INFLUENCE DE L’APPORT ÉNERGÉTIQUE
SUR L’UTILISATION DIGESTIVE ET MÉTABOLIQUE DES NUTRIMENTS,
ET LES PERFORMANCES DE REPRODUCTION,
CHEZ LA TRUIE GESTANTE NULLIPARE
M. ÉTIENNE Y. HENRY
J. LEBOST, F. COINTEPAS, Christiane VACHOT, Chantal POTIER Michèle SEGUIN
Station de Recherches sur
l’Élevage
des Porcs,Centre national de Recherches zootechniques, I. N. R. A.,
%8350 Jouy en Josas
RÉSUMÉ
Une expérience a été réalisée sur des truies gestantes nullipares, de race Large White, saillies
à un poids voisin de 120 kg, dans le but d’étudier l’influence du niveau de l’apport quotidien d’énergie sur les coefficients d’utilisation digestive des principes énergétiques et azotés, la réten- tion azotée et la synthèse des lipides chez la Truie, ainsi que sur la composition chimique des por- celets à la naissance. A cet effet, 3 lots de 3animaux sont mis en comparaison, qui reçoivent res- pectivement une ration témoin, à base de maïs et de tourteau de soja (lot 1), la même additionnée de rafles (lot 2) ou d’amidon de maïs (lot 3).
L’élévation du taux de cellulose dans le régime des truies du lot 2provoque un abaissement de tous les coefficients de digestibilité mesurés. Les teneurs en énergie digestible des rafles et de l’amidon de maïs, rapportées à la matière sèche, sont respectivement de 1900et 420o kcal/kg.
La quantité d’azote retenu chaque jour par les truies ne varie pas avec l’avancement de la ges- tation, mais augmente avec le niveau d’énergie digestible. Cette amélioration est importante sur-
tout pour les animaux du 2elot par rapport à ceux du lot témoin. La taille et le poids des portées,
de même que la composition chimique des porcelets à la naissance, ne sont pas affectés par l’ali- mentation maternelle. Seul, le gain net de gestation des truies est significativement augmenté
par l’élévation du niveau énergétique des rations.
Sur le plan pratique, ce travail montre qu’un rationnement exagéré en énergie digestible
nuit aux possibilités de rétention azotée des truies gestantes nullipares, et que les recommanda- tions actuelles (N. R. C., 1968) sont marginales pour des animaux n’ayant pas encore terminé leur croissance.
INTRODUCTION
La mise en évidence du
phénomène
d’anabolismegravidique
chez laTruie,
notamment par SAr.MON-I,!GaGN!uR et
JACQUOT (ig6i),
I,oDG! et aL.(ig6i),
apermis
depréciser
les résultats antérieurs d’UvANs( 1929 )
et MiTCHEU< et al.(rg 3 i),
selon
lesquels
unegrande partie
des nutrimentsingérés
par l’animalgestant
est uti- lisée à sonprofit
pour lasynthèse
de tissus maternels extra-utérins. Cettesynthèse, qui
est effectuée avec un rendementsupérieur
à celui de témoins nongestants,
sup- pose une diminution du besoinénergétique d’entretien,
ainsiqu’une
meilleure uti- lisation del’azote,
liées à l’état degestation.
Par
ailleurs,
la combinaison des mesures de bilans et desanalyses corporelles (I,!wKEr’r et al.,
1955 ; MOUSTGAARD,19 6 2 ) indique
que les besoins propres au déve-loppement
desembryons
et de leurs annexes sont faibles. Ceciexplique
que la dis- tribution de rationsmodiques
aux truiesgestantes
affecte peu lesproduits
de laconception,
ainsi que le démontrent de nombreux travaux(L ODGE et al., rg66 ;
Er.s!,!y et
aL., 19 6 9 ;
BAK!R etaL., rg6g).
Seul legain corporel
de la mère est réduit.Ainsi s’est trouvée démontrée la
priorité
de la fonction dereproduction
sur cellede la croissance propre de la mère. Ces résultats ont conduit à proposer une dimi- nution
importante
des normes alimentaires pour les truiesgestantes.
