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Évolution de la reconstruction de la plaque aréolomamelonnaire

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34 | La Lettre du Gynécologue • N° 403-404 - juillet-octobre 2016

DOSSIER

Pathologies aréolaires et mamelonnaires

Évolution

de la reconstruction de

la plaque aréolo mamelonnaire

Current trends in nipple reconstruction

J. Rausky*

* Service de chirurgie plastique et reconstructrice, hôpital Saint‑Louis, Paris.

L

a reconstruction du complexe aréolomamelon- naire est la dernière étape de la reconstruction mammaire après une mastectomie pour cancer.

L’absence de la plaque aréolomamelonnaire (PAM) peut aussi résulter d’un traumatisme, d’une brûlure, d’une malformation congénitale ou d’une compli- cation d’opération de chirurgie esthétique (plastie mammaire de réduction).

C’est une opération rapide (temps opératoire infé- rieur à 1 heure), souvent considérée, à tort, comme techniquement facile, et permettant d’obtenir immédiatement un très bon résultat esthétique.

Malheureusement, l’aréole et le mamelon nouvelle- ment reconstruits chirurgicalement vont beaucoup évoluer dans les mois suivant l’intervention, et le résultat s’avérer souvent décevant, voire inexistant quelques mois après la chirurgie.

Le manque d’intérêt pour la reconstruction de l’aréole en chirurgie réparatrice du sein est tout à fait dommageable quand on sait que, quelle que soit la technique utilisée pour reconstruire le sein, la principale cause d’insatisfaction des patientes est la PAM (1).

Anatomie

Les caractéristiques du complexe aréolomamelon- naire sont très variables en taille, en position, en texture et en couleur, faisant de cet organe quelque chose d’unique pour chaque femme. De même qu’il n’existe pas de sein “standard”, il n’existe pas de PAM

“standard”. On a l’habitude de placer la PAM parfai- tement au sommet du cône mammaire, regardant un peu vers le haut et très légèrement en externe.

Mais, en pratique, ces critères ne sont valables que chez une femme jeune et mince. L’âge de la patiente, ses choix, sa silhouette et le sein controlatéral condi- tionnent bien plus la reconstruction que des critères anatomiques.

L’aréole est une structure circulaire ou ovalaire, d’une couleur différente de celle de la peau adjacente et présentant une texture caractéristique unique, légè- rement plus épaisse et parsemée de petits orifices répartis de façon non homogène (les orifices des glandes de Montgomery). Son contour est parfois bien dessiné ou bien au contraire plus flou. Sa taille est variable : entre 3 et 6 cm le plus souvent, avec une moyenne comprise entre 4,2 et 4,5 cm de diamètre.

Au centre se trouve le mamelon qui, d’un point de vue purement anatomique, peut être considéré comme une proéminence d’environ 1 cm de diamètre et de 5 à 10 mm de projection, mais sa variabilité est très importante. Sa teinte est sensiblement dif- férente de celle du mamelon (généralement plus foncée, parfois seulement plus rosée). Le volume du mamelon projette une ombre sur l’aréole et la pointe prend davantage la lumière, créant un petit reflet clair sur la partie supérieure.

Enfin, pour complexifier le problème, l’aréole pré- sente un pouvoir contractile et le mamelon un pouvoir érectile ; toutes les caractéristiques anato- miques, déjà très variables d’une femme à l’autre, changent chez une même patiente au cours d’une même journée, d’un instant à l’autre.

Historique

Parallèlement au développement des techniques de reconstruction du sein, différentes techniques de reconstruction d’aréole et de mamelon ont été décrites au cours de la deuxième partie du XXe siècle.

W.M. Adams a été le premier à décrire une greffe de peau provenant de grandes lèvres de la vulve, puis à proposer de reconstruire le mamelon avec un tissu de même composition : c’était là évoquer ce qui deviendra la greffe de PAM controlatérale, qui reste aujourd’hui l’une des techniques phares de la reconstruction du mamelon (2).

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Points forts

» La reconstruction du volume mamelonnaire est essentielle et augmente significativement la satisfaction des patientes concernant la reconstruction de leur sein, ainsi que leur qualité de vie.

