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Le métier de l assainissement en station d épuration aujourd hui et demain

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Academic year: 2022

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n A. JAÏRY1, G. LE PALABE2

Mots-clés: station d’épuration, compétence, réglementation Keywords: wastewater treatment plant, skills, regulation

Introduction

Dans l’exercice de son métier, l’exploitant de station d’épuration doit posséder des compétences diverses exigées par une pratique qui revêt des réalités très différentes. Comment ce métier a-t-il évolué ? Est-il amené à continuer à évoluer ? Cet article propose d’identifier les « pressions » passées et à venir et d’en illustrer les impacts sur la pratique de l’exploitation au quotidien, sur les compétences du personnel en charge des stations d’épuration.

1. Les fondamentaux demeurent

1.1. Les compétences requises pour exploi- ter une station d’épuration

Une station d’épuration, dans une première approche, c’est un ensemble de génie civil et d’équipements.

L’exploitant doit être en mesure d’en vérifier l’état, d’en assurer la maintenance et la mise

en œuvre. Cette activité requiert a minimades compétences en électricité, électromécanique, automatisme.

Une station d’épuration, c’est avant tout de l’eau qui traverse les ouvrages et rejoint le milieu naturel. L’hydraulique de l’ensemble est calée sur la construc- tion. L’exploitant de station d’épuration doit néanmoins appréhender cette composante, essentielle par exemple lors de la vidange des ouvrages.

L’épuration c’est aussi un ensemble de procédés mettant en œuvre des phénomènes physiques, des traitements biologiques et des réactions chimiques.

L’exploitant doit en appréhender les principes de dimension nement, les étapes de mise en œuvre, les règles d’exploitation afin d’ajuster au quotidien les consignes d’exploitation et de diagnostiquer au plus tôt les dérives de fonctionnement.

1.2. Organisation du travail et taille des ins- tallations

C’est le même intitulé de métier « exploitant de station d’épuration », mais son exercice revêt des réalités très différentes selon la taille de l’installation sur laquelle il s’exerce.

Il faut remarquer que près de 50 % de la capacité épuratoire est concentrée sur une centaine de sites associés à des agglomérations d’assainissement d’une

1 Siaap – 2, rue Jules-César – 75012 Paris.

2 Veolia Eau – 52, rue d’Anjou – 75008 Paris.

Taille agglomération d’assainissement

Nombre de stations

Capacité épuratoire totale (EH)

2000EH* 14284 5334004

> 2 000 EH et < 10 000 EH 2 031 13 959 644

10 000 EH et < 15 000 EH 272 4 692 635

15 000 EH et < 50 000 EH 476 15 327 536

50 000 EH et < 100 000 EH 126 9 794 249

100000EH 111 39891932

0 0 0 0 0 0 9 8 0

0 3 7 1

* l a t o T

Agglomération : une zone dans laquelle la population et/ou les activités économiques sont suffi- samment concentrées pour qu’il soit possible de collecter les eaux urbaines résiduaires pour les acheminer vers une station d’épuration ou un point de rejet final – au sens de la directive eaux résiduaires urbaines, 21 mai 1991 ; EH : équivalent-habitant. (Source : MEEDDM- BDERU, 2008 ; et

*IFEN 2008.)

Tableau I. La répartition des stations d’épuration en France par taille

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À l’autre extrémité du parc des stations, le travail et son organisation sont tout autre sur une usine telle que Seine centre – épurant les eaux d’un million d’habitants et exploitée par le Syndicat intercommunal d’assainissement de l’agglomération parisienne (Siaap). À cette échelle, une station d’épuration est un outil industriel complexe de par les technologies mises en œuvre et leur imbrication viales eaux retournées en tête de station ou en cours de traitement.

L’exploitation est structurée autour de plusieurs pôles de compétence :

– services fonctionnels : programmation et préven- tion, affaires générales et finances, ressources humaines, maîtrise d’ouvrage des travaux, process ;

– services opérationnels : exploitation Colombes, exploitation Clichy/La Briche, maintenance.