Parexemple,
dans le cadre du National Research
Council,
elles sontpassées
de 9 800kcald’énergie digestible/j
en19 6 4
à 6 60o en19 68
pour des truies adultes.Cependant,
il existeencore actuellement des
divergences
dans les recommandations suivant les différents pays. Elless’expliquent
enpartie
par la variabilité élevée des critèreszootechniques qui
ont servi à établir ces normes d’alimentation.Alors que le besoin azoté de
gestation
a faitl’objet
de nombreuses estimations par la méthode des bilans(MW!,ER
etaL., rg6g ;
PIKE, ig7o ;R IPP E L , ig65 ;
SALMON-I,EGnGN!uR, zg65),
peu de travaux du mêmetype
ont été effectués en cequi
concernel’énergie.
Ilsemble, d’après
les résultats de Sn!,MON-I,!GnGN!uR(zg6 3 ),
que le niveauénergétique
de la ration constituedavantage
un facteur limitant de l’anabolismeprotidique
que le niveau azotélui-même,
tout au moins parrapport
aux recomman- dations envigueur.
D’autrepart,
l’influence de la nature des nutrimentsénergétiques
a été peu étudiée. La
comparaison
del’apport
d’unepartie
del’énergie
sous formed’amidon de céréales ou de
lipides (S!r.MON-I,!GaG!r!ux, 19 6 9 ) indique
toutefoisque la rétention azotée serait
plus
favorisée par l’élévation desapports quotidiens d’énergie digestible
que par laprésence
degraisses per
se dans lerégime.
L’expérience
que nousrapportons
ici a eu pour butd’étudier,
chez la Truie nulli- paregestante,
l’influence du niveau del’apport d’énergie digestible
et du volume dela ration sur la
gestation.
Pour cefaire,
une ration de base considérée comme témoina été
supplémentée,
soit par desglucides
hautementdigestibles (amidon
demaïs),
soit par un aliment
cellulosique (rafles
demaïs).
Lacomparaison
de cesrégimes
aporté
sur l’utilisationdigestive
desprincipes alimentaires,
la rétentionazotée,
les variationsquantitatives
etqualitatives
desdépôts
gras chez la Truie au cours de diffé- rentesphases
de lagestation.
Parailleurs,
l’influence éventuelle du rationnementdes mères
gestantes
sur les foetus a été recherchée par l’étude de lacomposition
chi-mique
desporcelets
à la naissance.Enfin,
lesperformances zootechniques
ont, dansune moindre mesure,
complété
ces résultats.MATÉRIEL
ETMÉTHODES
Neuf truies nullipares, de race Large lt’hite, sont saillies au premier oestrus après qu’elles
aient atteint le poids de 120 kg. Trois lots de 3 animaux chacun sont alors constitués, différant par le niveau et la nature des nutriments énergétiques, mais recevant un apport quotidien égalisé
de protéines. Les truies du lot témoin (lot i) ne consomment que 1,8 kg d’une ration de base
composée de maïs et de tourteau de soja, tandis que celles des autres lots disposent en plus de
0 ,
3 kg de rafles de maïs à 89,7 p. ioo de matière sèche (lot 2) ou de 0,9 kg d’amidon de maïs à 88,i p. 100 de matière sèche (lot 3). Compte tenu de la faible teneur en azote des rafles de maïs
(o, 55
g/kg). tous les animaux ingèrent quotidiennement la même quantité de protéines de qualité identique ; il en va de même pour les minéraux et les vitamines. Les rations sont distribuées en 2repas égaux par jour. Le mélange des matières premières qui entrent dans la composition des
différents aliments est effectué lors de chaque fabrication. Le tableau r rapporte la composition
des régimes. Les truies restent pendant un mois au sol, afin de s’assurer qu’elles sont bien ges- tantes. Celles qui reviennent en chaleurs sont éliminées de l’expérience, et remplacées par d’autres.
Les animaux sont ensuite soumis à 4 périodes de collecte de 4 jours, en cages de digestibilité, pen- dant lesquelles on récolte séparément les fèces et l’urine, selon une technique décrite par ailleurs
(SwLNtoN-LEGwcrEUR, i965). Chaque période de collecte est précédée d’une semaine d’adaptation
à la cage, et suivie d’une semaine au sol, en loges collectives avec alimentation individuelle. Les excréta sont collectés à partir des 38C, Sge, Soe et ioiejours de gestation.
Sur les échantillons représentatifs moyens de chacune des fabrications d’aliments et les fèces,
on procède aux déterminations suivantes : matière sèche par séchage à l’étuve à 95°C, cendres
par incinération au four à 5500C, azote par la méthode Kjeldahl, énergie par combustion dans un calorimètre balistique « Féry », cellulose brute par la méthode de Weende (modifiée O. C. D. E.).
