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André BERRY. Conte et chant de la seconde vie poèmes

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Academic year: 2022

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André BERRY

L'ANCIEN D'EUROPE

Conte et chant de la seconde vie poèmes

Après un silence, André Berry, précédemment attaché, dans le TRESOR DES LAIS, à conter et à chanter sa « Première vie » (1902-1940), donne une suite au « Conte et Chant » de sa « Seconde vie », ouverte en 1948, par la COURSE D'ENTRE DEUX PORTS. La guerre finie, l'ancien voyageur, sortant de la « cage France », s'avise de confronter, avec ce qu'un lustre calamiteux a laissé de sa propre personne, ce qu'il a laissé de sa vieille Europe. Pèlerinage, d'abord aux premiers pays qui ont vu les errances pédestres de sa jeunesse. Revoici Bruges, avec le souvenir de la nonne en fuite dont il n'a pas osé exploi- ter la faiblesse ; Anvers, plein de fantômes des grasses filles qui l'on initié ; Delft, hanté par le spectre du Libertin malade dont l'image terrifiante l'a toujours poursuivi ; Leyde, avec la cré- mière qu'il a failli épouser ; Amsterdam, où il cherche le vété- rinaire, le marchand de couronne juifs qui l'ont jadis hébergé et employé ; puis toute l'Allemagne, où il exerça jadis tant de métiers, depuis celui de bedeau jusqu'à celui d'acteur ; et l'Au- triche : Vienne, où il s'éprit de la fille d'un vigneron du Da- nube ; Salzbourg, où il fut l'amant d'une organiste ; puis l'Italie, courue en bachique compagnie : Vérone, avec l'ineffable prosti- tuée Giulietta ; Rome, avec la comtesse qui lui révéla le plaisir dans la beauté ; Naples, enfin... Mais à quoi bon poursuivre ? Dans cette Europe détruite, asservie, affadie, cafarde, Berry ne trouve plus rien de ce qui justifiait ses jeunes vagabondages, non plus qu'en lui-même il ne retrouve ni les forces ni les appé- tits d'autrefois. Sur les bateaux qui s'offrent à lui remontrer l'Angleterre, l'Espagne, la Grèce, la Turquie, il refuse de s'em-

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barquer, préférant demander « une âme neuve à d'autres conti- nents ».

Le voici bientôt, en effet, à Alger, ville de sa conception, où d'abord lui apparaît, conforme aux étranges souvenirs de sa pré-enfance, le monde arabe : dans le Désert, où une nouvelle Antinéa ne parviendra pas à le séduire ; à Fez, qui, après les plus folâtres velléités, le trouvera finalement sourd aux séduc- tions de l'Islam ; à Marrakech, où de suprêmes échecs le per- suadent de sonner la retraite. C'est à son Bordeaux natal que l'Ancien d'Europe, un moment devenu l'Intrus d'Afrique, de- mandera le dernier refuge : mais la ville le boude, la campagne ne lui présente plus que des maisons vides, des visages indif- férents et fanés. A bout de forces, il vient, sous le cyprès de Cénac, demander un tombeau où il dormira, parmi le concert laudatif des cloches de son pays, consolé de toutes ses décep- tions.

Tel est l'argument de ce livre, à la foie européen, africain et girondin, qui promène dans des décors si variés un personnage lui-même si composite : ici folâtre et enjoué, là inquiet et pro- fond. Livre plus moderne, plus actuel peut-être que tous les précédents, où, à la faveur de cette combinaison originale du conte rimé et de la poésie chantée qu'est le lai des deux Tré- sors, André Berry, sans cesser de renchérir sur les disciplines les plus fécondes, continue de rajeunir, en puisant à toutes les sources, le vers français.

Un vol., 248 pages, in-16 jésus 10 ex. num. de 1 à' 10 sur Pur Fil Johannot.. 1.800 fr. 900 fr.

980 ex. num. de 11 à 990 sur Alfa Cellunaf . . 1.800 fr.

DU MEME AUTEUR : LES ESPRITS DE GARONNE, 2 vol., 300 pages, in-16

jésus 600 fr.

LE TRESOR DES LAIS, 2 vol., 308-288 pages, in-16

jésus 600 fr.

LA COURSE ENTRE DEUX PORTS, 2 vol., 272 pages,

in-16 jésus 400 fr.

LES AMANTS DE QUINSAC, 208 pages, in-8 c o u r . . 300 fr.

SONGE D'UN PAIEN MODERNE, 92 pages, in-8 cour. 500 fr.

