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Composition et origine d'un échantillon de sable récolté dans la grotte de la Diau, massif du Parmelan, Haute-Savoie, France

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Academic year: 2022

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Composition et origine d'un échantillon de sable récolté dans la grotte de la Diau, massif du Parmelan, Haute-Savoie, France

SESIANO, Jean, SCHMIDT, Susanne Theodora

Abstract

L'analyse d'un échantillon de sable de la grotte de la Diau nous montre, en plus des éléments organiques comme des dents, des taies, des spicules et des microfossiles, des minéraux comme de la calcite, des oxydes de fer, des phosphorites et de la glauconie. De plus, et c'est ce qui est intéressant, nous observons des minéraux comme des feldspaths, du rutile et du grenat. Ils pourraient provenir de la Formation de Garschella, dont un lambeau est encore présent sur le plateau du Parmelan. Les éléments qui la composent ont pour provenance la chaîne hercynienne de Bohême. Mais, des feldspaths ne pourraient pas supporter un si long transport. Force est d'en déduire qu'ils proviennent des Alpes, et la composition du grenat nous conforte dans cette idée d'une origine glaciaire. Mais les glaciers du Würm n'ont pas eu accès au Parmelan, il faut donc nous en remettre à la glaciation précédente du Riss, qui était bien plus importante, dont des éléments morainiques sont descendus dans le karst.

SESIANO, Jean, SCHMIDT, Susanne Theodora. Composition et origine d'un échantillon de sable récolté dans la grotte de la Diau, massif du Parmelan, Haute-Savoie, France. Karstologia Mémoires , 2018, vol. 20, p. 235-245

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:107170

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Composition et origine d’un échantillon de sable récolté dans la grotte de la Diau, massif du Parmelan, Haute-Savoie, France

Jean SESIANO 1 et Susanne Théodora SCHMIDT 1

Dans la rivière souterraine de la Diau. Photo S. Jaillet.

1 Sciences de la Terre, Université de Genève, 13 rue des Maraîchers, CH-1205 Genève jean.sesiano@unige.ch et susannne.schmidt@unige.ch RÉSUMÉ : Un échantillon de sable récolté

dans la grotte de la Diau, une cavité se déve- loppant sous le plateau calcaire du Parmelan, en Haute-Savoie, a été étudié en détail. Si la calcite est abondante, comme on peut le pré- voir dans cet environnement karstique, de même que des éléments organiques issus des roches carbonatées (dents, microfossiles de fo- raminifères, spicules), des éléments plus exo- tiques ont été mis en évidence. Ils proviennent de la destruction d’un lambeau de grès verts de la Formation de Garschella (Albien) coif- fant la dalle urgonienne qui forme l’ossature du plateau. Parmi ceux-ci, de la glauconie, des oxydes de fer et des éléments colorés, souvent lourds et durs ; ils sont probablement originaires des Alpes, apportés par des glaciers préwürmiens, car les glaciers alpins du Rhône et de l’Arve au Würm n’ont pas atteint cette altitude à cet endroit. Il faut donc exclure une origine lointaine comme le Morvan ou le mas- sif hercynien rhénan ou bohémien.

MOTSCLÉS : KARST, GROTTEDELA DIAU, - PÔTDESABLE, FORMATIONDE GARSCHELLA, PAR- MELAN, HAUTE-SAVOIE, FRANCE.

ABSTRACT: ABOUT THE COMPOSITION AND THE ORIGIN OF A SAND SAMPLE PICKED UP IN THE DIAU CAVE, PARMELAN MASSIF, HAUTE-SAVOIE, FRANCE. A sand sample was collected in the Diau cave, extending under the Parmelan lime- stone plateau, in the Haute-Savoie department (France). The sand was studied in detail. As can be expected, there is abundant calcite as well as fossils organisms originating from the host rock limestone such as teeth, foraminifera microfossils, spicules. Other elements derive from the weather- ing of a small remnant of the Garschella Forma- tion, such as green sandstone deposits, covering the Urgonian plateau. Glauconite and iron oxides are frequent, but we also find colored minerals, of- ten hard and heavy. Different technics were used in order to determine their origin. They probably originate from the Alps, but are pre-würmian as the alpine Quaternary Rhône and Arve glaciers did not reach Parmelan altitude during the Würm.

A remote origin, such as the Morvan region or the hercynian Rhenan or Bohemian massifs can be completely ruled out.

KEYWORDS : KARST, DIAUCAVE, SANDDEPOSIT, GARSCHELLA FORMATION, PARMELAN, HAUTE-SAVOIE, FRANCE.

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La grotte de la Diau est située dans le massif du Parmelan. Il appartient au massif des Bornes, train de plis d’amplitudes en principe décrois- santes en allant vers le NO, contrecoup de la surrection des Alpes ; il est rattaché aux chaînes subalpines septentrionales (domaine delphi- no-helvétique). Le Parmelan chevauche le flysch oligocène et la molasse chattienne [CHAROLLAIS et LIERMIER, 1967].

