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L’évaluation sans standards : le paradoxe italien

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Revue internationale d’éducation de Sèvres

Colloque 2019 : Conditions de réussite des réformes en éducation

L’évaluation sans standards : le paradoxe italien

Evaluation without standards: the Italian paradox

Antonino Petrolino

Édition électronique

URL : http://journals.openedition.org/ries/7694 ISSN : 2261-4265

Éditeur

Centre international d'études pédagogiques

Référence électronique

Antonino Petrolino, « L’évaluation sans standards : le paradoxe italien », Revue internationale d’éducation de Sèvres [En ligne], Colloque 2019 : Conditions de réussite des réformes en éducation, mis en ligne le 11 juin 2019, consulté le 12 juin 2019. URL : http://journals.openedition.org/ries/7694

Ce document a été généré automatiquement le 12 juin 2019.

© Tous droits réservés

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L’évaluation sans standards : le paradoxe italien

Evaluation without standards: the Italian paradox

Antonino Petrolino

1 Au cours du vingtième siècle, le système scolaire italien n’a pratiquement pas connu de réforme. Au début, parce qu’il était très bon ; ensuite, parce qu’il avait été si bon qu’il était dommage de le changer ; enfin, parce qu’on ne savait plus où intervenir, les instruments d’évaluation et de contrôle ayant, au fil du temps, tous été abandonnés. Il n’y avait pratiquement plus d’inspecteurs, pas de système d’évaluation ni de tests nationaux.

2 Entre-temps, la perception de la situation s’était dégradée : un nombre croissant d’élèves, surtout ceux venant de familles de scolarisation récente, décrochaient sans terminer leur scolarité. On sentait que ça allait mal, mais on était incapable de dire où et pourquoi.

3 Le problème a commencé à être posé de façon différente il y a une vingtaine d’années, à peu près au moment où étaient lancés les programmes internationaux de comparaison des apprentissages des élèves tels que PISA, entre autres. Ces enquêtes ont, dès le début, montré que l’école italienne n’était pas bien placée. D’une part, parce qu’elle avait vieilli ; de l’autre, parce que ces enquêtes étaient structurées pour mesurer des compétences, alors que le système italien était – et il le reste encore en partie – conçu pour transférer des connaissances.

4 L’une des conséquences de cette prise de conscience a été l’amorce d’un processus de réforme : d’une part, dans le but de faire une plus large place au développement de compétences dans les écoles ; de l’autre, dans celui de commencer à structurer un système national d’évaluation des apprentissages.

5 Se soucier davantage du développement des compétences n’a pas seulement été une stratégie pour améliorer les scores italiens dans PISA ; il s’agissait aussi de favoriser le succès des élèves socialement moins favorisés, qui avaient souvent du mal à s’accommoder de la pensée théorique et de l’abstraction conceptuelle, fondements traditionnels de la culture académique en Italie. Avoir davantage recours à l’expérience pratique, à la didactique en laboratoire, à l’alternance entre école et stages de travail :

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voilà autant de mesures qui ont été mises en place pour pallier en partie l’abandon et l’échec scolaire. Les résultats sont, pour le moment, mitigés : des améliorations plus sensibles se seraient produites au niveau des élèves à risque modéré, mais pas encore pour ceux qui étaient et restent en grande difficulté. On enregistre encore près de 20 % d’élèves qui ne terminent pas leurs études secondaires.

6 En revanche, les efforts produits afin de mettre en place un système national d’évaluation ont donné des résultats plus convaincants. Aujourd’hui, une agence nationale italienne, appelée Invalsi, mesure les apprentissages de tous les élèves à cinq niveaux différents tout au long de leurs études : aux deuxième et cinquième grades (primaire), huitième grade (fin de secondaire inférieur), dixième et treizième grade (lycées général, technique et professionnel). Ces tests sont obligatoires et font l’objet d’une restitution très détaillée, qui s’arrête au niveau de la classe mais qui pourrait descendre, si on le voulait, au niveau de l’individu. Si on ne le fait pas, c’est pour ne pas interférer avec l’évaluation des enseignants, puisque ces mesures ont un but diagnostique et d’aide à la programmation didactique, mais n’ont pas de retombées administratives sur le parcours des élèves, qui reste du domaine de l’établissement. Les épreuves ont pour objet les compétences en lecture et compréhension fonctionnelle de différents textes en langue maternelle, l’usage de notions mathématiques pour résoudre des problèmes de la vie courante, la maîtrise orale de l’anglais (sauf au deuxième grade). Au collège et dans les lycées, les épreuves sont effectuées sur ordinateur, ce qui élimine tout risque de fraude et donne des résultats rapides et fiables. Dans le domaine particulier de l’usage de l’ordinateur pour mesurer les apprentissage, l’Italie est le seul pays au monde, avec le Danemark, à en avoir généralisé l’utilisation.

