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Epigénétique de la semence bovine : analyse moléculaire de la qualité de la semence et impact potentiel sur le
développement embryonnaire
Jean-Philippe Perrier
To cite this version:
Jean-Philippe Perrier. Epigénétique de la semence bovine : analyse moléculaire de la qualité de la semence et impact potentiel sur le développement embryonnaire. Biologie animale. Université Paris Saclay (COmUE), 2017. Français. �NNT : 2017SACLA037�. �tel-02098254�
Epigénétique de la semence bovine : analyse moléculaire de la qualité de la semence et impact potentiel sur le développement embryonnaire
Thèse de doctorat de l'Université Paris-Saclay préparée à AgroParisTech (l’institut des sciences et industries du vivant et de l'environnement)
École doctorale n°581 Agriculture, Alimentation, Biologie, Environnement et Santé (ABIES) Spécialité de doctorat : Biologie de la reproduction
Thèse présentée et soutenue à Jouy-en-Josas, le 14 décembre 2017, par
Jean-Philippe Perrier
Composition du Jury :
Pr. Etienne Verrier
Professeur, AgroParisTech Président
Dr. Carole Charlier
Principal investigator, GIGA (Unité de Génomique Animale) Rapporteur Pr. Romain Barrès
Professeur associé, CBMR (Section for Integrative Physiology) Rapporteur Dr. Christophe Arnoult
Directeur de recherche, CNRS (Institut de Biosciences Avancées) Examinateur Dr. Hélène Jammes
Directeur de recherche, INRA (Biologie du Développement et Reproduction) Directeur de thèse Dr. Hélène Kiefer
Chargé de recherche, INRA (Biologie du Développement et Reproduction) Co-encadrant de thèse Dr. Laurent Schibler
Responsable Développement et Innovation, Allice Invité
NNT : 2017SACLA037
Remerciements
Près de 4 ans se sont écoulées depuis mon arrivée sur le centre INRA de Jouy-en- Josas, et en écrivant ces remerciements un grand nombre de souvenirs me viennent à l’esprit.
J’ai pu y rencontrer tant de gens, j’ai l’impression d’avoir tellement appris et grandi pendant cette période que je suis sûr de conserver ces moments en moi toute la vie.
Tout naturellement, mes premiers remerciements vont à mes encadrantes, Hélène Kiefer et Hélène Jammes. Je vous suis extrêmement reconnaissant, tout d’abord d’avoir accepté ma venue après vous avoir contacté pour mon stage de M2, puis de m’avoir fait confiance pour intégrer l’équipe en tant que doctorant sur le projet SeQuaMol. Vous Toutes 2 êtes toujours restées l’écoute, m’avez toujours guidé dans la bonne direction quand j’avais des hésitations, et m’avez laissé de l’autonomie pour mener ce projet La thèse m’aura apporté énormément de choses, autant sur le plan personnel que professionnel, et c’est à vous que je le dois. Hélène Kiefer, j’ai eu beaucoup de chance de t’avoir comme encadrante principale, notamment pour la rigueur scientifique dont tu fais toujours preuve et que j’espère pouvoir appliquer maintenant à mon tour. Félicitation pour la naissance de Joseph, qui sera certainement un petit scientifique en herbe. Hélène Jammes, malgré ton emploi du temps toujours très chargé tu as pu me consacrer de ton temps, et notamment pendant la rédaction et alors que les mauvaises nouvelles arrivaient l’une après l’autre, et que je commençais à me demander si j’allais vraiment y arriver. Merci beaucoup pour ton aide et tes avis précieux.
Je souhaite remercier l’ensemble de l’équipe ER5 avec qui j’ai eu la chance de travailler durant ces quelques années : les titulaires (les Hélènes, Anne, Audrey, Aurélie, Mélanie et Charline), ceux qui sont parti à la retraite (Evelyne, Michel), les thésards (Maxime, Sofiane, Polina, Sarah), et les étudiants (Chaneze, Laura, Mélanie, Justin). Je souhaite remercier en particulier Audrey, ma camarade de bureau. Les pauses tricot, les pauses thé, et tous les moments de rigolade qu’on a eu vont me manquer ! Avant de partir, je te laisserai mon pistolet Nerf, je suis sûr que tu en trouveras une nouvelle utilité. Je pense avoir beaucoup appris de toi également, surtout concernant la rigueur à avoir pour les manips, et pour ton sens de l’organisation particulièrement développé. Je te souhaite de t’épanouir dans ta nouvelle équipe.
Maxime et Sofiane, camarades de pauses cafés – clopes. Désolé de vous en avoir taxé autant, dorénavant c’est terminé car après une 112ème tentative, j’ai finalement réussi à arrêter ! Maxime, le pro de la bioinfo, je te souhaite une bonne continuation dans ta nouvelle voie. Bon courage à toi Sofiane, tu es l’un des derniers thésards de la BDR, soit endurant et représente bien l’unité.
Eli, depuis mon arrivée tu as toujours été là et pour moi tu fais partie de l’équipe : un grand merci à toi aussi. C’était toujours sympa de venir dans ton bureau pour discuter de tout et de rien, et pour tous ces moments de rigolade. J’ai beaucoup appris grâce à toi, mise à part peut- être niveau blague, qui a dû baisser à force d’entendre les tiennes. Bon courage pour ta thèse, et pense à moi si tu finis par monter une boite !
Aurélie, bienvenu à nouveau dans l’équipe. J’espère que je n’ai pas été un trop mauvais professeur de RRBS et de bioinfo, et surtout prend bien soin du robot !
Merci à la partie « souris et microcèbe » de l’ER5, Anne Mélanie et Charline, pour votre bonne humeur constante, et pour nous avoir laissé manger tous les gâteaux d’anniversaire de votre côté du labo. Charline, bienvenu à toi, j’espère que tu vas t’épanouir en BDR.
Merci à toutes les personnes d’Allice avec qui j’ai pu travailler, en particulier Laurent Schibler et Chrystelle le Danvic. Ça a été vraiment enrichissant de pouvoir participer aux réunions du projet, d’avoir un aperçu des autres aspects du projet SeQuaMol. Merci particulièrement à Laurent d’avoir pris sur son temps précieux pour me relire lors de la rédaction.
Un grand merci aux bio informaticiens de l’unité, Luc Jouneau et François Piumi. Luc, merci pour ta patience et pour avoir toujours été là pour répondre à mes questions et lorsque j’ai eu un pépin avec les analyses des données de RRBS. François, je te souhaite une bonne continuation dans ton nouveau labo.
