LE MÉTABISULFITE DE POTASSIUM
ÉTUDE DE TOXICITÉ A LONG TERME SUR LE RAT
R. CLUZAN
J. CAUSERET
Denise HUGOT Laboratoire d’Anatomie!athologique, Hôpital Saint-illichel,
ParisLaboratoire d’Étude des Qualités
biologiques
des Ali7nents de l’Homme,Centre national de Recherches
zootechniques, Jouy-en-Josas (Seine-et-Oise)
SOMMAIRE
Pendant 20mois, deux lots de 80rats
( 40
mâles et 40femelles)
ont été soumis à un mêmerégime
alimentaire
équilibré
et ont reçurespectivement,
à titre de boisson, soit de l’eau distillée, soit unesolution de métabisulfite de potassium à 1,2 g par litre.
Aucune différence n’a été observée entre les deux lots, en ce
qui
concerne lamortalité,
l’évolutionpondérale
et la consommation de nourriture, les manifestationscliniques,
les formulessanguines (sauf
en cequi
concerne le nombre desleucocytes),
lepoids
de différents organes(sauf
en cequi
concerne celui de la
rate),
et l’étudeanatomique
-macroscopique
etmicroscopique
- de tous lesviscères
prélevés
à l’issue del’expérience (œsophage,
estomac,grêle,
côlon, foie, reins, coeur, poumons, rate, pancréas, surrénales, gonades,fragments
de muscles,encéphale, trachée).
Les seuls effets
particuliers
notés dans le lot d’animauxqui
a reçu du métabisulfite depotassium
sont : une
augmentation
du nombre desleucocytes (significative
chez les mâlesseulement)
et une augmentation dupoids
de la rate(chez
les femelles seulement).D’autre part, au cours de deux
reproductions
successives, on a observé, dans le lotqui
recevaitdu métabisulfite de potassium, une diminution du nombre moyen des
jeunes
par portée et de laproportion
des mâles dans les portées, par rapport aux résultats obtenus dans le lot témoin.Cepen-
dant, la croissance desjeunes
- soumis eux-mêmes aurégime
de leurs parents - a étéidentique
dans les deux lots durant trois mois de détermination.
Le caractère limité des différences observées entre les deux lots et les difficultés de leur inter-
prétation ne permettent pas de conclure actuellement à la nocivité du métabisulfite de
potassium
dans les conditions où il a été administré. Des recherches
complémentaires
serontindispensables,
en particulier dans le domaine de la
reproduction.
INTRODUCTION
L’anhydride
sulfureux etquelques-uns
des selsqui
en dérivent(notamment
lemétabisulfite de
potassium) figurent parmi
lesantiseptiques
lesplus
anciennement et lesplus largement employés
entechnologie
alimentaire(Ï HUHAU T,
1955 et19 6 2 ).
En
France,
on connaît enparticulier
leurs utilisations enoenologie,
encidrerie,
en
brasserie,
dans l’industrie desjus
defruits,
pour la conservation despoissons séchés,
des crevettes roses, des fruits secs, des pommes de terregrattées,
etc.(T RU -
HAUT et
SOUVERAIN, I g63).
Cependant,
les effetsphysiopathologiques
del’ingestion
de sulfites font encorel’objet
de diversesincertitudes,
dues aupetit
nombre des observationsexpérimen-
tales
approfondies
et aux résultats discordants des travauxpubliés.
