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I.F.S.I. DIJON
Approche psychosomatique
Cours de Valérie Touvenot-Lambert, psychologue clinicienne Mercredi 07 novembre 2018
1- Quelques définitions (Dictionnaire Le Robert) Psychosomatique: 1904; de psycho- et somatique
adj. Relatif aux troubles organiques ou fonctionnels occasionnés, favorisés ou aggravés par des facteurs psychiques (émotionnels et affectifs). Facteurs psychosomatiques déterminants de l'asthme, de l'eczéma. — Affections, manifestations psychosomatiques.
Psychogène : 1908; de psycho- et –gène
1 Qui agit comme cause purement psychique. « Certaines de ces stérilités “énigmatiques”
doivent avoir une origine psychogène » (J. Testart). — Qui est un facteur psychique pathogène.
2 Dont la cause est purement psychique. Aphonie psychogène.
Somatiser : 1967; de soma(tique)
Rendre somatique (1o) (un trouble psychique), en parlant de la personne affectée de ce trouble. Il somatise son angoisse. « elle somatise par sa cécité un malheur, une humiliation.
Somatisée, l'humiliation disparaît, mais elle ne disparaît qu'en se métamorphosant en une infirmité, la cécité justement » (Tournier).
Médecine psychosomatique, ou n. f. la psychosomatique, qui étudie et soigne les affections psychosomatiques.
2- Le corps et la psyché : dualisme ou monisme ?
Tout le monde reconnaît que le « moral », c’est-à-dire l’affectivité joue un rôle important dans l’évolution d’une maladie. Quand le malade garde un « bon moral », il a les meilleures chances de guérir. Par contre, il est beaucoup moins souvent admis que l’affectivité puisse jouer un rôle primaire dans le déclenchement même d’une maladie.
Dualisme : dans la tradition de Descartes : corps et psyché sont considérés comme étant deux entités distinctes, avec un fonctionnement indépendant. C’est la conception sous-jacente à la médecine occidentale classique : seul le corps est pris en considération dans les soins.
Document V. TOUVENOT IFSI DIJON 2018-2019 Page 2/4 Monisme : cela correspond plus aux traditions philosophiques orientales ou à la conception du philosophe Spinoza. La médecine traditionnelle chinoise, par exemple, reflète tout à fait cette conception : la personne est appréhendée dans sa globalité.
Actuellement, en Occident, on est de plus en plus contraint à abandonner le dualisme, même si cela ne se répercute pas encore vraiment au niveau médical. Les travaux en immunologie mettent en évidence les liens très étroits entre le système nerveux et le système immunitaire.
Le système limbique (cerveau ancien, affectif) joue notamment un rôle très important de liaison corps-psyché.
On voit aussi combien l’angoisse s’exprime somatiquement.
3- La tradition médicale occidentale : la conception organiciste de la maladie
La conception ontologique de la maladie considère que celle-ci a une existence autonome.
Elle existe indépendamment de l’organisme qui la supporte et elle vient l’attaquer de l’extérieur.
Ce courant est issu de Galien, médecin de l’Antiquité grecque.
L’origine d’une maladie est authentifiée dans une lésion anatomo-clinique.
En Occident, la découverte des microbes par Pasteur devait contribuer à renforcer cette vue en lui donnant son cachet scientifique. La thérapeutique consiste donc à rejeter hors de l’organisme le microbe, le parasite, représentant du mal, tout comme on repousse hors des frontières un envahisseur.
Conception organiciste : c’est une conception mécaniste du corps, l’organisme étant considéré comme une “machine”, en axant toute l’attention sur le fonctionnement du corps (soma), en l’isolant de la psyché.