» Il n’existe pas de solution idéale, le choix réside dans un compromis entre des critères anatomiques et le désir de la patiente.

» Dans tous les cas, le tatouage est indispensable afin de finaliser le processus de reconstruction.

Mots-clés

Mamelon Aréole Plaque aréolo- mamelonnaire (PAM) Reconstruction du sein

Tatouage

Highlights

»Nipple reconstruction is corelated with a higher cos- mectic safisfaction of the breast reconstruction and a higher quality of life.

»There is no gold standard in the NAC reconstruction:

the technique is chosen on anatomicals citerias and the patient wishes.

»In all cases, tatoo shlould finalize the process and improve the cosmetic results process.

Keywords

Nipple Areola NAC

Breast reconstruction Tattoo

Un pas a été franchi dans les années 1980 avec l’essor des techniques de reconstruction de mamelon par lambeau. Il n’est plus nécessaire de greffer le volume central qui figurera le mamelon, celui-ci peut être directement reconstruit en utilisant la peau présente sur le thorax lui-même. Quel que soit le patron du lambeau utilisé (étoile, bande, fleur, etc.), le principe est le même : lever 1, 2 ou 3 petites ailettes qui seront suturées sur elles-mêmes pour constituer un volume central.

Quelques décennies plus tard, et pour pallier le manque de projection à long terme du mamelon, beaucoup d’auteurs ont proposé différents types de comblements autologues ou artificiels permettant de lutter contre cette rétraction naturelle : il peut s’agir d’un greffon cartilagineux, d’une injection de graisse, d’une prothèse en silicone ou d’un fragment de matrice dermique.

Becker est le premier chirurgien à introduire, en 1986, ce qui va devenir la vraie révolution de la reconstruction d’aréole : le tatouage (3).

La littérature recense de très nombreuses techniques mais, pas plus qu’en matière de choix de la technique utilisée pour reconstruire un sein, il n’y a pas de combinaison idéale. Il s’agit d’un compromis entre les possibilités anatomiques et morphologiques de la patiente, ses désirs (notamment le fait de ne pas toucher à l’autre sein ou de ne pas avoir d’autres cicatrices) et les compétences techniques du chirur- gien. Nous allons parcourir les différentes techniques de reconstruction du mamelon et de l’aréole, puis nous tenterons de distinguer plusieurs situations nécessitant chacune une prise en charge différente.

Techniques de reconstruction du mamelon

La reconstruction du mamelon a un objectif : créer un petit volume au sommet du sein reconstruit.

Le problème principal réside dans la rétraction, à moyen et à long terme, de ce volume difficilement obtenu. Compte tenu de la perte naturelle de pro- jection du néomamelon dans les 2 ans suivant sa reconstruction, la règle élémentaire, quand cela est possible, est de surcorriger d’au moins 20 à 40 % la projection du mamelon reconstruit. Parmi les

techniques, nous pouvons distinguer les greffes (surtout celle du mamelon controlatéral) des lam- beaux locaux.

Greffe de mamelon controlatéral

Cette méthode est une des plus naturelles pour les patientes présentant une hypertrophie du mamelon controlatéral. Le résultat est très satisfaisant en matière de couleur et de texture, la projection obtenue dépend du volume prélevé et de la qualité de la prise de greffe. La procédure est très rapide et se pratique sous anesthésie locale.

De nombreuses patientes refusent cette technique de reconstruction, soit par volonté de ne pas toucher du tout le sein controlatéral (patiente ne souhaitant pas ou ne nécessitant pas de symétrisation), soit par crainte de séquelles esthétiques au niveau de la zone donneuse ou d’une diminution de la sensibilité.

M.R. Zenn, sur une série de 57 patientes ayant bénéficié d’une greffe de mamelon, trouve que 96 % d’entre elles sont contentes de l’aspect esthétique du mamelon donneur, mais seulement 47 % ont retrouvé une sen- sation normale et 42 % déclarent avoir récupéré une fonction érectile sur le mamelon reconstruit (4).