La
plupart
de ces travaux datent deplus
d’un demi-siècle. Leplus
ancien est dûà LEUCH
( 1 8 95 ), qui
a administré à une trentaine de personnes diverses des doses deS0
2
dans unepetite quantité
de vin( 30
à 50ml) ;
il observa des troubles divers(irritation
de la gorge, brîiluresd’estomac, migraines)
pour les doses deS0 2
libreégales
ousupérieures
à 45 mg. WAI,BAUM( I go6)
aégalement signalé
une irritationdu tractus
digestif
chez dessujets qui
avaient reçuquatre
fois parjour, pendant quatre jours,
des doses de sulfite de sodiumcomprises
entre 310et 620mg. D’autrepart,
WILEY( I go 7 )
a étudié leproblème
chez douzesujets qui
avaient reçupendant vingt jours
des doses croissantes deS0 2
en solution aqueuse(8 0
à Ioomg)
ou sousforme de sulfite de sodium en
capsules ( 115
à7 6o mg) ;
ilsignala
- outre des symp- tômessubjectifs
tels quecéphalées, étourdissements,
sensations de faiblesse - des troubles rénaux et une anémiehypochrome,
Il en conclut à la nécessité deproscrire S0
2’
sous toutes sesformes,
de toutes les denrées alimentaires.A la même
époque, quelques
travaux ont été effectués sur le Chien. KIONrsA( I
8g6)
et ScHuLz( I go2)
ont observé des effets nocifs - enparticulier
des hémorra-gies
-après
administrationprolongée
de faibles doses de sulfites. Enrevanche,
WILDENRATH
(igo6),
LEHMANN et TREUTLEIN( I gog),
ROST et FRANZ(IgI3)
ontconclu à
l’innocuité,
pour leChien,
de doses deS0 2
allantjusqu’à
Ioo et même 20o mg parkg ;
les derniers auteurs cités ont fait subir ce traitement à leurs animaux pen- dant un an sans voirapparaître
aucune lésionmacroscopique
oumicroscopique.
Les conclusions de certains de ces travaux - et
singulièrement
celles des obser-vations sur l’Homme - ayant ému les milieux
viticoles,
une Commission scienti-fique
fut constituée en Iglo, àBordeaux,
pourreprendre
l’étude duproblème
dansses
aspects oenologiques.
Sousl’impulsion
de cettecommission,
unepremière
sériede recherches fut effectuée sur des chiens
qui reçurent quotidiennement,
durantun
mois,
10 ml parkg
depoids,
d’un vin contenant 100mg deS0 2
libre ou 400 mg deS0 2
total(dont
300 mg à l’étatcombiné)
par litre. En aucun cas, on n’observa de troublesgastriques,
rénaux ousanguins ;
àl’autopsie,
tous les organesparaissaient
normaux
(GAUTR!I,!T,
Iglo a et Iglob).
Une seconde série
d’expériences
fut tentée sur six hommesqui, pendant plu-
sieurssemaines, ingérèrent chaque jour
15 à 20ml parkg
depoids,
d’un vin renfer- mant 400 mg deS0 2
par litre(dont
300 mg à l’étatcombiné) ;
aucunsujet
ne futatteint de troubles rénaux ou
sanguins (G AUTRELET ,
Iglo a et Iglob).
Bien que la durée de ces
expériences
ait ététrop
courte pour conduire à des.résultats
probants,
il a fallu attendreprès
de 4o ans pour voirapparaître
de nouvellespublications
sur le mêmeproblème.
EnI g 4 6, F ITZHUGH ,
KNUDSEN et NE ontpublié
lecompte
rendu d’une étude de toxicité àlong
terme sur des rats dont lerégime
contenait de 0,05 à 2 p. 100de métabisulfite de sodium(soit
0,03 à 1,2p. Ioo deS0 2 ).
Pour les doses de métabisulfiteégales
ousupérieures
à 0,10p. 100, ilssigna-
lent un ralentissement de la croissance et le
développement
de troubles macrosco-piques
etmicroscopiques :
« yeux à lunettes », crises depolynévrite, atrophie
de- différents organes, calcifications
rénales,
fibrose ethypertrophie épithéliale
gas-trique
« squameuse », altérations del’utérus, dépigmentation
desincisives,
etc. Unepartie
de cesphénomènes pouvait s’expliquer
par une carence en thiamine : on saiten effet que cette vitamine est détruite en
présence
de sulfites.Toutefois,
l’adminis- tration d’unsupplément
de thiamine laissait subsister laplupart
des troubles etdes
lésions,
les crises depolynévrite
étant seules àdisparaître.