Une pensée pour tous les étudiants que j’ai croisé au labo : Laura, Mélanie, Justin, Mikela, et particulièrement à Chaneze que j’ai encadré. Tu faisais de super pyro ! J’espère avoir été un bon encadrant et je te souhaite le meilleur pour la suite.
Je souhaite remercie L’équipe Doc’J, et en particulier, Tatiana sans qui le congrès annuel de 2016 n’aurait pas pu avoir lieu. Faire partie de Doc’J a été une très bonne expérience, et on a
passé de bonnes soirées, fait plein d’activité (comme les cafés entre étudiants, les ateliers pendant la journée portes-ouvertes…) et j’en garderai un bon souvenir.
Merci à tous les autres thésards que j’ai eu la chance de côtoyer : Matteo, Clara, Audrey, Sarah Valentino, Sarah Voisin, Polina et Mouna. Ça fait longtemps qu’on n’a pas pu se voir pour la plupart, chacun d’entre vous étant parti poursuivre sa carrière aux 4 coins du monde, mais ça a été un plaisir de vous rencontrer. Je ne désespère pas de vous croiser un jour au détour d’un congrès ! J’ai une pensée particulière pour Clara, avec qui je n’ai pas toujours été sympa, t’ayant posé beaucoup de lapins pour les pauses déjeuné…mais je suis certain que tu ne m’en veux pas car tu sais bien que j’ai une petite tête. Pour ta rédaction c’est la dernière ligne droite, mais n’ayant jamais vu quelqu’un d’aussi solide que toi je ne doute pas que tu vas t’en sortir brillamment.
Merci à Hala et Sara Fneich, vous avez apporté de la bonne humeur au labo et j’espère également avoir la chance de vous recroiser un jour.
Je souhaite également remercier toutes les autres personnes de la BDR que j’ai eu la chance de croiser, avec qui j’ai pu discuter et échanger. Chacun d’entre vous m’a apporté une petite chose, et c’est chacun d’entre vous qui faisait que j’étais de bonne humeur le matin en allant travailler. Merci en particulier à Céline, qui passait souvent me faire un coucou au bureau, et à Olivier Dubois pour avoir bien rigolé pendant les pauses clopes.
Merci aux membres du jury (Carole Charlier, Romain Barrès, Etienne Verrier et Christophe Arnoult), qui ont gentiment accepté de prendre de leur temps pour évaluer mon travail de thèse, et merci également aux membres de mon comité de thèse (Joël Drevet et Thomas Heams), qui m’ont suivi au cours de ces 3 années et qui m’ont toujours donné des conseils avisés.
Enfin, je souhaite remercier ma famille et surtout mes parents, qui ont toujours été là pour moi, qui m’ont toujours soutenu et à qui je dois absolument tout. Une pensée pour ma Sixtine, qui a su me pousser à donner le meilleur de moi-même, qui m’a supporté aussi alors que j’étais au bout du rouleau et que je ne devais pas être particulièrement agréable à vivre. A mes amis les Binious, ma seconde famille qui m’ont également soutenu et avec qui j’ai grandi, même pendant les moments difficiles qu’on a traversé ensemble. Je suis heureux d’avoir des amis comme vous.
Table des matières
Liste des abréviations ... 5
Table des illustrations ... 8
Introduction ... 12
Préambule ... 13
Chapitre I : La semence bovine, vecteur du patrimoine génétique paternel et produit à forte valeur ajoutée ... 15
1. Aspects biologiques : la voie mâle dans la reproduction ... 15
1.1. La structuration du testicule bovin ... 15
1.1.1. La différenciation des gonades fœtales ... 15
1.1.2. De la naissance à la puberté ... 17
1.2. La production des spermatozoïdes ... 18
1.2.1. La spermatocytogenèse ... 18
1.2.2. La spermiogenèse ... 19
1.2.3. La spermiation et la maturation des spermatozoïdes ... 20
1.3. La rencontre avec le gamète femelle et la génération d’un descendant ... 21
1.3.1. La fécondation ... 21
1.3.2. Le développement embryonnaire ... 22
2. Aspects biotechnologiques et économiques : production et diffusion de la semence bovine... 24
2.1. L’organisation de la filière ... 24
2.1.1. Trois siècles de développement de l’IA ... 24
2.1.2. Les avantages apportés par l’IA ... 25
2.1.3. La situation de la filière en France ... 26
2.2. La sélection des reproducteurs ... 27
2.2.1. Le testage sur descendance ... 27
2.2.2. La révolution génomique ... 28
2.2.3. L’évolution des pratiques ... 30
2.3. Les étapes de production de semence ... 31
2.3.1. La collecte et le conditionnement des éjaculats ... 31
2.3.2. La mise en place de l’IA ... 32
2.3.3. Aspects économiques ... 32
Chapitre II : Les enjeux de la fertilité mâle pour les filières bovines ... 33
1. Causes et conséquences de la baisse de fertilité des élevages ... 34
1.1. La baisse de fertilité est délétère pour les filières bovines ... 34
1.1.1. Observations ... 34
1.1.2. Conséquences organisationnelles et économiques ... 35
1.1.3. Estimation de la contribution des mâles à la baisse de la fertilité ... 36
1.2. Les causes de la baisse de fertilité mâle ... 38
1.2.1. Effets environnementaux sur la baisse de la fertilité mâle ... 38
1.2.2. Effets des traitements technologiques de la semence ... 39
1.2.3. Effets génétiques ... 40
1.2.4. Autres effets ... 41
2. Méthodes d’évaluation de la fertilité mâle ... 42
2.1. Analyses phénotypiques ... 42
2.1.1. Le spermogramme ... 42
2.1.2. Bull Breeding Soundness Evaluation ... 43
2.1.3. Analyses morphologiques des spermatozoïdes ... 44
2.1.4. Méthodes exploratoires ... 45
2.2. Données de terrain après IA ... 47
2.2.1. Taux de fécondation ... 47
2.2.2. Taux de non-retour ... 47
2.2.3. Taux de conception... 48
2.2.4. Fertilité et sub-fertilité ... 48
3. Les limites des méthodes d’évaluation de la fertilité mâle ... 49
3.1. Les analyses phénotypiques de la semence ne permettent pas de prédire la sub-fertilité . 49 3.2. Effets compensables et non-compensables ... 51
3.3. L’évaluation génétique ne permet pas de prédire la sub-fertilité ... 51