Afin de suivre les variations de composition en acides gras du tissu adipeux et l’intensité de la synthèse des lipides in vitro, des fragments de 4 à 5 g de lard sont prélevés au niveau du cou
des truies, avant le premier passage en cage de digestibilité, et avant la mise bas (soit en moyenne à 26 et 108 jours de gestation). Ils sont obtenus après anesthésie générale au thiopental sodique,
les animaux ayant été maintenus à jeun depuis la veille. Des coupes de ce tissu sont aussitôt incu- bées pendant 2heures à 3!°C, en présence de glucose uniformément marqué au l’C, selon la techni- que mise au point par O’HEAet LEVEILLE (1968), modifiée par HENRY (non publié). La mesure
de la radioactivité du gaz carbonique produit, et des lipides synthétisés, fournit une évaluation
de l’intensité de la lipogenèse. Le dosage des acides gras est effectué sur les mêmes fragments de
lard par chromatographie en phase gazeuse (colonne de Chromosorb W. 20p. 100 DEGS sur
Aerograph 1 200à ionisation de flamme), après saponification et méthylation des lipides extraits.
Les observations sur truies sont complétées par une étude de la composition chimique des porcelets à la naissance. Pour cela, dans chaque portée, un porcelet est sacrifié par asphyxie et
conservé à - 25°C. La composition chimique est déterminée après broyage et homogénéisation
de l’organisme entier congelé, et lyophilisation d’un échantillon représentatif. Les teneurs en
matière sèche, minéraux, azote et énergie sont estimées par les techniques déjà décrites, tandis que les lipides sont dosés par la méthode de BLIGH et DYER(i959).
Les données expérimentales sont traitées par l’analyse de variance, de manière à dissocier l’effet propre du régime de celui du stade de gestation.
RÉSULTATS
A. - Utilisation
digestive
des nutrimentsénergétiques (tabl. 2 )
Ainsi que le
prévoyait
leprotocole expérimental, l’ingestion
azotée a été la mêmedans les 3
lots,
de l’ordre de 44g/jour.
Celles de matièresèche,
de matièreorganique
et
d’énergie
brute varient defaçon parallèle
à laquantité
d’aliment frais. Par contre,l’introduction de 300 g de rafles de maïs dans le
régime
des truies du lot 2provoqueune élévation du taux de cellulose brute de 2,3 à 7 p. ioo et de son
ingestion quoti- dienne, qui augmente
deplus
de 200p. 100.Les coefficients de
digestibilité
obtenus par le calcul de l’excrétion fécale indi-quent
tous un effetsignificatif (P ! o,oor)
durégime :
les résultats du lot 3sont,
en ce
qui
concerne la matièresèche,
la matièreorganique
etl’énergie, supérieurs
de4 à 5
points
à ceux du lottémoin,
tandis que ceux du lot 2 sont inférieurs de 6 à 7points. L’utilisation digestive
de la cellulose brute estsignificativement plus
faibledans le cas du
régime qui
en contient leplus (lot 2 ),
soit 32 p. ioo contre4 6
et 53res-pectivement
dans les lots i et 3. Il faut toutefois remarquer que, d’unefaçon géné- rale,
la variabilité de ce critère estplus
élevée que celle des autres, etplus particu-
lièrement dans le cas du lot 2, pour
lequel
le coefficient de variation est de 47 p. ioo.Le coefficient d’utilisation
digestive
del’énergie
de la fraction noncellulosique
de la ration
(CUD Esse) ( 1 )
a été calculé selon des modalités décrites par ailleurs(HENRY
etÉ TIENNE , r 9 6 9 ),
afin d’étudier l’effet propre del’incorporation
de cellulosesur l’utilisation de cette fraction. Les résultats vont dans le même sens que ceux de la
digestibilité
de la totalité del’énergie,
mais ils leur sontsupérieurs,
surtout pour les animaux du 2e lot.Ainsi,
l’introduction de rafles de maïs dans lerégime
2 pro- voque une diminution du coefficient d’utilisationdigestive
de la fraction non cellu-losique
de laration,
de l’ordre de 3points (de 8 7
dans le lot i à8 4
dans le lot2 ).
Le stade de
gestation
n’exerce aucune influence sur les résultatsprécédents ;
de
plus,
il ne faitapparaître
aucune interaction avec lerégime.
