• Aucun résultat trouvé

Reconstruction de l'aisselle après traitement pour cancer du sein

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Reconstruction de l'aisselle après traitement pour cancer du sein"

Copied!
5
0
0

Texte intégral

(1)

DOSSIER

Prise en charge de l’aisselle

Figure 1. Lympho-IRM préopératoire : pas de drainage axillaire.

Reconstruction de l’aisselle après traitement

pour cancer du sein

Lymphatic reconstruction after treatment of breast cancer

C. Becker*

* Clinique Hartmann, Neuilly-sur- Seine ; Hôpital américain, Neuilly - sur -Seine ; hôpital européen Georges-Pompidou, Paris.

M

algré les nouvelles techniques, la chirurgie carcinologique du sein peut conduire à un lymphœdème très invalidant pour les patientes, à des douleurs, voire à une paralysie et des infections chroniques, lesquels s’ajoutent à la déformation du sein.

Après curage ou radiothérapie du creux axillaire, le drainage lymphatique du bras peut être terriblement fragilisé. Il est parfois possible de stabiliser l’œdème, par la physiothérapie, mais jamais de le guérir. Il est maintenant envisageable de réaliser des recons- tructions du creux axillaire par transfert ganglion- naire avec des tissus autologues (1). Les résultats esthétiques et fonctionnels sont excellents (2). Les patientes atteintes de cette pathologie doivent être informées qu’une solution chirurgicale peut amé- liorer leur vie, voire les guérir.

Les complications de cette chirurgie sont très minimes quand elle est réalisée par des mains expérimentées, mais cette condition est essentielle.

Une collaboration pluridisciplinaire permet de bien sélectionner les patientes susceptibles de bénéficier d’une chirurgie de reconstruction de la région axillaire.

Indications

La douleur, les infections chroniques et la dégrada- tion continuelle du lymphœdème malgré une physio- thérapie bien conduite sont les indications majeures des transferts ganglionnaires. Même les éléphantiasis peuvent bénéficier de cette intervention.

Pour rappel, les stades de lymphœdème vont de 1 à 4, en fonction de la fibrose, du nombre d’infections, de la transformation de la graisse et de la peau qui deviennent de plus en plus dures et rouges, à la suite de la destruction des canaux lymphatiques et des plexo- pathies associées. Les formes modérées et sévères, de grade 2 à 3, conduisent à une augmentation de 20 à

50 % du volume du bras touché par rapport à l’autre, avec des dégradations cutanées modérées.

Bilan préopératoire

Un bilan du système lymphatique inférieur doit être réalisé avant toute prise de décision thérapeutique (interrogatoire, lympho-IRM, lymphangiographie et angioscanner).

La lympho-IRM permet de mettre en évidence les voies de drainage axillaire superficielles ou pro- fondes. Le physiothérapeute peut les emprunter pour drainer la lymphe. Cependant, dans certains cas, il n’existe plus de voie de drainage (figure 1).

Dès lors, on peut reconstruire le creux axillaire grâce à un lambeau graisseux libre contenant quelques ganglions.

(2)

Figure 2. Prélèvement inguinal des ganglions de l’artère circonflexe iliaque superficielle.

ganglionnaire

Highlights

»The lymphatic reconstruction is a microsurgical technique for treatment of lymphedema.

»Pain, recurrent infections and irreversible lymphedema after decongestive physiotherapy are the main indications for lymph node transfer.

»A multidisciplinary collabora- tion allows to choose patients likely to benefit from axillary lymphatic reconstruction.

Keywords

Lymphedema Axillary pain Infections

Lymph node transfer En cas de paralysie ou de parésie, un électro-

myogramme doit également être demandé.

L’indication d’autogreffe ganglionnaire doit être donnée lors d’une réunion multidisciplinaire. Il est nécessaire de choisir la technique chirurgicale la plus adéquate. La contre-indication à cette chirurgie est un système lymphatique inférieur insuffisant.

Technique chirurgicale

Reconstruction par lambeau libre ganglionnaire

Il s’agit d’une chirurgie délicate qui demande de bonnes connaissances anatomiques, une expé- rience en microchirurgie et une dextérité en levée du lambeau. Le véritable problème est de trouver un site donneur de ganglions lymphatiques avec une vascularisation (une artère et une veine), sans pré- judice pour la malade.

Cette intervention dure environ 2 heures lors- qu’elle est réalisée par un chirurgien expérimenté (courbe d’apprentissage longue) et nécessite 2 jours maximum d’hospitalisation.