Chapitre III : L’épigénétique de la fertilité mâle ... 53
1. Les différentes marques épigénétiques ... 54
1.1. Les modifications post-traductionnelles des histones ... 54
1.2. Les ARN non-codants ... 55
1.3. La méthylation de l’ADN ... 57
1.3.1. Répartition génomique des sites CpG ... 58
1.3.2. Régulation de l’expression génique par la méthylation ... 59
1.3.3. La machinerie de la méthylation de l’ADN ... 61
1.3.4. Dialogue avec les autres marques épigénétiques ... 64
1.4. Rôles biologiques de la méthylation de l’ADN ... 65
1.4.1. Rôle structural et stabilité du génome ... 65
1.4.2. L’empreinte parentale ... 67
1.4.3. L’inactivation du chromosome X ... 67
1.4.4. Différenciation cellulaire et expression tissu-spécifique des gènes ... 68
1.4.5. Adaptation à des conditions environnementales ... 69
2. La reprogrammation épigénétique, un processus biologique fondamental pour la fertilité mâle 71 2.1. La reprogrammation dans la lignée germinale mâle ... 72
2.1.1. Déméthylation puis méthylation de novo dans les gonades fœtales ... 72
2.1.2. Remaniements épigénétiques après la naissance et dans la gonade adulte ... 75
2.2. La reprogrammation de l’épigénome embryonnaire ... 77
2.3. Effets multigénérationnels et transgénérationnels ... 80
3. Méthylation de l’ADN et infertilité mâle ... 81
3.1. Manipulations pharmacologiques et génétiques chez la souris ... 82
3.2. Troubles de la fertilité et de la spermatogenèse chez l’Homme en lien avec la méthylation de l’ADN ... 83
3.3. Altération épigénétique et fertilité bovine ... 86
Objectifs de la thèse ... 88
Méthodologie ... 91
1. Méthylation de l’ADN : quelle stratégie pour quel objectif ? ... 92
1.1. Les stratégies d’extraction de l’information de méthylation ... 94
1.1.1. L’utilisation d’enzymes de restriction ... 94
1.1.2. Les stratégies par affinité ... 94
1.1.3. La conversion de l’ADN au bisulfite de sodium ... 95
1.2. Les stratégies de révélation ... 96
1.2.1. Les méthodes basées sur la PCR ... 96
1.2.2. L’hybridation sur micropuce ... 98
1.2.3. Le séquençage à haut-débit ... 99
2. Choix des méthodes retenues pour notre étude ... 99
2.1. Le bisulfite-pyroséquençage ... 101
2.2. Le LUminometric Methylation Assay (LUMA) ... 102
2.3. Le Reduced Representation Bisulfite Sequencing (RRBS) ... 103
2.3.1. Optimisation du protocole par analyses in silico ... 103
2.3.2. La préparation des banques : ... 104
2.3.3. Le séquençage des banques ... 106
2.3.4. Le traitement bio-informatique des données ... 106
Résultats ... 111
Bull spermatozoa exhibit genome-wide DNA hypomethylation with both species peculiarities and conserved tissue-specific features ... 112
Identification de nouveaux biomarqueurs de la fertilité mâle dans le méthylome de la semence bovine : une analyse par RRBS ... 152
Introduction ... 153
Matériels et méthodes ... 155
A. Dispositif expérimental et collecte des échantillons ... 155
B. Extraction d’ADN génomique ... 156
C. Analyse de la méthylation de l’ADN par RRBS ... 157
D. Evaluation des apports de la double digestion enzymatique dans la description du méthylome ... 159
E. Validations de DMR par pyroséquençage ... 161
F. Intégration des données de génotypage aux données de méthylation ... 163
Résultats ... 164
A. Constitution des groupes de taureaux en fonction de leurs caractéristiques de fertilité 164 B. Bonne qualité des séquences de RRBS ... 165
C. La race influence de manière significative le taux de méthylation ... 166
D. Des différentiels de méthylation entre les catégories de fertilité sont mis en évidence pour les 2 races ... 167
E. Les DMC représentent de bons biomarqueurs de la fertilité ... 170
F. Répartition génomique des DMC identifiées ... 170
G. Identification des fonctions biologiques enrichies en gènes associés aux DMC/DMR identifiées ... 172
H. Validation des DMR par bisulfite-pyroséquençage ... 175
I. Intégration des données de SNP et de DMC ... 177
J. Intérêts d’utiliser une double digestion enzymatique HaeIII + MspI, pour construire une banque RRBS chez le bovin ... 178
a. Par analyse descriptive, il apparait que la double digestion permet d’identifier es CpG10 discriminant mieux les catégories Fertiles+ et Déviants. ... 179
b. La double digestion permet d’identifier un nombre plus important de DMC entre catégories de fertilité. ... 180
c. Annotation génomique des DMC[HaeIII + MspI]... 180
K. Mise en évidence d’un effet « âge » sur le méthylome spermatique - Correction des biomarqueurs de fertilité ... 183
Discussion ... 186
A. Le méthylome spermatique présente des variations importantes entre races ... 186
B. Des modifications du méthylome spermatique en fonction de la fertilité ciblent des processus biologiques variés ... 187
C. Impact fonctionnel des altérations du méthylome spermatique : conséquences pour la descendance ... 189
D. Le catalogue de DMC identifiées peut-il servir de base pour le développement d’un outil d’épigénotypage de la semence bovine ? ... 190
E. Effet de l’âge à la production de semence sur le méthylome spermatique ... 192
F. Nouvelle analyse du méthylome spermatique en fonction de la catégorie de fertilité en excluant les effets liés à l’âge à la production de la semence... 194
Discussion générale ... 197
Points technologiques critiques pour une fiabilité des biomarqueurs ... 198
Une limite de l’approche par RRBS : l’absence de données d’hydroxyméthylation ... 203
Hypométhylation de l’ADN spermatique bovin et compaction nucléaire ... 205
Des biomarqueurs révélateurs de la fertilité à l’éjaculat ... 207
Quelles sont les causes et les conséquences des différentiels de méthylation ? ... 209
Les causes ... 209
Les conséquences ... 212