Le massif du Parmelan, culminant à 1 832 m, se présente sous la forme d’un magnifique pla- teau karstifié. Il est formé de roches carbonatées d’âge barrémien et aptien de faciès urgonien (sur la carte géologique figure 1 : n4-5). Il est coupé par la vallée (cluse) de la Filière. On y observe de bas en haut d’abord les « calcaires urgoniens infé- rieurs » auct. (épaisseur 180 m). Ils sont surmon- tés par des bancs calcaires plus ou moins argileux et quartzeux, les marnes à Orbitolines, épaisses de moins de 20 m et formant dans le haut de la paroi une vire caractéristique ; puis viennent les

« calcaires urgoniens supérieurs » auct., d’environ 45 m de puissance. Le sommet des calcaires ur- goniens porte une surface de discontinuité poly-

Introduction

Le but de ce travail est de non seulement dé- terminer les divers composants du sable trouvé dans la grotte de la Diau, se développant sous le plateau du Parmelan, en Haute-Savoie, mais aussi d’en déduire, d’après ceux-ci, que le glacier du Rhône ou de l’Arve n’a pas recouvert tout ou partie de ce plateau lors de l’extension du Würm.

On s’est en effet rendu compte depuis quelques décennies que le karst était un outil très précieux pour reconstruire le passé. C’est ainsi que les restes d’un terrain sus-jacent, totalement érodé au cours de centaines de milliers d’années par l’eau, la corrosion, le gel-dégel ou les glaciers, peuvent se retrouver piégés dans les sédiments déposés à l’intérieur d’une cavité.

Par exemple, loin à l’intérieur de la grotte de Balme, en rive droite de la vallée de l’Arve, on peut observer des galets de granite et de gneiss, ainsi que des minéraux lourds ou résistant à l’abrasion, tous provenant des roches cristallines du massif du Mont-Blanc. Ils ont été apportés dans la cavi- té par injection depuis l’extérieur (courants d’eau ou glacier) et, pour les plus ténus, par percolation des eaux depuis la surface.

Massif du Parmelan

0 5km

La Diau Le Bunant

Gy GyA g1 g2 n7-C1 n4-5 n3C V allée du Pertuis

Mont Téret Le Parmelan

La Fillière

Figure 1 : Extrait de la carte géologique au 1/50 000 Annecy-Bonneville. Signification des symboles : Gy = glaciaire local. GyA = glaciaire de la vallée de l’Arve. g1 = marnes à Foraminifères (Oligocène inf.). g2

= Flysch indifférencié (Oligocène inf. à moye n). n7-C1 = Gault (Albien-Cénomanien). n4-5

= calcaires urgoniens (Barrémien- Bédoulien). n3C = calcaires gréseux à miches (Hauterivien).

Part of the 1/50.000 geological map Annecy-Bonneville. Symbols meaning: Gy = local glacial deposits. GyA = Arve valley glacial deposits. g1 = marl with Foraminifera (lower Oligocene). g2

= undifferentiated Flysch (lower and middle Oligocene). n7-C1

= Garschella Formation (Albian- Cenomanian). n4-5 = Barremian- Bedoulian limestone (Urgonian facies). n3C = siliceous limestone (« miches » facies) (Hauterivian)

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phasée (hiatus stratigraphique de plusieurs mil- lions d’années) exprimée par une surface durcie portant des minéralisations d’oxydes de fer, de glauconie et d’un niveau fossilifère à nodules de phosphorite [DELAMETTE et al., 1997]. Elle repré- sente une lacune dans la sédimentation, c’est-à- dire une émersion.

La profonde coupe offerte par la rivière la Filière s’écoulant vers le NO pour rejoindre le Fier permet en plus d’observer les couches sous-jacentes à l’Ur- gonien. Ce sont des roches de l’Hauterivien, cal- caires gréso-argileux d’environ 500 m d’épaisseur (figure 1 : n3c). Ces marnes imperméables forment dans le massif des Bornes le niveau de base local pour tous les écoulements souterrains. Et c’est ain- si qu’en rive gauche de la Filière, on observe deux grosses émergences : le torrent de Bunant, exploré par la SSS Genève dès 1977, issu du Parmelan, sen- su stricto ; et, plus en amont, le torrent de la Diau, exploré en partie par les mêmes, mais plus ancien- nement [CHEVALIER, 1995]. Il émerge à l’aplomb du vallon du Pertuis (combe de Nerval), synclinal fai- sant suite au Parmelan en direction du SE, dominé par le mont Téret.

Donc, les sédiments sableux se déposant dans la grotte de la Diau ne peuvent a priori provenir que du vallon du Pertuis, à l’altitude de 1 360 m, par soutirage dans l’endokarst, le Parmelan étant drainé par le système de Bunant ; à moins d’une diffluence entre le réseau de la Diau et celui de Bunant, diffluence qui n’a pas encore été décou- verte. D’autre part, le synclinal voisin d’Ablon, au SE, présente des roches plus variées, mais des traçages ont montré que son drainage s’effectue en direction de l’émergence de Morette, dans la vallée du Fier, à la faveur de l’importante faille coulissante des Collets [MONDAIN, 1983].