7 Un point critique du système est l’absence de standards préétablis : il n’existe pas de mesure officielle du minimum de performances attendues. Au niveau des classes, c’est aux enseignants d’en décider, en conscience et en connaissance de cause, pour ainsi dire ; mais là aussi, l’affaire se règle par la décision de considérer comme « suffisant » ou

« insuffisant » le niveau de chaque élève, sans définition de la suffisance valable pour tous.

8 Au niveau du système, on a recours à des standards statistiques, c’est-à-dire que l’on fait passer le test à tous les élèves concernés et qu’on les révise tous. La médiane de tous les résultats effectivement obtenus et considérés comme valables (c’est-à-dire complets) détermine le niveau de suffisance : tous les autres résultats sont notés à partir de ce point. Toute une série d’interpolations et de facteurs de correction sont bien sûr appliqués pour affiner le résultat. On arrive même à obtenir des mesures de valeur ajoutée, par comparaison horizontale ou synchronique (avec les écoles de même type qui sont situées dans des milieux comparables) et verticale ou diachronique (avec la même école au fil des mesures successives dans le temps).

9 Les tests nationaux ne donnent pas lieu à l’établissement de league tables, comme en Angleterre, et mesurent des compétences fonctionnelles plutôt que des connaissances.

Les sujets de référence (italien, anglais, mathématiques) sont choisis pour leur valeur prédictive en vue du succès scolaire d’ensemble. Cependant, ces tests ne sont pas aimés, en général, par les enseignants, d’une part parce que ceux-ci craignent qu’ils puissent être utilisés, d’une façon déguisée, pour leur propre évaluation professionnelle (ce qui est formellement exclu par la norme) ; de l’autre, parce que leur logique et leurs résultats diffèrent profondément de la pratique courante de l’évaluation scolaire. C’est que les enseignants continuent de se concentrer surtout sur les disciplines et les contenus : en

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outre, ils mêlent souvent évaluation formative et sommative. Autrement dit, ils tiennent compte non seulement du niveau atteint à un moment donné, mais aussi des progrès accomplis dans le temps, du contexte familier, de la personnalité de l’élève et ainsi de suite.

RÉSUMÉS

Jusqu’à la fin des années cinquante, il était courant en Italie que l’on arrête ses études en fin d’école primaire. Le collège et les lycées étaient fréquentés par une minorité d’élèves et étaient assez exigeants. Le passage vers « l’école de tous » a été rapide mais difficile, et s’est accompagné d’un taux important de redoublements et d’abandons. Pour y remédier, durant les trente dernières années, on a beaucoup travaillé à un système national d’évaluation ; d’autre part, l’on a accordé une attention accentuée aux compétences plutôt qu’aux seules connaissances. Ceci, du moins dans les intentions, puisque la pratique, souvent, n’a pas suivi.

Until the end of the fifties, it was common in Italy to finish one’s education at the end of primary school. Secondary schools were attended by a minority of pupils and were quite demanding. The shift towards "schooling for all" was quick but difficult, and led to high numbers repeating a year and dropping out. To address this, over the past thirty years, much work has put towards a national evaluation system. In addition, the emphasis has been increasingly placed on skills rather than on knowledge alone. Such at any rate are the intentions, since practice, often, has not followed.

INDEX

Index géographique : Italie

Palabras claves : evaluación del estudiante, reforma, calidad de la enseñanza Keywords : student evaluation, reform, teaching quality

Mots-clés : évaluation des étudiants, réforme, qualité de l’enseignement

AUTEUR

ANTONINO PETROLINO

Ancien chef d’établissement, Italie

Antonino Petrolino est né à Messine en 1944. Licencié ès lettres cum laude de l’Université La Sapienza de Rome, il a obtenu en 1969 l’agrégation de littérature italienne et d’histoire et a enseigné en lycée jusqu’en 1981. Il a ensuite été proviseur de lycée jusqu’en 2008. Il est l’auteur de plusieurs textes portant sur le fonctionnement et l’organisation des écoles ainsi que sur la fonction de chef d’établissement. Il a été secrétaire général puis président de l’Association européenne des chefs d’établissement (ESHA). Il a collaboré à plusieurs reprises avec le ministère italien de l’instruction publique.

antonino.petrolino@gmail.com

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