• Aucun résultat trouvé

La librairie et le crédit. Réseaux et métiers du livre à Paris (1830-1870)

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "La librairie et le crédit. Réseaux et métiers du livre à Paris (1830-1870)"

Copied!
738
0
0

Texte intégral

(1)

HAL Id: tel-00768969

https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00768969

Submitted on 27 Dec 2012

HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés.

La librairie et le crédit. Réseaux et métiers du livre à Paris (1830-1870)

Viera Rebolledo-Dhuin

To cite this version:

Viera Rebolledo-Dhuin. La librairie et le crédit. Réseaux et métiers du livre à Paris (1830-1870).

Histoire. Université de Versailles-Saint Quentin en Yvelines, 2011. Français. �tel-00768969�

(2)

UNIVERSITÉ DE VERSAILLES SAINT-QUENTIN-EN-YVELINES INSTITUT D’ÉTUDES CULTURELLES

ÉCOLE DOCTORALE CULTURES, RÉGULATIONS, INSTITUTIONS ET TERRITOIRES

LABORATOIRE CENTRE D’HISTOIRE CULTURELLE DES SOCIÉTÉS CONTEMPORAINES Ŕ EA 2448

DOCTORAT D’HISTOIRE

Viera R EBOLLEDO -D HUIN

La librairie et le crédit.

Réseaux et métiers du livre à Paris (1830-1870)

Volume I

Thèse préparée sous la direction du Professeur Jean-Yves M

OLLIER

en vue de l’obtention du grade de Docteur en Histoire Soutenue publiquement le 3 décembre 2011

Membres du jury :

Frédéric B

ARBIER

, Directeur d’Études à l’École Pratique des Hautes Études, Rapporteur.

Michel L

ESCURE

, Professeur à l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense, Rapporteur.

Christophe C

HARLE

, Professeur à l’Université Paris I-Panthéon Sorbonne Ŕ Institut d’Histoire Moderne et Contemporaine, Examinateur.

Laurence F

ONTAINE

, Directrice de Recherche au Centre National de la Recherche Scientifique, Examinateur.

Christine S. H

AYNES

, Professeur associé au département d’Histoire de l’Université de Caroline du Nord, Examinateur.

Jean-Yves M

OLLIER

, Professeur à l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines,

Directeur de thèse.

(3)
(4)

Remerciements

Qu’il me soit permis d’exprimer préalablement ma dette envers l’ensemble des services d’archives, qui ont, d’une manière ou d’une autre, facilité cette tâche ; envers Michel Lescure et, avec lui, Alain Plessis, qui m’ont les premiers donné goût à cette recherche ; envers Jean- Yves Mollier surtout, qui n’a cessé de m’encourager avec une juste évaluation des délais auxquels, en tant que doctorante-enseignante-de-secondaire-à-la-recherche-de-journées-de- plus-de-24-heures, je pouvais répondre, en lisant avec une rigueur et une rapidité à défrayer la chronique mes différents travaux, et en m’ouvrant finalement sur de nouveaux horizons. Je pense ici, entre autres, au jour où, venant reprendre un de mes volumes Ŕ déposé l’avant veille Ŕ, et parlant, de manière anodine, de Louis Tenré, Jean-Yves Mollier me fit relire avec plus d’attention la

Correspondance de Baudelaire, véritable boîte de pandore pour l’histoire

du crédit.

Ma gratitude va également à l’ensemble de l’équipe de LaDéHIS, et notamment à Claude Motte pour les recensements de la population parisienne, à Anne Varet-Vitu pour les fonds de carte de Paris, à Pascal Cristofoli pour ses conseils en analyse de réseaux, et à Maurizio Gribaudi, dont les séminaires ont profondément construit ma réflexion sur l’espace social parisien Ŕ et a fortiori celui des libraires Ŕ du XIX

e

siècle.

Nombre d’études de cas n’auraient eu d’intérêt sans l’apport des renseignements fournis par les descendants de « mes » libraires ou sans l’aide de certains de mes confrères ayant travaillé sur ces individus. Aussi, je tiens tout particulièrement à remercier, dans l’ordre chronologique : Guillaume de Tournemire, Marie-Antoinette Verdun-Dupray, Yvon Corfa, Laurent Chantraine, Jean-Michel Quetin, Louis André, Jean-Michel Barféty, Bernard Parent, Jean Hubert-Brierre et Éric de Catheu. Je suis très reconnaissante à Marie-Claire Boscq de m’avoir fait bénéficier des informations qu’elle détenait sur « mes » faillis, suite à son dépouillement systématique des dossiers de brevets pour les monarchies constitutionnelles.

Que soient également gratifiés pour leur constance mes fidèles relecteurs : Joëlle, Jérôme, Christian, Claudine et Estelle, ainsi que les nombreux amis qui ont, de près ou de loin, soutenu l’achèvement de ce travail : Carole, Rahul, Moïse, Geneviève, Cédric, Cyril et tous ceux que nous ne pouvons nommer ici.

Je suis en dernier lieu redevable envers mes proches que je remercie infiniment : Damien,

pour avoir souffert mes « 7 000 types » pendant toutes ces années ; ma sœur, Marusia, pour

son accompagnement durant les derniers moments de la rédaction ; mon père, pour son

lointain mais précieux soutien ; ma mère, pour son concours quotidien de longue haleine.

(5)
(6)

Clin d’œil

« Nous avons tous la librairie que nous méritons, sauf ceux qui n’en ont aucune. La mienne est la Sant Jordi, à Blanes, la librairie de Pilar Pagespetit i Mottri, dans l’ancienne avenue de la ville. […] Lorsque je lui demande si elle a toujours voulu se consacrer à ce métier, elle me répond qu’elle ne le sait pas. Elle a commencé à Tordera, en tant que bibliothécaire, et cela fait dix-huit ans, lorsqu’elle est venue s’installer à Blanes, elle a décidé de monter une librairie et elle a l’air heureux. Elle me fait crédit et, en général, m’obtient les livres que je lui commande. On ne peut pas en demander davantage. »

Roberto Bolaño, Entre parenthèses, trad. par Roberto Amutio, Paris, Éditions Christian Bourgois, 2011 (2004), p. 145-146.

(7)
(8)

Abréviations utilisées

AdP Archives de Paris (et du département de la Seine)

Et par extension :

AdCôte d’Or, AdYonne, etc. Archives départementales de la Côte-d’Or, de l’Yonne etc.

AmLyon Archives municipales de Lyon

AN Archives nationales

APP Archives de la préfecture de police

BF Banque de France

BnF Bibliothèque nationale de France

CCIP Archives de la Chambre de Commerce et de l’Industrie de Paris

IMEC Institut Mémoires de l’édition contemporaine

(9)
(10)

Introduction générale : Les faillites de libraires, entre histoire culturelle, sociale et économique

Déjà au centre de notre maîtrise et de notre DEA, dirigés par Michel Lescure, les faillites de libraires n’ont cessé, depuis lors, de nous interroger. Si l’idée simple et quelque peu morbide de nous intéresser aux morts d’entreprises Ŕ sujet peu étudié, nous avait dit, au cours d’un des derniers travaux dirigés de Licence, Judith Lyon-Caen Ŕ a peut être été une des premières motivations, nos travaux d’initiation à la recherche nous ont montré l’ampleur des informations que recelaient les dossiers de faillite, en matière notamment d’histoire des entreprises et d’histoire du crédit.