En 1955, nous avons
effectué,
en collaboration avecF LAXZY ,
une étude de caractèrepréliminaire
sur les effetsrespectifs,
chez le Rat, d’un vin de Muscadetnaturel,
du même vin sulfité à l’avance par addition de !oo mg de métabisulfite depotassium
par litre( 25
p. 100deS0 2
ainsiajouté passant
à l’étatcombiné),
et dumême vin sulfité à la même dose au moment même de l’administration. Les
sujets qui, pendant
6mois,
recevaient les vinssulfités,
ontpris
dupoids
moinsrapidement
que ceux
qui
recevaient le vinnaturel ;
c’est le vin sulfité au moment même del’emploi qui
a entraîné le ralentissement de la croissance leplus marqué.
En outre,ce vin a
provoqué
une nettehypertrophie
du foie.En
revanche,
HÔTZEL(ig6i-i 9 62)
n’a observé aucune modification dugain
de
poids,
de l’indice de consommation et dupoids
de différents organes chez le Rat soumispendant
100jours
à unrégime
alimentaireéquilibré,
additionné de doses de sulfitescorrespondant
à 400 mg deS0 2
parkg
depoids corporel.
Enfin,
alors que l’étudequi
faitl’objet
de ce mémoireprenait fin,
une commu- nication sur le mêmesujet
a étéprésentée
par LANTEAUME et al.( 19 65)
devant laSociété des
Experts-Chimistes
de France. Ces auteurs ont administréquotidiennement
par intubation
gastrique
à divers lots de rats,pendant
2 ans, 3 ml pour 100 gram-mes de
poids
de l’un desliquides
suivants :- eau pure ;
- solution aqueuse de métabisulfite de
potassium
contenant 450 mg deSO,
par
litre ;
- vin rouge de coupage contenant 110mg de
SO,
parlitre ;
- même vin contenant 450 mg de
SO,
par litre.L’anhydride
sulfureux n’aprovoqué
ni modifications de lacroissance,
ni troubles de lareproduction,
ni lésionsorganiques
décelablesmacroscopiquement
ou micro-scopiquement.
PROTOCOLE
EXPÉRIMENTAL
Les méthodes d’étude mises en oeuvre
s’inspirent largement
duprotocole expérimental
recom-mandé par la F.A.O.
(igj8)
pour l’étudetoxicologique
des additifschimiques
et sontproches
ausside celui
qui
a été décrit dans une récente circulaire du Ministère de la SantéPublique
et de laPopu-
lation
(1963).
Animaux
L’étude a
porté
sur 160rats YVistay(8 0
mâles et 80femelles),
provenant del’élevage
du labo-ratoire. Au début de l’étude, ils étaient
âgés
de 28 à 32jours
etpesaient
de 50 à 60 grammes. Leur état sanitairepouvait
être considéré comme satisfaisant(courbes
de croissance conformes à celles obtenues habituellement au laboratoire, pas d’infectionapparente).
Tous ces animaux ont été soumis à un
régime
alimentairecomplet
etéquilibré.
Mais la moitié d’entre eux a reçu comme boisson de l’eau distillée(lot i)
et l’autre moitié une solution de métabi- sulfite depotassium
à 1,2gramme parlitre,
soit environ 700 mg deS0 2
par litre(lot 2 ).
Régime
alimentaireLes animaux ont été soumis
pendant
la durée del’expérience
à unrégime
alimentaireéquilibré
::Ce
régime
a été distribué sous forme de bouillie obtenue par addition de 350 ml d’eau distillée à ikg
dumélange précédent.
Administration du
métabisulfite
depotassium
Le mode d’administration du métabisulfite de
potassium (en
solution dans l’eau deboisson)
a été choisi en vue d’éviter la destruction
partielle
de la thiamine durégime
par S02 avantl’ingestion.
Malgré
l’odeur et la saveurdésagréables
de cette solution, - nettementperceptibles
pour le consom- mateur humain -, les rats l’ontacceptée
sans difficulté(tabl. i).
