• Aucun résultat trouvé

Avant-propos

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Avant-propos"

Copied!
3
0
0

Texte intégral

(1)

Rites, cultes e t religions

Avant-propos

Jean Leclerc (UMR ArScAn - Ethnologie préhistorique),

Yvette Morizot (UMR ArScAn - Archéologie et systèmes d'information)

Dans les années qui ont suivi la mise en p la ce du thèm e transversal « rites, cultes, e t religions », nous avons a c c o rd é la plus g ra n d e p artie d e notre attention aux com portem ents funéraires ; c'est qu'ils convena ient particulièrem ent à notre volonté de nous appuyer sur des docum ents aussi matériels e t aussi particuliers que possible, e t qu'au dem eurant ils étaient particulièrem ent accessibles à la m éthode archéologique, la plus familière à la plupart d'entre nous. Malgré les bénéfices que nous avons tirés de c e t axe de recherche, il nous a semblé que le temps é ta it venu d'un rééquilibrage. Il éta it temps d e m ettre les phénomènes proprem ent religieux au centre d e notre réflexion collective. L'année 2002-2003 a vu s'esquisser c e tte évolution, puisque nous nous sommes alors consacrés à égalité à l'étude des pratiques funéraires e t à c e lle d e phénom ènes religieux — il est vrai que le cahier IV des thèmes transversaux n'en a pas rendu com pte, c e dernier a s p e c t a y a n t é té réservé pour une p u b lica tio n particulière en préparation. Au cours de l'année 2003- 2004, notre activité collective a totalem ent laissé de c ô té les pratiques funéraires, e t nous nous sommes consacrés exclusivem ent à poursuivre notre recherche du c o m p o rte m e n t religieux tel qu'il peut s'exprimer dans les sites e t dans les vestiges matériels. Ces deux directions d e recherche com plém entaires ont en com m un d e chercher leur point de d é p a rt en dehors d e c e qui dans le sentiment religieux peut être diffus e t désincarné. Elles donne nt sans d oute le meilleur accès à deux aspects rarem ent explicités de l'univers m ental des hommes : le sentiment religieux en ta n t qu'il est lié à des lieux particuliers, le sentiment religieux en ta n t qu'il est porté par des objets créés par l'homme,

La première d e ces directions d e recherche, la plus ambitieuse, avait été déjà largem ent abordée en 2002-2003. Entre tous les lieux où pe u t se manifester la présence divine, nous avions alors choisi de consacrer une rencontre à ceux où elle se manifeste d e la fa ç o n la plus proche, la plus spontanée, mais aussi la plus mystérieuse : les forêts et bois sacrés. Le phénom ène est largem ent observé, à toutes les époques, mais ces observations pouvaient-elles lé g itim e m e n t être rapproché es ? Les exemples présentés, en O céanie, en G aule pré-romaine, en G rèce antique, ou en Afrique actuelle, avaient posé b e tte question sans perm ettre d'y répondre1 ; ils a v a ie n t c o n v a in c u les p a rticip a n ts q u e c e tte première réunion d e va it être prolongée au cours des années suivantes, e t qu'il é ta it préférable de réserver les résumés des interventions pour une publication d'ensemble.

Une nouvelle réunion, organisée com m e la première en coopératio n avec le thèm e 1 par Hélène G uiot e t Yvette Morizot, a permis c e tte année de voir se préciser les questions que nous nous posions. Dès la description des rituels hittites par Jean Castanicos (UMR ArScAn — Histoire et archéologie de l'Orient cunéiform e), la com plexité du phénom ène a été con firm é e . Arbres sacrés ou divinités du règne végétal, c'est individuellem ent que certains arbres jo u e n t un rôle im portant ou sont porteurs de vertus particulières (liées parfois à la couleur d e leurs fleurs), mais c'est dans un b o c a g e sacré q ue sont récitées les invocations à des divinités hatties, De la m êm e façon, Marie-Christine Hellman (UMR ArScAn — Archéologie du m onde grec archaïque) a rappelé qu'en Grèce on ne confond pas les arbres sacrés, les bois sacrés, et

1 Leclerc J. e t Morizot Y. (2004). Avant-propos (au thèm e 6). Cahier des thèmes transversaux ArScAn III, 2002-2003, p. 101-102.

(2)

Jean Leclerc e t Yvette Morizot

les forêts, form ations plus vastes, sauvages, nocturnes2, mais c'est sur les bois sacrés proprem ent dits (alsos) qu'a porté plus précisém ent son étude. Ces bois sont considérés c o m m e g é n é ra le m e n t associés à des sanctuaires. Elle a montré que c e tte association é ta it très loin d'être générale, qu'elle n'était sans d o u te pas originelle, mais que c'est au fil du tem ps qu'elle est peu à peu d e ve n u e plus fréquente.