Au niveau thoracique

L’incision reprend les anciennes cicatrices du curage et/ou de la mastectomie, si une reconstruction du sein est envisagée. Régulièrement, on observe une compression de la veine axillaire par une gangue fibreuse et pouvant correspondre à un ancien lymphocèle. La dissection peut être très difficile en raison de la fibrose post-radique. Par ailleurs, des névromes des nerfs thoraciques peuvent être observés et seront traités. Le défilé thoracobrachial est libéré de manière à délivrer de leur carcan cica- triciel les nerfs et les vaisseaux qui, dès lors, sont décomprimés. Des perforantes artérielles et vei- neuses sont préparées pour les microanastomoses vasculaires.

Au niveau abdominal

Le lambeau choisi est un lambeau modifié de Mac Gregor, combiné à un DIEP (Deep Inferior Epigastric Perforator), en cas de reconstruction mammaire.

Un lambeau cutanéograisseux est prélevé dans la crête iliaque. Il contient des ganglions irrigués par l’artère circonflexe iliaque superficielle et par une branche de l’artère épigastrique superficielle infé- rieure. Ce lambeau ressemble fort au lambeau décrit il y a de multiples années par Mac Gregor. Il doit se dessiner au-dessus du ligament inguinal (figure 2), et rester superficiel pour ne pas inclure les ganglions inguinaux profonds, ni ceux de la jambe.

Notre technique utilise le groupe ganglionnaire du territoire circonflexe iliaque superficiel : ce ter- ritoire reçoit la lymphe de la paroi abdominale et n’intervient pas dans le drainage lymphatique du membre inférieur. Une dissection sous-cutanée de la région graisseuse en regard de l’épine iliaque est réalisée et l’artère circonflexe iliaque superficielle préparée (3).

Les vaisseaux épigastriques alimentent, par le biais de plusieurs artères perforantes, une quantité importante de peau et de graisse située sur tout l’abdomen sous l’ombilic (4). Il est dès lors possible d’augmenter la palette graisseuse pour entourer le plexus brachial et refaire la paroi thoracique et le sein.

(3)

Reconstruction de l’aisselle après traitement pour cancer du sein

DOSSIER

Prise en charge de l’aisselle

Figure 3. Lambeau libre fasciograisseux contenant quelques ganglions.

Transfert du lambeau

Le lambeau est transposé dans la région axillaire et les anastomoses sont faites sous microscope (figure 3).

L’apport cutané n’est en général pas nécessaire, sauf si la peau est brûlée ou si l’on reconstruit le sein.

Dans ce cas, les anasto moses sont également, parfois, réalisées sur les vaisseaux mammaires internes.

Ce lambeau peut être branché sur le pédicule du grand dorsal ou du lambeau pédicule perforateur de l’artère thoracodorsale (TDAP) [même pédicule que le grand dorsal sans muscle].

Il est possible de réaliser une reconstruction du sein par lambeau perforant abdominal (DIEP) et d’y inclure le groupe ganglionnaire abdominal. Dans ce cas, le lambeau dépend des vaisseaux épigastriques inférieurs. Les anastomoses vasculaires sont réalisées en général sur les vaisseaux mammaires internes ; les ganglions sont placés dans la région axillaire. Lors de la préparation des vaisseaux receveurs, on veillera à bien enlever la fibrose qui peut enserrer, comme une cravate, le plexus et comprimer le retour veineux (5).

Dans quelques cas, l’autogreffe ganglionnaire est implantée sur le pédicule thoracodorsal.

Période postopératoire

Elle se fait sans complication majeure. Une lymph- orrhée peut survenir chez 30 % des patientes, mais une gaine compressive est mise à l’ablation du drain et permet de diminuer nettement cette complication.

Les problèmes d’infection post opératoire, de cica- trices déhiscentes et d’hématomes sont rares (3 % des cas). Il n’est pas observé d’œdème du site donneur.

Dérivations lymphoveineuses

Les dérivations lymphoveineuses ne peuvent avoir de résultats locaux que lorsque les canaux lymph- atiques sont de bonne qualité et qu’ils possèdent encore leurs valvules. Cela n’est donc réservé qu’aux lymphœdèmes débutants de grade 1.

De petites incisions sur le bras permettent de repérer les canaux lymphatiques superficiels (par injection d’indocyanine), et on les déroute sur des veinules.

Ces canaux sont extrêmement fins et ne sont indi- vidualisables que dans les formes débutantes non fibrosées des lymphœdèmes.

Les dérivations lymphoveineuses préventives lors de l’adénectomie ne sont pas à recommander, car la radiothérapie postopératoire peut brûler ces anas- tomoses (6).