Prise en compte de l’âge à la production de semence pour l’identification de biomarqueurs pertinents ... 215
Intégration des données épigénétiques et génétiques pour la compréhension du phénotype spermatique. ... 216
Considérations pour la mise au point d’un outil d’épigénotypage ... 217
Bibliographie ... 220
Annexes ... 239
Liste des abréviations
5caC : 5-carboxylcytosine 5fC : 5-formylcytosine
5hmC : 5-hydroxyméthylcytosine 5mC : 5-méthylcytosine
A : Adénine
ACP : Analyses en Composantes Principales ADN : Acide DésoxyriboNucléique
ADNsat : ADN satellite
AID/APOBEC : Activation-induced cytidine deaminase / Apolipoprotein B mRNA Editing Enzyme Catalytic ARN : Acide RiboNucléique
AMH : Anti-Müllerian Hormone AMP : Aide Médicale à la Procréation AMPc : Adénosine MonoPhosphate cyclique ANR : Agence National de la Recherche BBSE : Bull Breeding Soundness Evaluation BCS : Body Condition Score
BER : Base Excision Repair Bsp: Bisulfite Sequencing PCR C : Cytosine
CASA : Computer Assisted Semen Analyzer
CASMA : Computer Assisted Sperm Morphology Analyzer CGI : CpG Island
ChIP : Chromatin ImmunoPrecipitation CNV : Copy Number Variation CS : Circonférence Scrotale CTCF: CCCTC-Binding factor
CTIG : Centre de Traitement de l’Information Génétique CVM : Complex Vertebral Malformation
DAPI : 4,6-DiAmidino-2-PhenylIndole Dazl: Deleted in AZoospermia like Ddx4 : DEAD-Box Helicase 4
DMC : Differientally Methylated Cytosine DMR : Differentially Methylated Region DNMT: ADN MéthylTransférase
DOHaD: Developmental Origins of Health and Disease DSB: Double-Strand Break
EGA: Embryonic Genome Activation
ELISA: Enzyme-Linked ImmunoSorbent Assay EMP: Entreprise de Mise en Place
Emx2 : Empty Spiracles Homeobox 2 ERK: Extracellular signal-Regulated Kinase ES: Entreprise de Sélection
FGF: Fibroblast Growth Factor FIV: Fécondation In Vitro
FSH: Follicle-Stimulating Hormone G : Guanine
GnRH: Gonadotropin-Releasing Hormone GO: Gene Ontology
GTF: General Transfer Format
GWAS: Genome-Wide Association Studies HDAC: Histone Déacétylase
HDM: Histone DéMéthylase HH: Holstein Haplotype
HMT: Histone MéthylTransférase HRM : High Resolution Melting IA : Insémination Artificielle
IAP : Insémination Artificielle Première
IAP : Intra-cisternal A Particle
ICF : Immunodeficiency with Centromeric instability and Facial anomalies ICM : Inner Cell Mass
ICR: Imprinting Control Region ICSI: Intracytoplasmic Sperm Injection IDELE : Institut de l’Elevage
IGF : Insulin-like Growth Factor
INRA : Institut National de la Recherche Agronomique INSL3 : Insulin-like factor 3
IPE : Insémination Par l’Eleveur jpc : jours post-coïtum
KAT : Lysine AcétylTransférase KRuO4 : perruntenate de potassium QTL : Quantitative Trait Loci LAMB2 : Laminin Subunit Beta 2 LH : Luteinizing hormone LIF : Leukemia Inhibitory Factor LIM1 : LIM Homeobox 1
LINE : Long Interspersed Nuclear Element
LNCR: Laboratoire National de Contrôle des Reproducteurs lncRNA : long non-coding RNA
LTR : Long Terminal Repeat
LUMA : Luminometric Methylation Assay MAR: Matrix Attachment Region
MBD: Methyl-Binding-Domain MDA: Malondialdehyde
MeCP2: Methyl-CpG-binding Protein 2 MeDIP: Methylated DNA ImmunoPrecipitation MH: Montbeliard Haplotype
MPT: Modification Post-Traductionnelle
MSRE : Methylation-Sensitive Restriction Enzymes N6mA: N6-méthyl-adénine
NF2 : Neurofibromin 2
NGS: Next Generation Sequencing OAT: oligoasthénotératozoospermique OS: Oligospermique
pb : paire de base
PLCζ: PhosphoLipase C zeta PCR : Polymerase Chain Reaction PGC: Primordial Germ Cell piARN: PIWI-interacting RNA PFN1: Profiline 1
PLS-DA: Partial Least Squares - Discriminant Analysis RARb: Retinoic Acid Receptor b
RISC: RNA-Induced Silencing Complex ROS: Reactive Oxygen Species
RRBS : Reduced Representation Bisulfite Sequencing SAM: S-adénosylméthionine
SBH: Sperm Bos Halomax SCF: Stem Cell Factor
SCNT: Somatic Cell Nuclear Transfer SCR: Sire Conception Rate
SCSA: Sperm Chromatin Structure Assay SF1: Steroidogenic Factor 1
SHBG: Sex Hormone Binding Globulin
SHGC: Syndrome d’Hypoplasie Généralisé Capréoliforme SINE: Short Interspersed Nuclear Element
SMRT: Single Molecule Real-Time Sequencing
SMARCD3: SWI/SNF Related, Matrix Associated, Actin Dependent Regulator Of Chromatin, Subfamily D, Member 3
SMUG1 : Single-Strand Selective Monofunctional Uracil-DNA glycosylase 1 SNIG: Système National d’Information Génétique
SNIP1 : Smad Nuclear Interacting Protein 1 SNP : Single-Nucleotide Polymorphism Sox9: SRY-related HMG-box gene 9 SPLS: Sparse Partial Least Squares
SRA: SET and RING-finger Associated domain SRY: Sex determining region of the Y-chromosome SSB: Single-Strand Break
Sycp3: SYnaptonemal Complex Protein 3 T : Thymine
TAB-seq : TET-Assisted Bisulphite sequencing TDG: Thymine DNA Glycosylase
TE: Transposable Element
TEAD1-4: TEA Domain Transcription Factor 1-4 TERRA: Telomeric Repeat Containing RNA Tet: Ten-Eleven Translocation
TF : Transcription Factor
TGFβ : Transforming Growth Factor β TLE3 : Transducin Like Enhancer Of Split 3 TNR : Taux de Non-Retour
TRD: Transcriptional Repression Domain TSS : Transcription Start Site
TTS : Transcription Termination Site
TUNEL : Terminal deoxynucleotidyl transferase mediated dUTP Nick end labelling U : Uracile
UCSC: University of California Santa Cruz UHRF: Ubiquitin-like PHD and RING Finger WGBS: Whole Genome Bisulfite Sequencing WT1 : Wilms Tumor 1
WWC1-2: WW And C2 Domain Containing YAP: Yes Association Protein
ZP: Zone Pellucide
Table des illustrations
Introduction
Figure 1. Chronologie comparative du développement de la fonction reproductrice chez le taureau, l’Homme et la souris .... 16
Figure 2. Chronologie des grandes étapes de la spermatogenèse ... 16