En A frique o c c id e n ta le , D om inique Juhé- Beaulaton (Laboratoire MALD (Mutations africaines dans la longue durée) — Centre d e Recherches africaines — CNRS-Université de Paris 1) n'est pas revenue sur la distinction entre les bois sacrés, clos, entretenus, soignés, e t les forêts auxquelles on se g a rd e bien d e toucher3. Elle s'est plutôt attachée , au Bénin e t au Togo, à expliciter à la fois l'im portance de ces lieux c o m m e enjeux d e pouvoirs, e t leur signification religieuse, liée au cultes vodou. C'est par c e d o uble ca ra ctè re que s'explique l'alternance des périodes où l'on a te n té de les faire disparaître, e t de celles où l'on s'est efforcé de les faire revivre. Dans la situation contrastée actuelle, certains sont m enacés p a r les ch a n g e m e n ts é conom iqu es ou dém ographiques (populations migrantes ignorant la structuration sacrée du paysage), d'autres sont prolongés g râ ce à leur réutilisation par une autre religion, ou protégés com m e conservatoires de la biodiversité.

En Polynésie, Hélène G uiot (UMR ArScAn — Ethnologie préhistorique) a insisté à la fois sur le rôle essentiel d e toute forêt dans l'équilibre du m onde (renouvellem ent de la fertilité), rôle exprimé par des rituels e t interdits particuliers, e t sur la distinction de différents types de forêts, d o n t certaines seulement sont taboues (ou sacrées ?). Ce ca ra ctè re sacré trouve son sens dans la structuration du paysage e t le jeu c o m p lé m e n ta ire des différentes élém ents naturels. En Limousin enfin, l'étude de Marie-France Houdart a bolit les distinctions en suggérant que tout bois, to u te forêt, to u t élém ent d e la forêt est sacré. Ce c a ra c tè re sacré pe u t s'étendre aux « parcelles d e la forêt » (arbre, ram eau...) rapportées dans le territoire des hommes, souvent en rapport a ve c les rituels d e mai.

Il est clair qu'au cours de ces présentations de travaux c'est surtout la g ra n d e diversité du phénom ène qui a é té mise en évidence. Toutefois,

c e tte diversité oppose moins les cultures entre elles q u e des manifestation contrastées au sein d e la m êm e culture. Pour peu qu'on y regarde d e près, on note p a rtout la m êm e relation difficile, soulignée Marie-France Houdart, entre les hommes, défricheurs e t cultivateurs, e t l'espace sauvage. Les différents phénom ènes observés pourraient n'être que la fa ço n propre à ch a q u e culture d'expliciter e t d e maîtriser c e tte relation difficile.

C ette réunion a été trop tardive pour que nous puissions en inclure les résumés dans le présent cahier. Les résumés détaillés des deux réunions seront réunis pour un fascicule spécial associé au cahier VI, peut- être encore enrichi par les nouvelles contributions d o n t l'intérêt des discussions a bien fait apparaître la nécessité.

En contrepoin t d e c e tte recherche ambitieuse, nous avons poursuivi un projet plus hum ble e t plus précis : l'é tu d e d'objets, en eux-mêmes, pour c h e rc h e r leur signification dans l'é tu d e la plus c o n crè te e t la plus a ttentive d e leur m atérialité même, C ette recherche a va it pris son d é p a rt a v e c la présentation par Grégory Pereira d'instruments de musique mexicains, d o n t il a va it pu montrer qu'ils tiraient toute leur portée a ffe ctive e t symbolique de la m atière première utilisée (des ossements humains) e t d e sa provenance (les victimes d e sacrifices)4. Nous y avons vu un a c c è s te c h n o lo g iq u e au dom aine du sacré, particulièrem ent propre à réunir l'attention des historiens, des ethnologues, e t des archéologues. Une piste que nous avons reprise et suivie c e tte année.