1. Les faillites, à la croisée des regards

Malgré notre enthousiasme

a posteriori, la faillite se lit tout entière en creux. En effet, le

failli est, étymologiquement, celui qui tombe, échoue, trompe, celui qui commet une erreur

(de gestion) et, parce que laissant ses engagements en souffrance, celui qui manque

d’honneur. Fuyard en puissance, le débiteur suspecté de malhonnêteté envers ses confrères,

subit, depuis l’époque médiévale, des peines infâmantes, qui se perpétuent en partie jusqu’à la

loi du 4 mars 1889, instaurant une procédure de liquidation judiciaire pour les débiteurs

malheureux, voire jusqu’à celle du 30 décembre 1903, facilitant la réhabilitation complète des

commerçants honnêtes en cessation de paiement. La faillite est, contrairement à la déconfiture

Ŕ condamnant tout débiteur défaillant en juridiction civile Ŕ ou à la banqueroute Ŕ qui est un

phénomène pénal Ŕ, un délit commercial défini par le Code de commerce, dont les termes sont

hérités du droit des marchands d’Ancien Régime. Elle constitue donc une sanction collective

contre le commerçant indigne, incapable d’honorer ses fournisseurs. La procédure judiciaire,

qui s’élabore véritablement au XIX

e

siècle, fait, à cette époque, couler beaucoup d’encre et,

parce que critiquée, elle connaît plusieurs réformes tendant à distinguer progressivement

l’infortuné commerçant Ŕ ou mauvais gestionnaire Ŕ de l’homme frauduleux. Malgré

(11)

l’assouplissement de la législation, la faillite reste, jusqu’à aujourd’hui, le négatif comptable de l’entreprise, la trace de sa mort, le signe et le stigmate des crises.

Par conséquent, la faillite intéresse, parmi les contemporains du

Code, juristes,

économistes et romanciers, et, plus récemment, outre les historiens du droit et de la gestion leurs collègues historiens économistes. Tandis que les juristes Ŕ de même que les romanciers Ŕ du XIX

e

siècle critiquent le Code et discutent des réformes entreprises en France par comparaison à la législation étrangère

1

, les historiens du droit ont longtemps englobé la faillite au sein d’une étude dogmatique du droit commercial. À côté de l’ouvrage de Jean Hilaire

2

Ŕ poursuivi et actualisé, en quelque sorte, par celui rédigé autour d’Édouard Richard

3

, tous deux indispensables à la compréhension des origines, de l’évolution et des enjeux de la procédure, analysée plus précisément par Alain Desurvire

4

notamment Ŕ, de récentes études s’attachent désormais, dans la lignée des travaux de Claire Lemercier

5

par exemple, aux rôles des acteurs judiciaires, rejoignant ainsi les préoccupations actuelles de plusieurs historiens de la gestion. En effet, à la fin des années 1980 Ŕ au moment même où, paradoxalement, paraît le livre de Jean Hilaire Ŕ, l’historiographie de la justice a été profondément transformée sous l’effet des exhortations de Pierre Bourdieu ou de Christophe Charle qui, réactualisant l’héritage wébérien, en appelaient à une analyse sociale du droit

6

. Si le terme remonte au début du XX

e

siècle

7

, la sociologie juridique s’est surtout développée ces soixante Ŕ voire ces trente Ŕ dernières années et s’est accompagnée de recherches pluridisciplinaires, empruntant des méthodes anthropologiques et prosopographiques, sur quelques objets communs aux

1 Raymond Serville, « Étude sur les syndics de faillites (réformes qui pourraient être introduites dans l’organisation de leurs pouvoirs et de leurs fonctions, d’après l’examen des principales législations étrangères) », dans Bulletin de la société de la législation comparée, t. 17, 5 mai 1888, p. 432-458 ; Joseph Lefort, « La réforme de la législation des faillites », dans Journal des économistes. Revue de la science économique et de la statistique, t. 46, avril-juin 1889, p. 3-16.

2 Jean Hilaire, Introduction historique au droit commercial, Paris, Presses Universitaires de France, 1986, 355 p.

3 Édouard Richard (dir.), Droit des affaires. Questions actuelles et perspectives historiques, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2005, 642 p.

4 Alain Desurvire, Histoire de la banqueroute et faillite contemporaine, Paris L’Harmattan, 1993, 207 p.

5 Claire Lemercier, Un si discret pouvoir. Aux origines de la chambre de commerce de Paris : 1803-1853, Paris, La Découverte, 2003, 408 p.

6 Max Weber, Économie et société, Paris, Pocket, 1995 (1ère éd. française 1971, 1ère éd. allemande 1922), 2 vol.

et Sociologie du droit, Paris, Presses Universitaires de France, 1986 (édité par Jacques Grosclaude à partir de textes tirés de Économie et société et d’autres publiés entre 1911 et 1913) ; Pierre Bourdieu, « La force du droit.

Éléments pour une sociologie du champ juridique », dans Actes de la recherche en sciences sociales, 1986, vol. 64, n° 1, p. 3-19 ; Christophe Charle, « Pour une histoire sociale des professions juridiques », dans Actes de la recherche en sciences sociales, 1989, vol. 76, n° 1, p. 117-119.

7 Évelyne Serverin, Sociologie du droit, Paris, La Découverte, 2000, p. 3-6 rappelle que l’expression apparaît en 1913, date à laquelle le juriste autrichien Eugen Ehrlich publie Grundlegung der Soziologie des Rechts. Notons, avec Jacques Grosclaude, que c’est à cette époque que Max Weber, ancien professeur de droit commercial, fait également paraître sa Rechtssoziologie conçue dans les années 1890, et qui constitue, selon le traducteur, le point culminant de la théorie wébérienne de la rationalisation des sociétés (« introduction », dans Max Weber, Sociologie du droit, ouv. cité, p. 13-23).

(12)

historiens et aux gestionnaires, donnant naissance à diverses études, portant notamment sur le rôle, les fonctions et les pratiques Ŕ ainsi que leur évolution Ŕ des juges du tribunal de commerce ou des syndics de faillites

8

. L’intérêt pour ces acteurs est, de fait, plus ancien.

Suspectés, notamment par les romanciers Ŕ au premier chef, Balzac

9

Ŕ, de collusion avec les victimes ou pire, avec l’accusé du procès, les juges du tribunal de commerce et les agents de faillites Ŕ au cœur des réformes judiciaires du XIX

e

siècle Ŕ occupent une place importante dans la réflexion juridique de l’époque

10

, et ce d’autant plus que leur légitimité est, du fait de leur recrutement Ŕ au sein des commerçants, pour les uns, et des créanciers, au moins jusqu’en 1838, pour les autres Ŕ, remise en cause, du moins par certains juristes légalistes doutant de leurs compétences

11

. Or, précisément, comme l’a montré l’historiographie récente, la faillite offre cette possibilité de légitimation aux juges du tribunal de commerce qui appliquent de manière très souple la loi Ŕ tout en participant à sa réformation Ŕ de sorte qu’ils apparaissent plutôt comme des médiateurs entre les parties, garantissant la moralité du commerce et régulant le tissu commercial

12

. En outre, les historiens de la gestion, aujourd’hui plus préoccupés qu’auparavant de la pratique des acteurs, ont souligné combien la réforme de 1838, modifiant les modalités de désignation du syndic, a favorisé la professionnalisation de leurs fonctions Ŕ l’agent de la faillite devenant, au cours du second XIX

e

siècle, un véritable expert comptable

13

. Le récent renouvellement de l’histoire du contentieux judiciaire, et plus précisément du contentieux commercial, montre déjà que l’analyse des faillites se trouve au croisement de l’histoire économique, sociale, juridique et politique, ou encore de celle des techniques, des représentations et des mentalités.