Pour permettre de comparer les doses de 502
ingérées
par les rats du lot i et celles administrées par d’autresexpérimentateurs,
nous avonsrapporté
ces doses auxquantités
de nourriture consom-mées et au
poids corporel (tabl. 2 ).
Les différences liées au sexe
résultent du
fait que les femellesingèrent
autant de boisson que lesmâles,
mais consomment moins de nourriture et prennent moins depoids.
Durée de l’étude
L’étude a commencé le 14
juin
1962, et le sacrifice des animaux a été échelonné sur lapériode
allant du ierfévrier au lermars
19 6 4 .
Elle a donc duré environ 20mois.( 1
) Additionnée de i p. 100d’huile de foie de morue et de o,oi5p. 100d’oc-tocophérol.
( 2
) Le calcium est fourni par les autres constituants du régime, en particulier par la peptone.
Observalions
Les observations essentielles ont
porté
sur lespoints
suivants :- mortalité,
- évolution
pondérale,
- consommation de nourriture,
- manifestations d’ordre
clinique ;
- nombre de
portées,
leur constitution,développement pondéral
desjeunes (deux générations successives) ;
- études
hématologiques
sur 100sujets
de lapremière génération ( 25
mâles et 25 femelles dechaque lot) :
des numérations d’hématies et deleucocytes
ont été effectuées au moment du sacri- fice des animaux, et une étudecomplémentaire
aporté
sur des frottis de moelle osseuse et surdes frottis de sang, les résultats étant
comparés
à ceux desnumérations ;
- étude
anatomique
des animaux de lapremière génération
mortspendant l’expérience
etdes 100
sujets
sacrifiés à son issue(par
le gazd’éclairage),
cette étude comportant la recherche de lésionsmacroscopiques,
lapesée
de certains organes et l’étudemicroscopique
des viscères suivants,après
fixation dans le formol à 10p. 100, inclusion à laparaffine
et coloration par l’hématéine-éosine avec, à lademande,
coloration élective :oesophage,
estomac,grêle, côlon, foie, reins,
coeur, poumons, rate,pancréas,
surrénales,gonades, fragments
de muscles,encéphale,
trachée.RÉSULTATS
Mortalité La mortalité en cours
d’expérience
a atteint :- 9
sujets
du lot1 (témoins),
dont 6 mâles et 3 femelles : soit 12p. 100de l’effec- tif total dulot ;
- il
sujets
du lot 2(recevant SO,),
dont 8 mâles et 3 femelles : soit 14 p. ioo de l’effectif total du lot.Dans les deux
lots,
cette mortalité est due presque entièrement à une affection des voiesrespiratoires qui,
enjuin y 6 3
afrappé
brutalement l’animalerie du labo-ratoire,
enprovoquant
d’ailleurs une diminutionmarquée
de la consommation de nourriture et une chute depoids
chez de nombreuxsujets.
Desinjections
intramus-culaires
d’oxytétracycline ( 2 , 5
mg p. 100g depoids pendant
troisjours consécutifs)
ont été
pratiquées
sur tous les animaux sans distinction et ontenrayé
lesprogrès
de
l’épidémie.
Laperte
depoids
a étécompensée
etl’expérience
s’estpoursuivie
sans nouvel incident
pendant les derniers
mois.Si l’on
défalque
des valeurs citéesplus
haut les décès observés enjuin 19 6 3 ,
la mortalité a été :
Il ne semble donc pas
qu’il
ait y lieu de lui accorder unesignification particu-
lière dans le cadre de
l’expérience.
Évolution pondérale
Ne
pouvant reproduire
ici les courbes depoids complètes,
nous nous borneronsà
indiquer
lesgains
depoids
à divers stades del’expérience (tabl. 3 ).
Les faibles différences observées entre les deux lots ne sont pas
significatives.
Consommation de nourriture
La consommation de nourriture a été déterminée à
plusieurs reprises
au coursde
l’expérience, chaque
foispendant
unepériode
de 2 semaines. Aucune différencesignificative
n’a été observée entre les deux lots.Manifestations
d’ordreclinique
En dehors de l’affection des voies
respiratoires déjà signalée,
un certain nombre desujets
ontprésenté,
au cours de la deuxièmeannée,
des tumeurs sous-cutanées volumineusessiégeant
enparticulier
au niveau de l’abdomen(deux
dans le lot iet deux dans le lot
2 ).