Pour son fonctionnement cette usine mobilise une centaine d’agents, qui travaillent en 3 × 8 avec des astreintes de trois niveaux (ingénieur, exploitation, électricité et automatisme).

Quelle que soit la taille de la station, l’agent d’exploi- tation doit intégrer une vision globale :

– la station d’épuration est en aval d’un réseau d’assainissement, organe de collecte et de transfert des eaux usées vers la station. Le dernier point de connaissance des effluents du réseau est donc l’entrée de la station, point par ailleurs très souvent le mieux instrumenté du réseau (connaissance du débit et de la qualité de l’eau) ;

– un procédé de traitement est en aval du précédent et peut donc subir les conséquences d’un changement de procédés (changement de réactif, par exemple). Il peut lui-même interférer sur toute l’usine viales retours en tête.

Cette vision globale est d’autant plus compliquée à appréhender que la station met en œuvre des procé- dés nombreux, complexes et que le personnel est affecté à une partie du traitement. La dispersion des équipes sur un même site doit alors s’accompagner d’outils et de temps de communication afin que chacun reste en contact avec l’usine et son contexte de fonctionnement global.

Pour illustrer cette contrainte, un changement de ré- actif (dans ses spécifications) sur la file de traitement de l’eau, voire le changement du réactif (exemple : sels de fer/sels d’aluminium) peut engendrer des mo- difications de pilotage d’un four d’incinération ou son traitement des fumées. Il est souhaitable donc de taille ≥ 100 000 EH. Ces stations représentent moins

de 1 % des installations en service en France.

À l’autre extrémité du parc des usines, 6 % de la capacité épuratoire est dispersée sur plus de 14 000 stations – soit plus de 80 % des installations dans des agglomérations d’assainissement d’une capacité ≤ 2 000 EH.

14 284 2 031

272 476 126 111

0

2 000 4 000 6 000 8 000 10 000

12 000 14 000

16 000 2 000 EH

 > 2 000 EH et < 10 000 EH   10 000 EH et < 15 000 EH   15 000 EH et < 50 000 EH   50 000 EH et < 100 000 EH 100 000 EH

Nombre de stations

EH : équivalent-habitant.

Figure 1. Nombre de stations en France en fonction de la taille de l’aggloméra- tion d’assainissement

13 959 644 4 692 635

15 327 536 9 794 249

39 891 932

0

5 000 000 10 000 000 15 000 000 20 000 000 25 000 000 30 000 000 35 000 000 40 000 000 45 000 000 2 000 EH

 > 2 000 EH et < 10 000 EH   10 000 EH et < 15 000 EH   15 000 EH et < 50 000 EH   50 000 EH et < 100 000 EH 100 000 EH

Capacité épuratoire (EH) 5 334 004

EH : équivalent-habitant.

Figure 2. Somme de la capacité épuratoire des stations d’épuration en France en fonction de la taille de l’agglomération d’assainissement

Sur les stations d’épuration de moins de 2 000 EH, un seul agent a la charge d’effectuer la surveillance des équipements et le réglage du fonctionnement. Il organise également l’évacuation des boues et des dé- chets (sables, graisses, refus de dégrillage). La fré- quence de passage et le temps de travail de l’agent d’exploitation sont variables suivant les procédés mis en œuvre, de quelques heures par mois sur une filière comprenant un dégrillage suivi de lagunes, par exemple, à quelques heures par semaine. Sur ces usines, l’agent d’exploitation est polyvalent et peu spécialisé. Il doit être en mesure d’alerter sur des observations (process, état des équipements) inhabi- tuelles nécessitant l’appui de spécialistes.

Un même agent d’exploitation peut être très polyva- lent lorsqu’il est amené à intervenir sur plusieurs sites de traitement, épuration et production d’eau potable, en réseau d’assainissement et sur le réseau de distri- bution, auprès des clients du service assainissement, du service eau potable.