8 Natacha Coquery et Nicolas Praquin, « Règlement de faillites et pratiques judiciaires. De l’entre-soi à l’expertise du syndic (1673-1899) », dans Histoire & Mesure, 2008, vol. XXIII, n° 1, p. 43-83 .

9 Nous pensons bien sûr ici à César Birotteau. Sur ce point voir notamment Sylvie Humbert, « À l'instar de César Birotteau, des juges honnêtes et de loyaux commerçants à Lille au XVIIIe et au XIXe siècles ? », dans Histoire de la justice, Paris, La Documentation française, 2007, n° 17 : « Les tribunaux de commerce. Genèse et enjeux d’une institution », p. 145-152.

10 Paul Fossé, Les syndics de faillite, fonctions et pouvoirs, Paris, Guillaumin, 1888, 239 p. ; Raymond Serville,

« Étude sur les syndics de faillites… », art. cité. Jérôme Sgard, « Do Legal Origins Matter ? The Case of Bankruptcy Law in Europe, 1808-1914 », dans European Review of Economic History, 2006, n° 10, p. 389-419 poursuit actuellement ce type de réflexion.

11 Claire Lemercier, « Juges du commerce et conseillers prud’hommes face à l’ordre judiciaire (1800-1880). La constitution de frontières judiciaires », dans Hélène Michel et Laurent Willemez (dir.), La justice au risque des profanes, Paris, Presses Universitaires de France, 2007, p. 107-123.

12 Sylvie Humbert, « À l'instar de César Birotteau… », art. cité ; Pierre-Cyrille Hautcœur, « Produire des statistiques : pour quoi faire ? L’échec de la statistique des faillites en France au XIXe siècle », dans Histoire &

Mesure, 2008, vol. XXIII, n° 1, p. 85-136. Cela rejoint l’hypothèse d’autorégulation de Jean-Clément Martin,

« Le commerçant, la faillite et l’historien », dans Annales ESC, 1980, n° 6, p. 1251-1268.

13 Pierre Labardin, « La diffusion progressive des pratiques comptables en France. Une étude d’après les rapports des syndics de faillite auprès du Tribunal civil de Tours jugeant commercialement (1842-1935) », dans Cahiers du Laboratoire Orléanais de Gestion Praquin, 2007, n° 2, p. 2-39, [En ligne uniquement], LOG, http://www.univ- orleans.fr/log/rechdoc.htm, consulté le 10 mai 2010.

(13)

C’est également en 1980 que Jean-Clément Martin s’insurge contre les historiens qui voient « dans la faillite à la fois [et seulement] la sanction de la dégradation de l’état économique d’une entreprise, et l’indice révélateur de la conjoncture », et invite à « repenser la signification de[s] faillite[s] » en les considérant « dans leur nombre », car c’est là, selon lui, « que se révèle le sens de la procédure

14

». Avant de revenir sur l’apparent paradoxe entre le double refus d’une histoire monographique et d’une histoire globale, tout en revendiquant une approche quantitative, notons d’abord que les deux facteurs d’explication de la faillite soulevés par l’historien de la mémoire vendéenne sont déjà à l’ordre du jour dans la littérature Ŕ qu’elle soit d’économie politique ou romanesque Ŕ du XIX

e

siècle, voire antérieurement. De même que Savary considère, à la fin du XVII

e

siècle, la faillite comme le résultat de l’ambition, de l’ignorance ou de l’imprudence des commerçants, Jean-Baptiste Say estime, un peu plus de cent cinquante ans plus tard, qu’elle est la sanction naturelle contre l’« homme incapable et négligent

15

». D’une autre manière, lorsque les romanciers de la « littérature panoramique »

16

, soucieux de rendre lisible la réalité sociale à travers une mise en types de leurs contemporains

17

, s’attachent aux commerçants Ŕ qui constituent, selon eux, l’« homme moyen »

18

, soit le type paradigmatique, du XIX

e

siècle Ŕ, la faillite sert, le plus souvent, à mettre en scène leur ambition démesurée, leur arrivisme et leurs spéculations hasardeuses, voire plus ou moins honnêtes, qui seraient caractéristiques d’un siècle perverti par

14 Jean-Clément Martin, « Le commerçant, la faillite…», art. cité, p. 1251.

15 Jacques Savary, Le parfait négociant, ou instruction générale pour ce qui regarde le commerce des marchandises de France, et des pays étrangers, Paris, Chez les frères Estienne, 1757-1770 (1675), t. I, livre premier, chapitre III : « Que l’ignorance, l’imprudence et l’ambition des négocians [sic] causent ordinairement les faillites et banqueroute », p. 25-28 et livre quatrième, chapitre III : « Des faillites qui arrivent par pur malheur aux négocians [sic] : ce qu’ils doivent faire et observer : la manière avec laquelle doivent agir leurs créanciers et les syndics ou directeurs des créanciers ; et des banqueroutes frauduleuses, et comment ceux qui les font sont punis », p. 331-377 ; Jean-Baptiste Say, Traité d’économie politique ou simple exposition de la même manière dont se forment, se distribuent et se consomment les richesses, Osnabrück, Otto Zeller, 1966 (fac-similé de l’édition Guillaumin de 1841), p. 399 s’oppose à la conception d’Adam Smith, pour qui « le profit est raison du capital d’une entreprises et non de l’industrie de son entrepreneur » (p. 399), et montre que « dans la même ville, lorsque deux manufactures s’occupent de la même espèce de produits et disposent d’un capital semblable, si l’une d’elles, conduite avec beaucoup plus d’ordre, d’intelligence, d’activité que l’autre, rapporte 20 pour cent de son capital, et la seconde à peine 5 pour cent, n’est-il pas évident, conclue-t-il, que la supériorité d’un de ces profits sur l’autre, est due à la supériorité des talents industriels de l’entrepreneur, et non à son capital ? » (p. 352)

16 Nous faisons ici référence à l’expression, communément admise pour qualifier la littérature « réaliste » du premier XIXe siècle, de Walter Benjamin, Paris, capitale du XIXe siècle. Le livre des Passages, Paris, Éditions du Cerf, 2000 (1989), p. 37-38 et 543-551.

17 Judith Lyon-Caen, « Saisir, décrire, déchiffrer : les mises en texte du social sous la monarchie de Juillet », dans Revue historique, 2004/2, n° 630, p. 303-331 ; Jérôme David, Éthiques de la description. Naissance de l’imagination typologique en France dans le roman et la sociologie (1820-1860), thèse de Lettres et d’Histoire des civilisations, co-dir. C. Reichler et J. Revel, Université de Lausanne et EHESS, 2006, 615 p.