Enrevanche,
les crises depolynévrite
et lesyndrome
des« yeux à lunettes
» signalées
parFrT Z xuGx,
KNUDSEN et N!!sow( 194 6)
n’ont étéobservés chez aucun de nos animaux.
Repvoduction
A
l’âge
de neufmois,
un certain nombre defemelles,
choisies au hasard danschaque lot,
ont été mises au mâle(dans
une même cage : 3 femelles avec 2 mâles du mêmelot).
Les animaux de la deuxième
génération
ont été soumis dès le sevrage(à
21jours)
au
régime
de leursparents. Lorsqu’ils
ont atteintl’âge
de troismois,
ils ont été misen
couple,
et les animaux de la troisièmegénération
ont été soumis aurégime
deleurs
parents depuis
le sevragejusqu’à l’âge
de trois mois.Les résultats obtenus sont mentionnés dans le tableau 4.
Il existe une différence
significative
entre les deux lots en cequi
concerne lenombre de
jeunes
parportée
au cours de lapremière reproduction :
en moyenne,il est diminué de
près
de 20 p. 100 dans le lot 2(différence significative
au seuil deP =
0 . 05 ).
Une différence du même genre est observée au cours de la seconde repro-duction,
mais elle est moinsmarquée
et nonsignificative.
D’autre
part,
laproportion
des mâles dans le lot 2 est moins élevée que dansle lot i. La
comparaison
des résultats obtenus dans les deux lots - par la méthode ditedue x 2
- prouve que la différence observée au cours de lapremière reproduction peut
être due aux hasards del’échantillonnage,
mais quecelle
observée au cours de la deuxièmereproduction
est hautementsignificative (au
seuil de P =0 , 01 ).
Toutes les autres déterminations donnent des résultats
identiques
pour les deux lots.Étude hématologique
a)
Le nombre des hématies et desleucocytes
contenus dans le sang des ani-maux à la fin de
l’expérience
estindiqué
dans le tableau 5.Dans le cas des
hématies,
la faible différence observée entre les deux lots n’est passignificative.
Le taux desleucocytes
estplus
élevé dans le lot 2(SO,)
mais ladifférence n’est
significative
que chez les mâles(au
seuil de P =0 . 05 ).
b)
Certains animauxprésentaient
des anomalies de leur formulesanguine :
ainsi a-t-on observé une
hyperleucocytose
avecpolynucléose neutrophile (hyperleu- cocytose atteignant parfois
16 ooo à 19000 ),
enrapport
avec des lésionspulmonaires
retrouvées à l’examen
anatomique.
Ces animaux étaient un peuplus
nombreuxdans le lot 2
(SO,).
D’autrepart, quelques
animauxprésentaient
uneleucopénie,
mais ceci avec une
fréquence égale
dans les deux groupes.c) L’étude
des frottis médullaires n’a pas montré de différence entre les deux groupes(tabl. 6).
La lecture des lames médullaires acependant
ététechniquement
difficile,
du fait de la richesse engraisse
de la moelle duRat,
cequi
a rendu délicat leproblème
de la coloration des lames.Poids de divers organes
Le
poids
moyen de divers organes,rapporté
à celui du corps,figure
dans letableau 7.
La
comparaison
des valeurs obtenues dans les deux lots nepermet
de releverqu’une
seule différencesignificative :
elle concerne lepoids
de la rate,qui
estplus
élevé chez les femelles du lot 2 que chez celles du lot i
(différence significative
auseuil de P =
o.o5).