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mener des études d’impact – avant un changement programmé – ou des études de recherche de cause de dysfonctionnement avec des experts procédés, d’une part, et des experts intégrant l’ensemble des impacts sur une usine, file eau, file boue, file air, d’autre part.

2. Des évolutions depuis 30 ans

2.1. Des exigences de performance accrues – une moindre tolérance de la défaillance opérationnelle

Il y a encore quelques dizaines d’années, un réseau d’assainissement qui débordait sur la voie publique par temps de pluie ou une station d’épuration qui perdait ses boues dans les mêmes conditions clima- tiques étaient perçus comme un désordre fonction- nel, mais également une fatalité associée à un élément non maîtrisable – le ciel.

L’évolution des conditions de vie quotidienne dans un environnement de plus en plus propre a conduit la population et donc les services publics à refuser les décharges d’ordures et d’encombrants sauvages tout autant que les débordements non maîtrisés des eaux usées sur la voie publique ou directement dans le milieu.

Pour l’assainissement, cette demande sociétale d’une meilleure maîtrise par temps de pluie s’est traduite dans la directive « eaux résiduaires urbaines » du 21 mai 1991 avec ces prescriptions (encadré).

Sur les réseaux d’assainissement jusqu’en entrée de station, chaque agglomération d’assainissement a revu le dimensionnement des collecteurs et s’est dotée parfois de capacité de stockage pouvant dépas- ser la capacité de traitement journalière de la station d’épuration afin de répondre à la double exigence : – de savoir collecter et traiter une part des effluents collectés par temps de pluie ;

– de ne plus engendrer de débordement non maîtrisé par temps de pluie, notamment ceux sur la voie publique, présentant par ailleurs des risques impor- tants pour les populations (liés au soulèvement des tampons des regards).

La demande des populations de vivre dans un envi- ronnement de mieux en mieux maîtrisé s’est traduite également par une moindre tolérance à l’interruption de service quelle qu’en soit la cause. La réponse des services est multiple :

• le maintien d’une pratique usuelle de conception des ouvrages : le choix des équipements stratégiques pour

lesquels le secours est installé, c’est-à-dire en condi- tion opérationnelle, prêt à prendre le relais de son homologue défaillant avec un pilotage automatisé ;

• le développement d’outils de connaissance à distance :

– au sein d’une usine avec la généralisation des supervisions dès lors que la station atteint une capacité de 10 000 EH ;

– au-delà d’un site, les télégestions permettent à un agent d’exploitation d’être alerté de la dérive d’un paramètre d’exploitation ou d’un dysfonctionnement.

Ces informations à distance lui permettent de hiérar- chiser ses interventions et de minimiser les temps pendant lesquels le service pourrait être dégradé ; – une approche de la maintenance des équipements qui intègre bien sûr une maintenance préventive, mais également une maintenance conditionnelle : des analyses vibratoires sur les machines tournantes, la thermographie des armoires électriques, par exemple.

Ces interventions apportent une connaissance de l’état des équipements orientant les actions de main- tenance sur les équipements qui le nécessitent et avant la défaillance qui pourrait pénaliser l’atteinte des objectifs du service.

Les bénéfices de ces conditions techniques sont effectivement mesurables sur la fiabilité des stations d’épuration, mais également sur l’organisation du travail : les stations d’épuration avec du personnel

(Extrait de la directive « eaux résiduaires » du 21 mai 1991 – Annexe 1)

« A. Systèmes de collecte*

Les systèmes de collecte tiennent compte des prescrip- tions en matière de traitement des eaux usées.

