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Biopathologie moléculaire des cancers de la prostate résistants à la castration

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Correspondances en Onco-Urologie - Vol. VII - n° 2 - avril-mai-juin 2016 108

44

44 40

12 44

28 4 12 8

Fusion impliquant des gènes ETS Mutations RA Délétion de PTEN Délétion de TP53

Délétion de RB1 Délétion de BRCA2 Mutation de PIK3CA Mutation d’ATM Gain de MYC Figure 1. Altérations moléculaires fréquentes (%) dans les cancers de la prostate résistants à la castration (5).

d o s s i e r

Génomique dans les tumeurs urologiques

Biopathologie moléculaire des cancers de la prostate résistants à la castration

Molecular biopathology of castrate-resistant prostate cancers

O. Cussenot* , **, G. Fromont* , ***

* Centre de recherche sur les pathologies prostatiques et urologiques (CeRePP), Paris.

** Service d’urologie, hôpitaux de l’Est parisien,

site Tenon, Paris.

*** Service d’anatomopathologie,

CHU de Tours.

L

es cancers de la prostate résistants à la castration (CPRC) constituent une phase préoccupante de la maladie, car ils présentent un risque d’évo- lution fatale à court terme, avec une médiane de survie de 2 ans (1) . Le CPRC se définit par une progression biologique (cinétique du taux de PSA) ou radioclinique alors que le taux de testostérone circulant équivaut au taux de castration . Ce dernier est fixé à 50 ng/ ml de testostérone totale, ce qui correspond au seuil d’effica- cité retenu pour une castration médicale par analogue de la LHRH (2) .

Diff érents mécanismes d’échappement

Les mécanismes qui déterminent l’échappement à la castration médicale sont multiples (figure 1) [3-5] , mais ils peuvent être classés en grandes entités biologiques et moléculaires selon que l’activité du récepteur des andro- gènes (RA) persiste ou non [figure 2] . Le RA activé par son ligand physiologique, la dihydrotestostérone (DHT), est transloqué dans le noyau cellulaire et se fixe sur les séquences régulatrices ( Androgen Response Element [ARE]) de ses gènes cibles pour induire leur transcription (comme le gène du PSA ou de TMPRSS2) ou la réprimer (comme les gènes PSMA ou SOX2). Ainsi, à partir de ces gènes cibles, des signatures transcriptomiques de l’activité du RA ont été établies (6) . Dans sa fonction biologique normale, le RA est exprimé au niveau des cellules glandulaires luminales sécrétoires (et non au niveau de la couche basale) et assure au niveau de ces cellules luminales les fonctions physiologiques de diffé- renciation en phénotype sécrétoire (PSA, TMPRSS2, etc.), de blocage de l’apoptose (voie TGF β / Smad) [7, 8] , et de blocage du cycle cellulaire (voie TCF4/ p27) [9] . Pour mémoire (figure 3) , les réarrangements de type gènes de fusion TMPRSS2-ETS (ERG/ETV1, ETV4), fré- quents dans la carcinogenèse prostatique, transforment l’activité du RA en activité oncogénique en déverrouil- lant le cycle cellulaire et en activant les voies d’invasion (motilité), avec un maintien des autres fonctions : inhi- bition de l’apoptose et différenciation luminale avec sécrétion du PSA.

»

Les altérations moléculaires sont multiples.

»

Il existe 2 grands mécanismes, identifi ables par des signatures géno- miques, selon que l’activité biologique du récepteur des androgènes persiste ou non.

Mots-clés : Prostate − Cancer − Pathologie moléculaire − Androgène − Castration − Neuroendocrine.

Molecular alterations are various and complex.

Two main mechanisms are identifi ed by genomic signatures, according to whether the biological activity of the androgen receptor persists.

Keywords: Prostate − Cancer − Molecular pathology − Androgen − Castration − Neuroendocrine.