La colonne stratigraphique affleurant dans la région Parmelan-Pertuis, s’achève par un lam-

beau de la formation de Garschella (Albien-Cé- nomanien), à la limite du Crétacé inférieur et su- périeur (110 à 90 Ma). Il est mentionné par une flèche verte sur la figure 1 sous n7-c1. Cet affleu- rement restreint (environ 0,3 km2) se trouve tout à l’amont du vallon du Pertuis. Y sont rattachés les fameux grès verts de l’Albien, d’une ving- taine de mètres d’épaisseur, formés de dépôts gréso-glauconieux argileux et de phosphorites avec, peut-être, au sommet, des restes de calcaire de Seewen ou calcaire sublithographique [DE- LAMETTE et al., 1997]. La glauconie, donnant une couleur verte à la roche, est un des minéraux de la famille des argiles. C’est un silicate hydraté de fer, de magnésium et de potassium, avec un peu d’aluminium ; elle se présente le plus souvent en grains mamelonnés submillimétriques. Cette for- mation de Garschella recouvrait auparavant tout le plateau du Parmelan, mais l’érosion en a enlevé la plus grande partie.

Nous nous sommes un peu étendus sur la litho-stratigraphie des roches du secteur afin d’anticiper les constituants d’un sable amené du haut par ruissellement, puis percolation des eaux à travers le karst.

En résumé, nous pouvons donc nous attendre à avoir de la silice (quartz), de la glauconie, divers oxydes de fer, de la calcite provenant des bancs calcaires, des coquilles d’organismes marins fossi- lisés et fragmentés par le transport, ou encore des fragments de concrétions du réseau souterrain.

Et en plus, des minéraux lourds (densité > 2,9) et très résistants mécaniquement au transport, comme la tourmaline, le grenat, le pyroxène, le spinelle, le zircon, le rutile, la staurotide et l’ilmé- nite, dont il faudra trouver l’origine, et, par oppo- sition, une faible présence de minéraux légers immatures comme les micas, les feldspaths, etc.

Grotte de la Diau

(zone d’entrée)

S B

Figure 2 : Plan d’une partie de la grotte de la Diau (dessin A.

Pahud). Les lieux de prélèvement sont indiqués : S pour le sable, et B pour la roche et le film bactérien.

Part of the Diau cave plan (drawing by A. Pahud). Places of sampling are indicated: S for the sand, and B for the rock wall and the bacterial film.

(5)

II. Méthode expérimentale et résultats

Le sable brut (figure 3) a été examiné par lots de 5 g au microscope binoculaire (grossissement 2 à 5 fois), en lumière normale. Le diamètre maxi- mum des rares gros grains est de 2 à 3 mm, alors que les plus petits mesurent quelques dizaines de microns. La médiane générale tourne autour de quelques dixièmes de millimètre. Après sépa- ration et concentration des divers composants, il a été possible d’en faire une analyse par fluores- cence X.

On observe d’abord de très nombreux grains clairs roulés, ovoïdes ou sphériques, certains sont translucides (émoussés luisants), mais la majori- té sont transparents comme des gouttes d’eau (figure 4). Ils sont parfois colorés en jaune clair ou en brun par des oxydes de fer et de manganèse (cf. quartz enfumé). 20 % de ces « gros » objets (0,1 à 0,5 mm de diamètre) sont des morceaux de calcite blanchâtres, voire jaunâtres, certains anguleux, d’autres arrondis ; le restant est formé de quartz. Ces éléments clairs, dont la nature a été confirmée par fluorescence X, représentent 65 à 70 % du sable. Les plonger dans une goutte d’acide chlorhydrique permet tout de suite de distinguer le quartz de la calcite, celle-ci se dissol- vant très vite avec effervescence.

On a encore, formant cette fois la fraction sombre du sable, de nombreux morceaux d’oxydes de fer (limonite) ou de phosphorite, très souvent arrondis ou allongés, plus ou moins luisants, bruns, brun-rouges, voire presque noirs (figure 5). Ce sont peut-être aussi des coprolithes de poissons ou des nodules phosphatés ; l’ana- lyse par fluorescence X a confirmé leur nature :

Fe₂O₃ 60,46 % ; SiO₂ 19,67 % ; CaO 5,59 % ; Al₂O₃ 5,17 % ; P₂O₅ 5,04 %, avec encore un peu de man- ganèse et de magnésium. Le phosphore détecté provient d’une dent, enlevée lors de la photo, la silice et le calcaire, d’un ou deux morceaux de mi- crogrès à ciment calcaire. Ces éléments sombres représentent environ 10 à 15 % du sable. De très rares grains de magnétite les accompagnent.

Moins fréquents, quelques pourcents, des grains mamelonnés de glauconie sont aussi présents. Ils ont une couleur verte, claire ou fon- cée et un diamètre inférieur au demi-millimètre (figure 5). Leur composition a été donnée plus haut. Il y a encore quelques pourcents d’éléments se présentant sous la forme de petites masses de particules agglomérées, plus ou moins sphé- riques. Soumis à l’acide chlorhydrique, ils se dé- sagrègent en grains de quelques dixièmes de millimètre cimentés par de la calcite. Il s’agit de morceaux de microgrès formés de minéraux et d’argile (figure 5) ; leur analyse donne 38 % d’oxydes de fer, 37 % de silice, 10 % de calcite, 6 % de phosphate et 5 % d’alumine, avec encore quelques métaux en quantités négligeables. On observe encore de rares fragments, semblables à de la porcelaine, plutôt anguleux et plats, à surface brillante et claire. Il existe de plus des grains anguleux ou arrondis, transparents ou translucides, de quelques dixièmes de millimètre, voire moins, de couleurs roses, jaunes, rouges ou vertes. Ils viennent certainement d’un contexte cristallin. Leur détermination est présentée plus bas (figure 6).