Étude anatomique:
observationsmacroscopiques
Les
principales
observationsmacroscopiques
sont résumées dans le tableau 8.Bien que certaines lésions n’aient été observées que dans le lot 2, aucune d’entre elles n’a été suffisamment
fréquente
pourqu’on puisse
conclure à l’existence de différences entre les deux lots.Étude anatomique:
observationsmicroscopiques a)
Au niveau dufoie,
ont été observées :- une dilatation sinusale très
fréquente
dans les deuxlots, plus
ou moins mar-quée,
àdisposition centro-lobulaire,
enrapport
avec le mode de sacrifice sans aucundoute ;
- une stéatose se
répartissant
commel’indique
le tableau 9.Cette
stéatose,
sansparticularité histologique,
se retrouve avec unefréquence comparable
dans les deux groupes d’animaux.b)
Au niveau de1’oesophage,
on atrouvé,
chez un mâlequi
avait reçu du méta-bisulfite,
une ulcération du basoesophage.
Cette ulcération nepeut
vraisemblable- ment être retenue comme lésion due ausulfite,
car demultiples
facteurspeuvent expliquer
une telle lésion chez un rongeur ; d’autrepart,
elle a été rencontrée uneseule fois.
Aucune différence n’est à
signaler
entre les deux lots dans la structure de laportion oesophago-gastrique
et lesrégions
voisines. Dans les deuxlots, l’épithélium malpighien
a parulégèrement hyperplasique
dans cetterégion.
c)
Au niveau desreins,
on a trouvéparfois
descylindres hyalins,
descylindres granuleux,
des dilatations tubulaireskystiques (tabl. 10 ).
Mais larépartition
deces lésions est
identique
dans les deux lots.Quelques images
dehyalinisation
des basales ont étéobservées,
mais lephéno-
mène restait limité et se retrouvait dans les deux lots. Ces modifications sont à ratta- cher
probablement
à desphénomènes
de vieillissement.Il n’a pas été observé de calcification.
Une
fois,
chez un mâle du lot 2(S0 2 ),
il a été observé desimages
derégression tubulaire, paraissant plus
enrapport
avec desphénomènes
infectieux quetoxiques (abcès
rénal constaté àl’autopsie).
d)
Au niveau despoumons,
de nombreuses lésions inflammatoires àprédomi-
nance
péribronchique,
de caractèreaigu
ausubaigu,
ont étéretrouvées,
enrapport
avec des
phénomènes cliniques signalés précédemment.
Leurrépartition
était lasuivante :
La
répartition
n’a donc aucun caractèreparticulier.
e)
Les autres viscères ont faitl’objet
d’une étudesystématique,
sansqu’il
soitpossible
de mettre en évidence des différences entre les deuxlots,
ni même des alté- rations.L’étude
del’appareil digestif
a étéparticulièrement soignée
au niveau de l’es- tomac, notamment en cequi
concerne la forme et larépartition
des éléments(cellules mucipares, bordantes, principales). Quelques images
de nécrose ont été observées dans les deux lots au niveau des couches cellulairessuperficielles
de la muqueuse;elles étaient
peut-être
enrapport
avec lestechniques
de sacrifice et de fixation despièces.
Cesaspects
sont restés très limités. Les infiltrats inflammatoires ont étérecherchés,
ainsi que lesaspects
éventuelsd’hyperplasie
oud’hypoplasie
de la mu-queuse.
DISCUSSION
I. - Des observations
rapportées ci-dessus,
il résultequ’aucune
différencen’a été observée entre les deux lots en ce
qui
concerne lamortalité,
l’évolution pon-dérale,
la consommation denourriture,
les manifestationscliniques,
les formulessanguines (sauf
en cequi
concerne le nombre desleucocytes),
lesmyélogrammes,
le
poids
de différents organes(sauf
en cequi
concerne celui de larate),
l’étude ana-tomique
des viscères.Les effets de l’administration
prolongée
de sulfites ont donc été limités :- au cours des essais de
reproduction,
on observe une diminution del’impor-
tance
numérique
desportées
et de laproportion
des mâles dans lesportées ;
- à la fin de
l’expérience,
le nombre moyen desleucocytes
contenu dans lesang est
plus
élevé que chez lestémoins ;
- le
poids
moyen de la rate des femelles estégalement plus
élevé que chez les témoins.La
signification
de ces faits estd’interprétation
difficile.Les observations effectuées au cours des essais de
reproduction
ne se sont accom-pagnées apparemment
d’aucune malformation chez lesjeunes,
dont la croissancea été d’autre
part
normale.L’existence
bien connue, enclinique
et enpathologie expérimentale,
des effets de certainstoxiques
sur lareproduction,
conduitcependant
a attacher de
l’importance
à tout effetparticulier
constaté dans ce domaine. Dans le casprésent,
il sera nécessaire de chercher si la diminution du nombre desjeunes
par
portée
est due à une action sur lesgamètes,
à des avortements ou à unerésorp-
tion
embryonnaire.