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Correspondances en Onco-Urologie - Vol. VII - n° 2 - avril-mai-juin 2016 109 Expression RA+ (PSA+)

Liaison d’androgènes résiduels (synthèse in situ ou surrénalienne) ou de ligands inhabituels (ex. : cortisol) du RA

RA activé spontanément en l’absence de ligand Indépendant du RA

Dépendant du RA Ligand dépendant

Ligand indépendant

Ligand spécifique résiduel RA hypersensible Amplification du RA Stabilisation du RA Mutation du domaine

de liaison du RA Récepteur tronqué par mutation ou variant d’épissage

Dédifférenciation  stem cell like  Transdifférenciation neuroendocrine

Phosphorylation du récepteur Ligand aberrant

Sécrétoire Non sécrétoire

(stem cell like) RA– (PSA–)

Dépendant du RA Neuroendrocrine

(expression CGA/NSE+) Tumeurs mixtes

CGA : chromogranine A ; NSE : neurone spécifique énolase.

Prostate non tumorale

Différenciation luminale Expression de PSA, TMPRSS2, etc.

Blocage de l’apoptose TGFβ/Smad

Arrêt du cycle cellulaire TCF4/p27

DHT/ligand

RA

Récepteur des androgènes

ARE

Androgen Response Elements des gènes cibles de RA

Adénocarcinome prostatique Différenciation luminale Expression de PSA, TMPRSS2, etc.

Blocage de l’apoptose TGFβ/Smad

ARE-ETS (par exemple, TMPRSS2-ERG) Gènes de fusion régulés par les androgènes

Prolifération Invasion

Figure 2. Classifi cation pathobiologique et moléculaire des mécanismes d’échappement à la castration des cancers de la prostate.

Figure 3 . Coopération oncogénique du RA et des fusions impliquant des gènes ETS.

Biopathologie moléculaire des cancers de la prostate résistants à la castration

Activité persistante du RA

Après une première ligne de castration, la majorité (> 80 %) des CPRC ont une activité persistante du RA dépendante ou indépendante du ligand (10) . L’activité dépendante du ligand est déterminée soit par une hypersensibilité du RA pour un taux intra tissulaire

résiduel de DHT résiduelle (pour une diminution de 95 % du taux circulant de testostérone, le taux tissu- laire intraprostatique ne baisse que de 60 %), soit par un élargissement du spectre des ligands susceptibles de se fixer à son domaine de liaison (corticoïdes, voire antiandrogènes non stéroïdiens lors du syndrome de retrait) suite à des mutations touchant le domaine

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Correspondances en Onco-Urologie - Vol. VII - n° 2 - avril-mai-juin 2016 110

HMG-CoA AMACR

Squalène Cholestérol

SQLE

SRD5A1 SRD5A2

Testostérone Androstènedione Pregnénolone

Dihydrotestostérone

AMACR : alpha-méthylacyl-CoA racémase ; AKR1C3 : aldo-keto reductase family 1, member C3 ; SQLE : squalene epoxidase ; CYP17 : cytochrome P-450 17alpha-hydroxylase/C17,20-lyase ; SRD5A 1 et 2 : steroid 5 alpha-reductase 1 et 2.

AKR1C3 CYP17

Récepteur des androgènes

Expression de AKR1C3 Expression de la chromogranine A (transdifférenciation neuroendocrine)

Expression de 5-alpha réductase de type 2 Expression du récepteur des androgènes phosphorylés (Ser210)

A B

C D

Figure 4. Enzymes clés de la synthèse des androgènes surexprimées dans les cancers de la prostate résistants à la castration.

Figure 5 . Transdiff érenciation des cancers résistants à la castration.

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Génomique dans les tumeurs urologiques

de liaison du RA. Il peut en effet persister des andro- gènes capables d’activer le RA soit parce que le taux de testostérone n’est pas abaissé de façon optimale par le blocage hypothalamohypophysaire, soit en raison de la synthèse des androgènes d’origine surrénalienne.