gères et al. [1970], ainsi que ceux, plus généraux de Delamette et al. [1997]. Proches du Parmelan, les travaux de Martini [1964] sur la grotte du Sa- blon, au Salève, ont été repris partiellement par Pittard [1974 et 1979], et aussi par Maire [1990], mais avec une interprétation différente. Ce der- nier auteur a aussi traité des sédiments dans la grotte de Hautecourt, Ain. Il est intéressant de relever que les idées avancées par Martini sur la présence de sable dans la grotte du Sablon, ayant mené à son comblement, se rapprochent beau- coup de notre exemple : le sable provient des ter- rains sus-jacents (« sidérolithique » et Hauterivien) et probablement aussi de la molasse chattienne, maintenant érodée. Sans omettre une faible contribution possible par des moraines dépo- sées sur le sommet du Salève. Maire [1990] en re- vanche y voit plutôt des dépôts glaciaires en eau calme, dans une nappe baignant le pied du Salève à la fin de la dernière glaciation, ce qui ne semble guère possible vu la nature ni polygénique, ni im- mature du sable de la grotte.

I. Prélèvement de l’échantillon

En 2015, lors d’une sortie à la grotte de la Diau, dont le plan partiel est donné à la figure 2 (échan- tillon S), environ 50 g de sable ont été prélevés dans la salle des Piliers, peu avant de retrouver le cours d’eau souterrain, en venant de l’entrée. Il a fallu trouver un endroit abrité, car de violentes crues peuvent balayer cette partie semi-fossile de la grotte. Une fissure libérant du sable a été l’en- droit favorable, indiqué sur la figure 2. L’avantage d’un échantillon récolté dans une grotte perchée comme la Diau, c’est qu’il est représentatif des terrains et des roches situés à l’aplomb de la cavi- té, alors que celui issu d’un cours d’eau extérieur reflète potentiellement la nature de tous les ter- rains du bassin-versant.

Concernant les terrains de la formation de Gar- schella dont nous avons parlé plus haut, de nom- breux travaux ont été effectués sur les grès du Crétacé moyen. Dans la région qui nous concerne, il suffit de mentionner les travaux de Busnardo et al. [1966] dans des carrières du Jura méridional, et, un peu plus au sud, dans le Vercors, ceux de Fau-

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Parfois aussi, des grains peu fréquents et quelque peu « exotiques » dans cette suite de composants. D’abord des pseudomorphoses de pyrite limonitisée, transformées en goethite : cubes, octaèdres ou dodécaèdres pentagonaux, voire des macles. Ou encore, de minirhom- boèdres de calcite dont les arêtes n’ont pas été affectées par leur (court) transport, puisqu’ils proviennent des concrétions de la cavité ou de veines non-karstiques (figure 7).

Et pour finir, des formes organiques ont été observées dans le sable (figure 8). Il s’agit d’une dent de requin, longue de 3 mm, provenant de la formation de Garschella, d’une dent palatine de Gyrodon, poisson holostéen de la famille des Py- cnodontidés, grands amateurs de corail ; elle est d’âge barrémien (com. orale J. Martini). Et encore, d’un fragment de dent de requin. On a aussi ob- servé une Orbitoline, malheureusement perdue plus tard dans la masse du sable, un foraminifère de la partie supérieure de l’Urgonien (vire à Orbi- tolines), ainsi qu’un microfossile de foraminifère (miliole). Et quelques minuscules ammonites et des fragments de tests d’échinodermes.

Pour être complet, et pour affiner la connais- sance de ce remplissage de la grotte de la Diau, il faut encore mentionner qu’un prélèvement de très minces dépôts de calcaire sur une paroi avait été fait en juillet 1986, sur la rive du lac qui se trouve après la Soufflerie et la Savonnette (échan- tillon B, figure 2), et qui est siphonnant. L’analyse chimique qui avait été effectuée en automne de la même année et celle refaite par fluorescence X en 2016, sont très similaires, bien qu’avec des techniques très différentes. Au même endroit, un film noir d’une matière semblant organique avait été raclé sur la paroi. C’est en effet un biofilm de bactéries et d’algues. Trente ans après, il n’a pas été possible de les ramener à la vie. Lors de la calcination, la perte au feu (gaz carbonique, eau, etc.) a été de 41,49 %, ce qui indique que ce n’est qu’en partie de la matière végétale. L’analyse de la matière minérale que ces bactéries ont fixée ainsi que celle de la roche est donnée tableau 1 :

Analyse du calcaire (%) Film bactérien (%)