Figure 3. Migration des PGC au cours du développement embryonnaire chez la souris ... 16
Figure 4. Différenciation du tractus génital pendant la période embryonnaire chez le bovin ... 17
Figure 5. Représentation de l’axe hypothalamo-hypophyso-testiculaire ... 18
Figure 6. Cinétique de la maturation sexuelle chez le taureau ... 18
Figure 7. Organisation du tractus génital mâle bovin ... 19
Figure 8. La méiose ... 20
Figure 9. Les étapes de la spermiogenèse chez le bovin ... 20
Figure 10 Spermatozoïde bovin... 21
Figure 11. La fécondation ... 22
Figure 12. Eclosion et élongation du blastocyste chez le bovin ... 24
Figure 13. Principe du testage sur descendance ... 28
Figure 14. Principe de la sélection génomique ... 29
Figure 15. La mise en place de l’IA ... 32
Figure 16. L’IA en France ... 33
Figure 17. Le taux de conception bovin est en diminution, et est principalement lié à des pertes embryonnaires précoces ... 35
Figure 18. Estimation de la fertilité des cheptels et des mâles uniquement ... 37
Figure 19. Le spermogramme ... 43
Figure 20. Exemple d’anomalies morphologiques des spermatozoïdes retrouvées chez le bovin ... 45
Figure 21. Relation entre la valeur de fertilité prédite et le taux de non-retour à 56 jours ... 50
Figure 22. Relation entre le nombre de spermatozoïdes par paillette et la fertilité des taureaux ... 52
Figure 23. Représentation schématique des QTL associés à la fertilité mâle bovine, chromosome par chromosome ... 52
Figure 24. Le paysage développemental selon Conrad Waddington ... 54
Figure 25. Principales marques épigénétiques chez les eucaryotes ... 54
Figure 26. Etats chromatinien et régulation de la transcription ... 54
Figure 27. Les modifications post-traductionnelles des histones ... 54
Figure 28. Modes d’action des microARN ... 57
Figure 29. Mécanismes de régulation des transposons par les piARN ... 57
Figure 30. La méthylation de l’ADN est la marque épigénétique la plus étudiée... 58
Figure 31. La méthylation de l’ADN... 58
Figure 32. Les diverses formes principales de méthylation de l’ADN ... 59
Figure 33. Concepts d’îlots CpG, de rivages CpG, de plateaux CpG et de mer ouverte ... 60
Figure 34. Répartition génomique de la méthylation de l’ADN ... 61
Figure 35. Degré de méthylation du promoteur et transcription génique ... 62
Figure 36. Représentation schématique de la structure des protéines de la famille des DNMT ... 62
Figure 37. Modes d’action de la DNMT de maintenance (DNMT1), et des DNMT de novo (DNMT3a et DNMT3b) ... 62
Figure 38. Représentation schématique du cycle du folate et de la méthionine... 62
Figure 39. Représentation de la voie passive de la déméthylation de l’ADN ... 63
Figure 40. Voie active de la déméthylation de l’ADN ... 63
Figure 41. Les trois familles de protéines de liaison aux sites CpG méthylés chez les mammifères ... 64
Figure 42. Interactions entre la méthylation de l’ADN et les modifications post-traductionnelles de histones ... 65
Figure 43. Maintenance de la méthylation de l’ADN par DNMT1 et Uhrf1 ... 65
Figure 44. Les éléments de type transposables dans le génome bovin ... 66
Figure 45. Le phénomène de l’empreinte parentale... 68
Figure 46. Représentation de l’inactivation des gènes et de la réorganisation spatiale du chromosome X ... 69
Figure 47. Les différentes phases de la reprogrammation épigénétique chez la souris ... 72
Figure 48. La reprogrammation épigénétique dans les PGC ... 73
Figure 49. Etat chromatinien de type bivalent ... 75
Figure 50. Remplacement des histones par les protamines ... 77
Figure 51. Modifications des marques épigénétiques au cours de la spermatogenèse ... 78
Figure 52. La reprogrammation épigénétique dans le zygote ... 79
Figure 53. Principe du clonage par transfert nucléaire (Somatic Cell Nuclear Transfer) ... 80
Figure 54. Effets multi et transgénérationnels ... 81
Figure 55. Les phases du projet Sequamol ... 82
Tableau 1. Liste des haplotypes létaux au stade embryonnaire chez le bovin ... 42
Tableau 2. Corrélations génétiques entre paramètres spermatiques et phénotypiques liés à la fertilité chez le bovin ... 50
Tableau 3. Héritabilité des paramètres spermatiques et de fertilité bovine... 53
Tableau 4. Principaux algorithmes de prédiction des îlots CpG du génome Humain ... 59
Tableau 5. Listes des gènes soumis à l’empreinte connus chez le bovin ... 68
Tableau 6. Liste des études faisant le lien entre nutrition et méthylation de l’ADN chez les espèces d’intérêt agronomique ... 71
Méthodologie Figure 56. Arbre décisionnel pour l’analyse de la méthylation de l’ADN ... 93
Figure 57. Schéma représentatif de l’analyse de la méthylation de l’ADN à différentes échelles génomiques ... 93
Figure 58. Schéma représentatif de la stratégie d’analyse de la méthylation de l’ADN par affinité... 95
Figure 59. La conversion de l’ADN par bisulfite de sodium ... 96
Figure 60. Automatisation du protocole de RRBS sur un automate de pipetage ... 101
Figure 61. Principe de la mesure de la méthylation de l’ADN par pyroséquençage ... 102
Figure 62. Principe de la mesure de la méthylation de l’ADN par LUMA ... 103
Figure 63. Etapes de préparation des banques RRBS ... 104
Figure 64. Sélection de taille des fragments et densité en sites CpG ... 105
Figure 65. Contrôles qualité de production de production des banques RRBS ... 106
Figure 66. Vue d’ensemble de la procédure de traitement bio-informatique des données de RRBS ... 107
Figure 67. Rapports de contrôles qualité fournis par le logiciel FastQC ... 108
Figure 68. Contrôle qualité, nettoyage des séquences et alignement sur le génome de référence ... 108
Figure 69. Identification et annotation des cytosines et régions différentiellement méthylées ... 109