La conception, la construction et l’entretien des systèmes de collecte sont entrepris sur la base des connaissances techniques les plus avancées, sans entraîner des coûts excessifs, notamment en ce qui concerne :

– le volume et les caractéristiques des eaux urbaines résiduaires ;

– la prévention des fuites ;

– la limitation de la pollution des eaux réceptrices résul- tant des surcharges dues aux pluies d’orage. »

*«  Étant donné qu’en pratique il n’est pas possible de construire des systèmes de collecte et des stations d’épuration permettant de traiter toutes les eaux usées dans des situations telles que la survenance de précipitations exceptionnellement fortes, les États membres décident des mesures à prendre pour limiter la pollution résultant des surcharges dues aux pluies d’orage. Ces mesures pourraient se fonder sur les taux de dilution ou la capacité par rapport au débit par temps sec ou indiquer un nombre acceptable de surcharges chaque année. »

Prescriptions relatives aux eaux urbaines résiduaires

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logé sur site, voire présent en permanence 365 jours par an, sont de plus en plus rares en France. Les exceptions relèvent de procédé tel que les fours requérant un délai d’intervention réduit (inférieur à la demi-heure) donc une vigilance de proximité.

2.2. Des exigences d’intégration environ - nementale

En parallèle de l’accroissement des attentes sur la fiabi- lité du service, la population exprime de fortes exigences d’intégration environnementale des équipe- ments. Cela peut se résumer tel un slogan publicitaire :

« ne plus voir, ne plus sentir, ne plus entendre ».

Le confinement des ouvrages de traitement peut aller jusqu’à la mise en souterrain de la quasi-totalité de la structure, ne laissant visibles – à l’œil exercé du professionnel – que les accès.

Cette tendance s’exprime d’autant plus fortement que l’emprise au sol est une ressource rare et/ou chère dans les zones de fortes densités de population, telle qu’en région parisienne, ou de forte compétition à l’usage des sols, telle qu’en zone touristique.

Ainsi, la modernisation de Marne Aval s’est accom- pagnée d’une augmentation de sa capacité de traite- ment de 30 000 m3/j à 75 000 m3/j par temps sec et 125 000 m3/j par temps de pluie.

Si Marne Aval a doublé sa capacité de traitement, son emprise au sol est réduite de 8 à 3 hectares laissant une large place aux aménagements paysagers. Les deux tiers du site seront ainsi engazonnés et intégre- ront une zone d’expansion des crues.

Les ouvrages anciens ont laissé place à des construc- tions compactes et modernes, utilisant des matériaux épurés comme le verre et le béton poli. Les équipe- ments seront confinés à l’intérieur des bâtiments et l’air sera traité afin d’éliminer tous les risques de nui- sances pour les riverains.

Pour le fonctionnement de l’usine, le Siaap a privilégié : – des équipements limitant la consommation des produits nécessaires au traitement des eaux ;

– des sources d’énergie renouvelable : panneaux solaires et turbine-vapeur pour récupérer de l’électri- cité et alimenter l’usine.

Pour éliminer les déchets (boues d’épuration), le Siaap a choisi, comme pour son usine Seine Centre à Colombes (Hauts-de-Seine), l’incinération. Cette technique répond à des objectifs précis :

– préserver les riverains des nuisances olfactives liées au stockage et au transport des boues ;

– limiter la circulation de camions aux abords du site.

Des évolutions comparables ont été réalisées sur la station de Seine Centre.

La grande innovation de Seine Centre est sa capacité à changer de régime par temps de pluie. Alors que par temps sec le traitement s’effectue à 2,8 m3/s en quatre étapes successives, par temps de pluie le débit peut atteindre 12 m3/s. Un traitement en deux étapes permet alors de rejeter à la Seine une eau épurée de qualité satisfaisante.

L’intégration souterraine des ouvrages de traitement habituellement situés en plein air est une conception exceptionnelle. Ainsi, les risques de nuisances olfac- tives ont totalement été supprimés. Toujours par souci de protection des riverains, les fumées émises lors des traitements sont lavées et filtrées pour préserver la qualité de l’air.

2.3. Les conséquences sur les choix techniques et les conditions d’exploitation

Dans ce nouvel environnement de travail, l’exploi- tant est confiné tout comme les ouvrages. Il travaille au sein d’un génie civil fermé et dont les échanges avec l’air externe font l’objet d’une grande vigilance traduite dans les équipements :

– sas sur tous les accès, piétons et véhicules ; – évacuation de l’air de l’intérieur vers l’extérieur après traitement de désodorisation.

