement, et mets en relation ces trois éléments. Pour une large part, le plan directeur des années 1950 s’est accompagné de la réorgani- sation de l’ancien plan colonial, mais sous l’autorité du politique. Le passage aux infrastructures informationnelles est à relier à deux processus : d’un côté, l’essor du néolibéralisme dans le monde dès les années 1990, de l’autre, l’émergence des experts et des consultantsqui s’affirment comme les intermédiaires entre le pouvoir et l’action publique. Dans une culture où le risque est un vecteur majeur de l’action publique et de l’aménagement du territoire, les experts occupent désormais une place essentielle, tradition que la gouvernance informationnelle partage avec les entreprises commerciales.

Partha Chatterjee (2004) avance que, contrairement à la citoyenneté libérale, la démocratie poli- tique reposait sur une division conceptuelle entre les citoyens et les populations, ces dernières dési- gnant des catégories empiriques de personnes bénéficiant de politiques de protection sociale régies par des technologies administratives gouvernementales. Avec la mobilisation politique, les popula- tions urbaines ont cherché à mettre sur pied des mécanismes parajuridiques en lien avec les réseaux

SYNTHÈSE

article complet en accès libre : http://tc.revues.org/

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1. Caméra de vidéosur- veillance, mosquée Jasma Masjid dans le Vieux Delhi, 2008 Les pathologies de la sécurité sont une com- posante importante du tournant informationnel.

administratifs locaux dans le but d’accéder aux services publics, scénario que Chatterjee désigne sous l’appellation « société politique ». En mettant l’accent sur les réseaux parajuridiques dans l’ad- ministration au détriment des technologies normatives libérales, Chatterjee place la représentation urbaine sous un éclairage différent et présente l’infrastructure comme un lieu clé du politique. Les nouvelles infrastructures indiennes s’attachent à redéfinir ce rapport entre la gouvernance urbaine et la politique, rapport qui est vu comme l’expression d’un système urbain opaque, propice à la « cor- ruption » et aux arrangements ad hoc. Comme je le montre dans cet essai, les stratégies information- nelles adoptées par les coalitions d’élite préconisent l’authentification en temps réel des populations, des terres et des capitaux, comme un moyen de modernisation de la gouvernance urbaine.

Ces changements qui interviennent en Inde sont à rapprocher de l’essor des technologies de l’information dans le monde et du nouveau discours de changement qui l’accompagne. L’historien des sciences Paul N. Edwards (2011) souligne la puissance du « discours de rupture » associé à la technologie, qu’il décrit comme le trope de la modernisation le plus répandu depuis la seconde guerre mondiale, les élites et les technocrates laissant entrevoir la possibilité de changements rapides induits par les nouvelles technologies, phénomène qui s’est rapidement accru avec l’émer- gence des médias numériques. Les conséquences de cette thèse sont considérables. Comme le montre une étude récente, certains font valoir aujourd’hui que les « données » existent « avant » le fait, en tant qu’unité irréductible et capable de contenir la totalité du phénomène.

« Ce sentiment partagé de la préexistence des données aboutit souvent à un postulat caché : les don- nées seraient transparentes, et l’information irait de soi et constituerait la quintessence de la vérité » (Gitelman 2013).

Cette transaction entre transparence et information s’opère à mesure que les élites de la modernisation et les groupes de la classe moyenne s’associent pour changer les catégories politiques des populations urbaines au profit de jeux de données « apolitiques » rendus possibles par les nouvelles techniques de recensement. Dans le cas de l’Inde, les « données » sont produites au moyen des technologies médiatiques de l’écrit, du stockage et de la circula- tion, qui dépendent des réseaux de voisinage, des pratiques bureaucratiques, de la mobilisation des militants, des affaires judiciaires et de l’expansion de la couverture médiatique. Dans le présent article, je m’intéresse plus parti- culièrement à la matérialisation de ces nouvelles technologies dans les villes indiennes et au rapport qu’elles entretiennent avec le développement de la culture médiatique. Ces dernières années ont vu l’émergence d’un nouveau débat transdisciplinaire sur la culture de l’information, les infrastructures et les « réalités augmentées » de la vie urbaine, qui se caractérise par une pré- sence croissante des réseaux sociotechniques et des interfaces numériques dans le quotidien. Ce rapport de proximité entre infrastructure, information et réalité augmentée de la vie urbaine revient tout au long de l’article à travers le prisme instable d’une situation postcolonniale.

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R. SUNDARAM 153 VERS UNE VILLE AUGMENTÉE ?

Le virage informationnel mobilise les responsables politiques acteurs de la modernisation, les réformateurs des grands groupes de l’industrie ainsi que les mouvements sociaux. Les tech- nologies de la visibilité s’attachent à rassembler les populations non recensées dans des bases de données biométriques, d’où l’importance des débats sur la transparence. Les espaces urbains sont cartographiés numériquement au moyen de systèmes d’information géographiques (SIG).

En analysant les apories de ce virage informationnel, le texte présent ambitionne de mieux comprendre un lieu important de l’urbanisme postcolonial.

En ligne

Retrouvez l’article complet, en version originale (anglais), sur revues.org, Techniques &Culture 67 « Low tech ? Wild tech ! : http://tc.revues.org.

L’auteur

Ravi Sundaram est professeur au Centre d’études des sociétés en développement (CSDS) de Delhi, où il a créé en 2000, en collaboration avec Ravi Vasudevan et le collectif médiatique Raqs, le célèbre programme Sarai, devenu aujourd’hui l’un des sites de recherche expérimentale et critique les plus connus sur les médias, tant en Inde que dans le monde entier. Ravi Sundaram est l’auteur de Pirate Modernity : Media Urbanism in Delhi et de No Limits : Media Studies from India (Delhi, 2013) ainsi que de plusieurs articles dans la revue Sarai Reader : « The Public Domain » (2001), « The Cities of Everyday Life » (2002),

« Shaping Technologies » (2003) et « Crisis Media » (2004). Ses essais ont été traduits en plusieurs langues, en Inde, en Asie et en Europe. Il termine actuellement un projet à paraître sous le titre Events and Affections : post-public media circulation.

Ravi Sundaram est professeur invité de plusieurs universités : Princeton, Johns Hopkins, Michigan (Ann Arbor) et Oxford.

Iconographie

Image d’ouverture. Carte coloniale de New Delhi. Conception et plan d’urbanisme 1914. Remarquez la hiérarchie minutieuse des quartiers représentés par la cartographie coloniale. © Delhi State Archive.

1. © Collection of Inder Salim, artist.

Références

Chatterjee, P. 2004 The politics of the governed: reflections on popular politics in most of the world. New York : Columbia University Press.

Edwards, P. N. et al. 2011 « Historical Perspectives on the Circulation of Information », American Historical Review December : 1393-1435.

Gitelman, L. 2013 “Raw Data” Is an Oxymoron. The MIT Press : Cambridge MA.

Traduction

La rédaction de Techniques&Culture tient tout particulièrement à remercier Olivier Morice pour son travail de traduction.

Pour citer l’article

Sundaram, R. 2017 « Vers une ville augmentée ? Planification et nouveaux régimes d’information », Techniques&Culture 67

« Low tech ? Wild tech ! », p. 150-153.

Références

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