Tableau 7. Liste des principales techniques développées pour l’analyse de la méthylation de l’ADN ... 94
Résultats
Bull spermatozoa display a genome-wide DNA hypomethylation with both species peculiarities and conserved tissue- specific features
Figure 1. Global methylation measured by LUMA is low in bovine sperm ... 147
Figure 2. Cell type is a massive determinant of DNA methylation landscapes in cattle. ... 148
Figure 3. Two distinct sets of differentially methylated regions and differentially methylated CpGs display hypomethylation in sperm ... 149
Figure 4. Hypo-DMRs identified by MeDIP target genes involved in mRNA processing and spermatogenesis ... 150
Figure 5. Hypo-DMCs identified by RRBS target specific genomic features and functions ... 151
Figure 6. Validation by pyrosequencing ... 152
Identification de nouveaux biomarqueurs de la fertilité mâle dans le méthylome de la semence bovine : une analyse par RRBS Figure 1. Dispositif expérimental ... 156
Figure 2. Analyses phénotypiques ... 164
Figure 3. Analyses fonctionnelles ... 165
Figure 4. Contrôles qualité des séquences de RRBS ... 166
Figure 5. Comparaisons de la méthylation entre les races Holstein et Montbéliarde ... 167
Figure 6. Analyse descriptive comparant les races Holstein et Montbéliarde ... 167
Figure 7. Méthylation globale des taureaux Holstein et Montbéliard, avec distinction entre les catégories de fertilité ... 168
Figure 8. Analyse descriptive comparant les catégories de fertilité pour les races Holstein et Montbéliarde ... 168
Figure 9. Analyse différentielle entre les catégories de fertilité, pour les races Holstein et Montbéliarde ... 169
Figure 10. Analyse discriminante pour les DMC identifiées ... 171
Figure 11. Annotation des DMC et DMR ... 172
Figure 12. Processus biologiques enrichis en DMC – enrichissements pour les comparaisons Fertiles+ contre Fertiles-, Déviants/Fertiles+, Déviants/Fertiles- – taureaux Holstein ... 173/174 Figure 13. Processus biologiques enrichis en DMC – enrichissements pour les comparaisons Fertiles+ contre Fertiles-, Déviants/Fertiles+ et Déviants/Fertiles- – taureaux Montbéliard ... 175
Figure 14. Validations par bisulfite-pyroséquençage sur 3 des gènes pour les taureaux Holstein ... 176
Figure 15. Validations par bisulfite-pyroséquençage sur 1 autre gène pout les taureaux Holstein, et le gène LAMB2 pour les taureaux Holstein et Montbéliard ... 176
Figure 16. Corrélation entre les résultats de RRBS et de bisulfite-pyroséquençage ... 177
Figure 17 Répartition des polymorphismes de séquence sur la DMC du gène SMARCD3 ... 178
Figure 18. Intégration des données de génotypage aux DMC ... 178
Figure 19. Relation spatiale entre les DMC et les SNP pour la race Holstein ... 178
Figure 20. Résultats obtenus par la double digestion enzymatique HaeIII + MspI ... 180
Figure 21. Identification et caractérisation des DMC et DMR pour la double digestion HaeIII + MspI ... 181
Figure 22. Processus biologiques enrichis en DMC – enrichissements pour les comparaisons Fertiles+ contre Fertiles-, pour les taureaux Holstein analysés par double digestion enzymatique ... 182
Figure 23. Processus biologiques enrichis en DMC – enrichissements pour les comparaisons Déviants/Fertiles+, pour les taureaux Holstein analysés par double digestion enzymatique ... 182
Figure 24. Processus biologiques enrichis en DMC – enrichissements pour les comparaisons Déviants/Fertiles-, pour les taureaux Holstein analysés par double digestion enzymatique ... 182
Figure 25. Différences d’âge entre les catégories de fertilité ... 183
Figure 26. Prise en compte de l’âge à la production ... 184
Figure 27. Processus biologiques enrichis en DMC – enrichissements pour les comparaisons Fertiles+ contre Fertiles-, Déviants/Fertiles+, Déviants/Fertiles- – taureaux Holstein analysés après retrait des DMC liés à l’âge ... 184
Figure 28. Régulation du lignage Trophectoderme-ICM par la voie Hippo dans l’embryon préimplantatoire ... 196
Tableau 1. Comparaisons de la méthylation entre les races Holstein et Montbéliarde ... 168
Tableau 2. Implications biologiques des gènes présentant une DMR et validés par bisulfite-pyroséquençage ... 176
Tableau 3. Liste des gènes de la voie Hippo impactés par un différentiel de méthylation ... 186
Discussion générale Figure 1. Mesure de la 5mC et 5hmC globale par ELISA dans la semence fraiche et congelée de taureaux ... 204
Figure 2. Représentation schématique des méthodes de RRBS, de oxRRBS et de TAB-seq ... 205
Figure 3.Analyse descriptive prenant en compte toutes les races du dispositif ... 217
Introduction
Préambule
13
Préambule
Au cours de la période Néolithique, les premières traces de domestication datent de 14 000 à 12 000 ans. Elles représentent l’un des tournants majeurs ayant contribué au développement des civilisations Humaines. Parmi les premiers animaux domestiqués, les bovins tiennent une place essentielle. Leur domestication apparait au Proche-Orient vers 6500 avant J.C (Zeder 2009). Les bovins ont fourni l’Homme en aliments (lait, viande), en matériaux (os et cuir) et l’ont soutenu dans les travaux agricoles. La domestication s’est progressivement accompagnée d’une sélection par utilisation, comme reproducteurs, des individus au sein des troupeaux ayant les performances ou les aptitudes recherchées par les éleveurs : force physique, richesse et quantité de lait produit par les vaches, docilité… Au gré des adaptations à des conditions environnementales variées et des processus de sélection, il est dénombré aujourd’hui près de 900 races bovines à travers le monde (Commission on genetic resources for food and agriculture, Food and Agriculture Organization of the United Nations, Rome 2007).