4- L’approche psychosomatique de la maladie
La médecine psychosomatique contemporaine est issue d’un triple courant de pensée et de recherche parallèle : physiologique, neuro et psychophysiologique et psychopathologique. Les recherches neuropsychologiques focalisent leur attention sur le cerveau neurovégétatif (thalamus, hypothalamus, formation réticulée, région limbique), mettant en évidence les connexions entre le psychique et l’organique par l’intermédiaire du système nerveux,
Document V. TOUVENOT IFSI DIJON 2018-2019 Page 3/4 objectivant le rôle des émotions sur les sécrétions glandulaires, les métabolismes, l’équilibre végétatif viscéral, la régulation des systèmes immunologiques.
Dans sa conception la plus large, la médecine psychosomatique entend intégrer la psychologie dans l’appréhension de la pathologie organique. La psychologie – nécessairement présente dans les conditions qui président à l’équilibre de l’être vivant, dont en effet il n’est pas possible d’exclure les comportements, c’est-à-dire les rapports de l’individu avec son milieu – va se trouver impliquée dans l’étiologie de la morbidité comme dans son évolution et sa thérapeutique.
Ce deuxième grand courant considère la maladie comme une réaction de l’organisme et de l’individu dans leur totalité, à une perturbation de leur équilibre. C’est Hippocrate et son école, dans l’Antiquité grecque qui ont illustré le mieux cette conception. Pour eux, la nature est équilibre et harmonie. Cet équilibre résulte d’un jeu dynamique de fluides à l’intérieur de l’organisme. La maladie reflète la rupture de cet équilibre et traduit déjà un effort de guérison de l’organisme à la recherche d’un nouvel équilibre. La maladie ne peut pas être localisée, elle concerne l’homme en son entier. Ici, les facteurs externes ne sont que des occasions pour le déséquilibre interne de se manifester, elles ne sauraient être les causes.
L’approche psychosomatique que je vais vous présenter (École de Paris, fondée par Pierre MARTY) est issue de la psychanalyse, et continue à l’intégrer à la fois sur le plan théorique et clinique.
P. Marty parle d' « unité fondamentale de l'être humain ».
Attention, dans cette conception, il est abusif de parler de « maladies psychosomatiques », (ex. eczéma, psoriasis, asthme), c’est l’humain qui est psychosomatique et donc potentiellement toute maladie.
Dans cette approche, on considère que « la mort est parallèle à la vie, quelle que soit l'organisation de cette dernière. Elle la sous-tend. (...) Le monde vivant n'est pas seulement l'objet d'organisation, de hiérarchisation, (...) de croissance, d'évolution. Il est l'objet de destructions presque aussi permanentes et régulières que les constructions, qui aboutissent à l'anéantissement des espèces, des individus, des fonctions. (...) La désorganisation peut se faire jour sur n'importe quel palier d'organisation, en tout point et en tout temps de l'évolution. » (Pierre Marty)
Document V. TOUVENOT IFSI DIJON 2018-2019 Page 4/4 Le dynamisme de ce processus évolutif est celui des mouvements de vie, mais il ne se déroule pas sans péripéties, qui déterminent plus spécialement le caractère individuel. Ces péripéties, dues à des circonstances appelées traumatismes, contrarient la progression évolutive.
Selon la vulnérabilité individuelle de la personne, elle va pouvoir soit se réorganiser ou au contraire se désorganiser en décompensation somatique.
Chaque observation est singulière est unique, le symptôme somatique doit toujours être réinséré dans le déroulement de la vie du malade.
Quelques éléments bibliographiques :
- DAMASIO (A.), L’Erreur de Descartes. La raison des émotions, Éd. Odile Jacob, 1995.
- DEBRAY (R.), Pierre Marty, P.U.F., 1998.
- JEAMMET (Ph.), REYNAUD (M.), CONSOLI (S.), Psychologie Médicale, Masson, 1992.
- KREISLER (L.), La Psychosomatique de l’enfant, P.U.F., Que sais-je ?, 1996.
- MARTY (P.), La Psychosomatique de l’adulte, P.U.F., Que sais-je ?, 1990.