18 Nous faisons ici référence à l’expression du statisticien Adolphe Quételet, Sur l’homme et le développement de ses facultés ou Essai de physique sociale, Paris, Fayard, 1991 (1835), en particulier p. 499-505. Sur ce point voir Alain Desrosières, La politique des grands nombres. Histoire de la raison statistique, Paris, La Découverte, 2000 (1993), passim ; Jérôme David, Éthique de la description…, ouv. cité, passim.

(14)

l’industrialisation et la montée du capitalisme

19

. Si les études sur les représentations littéraires de la faillite, qui seraient riches d’enseignements en matière d’histoire des mentalités, sont encore trop rares

20

, le regain d’intérêt actuel pour les analyses sur l’argent ou le crédit dans la littérature

21

donne lieu à de nombreux travaux mettant notamment en évidence des convergences entre scientifiques et écrivains, préoccupés de la question sociale, les traités d’économie politique tendant à se littératuriser, les chiffres venant en retour envahir l’écriture romanesque

22

.

De fait, d’Adam Smith à Alfred Marshall, en passant par Sismondi, Marx, Juglar, ou encore Pareto, tous conviennent que la faillite touche avant tout les petites entreprises, dont la jeunesse ou la faiblesse capitalistique ne leur permettent pas de s’adapter aux innovations sectorielles Ŕ sortant perdantes du jeu de la concurrence Ŕ, ni même de faire face aux difficultés conjoncturelles

23

. Dans les ouvrages d’économie politique, la faillite est, en outre, considérée comme l’effet immédiat des crises. Si la statistique des faillites se développe au début du XIX

e

siècle Ŕ parallèlement aux grandes enquêtes industrielles, judiciaires et morales Ŕ, les auteurs du

Compte général de l’administration de la justice civile et commerciale n’en font rien24

et il revient à Clément Juglar de théoriser, dès 1850-1860, sur les

19 Nous pensons en premier lieu à César Birotteau (1837) et Illusions perdues (1837-1843) de Balzac, L’homme et l’argent (1839) de Souvestre et Jérôme Paturot (1842) de Louis Reybaud.

20 Luc Marco et Guillaume Artur du Plessis, « La faillite dans la littérature française du XIXe siècle », dans Jean- Marie Thomasseau (dir.), Commerce et commerçants dans la littérature. Actes du colloque international organisé par le département Techniques de Commercialisation de l’IUT « A » - Université de Bordeaux I (25- 26 septembre 1986), Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux, 1988, p. 135-153 consacrent un article, trop succinct à nos yeux, à ce sujet. Plus récemment, Anne Élisabeth Andréassian Ŕ tout comme Luc Marco, gestionnaire de formation Ŕ, a livré une étude sur les représentations littéraires de l’entreprise faisant une petite place aux faillites : Les représentations de l’entreprise dans le roman français au XIXe siècle (1829-1891), thèse d’Histoire, dir. M. Tsikounas, 2010, 2 vol. (en particulier vol. 2, p. 51-85).

21 L’intérêt pour ce thème est ancien comme en témoigne notamment la thèse d’Emmanuel Failletaz, Balzac et le monde des affaires. Dissertation présentée à l’École des Hautes Études commerciales de l’Université de Lausanne pour l’obtention du grade de Docteur ès Sciences commerciales et économiques, Lausanne, Librairie Payot et Cie, 1932, 158 p. Si cet intérêt ne s’est jamais véritablement tari, les travaux se multiplient aujourd’hui, à ce titre on compte les thèses d’Hélène Gomart, Les opérations financières dans le roman réaliste : lectures de Balzac et de Zola, Paris, Honoré Champion, 2004, 380 p. et de Christophe Reffait, La bourse dans le roman du second XIXe siècle : discours romanesque et imaginaire social de la spéculation, Paris, Honoré Champion, 2007, 642 p.

22 Voir notamment : Jérôme David, « Les "tableaux" des sciences sociales naissantes : comparatisme, statistique, littérature », dans Revue d’histoire des sciences humaines, 2001/2, n° 5, p. 37-59 ; François Vatin et Nicole Edelman (dir.), Économie et littérature. France et Grande-Bretagne 1815-1848. Journée d’étude organisée par l’Université Paris X-Nanterre le 6 avril 2006, Paris, Éditions Le Manuscrit, 2007, 353 p. ; Judith Lyon-Caen,

« Enquêtes, littérature et savoir sur le monde social en France dans les années 1840 », dans Revue d’histoire des sciences humaines, 2007/2, n° 17, p. 99-118.

23 Luc Marco, La montée des faillites…, ouv. cité, p. 24-42 et « Faillites et crises économiques en France au XIXe siècle », dans Annales ESC, 1989, n° 2, p. 355-378.

24 Pierre-Cyrille Hautcœur, « Produire des statistiques… », art. cité.

(15)

crises, à partir de séries longues tant nationales qu’internationales

25

. Reprise Ŕ en la combinant, notamment aux longues vagues de Kondratieff ou de Simiand

26

Ŕ et diffusée par Schumpeter, dans les années 1930, la théorie des cycles de Juglar a longtemps influencé l’histoire économique française et par là-même l’histoire de la faillite.

En effet, l’histoire économique a d’abord été celle des crises et, de fait, celle-ci s’élabore le plus souvent au moment même des mouvements de panique : « l’histoire économique quantitative, première manière, est, écrit Pierre Chaunu en 1974, une tentative de réponse, sans fard, aux angoissants problèmes d’une époque.

27

». Comme si les débats des années 1890-1905, entre Simiand et Seignobos Ŕ rejouant en partie le conflit, né au moment de la naissance de la statistique, entre holisme et individualisme

28

Ŕ, rejaillissaient à l’époque de la crise américaine, l’histoire économique connaît une étape décisive dans les années 1930, avec Ernest Labrousse et Fernand Braudel, qui défendent une histoire quantifiée, macroéconomique, sur le long terme et où l’influence structuraliste n’est pas sans peser sur la conception Ŕ du premier pour le moins Ŕ d’une prédominance de la conjoncture économique sur les autres aspects constitutifs des sociétés. Étonnamment, bien que de nombreux historiens voient dans les faillites le symbole même des crises, elles ne font pas partie des indicateurs retenus en priorité par les études quantitatives menées par les premiers rédacteurs des

Annales. Deux ans après la fondation de la revue, Henri Hauser signale néanmoins « un fonds,

peu utilisé jusqu’à présent, […] qui présente le plus grand intérêt pour l’histoire du commerce, soit intérieur, soit extérieur, et pour celle des banques en France […], à savoir le fonds des faillites » dont les bilans « peuvent fournir [de précieux renseignements] sur la structure des affaires, celles-ci se laissant beaucoup mieux saisir à l’état de crise que dans la vie normale.

