NATIONS UNIES INSTITUT AFRICAIN DE DEVELOPPEMENT ECONŒUQUE
ET DE PLANIFICATION DAKAR
DOCUMENT DE TRAVAIL
QUELQUES REMARQUES SUR LES CONSEQUENCES DE
L'APPLICATIOn DES METHODES DE GESTION DE PROJETS AGRICOLES par
M. FRANCO
JUIN 1974
• .•• ' ( 1
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'DOClTiviENT DE TRAVAIL
QUELQUES REr1A...'tQUES SUR cLES CONSEQUENCES DE
L' APP-LICArJiON.i
~ES
ME:THODES ·DEr G.ŒSTION-DE PROJETS AGRICOLES-
-· ··
. .
1. Comme indiqué dans la section précédente, les techniques AP _ne- sont capables que d'identifier comme rentables que les exploitations de t;ype capitaliste. Dans -les projets de type "développement d' exploi- tations paysan~es", ·la problématique est toute:'l.:B.ï:f'férente. Dans les projets d'exploitation capitaliste, la technologie est connue, le pro-
jet est localisé à un AndT'oi t bi eu délimité, le type de cul ture est une donnée, l'investissement à faire peut êtr~ clairement défini (aménagements, matériel etc.). Vue la structure d~ l'entreprise un compte d'exploitation peut être établi sans ambiguité et la rentabi- lité q~ les effets peuvent être facilement calculés. Ainsi une campa- raison entre différents projets de ce type est possible.
~ '!': t ~
2. ·Pour IE:Ù3 'B:lojets de développement des exploita tians paysannes la rektabÜit[~u
'les
effets sont difficiles. à c'alcuie~. ·Dans ce cas, le grand p'rob\ème~st'
la~c>nc-eption
du projet :. q_uoi faire etcomm~nt.
Lé~- Ï•J/éiij,U.~·t te~I{rioloêiquei'
est~l~tôt
uninc~nnu q_~' u~e
donnée, des . ·>-.:. -~: ... .,.,.... . ~-,., .--~-- . ,. . ~: . . _<_!. ' .. J: ·-. -. :_:.-· ... ~ .... c-· •:exploitatiorfs-indépend'ant'es sont éparpillées dans une-région. t''i~-
vesti:~:~Eimcnt 1
e'st- fonëtf~ri
a:u paquettechno1o~iq_ue acfopt~
et doit set • .'. . . 1 ·::: _; :,; -~- . . .
faire à plusieurs niveaux : les paysans, la structure d'animation- vulgarisation, la structure de commercialisation-financement,éventuel-
, . _;-.. ··~- -~~ ... : i: ( ; ,.: . . ~ .~ : .. _r:;_:·· . : :· j: .· . . .
lement les ëo-operat·i ves. Il n'y a pas un responsable unique : bea':;lcou~
d' instan~es a~'t'bnoînes o~ s'emi-a~tonomes doivent collaborer pour la
· . ~ :. · : · . ·· i r :·· · ·. : ~ . · · ·
bonne fin de l'operàtion. Il y a un problème de distribution des béùé- fices
e,t ,
e;_.:Pi:usia
distribution influencera la rontabili té totale : la répartition des bénéfices dépend des:o~v e ments
des prix relatifs. . -
d'achat ~t dé vente.
Un
problème suppfémentâ.ire. se pose pour le ,calculi;.-:--
. .
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de l a rentabilité ~u des effets : le coût d'opp0rtunité est diffé- rent suivant le niveau auquel on se situe (par exemple pour l'esti- mation de la valeur de 1:1 produoti.on autcoonsommée). Avant
..
t•ut, le succès de l'opération (donc la reniabil.i t é). dépend de la roactie.n:.
des paysans. Tout ca.t.oul. <ie· 1\.P:.(r.e.ntahilité ... effets) est dône sans signi ficatioriL: .le.l3 r.ésultat.s ... o'bte.nu.s. n'ont .. rien à.
vo-ir:~nt -aVkl> -1:-ëSc-~:.::
problèmes réels, ni avec leur solution.