La teneur enénergie digestible
de la matière sèche des aliments diffère entre les 3lots ;
elle passe de3 8 77
keal/kg
pour lerégime
du lot 3, à 3455 kcal pour celui du lot 2. Maislorsque l’énergie digestible
estrapportée
à la matièreorganique,
on n’observeplus
d’écartentre les aliments contenant le moins de cellulose
( 4 00 o keal/kg),
au contraire durégime qui
renferme des rafles de maïs( 3 66 7 kcal/kg).
B. - Utilisation
digestive et
rétention des matières azotées(tabl. 3 )
La
digestibilité
des matières azotées durégime
2 estplus
faible que celle desrégimes
i et 3(8 3
p. 100 contre85
et86),
en raison d’un taux de celluloseplus
élevé.Pour une même
ingestion azotée,
laquantité
d’azote fixéequotidiennement augmente
de 12, à z5,o et1 6, 9
grespectivement
dans les lots i, 2et 3 ; il en est de même pour le coefficient de rétention azotée(CRN).
Le coefficient d’utilisationpratique
de l’azote(CUPN),
résultant de la combinaison des critèresprécédents,
est doncsignificative-
ment abaissé chez les truies du lot témoin en
comparaison
de cellesqui reçoivent
del’amidon de maïs. Les résultats des animaux du lot
disposant
de rafles sont intermé-diaires.
! CUD
Énergie
totale absorbée --Énergie
de la cellulose digérée ,ler gie de la
! ! CUD
Esse - -———. , , ,—:——————-———.. ,—————:———,
Energie totale ingérée - Energie de la cellulose ingérée où &dquo;&dquo; ’ l’énergie &dquo; de lacellulose ingérée est obtenue en multipliant la quantité ingérée par la valeur énergétique brute de la cellu- lose (4,127 kcal/g de matière sèche) ; l’énergie de la cellulose digérée est égale à l’énergie de la cellulose ingérée multipliée par le CUD de la cellulose pour le régime considéré.
Le stade de
gestation
n’a d’influence sur aucun de ces critères(tabl. 4 ).
Il fautremarquer toutefois que la
quantité
d’azote fixéchaque jour
par les truies du lot 3 tend àaugmenter
de15 ,6
à1 8, 1 g/jour (P < o,ro)
entre i moisaprès
la saillie et la mise bas. Aucune interactionsignificative
entre lerégime
et le stade degestation
n’est à noter, bien que la rétention azotée ait tendance à
augmenter
en fin degesta-
tion sous l’effet d’unapport énergétique
accru.C. - Intensité de
synthèse
deslipides
etcomposition
en acides gras du lard dorsal des truies(tabl.
5 et6)
L’intensité
desynthèse
deslipides,
estimée in vitro sur un échantillon de lardprélevé
parbiopsie
au niveau du cou destruies,
tend à diminuer chez tous les animaux entre le début et la fin de lagestation (tabl. 5 ).
Mais l’effet du stade n’estsignificatif
que pour la
production
deCO, marqué qui,
dans tous les cas, évolueparallèlement
à la
synthèse
deslipides.
On ne note aucune différence dans les taux
d’incorporation
deprécurseur
mar-qué
dans leslipides
ou leCO,
formé entre les lots i et 2. Par contre, dans le lot 3,l’incorporation
duglucose
tend à êtreplus importante
que dans les autres deuxlots,
tout au moins au 26e
jour
degestation. Mais,
étant donné leur variabilitéélevée,
ces valeurs ne sont passtatistiquement
différentes.La
composition
relative en acides gras du lard dorsal des truies(tabl. 6)
nemontre pas de variations
importantes.
Lerégime
des animaux ne l’affecte pas, et seul le stade degestation
exerce une influencesignificative,
lepourcentage
d’acidespalmitique
etstéarique
diminuant entre le 26e et le ro8ejour après
la saillie. Cette baisse estcompensée
par uneaugmentation
de certains autres acides gras,oléique
en
particulier.
D’unefaçon générale,
on constate que la teneur deslipides
en acidesgras saturés tend à diminuer
(de
35,7 à 33,2 p.ioo),
alors que celle des acides insatu- rés totaux s’élève.D. -
Performances de reproduction (tabl.