29

» À partir de listes des débiteurs et correspondants de quelques maisons de

25 Après un premier article paru en 1856 dans l’Annuaire de l’économique politique et statistique, est publiée six ans plus tard une première version de l’ouvrage de Clément Juglar, Des crises commerciales et de leur retour périodique en France, en Angleterre et aux États-Unis, Paris, Guillaumin, 1862, 258 p. remanié pour une seconde édition en 1889. Sur ce point voir : Muriel Dal-Pont Legrand et Ludovic Frobert, « Note sur le premier état du projet d’édition des Écrits économiques de Clément Juglar (1819-1905) », dans Cahiers d’économie politiques, 2009, n° 57, p. 175-196.

26 Muriel Dal-Pont Legrand et Harald Hagemann, « Analyses théorique, historique et statistique des cycles : Juglar et Schumpeter », dans Revue européenne des sciences sociales, 2009, n° 143, p. 49-64 ; Michel Margairaz, « Histoire économique », dans Christian Delacroix, François Dosse, Patrick Garcia et Nicolas Offenstadt (dir.), Historiographies. Tome 1 : Concepts et débats, Paris, Gallimard, 2010, p. 295-306.

27 Pierre Chaunu, « L’économie Ŕ Dépassement et prospective », dans Jacques Le Goff et Pierre Nora (dir.), Faire de l’histoire, Paris, Gallimard, 2011 (1974), p. 374.

28 Madeleine Rebérioux, « Le débat de 1903 : Historiens et sociologues », dans Charles-Olivier Carbonell et Georges Livet (dir.), Au berceau des Annales. Le milieu strasbourgeois, l’histoire en France au début du XXe siècle. Actes du colloque de Strasbourg, 11-13 octobre 1979, Toulouse, Presses de l’Institut d’Études politiques, 1983, p. 219-230 ; Alain Desrosières, La politique des grands nombres…, ouv. cité, passim.

29 Henri Hauser, « Une source de l’histoire du commerce et des banques : le fonds des faillites », dans Annales, 1931, n° 12, p. 542.

(16)

commerce et de banque, l’historien invite ses confrères, modernistes surtout, à réaliser « un dépouillement systématique du fonds des faillites

30

». Malgré cette recommandation, et quelques analyses régionales, sur le XVIII

e

siècle Ŕ répondant parfaitement au programme labroussien

31

Ŕ, les études de ce type restent relativement peu nombreuses jusqu’aux années 1970, sinon 1980, voire même jusqu’à aujourd’hui. Si on comprend aisément cette désaffection pour les faillites d’Ancien Régime, pour lequel les sources sont rares et dispersées du fait de la multiplicité des procédures offertes aux commerçants insolvables Ŕ ce qui rend toute reconstitution rétrospective trop longue, relativement à la construction de séries sur les prix des céréales par exemple

32

Ŕ, ces lacunes s’expliquent mal en ce qui concerne le XIX

e

siècle, si ce n’est que « dans le modèle labroussien […], c’est la crise

industrielle d’ancien type qui est d’abord en cause, la crise d’une structure industrielle où dominent les

textiles, et non la métallurgie.

33

»

Relativement peu influencée par la

New Economic History des années 1950-1960 Ŕ née du

développement après-guerre de comptabilités nationales Ŕ, l’histoire économique française manque Ŕ aujourd’hui encore, selon un de ses fervents défenseurs Ŕ d’études quantitatives sur ce qui ne touche ni à l’agricole ni à l’industriel

34

, et ce n’est qu’à l’étranger Ŕ et beaucoup plus récemment Ŕ que quelques travaux cliométriques prennent en considération les faillites

35

. En effet, l’histoire économique française est, au moment où l’économétrie prend son essor aux États-Unis, essentiellement marquée par deux autres courants : l’un quantifié, l’histoire sérielle, l’autre à tendance monographique, l’histoire des entreprises. En 1973, Pierre Cayez et Robert Estier, qui publient tous deux un article dans le même numéro du

Bulletin,

30 Idem, p. 550.

31 Pierre Dardel, « Crises et faillites à Rouen et dans la haute Normandie de 1740 à l’an V », dans Revue d’histoire économique et sociale, 1948, vol. XXVII, n° 1, p. 53-71 se propose d’analyser la chronologie des crises, à la manière de Labrousse, et les courants commerciaux comme l’indiquait Hauser ; l’article de Pierre de Saint Jacob, « Histoire économique et sociale dans les archives de la juridiction consulaire de Dijon (1775- 1789 », dans Bulletin de la société d’histoire moderne, 1958, n° 4, p. 2-10, qui résulte d’une communication à l’automne précédent, donne lieu aux éloges d’Ernest Labrousse ; Serge Chassagne, « Faillis en Anjou au XVIIIe siècle. Contribution à l’histoire économique d’une province », dans Annales ESC, 1970, n° 2, p. 477-197 utilise, lui, 205 bilans « afin d’appréhender le commerce angevin d’un triple point de vue, territorial, temporel et différentiel […] [c]’est-à-dire [afin] d’envisager l’espace, la conjoncture, les structures d[e ce] commerce » (p. 478).

32 Frédéric Deshusses, « Mesurer l’insolvabilité ? Usages statistiques des dossiers de faillite (1673-1807) », dans Histoire & Mesure, 2008, vol. XXIII, n° 1, p. 19-41.

33 Jean Bouvier, « L’économie Ŕ Les crises économiques. Problématique des crises économiques du XIXe siècle et analyses historiques : le cas de la France », dans Jacques Le Goff et Pierre Nora (dir.), Faire de l’histoire, ouv. cité, p. 349. Souligné dans le texte.

34 Jean-Charles Asselain, « Le projet français d’histoire économique quantitative : ambitions et résultats », dans Économies et sociétés, 2007, n° 4, p. 567-609. Bien que l’auteur justifie ce que ses contradicteurs désignent comme des anachronismes, nous préférons utiliser ces termes, et la formulation par la négative, plutôt que de parler de secteur tertiaire.

35 Voir notamment la série de journées d’études sur les faillites ainsi que celle intitulée « Economic History and History of Economics » (2 avril 2009) organisées par EconomiX : http://economix.fr.

(17)

actuellement dénommé,

du Centre Pierre Léon36

, prennent acte des changements historiographiques. Plutôt qu’une histoire quantitative soucieuse de tester la correspondance entre faillites et conjoncture, ils tendent, en essayant de comprendre l’organisation d’un tissu commercial à l’échelle régionale, vers ce « troisième niveau », défini par Pierre Chaunu

37

, d’une histoire quantifiée Ŕ « rangée sous la bannière d’un Ernest Labrousse revu et corrigé

38

». Si Robert Estier souligne déjà que les faillites permettent moins d’appréhender la portée de la crise Ŕ économique ou commerciale Ŕ que l’ampleur de la crise de confiance qui se joue à Roanne, il revient surtout à Jean Bouvier, pour les crises

39

, et à Jean-Clément Martin, pour les faillites, de porter les espérances programmatiques de l’histoire sérielle. Jean- Clément Martin s’en fait même le porte-parole lorsqu’il conclut son article en mettant en garde contre le « découp[age du] savoir historique en histoire économique, sociale, des mentalités…

40

», invoquant, pour défendre sa vision des faillites comme « fait social global » Ŕ en référence à l’ouvrage sur le don de Marcel Mauss

41

Ŕ, Michel Foucault et Claude Lévi- Strauss. On comprend bien que l’historien se réfère au philosophe de la normativité et des marginaux ou à la figure de proue du structuralisme, l’auteur de

Surveiller et punir

applaudissant la sérialisation de l’histoire et celui de l’Anthropologie structurale ayant influencé la pensée braudelienne Ŕ tout comme celle d’Alphonse Dupront, qui joue un rôle important dans le développement de l’histoire des mentalités Ŕ, mais le structuralisme deshistoricisé tend alors à décliner au profit d’une anthropologie historique, qui a pu un

36 Pierre Cayez, « Les faillites lyonnaises au XIXe siècle » et Robert Estier, « Les faillites, instrument d’histoire économique : l’exemple de la région roannaise dans le deuxième quart du XIXe siècle (1827-1851), dans Bulletin du Centre d’Histoire Économique et Sociale de la région lyonnaise, 1973/4, p. 1-15 et 17-59, ainsi que les discussions à propos de ces articles, p. 61-62.