L’exploitant travaille parfois en permanence en lumière artificielle. Outre les éventuels impacts phy- siologiques négatifs, variables d’un individu à un autre, l’agent d’exploitation n’a plus la connaissance directe (visuelle) de la météorologie locale alors que la pluie a une influence directe sur son activité.

Le confinement des ouvrages a induit une conception renforcée sur leur ventilation et le traitement de l’air avant son rejet dans l’atmosphère. Le confinement accélère également le vieillissement du matériel plus exposé aux gaz émis par les effluents traités.

Toutes ces évolutions se sont donc aussi traduites par des coûts d’investissement et des coûts d’exploitation plus élevés. Les conditions de travail sont également plus difficiles pour le personnel d’exploitation.

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Depuis plusieurs années, le Siaap est engagé dans un programme important de construction de nouvelles usines d’épuration et de modernisation de ses installations existantes.

Le développement des nouvelles technologies à maîtri- ser, combiné à la nécessaire modernisation des procédés datant de plusieurs dizaines d’années, a conduit l’exploi- tant à une réflexion sur les mutations profondes que ces réalisations entraînaient.

Parmi ces réflexions, un premier thème s’est imposé de lui-même, celui de la sécurité industrielle. L’étude de l’accidentologie des principaux sites industriels et le récent retour d’expérience des mises en service ont mis en valeur la nécessité d’étudier particulièrement la sécurité des installations de production et d’utilisation du biogaz et celles des procédés de fabrication, de manu- tention et de stockage des boues séchées.

Un groupe de travail biogaz, constitué d’ingénieurs sécurité, de conducteurs d’opération, d’exploitants et d’un bureau d’étude spécialisé, s’est particulièrement penché sur les accidents, quasi-accidents et incidents répertoriés sur les deux installations de méthanisation de Seine Aval et de Seine Amont. Rapidement s’est imposée au groupe la nécessité de collecter et d’harmoniser les dispositions réglementaires, règles de l’art et bonnes pratiques, totale- ment dispersées et souvent récentes à travers les différents codes (environnement, travail, santé, Codeti…), les dif férents arrêtés et circulaires (arrêté ICPE 98, arrêté type combustion/compression, circulaire combustion biogaz…) et les directives (DESP…), ainsi que les recom- mandations et avis.

Un guide1d’application des exigences réglementaires et pratiques a donc été réalisé avec, en particulier, une partie « méthodologie d’intégration de la sécurité dans la conception et la réalisation des installations du Siaap » qui sera intégrée dans les cahiers des charges des futurs appels d’offres de conception-réalisation. Une autre partie « exigences de conception applicables aux compo- sants des systèmes biogaz » détaille, pour les marchés de travaux, les spécifications pour les équipements de compression, tuyauterie, torchère, pot de purge, automa- tisme et détection de gaz.

En ce qui concerne le thème du séchage et du stockage des boues de station d’épuration, le Siaap, après une série

d’incidents relatifs aux phénomènes d’autoéchauffement, a constitué un partenariat avec les plus grands acteurs du traitement de l’eau et l’agence de l’eau Seine-Normandie et sollicité l’aide de l’Ineris pour l’étude expérimentale d’un protocole relatif à la caractérisation des phénomènes exothermiques de boues séchées de différentes stations d’épuration en France.

L’augmentation de la réactivité des boues vis-à-vis de l’autoéchauffement, observée depuis 10 ans, entraîne les constats suivants :

– à ce jour, certaines boues séchées sont considérées en tant que matières autoéchauffantes pour le transport, soit un classement 4.2 dans le cadre de la réglementation du transport des matières dangereuses. Ce classement implique des contraintes logistiques et financières importantes puisque les produits classés 4.2 doivent être transportés dans des remorques spéciales (cas de la filière visant la valorisation agricole des boues séchées) ; – des questions se posent aujourd’hui à la profession sur le concept de traitement des boues humides par séchage, du fait des risques inhérents à cette opération et à celle du stockage de ces boues (incendie, explosion).