CO₂ 43,49 CO₂ 41,49

CaO 45,00 SiO₂ 29,87

MgO 7,90 CaO 12,10

SiO₂ 2,55 Al₂O₃ 8,60

Al₂O₃ 0,64 Fe₂O₃ 4,08

Fe₂O₃ 0,23 K₂O 1,13

K₂O 0,10 MgO 0,98

TiO2 0,03 TiO₂ 0,60

P2O5 0,02 P₂O₅ 0,41

S 0,02 S 0,23

MnO 0,01 MnO 0,18

Sr 0,01 Na₂O 0,16

W 0,01 Zr 0,06

Pour le film bactérien, on trouve encore, mais avec des quantités égales ou inférieures à 0,02 %, du tungstène (W), du chlore (Cl), du baryum (Ba), du zinc (Zn), du chrome (Cr), du strontium (Sr), du rubidium (Rb), du cobalt (Co), du nickel (Ni), et enfin, en quantités négligeables, du cuivre (Cu), de l’yttrium (Y), du niobium (Nb) et du plomb (Pb). Il est intéressant de noter que ces bactéries ont fixé de la silice et du fer, ainsi que des oxydes de métaux, du soufre et du phosphore dans un rapport 10 à 20 fois supérieur à celui de la roche sur laquelle elles se sont développées. Relevons qu’il n’y a aucune habitation pérenne sur cette partie orientale du plateau du Parmelan, repré- sentée par le vallon du Pertuis et le mont Téret (figure 1). À part les éléments majeurs de cette analyse que l’on est en droit d’attendre dans cet environnement, à savoir, pour la roche, le calcaire (CaCO₃), la magnésie (MgO) et la silice (SiO₂), et pour le film bactérien, la silice, la chaux (CaO), l’alumine (Al₂O₃) et l’oxyde de fer (Fe₂O₃), les élé- ments mineurs, peu présents ou absents dans la roche, doivent provenir du sol, de la végétation et de l’atmosphère, puis ont été concentrés par les bactéries. Cependant, la partie minérale pourrait aussi provenir de fines particules piégées par un matelas de bactéries filamenteuses.

Figure 3 : Sable brut prélevé dans la grotte.

A raw sand sample from the Diau cave.

Figure 4 : Les constituants clairs du sable, soit le quartz et la calcite.

The light coloured sand components, i.e. quartz and calcite.

Tableau 1 : Analyse du calcaire et du film bactérien de l’échantillon B.

Limestone and bacterial film analysis of sample B.

(7)

c a b

50 +m

Figure 5 : Les constituants sombres du sable, soit a, les microgrès ; b, la glauconite, simple ou mamelonnée ; c, des grains d’oxyde de fer ou de phosphorite ; d, des pseudomorphoses, en cubes ou en macle, de goethite.

The dark coloured sand components, i.e. a, micro-sandstone ; b, glauconite, single or multiple mamilliform ; c, iron oxides and phosphorite grains ; d, goethite pseudomorphosis, as cubes or macles.

Figure 6 : Les minéraux colorés du sable (en g, probablement un grenat).

Colorful minerals from the sand (in g, a garnet, most probably).

Figure 7 : Divers constituants du sable avec a : pseudomorphoses en cubes ou en macle de pyrite limonitisée en goethite ; b : glauconite, simple ou mamelonnée ; c : rhomboèdre de calcite ; d : éléments organiques : petite ammonite et dent, spicule et dent ; e : bois silicifié ; f : miliole.

Some sand components with a: pyrite pseudomorphosis as cubes or macle, limonitized in goethite ; b: glauconite, single or multiple mamilliform ; c: calcite rhomb ; d: organic elements: a small ammonite and a tooth, a spicule and a tooth ; e: silicified wood ; f:

Foraminifera microfossil (miliole).

Figure 8 : Divers constituants du sable avec a : des dents (orangée, de Gyrodon ; brune, de requin, et blanche, espèce non identifiée) ; b : rhomboèdres de calcite ; c : spicule et dent brune (?) ; d : grains de glauconite ; e : fragment de calcaire avec taies de Foraminifères ; f : fragment de carapace d’un échinoderme (?)

Various sand components with a: teeth (orange color, from a Gyrodon ; brown, from a shark, and white, from an unidentified species) ; b: calcite rhombs ; c: spicule and brown tooth (?) ; d: glauconite grains ; e: a piece of limestone with Foraminifera shells ; f: a piece from an Echinoderm shell (?)

Figure 9 : Rutile en lumière polarisée (a) et au microscope à balayage (b). Le spectre EDS montre le pic pour Ti (c).

Rutile in plane-polarized light (a) and under the electron microscope in backscattered mode (b). The EDS spectrum shows the peak for Ti (c).

(8)

b a

100 mm

b a

b

c

b a

b

Composition du grenat

SiO2 Al2O3 FeO CaO MgO MnO

Alm62Grs30.1Pyr4.7Spe3.2

37.3 wt%

22.7 wt%

27.7 wt%

10.4 wt%

1.2 wt%

1.4 wt%

b a

100 mm

b a

Figure 10 : Calcite en lumière polarisée analysée (a), au microscope à balayage (b) et le spectre EDS avec le pic pour Ca (c). Le clivage rhomboédrique est bien visible.

Calcite in cross-polarized light (a), under the electron microscope in backscattered mode (b) and the EDS spectrum with the peak for Ca (c). The rhombohedral cleavage of calcite is clearly visible.

Figure 11 : Grenat rose en lumière polarisée (a). Il s’agit d’un almandin avec des composants en CaO et des MgO et MnO plus bas.

Rose garnet in cross-polarized light (a). The composition determined by microprobe analysis indicates an almandine with CaO and MgO. The MnO is low.