37 Pierre Chaunu, « L’économie Ŕ Dépassement… », art. cité ; « Dynamique conjoncturelle et histoire sérielle », dans Industrie, juin 1960, n° 6 ; « Histoire quantitative ou histoire sérielle », dans Cahiers Vilfredo Pareto, 1964, n° 3, p. 165-176 ; « Histoire sérielle, bilan et perspectives », dans Revue historique, avril-juin 1970, t. 243, p. 297-320.

38 Bernard Lepetit, « Séries longues, histoire longue », dans Genèses, 1992, n° 2, p. 102-106.

39 Jean Bouvier, « L’économie Ŕ Les crises économiques », art. cité, p. 356 note par exemple : « Mais à travers les mécanismes [structurels des crises] agissent les hommes, c’est-à-dire les entreprises et les groupes qui, à la fois, subissent les mécanismes Ŕ en registrant les illogismes du marché Ŕ et les utilisent dans leur sens, le sens de la défense de leur intérêts propres. » Aux travaux de cet historien, il faudrait bien évident ajouter ceux de Jacques Néré.

40 Jean-Clément Martin, « Le commerçant, la faillite… », art. cité, p. 1266.

41 Jean-Clément Martin préfère néanmoins adopter un euphémisme, l’adjectif « global », à celui utilisé par Mauss (« total ») ; cette transformation renvoie probablement aux objectifs de la première école des Annales tout autant qu’à la critique, très pressante à l’époque où il écrit, du stalinisme. Voir aussi infra note 2 de l’introduction de la deuxième partie.

(18)

moment apparaître comme une alternative à l’histoire quantitative

42

. En effet, et bien que les partisans de cette « nouvelle histoire » aient remporté divers succès du côté de l’histoire démographique, religieuse ou culturelle

43

Ŕ et notamment de l’histoire du livre, nous y reviendrons Ŕ, remontant ainsi « de la cave au grenier »

44

, c’est précisément au moment où Jean-Clément Martin trace un programme pour l’étude des faillites, en conformité avec les grands préceptes de l’histoire sérielle, que celle-ci, et plus généralement l’histoire quantitative et, avec elle, les

Annales, essuie les plus graves critiques Ŕ qui se multipliaient depuis le

milieu des années 1970

45

. Contre la décontextualisation et la dilution de l’histoire dans d’autres disciplines, l’individu, l’événement, l’indice et le récit se substituent désormais à la série et aux structures. Au changement d’échelle s’ajoute également un déplacement des thèmes de prédilection : émerge alors, la question, déjà évoquée, des acteurs sociaux et de leurs interactions, ainsi que celle de la construction des catégories et/ou classifications sociales Ŕ jusque-là admises comme telles par l’école labroussienne Ŕ, comme en témoignent notamment les travaux du statisticien Alain Desrosières

46

. Enfin, l’historiographie française s’ouvre, non seulement à d’autres sciences mais également à l’histoire venue d’ailleurs. Ces évolutions Ŕ le succès de la

microstoria par exemple, qui n’est pas à proprement parler anti-

quantitative, mais insiste plutôt sur l’importance de l’histoire-problème et de

42 Michel Foucault, Surveiller et punir. Naissance de la prison, Paris, Gallimard, 1975, 318 p. ; Claude Lévi- Strauss, Anthropologie structurale, Paris, Plon, 1958-1973, 2 vol. ; Arlette Farge, « Marginalités », dans Christian Delacroix, François Dosse, Patrick Garcia et Nicolas Offenstadt (dir.), Historiographies…, ouv. cité, t. I, p. 491-502 ; Christian Delacroix, François Dosse et Patrick Garcia, Les courants historiques en France.

XIXe-XXe siècle, Paris, Armand Colin, 2002 (1999), p. 223-230.

43 François Lebrun, Les hommes et la mort en Anjou aux XVIIe et XVIIIe siècles. Essai de démographie et de psychologie historiques, Paris/La Haye, Mouton, 1971, 562 p. ; Philippe Ariès, L’homme devant la mort, Paris, Éditions du Seuil, 1977, 641 p. ; Michel Vovelle, Piété baroque et déchristianisation. Attitudes provençales devant la mort au siècle des Lumières, Paris, Plon, 1973, 700 p. ; François Furet (dir.), Livre et société dans la France du XVIIIe sicèle, Paris/La Haye, Mouton, 1965-1970, 2 vol. ; Henri-Jean Martin, Livre, pouvoirs et société à Paris à Paris au XVIIe siècle (1598-1701), Genève, Droz, 1969, 2 vol. ; Daniel Roche, Le peuple de Paris. Essai sur la culture populaire au XVIIIe siècle, Paris, Fayard, 1998 (1981), 380 p.

44 Michel Vovelle, De la cave au grenier. Un itinéraire en Provence au XVIIIe siècle, de l’histoire sociale à l’histoire des mentalités, Québec, S. Fleury, 1980, 481 p.

45 Lawrence Stone, « Retour au récit ou réflexions sur une nouvelle vieille histoire », trad. par Louis Évrard, dans Le Débat, 1980 (1979), n° 4, p. 116-142 ; Carlo Ginzburg, « Signes, traces, pistes. Racines d’un paradigme de l’indice », trad. par Monique Aymard, dans Le Débat, 1980 (1979), n° 6, p. 3-45, repris sous le titre « Traces.

Racines d’un paradigme indiciaire », dans Mythes, emblèmes, traces. Morphologie et histoire, Paris, Verdier, 2010 (1989), p. 218-294 ; Paul Ricœur, Temps et récit, Paris, Éditions du Seuil, 1983-1985, 3 vol.

46 Christophe Charle, « Micro-histoire sociale et macro-histoire sociale. Quelques réflexions sur les effets des changements de méthode depuis quinze ans en histoire sociale », dans Christophe Charle (dir.), Histoire sociale, histoire globale ? Actes du colloque des 27-28 janvier 1989, Paris, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, 1993, p. 45-57 ; Alain Desrosières, « Comment faire des choses qui tiennent : histoire sociale et statistique », dans Histoire & Mesure, 1989, vol. 4, n° 3-4, p. 225-242 et « L’histoire de la statistique comme genre : style d’écriture et usages sociaux », dans Genèses, 2000/2, n° 39, p. 121-137.

(19)

l’expérimentation Ŕ montrent aussi que les outils quantitatifs ne sont pas totalement obsolètes ni en histoire économique ni en histoire culturelle, toutes deux sociales

47

.