Après revue de la littérature, la crainte des patientes paraît fondée – bien que cette technique apporte une reconstruction de grande qualité et même une certaine fonction érectile chez plus de 1 patiente sur 3 : la teinte initialement concordante a une nette tendance à la décoloration et la morbidité au site donneur est loin d’être négligeable, avec le plus souvent une diminution de la sensibilité du mamelon donneur (mais un aspect esthétique le plus souvent conservé). L’indication idéale est la présence d’un mamelon controlatéral excessif chez une patiente acceptant une diminution de sensation du côté controlatéral (figure 1, p. 36).

Autres greffes

D’autres greffes de peau ou de muqueuse ont été décrites pour la reconstruction du mamelon.

On peut citer celle d’un fragment de petite lèvre, d’une marisque anale ou d’une cicatrice

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DOSSIER

Pathologies aréolaires et mamelonnaires

Figure 1. Reconstruction du mamelon par greffe d’hémimamelon controlatéral, suivie d’un tatouage de l’aréole après reconstruction composite du sein (implant/graisse).

hypertrophique. Ces méthodes sont à réserver à des indications très particulières : échec d’autres techniques, impossibilité technique de recourir à un procédé plus classique, etc.

Elles ont toutes en commun une rétraction majeure de la projection quelques mois après l’intervention.

Lambeaux locaux

Dans tous les cas, une ou plusieurs languettes de peau sont suturées sur elles-mêmes ou l’une sur l’autre pour réaliser un volume.

L’objectif principal de la reconstruction du mamelon, soit le maintien d’une projection à long terme, est entravé par 2 facteurs : les forces de rétraction qu’exercent les tissus environnants et le potentiel de contraction du lambeau lui-même.

La vascularisation du lambeau est également un facteur déterminant la projection. En effet, une nécrose partielle d’un lambeau mal vascularisé aboutira à une diminution globale du volume viable, et donc de la projection. Si le design est très variable, les règles classiques de chirurgie des lambeaux s’appliquent à ces procédés : lever un pédicule le plus large possible, éviter une cicatrice barrant le pédicule, ne pas exercer de fortes ten- sions sur le lambeau pendant la suture et ne pas comprimer le lambeau en postopératoire nous paraissent représenter 4 règles essentielles.

La technique dite “star flap” est la plus populaire depuis une dizaine d’années. Il s’agit d’un lambeau

trifolié, dont les ailettes sont directement sutu- rables. Ainsi, il peut être réalisé seul ou en com- plément d’une greffe de peau pour l’aréole mais, contrairement à d’autres types de design, la greffe de peau n’est pas indispensable, ce qui permet une plus grande variété d’options : on peut l’associer soit à un tatouage, soit à une greffe de peau aréolaire, soit aux 2, comme nous le verrons plus loin. La largeur et la projection du futur mamelon sont définies par la hauteur et la longueur des 2 ailettes latérales.

L’enroulement des 2 ailettes permet de reconstituer au mieux la forme finale du mamelon. Évidemment, une diminution substantielle de la projection est à prévenir par une surcorrection initiale (5, 6).

Par ailleurs, comme pour tous les lambeaux locaux, le star flap reconstruit un mamelon exactement de la même couleur que la peau thoracique : un tatouage ultérieur du lambeau nous paraît être essentiel.

Quel que soit le lambeau utilisé, le résultat dépend avant tout du type de reconstruction sous-jacente. Dans le cas d’une reconstruction par lambeau ou injection de graisse (technique de lipofilling exclusive), il est possible de conserver un dé de graisse à la face profonde du lambeau et d’enrouler les ailettes autour de ce dé : ce support va permettre de diminuer la rétraction du lambeau et d’optimiser la projection à long terme. Lorsque le sein est reconstruit à l’aide d’un implant ou d’un expandeur, le tissu présent à l’emplacement du lambeau n’est constitué que d’un derme relativement fin, le volume manque

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Pathologies aréolaires et mamelonnaires

pour obtenir une bonne projection, et le résultat à long terme est le plus souvent décevant, amenant à songer à une augmentation de volume (et donc de projection) du mamelon, soit par une technique autologue, soit par un matériel synthétique.