Si par exemple une analyse est faite pour la mise en valeur d'une région don'nëe Eft en veut· comparer· un projet d'exp lei tati
on
capi-, . • :. • f 1 •
tali:s--te-':avec un projet de développement des exploitations paysannes' le' :riesul'tat fait p~u de doute.
Mais du point de vue du secte;ux moderne, i l y a quand r11êmo dans ces · exploitations paysannes un grand potentiel de ponc;tion de surplus,. pa.r 1 e-u.::r intégrat;Lon dans l es · circl..l.i ts commerciaux. La mise. ;.
en valeur capitaliste exige seuvent t:qop .d'' _investissements J?OUr être im[J)._édiatement géné::ra;Lisé<). D'_autres l)l .. yen_l?: 'd' intégratiop dfivent exis-
t~:r •. ~· expérienç:e, d_émo11tre .que cett(3 intég::ration es,~ pessibLe à bas prix et à haut ~e_ndement _à condition que l ep::rojet soit bien, conçu et bien géré. Si l es méthodes A.P ne sont pas capables de planifier cette _conception-_ et cette gestion;, i l faut utiliser d 1al.).tres techniqu~s
qui ~pny 1Pl us tournées vers ces aspects. Dans cette ea;tégorie on_: peut, classe:r ,les techniques p::récorüsées dans, le manuel. do KULP~: La SATEC; -_[ utilise_ 11?- même-approche. J:.
Le pointr9-o départ·· dans cette méthode est qu'on fait (o_u fera) ... le projet. Le problème n'est plus de savoir si le. projet de dé- ve.loppement de la paysannerie. val..l.t .-la peine d'être réalisé _(-proplèmq d'AP). La décision est prise et la question est do savo~r, a.mment concevoir le projet. Les 'ffiéth,•des de gestion proposées peuvent diffé- ' rer sux le point des tecb,niques concrètes .à utiliSer pout ~:résoudre
ce· problètne : est-co que· la standardisatio:n dU paquet te.chn:ologiql.).O
à appl:iquer sera totale ou pas ; utilisora-t~on des techniques :de programmation linéaire .Jl.). d'autres techni_quos de prog:Camm-ation sophis- tiquees, eu plutôt des techniques plus pragmatiques etc. Dans tous
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:page 3ces aspects, l'accent se trouve beaucoup plus sur las questions pra- tiques de gestion que sur les qu0sti ·:)ns de :planification (simulation de différentes solutions :pour aboutir à des choix fondamentaux).
4.
Le résultat do ces méthodes sera do pousser efficacement des-._!.
:projets ,d"intégration de la paysannerie dans l 0s circuits commerciaux:
abandon des cultures vivrières, introduction de cultures commerciales avéc des :paquets technologiques aussi standardisés. que :possible afin de mihimisëi' 'le coût etc.
Dans une :première, :période la situation financière des paysans s 1 améliorera :probabl8ment. On suggère même d·a donner des subvent'ï6ns au début pour faire accepter :plus facilement la modernisation, sans se soucier du fait que après suppression du subside le revenu paysan
t~mbe p~ut..,-:-être
à moitié. Avec la suppression des subsides ViQnt. ·- .. ~ . .. .,•· " . .
le mécapisme ).névi k~ble d'augmentation de la ponction par le J'eu des
~- .... .' ·. ,' .:. :·;;·
prix x.:-~ .. elati.fs. Les .. ~, ·_1_ : :.: r_, gains . de :productivité ne profiteront pas aux :pay- s~ns mai.s passeron,t dans; le secteur mvderne qui essaie de troÙvér ses
' '· .· . . ·. :! ,· ! :'_ . ; f_ _..... J
ressources financières au moindre coût. La situation des pays<!ns·stagne-
•.• -. • : ;_ .! :.. . ·'.. •:. : ~ _'. : :'
ra et se détériorera dans la m1 esure où le revenu reste stabie.mais
~ ... : ·.
que le coût de la vie augmente. Cette détérittration de la situation
économ~_ql:le ~st inévi ~ab~e dans une économie ou le secteur de la :pro- duct.ion a.griçole est consh tué par d~ peti
tés
exploitations pa.ysélnnes. .. ··- ' .. . ·:J.:.' ' .