Le « tournant critique »

48

des Annales, en prenant ses distances avec le quantitativisme et la longue durée, rejaillit évidemment sur l’histoire économique et modifie donc les manières d’appréhender les faillites, tant en général que dans l’histoire de l’édition, secteur commercial parmi d’autres. La Business History, ou l’histoire des entreprises, qui se développe en France dans les années 1960 Ŕ notamment du côté de l’histoire bancaire

49

Ŕ, sous l’influence des travaux d’Alfred Chandler, connaît un plus grand développement avec la remise en question de l’histoire macro-économique

50

. Dans l’histoire du livre, la monographie domine largement depuis ses origines mais plus encore depuis les années 1980. En effet, à côté des premiers essais bibliométriques apparus avec l’industrialisation de l’imprimé

51

, au XIX

e

siècle, l’histoire du livre est d’abord aux mains de bibliophiles et de professionnels qui Ŕ s’ils ne donnent pas à lire opuscules et pamphlets contre les empêchements juridiques ou les difficultés économiques, à l’exercice de leur métier

52

Ŕ rédigent fréquemment des mémoires honorant les grandes familles du livre, et plus souvent encore celle dont ils viennent

53

. Ce n’est qu’avec la publication, en 1958, de L’apparition du livre de Lucien Febvre et Henri-Jean Martin

54

que cette histoire prend un tour scientifique. De là, les approches statistiques et sérielles se développent, ici comme ailleurs, mais celles-ci concernent surtout l’époque moderne

55

. Malgré les perspectives lancées par les trois ouvrages donnant à l’histoire du livre toute son autonomie, dans les années 1980 Ŕ l’Histoire de l’édition dirigée par Roger Chartier et Henri-Jean Martin, L’Empire du livre de Frédéric Barbier et L’Argent et les lettres de Jean-

47 Claire Lemercier et Claire Zalc, Méthodes quantitatives pour l’historien, Paris, La Découverte, 120 p.

48 Annales ESC, novembre-décembre 1989, n° 6 : « Histoire et sciences sociales. Un tournant critique » dir. par Bernard Lepetit.

49 Jean Bouvier, Naissance d’une banque : le Crédit Lyonnais, Flammarion, 1968, 382 p.

50 Michel Margairaz, « Histoire économique », art. cité rappelle le relatif retard de cette discipline en France, comme en témoigne la date de création de la revue Entreprises et histoires, en 1992.

51 Philarète Chasles, « Statistique littéraire et intellectuelle de la France pendant l’année 1828 », dans Revue de Paris, 1829, t. VII, p. 191-243 ; Émile Morice, « De la littérature populaire en France », dans Revue de Paris, 1831, t. XXIV, p. 77-92 ; Charles Louandre, « Statistique littéraire de la production intellectuelle en France depuis quinze ans », dans Revue des deux mondes, t. XX, oct-déc 1847, p. 255-286 et 417-446.

52 À titre d’exemple : Victor Bouton, Très humble remontrance au ministre de l’intérieur et au préfet de police contre la loterie des artistes accaparée par les libraires dans la gêne par un libraire qui n’est pas gêné, Paris, Impr. Beaulé et Maignand, 1849, 8 p. ; Ambroise Firmin Didot, Réponses aux questions soumises par MM. les membres de la Chambre de Commerce de Paris à M. F. D. sur la situation de la librairie, de l’imprimerie, de la fonderie en caractères et de la papeterie, Paris, Impr. de Ambroise Firmin Didot, 1831, 30 p.

53 À titre d’exemple : Edmond Werdet, Études biographiques sur la famille des Didot, imprimeurs, libraires, 1713-1864, Paris, E. Dentu, 1864, 52 p. ; Jean-Baptiste Baillière, Famille Baillière, Paris, Imprimeries réunies, s.d. [1886], 23 p.

54 Lucien Febvre et Henri-Jean Martin, L’apparition du livre, Paris, Albin Michel, 1999 (1958), 588 p.

55 Voir supra note 43.

(20)

Yves Mollier

56

Ŕ, l’histoire de l’édition devient dès cette époque, et jusqu’à aujourd’hui, dominée par les études monographiques, comme en témoigne la bibliographie des thèses soutenues sur le sujet

57

. De même qu’en histoire économique, ces approches présentent autant d’atouts que de dangers

58

. Histoire pouvant se faire sur commande, polarisée sur les grandes entreprises Ŕ pour une question évidente de sources disponibles Ŕ, et par là-même susceptible de devenir le récit d’une

success story, le genre monographique relègue le plus souvent la

faillite Ŕ si jamais elle survient Ŕ à un accident de parcours, perçu à travers des grilles d’analyse littéraire Ŕ réduisant l’utilisation des chiffres à une fonction illustrative, renforçant ainsi les contempteurs de l’histoire sérielle. En effet, même la très riche thèse de Nicole Felkay, dont une des principales sources est justement le fonds de faillites parisiennes, laisse de côté, ou presque, les comptes des différentes maisons d’édition qu’elle étudie

59

. Or, d’une part, les « faillites médiocres »

60

forment, Robert Estier et Jean-Clément Martin l’ont déjà évoqué, la majorité des défaillances économiques, et ne pas les prendre en considération serait oublier les pesanteurs auxquelles les boutiquiers et entrepreneurs doivent faire face, tandis que

« l’étude comptable constitue […] l’un des outils indispensables de la monographie d’entreprises

61

» et, par conséquent, examiner cette comptabilité « en négatif », à partir de données « externes » aux entreprises, nous paraît essentiel pour « saisir une "maison" en pleine activité, Ŕ et pas seulement au début et à la fin [, voire au début de la fin] de son existence

62

». Si la biographie peut, par le biais de l’analyse recontextualisée des choix et stratégies commerciales des libraires-éditeurs, éclairer les tensions propres à certaines périodes Ŕ comme nous le verrons avec l’étude des cas de Joseph Décembre (confirmant la manière dont les républicains s’appuient, à la fin du Second Empire, sur les loges

56 Roger Chartier et Henri-Jean Martin (dir.), Histoire de l’édition française, Paris, Fayard/Éditions du Cercle de la Librairie, 1990-1991 (1ère éd. Promodis, 1982-1986), 4 vol. ; Frédéric Barbier, L’Empire du livre : le livre imprimé et la construction de l’Allemagne contemporaine (1815-1914), Paris, Éditions du Cerf, 1995, 612 p.

(qui reprend certains éléments de Livre, économie et sociétés industrielles en Allemagne et en France au XIXe siècle (1840-1914), thèse de Lettres et Sciences humaines, dir. F. Caron, Université Paris IV, 1986, 1343 p. ; Jean-Yves Mollier, L’Argent et les Lettres. Histoire du capitalisme d’édition : 1880-1920, Paris, Fayard, 1988, 549 p.

57 Jean-Yves Mollier et Patricia Sorel, « L’histoire de l’édition, du livre et de la lecture en France aux XIXe et XXe siècles », dans Actes de la recherche en sciences sociales, 1999, n° 126-127, p. 39-59. (Article complété et régulièrement actualisé sur le site de l’Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines : http://www.chcsc.uvsq.fr/semin/sem3.html).