7 et8)
En raison du faible nombre de truies par
lot,
les résultats dereproduction, qui
sont
rapportés
dans le tableau 7, ne sont donnésqu’à
titre indicatif. Bienentendu,
ils ne montrent aucun effetsignificatif
durégime
maternel sur le nombre ou lepoids
des
porcelets
à la naissance.Remarquons
toutefois que legain
depoids
total degesta-
tion est le
plus
élevé chez les animaux du lot 3, soit 7kg
contre 49et 41respective-
ment dans les lots i et 2. Il en est de même pour le
gain
net,qui
passe de 37 et 28kg
dans les lots i et 2 à5 8 kg
dans le lot 3.La
composition chimique
desporcelets
à la naissance(tabl. 8)
n’est pas influen- cée par lesrégimes
maternels degestation
étudiés.Que
les résultats soientrapportés
au
poids
frais ou aupoids
sec, aucune différence entre les teneurs en matièresèche,
protéines, lipides,
minéraux ouénergie
brute des animaux issus des truies des 3 lots n’est mise en évidence. De la mêmefaçon,
lesquantités
totales de chacun de cesconstituants dans les
portées
à la mise bas sontcomparables
d’un lot àl’autre ;
danstous les cas, elles
présentent
une corrélation élevée avec lepoids
vif desporcelets,
soit
respectivement 0 ,8 7 ,
0,97 et o,gr pourl’azote,
les minéraux etl’énergie.
De cette
expérience,
onpeut
déduire quel’organisme
desporcelets
à la naissancecontient en moyenne
1 8 9
g de matièresèche, 1 8, 7 d’azote, 1 8,o
g delipides
et 35,4 g de minéraux parkg
depoids vif,
leur teneur enénergie
brute étant de8 41 kcaljkg,
quel
que soit lerégime
de leur mère au cours de lagestation.
DISCUSSION
A. - Nature de
l’énergie et
résultats dedigestibilité
Le
présent
travail montre quel’adjonction
de rafles de maïs à la ration de base provoque une diminution de tous les coefficients d’utilisationdigestive
encomparai-
son avec l’aliment témoin. Ainsi que l’ont
indiqué
de nombreux travauxantérieurs,
cet effet est dû à l’élévation du taux de cellulose brute du
régime, qui
passe de 2,3 à 7,o p. loo. L’effetdépressif
sur ladigestibilité
del’énergie
est de6, 3 points,
soit untaux de diminution de 1,34p. ioo pour i p. 100
d’augmentation
du taux de cellulose.Cette réduction est
plus
forte que celle que nous avions obtenue sur des porcs de 80
kg (HENRY
etÉ TIENNE , ig6g),
soito,8
p. 100 avec une cellulose de boispurifiée ;
elle est, par contre, moins élevée que dans d’autres travaux
qui
font état d’une dimi- nution de 2 à 3 p. 100 avec desrégimes
à base de céréales et d’issues demeunerie,
riches en hémicelluloses(A X E LSSON ,
rg55 ; NEHRIN&,rg66 ;
HENRY,19 68) :
enréalité,
dans laprésente expérience,
les truiesingèrent
des rafles de maïs contenant,outre la
cellulose,
de lalignine qui
n’est pasdigérée
par le Porc(I,nuR!rrTOwsKa, r
9S9
),
et uneproportion
réduite d’hémicelluloses. Onpeut invoquer plusieurs
raisonsà ces différences. Il ressort de certains travaux
(HENRY, 1971 )
que les constituants membranaires totaux(cellulose
+ hémicelluloses +lignine) permettent
une meilleureprévision
de l’utilisationdigestive
del’énergie
pour le Porc que la cellulosebrute ;
cette
dernière,
eneffet,
ne tient pascompte
de la fraction deshémicelluloses,
dont l’utilisationdigestive
est relativement faible chez le Porc etcomparable
à celle de la cellulose. Ceciexplique
que l’effetdépressif, rapporté
à la cellulosebrute,
ait été moinsimportant
que dans l’essaiprécédent.
Parailleurs,
laparticipation
de la cellulose à la couverture du besoin enénergie augmente
avecl’âge
duPorc,
à cause de sa meil- leure utilisationdigestive,
ainsi que l’ont montré CUNNINGHAM et al.( 19 6 2 ), puis
HENRY et
ËT I E NNE (ig6g).
Nos truies sontplus
lourdes etplus âgées
que les animauxen croissance d’AxELSSON
( 1955 )
et HENRY( 19 68).
Il est donclogique
que le bilan del’énergie digestible
s’en trouve amélioré. Ladigestibilité
propre de la cellulose brute est d’ailleurs relativementélevée,
mêmelorsqu’elle
estprésente
enproportion importante
dans l’aliment.Lorsque
son taux dans lerégime
diminue(lots
i et3 ),
sa
digestibilité apparente augmente,
ainsi que l’ont trouvé FRIEND et al.( 19 6 2 ).,La
variabilité élevée de ce critère n’est pas
surprenante,
comme l’ont constaté ZIVKOVIC et Bow!,axD( 197 o)
et SAVIC et at.(1972).