Ces constats ont suscité la nécessité d’identifier des critères de réactivité des boues selon un protocole expérimental et répondant aux quatre points essentiels suivants :

• Quels sont les paramètres qualitatifs importants à analyser pour caractériser la réactivité d’une boue séchée à basse température (taux en fer, taux des matières volatiles, taux d’humidité, taux de soufre…).

• Comment caractériser les réactions exothermiques de boues séchées à basse température qui sont susceptibles d’accélérer la cinétique d’autoéchauffement.

• Comment détecter précocement les phénomènes d’autoéchauffement et comment agir sur un échauf - fement en cours d’un stockage de boues séchées permet- tant d’éviter les phénomènes de thermolyse.

• Quelle est la méthodologie d’évaluation des risques d’autoéchauffement de boues séchées à suivre dans le cas d’un procédé de séchage et de stockage de boues séchées.

Sécurité industrielle : méthanisation et séchage des boues d’épuration

■par C. Mandereau (bureau d’étude Aristot), S. Evanno (Ineris), M. Riotte (Siaap)

1 Le Guide d’application des exigences réglementaires et pratiques sur le Biogaz est disponible au Siaap sur demande, de même que le rapport final sur l’auto-échauffement des boues séchées, qui l’est également auprès de l’Astee.

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de débit en entrée de station sont parfois rapides et très significatives comme l’illustre la figure 3.

2.4. La communication envers les riverains – l’acceptabilité sociétale

Pour atteindre les exigences des performances épuratoires, l’exploitant doit maîtriser des outils industriels de plus en plus complexes, souvent dans des tissus urbains denses.

L’acceptabilité de ces installations implique une instauration de dialogues réguliers avec les riverains.

Ainsi, en 2009, le Siaap a inauguré la maison de l’environnement créée selon la démarche haute qualité environnementale (HQE).

Il s’agit d’un espace d’accueil privilégié du public et d’un pôle d’information pour les associations de riverains.

Par ailleurs, le riverain est compétent et son avis est pris en compte. À titre d’exemple, les jurys de nez du Siaap sont constitués par des habitants des communes voisines des usines d’épuration, volontaires pour participer à une semaine de tests olfactifs par mois.

Un autre exemple de communication envers les rive- rains et de transparence s’illustre par le déploiement du

« Système de prévision des odeurs du Siaap » (Sypros)3. Il s’agit d’un modèle de dispersion des odeurs permet- tant de visualiser l’impact des émissions odorantes des usines du Siaap dans l’environnement. L’outil est accessible à tous les usagers via le site Internet (www.siaap.fr).

Depuis 30 ans, l’exploitant de station d’épuration a appris à communiquer sur son métier et ses contraintes avec des personnes non spécialistes. Il a aussi appris à les écouter afin de traduire les attentes du public dans sa pratique au quotidien, dans la limite des enjeux techniques et financiers.

3. De nouvelles compétences

Aujourd’hui, avec la directive « eaux résiduaires urbaines » (ERU) et la directive cadre sur l’eau (DCE), le périmètre de l’exploitant de station d’épu- ration est élargi. En effet, répondre aux exigences de ces directives impose une maîtrise tant en amont du réseau qu’en aval (à savoir le milieu naturel), notam- ment pour la masse d’eau touchée par le rejet.

• En amont du réseau: la notion du débit de réfé- rence impose à l’exploitant une régulation des flux arrivant à la station d’épuration (STEP). Les variations

• En aval du rejet: la notion de masse d’eau et du bon état introduite par la DCE impose une nouvelle approche pour les exploitants des STEP.

Adoptée le 23 octobre 2000 et transposée en droit français le 21 avril 2004, la directive cadre sur l’eau (DCE) dresse la méthodologie d’une gestion et d’une protection des eaux par bassin hydrographique.

Cette directive innove en plaçant le milieu naturel au centre de la politique de l’eau. Elle institue une approche globale autour d’objectifs environnemen- taux avec une obligation de résultats.