Quant
à l’accroissement du nombre desleucocytes
dans le groupequi
a reçu du métabisulfite depotassium,
il convient desouligner qu’il
n’estsignificatif
que chez lesmâles ;
le nombre desleucocytes
dans le sang du Rat adulte varie d’ailleurs normalement entre 6 00o et 18 ooo par ml(C R E SKOFF
etal., zg6a),
et il sutht d’unchoc
émotionnel,
ou d’un effort de l’animalqui
se débatpendant quelques
secondespour provoquer une
leucocytose.
Comme on l’a vu, il reste toutefois que les casd’hyperleucocytose
avecpolynucléose neutrophile,
enrapport
avec des lésionspulmonaires
retrouvées à l’examenanatomique,
sont un peuplus
nombreux chez les animauxqui
ont reçu du métabisulfite depotassium
que chez les témoins.Enfin, l’augmentation
dupoids
de la rate dans le groupequi
a reçu du méta- bisulfite depotassium
ne se manifeste que chez les femelles. Un trèspetit
nombred’animaux en est
responsable ;
l’omission de 2 d’entre eux(sur 25 )
suffirait à rendrenon
significative
la différence entre les deux lots.II. - Les résultats de notre travail concordent avec ceux d’autres études
signa-
lées au début de notre
exposé
mais différent de ceux obtenus par FITZHUGH et al.( 1946
)
et par Fr,nvzy et al.(1955).
a) Rappelons
que lespremiers,
au terme d’unetriple expérimentation
effectuéeen trois
époques
différentes et en utilisant diversprotocoles
dont l’un visait à déter- miner lapart
de l’avitaminoseB,
dans les troublesobservés,
concluaient au rôle certain des sulfites dansl’apparition
des troubles suivants :polynévrite,
yeux àlunettes, dépigmentation
desincisives,
modification del’utérus, atrophie
de diffé-rents
viscères,
calcification rénaletubulaire, atrophie
osseuse, nécrosemyocardique
localisée et
hyperplasie
squameuseépithéliale gastrique.
Un certain nombre de lésions n’ont pas été recherchées dans notre étude :
polynévrite ( 1 ), atrophie
osseuse, altération de l’utérus. Mais nous n’avons pas retrouvé les autres altérationssignalées
par FiTZHUGH et al. Plusieurs raisons peu- vent êtreinvoquées
pourcela,
et enparticulier
les différences dans les conditionsd’expérience.
Nous pensons que bon nombre d’altérations
signalées
dans le travail de FIT-ZHUGHet
al., correspondent
en fait à des modifications assez souvent rencontrées chez le ratâgé
etque
le nombre d’animauxutilisés,
tant chez les témoins que chez les animauxtraités,
nepermet peut-être
pas de conclure avec certitude à leur fré- quenceplus grande
chez les animaux traités. C’est le cas enparticulier
pour leslésions
dites de stéatosehépatique qui,
dans le dernier travail de FrTZxuGx et al.,se
répartissaient
comme suit :Il est vrai que pour d’autres altérations le
pourcentage
chez les animaux traitésparaît
un peuplus grand
que pour lestémoins,
maisjamais
le nombre de témoinsutilisé ne
permet
d’affirmer avec certitude que lesaspects
observés(assez
banalsen
eux-même)
sont valablementplus fréquents
chez les animaux traités que chez les témoins.Enfin,
dans un domaine aussi difficile que celui del’appréciation
de modifi-cations
statistiquement significatives
dans les études de toxicitéchronique,
il seraitbon de
pouvoir
confronter desimages histologiques
de ce que les auteurs consi- dèrent comme des altérationspathologiques.