Figure 12 : Perthite en lumière polarisée analysée avec des taches plus claires de composition albitique dans un feldspath alcalin (a) et au microscope à balayage (b).

Perthite in cross-polarized light with light gray patches of albite composition in K-feldspath (a) and under the electron microscope in backscattered mode (b).

III. Détermination des minéraux colorés

Les minéraux colorés, une septantaine de grains, ont été sortis grain par grain du sable brut.

Leurs dimensions varient d’un dixième de mm (soit 100 microns) à quelques dixièmes. Il était in- téressant de connaître leur nature, car elle nous renseigne sur l’origine d’une partie du sable. La question qui se pose est donc la suivante : ces minéraux proviennent-ils de l’érosion de la for- mation de Garschella présente sur le plateau du Parmelan, ou bien sont-ils d’origine alpine, ame- nés par les glaciers quaternaires ?

Plusieurs méthodes ont été mises en œuvre.

Tout d’abord, l’utilisation du microscope polari- sant a permis de déterminer les minéraux les plus fréquents, mais aussi les plus triviaux de cette série. Il s’agit du quartz, de la calcédoine, de la calcite et du feldspath. La détermination est aussi assez sûre concernant du rutile et du grenat.

Une méthode plus sophistiquée est basée sur l’effet Raman. Les grains de sable sont collés sur une plaquette de verre, puis irradiés par un faisceau laser avec des photons dans le vert/le proche infrarouge et avec une longueur d’onde et une énergie bien définies. La plupart des pho- tons sont rétrodiffusés dans la même longueur d’onde que celle du laser. On appelle ce phéno- mène la diffusion Rayleigh (Rayleigh scattering).

Mais un photon sur 10 millions environ rétrodif- fuse dans une autre longueur d’onde, normale- ment une longueur d’onde plus grande que celle du faisceau incident, donc avec moins d’éner- gie. Cette différence d’énergie entre les photons entrants et les photons sortants est attribuée à l’énergie nécessaire pour faire vibrer une molé- cule dans notre échantillon : c’est la diffusion Ra- man (Raman scattering). En déterminant les lon- gueurs d’onde rétrodiffusées, on peut identifier un minéral inconnu, car les pics du spectre sont caractéristiques des minéraux rencontrés ou des molécules présentes dans ceux-ci. C’est ainsi que le quartz, la calcite et le rutile (TiO₂) ont été iden- tifiés avec certitude.

À la fin de ces études, nous avons décidé d’utiliser le microscope polarisant, le microscope à balayage et la microsonde pour déterminer la composition des grains sélectionnés permet- tant d’identifier les minéraux avec certitude.

Les grains, collés sur une lame de verre, ont été amincis jusqu’à une épaisseur de 30 μm, comme pour une lame mince classique. La figure 9a montre le rutile au microscope polarisant avec sa couleur rouge-brun caractéristique et, à la figure 9b, l’image du rutile au microscope à ba- layage apparaît très homogène. Le spectre EDS

(9)

a

b

c

d

e

d e

atteste du pic pour le Ti. La figure 10a montre une calcite en lumière polarisée analysée avec une biréfringence élevée, caractéristique pour la calcite. La figure 10b est l’image au microscope à balayage. Le spectre EDS en figure 10c donne Ca et aucun autre élément qui pourrait être présent comme le Mn ou le Fe. La figure 11 est l’image d’un grenat au microscope polarisant. Il a une couleur rouge et la composition d’un almandin (Alm₆₂Gr₃₀.₁Py₄.₇Spe₃.₂) avec une bonne valeur en CaO et des valeurs basses en MgO et MnO. Sur la figure 12a, on observe une perthite en lumière polarisée analysée avec des taches plus claires de composition albitique dans un feldspath alcalin.

Cette texture est aussi évidente au microscope à balayage (figure 12b). Sur la figure 13, une per- thite avec l’intercroissance d’une albite avec un feldspath alcalin, bien visible en lumière pola- risée (figure 13a), en lumière polarisée analysée (figure 13b) et au microscope à balayage (figure 13c). Le spectre EDS (Energy dispersive spectrosco- py, figure 13d) donne la composition des taches sombres ou albitiques (Na, Si et Al) et le spectre EDS (e) la composition d’un feldspath alcalin (K, Si et Al). La figure 14 présente un claste d’une roche sédimentaire, au microscope à balayage (figure 14a), contenant de petits grains de quartz et des endroits vert-jaune avec de la glauconie bien visible en lumière polarisée analysée (figure 14b). Le spectre EDS (figure 14c) donne la com- position de la glauconie (Si, Al, Mg, K et Fe). Sur la figure 15, un grain rond de quartz en lumière polarisée montre des fractures avec des zones d’oxydation (figure 15a), et au microscope à ba- layage (15b). Le spectre EDS confirme la présence de Si comme élément dominant (15c).

IV. Remarques et conclusions

L’examen détaillé d’un échantillon de sable prélevé dans la grotte de la Diau montre des composants venant de l’encaissant, la calcite en l’occurrence, et des roches sus-jacentes. Concer- nant ces dernières, les grès verts de la formation de Garschella sont les plus caractéristiques : en plus de la glauconie, abondante et donnant sa couleur à cet étage, on observe des minéraux qui dénotent une origine plus lointaine dans le temps et dans l’espace.