Elle fixe un objectif clair et ambitieux : le bon état des eaux souterraines, superficielles et côtières en 2015, avec des dérogations (2021 et 2027) à condition de les justifier.

Cette directive introduit de nouvelles notions (bon état écologique et chimique, masses d’eau, masses d’eau fortement modifiées, zone de mélange…) qui changent l’approche actuelle des obligations des moyens.

Aussi, pour tenir ces objectifs, l’exploitant doit maîtriser l’ensemble des entrants, notamment la qualité de l’effluent, pour anticiper les impacts sur la sécurité des agents, la traitabilité et la destination des sous-produits.

La DCE prévoit de réduire ou de supprimer les rejets des substances dangereuses pour atteindre le bon état chimique des masses d’eau.

La directive 2008/105/CE du 16 décembre 2008 (JOUEdu 24 décembre 2008) établit des normes de qualité environnementale (NQE) dans le domaine de l’eau pour les substances prioritaires et autres

0 1 2 3 4 5 6 7 8

27/04/09 27/04/09 27/04/09 27/04/09 27/04/09 27/04/09 27/04/09 27/04/09 28/04/09

Débit total (m3/s)

Figure 3. Exemple de débit instantané (m3/s) mesuré en entrée de station d’épuration

3 I. Isaac-Ho Tin Noe, F. Siino, M. Diallo : « Sypros : un outil pour maîtriser en temps réel les odeurs dans l’exploitation d’une station d’épuration  », Techniques Sciences Méthodes, 2012 ; 5 : 61-70.

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polluants énumérés à l’annexe I partie A, en applica- tion de l’article 16 de la directive 2000/60/CE (direc- tive cadre dans le domaine de l’eau).

Pour chacune des substances, sont fixées : – une NQE MA (valeur moyenne annuelle) ; – une NQE CMA (concentration maximale admissible).

L’état chimique est défini suivant deux classes selon qu’il se situe au-dessus ou en dessous des NQE, aussi bien en moyenne annuelle qu’en valeur maximale admissible. Le bon état chimique est atteint lorsque l’ensemble des NQE sont respectées.

La surveillance et la réduction de ces substances dans l’environnement s’exposent à deux difficultés majeures : – d’une part, bien souvent, l’origine et les flux de ces substances ne sont pas connus ;

– d’autre part, les méthodes analytiques et les proto- coles de prélèvements utilisés sont pour une majorité de substances en cours de mise au point. À cela s’ajoutent des niveaux très bas à l’origine d’effets, et des limites de détection et de quantification toujours plus basses auxquelles les appareils de mesure doivent descendre pour parvenir à les évaluer.

La problématique des substances dangereuses consiste : – à dresser un état des lieux de ce que l’on sait aujour- d’hui sur leurs propriétés dans l’eau (hydrophile, hydrophobe, adsorption sur matières en suspension MES, fraction dissoute, biodégradation, etc.) ; – d’identifier les intrants au sein du système d’assai- nissement ;

– et, enfin, de déterminer les substances qui présen- tent les risques de contamination les plus préoc - cupants pour le milieu récepteur.

L’exploitant doit prendre des décisions dans ce domaine en cours de défrichage alors que les connais- sances scientifiques en termes de propriétés physiques, chimiques, et en termes d’abattement au sein des filières usuelles de traitement des eaux usées évoluent.

À cela s’ajoute la nécessité d’acquérir de nouvelles compétences dans un domaine à la frontière de la recherche pour garantir la fiabilité des résultats par la maîtrise de nouveaux modes de prélèvement et des protocoles analytiques, savoir interpréter les résultats souvent proches des limites de quantification au regard des enjeux environnementaux.

Je suis exploitant, j’ai une valeur associée à une substance (exemple : tributylétain) – dois-je engager une action corrective ? Cette action doit-elle relever

du traitement ? de la police de réseau ? ou attendre une substitution de molécules par les fabricants ? (règlement Reach.)