R E N E J U L I A R D 30, rue de l'Université

P A R I S

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L'ANCIEN D'EUROPE

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DU MÊME AUTEUR Chez René Julliard

Les Esprits de Garonne, geste champêtre, I vol., 1941; 2 vol., 1943.

Le Trésor des Lais, Conte et Chant de la Première Vie (Préambule, Lais de Gascogne ou Le Rappel d'Enfance. Chantefable de Murielle et d'Alain. La Corbeille de Ghislaine. Le Congé de Jeunesse. Epilogue. Le Pot-Pourri). 2 vol., 1946.

La Course d'Entre deux Ports, Conte et Chant de la Seconde Vie, Tome I; 1947.

Songe d'un Païen Moderne, 1951.

Les Amants de Quinsac, roman, 1949.

Chez Henri Lefèbvre Les Aïeux Empaillés, troisième présentation, 1950.

Poèmes Involontaires, 1949.

Chez Flammarion

La Fiancée de Saint-Omer, roman, 1942 (précédemment Le Silence sous les Panonceaux, Firmin-Didot, 1942).

Le Puceau Vagabond, 1947.

Chez Denoël

Les Expériences Amoureuses, roman; 2 vol., 1947-1950.

Aux Editions de la Tournelle Contes Milésiens tirés d'Apulée, 1936. Etc...

TRAVAUX D'ERUDITION OU DE CRITIQUE Florilège des Troubadours (Firmin-Didot, 1930).

Les Eglogues de Pey de Garros (Privat, 1953).

Traductions de : Théocrite (en collaboration avec Edgar Valès;

Union Bibliophile de France, 1946); Virgile (id. Jacques Hau- mont, 1945); Catulle (J. Haumont, 1942); Jean Bonnefons (en collaboration avec E. Valès; J. Haumont, 1944); etc.

EDITIONS DE LUXE

Le Rappel d'Enfance (illustré par V. Le Campion; chez J. Hau- mont, 1945).

Chantefable de Murielle et d'Alain (illustrée par Tavy Notton : chez H. Lefèbvre, 1948). Etc...

VOIR : Pierre Labracherie, La Vie Inimitable d'André Berry, pp. 215-220; E. Valès, André Berry, poète des Esprits de Garonne et du Trésor des Lais, pp. 261-266.

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ANDRÉ BERRY

CONTE ET CHANT DE LA SECONDE VIE LIVRE II

L ' A N C I E N

D'EUROPE

SUIVI DE

L'INTRUS D'AFRIQUE ET DU

TOMBEAU BORDELAIS

RENÉ JULLIARD 30, rue de l'Université

PARIS

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IL A ÉTÉ TIRÉ DE CET OUVRAGE SUR PUR FIL JOHANNOT, DIX EXEMPLAIRES NUMÉROTÉS DE I A X ET, SUR PUR ALFA CELLU- NAF, NEUF CENT QUATRE-VINGT- DIX EXEMPLAIRES NUMÉROTÉS DE II A 1.000, PLUS QUELQUES EXEMPLAIRES D'AUTEUR, LE TOUT CONSTITUANT L'ÉDITION

ORIGINALE.

Copyright 1954 by René Julliard, Paris. IMPRIMÉ EN FRANCE

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L'ANCIEN D'EUROPE

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PREMIÈRE ÉTAPE

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COMPLAINTE PARISIENNE DU VIEIL EUROPEEN Paris, pour moi bastille plus qu'étoile, Châtelet sombre où je bâille encavé, Par Châtelet, de Bastille en Etoile, J'ai trop longtemps battu ton noir pavé.

Après cinq ans de sanglantes bagarres, Plus qu'Opéra, que Crillon et que Ritz, J'aime à présent, Paris, tes grandes gares, Tes Nords fumeux, tes gluants Austerlitz.

Au soir tombant je vais sous les marquises, Par les longs quais guettant l'ultime train Qui pour rouler vers les Terres Promises Débloquera son implacable frein.

Pays, hélas! par ce dernier convoi, Qu'ai-je à revoir de vous, et vous de moi?

Rails délaissés où glisse encor mon rêve, Rais lumineux qui tremblez dans ma nuit, Vers l'estuaire et le col et la grève Votre chemin derechef me conduit.

Voici les bois, les coteaux, les campagnes, Des fleuves clairs l'ondoyant serpentin, Les longs tunnels tordus sous les montagnes, Et les sommets embrumés au matin.

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A Rotterdam, entre deux rangs de lampes, Du triple Rhin j'enjambe la largeur;

Du vert Simplon, par les abruptes rampes, Je glisse, à l'aube, au bleu du Lac Majeur.