De nombreux auteurs se sont penchés sur les dépôts de la formation de Garschella. Le pre- mier exemple donné sera celui le plus proche de notre site : il s’agit de la trouvaille de Delamette et al. [1997]. Il a récolté au col de Cenise, à 15 km au NE du Parmelan, un galet décimétrique de micaschiste situé dans la partie supérieure des grès verts helvétiques. Il pense que c’est un élé- ment relâché par un bois flottant (dropstone). Le second exemple est un peu plus éloigné, 140 km en direction du SSO, puisqu’il s’agit d’échantillons

c b

100 +m

a

c b a

Figure 13 : Perthite en lumière polarisée (a), en lumière polarisée analysée (b) et au microscope à balayage (c). Le spectre EDS (d) donne la composition des taches sombres ou albitiques (Na, Si et Al) et le spectre EDS (e) la composition d’un feldspath alcalin (K, Si et Al).

Perthite in plane-polarized light (a), in cross-polarized light (b) and under the electron microscope in backscattered mode (c). The EDS spectrum shows the composition of the dark gray patches to be albite (Na, Si et Al) and the EDS spectrum of the lighter parts displays a composition of a K-feldspath (K, Si et Al).

Figure 14 : claste d’une roche sédimentaire au microscope à balayage (a), contenant de petits grains de quartz et des endroits avec de la glauconie bien visible, en lumière polarisée analysée, avec des zones vert-jaune (b). Le spectre EDS (c) donne la composition de la glauconie (Si, Al, Mg, K et Fe).

Clast of a sedimentary rock under the electron microscope in backscattered mode (a). It contains small grains of quartz and green-yellow zones with glauconite well visible in cross-polarized light (b). The EDS spectrum (c) displays the composition of glauconite (Si, Al, Mg, K et Fe).

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de grès de cette même formation dans le Vercors, examinés par Faugères et al. [1970]. Les auteurs en déduisent qu’il s’agit de sédiments marins lit- toraux déposés en milieu agité comme l’indique un fort litage (milieu deltaïque). Son orientation dénote la présence d’un courant marin se diri- geant de l’ONO vers l’ESE : l’origine des sédiments ne fait alors guère de doute, il provient du Massif central. Un troisième auteur, Föllmi [1989] a fait des observations plus à l’est, dans l’Helvétique de la Plaine Morte (Alpes valaisannes calcaires, en rive droite du Rhône), à 110 km à l’ENE du Parmelan : il a trouvé dans les dépôts de l’Albien (formation de Garschella) un galet décimétrique de micaschiste.

Cet auteur mentionne aussi d’autres trouvailles dans l’ouest de l’Autriche (gneiss, quartzite et mi- caschiste). Enfin, un dernier exemple est donné par Engelbrecht et al. [2010], associé du reste à l’auteur précédent. Ils ont trouvé, toujours au sein de cette formation, un nodule d’ambre dont l’ana- lyse chimique a été poussée assez loin. Mais, ce qui nous intéresse dans leur travail, comme dans celui de Fölmi [1989] ou de Delamette et al. [1997], et fi- nalement dans le nôtre, c’est l’origine de ces objets exotiques. Wyssling [1986] aussi bien que Pucéat et al. [2005] attribuent les unités sédimentaires de l’Helvétique à la plateforme située sur la rive septentrionale de la Téthys. En effet, la reconstitu- tion des courants marins circulant dans cet océan il y a 105 Ma, au début de l’Albien [BLAKEY, 2008], montre un courant global circum-téthysien trans- portant les sédiments d’est en ouest. Donc, dans le cas de Delamette et al., de Fölmi, d’Engelbrecht et, éventuellement, des éléments colorés de notre échantillon de sable, la provenance des matériaux doit être recherchée du côté de l’est.

Dans notre cas, pour tous ces minéraux à l’ex- ception des feldspaths, ils pourraient provenir de la couverture gréseuse triasique de la chaîne her- cynienne, d’âge paléozoïque (Dévonien-Permien, 400 à 250 Ma), alors en plein démantèlement.

Seuls le quartz et les minéraux lourds résistants comme le rutile ou le grenat auraient pu suppor- ter un transport depuis le Harz ou la Bohême, bien que l’altération chimique en milieu pédolo- gique soit prédominante dans l’altération de sur- face des minéraux, la longueur du transport étant moins importante ; leur nature très usée dénote d’abord un apport fluviatile, puis un transport marin. Pour les galets, le transport aurait pu se faire à bord d’un bois flotté, emporté par le cou- rant, avant relâchement lors du pourrissement du bois. Cependant, un argument en défaveur de l’origine lointaine de nos minéraux est basé sur la composition quantitative du grenat, obtenu à la microsonde. La proportion de manganèse est de moins de 2 %, valeur compatible avec celle des grenats alpins.

Nous pouvons écarter cette origine lointaine pour les minéraux de notre échantillon de sable, polygénique et mature, au profit d’une origine alpine, plus simple et plus vraisemblable, c’est- à-dire un apport par le glacier de l’Arve. Cepen-

dant, si ce glacier atteignait au Würm, il y a 50 000 ans, encore plus de 1 300 m d’altitude autour de Bonneville, il s’élevait certainement encore à une altitude supérieure à 1 100 m dans la région qui nous occupe, d’après la carte géologique Anne- cy-Bonneville au 1/50 000. Des travaux plus ré- cents par Coutterand [2013 ; 2010] le montrent à 1 200 m, voire un peu plus haut.