Il faut aussi souligner sur cette problématique des substances dangereuses l’importance de trouver un équilibre entre la vision curative et la vision préven- tive (réduction des émissions par la formulation – Reach, modifications des pratiques ou maîtrise des intrants notamment les raccordés non domestiques).

Néanmoins, pour mieux doser cet équilibre, il est indispensable d’adapter les stratégies par substance.

Cela passe par :

– définir des méthodologies pour une connaissance des flux par substance selon leurs origines ;

– partager cette connaissance entre les acteurs : services de l’État, agences de l’eau, collectivités terri- toriales, exploitants, industriels et le monde agricole ; – adapter les valeurs d’émissions (VLE) des usagers non domestiques raccordés à une STEPau respect des NQE.

L’acquisition de ce préalable permettra de hiérarchiser et de choisir la solution au meilleur rapport coût/

bénéfice acceptable par l’ensemble des acteurs.

Conclusion

Depuis l’adoption en décembre 2000 de la DCE qui fixe des objectifs d’atteinte du bon état et de réduc- tion des flux de micropolluants rejetés vers les milieux aquatiques à l’horizon 2015, les fondamen- taux demeurent pour l’épurateur de l’eau et son rôle d’acteur de l’environnement est renforcé.

Ainsi, son périmètre géographique et ses compé- tences se sont élargis pour garantir des objectifs de résultats d’une production pour les différentes composantes : biodiversité, eau, boues, air et bruit tendant vers le « zéro nuisance » ou le niveau de nuisances socialement acceptable.

De plus, si les objectifs de la qualité environnemen- tale de la masse d’eau, transcrite dans la DCE puis déclinés dans les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), sont connus, il reste néanmoins à définir pour tous les contributeurs de la masse d’eau, dont la station d’épuration urbaine, l’effort économique et environnemental acceptable.

L’interrogation est comment définir aujourd’hui les investissements techniques et humains pour satisfaire les objectifs qualitatifs de la DCE en cours de traduc- tion en objectifs opérationnels ?

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D’hier vers demain, cet article dresse le profil de l’exploitant de station d’épuration. Un métier à diverses facettes de par les compétences à exer- cer, dans des contextes organisationnels variés, notamment en liaison avec la taille des installa- tions. Depuis 30 ans, les évolutions du métier ont répondu à des exigences accrues en qualité de service, réponses à des demandes sociétales d’une plus grande intégration, voire d’une plus grande discrétion de l’activité. Ces évolutions se sont inscrites par ailleurs dans un cadre régle-

mentaire en mouvement avec l’intégration des directives de l’Union européenne.

La transcription de la directive cadre sur l’eau est un chantier qui ouvre de nouveaux horizons d’activité pour l’exploitant de station d’épuration. Des ques- tions nombreuses sont en suspens et y apporter des réponses est un préalable à la définition du métier pour demain. Il revient aux acteurs de l’assainis - sement d’identifier des actions mesurées pour répondre au mieux aux enjeux environnementaux dans un contexte économique difficile.

R é s u m é

Le métier de l’assainissement en station d’épuration aujourd’hui et demain A. JAÏRY, G. LE PALABE

This article draws up the profile of skills involved in operating a wastewater treatment plant (WWTP) with a look at changes at stake in this profession for the past decades, as well as prospects for the future. Operating a WWTP involves various skills, exercised in different organisational contexts, which are notably linked to the size of the WWTP.

The job has evolved in order to meet new requirem ents in terms of service quality and societal demands for a better integration, some- times up to a visual disappearance of the plant.

These changes have developped within a variable

ruling system in accordance with the European Union Directives.

The transcription of the Water Framework Directive (2000/EC/60) is a toil, which opens new possibilities for the WWTP’s operator. Many ques- tions are still unresolved but to find answers is a prerequisite for the definition of this job in the future.

It is up to wastewater stakeholders to identify measured actions that will bring the best possible answer to environmental issues at stake in a difficult economic context.

A b s t r a c t

Skills involved in operating a wastewater treatment plant: present and future prospects A. JAÏRY, G. LE PALABE

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