Nous l'avons d 'a b o rd reprise a v e c la présentation par Tinaig Clodoré-Tissot d'un travail d'ensem ble sur les instruments d e musique préhistoriques. Bien que c e travail se soit limité à l'Europe, c e qui lui confère une certaine unité, il va de soi que l'immense étendu e des tem ps considérés ne p e rm e tta it guère d'a ffirm a tio n s précises, e t les interprétations sociologiques ou sym boliques esquissées ne pourront être réellem ent établies que p a r des études sur des groupes culturels plus étroitem ent définis. C ependant, si l'utilisation cultuelle d e ces objets n'est pas toujours réellem ent dém ontrée, leur valeur sym bolique est fortem ent suggérée par les m atériaux choisis e t par les formes retenues, qui sont souvent les uns et les autres assez éloignés d e c e qu'exigerait une simple a d a p ta tio n à

2 Un des thèmes d e la contribution d'Yvette Morizot lors d e la p ré cé d e n te réunion. 3 Distinction introduite lors d e la pré cé d e n te réunion p ar Stéphane Dugast,

4 G. Pereira (2003. A propos d e l'utilisation des ossements humains du Mexique ancien ; l'exemple des racles. Cahiers des thèmes

transversaux ArScAn, III, 2001-2002, p. 149-153.

(3)

Rites, cultes e t religions

la fonction. C om m e dans le cas des instruments de musique mexicains, la signification d e l'instrument éta it sans d oute portée par la m atière utilisée e t par son a sp e ct visuel, plus que par sa sonorité. Le décor, les co ndition s du d é p ô t, e t les associations a rch é o lo g iq u e s interviennent seulem ent pour a p p o rte r des élém ents d e confirm ation à c e tte interprétation.

Pour son é tu d e des bois d'œ uvre à l'île de Pâques, Catherine Orliac a pris en c o m p te l’ensemble des bois sculptés connus, actu e lle m e n t dispersés dans différents musées et collections à travers le m onde, pour n’en retenir que ceux do n t l'origine e t la d a te sont connues. Elle aussi a mis en évidence, de fa ç o n encore plus claire, l'im portance de la m atière première utilisée. Sans d oute plus significative que la figuration explicite elle-même, c'est elle qui confère aux objets leur valeur e t leur portée symbolique. Portant sur d'autres lieux, en d'autres temps, son

é tude a pu utiliser la docu m e n ta tio n ethno-historique e t faire apparaître dans le choix des bois travaillés des critères qui laissent peu d e tra c e archéologique : c a ra c tè re sacré d e l'arbre lui-même, lieu é ve n tu e lle m e n t sacré où il a poussé, rituels d 'a b a tta g e et d e transport. C ependant, son travail, a v a n t to u t te c h n iq u e (analyse xylologique) et archéologique, a suffi à lui seul à établir les principaux critères du choix. Seuls les bois du Sophora toromiro et du Thespesia p o p u in e a ont été utilisés, c e qui ne répond à aucune nécessité m écanique particulière, mais seulement à la couleur que prennent des bois en vieillissant : la couleur rouge, une des couleurs des dieux. Qualité supplém entaire : d e leur vivant, ces arbres portent des fleurs jaunes, l'autre couleur des dieux5. Telle est la véritable raison du choix qu'on en a fait. Ainsi les analyses les plus techniques ouvrent un accès inattendu à l'univers du sacré — un accès que nous espérons bien continuer à explorer dans la suite de nos échanges.

5 L'article do nne l'inventaire co m p le t d e ces objets e t leurs références muséographiques. Malheureusement, les droits de reproduction sont réservés, e t nous interdisent d e publier c e qui aurait é té un passionnant musée virtuel.

Références

Documents relatifs

phospholiJ:.lids having different 'polar head groups were used to .st."udy the binding of PcB~ to liposomes as dell'Zcibed in leg~lnd to fig., 33b

Toble 1 Summory of Rapid Epidemiologicol Mopping of Onchocerciosis (REMO) ond Ropid Assessment Procedure for Loiosis (RAPLOA) in Southern Comeroon, August t't9,

D'une part, des discussions ponctuelles (initiées par le prof ou par un élève de la classe) autour de la préparation d'un devoir ou de la réalisation d'un DM. D'autre part

C’est dans ce service que l’élève est affecté à sa classe, aux options et aux groupes auxquels il doit appartenir, en relation avec la structure mise en place par

Response of a Building Under Dynauaic Loading Exchange Integrals Between Real Slat~r 9rbitals'.. Linear

Q1 : Il suffit de constater la conservation de la parité rouge+noir pour conclure que l'on ne peut aboutir qu'à 0 ou 2 (N+R) et donc 1 ou 3 jaunes. Q2 : Cette question fait

 Des aides et tutoriels pour vous aider à utiliser les outils de l’ENT. (établissement ou bassin) à demander auprès de

' On prélève dans la thyroïde de M'" T, diverses cellules avec lesquelles sont réalisées des cultures.. DOCUMENT 4 : Biosynthèse des hormones