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9-lfli l:?Ont dorrlinées par le secteur moderne.
-~ . " . . ·' ~ . . . - . : '-~: .r :_l :-.. .-, ) .
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5. · '·· ;
c'eîte.'"opéra.tion d'int'égÎ''a'tion · da.rrs 'le$ circuits comme+·cütux:n· ; :~St~ 'iiîde
p·aé{ se'ulemGnt-'-'un·ë:)aét.érioratl.on: do.' la situation écono-mique des
p';iyè· ans : ,
miü-s un:e: désïntégration du milieu social.Cette désintégration est causée par l '·introduct{on de nouvelles techniques de :prôduction,nouvelles cultures, un contact plus inti- me avec l' éconoini
e
marchande etc • .. Rien n'est prévu pour stimulerf '
pagè 4
une restructuration sur de bases saines le projot ne considère
·. . que l os. g,spects . économiques en négligeant tous los aspocts non-
~, i
économi.quos. Si certains él éments non~économiques sont inclus dans le projet ils seront. dans boacoup de cas plutôt dysfonctï.4nnels, parce que eux aussi ne sont conçus qu'Jn fonction do l'augmenta-
, ' ::;.
tian de la production. Cette désintégration entraîne de graves pro- blèmes sÜrtout paré10' que à ccurt terme, ,at dans los candi tiens
d'
agiz.essién d'un niode de production .ct ,de vic sur une autre,. uno z'ost'A1ctui"ation spontanée est très difficile à réaliser_ (sinon oxclU:e). ,· 1 _' ' ' • ••Cette destructuration socialG a bien sûr des r éper- cussions sur l a psyeh•logie des individus qui ne se retr('uvent plus dans la nouvel le situation où aussi bi:13n l a structure que
les valou:rs sociales ont· 'été bouleversées. La. récupéra, ti on qui a été ·•pérée par la réli'gfém et qui a pu intégrer l es nouveaux élé- ments dans 1' anci"'eri--c.idre de r éfér ence no _.peut; être. _q:u' une solu- tion temp''orair·e ( voj}r -q'tiàtrième session). J -.;· .-.. '.
' ·' .- ..
6.
On peut·dire en conclusion qu'après une pr13mi~repériode euphorique ce genre d'intégration de l a paysannerie dans
. . i ..• ·.. '
les circuits commerci~ . .. aux doit abo~tir à un désenChantement brutal.
· U
op.ération se solde par un appauvris-sement' des paysans. du p;oint. - ' .i -j_ . . . . . • •·
de vue. sopial .et du point de vü~ éêono~ique~. La raison· en· ost que
... • ~ .• ~· 1 ' ~- . , •. ' ... " l .
1' intéé?:'ati9_n d.cms les eircui ts co~merëiaui··a" été Conçue .au profit
" ... ; . \.'_[ ; ' ' ·. ' ' . .
, , .. d;\l-. s~_S2,t)Etl;ur· capi t._~li,ste dominant et dans l'e 'fonctionnement · du pro- jet, la ponction du surplus devi~nt de plus en plu~ forte. Les techniques utilisées sont conçues pour planifier cette intégration, leur utilisation aboutira dans la plupart des cas à ce genro de projets. Les techniques reflètent cette caractéristique de la so- ciété capitaliste de mettre 1' économique avant toutes choses et d'être prêt, pour obtenir les augmentations du profit de détruire tous l es obstacles non-économiques qui se trouvent sur le chemin.
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La technique alternative à rechercher doit être d'abord inspirée de certains principes qui reflètent un développement plus harmonieux du monde rural. Premièrement on doit se prononcer sur les caractéristiques de ce développement harmonieux. La technique qui peut aider d'analyser et de planifier des cas concrets sera conçue à partir de ces principes. Nous proposons pour la discus- sion :
a - Le développement doit être en fonction de la popu- lation concernée en premier lieu
b -Le développement doit être total : ne pas privilé- gier l'économique sur d'autres aspects de la vie sociale
c - Le développement doit permettre aux collectivités de base de renforcer leur position vis-à-vis du secteur capitaliste.