Ainsi
qu’il
adéjà
étéremarqué auparavant (HENRY
etÉT IENNE , 19 6 9 ),
l’éléva-tion du taux de cellulose du
régime
diminue ladigestibilité
des autres constituants de laration, qu’il s’agisse
del’énergie
ou des matières azotées. Cet effetpeut
être attribué àl’augmentation
du volume de la ration(Woo DM a N
etEvnrrs, rg47),
ouà l’accélération du transit
qui
est observée enparticulier
chez la Truie(R ICHTER
etBusCH, zg 7 o),
cequi
a pourconséquence
uneaugmentation
de l’excrétionendogène
fécale.
Malgré cela,
le bilanglobal
montre que l’addition de 0,3kg
de rafles de maïs aurégime
de base élève de 515kcal l’énergie digestible ingérée quotidiennement
par lesanimaux,
cequi correspond
à uneaugmentation
du niveauénergétique
de la ration deprès
de 9 p. ioo. Il en résulte que, dans les conditions de cetteexpérience,
les raflesde maïs
apportent
i goo kcald’énergie digestible/kg
de matière sèche. Ce résultat est trèssupérieur
aux estimations de Bo!rrx!ER et al.(ig6g) qui
trouvent que les raflesde maïs, introduites au taux de 10p. 10;) dans
l’aliment,
n’ont aucune valeurénergé- tique
pour le Porc en croissance-finition. lueurs travauxportaient
en fait sur desanimaux de q4 à
5 8 kg
depoids vif,
tandis que nos truiespesaient
entre 12o et 16okg
ce
qui pourrait expliquer,
tout au moinspartiellement,
la différence constatée.Dans le
régime
3,supplémenté
enamidon,
les résultats dedigestibilité
des nutri-ments
énergétiques (sauf
lacellulose)
sontsupérieurs
à ceux durégime
témoin. Cet écartprovient
de la bonne utilisation de l’amidon de maïs, dont la matièresèche,
la matièreorganique
oul’énergie
brute sontcomplètement digérées (entre ioo,6
et101
,6
p. iood’après
les calculs effectués pardifférence),
en accord avec ScxWMarrrret al.
(ig6z).
La valeur de l’amidon de maïs pour les truiespeut
être ainsi estimée à q20
o kcal
d’énergie digestible/kg
de matière sèche.B. - Niveau des
apports d’énergie
et rétention azotéeL’élévation
desapports quotidiens d’énergie digestible
àpartir
d’un niveau bas chez la Truie engestation,
provoque une amélioration de la rétentionazotée,
comme d’ailleurs des coefficients de rétention azotée. Ce résultat confirme l’existence d’une action
d’épargne
del’énergie
sur l’azote aussi bien chez les truies adultes(Sa!,MOrr-I,!GnGrr!ua, 19 63 E LSL E Y , rg6 7 ;
PlKE,1970 )
que chez les animaux encroissance
(HENRY
et DE Wm.D!,1973 ).
Ilapparaît,
deplus,
dans notreexpérience
que l’influence de
l’augmentation
desapports d’énergie
sur le métabolisme azoté est d’autantplus marquée
que le niveau initial est bas.Ainsi,
entre les truies du lot iet celles du lot 2, une
ingestion d’énergie digestible supérieure
de8,8
p. ioo améliore le coefficient de rétention azotée de21 ,6
p. 100en valeurrelative,
tandisqu’entre
leslots 2 et 3, l’écart n’est
plus
que de m p. 100 pour uneaugmentation
de consomma-ti
on
d’énergie
de 44 p. 100.Le niveau
d’énergie digestible
des truiesqui reçoivent
des rafles de maïs enplus
de la ration de base diffère peu des normes du N. R. C.
(rg68) :
6 600kcal/jour, l’apport
azoté étant par ailleurs conforme aux recommandations
( 2 8 0
g deprotéines brutes/
jour). Or,
nos résultats montrentqu’une
réduction faible desapports d’énergie diges-
tible
(lot i)
parrapport
aux normes provoque un abaissement de la rétention azotée destruies,
alors que leuraugmentation (lot 3 )
n’améliorequ’assez
peu le bilan azoté.Il est
possible
de discuter lasignification
de ce critère dans le cas des truiesgestantes, compte
tenu de la faible sensibilité des résultatszootechniques
à des modifications alimentairesimportantes.