Basée initialement sur l’observation de la conformation des animaux, la sélection s’est rationalisée à partir du XIXème siècle et surtout après la Seconde Guerre Mondiale, avec la création de l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA) et le développement de la génétique quantitative sous l’impulsion de chercheurs tels B. Vissac et J. Poly. Délaissant les performances propres de l’animal, la sélection se fonde alors progressivement sur l’évaluation des performances de la descendance des taureaux (« testage »), profitant pleinement de l’essor de l’Insémination Animale (IA). L’IA consiste en un dépôt intra-utérin de la semence préalablement prélevée sur un taureau et conditionnée en paillettes. Outre les avantages sur le plan de la sécurité sanitaire, cette technique permet une large diffusion du progrès génétique et, ce faisant, facilite l’évaluation des reproducteurs sur descendance. Avec les progrès de la connaissance sur le génome, les méthodes d’évaluation se sont aussi perfectionnées, pour aboutir aujourd’hui à une sélection « génomique », où les animaux sont évalués directement par une analyse ADN (génotypage) grâce à des équations de prédiction établies sur des populations de référence phénotypées et génotypées. En quelques années, le génotypage s’est imposé en France comme la méthode de choix pour les races à fort effectif (grandes races laitières et allaitantes, principales races laitières régionales). Plus de 95% des taureaux mis en marché sont issus de la sélection génomique et plus de 100.000 génisses sont testées chaque année afin de mieux gérer le renouvellement des troupeaux.
Préambule
14
La sélection génomique introduit un nouveau paradigme pour l’évaluation du potentiel reproducteur des mâles. En effet, lors du testage sur descendance, une centaine de filles étaient procréées par taureau, permettant par conséquent de mesurer la fertilité de la semence avant diffusion à grande échelle des paillettes. Avec la sélection génomique, les taureaux sont aujourd’hui sélectionnés par l’analyse de leur génome dans les premiers mois de vie et leurs paillettes sont commercialisées sans information sur leur fertilité effective, puisque ces taureaux n’ont alors pas encore de descendants. Or, l'efficacité reproductive est un facteur clef de l'efficacité globale de l’élevage bovin. L’utilisation de taureaux sub-fertiles se traduit par des pertes de production et une augmentation du taux de réforme des vaches pour infertilité, induisant des pertes économiques importantes et un gaspillage des ressources biologiques.
Garantir le progrès génétique et la durabilité des élevages suppose de faire évoluer les procédés de contrôle qualité de la semence afin de prendre en compte ce nouveau contexte.
En particulier, il est essentiel de pointer des défauts épigénétiques pouvant avoir un retentissement sur le développement embryonnaire ou le phénotype de la descendance, et d’en identifier les éventuelles causes environnementales. L’identification de marques épigénétiques pourrait ainsi permettre d’affiner l’évaluation génomique, et contribuer à mettre en place des indicateurs de gestion individuelle des animaux dans une logique d’élevage de précision.
L’UMR 1198 Biologie du Développement et Reproduction (BDR) est une unité mixte de recherche du Centre INRA de Jouy-en-Josas dont les thématiques de recherche portent sur les mécanismes développementaux qui contribuent à l’établissement des phénotypes, en particulier via la programmation précoce et la régulation de l’expression du génome par l’environnement. L’équipe d’Hélène Jammes, en collaboration avec l’équipe R&D d’ALLICE, la fédération des Entreprises de sélection et des coopératives d’IA, pilote le laboratoire commun (Labcom ANR) SeQuaMol « Qualité Moléculaire de la Semence ».
L’objectif du projet SeQuaMol, dans lequel s’inscrit mon travail de thèse, est le développement du contrôle qualité épigénétique de la semence, afin de mieux prédire et d’optimiser la fertilité chez le taureau.
Le manuscrit comporte en introduction des données sur la reproduction du mâle en se concentrant sur le modèle bovin, puis des données sur l’organisation de la filière professionnelle concernant la semence bovine mettant en œuvre la sélection génomique et l’IA. Nous consacrons aussi un chapitre afin de mieux cerner l’apport de la recherche en épigénétique et la contribution de l’identification de marqueurs épigénétiques de la fertilité afin d’écarter les taureaux sub-fertiles des élevages.
PGC
PGC
7,5 jpc 10,5 jpc 13 jpc
Figure 3. Migration des PGC au cours du développement embryonnaire chez la souris
Les précurseurs des cellules germinales se différencient dans les tissus extra-embryonnaires à la base de l’allantoïde. Ils vont migrer, se multiplier et coloniser les crêtes génitales pour former la réserve de cellules germinales primordiales (PGC).
jpc, jourspost-coïtum
(adapté de Bogdanović et Lister, 2017)
Chapitre I : La semence bovine, vecteur du patrimoine génétique paternel et produit à forte valeur ajoutée
15
Chapitre I : La semence bovine, vecteur du patrimoine génétique paternel et produit à forte valeur ajoutée
Les schémas d’organisation de la reproduction sont assez semblables entre les espèces de mammifères. Pour simplifier la description et rester dans le contexte de la filière de la semence bovine, dans ce document ne sera décrit dans la mesure du possible que celle du taureau. Une cinétique comparative des principaux évènements dans la mise en place du processus de reproduction chez le mâle et des principaux évènements de la spermatogenèse sont donnés respectivement Figure 1 et Figure 2.
Dans le but de brosser un schéma complet du processus de reproduction, cette partie débutera par la différenciation et le développement des organes génitaux mâles au stade embryonnaire, puis décrira la puberté et la production des gamètes mâles, et enfin évoquera la fécondation et le développement embryonnaire.
1. Aspects biologiques : la voie mâle dans la reproduction
1.1. La structuration du testicule bovin
1.1.1. La différenciation des gonades fœtales
Après la fécondation et durant les premières semaines de développement, les gonades embryonnaires se développent de manière indifférenciée. La crête génitale, originaire du mésonéphros, apparait entre le 27ème et le 31ème jour post-coïtum (jpc). Elle constitue alors l’ébauche des gonades et en formera la composante somatique. Chez la souris, il a été montré que la formation de la gonade indifférenciée est sous le contrôle de gènes codant pour des facteurs de transcription comme le Steroidogenic factor-1 (Sf1), Wilms tumor 1 (Wt1), Empty spiracles homeobox 2 (Emx2), Lim homeobox 1 (Lim1) ou M33 (Capel 2000).