Il est vraicependant
que lamajorité
( 1
) Signalons cependant qu’aucune crise de polynévrite n’a été observée.
des altérations
signalées
dans le travail de FITZHUGHetal.,
ne seraitqu’une
survenueplus fréquente,
chez les animauxtraités,
de modifications assez courantes en elles- mêmes et ne nécessitant pas,peut-être,
laprésentation
demicro-photographies.
b)
L’absence d’effet du métabisulfite sur ledéveloppement pondéral
des ani-maux et sur le
poids
du foieparaît
en discordance avec les résultats que deux d’entrenous avaient obtenus antérieurement avec FLANZY
( 1955 ),
résultatsrappelés
dansl’introduction de ce travail. Il est
possible
que ladivergence
soit due aux formes d’administrationrespectives
des sulfites(dans
levin,
ou en solutionaqueuse).
Maisil se
peut
aussiqu’elle résulte,
pour unepart,
des conditions d’alimentation différentes dans les deuxexpériences :
dans notre travail de r955, les animaux étaient soumis à unrégime
ne contenant que 2 mg de thiamine parkg,
alors que dans laprésente étude,
lerégime
en contenait environ le double. Or, HOTZEL(ig6i-i 9 62)
a constatéque des doses de
SO, qui
n’ont aucune action sur la croissance du Rat soumis à unrégime
alimentairelargement
pourvu enthiamine, peuvent
ralentir ledéveloppe-
ment
pondéral lorsque
lerégime
est peu riche en cette vitamine( 1 ).
III. - Il y a lieu de
rappeler
que les doses deSO,
administréespendant
laplus grande partie
del’épreuve atteignaient approximativement
q.o mg parkg
depoids corporel. Or,
un homme depoids
moyen(6 5 kg)
consommantquotidiennement
i litre de vin sulfité à la dose licite
maximum,
recevraitainsi
7 mg deSO,
parkg
de
poids.
Lerapport
entre les valeurs 40et peut paraître élevé ;
mais il est bieninférieur au
rapport
entre doses nontoxiques
pour les animauxd’expérience
et dosesréellement
ingérées
par l’Homme pour que lagarantie
d’innocuitépuisse
êtrejugée
suffisante
(2).
D’autre
part,
notretravail,
du fait mêmequ’il portait
sur desanimaux,
n’apas
permis
de vérifier l’existence de certainssymptômes subjectifs
dont seplaint parfois
le consommateur humainaprès ingestion
d’aliments ou de boissons forte- ment sulfités(irritation
du tractusdigestif, cephalées).
Reçu pour
publication
enjanvier
1965.SUMMARY
POTASSIUM METABISULPHITE : LONG TERM STUDY OF TOXICITY IN THE RAT
For 20 months 2 groups of 80 rats, 40 male and 40 femela, were fed on the same balanced ration, and to drink
they
weregiven
either distilled water or a solution ofpotassium metabisulphite,
1 .
2 g per litre.
There was no difference between the groups in
mortality, changes
inweight
or feed intake,nor in clinical
signs,
bloodpicture,
except for number of white cells, orweight
of different organs, except for spleen.Macroscopic
andmicroscopic
examination of viscera removed at the end of thetrial,
oesophagus,
stomach, small intestine, colon, liver,kidneys,
heart, lungs,spleen,
pancreas,adrenals, sections of muscle,
encephalus
and trachea showed no difference between the groups.( 1
) Cette constation suggère que les sulfites peuvent détruire la thiamine in vivo - comme ils la détruisent in vitro - ou entraver son utilisation par l’organisme.
( 2
) Dans le cas présent, il n’était pas possible d’expérimenter avec des solutions sulfitées beaucoup plus concentrées, qui auraient été refusées par les rats.