Lipoaspiration

Cette technique détruit tout le tissu adipeux entre la peau et le muscle.

Une destruction partielle permet d’enlever les dépôts graisseux liés à l’ancienneté du lymphœ dème. Elle est souvent couplée à une greffe ganglionnaire.

Elle est indiquée dans les résidus de dépôts lipidiques localisés.

Une lipoaspiration complète fonctionne dans les lymphœdèmes “gras”, mais impose, à vie, nuit et jour, une contention 4 x 2 ; elle est réalisée en Suède, pays froid et dont les habitants sont disciplinés… (7).

Dermolipectomies

Cette technique, qui permet de retirer des excès de peau et de réaliser d’énormes décollements, est réservée aux éléphantiasis. Malheureusement, même en France, ces cas existent encore… Elle peut être combinée aux greffes ganglionnaires.

Résultats observés après reconstruction

par lambeau libre ganglionnaire

Repousse des canaux lymphatiques

Les résultats s’observent sur plusieurs mois, le temps que les canaux lymphatiques repoussent grâce à la sécrétion de VEGF-C (Vascular Endothelial

(4)

Figure 4. Lympho-IRM 1 an après la greffe ganglion- naire : rétablissement d’un drainage axillaire (même patienteavant traitement : voir figure 1.

A B

Figure 5. A. Lymphœdème apparu 1 an après la mastectomie, la radiothérapie et la chimiothérapie, chez une femme de 46 ans. Malgré la reconstruction par lambeau du grand dorsal, le lymphœdème s’est dégradé. B. Résultat 1 an après la reconstruction du creux axillaire par lambeau ganglionnaire.

ganglions et la graisse autour (8).

Les études expérimentales démontrent que les ganglions lymphatiques transplantés reprennent une architecture normale. Le tissu lymphoïde présent dans les ganglions lymphatiques transplantés pré- vient l’infection, mais réduit aussi le gonflement du membre supérieur.

La lympho-IRM remplace actuellement la lympho- scintigraphie, offrant des informations extrêmement précises quant à la formation des canaux lymph- atiques sans nécessité d’injection de produit radio- actif. Elle permet d’évaluer le drainage, la repousse ganglionnaire, l’épaisseur de la peau avant et après, le dermal backflow (diffusion intradermique) ainsi que la quantité d’eau contenue dans la graisse, et de les quantifier précisément (figure 4). Cela permet donc d’évaluer objectivement le résultat de la chirurgie, et d’adapter la direction des drainages lymphatiques vers les petits canaux lymphatiques néoformés. Cet examen est réalisé à 1 an après la chirurgie.

Diminution du lymphœdème

Une kinésithérapie postopératoire adaptée, réalisée par une équipe spécialisée, formée et sensibilisée est primordiale. Elle permet d’acheminer la lymphe vers les ganglions transplantés et d’améliorer les résultats cliniques.

et perd de son volume. Dans 75 % des cas, on observe une réduction de 2 cm en moyenne du périmètre du bras par mois, avec une normalisation du bras dans les 2 ans pour les œdèmes modérés figure 5. Les autres cas sont tous améliorés.

La physiothérapie peut être complètement arrêtée dans 80 % des lymphœdèmes modérés ; elle est fortement diminuée pour les autres.

Les vieux lymphœdèmes peuvent se transformer en lipœdèmes et bénéficier d’une petite liposculpture externe à la face postérieure du bras et près de l’épi- condyle après 1 an.

Diminution des douleurs

Lorsque l’œdème régresse, la symptomatologie de la périarthrite scapulohumérale diminue et permet de réduire la prise d’antalgiques.

Dans les plexites radiques, les douleurs s’amendent dans 90 % des cas (3). C’est probablement un autre intérêt majeur de cette opération (9).

Dans certaines paralysies partielles, des transferts tendineux peuvent être envisagés pour permettre certains mouvements de la vie courante.

(5)

Reconstruction de l’aisselle après traitement pour cancer du sein

DOSSIER

Prise en charge de l’aisselle

Les douleurs névromateuses observées après adé- nectomie disparaissent dans 98 % des cas après neurolyse du névrome réalisée lors de la mise en place du lambeau lymphograisseux.

Diminution des infections

Le taux d’infection décroît sans antibiothérapie préventive jusqu’à 5 % seulement, tous stades confondus (10).

Les érysipèles chroniques disparaissent complète- ment dans 2 tiers des cas ; ils sont réduits dans tous les autres cas.