En effet, le seuil limite fixé à 50 ng/ ml de testostérone totale peut être suffisant pour activer un récepteur hypersensible. Le taux de 20 ng/ ml est préférable en termes de pronostic, comme l’ont montré plusieurs études (11) . Une testostérone biodisponible indosable serait le reflet d’une castration optimale.

La tumeur et son microenvironnement ont aussi la capa- cité et surexpriment les enzymes clés de la stéroïdo- genèse à partir de précurseurs du cholestérol et de la DHT (figures 4 et 5) [12] . Sur le plan mécanistique, cette situation est la meilleure cible des nouveaux

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Cellule luminale/sécrétoire CK18+ ; PSA+ ; AR+

ALDH1 : aldéhyde déshydrogénase 1 ; CGA : chromogranine A ; CK : cytokératine ; EZH2 : enhancer of zeste 2 Polycomb Repressive Complex 2 subunit ; Myc : V-Myc avian myelocytomatosis viral oncogene homolog ; PTEN : phosphatase and tensin homolog ; REST : repressor element-1 silencing transcription factor ; SOX2 : sex determining region Y-Box 2.

REST– Myc+

PTEN–

EZH2+ CDH1–

Cellule neuroendocrine CGA+

 Cellule stem like SOX2+ ; ALDH1+

Cellule basale CK5/14+ ; p63+

CD44+ ; CD133+

Figure 6. Récapitulation schématique de la diff érenciation glandulaire prostatique et perte de la diff éren- ciation lors des mécanismes de résistance à la castration.

O. Cussenot déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec cet article.

G. Fromont n’a pas précisé ses éventuels liens d’intérêts.

Biopathologie moléculaire des cancers de la prostate résistants à la castration

anti androgènes (acétate d’abiratérone ou enzaluta- mide). Le RA peut également rester actif pour ces gènes cibles indépendamment de ses ligands, par différents mécanismes (figure 1) directs − mutation activatrice par formation d’un récepteur tronqué ou amplifié (10) , variant d’épissage comme ARV-7 ou ARV-8 (13) , phos- phorylation du RA (voie des récepteurs de tyrosine kinase ou PTEN/ PI3K/ AKT ; facteurs de croissance EGFR ou cytokines IL-6) [figure 5D], absence de dégradation du RA (mutation de SPOP) [14] − ou indirects (amplifi- cation de coactivateurs ou inhibition de corépresseurs du récepteur) [15] .

Activité réduite ou inexistante du RA

Après la première ligne de castration, une minorité (< 20 %) des CPRC ont une activité réduite ou inexis- tante du RA (absence de signature transcriptionnelle du RA, faible expression du PSA par rapport au volume tumoral ). Cette situation s’observe plus souvent en deuxième ligne d’échappement aux antiandrogènes de nouvelle génération. Dans ce cas, les tumeurs sont dédiffé renciées (profil génomique de transition épithé- lial /mésenchyme : EMT et type stem-like , impliquant la voie Wnt/ β -caténine) [16-18] ou transdifférenciées (expression de marqueurs neuro endocriniens tels que la chromo granine A) [figure 5C] (19) . Ces modalités d’échappement biologique à la déplétion andro génique inversent les voies de différenciation cellulaire de la morphogenèse prostatique (figure 6) , en impliquant certains gènes clés comme la dérégulation épigéné- tique d’EZH2 (Polycomb Group Protein) , les amplifica- tions de c-Myc ou de SOX2 et les délétions de PTEN.

Conclusion

À ce jour, et à ce stade de la maladie, les mutations clés spécifiques de molécules thérapeutiques dites ciblées, comme les inhibiteurs des récepteurs de tyrosine kinases, restent des exceptions dans l’histoire naturelle des CPRC. En dehors des approches d’immunothérapie, les altérations les plus pertinentes (10 % des CPRC) sont les altérations acquises des voies de réparation de l’ADN (défaut de réparation des recombinaisons homologues impliquant BRCA2, ATM, FANC), particulièrement sen- sibles à certains traitements comme le cisplatine ou les

inhibiteurs de PARP (20) . ■

R É F É R E N C E S

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