Mais il ne faut pas oublier que ces truies auront à assurer,après
laparturition,
uneproduction
de laitélevée,
dont lasynthèse exige
laparticipa-
tion des réserves
maternelles, protéiques
enparticulier,
édifiéespendant
lagestation.
D’autre
part,
la croissance des truiesnullipares
utilisées dans laprésente expérience
n’est pas terminée. Le bilan azoté de ces animaux revêt donc une
signification parti-
culière si l’on considère leurs
performances
dereproduction
ultérieures. Sur la base de cecritère,
ilapparaît
que les normesénergétiques
actuelles(N.
R.C., 19 68)
destruies
gestantes
sontmarginales,
tout au moinslorsque
celles-ci n’ont pas atteint leurpoids
adulte.A l’inverse de ce
qui
a été trouvé parplusieurs
auteurs(Ro MB nuTS, 19 6 2 ; SA!,MOrr-I,!GnGN!uR, zg65 ;
1 ELSLEY etat., 19 66 a),
nous n’obtenons pas d’améliora- tion de la rétention azotée des truies avec l’avancement de lagestation.
A celaplu-
sieurs
explications peuvent
être données. Nos bilans ne commencentqu’à partir
de40
jours après
la saillie et sontdéjà
assez élevés. D’autrepart,
la rétention azotée varie defaçon aléatoire,
ainsi que l’ont montré des mesures effectuées toutes les semaines par SALMON-LEGAGNEUR(rg65). Enfin,
les truies que nous avons utilisées sont encore encroissance,
cequi
a pu interférer avec l’anabolismegravidique.
Remar-quons
cependant
que la rétention azotée chez les truies du lot 3augmente,
bien quenon
significativement (P ! o,ro)
entre 40jours après l’accouplement
et la mise bas.Comme cet effet n’existe pas chez les autres
animaux,
pourlesquels l’apport d’énergie digestible
estplus limité,
ilapparaît qu’une
telle restrictionpeut
réduire non seule-ment le bilan azoté moyen des
truies,
mais aussi la « super rétention » azotée de fin degestation (I,!NxW T et al., rg 55 ).
Ce résultat semble d’autantplus logique
que ladépense d’énergie
s’accroissait au cours de cettepériode,
et nous voyons là un argu- mentsupplémentaire
pour ne pas réduire les normesénergétiques
actuellement envigueur.
C. - Niveau des
apports d’énergie, lipogenèse
et
composition
en acides gras du tissuadipeux
L’intensité de la
lipogenèse,
mesurée in vitro sur des échantillons de lard dorsal destruies,
diminue entre 26 et io8jours
degestation, quel
que soit le lotauquel appartiennent
les animaux. Ces résultats sont àrapprocher
de ceux de SALMON- I,!GAGrr!ux( 19 6 3 )
et de ADAM et al.( 1971 ), qui
observent quel’épaisseur
du larddorsal,
mesurée auxultrasons,
diminue en fin degestation.
Sn!,MOrr-h!GnGrrEUx etJACQUOT (ig6i), après
dissection des carcasses de truies à différentsstades,
trouventune diminution relative des tissus gras entre la saillie et la mise bas.
Enfin,
VERSTEGENet al.
( 1971 )
mettent enévidence,
sur des truiesplacées
en chambresrespiratoires,
une
augmentation
de laproduction
d’extrachaleur au cours des4 dernières
semainesde
gestation.
L’intensité
de lalipogenèse
est laplus importante
à 26jours
degestation
pourles truies du 3 lot. Leur
régime, plus énergétique
et à based’amidon,
favorise donc leurengraissement.
Par contre, en fin degestation,
l’activité du tissuadipeux
estla même pour tous les animaux. En d’autres termes, la
synthèse
delipides
de novoà
partir
d’unapport
accrud’énergie,
dans le lot 3, est alors abaissée auprofit
de laprotéinogenèse.
Onpeut invoquer l’augmentation
desdépenses
d’extrachaleur(VE RS TEGE N
et al., 1971 ),
mais aussi l’élévation des besoins enénergie
due à l’amélio-ration de la rétention azotée au fur et à mesure de l’avancement de la
gestation,
constatée chez les animaux du lot « amidon o.