D’autre part, la diffluence du glacier de l’Arve par Megève et la vallée de l’Arly, lui a permis de franchir également le col des Aravis pour s’écou- ler vers Thônes et, accessoirement, vers les Bornes (COUTTERAND, loc. cit. ; DORTHE-MONACHON, 1986).

Les appareils locaux issus de toutes les combes de la chaîne des Aravis devaient cependant contra- rier son avance et son volume. Une diffluence par le col de Romme (altitude 1 300 m), puis le col de la Colombière, à plus de 1 600 m d’altitude, n’est guère envisageable, les langues issues de la Pointe Percée et du versant oriental des Vergys, appellation locale de la chaîne allant du Bargy au Jalouvre, s’y opposant. Et puis, le glacier de l’Arve, après une augmentation de son épaisseur et de sa vitesse dues à la constriction de Cluses, voyait son épaisseur diminuer dans la large vallée suc- cédant au verrou, ce qui ne devait pas l’aider à transfluer par ce col.

Pour en revenir à la diffluence par le col des Aravis, elle a apporté du matériel alpin, en très faible quantité, que l’on retrouve dans la vallée du Borne [DORTHE-MONACHON, 1986 ; COUTTE- RAND, 2010] et même quelques rares galets sur le plateau des Glières (G. NICOUD, com. pers.).

Cependant, la calotte glaciaire qui recouvrait le massif du Parmelan et du Pertuis a empêché tout écoulement d’une langue du glacier de l’Arve par la vallée de la Filière.

Nous devons donc nous tourner vers les gla- ciations anté-würmiennes, telle celle qui a dépo- sé du matériel à plus de 1 600 m d’altitude sur

!

a

b c

Figure 15 : grain rond de quartz en lumière polarisée avec des fractures et des zones d’oxydation (a), au microscope à balayage (b) et le spectre EDS avec le pic pour Si (c).

Rounded grain of quartz in plane- polarized light with fractures and zones of oxidation (a), under the electron microscope in backscattered mode (b). The EDS spectrum shows the peak for Si (c).

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la Pointe d’Andey et à plus de 1 500 m au Môle, deux sommets dominant Bonneville [SESIANO, 2015], ou encore à 1 300 m, au sommet du Salève.

Cela permettrait d’expliquer la présence de ces minéraux dans notre échantillon de sable, y com- pris pour les feldspaths comme la perthite qui, du fait de leur faible dureté et de leur clivage, ne supporteraient pas un long déplacement depuis la Bohême. À noter que pour notre perthite, des déformations dues au dynamométamorphisme sont clairement visibles : elle proviendrait donc de la destruction d’un gneiss du massif Mont- Blanc – Aiguilles Rouges.

Comme il n’existe pas de formations proches pouvant être la source des minéraux identifiés, il faut invoquer le lessivage d’un dépôt anté-wü- rmien local (Riss ou antérieur), dont le transit à travers le karst aurait pris plus de 100 000 ans ; cet épisode glaciaire aurait eu une extension géogra- phique et altitudinale bien plus importante que celle du Würm. C’est cette hypothèse qui a notre préférence quant à l’origine des éléments colorés de notre sable.

En ce qui concerne les oxydes de fer, ils pro- viennent d’une part de la décomposition de la pyrite contenue dans les marnes, ce qui a donné de la goethite (pseudomorphose en cubes), et d’autre part des grains de limonite provenant de la cuirasse d’oxydes de fer au sommet de l’Urgo-

nien et du « sidérolithique » coiffant le Crétacé.

Quant aux éléments paléontologiques, comme des dents, des foraminifères, etc., ils reflètent la diversité des terrains sus-jacents ainsi que celle de la roche dans laquelle s’est développée la ca- vité (figure 16).

Cette étude, basée sur un seul échantillon de sable, montre néanmoins un potentiel encore inexploité pour mieux comprendre le transport des sédiments avant, pendant et après les diffé- rents âges qui ont formé et qui formeront le pay- sage actuel.

Remerciements

Nous remercions Stéphanie Girardclos, maître d’enseignement et de recherche, pour sa maîtrise de l’ordinateur, Roland Wernli pour ses informa- tions, Annette Süssenberger, doctorante, tous trois du Département des Sciences de la Terre de l’Uni- versité de Genève ; Fabio Capponi et Jean-Marie Boccard, du même institut, pour leur travail, ainsi que Michel Delamette, Jacques Martini, Gérard Ni- coud et Jean Charollais, géologues, avec lesquels nous avons eu des discussions constructives. Et enfin le Département des Sciences de la Terre pour la mise à disposition de ses infrastructures et de ses services.

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Figure 16 : La rivière souterraine de la Diau compte parmi les plus belles rivières souterraines des Alpes du Nord. Son profil en long (ici cascadant) autorise le transport de sédiments détritiques. Photo S. Jaillet.

The underground river « Diau » is one of the most beautiful underground rivers in the Northern Alps. Its profile (here cascading) allows the transport of detrital sediments.

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Références

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