Pays, hélas! par ce dernier convoi, Qu'ai-je à revoir de vous ,et vous de moi?

Il siffle! Il part! « Voyageurs, en voiture! » O quel ancien, ô quel nouveau frisson Quand sur le rail qui rend un long murmure Les lourds essieux rescandent leur chanson!

Vous revoilà, que la machine enfume, Buissons fleuris, talus jaune-étoffé;

D'un nez avide ensemble je vous hume, Sucre des champs, soufre du fer chauffé.

Tableaux je vois de Suisse et d'Allemagne Se succéder aux cadres des carreaux;

Sur l'Italie et la Flandre et l'Espagne La cage France écarte ses barreaux...

Pays, hélas! par ce dernier convoi, Qu'ai-je à revoir de vous, et vous de moi?

Adresse

O toi qui fus mon champ de vie, — Europe, — O mon Etat, mon clos d'élection,

O zodiaque où tint mon horoscope, Mon ciel lacté, ma constellation, — Scène et décor de tous les personnages Que j'ai joués aux tréteaux d'ici-bas, — Multiple Europe, Europe aux cent visages, Vœu de mes mains, raison de tous mes pas, —

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Sur les trottoirs de tes villes minées Fais place encore à mes pieds lézardeux, Et confrontons, vieillis de cinq années, Ce que ce lustre a laissé de nous deux.

Pays, hélas! par ce dernier convoi, Qu'ai-je à revoir de vous, et vous de moi?

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LAI DE LA NONNE DE BRUGES C'est sous de semblables déluges Qu'un soir, avec trente ans de moins, Arrivant je reconnus Bruges Au même concert de coincoins.

Comme alors le cygne est sous l'arbre.

Comme alors, au milieu d'un lac, Des deux vers gravés dans son marbre M'accueille un dolent Rodenbach.

Quelque chose encor dans tes cloches, O ville du nord, meurt de moi, Quelque chose que ton beffroi Egrène argentin dans ses croches!

C'est le doux Berry jeune et frais Qui, féru de tes murs gothiques, Promenait ses rêves mystiques Aux pavés herbeux de tes quais!

Première de mes jeunes villes Que retrouve mon âge mûr, Des cités, parmi tant de milles, La seule qui m'ait connu pur, Sur tes ponts décorés de Vierges, Bruges, par combien d'autres soirs Ai-je regardé les longs cierges S'écourter dans les reposoirs!

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Par combien d'autres matinées, Vieux logis, gâbles dentelés, Auvents, toitures chantournées, Vous ai-je déjà contemplés!

Triple Saint-Sauveur, Notre-Dame, A l'envers que de fois mirés Dans les eaux comme dans mon âme Se sont vos bonnets mordorés!

Toujours sur les antiques dalles Je rôdais, ne quittant les eaux Que pour m'égarer dans les salles Aux murs couverts de vieux tableaux : Soit que de peinture en peinture, Dans le noir Muséion d'alors, De David et de La Pasture J'allasse épuiser les trésors;

Soit que, dans leur frileux hospice Faisant retentir mon ding-ding, Pieuse visite je fisse

Aux Saintes du tendre Memling : Surtout, par la Vierge à la Pomme, Par son beau front plat, son long nez, Jusqu'à perdre appétit et somme Mes sens étaient illuminés.

J'avais un grand lit à courtines A l'Hôtel de l'Etoile d'Or : Baldaquin, blanches mousselines D'un siècle, ou plus vieilles encor : J'y restais comme un saint en châsse Ou sur le sépulcre un gisant, Les mains jointes, au ciel la face, A mes chères saintes musant.

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Ce qui paraissait dans mes rêves En ces prudes jours anciens, Ce n'était les colliers des Eves Pendant aux nus vénitiens.

Toujours ma modeste Madone, Une croix perleuse à son sein, Blonde sous la blonde couronne, Passait, la chaste pomme en main.

Un soir, de Toussaint la vigile, Suivant sur le pavé peu sec Dans les environs de Saint-Gille La ruelle où vécut Van Eyck (Il était onze heures peut-être), — Soudain au plus haut d'un couvent Grillagé moins une fenêtre, Je vois béer un contrevent.

La croisée, aussi, s'entrebâille.

Dans mon coin je demeure coi, Et bientôt, contre la muraille, Vers le quai je vois glisser quoi?

Tout un drap suivi de son double, Plus ou moins en corde roulé, Lequel, sous mon œil déjà trouble, Jusqu'au sol a bientôt coulé.