Augmentation autologue du mamelon

Pour lutter contre la rétraction du mamelon, B. Brent et J. Bostwick, en 1977, ont pensé introduire secondairement un petit greffon cartilagineux d’ori- gine auriculaire au centre du lambeau réalisé (7).

Il est en effet logique de penser qu’une structure cartilagineuse solide va freiner la rétraction du mamelon (8, 9).

Lors d’une reconstruction par lambeau de DIEP (Deep Inferior Epigastric Perforator), un fragment de cartilage costal est communément retiré afin de permettre une exposition satisfaisante des vais- seaux mammaires internes. L’équipe de Fuchan Wei, à Tapei, surfant sur la vague de la cryoconservation, propose de conserver ce fragment et de l’intro- duire secondairement dans le néomamelon avec des résultats prometteurs (10).

Le développement des techniques de transfert graisseux en reconstruction du sein a tenté un bon nombre d’auteurs, qui ont essayé de pratiquer des injections de graisse dans le mamelon pour aug- menter son volume (11). Malheureusement, les résultats sont souvent décevants, probablement en raison du très faible volume injectable : 2 à 3 ml.

Augmentation synthétique du mamelon

Les principaux problèmes liés à l’utilisation des pro- thèses de mamelon en silicone sont l’infection et l’exposition de prothèse en raison de la finesse des téguments couvrant l’implant. Esthétiquement, le problème réside dans la mobilisation progressive de l’implant : en effet, le phénomène de rétraction va souvent pousser l’implant vers la profondeur et fournir un résultat quasiment nul en ce qui concerne le gain de projection. Le même phénomène est obtenu avec les produits de remplissage : acide hyaluronique ou calcium hydroxyapatite.

Plus récemment, à la suite de l’essor des matrices dermiques acellulaires en reconstruction du sein, plusieurs équipes, comme celle de M.Y. Nahabe- dian, ont proposé de mettre en place un fragment

d’AlloDerm® dans le néomamelon, avec des résul- tats prometteurs. Précisons que ce matériel doit être mis en place au cours d’une autre intervention et que le coût est prohibitif (12).

Techniques de reconstruction de l’aréole

Restaurer la couleur et la texture d’une aréole native sont les 2 objectifs de cette reconstruction.

Une greffe de peau, pour la texture, et un tatouage, pour la couleur, paraissent en théorie représenter l’option de choix pour les patientes les plus moti- vées. En théorie, oui ; en pratique, cela reste à prouver.

La greffe de peau, une fois cicatrisée, donne un aspect légèrement nervuré qui passe volontiers pour une texture d’aréole – c’est la principale raison pour laquelle cette procédure est réalisée. Dans tous les cas, la concordance des couleurs n’est pas obtenue avec cette procédure seule, et un tatouage peut améliorer le résultat.

La région inguinocrurale est, de loin, la zone don- neuse la plus classique. De couleur légèrement plus foncée, elle procure un résultat à court terme surprenant. Cependant, la décoloration ne se fait pas attendre et, avant même qu’une année se soit écoulée, il ne reste quasiment plus aucune différence de couleur avec la peau thoracique. La morbidité du site donneur consiste en une cicatrice, certes plutôt cachée dans le sillon inguinal, mais souvent élargie et inesthétique. Les suites sont également assez souvent marquées par des désunions cicatricielles, surtout en cas de reconstruction bilatérale.

L’utilisation d’un fragment d’aréole controlatérale, prélevé lors de la symétrisation, présente comme avantage indéniable qu’il s’agit d’un tissu iden- tique, mais la mise en place en tourbillon produit un résultat cicatriciel assez inesthétique.

Enfin, comme pour le mamelon, l’aréole peut être cryoconservée, analysée et regreffée, mais ce procédé n’est pas réalisé en pratique courante en France.