Les cellules germinales primordiales (Primordial Germ Cells, PGC) sont d’origine extra- embryonnaire, en provenance du sac vitellin (yolk sac) chez le bovin. Les PGC sont les premières cellules de la lignée germinale. Elles migrent et colonisent les crêtes génitales entre le 25ème et le 31ème jpc (Wrobel et Süss 1998)(Figure 3). La crête génitale croît alors rapidement en taille pour atteindre une forme globulaire au 38ème jpc. Chez la souris, la
Taureau Homme Souris Figure1.Chronologiecomparativedudéveloppementdelafonctionreproductricechezletaureau,l’Hommeetlasouris Lachronologiedébuteàpartirdelafécondation. jpc,jourspost-coïtum;jpp,jourspost-partum
Naissance 280 jpc 38-40 sem. 21 jpc
Différenciation gonadique 40 jpc 6-7 sem. 11,5-12,5 jpc
Formation des crêtes génitales et colonisation par les PGC 27-31 jpc 4–5 sem. 10-11,5 jpc
Puberté 12-13 ans
7-13 mois 28-30 jpp
Fécondation
Figure 2. Chronologie des grandes étapes de la spermatogénèse
La spermatogénèse est un processus continu qui peut être subdivisé en 2 grandes étapes : la spermatocytogenèse et la spermiogenèse. La spermatocytogenèse correspond aux différentes phases permettant à partir de cellules souches, les spermatogonies (2n) de générer des spermatides rondes (n). Le renouvellement du stock de cellules souches est assuré par de nombreuses mitoses des spermatogonies A. Certaines spermatogonies A enclenchent une première différenciation qui donne naissance aux spermatogonies B puis aux spermatocytes de type I. Ces cellules entrent alors en méiose afin d’aboutir à la formation de spermatocytes de type II puis à des spermatides rondes et de passer d’un statut diploïde à un statut haploïde : pour ce faire, 2 phases méiotiques se mettent en place. Les spermatocytes I à 2n chromosomes subissent une division réductionnelle et donne ainsi 2 spermatocytes II à n chromosomes. Chaque spermatocyte II subit la deuxième division de méiose et donne 2 spermatides à n chromosomes. .La dernière phase est la spermiogénèse, phase pendant laquelle les spermatocytes vont progressivement se différencier en spermatides allongées puis en spermatozoïdes.
(adapté de Jégou, Rolland et Albert, La reproduction animale et humaine, Synthèse, 2014) Spermatogonies A
Spermatogonies B
Spermatocytes I
Spermatocytes II
Spermatides rondes
Spermatides allongées
Spermatozoïdes
SpermatocytogénèseSpermiogénèse MitosesMéiose IMéiose IIDifférenciation
Voie de différenciation femelle Voie de différenciation mâle Gonades
bipotentielles Canaux de Müller
Canaux de Wolf
+ AMH + Testostérone
Testicules Vessie
Epididyme Canaux déférents Vésicule séminale
Ovaire Oviducte Corne utérine
Cervix Vagin
Prostate Glande bulbo-urétrale
Figure 4. Différenciation du tractus génital pendant la période embryonnaire chez le bovin
La sécrétion de l’hormone anti-müllerienne (AMH) par le testicule fœtal provoque la régression des canaux de Müller. Dans la voie de différenciation femelle, les canaux de Müller donneront les oviductes, l’utérus et la partie supérieure du vagin. La sécrétion de testostérone est responsable de la transformation des canaux de Wolf en les canaux déférents, l’épididyme et les vésicules séminales.
(adapté de Matzuk et Lamb, 2008)
Chapitre I : La semence bovine, vecteur du patrimoine génétique paternel et produit à forte valeur ajoutée
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migration et la prolifération des PGC est sous la dépendance des facteurs de croissance Stem cell factor (Scf), Leukemia inhibitory factor (Lif) ou Fibroblast growth factor (FGF) (De Felici 2000).
Si le génome de l’embryon est porteur d’un chromosome sexuel Y, les gonades embryonnaires se dirigent vers une voie de différenciation de type testiculaire. Cette voie de différenciation est enclenchée par l’activité d’un gène présent sur le chromosome Y, le Sex determining Region of the Y-chromosome (SRY). L’expression de SRY est détectée dès les stades 4 à 8 cellules chez le bovin, et tout au long du stade blastocyste (Gutiérrez-Adán et al.
1997). Il s’agit d’un facteur de transcription activant ou réprimant l’expression de gènes favorisant la voie de différenciation mâle. Par exemple, il active en partenariat avec SF1 le gène SRY-related HMG-box gene 9 (Sox9). Sox9 est impliqué dans la différenciation et l’organisation des cellules somatiques de soutien de la lignée germinale, les précurseurs des cellules de Sertoli (Sekido et Lovell-Badge 2008).
Le processus de morphogenèse testiculaire prend place au 40ème jpc chez le bovin et est principalement orchestré par les cellules de Sertoli. A cette période débute la formation des cordons testiculaires (qui donneront les futurs tubes séminifères) et l’apparition de la vascularisation du testicule. Ces évènements sont sous l’action des hormones testiculaires (Figure 4). Les cellules de Sertoli, sécrètent l’hormone anti-Müllerienne (Anti-Müllerian Hormone, AMH) qui induit la dégénérescence des canaux de Müller (Jost et al. 1973). Les cellules de Leydig de type fœtal sont présentes dans l’espace interstitiel et sécrètent les androgènes, parmi lesquels la testostérone est la composante la plus importante. La sécrétion de testostérone provoquera la transformation des canaux de Wolf pour masculiniser le tractus génital et ainsi donner l’épididyme et les canaux déférents. Les cellules de Leydig sécrètent aussi l’Insulin-like factor 3 (INSL3), dont un des rôles est la descente testiculaire dans le scrotum (Adham 2000).
Une fois formé, le testicule croît rapidement en période fœtale (Orth 1993). Les gènes impliqués dans la régulation de la morphogenèse testiculaire sont notamment le Transforming Growth Factor Beta (TGFB), les Insulin-like Growth Factors (IGF) ou encore le Fibroblast Growth Factor 9 (FGF9). Au stade fœtal démarre la différenciation précoce des PGC en cellules germinales spermatogoniales. C’est la phase de pré-spermatogenèse. Les cellules germinales continuent à proliférer par vague de mitose, notamment entre 50 et 80 jpc. Cette prolifération décroît ensuite en intensité jusqu’à s’arrêter à 200 jpc (Wrobel 2000). Elles n’entrent cependant pas en méiose à ce stade, et restent à un stade de différenciation appelé
« pré-spermatogonie ».