Puis, au fil de la blanche échelle, Comme ange des cieux, descend qui?

Rien moins qu'une blonde pucelle En nonnette plus qu'à demi, Qui, bientôt, les jambes desserre, Et vite, au prix d'un petit saut Ayant mis le pied sur la terre, Prend sa course comme un levraut.

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Je coupe par une autre rue. Contre moi, comme incidemment, Elle butte, et tout éperdue, Bredouille un discours en flamand.

« Français! » fis-je, un peu ridicule.

« Français? dit-elle, chevalier?

Alors arrachez Sœur Gudule Au Christ devenu son geôlier ! » Je dévisageai la rebelle :

Vingt ans, un Memling trait pour trait, Vierge, en tout, identique à celle Dont j'aimais si fort le portrait : La même très longue figure, Le nez droit, et jusqu'au bandeau, Sauf qu'il ne serrait chevelure Mais des fronts cernait le plus beau.

« Oui, sauvez, je vous en supplie, Dit-elle en me pressant les mains, La femme que le monde oublie Derrière ces murs inhumains;

La pauvre Sœur-Noire, oh! de grâce, Tirez-la de cette maison

Où toute sa jeunesse passe Dans le jeûne et dans l'oraison! » Par le bras, ne sachant que faire, D'un timide bras je la pris : Le long du canal solitaire Nous allions, gris pour les chats gris; D'un vœu de novice égarée Elle me disait la rançon,

Et la chair en vain macérée, Le fouet appuyant la leçon.

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Jusqu'au Lac d'Amour nous marchâmes : Là, sous un vieux saule, un vieux banc.

« Vivre comme les autres femmes! » Fit-elle, entre mes bras tombant.

Puis, d'un doigt chargé de rancune, Montrant au pantois jouvenceau Le Ciel, puis l'étang blanc de lune :

« Vivre! ou me jeter dans cette eau! » Et moi, dans ma pudique prose :

« Demain, Gudule, il fera clair;

Ce soir, il faut sur toute chose Ne pas vous morfondre en plein air.

Hélas! je n'ai qu'une chambrette...

— Oh! fit-elle, prêtez-la moi;

Abritez dans cette retraite La nonne infidèle à sa foi! » Et bientôt, avec cette vierge, Voulant, nolant — nolant plutôt — Me voilà devant mon auberge, Puis dans l'escalier, puis en haut.

« Ainsi cette chambre est la vôtre?

Eh bien! maintenant, laissez m'y : Vous en trouverez bien une autre, N'est-ce pas, Français mon ami?

« Moi, sauve, moi, libre et contente, C'est là que, Belle au Bois Dormant;

Je vais reposer, — dans l'attente, Qui sait? de mon Prince Charmant. » Je la vis s'étendre habillée,

Droite et pure comme un grand lis...

Sur quoi, la porte verrouillée, En poche la clef, je sortis.

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Je crois que dans la conjoncture Le moins dégourdi d'entre vous A l'enfant lasse d'être pure Aurait proposé le plus doux.

Eh bien! en ce soir de novembre, Au lieu de revenir bientôt, Sur elle, au discret de la chambre, Tenter l'effet d'un joli mot, Je passai la nuit tout entière A vaguer par ponts et remparts, Sur ce qu'il convenait de faire Demandant conseil aux canards : Près d'elle, en heures de licence, Envisageant bien mon bonheur, Mais sur toute concupiscence Mettant l'intérêt du Seigneur.

A l'aube, comme on prend sa purge, Rompu de scrupule j'allai Au curé de Sainte-Walburge Exposer le cas sans délai : Quand on fit toc-toc à sa porte, C'est au prêtre, au sbire en habit, Et non à ma personne accorte Que la pauvre Gudule ouvrit.

Judas qui me croyais sublime, Seule entre vicaire et sergent, Je vis, j'osai voir ma victime Rentrer dans son triste couvent.

Comment la Sœur Supérieure La put lors semondre et tancer, A Bruges, encore à cette heure, L'écrivant, je n'ose y penser.

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Mais à sa beauté je resonge Qui souventes fois m'a hanté;

Plus aigre Je regret me ronge Du sort que j'ai violenté.

Ah! si... Mais quelle est cette foule, En cet après-midi de mai,

Quel est pour voir la Sainte-Ampoule Ce peuple amassé sur le quai ? De la vénérable chapelle Ce nombreux clergé qui descend, N'est-ce pas ce que l'on appelle La Procession du Saint-Sang?