Reconstruction de la PAM en reconstruction immédiate

Un cas particulier est celui de la mastectomie conservatrice de l’étui cutané avec reconstruction immédiate par lambeau. L’incision peut alors être circulaire, emportant la PAM native, éventuellement

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Figure 2. Patiente ayant bénéficié d’une reconstruction immédiate par DIEP, avec reconstruction immédiate du mamelon puis tatouage de l’aréole.

avec un refend externe. Le lambeau, quelle que soit son origine – DIEP, grand dorsal, TUG (Trans- verse Upper Gracilis, provenant de la cuisse), SGAP (Super ior Gluteal Artery Perforator), IGAP (Inferior Gluteal Artery Perforator) ou PAP (Profunda Artery Perforator, provenant de la fesse) – est mis en place dans la loge de mastectomie avec une palette cutanée circulaire suturée à l’emplacement de l’aréole. Plusieurs artifices techniques permettent de reconstruire le mamelon durant la même opé- ration (figure 2).

Le tatouage : un apport indispensable

Seul le tatouage peut aboutir à une bonne concor- dance de couleur entre le sein natif et le sein reconstruit, tant pour l’aréole que pour le mamelon.

Initialement introduit par T.D. Rees (13), le tatouage d’aréole et de mamelon est longtemps resté un pro- cessus médical, utilisant une machine biomédicale et des pigments médicaux semi-permanents. Encore aujourd’hui, de nombreux hôpitaux sont équipés d’un moteur à dermabrasion sur lequel une pièce à main spéciale pour tatouage est ajoutée. Ces machines apportent, au mieux, une vague coloration, mais ne permettent pas de réaliser des nuances de teintes, des ombres, des prises de lumières et des détails.

Depuis une dizaine d’années et à travers le monde, certains tatoueurs professionnels ont commencé à former des chirurgiens aux techniques classiques de tatouage. Grâce à l’utilisation de machines

professionnelles et à la formation des médecins au tatouage, les indications de reconstruction de l’aréole ont été modifiées.

Quelle que soit la reconstruction de PAM effectuée, le tatouage va fixer les yeux de l’observateur, et dimi- nuer ainsi l’importance des autres cicatrices. Il est nécessaire de distinguer plusieurs cas de figure parmi les femmes se présentant pour un tatouage de PAM.

Patiente ayant bénéficié d’une reconstruction d’aréole (par greffe de peau) et de mamelon (lambeaux ou greffe)

A priori, la situation est idéale : la greffe apporte la texture, le volume du mamelon a été reconstruit, il ne reste plus qu’à apporter la couleur correspon- dant à l’aréole et au mamelon controlatéraux. En pratique, après 6 à 12 mois d’évolution du sein reconstruit, il est relativement rare que l’aréole reconstruite par greffe soit exactement de la bonne taille et à la bonne position. Bien souvent, je suis contraint de réaliser un tatouage légèrement plus petit ou plus grand que la greffe de peau, et de modi- fier la position ou la forme pour l’adapter au mieux à l’aréole controlatérale. En trichant, on améliore la symétrie entre les 2 PAM, mais on met en évidence des cicatrices supplémentaires (une partie de la greffe qui n’est pas tatouée, par exemple).

Lorsque la projection du mamelon est insuffisante, on s’attachera à accentuer son ombre, ce qui permet de créer une fausse projection en trompe-l’œil.

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Pathologies aréolaires et mamelonnaires

Figure 3. Tatouage de la PAM sans reconstruction chirurgicale, mais avec effet trompe-l’œil.

Patiente ayant bénéficié seulement d’une reconstruction de mamelon (lambeau ou greffe)

Le mamelon seul apporte le volume, il ne reste qu’à dessiner la position, la taille et la forme de l’aréole et à choisir la couleur. Le mamelon est tatoué d’une teinte plus foncée et, le cas échéant, on renforce également sa projection en accentuant l’ombrage.

Patiente n’ayant encore bénéficié d’aucune reconstruction, ni d’aréole ni de mamelon (ou ne le souhaitant pas) Le tatouage est le plus complet. Il comprend le rem- plissage de l’aréole avec des irrégularités mimant les glandes de Montgomery et le mamelon, si pos- sible en 3D, permettant de tromper l’observateur qui regarde de face (figure 3).