Conclusion

L’autotransplantation des ganglions lymphatiques pour traitement du lymphœdème est une technique microchirurgicale qui est effectuée depuis plus de 20 ans, et d’une manière courante actuellement dans le monde. Il n’existe plus de congrès de chirurgie plastique ne comportant aucun volet consacré au traitement chirurgical des lym ph œ dèmes.

Le lambeau libre fasciograisseux de reconstruction du creux axillaire, combiné ou non avec un lambeau de reconstruction du sein, permet d’améliorer le lymphœdème dans 98 % des cas, voire de le guérir dans les cas modérés (lorsque la fibrose ne s’est pas trop installée). La morbidité de cette intervention est minime. La sélection des patients est très importante et l’indication doit être validée en consultation pluri- disciplinaire. Le chirurgien devra choisir la technique la plus adéquate.

Ces interventions demandent une expertise impor- tante ; la tentation des microchirurgiens d’essayer cette technique est grande et conduit à certains écueils pouvant causer à tort une méfiance. Ces techniques sont encore réservées en France à des centres spécialisés, mais seront amenées à être dif- fusées dans les prochaines années. Des formations se mettent en place.

La douleur, les infections chroniques et la dégra- dation continuelle du lymphœdème, malgré une physiothérapie bien conduite, sont les indications majeures des transferts ganglionnaires.

L’information des patientes est, en général, très insuffisante, alors que l’on peut aider énormément

cette population. ■

L’auteur n’a pas précisé ses éventuels liens d’intérêts.

1. Becker C, Hidden G, Maurage H, Leduc O, Coget JM. Les affections vasculaires. Transferts lymphatiques libres-Traité de chirurgie de la main (Tubiana), affections rhumatis- males, affections vasculaires, “unguéales” et tumorales.

Masson 1995;5:147-51.

2. Assouad J, Becker C, Riquet M. Treatment of lympho- edema combined with reconstruction of the breast. Eur J Lymphology 2001;9:34.

3. Bourgeois P, Munck D, Becker C. A three phase lympho- scintigraphic investigation protocol for evaluation of lower limb oedema. Eur J Lymphology 1997;6:21.

4. Allen RJ, Treece P. Deep inferior epigastric perforator flap for breast reconstruction. Ann Plast Surg 1994;32(1):32-8.

5. Saaristo AM, Niemi TS, Viitanen TP et al. Microvas- cular breast reconstruction and lymph node transfer for postmastectomy lymphedema patients. Ann Surg 2012;255(3):468-73.

6. Campisi C, Boccardo F. Microsurgical techniques for lymphedema treatment: derivative lymphatic-venous microsurgery. World J Surg 2004;28(6):609-13.

7. Brorson H, Höijer P. Standardised measurements used to order compression garments can be used to calculate arm volumes to evaluate lymphoedema treatment. J Plastic Surgery Hand Surg 2012;46(6):410-5.

8. Tammela T , Saaristo A, Holopainen T et al. Therapeutic differentiation and maturation of lymphatic vessels after lymph node dissection and transplantation. Nat Med 2007;13(12):1458-66.

9. Becker C, Pham DN, Assouad J et al. Postmastectomy neuropathic pain: results of microsurgical lymph nodes transplantation. Breast 2008;17(5):472-6.

10. Becker C, Assouad J, Riquet M, Hidden G. Postmas- tectomy lymphedema: long-term results following microsurgical lymph node transplantation. Ann Surg 2006;243(3):313-5.

Références bibliographiques

Références

Documents relatifs

The fundamental objective of this conceptual design is to show through simplified engineering analysis that a nuclear reactor can be used to propel a modem day

Pour garantir une qualité de soins optimale, ces établissements doivent se médicaliser et c’est dans ce contexte que les Établissements d’Hébergement

Au cours du premier essai, le nombre de leucocytes et celui de lymphocytes étaient plus élevés chez les poissons ayant reçu la supplémentation en lysozyme (1000ppm)

Dans certains cas, cette accumulation est un trompe-l’œil et illustre un luxe fictif, à usage strictement funéraire (ce qui peut apparaître comme le degré ultime de la mise en

category attributes F4 Extract requirements from uploaded applicable documents F6 Identify contradictions F7 Identify redundancies F8 Identify infringed best practices F9

- une prise en charge médicamenteuse plus performante quand sont associés, notamment dans le cadre du développement de la pharmacie clinique, à la conciliation

par lambeau tarsoconjonctival de Köllner-Hughes avaient un défect palpébral après l’exérèse tumorale de l’ordre de 72 % [1] et ont développé plus d’érythème du bord