Le
régime
degestation
ne semble pas influencer lacomposition
en acides grasdu tissu
adipeux
dorsal des truies. Par contre, cettecomposition
évolue de la mêmefaçon
pour les animaux des 3 lots entre le début et la fin de lagestation,
la propor- tion d’acides gras insaturésaugmentant
au détriment des acides gras saturés. SAL- Morr-!!GnGN!ux( 19 65)
observe une diminution dupourcentage
d’acidepalmitique
ou
stéarique
entrel’accouplement
et laparturition. Mais, compte
tenu des modifica- tionsqui portent
sur laquantité
delipides
stockés au cours de lagestation, l’interpré-
tation de ces variations est difficile. Elles
peuvent
aussi bien être dues à unstockage préférentiel
des acides gras insaturésaprès
la sailliequ’à
une utilisationplus impor-
tante des acides gras saturés en fin de
gestation.
Il ne faut pas nonplus négliger
lesinterconversions de ces acides entre eux et aucune de ces 3
hypothèses
nepeut
êtrerejetée
dans le casprésent.
D. - Niveau
énergétique et performances
dereproduction
Les conclusions
qu’il
estpossible
de tirer àpartir
des résultatsd’élevage
des truiessont conformes aux observations de la
plupart
des auteursqui
ont étudié l’influence del’apport d’énergie
aux truiesgestantes.
Les animauxqui ingèrent
leplus d’énergie digestible (lot 3 )
réalisent ungain
total ou net degestation supérieur
aux autres,comme l’ont
signalé
E!,s!,xy et al.( 19 68 b),
VERMEDAHLet al.(ig6g)
ou FROBISHet al.(1973).
Onpeut
êtresurpris
de ce que les truies du lot 2 aient des croissances infé- rieures à celles du lot témoin avant laparturition,
bien que leur rétention azotée ait étéplus importante.
Peut-être ont elles stocké moins delipides,
ainsi que les mesuresd’activité du tissu
adipeux
tendent àl’indiquer.
Mais les résultatsd’élevage
sont àconsidérer avec
précaution compte
tenu du faible effectif d’animaux danschaque
lot. Aucune différence
significative
n’est mise en évidence en cequi
concerne les por- tées. Le nombre deporcelets
nés ou nés vivants n’est pas influencé defaçon
statis-tique,
ainsi que l’ontindiqué
ELSLEYet al.( 19 68 b)
et SRECKOVIC et al.( 1971 ).
La mor-talité
périnatale, plus
élevéeparmi
lesporcelets
des truies du lot 2, est due enpartie
àleur
poids
moyen à la naissance assezfaible,
mais surtout au fait que lesparturitions
ont eu lieu dans une
porcherie équipée
d’un sol sur caillebotis. Lepoids
moyen desporcelets
à la naissance tend à êtresupérieur lorsque
leurs mères ontingéré plus
d’éner-gie digestible pendant
lagestation (lot 3 ).
Ce résultat est conforme aux observations de FROBISH et al.( 1973 )
et ELSI,EY et al.( 19 6 9 ).
La différence depoids
entre lesanimaux issus des truies des lots i et 2
s’explique
par laplus grande
taille deportée
dans le cas du lot 2.
L’absence d’effet du niveau et de
l’origine
desapports d’énergie
aux truiesgestantes
sur lacomposition chimique
desporcelets
à la naissance a étésignalée
parplusieurs
auteurs, dont ELSLEY et al.( 19 66 b) qui
ont trouvé que pour des niveaux alimentaires degestation compris
entrer,6
et2 ,6 kg/j
le contenu azotécorporel
desjeunes,
de l’ordre de 18g/kg,
n’est pas modifié par le traitement antérieur de la truie.D’autres
expériences, portant
sur laquantité
deprotéines
distribuées aux mères(I,mrrGSTOrrE
etal., 19 66 ;
PorrDetal., 19 68)
aboutissent à des conclusionsanalogues,
tout au moins en ce
qui
concerne la teneur en azote desporcelets
à la misebas,
ou àl’abattage
à 90kg.
En
conclusion,
les résultats de cetteexpérience
confirment que les niveaux desapports d’énergie digestible
considérés ont peu, ou pas, d’influence sur lareproduction
des
truies,
tout au moinspendant
un seulcycle. Pourtant,
les mesures de rétention azotéeindiquent qu’il
estpréférable
de ne paspréconiser
des normesénergétiques trop
faiblespendant
lagestation,
notamment dans le cas des truiesnullipares,
encoreen croissance. Nous