Conclusion

L’objectif de la reconstruction de PAM est de res- taurer une symétrie de taille, de position, de couleur et de texture, et une projection mamelonnaire satis- faisante à long terme. Généralement, un seul temps opératoire est suffisant pour répondre à ce cahier des charges, à l’exception de la couleur.

La reconstruction de PAM doit être réalisée en fin de processus. Même s’il est possible, dans certains cas, d’associer ce geste à une plastie controlatérale de symétrisation, il est plus raisonnable de retarder ce geste de 3 à 6 mois, après toute modification chirurgicale importante du sein reconstruit ou controlatéral. Ce délai permet une diminution quasi complète de l’œdème postopératoire. Une recons- truction trop précoce peut aboutir à un résultat asymétrique de la position (14).

La reconstruction de PAM est réalisée seule, ou associée à une ou plusieurs procédures mineures de correction : injection de graisse, reprise de cicatrice.

En reconstruction unilatérale, la PAM contro- latérale sert de patron, toutes ses caractéristiques seront scrupuleusement étudiées et associées aux désirs de la patiente pour proposer la reconstruction personnalisée optimale :

si la patiente présente une importante hyper- trophie mamelonnaire controlatérale, il est justifié de lui proposer cette solution pour le mamelon, en lui expliquant les risques et les séquelles attendues, car le résultat de cette technique sera le meilleur en matière de projection et de texture ;

dans les autres cas, on réalisera une reconstruc- tion du mamelon par lambeau local (par exemple, star flap). Celui-ci pourra, éventuellement, être armé secondairement par une greffe de cartilage ou injecté avec de la graisse (surtout dans les cas de reconstruction du sein par prothèse, car le tégument fin n’a pas permis de restaurer un volume convenable) ;

la reconstruction aréolaire peut garder un intérêt en reconstruction unilatérale pour symétriser les textures, bien que la morbidité du site donneur soit loin d’être négligeable ;

le tatouage est un atout indispensable, tant pour l’aréole que pour le mamelon (couleur et illusion de projection) [figure 4].

En reconstruction bilatérale, il n’y a pas de modèle à respecter. Aucune référence ne permet à l’œil de l’observateur d’objectiver la moindre diffé- rence si les 2 aréoles sont reconstruites en même temps et de la même manière. Ainsi, la greffe de peau pour reconstruire l’aréole devient inutile, voire nuisible. Tout d’abord, la prise de greffe n’est souvent pas identique des 2 côtés : les greffes sont rarement complètement symétriques en taille et en position.

Par ailleurs, le prélèvement concomitant sur les 2 sillons inguinocruraux est relativement invalidant, et les suites souvent compliquées. Pour toutes ces raisons, en reconstruction bilatérale, une double

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Figure 4. Reconstruction unilatérale du sein par lambeau de grand dorsal et injection de graisse. Reconstruction du mamelon par star flap et de l’aréole par greffe de peau.

Un an après la reconstruction chirurgicale de la PAM, on peut voir l’absence totale de coloration. Tatouage ultérieur de la PAM.

Figure 5. Reconstruction bilatérale composite des seins.

Reconstruction bilatérale de mamelons par lambeau star flap, puis tatouage de l’aréole avec renforcement de la projection.

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Pathologies aréolaires et mamelonnaires

reconstruction de mamelon par lambeau, suivie d’un tatouage comprenant aréole et mamelon paraît être une solution optimale (figure 5, p. 41).

Pour les femmes ne désirant plus subir d’inter- vention chirurgicale, un tatouage seul reste une solution tout à fait acceptable qu’il faut proposer.

En effet, quel que soit le niveau esthétique de la reconstruction, l’absence de reconstruction de l’aréole ou une reconstruction sans couleur pro- voquent un refus, par la patiente, de considérer

cette reconstruction comme un sein. Remettre de la couleur sur l’aréole, c’est finaliser tout le travail effectué et permettre aux patientes de tourner la page.

S’il est clair que la reconstruction chirurgi- cale du mamelon améliore la satisfaction des femmes concernant la qualité esthétique de leur reconstruction, il n’en est pas de même pour la reconstruction chirurgicale de l’aréole comparée

au tatouage seul.

J. Rausky déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec cet article.

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