Oui, voici, contournant les Halles, Les prêtres, les moines aussi;

Voici toutes les moniales;

Les Sœurs-Noires, Ciel! les voici!

Elle est là, bien sûr. Laquelle est-ce?

La sèche avec son nez griffu, La grasse au bedon qui s'affaisse, L'hirsute avec son pois touffu?

Peut-être cette vieille louche Qui s'en vient, d'un pied courbatu, Une dartre au coin de la bouche, Au nez l'eczéma de vertu?

Nenni. — C'est la borgne peut-être Qui, d'un unique œil chassieux, Semble, dirait-on, reconnaître Le Berry de ses anciens yeux? Je m'avance, elle se recule...

Mais, fût-ce elle, qui donc, à quoi, Pourrait reconnaître Gudule?

Qui, trente ans passés, — fût-ce moi?

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Tels deviennent hors de leurs cadres Les Memling comme les Van Eyck : Corps rancis, corps perclus ou ladres, Dent jaune au revêche du bec.

Pour le Saint, la Vierge à la Pomme Retient tout son jeune souris.

Sœur Gudule, pour le vieil homme, N'a plus que ces chicots pourris.

Mais toi, Berry, ni sous le verre Où son charme peint s'est gardé, Ni sous la cornette sévère Qui voile son front dégradé, Femme ni tableau ne la cherche, La vierge de ton vingtième an...

Le nautonier te tend la perche : Monte dans sa barque, et va-t'en.

Un cygne éploré nous éclaire, Deux cygnes chagrins nous font flanc.

Quai du Marbrier, du Rosaire, Pignons de la Maison du Franc, Notre-Dame, Logis Grûthûse, — Enfin, figeant son humble mer Face au pavillon de l'Ecluse, Gudule, notre Minn'water!

Il pleut parmi la nuit qui tombe.

Chacun a rejoint son abri : Sur le Lac d'Amour qui se plombe Te revoilà seul, vieux Berry;

A ton cœur ne peuvent répondre Que les cloches dont les accords Dans l'averse viennent se fondre Sur l'eau triste et ses tristes bords.

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Minn'water, sont-ce tes sirènes, Gudule, ton spectre noyé, Qui rechantent leurs cantilènes Sous le lac, de vent balayé?

Il semble que du fond de l'onde Où se mirent les vieilles tours, D'autrefois la cloche réponde A la cloche des nouveaux jours.

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TENSON DU VIEUX BERRY ET DES CLOCHES DE BRUGES

I BERRY

Cuivres sourds, cloches clair-clamantes, Bronzes par la brume brouillés, Drelinant sur les eaux dormantes, Sur la mousse des toits mouillés;

Lourde cloche de Notre-Dame Qui pour moi, souvent pour moi seul, Note à note égouttais ta gamme (Feuilles à feuille, ainsi, le tilleul), Cloches de Memling et d'Ursule, Dites-moi donc Où refleurira ma Gudule?

LES CLOCHES Din-don, din-don.

II BERRY

Comme un chant de vierges orantes Vous qui m'induisiez en ferveur,

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Cloches doucement clangorantes De Sainte-Anne et de Saint-Sauveur, — De Saint-Jacques et de Saint-Gille Cloches d'or, et cloches d'argent Du Sépulcre et de Saint-Basile, — Toi, cloche de fer de Saint-Jean, — Cloches de Memling et d'Ursule, Dites-moi donc Où refleurira ma Gudule?

LES CLOCHES Din-don, din-don.

III BERRY Des Sœur-Noires cloches glacées Qui de ma Sœur-Noire autrefois Agitiez les folles pensées Entre les amours et la Croix, — Tièdes cloches du Béguinage, De tout ce qui reste aujourd'hui Des Madones de mon jeune âge Berçant la vieillesse et l'ennui, Cloches de Memling et d'Ursule, Dites-moi donc Où refleurira ma Gudule?

LES CLOCHES Din-don, din-don.

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ACHEVÉ D'IMPRIMER LE 21 JANVIER 1 9 5 4 SUR LES PRESSES DE LA TYPO- GRAPHIE FIRMIN-DIDOT AU MESNIL (EURE) POUR RENÉ JULLIARD ÉDITEUR

A PARIS

Imprimé en France

N° d'éditeur : 957 Dépôt légal : 1 trinestre 1954. — 576.

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Participant d’une démarche de transmission de fictions ou de savoirs rendus difficiles d’accès par le temps, cette édition numérique redonne vie à une œuvre existant jusqu’alors uniquement

sur un support imprimé, conformément à la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012 relative à l’exploitation des Livres Indisponibles du XXe siècle.

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