58 Jean-Yves Mollier, « L’histoire de l’édition, une édition à vocation globalisante », dans Revue d’histoire moderne et contemporaine, avril-juin 1996, t. 43, n° 2, p. 329-348 ; Dominique Barjot, « Introduction », dans Revue économique, 2007/1, vol. 58, p. 5-30.

59 Nicole Felkay, Balzac et ses éditeurs : 1822-1837. Essai sur la librairie romantique, Paris, Promodis/Éditions du Cercle de la Librairie, 1987, 381 p.

60 Robert Estier, « Les faillites, instrument… », art. cité ; nous empruntons l’expression à Jean-Clément Martin,

« Le commerçant, la faillite… », art. cité, p 1251.

61 Dominique Barjot, « Introduction », art. cité, p. 11.

62 Robert Estier, « Les faillites, instrument… », art. cité, p. 17.

(21)

maçonniques pour la diffusion de leurs idées

63

, à moins que ce ne soit pour leur ascension personnelle) ou de Dupray de la Mahérie (soulignant la multiplicité des spéculations peu honnêtes menées, grâce à la presse, dans les milieux catholiques autour des années 1880

64

) Ŕ ou à certaines relations entre les producteurs de livres (ouvriers, auteurs, éditeurs, lecteurs), donnant ainsi tout son sens à la « vocation globalisante »

65

de l’histoire de l’édition, elle en appelle, par définition à l’étude du collectif

66

, non seulement pour estimer la « normalité de cet exceptionnel »

67

mais aussi pour mieux apprécier l’individu, par les milieux dans lesquels celui-ci s’insère.

De fait, les événements de 1968 et la crise des années 1970 bouleversent l’ensemble des sciences humaines et les questionnements des historiens passent, dans la décennie suivante surtout, de l’individu au groupe, « des personnes aux institutions »

68

. Cela favorise, en histoire du livre, l’étude des auteurs Ŕ à la suite de Roland Barthes, Michel Foucault et Pierre Bourdieu Ŕ par Paul Bénichou ou Alain Viala

69

, des lecteurs et de leurs mentalités autour de Robert Mandrou et Roger Chartier Ŕ poursuivant autrement les travaux de sociologie de la lecture de Robert Escarpit puis Anne-Marie Thiesse

70

Ŕ, des ouvriers de l’imprimerie Ŕ Frédéric Barbier et Madeleine Rebérioux renouvelant profondément l’approche du

63 Éric Anceau, « Nouvelles voies de l’historiographie politique du Second Empire », dans Parlement[s], Revue d’histoire politique, 2008/3, n° HS 4, p. 25 se réfère notamment à Sudhir Hazareesingh et Vincent Wright, Les Francs-maçons sous le Second Empire. Les loges provinciales du Grand-Orient de France à la veille de la Troisième République, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2001, 255 p.

64 Sur Décembre et Dupray de la Mahérie, voir infra, chap. IV, § II.B.3.

65 Jean-Yves Mollier, « L’histoire de l’édition… », art. cité.

66 Björn-Olav Dozo, « Données biographiques et données relationnelles. Notes théoriques pour une utilisation complémentaire des outils quantitatifs », dans ConTextes, juin 2008, n° 3, En ligne : http://contextes.revues.org/index1933.html, consulté le 26 décembre 2008, introduit très justement son article en ces termes : « La définition du biographique comme une "catégorie critique qui formalise des éléments référentiels pour les livrer sous une forme intelligible au service des différents usages propres à l’histoire et la théorie littéraires […]" nous incite à analyser son usage pour étudier les collectifs, les groupes, ou encore pour reconstituer l’état d’un champ artistique à une époque donnée. »

67 Nous adaptons ici l’oxymoron (« l’exceptionnel normal »), qui fit florès, formulé par Edoardo Grendi,

« Micro-analisi e storia sociale », dans Quaderni storici, 1977, vol. 35, n° 2, p. 506-520.

68 Nous empruntons la formule à Laurence Fontaine, Gilles Postel-Vinay, Jean-Laurent Rosenthal et Paul Servais (dir.), Des personnes aux institutions. Réseaux et culture du crédit du XVIe au XXe siècle en Europe. Actes du colloque international « Centenaire des FUCAM » (Mons, 14-16 novembre 1996), Louvains-la-Neuve, Bruylant- Academia s.a., 1997, 440 p.

69 Roland Barthes, Le degré zéro de l’écriture, Paris, Éditions du Seuil, 1972 (1953), 179 p. ; Michel Foucault,

« Qu’est-ce qu’un auteur », dans Dits et écrits : 1954-1988, Paris, Gallimard, 1994, t. I, p. 789-821 ; Pierre Bourdieu, Les règles de l’art. Genèse et structure du champ littéraire, Paris, Éditions du Seuil, 1998 (1992), 567 p. ; Paul Bénichou, Le Sacre de l’écrivain. 1750-1830. Essai sur l’avènement d’un pouvoir spirituel laïque dans la France moderne, dans Romantismes français. Tome I, Paris, Gallimard, 2004 (1973), 2077 p. ; Alain Viala, Naissance de l’écrivain. Sociologie de la littérature à l’âge classique, Paris, Éditions de Minuit, 1992 (1985), 317 p.

70 Robert Mandrou, De la culture populaire aux XVIIe et XVIIIe siècles. La Bibliothèque bleue de Troyes, Paris, Stock, 1964, 223 p. ; Roger Chartier, Lectures et lecteurs dans la France d’Ancien régime, Paris, Éditions du Seuil, 1987, 369 p. ; Robert Escarpit (dir.), Le littéraire et le social, éléments pour une sociologie de la littérature, Paris, Flammarion, 1970, 319 p. ; Anne-Marie Thiesse, Le roman du quotidien. Lecteurs et lectures populaires à la Belle-Époque, Paris, Éditions du Seuil, 2000 (1984), 283 p.

Références

Documents relatifs

-Les langages disciplinaires, les savoirs et les pratiques : psychothérapie comme acte clinique et culturel ; culture, symptôme et représentations ;

This dossier of the Revue d’histoire culturelle (XVIIIe-XXIe siècles) aims to present in the most explicit and concrete way possible the bridges between human and social

Laurent Beauguitte (CNRS – UMR IDEES), Pierre Gervais (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, EA 4399 CREW/CRAN), Claire Lemercier (CNRS, CSO-Sciences Po Paris),

Pour les curieux et les amateurs, comme pour les initiés et les professionnels des métiers du livre qui souhaitent mieux connaître l’histoire du patrimoine écrit, les conservateurs

On étudiera les moments clés, grandes figures et lieux de mémoire qui ont marqué l’historiographie de la danse ; la construction de la danse comme pratique sociale

2 Mais Paul Claval nous offre ici un historique épistémologique de la discipline, plus complet (pas seulement plus récent), plus ambitieux et, sans doute, aussi et surtout,

27 L'objet fondamental d'une histoire qui vise à reconnaître la manière dont les acteurs sociaux donnent sens à leurs pratiques et à leurs énoncés se situe donc dans la tension

À titre d’illustration, retenons cinq méthodologies qualitatives différentes (dont trois mises en pratique par un même auteur dans trois travaux [Bethencourt, 2009]) et des